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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 19 décembre 2023, n° 21/07881

RENNES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Redcore (Sté)

Défendeur :

Castel d'Agard (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Contamine

Conseillers :

Mme Clément, Mme Jeorger-Le Gac

Avocats :

Me Noinski, Me Bonte, Me Renaudin, Me Abrial

CA Rennes n° 21/07881

18 décembre 2023

FAITS

La société CASTEL D'AGARD, fabricant d'armes à feu et de munitions depuis 1990 est dirigée par M. [I] [X] et emploie le fils de ce dernier, M. [S] [X]. Elle ne commercialise pas ses fabrications.

Dans le cadre du marché destiné à équiper les polices municipales la société CASTEL D'AGARD signale avoir collaboré depuis 2013 avec la société SUNROCK pour produire un prototype de LBD (lanceur de balles de défense) équipé d'un canon rayé de calibre 44 millimètres ainsi que sa munition.

Elle indique avoir recherché une société distributrice pouvant assurer la mise sur le marché et la commercialisation de ce LBD . C'est dans ces circonstances qu'elle signale s'être rapprochée de la société REDCORE créée en juillet 2014 par Messieurs [E] [J] et [T] [A], qui commercialise des produits innovants dans le domaine de la sécurité intérieure.

La société REDCORE a fait parvenir une lettre d'intention à la société CASTEL D'AGARD le 1er mars 2016 intitulée « Lettre d'intention commerciale bilatérale entre la société Castel d'Agard et le société REDCORE » destinée à organiser leur collaboration aux termes de laquelle la SARL Castel d'Agard s'engageait à confier à la société REDCORE SAS en exclusivité la commercialisation et la promotion de ses produits, la société REDCORE SAS s'engageant pour sa part à interférer auprès des autorités compétentes pour l'obtention de ces autorisations.

Durant les années 2016 et 2017 les deux sociétés ont collaboré à la fabrication et commercialisation d'un lanceur de balles de 44 mm à canon rayé dénommé Kann 44R et d'une munition MAT44 pour équiper les polices municipales sur la base de cette lettre d'intention.

Dans le temps du processus d'expertise du LBD 44R avec ses munitions par le Centre de recherche et d'expertise de la logistique (CREL) le contexte réglementaire sur le contrôle des armes à feu a été modifié à partir de 2017 ouvrant de nouvelles modalités de classement des armes.

Certains clients de la société REDCORE, liés au marché des polices municipales, auxquels avaient été livrés des LBD 44R les ont retournés.

Dans ce contexte les relations entre les sociétés CASTEL D'AGARD et REDCORE se sont dégradées.

La société REDCORE a reproché à la société CASTEL D'AGARD des inexécutions contractuelles (retard de livraisons, annulation de commandes, défauts de conformités des produits etc..) qui auraient retardé le processus d'obtention des autorisations de commercialisation. Elle a ainsi refusé de régler à la société CASTEL D'AGARD des factures concernant la livraison en 2017 de LBD.

S'attribuant la paternité du LBD 44R la société REDCORE a déposé à l'INPI à titre de dessins et modèles les plans du LBD KANN44 ainsi que des marques verbales française « KANN » et MAT.

Parallèlement la société CASTEL D'AGARD a obtenu du président du tribunal de commerce de Lorient une ordonnance l'autorisant à saisir à titre conservatoire des armes qu'elle avait livrées dans les locaux de la société REDCORE.

Cette saisie conservatoire réalisée le 10 mai 2019 a été levée par ordonnance du président du tribunal de commerce de Lorient le 21 novembre 2019.

Par acte du 1er juin 2019, la société CASTEL D'AGARD a fait assigner la société REDCORE devant le tribunal de commerce de Lorient en paiement du solde de ses factures pour un montant de 47 607 euros TTC ainsi que pour obtenir la restitution d'armes et des dommages et intérêts.

Par jugement du 29 novembre 2021 le tribunal a :

- Dit que Monsieur [G] [X] possède la capacité juridique nécessaire pour engager la société CASTEL D'AGARD dans ses relations contractuelles avec la société REDCORE;

- Dit que la lettre d'intention proposée par la société REDCORE à la société CASTEL D'AGARD a valeur contractuelle ;

- Dit que la société CASTEL D'AGARD n'a pas manqué à ses obligations contractuelles liées à une supposée qualité de sous-traitant;

En conséquence,

- Débouté la société REDCORE de sa demande visant à obtenir des dommages et intérêts au titre des préjudices suivants :

- Commercial à hauteur de 200.000 euros ;

- Atteinte à sa réputation commerciale et à son image de marque à hauteur de 30.000 euros

- Débouté la société REDCORE de son exception d'inexécution ;

- Condamné la société REDCORE à payer à la société CASTEL D'AGARD une somme de 42.607 euros au titre de ses factures impayées ;

- Débouté la société CASTEL D'AGARD de sa demande visant à se voir restituer sous astreinte par la société REDCORE les armes suivantes :

- une arme neutralisée LBD 4-4R et numérotée 2016-0002, pour présentation,

- un LBD 44R portant le numéro de fabrication n° 2016-0012 avec protection de rail Picatinny que la société CASTEL D'AGARD lui a envoyé le 10 janvier 2017 pour démonstration,

- un LBD 44R n° 2017-0008 avec écouvillon qui a été retourné par un client de REDCORE, qui a fait l'objet d'une facture impayée de la part de REDCORE et pour lequel un avoir a été proposé,

- un pistolet semi-automatique modèle B60 finition black de calibre 7,65 Br millimètres numéroté n° T1102-16AL00056,

- un pistolet semi-automatique modèle CM9 finition black de calibre 9 x 19 millimètres numéroté T1102-14C00355,

- un pistolet semi-automatique modèle CM9 finition Stainless Steel calibre 9 x 19 millimètres numérote T1102-15C02123,

- un revolver modèle SR38 finition Stainless Steel calibre 38 Special numerote T1102- 15100096;

- Débouté la société CASTEL D'AGARD de sa demande visant à obtenir une somme de 50.000 euros du chef de concurrence déloyale au titre de son préjudice commercial ;

- Condamné la société la société REDCORE à verser à la société CASTEL D'AGARD la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté la société REDCORE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

- Condamné la société REDCORE aux entiers dépens de l'instance, dont les frais de greffe liquidés à la somme de 73,22 euros TTC.

La société REDCORE a fait appel du jugement le 17 décembre 2021.

Par ordonnance du 1er février 2022, le premier président de la cour d'appel de Rennes a ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire.

Par jugement du 22 avril 2022 le tribunal de commerce de Lorient a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société REDCORE et a désigné en qualité d'administrateur la SELARL [Z] en la personne de Maître [Y] [H] et de mandataire judiciaire Maître [Y] [U] de la SELARL [Y] [U].

La société CASTEL D' AGARD a déclaré sa créance le 11 mai 2022 pour un montant de 110 642,40 euros.

Par acte du 14 juin 2022, la SARL CASTEL D'AGARD a assigné en intervention forcée Maître [Y] [H] de la SELARL [Z] en qualité d'administrateur.

Par acte en date du 16 juin 2022, la SARL CASTEL D'AGARD a assigné en intervention forcée Maître [Y] [U] de la SELARL [Y] [U] en qualité de mandataire judiciaire.

L'ordonnance de clôture est en date du 19 octobre 2023.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses écritures du 8 septembre 2022 la société REDCORE, la SELARL [Z] prise en la personne de Maitre [Y] [H], la SELARL [Y] [U] prise en la personne de Maitre [Y] [U] demandent à la cour au visa des articles 1100 et suivants, 1219, 1220, 1231-1 et suivants, 1289 et suivants du code civil, 699 et 700 du code de procédure civile, 325 et suivants du code de procédure civile de :

- Déclarer la société REDCORE recevable et bien fondée en son appel,

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lorient le 29 novembre 2021 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la société CASTEL D'AGARD de ses demandes au titre de la concurrence déloyale et de la restitution des armes sous astreinte,

Et Statuant à nouveau :

A titre principal :

- Juger que la société CASTEL D'AGARD a gravement manqué à ses obligations contractuelles liées à sa qualité de sous-traitant,

- Juger que ces manquements contractuels ont occasionné pour la société REDCORE les préjudices suivants :

o 200.000 euros au titre d'un préjudice commercial attaché au gain manqué, o 30.000 euros au titre de l'atteinte à sa réputation commerciale et à son image de marque,

- Juger que la société REDCORE est légitime et bien fondée à opposer à la société CASTEL D'AGARD une exception d'inexécution,

En conséquence :

- Débouter la société CASTEL D'AGARD de l'ensemble de ses demandes indemnitaires,

- Condamner la société CASTEL D'AGARD à verser à la société REDCORE la somme de 230.000 euros en réparation de son préjudice commercial et de l'atteinte à sa réputation commerciale et à son image de marque,

- Ordonner la compensation judiciaire entre toutes sommes mises à la charge de la société REDCORE avec les sommes mises à la charge de la société CASTEL D'AGARD ;

- Débouter la société CASTEL D'AGARD de l'entièreté de ses demandes, fins et prétentions,

- Condamner la société CASTEL D'AGARD à verser à la société REDCORE somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société CASTEL D'AGARD aux entiers dépens.

Dans ses écritures notifiées le 4 octobre 2022 la société CASTEL D'AGARD demande à la cour au visa des articles 1101 et suivants du code civil, 1240 du code civil, 1219 du même code de :

- Confirmer le jugement en toutes ces dispositions l'ayant conduit à condamner la société REDCORE à payer la somme de 42 607 euros à la société CASTEL D'AGARD, outre 5 000 euros d'article 700 et les dépens et fixer la créance de la société CASTEL D'AGARD sur la société REDCORE au titre de ce premier poste à la somme en principal de 42 607 euros et de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société REDCORE de toutes ses demandes reconventionnelles,

- Réformer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société CASTEL D'AGARD au titre de la restitution d'armes sous astreinte et statuant à nouveau, condamner in solidum, ou celui des deux qui mieux le devra, la SELARL [Y] [U], prise en qualité de MANDATAIRE JUDICIAIRE au redressement judiciaire de la société REDCORE suivant jugement du tribunal de commerce de Lorient et la SELARL [Z] prise en la personne de Maitre [Y] [H] en qualité d'administrateur judiciaire, suivant jugement du tribunal de commerce de Lorient du 22 avril 2022 à restituer à la société CASTEL D'AGARD dans le délai de quinze jours à compter du prononcé de la décision à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai les armes suivantes :

- une arme neutralisée LBD 44R et numérotée 2016-0002, pour présentation, dont elle souhaite obtenir restitution (pièce 27),

- un LBD 44R portant le numéro de fabrication n° 2016-0012 avec protection de rail Picatinny que la société CASTEL D'AGARD lui a envoyé le 10 janvier 2017 pour démonstration, dont elle souhaite obtenir la restitution (pièce 20.2),

- un LBD 44R n° 2017-0008 avec écouvillon qui a été retourné par un client de REDCORE,qui fait l'objet d'une facture émise par la sté REDCORE sur la ville de [Localité 16], restée impayée par cette dernière et qui réclamait un avoir (pièce 23 : retour de l'arme par la Ville de [Localité 16]).

- un pistolet semi-automatique modèle CM9 finition Stainless Steel calibre 9 x 19 millimètres numéroté T1102-15C02123 (pièce 31),

- un revolver modèle SR38 finition Stainless Steel calibre 38 Spécial numéroté T1102-15l00096 (pièce 32),

- un pistolet CM9 finition black de calibre 9 x 19 millimètres numéroté T1102-14C00355 (Pièce 31 : extrait du registre des armes CDA pistolet 365 et 15C0212),

- Réformer encore le jugement et fixer la créance de la société CASTEL D'AGARD pour le pistolet semi-automatique modèle B6C finition black de calibre 7,65 Br millimètres numéroté n° T1102-16AL00056 (pièce 30, Pièce 30: extrait du registre des armes CDA pistolet 7.65 Br mm T1102 16AL00056) facturé à la société REDCORE, avec un autre et 4 chargeurs, pour la somme de 1 360 euros (Pièce 29.1) à la somme de 1 360 euros,

- Réformer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts de la société CASTEL D'AGARD pour concurrence déloyale, et statuant à nouveau, retenant les fautes commises par la société REDCORE au titre de la copie servile du LBD 44R et de l'usage du logo de la société CASTEL D'AGARD , comme constitutives d'actes de concurrence déloyale, et fixer la créance de la société CASTEL D'AGARD sur la société REDCORE à la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice commercial,

- Allouer à la société CASTEL D'AGARD une indemnité de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et fixer la créance de la société CASTEL D'AGARD sur la société REDCORE à ce titre, à la somme de 7 000 euros,

- Condamner la société REDCORE aux entiers dépens d'appel.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

DISCUSSION

Les acteurs

1) La lettre d'intention

Les appelantes affirment que la société REDCORE est à l'origine du LBD 44R et de ses munitions et que par suite elle est liée à la société CASTEL D'AGARD par un contrat de sous-traitance.

Elles ajoutent qu'il n'est pas démontré que la lettre d'intention a bien été retournée signée à la société REDCORE, et que par conséquent ce document est resté à l'état de support à des relations précontractuelles ; qu'elle n'a donc pas valeur de contrat.

La société CASTEL D'AGARD fait valoir que la lettre d'intention signée par les deux parties a été transmise à la société REDCORE ; qu'elle engage REDCORE et démontre bien qu'elle a la paternité du LBD 44R et des munitions .

Dans son procès-verbal de constat du 15 octobre 2020 (page 223) réalisé à la demande de la société CASTEL D'AGARD à partir de l'ordinateur de [S] [X], l'huissier qui a instrumenté avec M. [K] expert informatique près la cour d'appel de Limoges, reprend les échanges intervenus entre M. [X] et M. [J] de REDCORE.

Le 1er mars 2016 M. [J] écrit :

Messieurs suite à nos différents échanges, je vous adresse pour proposition de lettre d'intention commerciale bilatérale fixant notre collaboration.

En cas d'accord la société REDCORE SAS s'engage à commencer à mettre en oeuvre son action commerciale. ...

Ce à quoi [S] [X] répond le 10 mars 2016 :

[E],

En PJ la lettre d'intention signée.

Nous avons discuté et sommes d'accord sur :

- Vente de lanceur par Redcore à la société FSI (Marc Mengus)

- Castel d'Agard vendra en direct sur le marché asiatique.

Prochaine présentation importante : PM de [Localité 13]. Je fais le maximum pour vous fournir un prototype.

La société CASTEL D'AGARD verse une attestation de M. [K] du 15 mars 2021 :

Sur la base des éléments fournis cités en référence, il apparaît que l'e-mail décrit en page 223 du procès-verbal correspond bien au message extrait et inscrit en pièce numérotée 7. Seule la présentation diffère et cela est expliqué par le logiciel de lecture de mail qui a été utilisé pour la consultation et la sauvegarde de ce même message.

La pièce jointe associée à ce message est bien présentée à la suite de ce dernier dans le procès-verbal et est mentionné en fin de la pièce 7 fournie. L' analyse faite sur le format numérique de cette même pièce montre que la pièce jointe de format pdf est bien présente dans le message électronique et est en tout point identique au document présenté en pages 227 et 228 du procès-verbal.

Il est donc établi que la pièce jointe (la lettre d'intention signée par [S] [X]) a bien été envoyée à [E] [J].

Elle fige donc les relations contractuelles entre ces partenaires en ces termes :

La SARL Castel d'Agard s'engage à confier à la société REDCORE SAS en exclusivité la commercialisation de ses produits à savoir : lanceurs 44 (canon lisse et canon rayé), munitions de 44 pour une première période de 8 mois (01/02/16 au 31/10/16) pour la France, l'Europe, l'Afrique et le Moyen Orient.

Par la même la SARL Castel d'Agard autorise la société REDCORE SAS à promouvoir ces différents produits par quelques moyens que ce soit et à les présenter lors de salons professionnels (Salons des Maires de France, Eurosatory...)

La société REDCORE s'engage à ne pas commercialiser des produits similaires ou concurrents à la SARL Castel d'Agard.

Pendant cette première période de collaboration qui a comme objectif de promouvoir les produits de la société Castel d'Agard et d'établir leur notoriété en France et à l'étranger la société REDCORE SAS s'engage à interférer auprès des autorités compétentes (DGA) afin que les autorisations de fabrication et détention d'armes, en particulier pour les catégories A2/4/5/6 soient concédées à la société Castel d'Agard dans le but de fabriquer un lanceur de 40mm et une grenade de dispersion dite "chocolat".

En cas d'obtention de l'autorisation de fabrication la SARL Castel d'Agard s'engage à confier à la société REDCORE SAS la distribution exclusive de l'ensemble de ses produits pour la France l'Europe, l'Afrique et le Moyen Orient.

En cas de non-attribution des autorisations citées en référence mais en cas de vente des produits de la SARL Castel d'Agard par la société REDCORE SAS, la SARL Castel d'Agard s'engage à confier à la société REDCORE SAS la distribution exclusive de l'ensemble de ses produits pour la France l'Europe, l'Afrique et le Moyen Orient pour une période supplémentaire de huit mois.

A l'issue de la première période de huit mois et en cas de non-attribution des autorisations citées en référence et si la SARL Castel d'Agard et la société REDCORE SAS souhaite mettre un terme à cette collaboration la SARL Castel d'Agard s'engage à accepter de fournir à la société REDCORE SAS les produits pré-vendus émanant des contacts ou marchés conclus lors des négociations commerciales pendant de ladite période.

Nota : la procédure d'admission et d'obtention d'autorisation de fabrication étant administrativement longue la période de huit mois peut ne pas être suffisante pour instruire le dossier un avenant à cette lettre d'intention sera signé afin de fixer à nouveau la durée de la première collaboration entre la SARL Castel d'Agard ou la société REDCORE SAS.

Les termes de la lettre d'intention proposée par la société REDCORE elle-même, lui donnent mission, sans ambiguïté, de promouvoir et distribuer les produits Castel d'Agard et d'obtenir toutes les autorisations de fabrication et détention d'armes A2, 4/5/6 pour le compte de la société Castel d'Agard auprès des autorités compétentes.

Les parties ne contestent pas que cette mission concernait aussi le lanceur 44R à canon rayé et ses munitions.

Dans ces conditions il n'est nullement question d'assigner à la société CASTEL D' AGARD les obligations d'un sous-traitant de la société REDCORE dès lors qu'il ressort de la lettre de mission que REDCORE est liée à CASTEL D'AGARD par un contrat de distribution des armes conçues et fabriquées par cette dernière.

La société REDCORE ne démontre pas en outre qu'elle se trouve à l'origine du LBD 44R et de ses munitions, ce qui conforte les obligations de chaque partenaire dans la lettre d'intention.

La société CASTEL D'AGARD verse des échanges antérieurs à son rapprochement avec la société REDCORE, qui établissent qu'elle entretenait des relations avec le Ministère de l'Intérieur concernant le réglage et la livraison de flash ball à la police (mails et devis de 2013).

Elle communique surtout une attestation de la société SUNROCK du 2 juin 2020 :

J'ai rencontré [S] [X] en juin 2013. Nous avons collaboré pour la création d'un Lanceur de Balle de Défense à partir du lanceur de la société SIPJA ... et du savoir-faire de la société Castel d'Agard fabricant d'armes et de munitions et spécialisée dans le rayage de canon Nous avons collaboré par la suite sur divers projets.

...

J'atteste par la présente : que le produit figurant dans le document technique produit par la société REDCORE à la page 1 est produit par la société SIPJA dont les produits étaient exclusivement distribués par la société SUNROCK en FRANCE. Il s'agit précisément d'un lanceur SJ 102 de calibre 38 mm dont le fonctionnement est dit à double action et de chargement manuel grâce au canon basculant.

Que j'ai présenté ce produit à la société Castel d'Agard en mai 2014et en particulier à [S] [X]. Que je n'ai jamais présenté ce produit à la société REDCORE ou à ses dirigeants. Ce produit a servi de base au développement d'un lanceur de balle de défense de 44 mm. Notre registre des armes atteste de l'envoi de la carcasse du lanceur SIPJA à la société Castel d'Agard le 4 juin 2014. Nous avons reçu une étude de faisabilité et le tarif le 24 juin 2014de la société Castel D'Agard (voir PJ1).

Nous avons reçu les photos du premier prototype le 15 avril 2015 (voir PJ 2);

Cette collaboration est confirmée par les échanges de mails et de documents techniques entre [S] [X] et le responsable de la société SUNROCK bien avant le 1er mars 2016.

Le dossier technique sur l'arme litigieuse, versé par la société REDCORE en pièce 23 qu'elle aurait transmis selon ses affirmations à la société CASTEL d'AGARD, ne peut donc établir qu'elle aurait conçu le LBD 44R d'autant qu'il n'est pas daté.

Les échanges de mails établissent que [S] [X] se trouve à l'origine de la conception des prototypes de LBD.

Ainsi par exemple mail du 31 mars 2016 de M. [X] à M. [J] :

...

Voici une photo du prototype

...

Réponse :

Merci pour la photo, à quoi servent les deux queues de détente.

...

Pour démontrer sa paternité, la société REDCORE reproduit également dans ses écritures ses échanges avec [S] [X] et un certain [B] [F] dont elle était le nom en raison d'un cryptage de la messagerie.

Selon CASTEL D'AGARD [B] [F] n'est autre que M. [B] [M] qui avait déjà collaboré au projet SUNROCK (Cf mail du 24 juin 2014 p 160 du constat d'huissier).

En tout état de cause cette reproduction de messages n'a aucune valeur probatoire d'autant qu'en l'espèce leur contenu ne démontre pas que REDCORE aurait conçu le LDB 44.

La société REDCORE considère encore que la lettre de la Direction générale de l'armement DGA du 10 février 2016 confirme qu'elle est bien le fabricant de l'arme aux motifs qu'elle lui accorde une autorisation de fabrication jusqu'au 4 février 2019.

Cette autorisation s'applique aux :

- armes et éléments d'armes et munitions de catégorie A1 paragraphe 4° - 6°;

- matériels de guerre de catégorie A 2 paragraphe 1°-3°-4°-5°-6°-12°- 13°-14°-15°-18° ;

- armes éléments d'armes et munitions de catégorie B.

Cette lettre ne démontre pas pour autant que REDCORE aurait conçu le LBD44 R.

Elle est conforme à l'activité déclarée de la société REDCORE (extrait Kbis) et ne vise pas directement les lanceurs de balle de défense R44, ni même leur catégorie de l'époque, B3.

Elle est surtout antérieure à la lettre de mission qui finalement limite le rôle de REDCORE à la promotion des produits de CASTEL D'AGARD et plus particulièrement du LBD 44R auprès des polices municipales.

Enfin les démarches de la société REDCORE auprès de l'INPI les 18 avril 2017 et 20 octobre 2017 pour faire enregistrer les marques KANN et MATT sont contemporaines des premiers signes de désaccord entre les deux partenaires. Elles ne peuvent suffire à valoir comme preuve irréfutable de sa paternité sur les armes et munitions dès lors que la société CASTEL D'AGARD lui reproche des actes de concurrence déloyale. Il en est de même de la livraison part REDCORE à ses clients de munitions gravées REDCORE dans un emballage REDCORE.

Les appelantes ne démontrent donc pas que la société REDCORE a conçu le LBD 44R et que la société CASTEL D'AGARD a agi comme son sous-traitant.

Le jugement est confirmé de ce chef.

2) [S] [X]

Les appelantes remettent en cause la capacité de [S] [X] d'engager la société CASTEL D'AGARD aux motifs qu'il en est le salarié et qu'il n'occupe qu'un poste de technicien.

Elles considèrent donc que la lettre d'intention au nom de la société CASTEL D'AGARD signée par [S] [X] est nulle et ne peut lui être opposée.

Le dirigeant de la société CASTEL D'AGARD atteste le 10 mars 2021 :

Par la présente, j'atteste que Monsieur [S] [X] était salarié au sein de ma société le 1er mars 2016.

Je lui ai confié la gestion du projet conception, fabrication et mise au point d'un lanceur de balle de défense et de ses munitions aux fins de commercialiser ce produit par le biais d'un distributeur.

Tous pouvoirs lui ayant été donnés pour engager la société.

Les appelantes remettent en cause la validité de ce document qui ne répond pas aux conditions du code de procédure civile.

Mais la société REDCORE n'a jamais soulevé la nullité des engagements de [S] [X] avant l'émergence des dissentions entre les parties.

Elle est même restée en relation d'affaire avec la société CASTEL D'AGARD, directement, par l'intermédiaire de [S] [X] jusqu'à la cessation de leur collaboration en 2018 bien après les échéances prévues dans la lettre d'intention.

Les appelantes signalent encore que les échanges que [S] [X] a eu avec son avocat s'agissant de la contestation des dépôts INPI effectués par la société REDCORE, démontrent qu'il agissait pour son compte personnel ou le compte de sa société MGM, immatriculée depuis le 20 octobre 2017.

Toutefois l'utilisation par [S] [X] d'une adresse personnelle (pièce 41) dans ses échanges avec son avocat ne permet pas de confirmer qu'il agissait pour son compte personnel et non pour celui de la société CASTEL d'AGARD.

Il en est de même lorsque dans le cadre de la procédure judiciaire en contestation des dépôts INPI par REDCORE, il s'interroge sur la propriété des droits sur les armes, cette question juridique étant indépendante de leur conception.

Il est donc suffisamment établi que la lettre d'intention régularisée par M. [S] [X] est opposable à la société REDCORE qui l'a exécutée postérieurement à sa signature.

Le tribunal est confirmé de ce chef.

Les factures émises par la société CASTEL D' AGARD.

La société CASTEL D'AGARD sollicite que sa créance soit fixée à la somme totale de 42 607 euros.

Les appelantes font valoir que la société REDCORE était légitime à soulever une exception d'inexécution pour ne pas régler les factures en raison des fautes de la société CASTEL D'AGARD dans l'exécution du contrat.

A cet égard dans ses courriers des 12 mars et 23 mars 2018 et dans une lettre de son avocat elle reproche à la société CASTEL D'AGARD :

- des retards de livraison qui auraient généré l'application de pénalités et des remises pour ses clients ;

- l'annulation de commandes entraînant la nécessité de trouver d'autres fournisseurs se traduisant pas des surcoûts ;

- un refus de livraison d'un reliquat de commande dans le cadre d'un marché public;

- des défauts et non-conformité des lanceurs livrés sur différents sites la contraignant à des gestes commerciaux ;

- un refus de garantie de 3 ans sur les armes en contradiction avec les accords initiaux ;

- le comportement de [S] [X] à l'occasion du processus d'expertise par le CREL (Centre de recherche et d'expertise de la logistique) aboutissant à le rendre caduc et à contraindre REDCORE à le reprendre en 2018.

Les retards de livraisons et leurs incidences :

Les échanges de mails entrent [S] [X] et la société REDCORE illustrent les difficultés techniques auxquelles s'est heurtée la société CASTEL D'AGARD pour concevoir et fabriquer le LBD R44 et parvenir à respecter les livraisons.

Le 26 juin 2016 M. [J] écrit [S] [X] :

J'ai fait un tableau afin de gérer les commandes, la production et les livraisons.

...

C'est un tableau navette entre vous et nous afin d'assurer une gestion claire,

Le fichier portera la date du jour afin de ne pas se tromper,

Dites moi ce que vous en pensez '

Quel est le délai de fabrication pour un 1 Kann et 50 munitions (vous allez peut- être faire des séries),

Le 16 novembre 2016 [S] [X] informe REDCORE :

[E]

Je suis bloqué sur les munitions. Pour avancer, [R] doit nous envoyer la documentation afin que je puisse valider ou modifier.

Je dois rapidement changer de fabrication. Une fois la fabrication changée, je ne pourrai pas revenir sur cette dernière pour le passage au BE.

Par ailleurs, ce matin vous m'avez dit avoir rassuré [W] sur la livraison de décembre .Je vais faire de mon mieux pour satisfaire ce délai. Néanmoins je ne peux pas garantir ce délai comme je vous l'ai dit lundi matin.

Je suis tout à fait conscient des enjeux de cette commande en particulier. Je tiens à affirmer ma volonté à satisfaire cette livraison. Néanmoins je me dois de livrer un produit dont je suis sûr dans son fonctionnement et ses capacités. Il me semble plus facile de justifier du retard pour proposer un produit à la hauteur de la réputation que nous lui construisons que de justifier d'un produit ayant de graves problèmes techniques et cela même dans le cadre d'une PM pilote.

D'une manière générale la fabrication industrielle avec assemblage et test manuel requière une grande inertie de temps. Je mets la "machine" en marche jour après jour. Nous montons en puissance, mais cela nous demande du temps.

Le 2 janvier 2017 [S] [X] demande que REDCORE lui fasse parvenir des bons de commandes concernant deux BC 6 pour le Chesnay et 4 chargeurs et le 25 janvier 2017 il fait parvenir une facture concernant ces armes à la société REDCORE.

Le 22 février 2017 [S] [X] évoque les nombreuses semaines de travail et d'investissement (annexe 17)

Le 2 mai 2017 il réitère ses craintes quant au respect des délais d'une livraison prévue le 13 juin 2017, en raison du travail à réaliser sur la Mat 44 (pièce annexe 22).

Le 7 juillet 2017 la société REDCORE évoque les difficultés sur les livraisons retardées auprès de ses clients et les gestes commerciaux qu'elle a dû consentir (annexe 26).

Le 25 juillet 2017 [S] [X] informe REDCORE d'une livraison en décembre pour la police municipale de [Localité 11].

En aout 2017 les relations se tendent entre les parties, REDCORE indiquant à [S] [X] qu'aucun retard de livraison ne sera accepté (annexe 30).

En septembre 2017 [S] [X] indique à sa partenaire qu'il est soumis aux aléas techniques de ses machines ce qui retarde son planning (mail du 22 septembre 2017 pièce annexe 31).

Le 5 octobre 2017 [S] [X] accuse réception de bons de commandes de REDCORE (annexe 33).

Le 12 octobre 2017 REDCORE sollicite une visibilité sur les expéditions pour être clair avec ses clients (annexe 34).

Le 18 octobre 2017 [S] [X] confirme l'envoi de colis corrrespondant à des bons de commandes (annexe 36).

Ces échanges démontrent bien les inquiétudes de la société CASTEL D'AGARD pour respecter les délais de livraison et son incapacité à suivre le rythme des commandes de REDCORE.

Ce contexte l'a même incitée à ne pas s'engager dans un renouvellement de la lettre d'intention parvenue à son terme le 1er juillet 2017 malgré les sollicitations de REDCORE le 12 avril 2017 (pièce annexe 20).

Pour autant les échanges visés supra ne permettent pas d'établir que la société CASTEL D' AGARD a refusé de satisfaire les commandes de REDCORE alors qu'elle se plaint d'une pression de sa partenaire.

Cette posture a eu pour effet d'entretenir ses propres retards.

La société REDCORE va cependant poursuivre ses propres commandes auprès de ces clients considérant en effet que la lettre de la DGA (Direction générale de l'armement) du 16 décembre 2016 donne naissance officiellement au Kann 44 CLR sur le marché de la police municipale et autres (pièce annexe 11).

Pourtant ce courrier n'était pas ferme :

En réponse à votre courriel de référence et après expertise technique du lanceur de balle de défense de calibre 44/83 mm nommé "KANN44 CRL" et de ses munitions je vous informe que la DGA considère que ces matériels ne relèvent d'aucune caractéristique des armes listées dans la catégorie A de l'article R. 311-2 du code de la sécurité intérieure.

Toutefois ces matériels pourraient être visés par la 3° de la catégorie B de l'article précité. Ils nécessiteraient le cas échéant une autorisation de fabrication et de commerce délivrée par le ministre de la défense au titre des dispositions du décret 2013-700 du 30 juillet 2013 relatif à l'établissement d'un contrôle des armes modernes simplifié et préventif.

Ce courrier mentionne clairement que si l'arme n'était pas classée, elle était toutefois susceptible de l'être en B3 ce qui implique des contrôles supplémentaires.

De même l'homologation par le Banc national d'épreuve de [Localité 14] le 5 janvier 2017 ne suffisait pas à la conforter sur la conformité des armes et donc, sur sa possibilité à les vendre puisque cet accord ne concernait que des cartouches.

En outre le 27 janvier 2017 la société REDCORE a aussi été informée que le Service central des armes du ministère de l'intérieur (SCA) reprenait les compétences du ministère de la défense en matière d'armes, ce qui a eu pour conséquence la nécessité de prévoir des expertises supplémentaires notamment sur les munitions. A cette occasion il lui était signalé aussi que le ministère de l'intérieur souhaitait engager une réflexion d'ensemble sur les lanceurs de balle de défense.

Ce contexte réglementaire instable obligeait la société REDCORE à demeurer vigilante et prudente dans la passation de commandes auprès de ses clients potentiels d'autant qu'elle était alertée le même temps des difficultés de la société CASTEL D'AGARD pour suivre son rythme dans les commandes.

Pourtant dans un courrier du 17 octobre 2017, REDCORE continue à se plaindre des retards de la société CASTEL D'AGARD compte tenu de ses 22 commandes de Kann 44 CLR et 1202 de MATT 44 et des autres devis en cours de validation pour l'année 2017 et pour l'année 2018.

La lettre d'intention n'impose pas à la société CASTEL D'AGARD un volume d'armes à livrer à REDCORE dans un temps déterminé à tel point qu'il était convenu qu'elle puisse être renouvelée en considération des difficultés pour l'obtention des autorisations administratives.

La société REDCORE ne pouvait donc pas s'engager vis à vis de ses clients ni effectuer des ventes notamment auprès des polices municipales avant d'avoir obtenu toutes ces autorisations administratives et de connaître le type de classement de l'arme qui faisait l'objet d'une réflexion au niveau ministériel.

En outre la société REDCORE n'établit pas que les retards de livraison concernent les livraisons pour lesquelles CASTEL D'AGARD sollicite un paiement.

Elle ne peut donc refuser de les régler aux motifs que CASTEL D'AGARD aurait failli dans le calendrier de livraison qu'elle imposait.

Le retard dans le processus d'expertise,

Le processus d'expertise du LBD Kann44 CLR et de sa munition MAT44 a été repoussé au mois de décembre 2017.

La société REDCORE fait valoir que ce retard de 8 mois sur le planning d'origine prévu en avril 2017, provient de la défaillance de CASTEL D' AGARD qui n'aurait pas livré le matériel à livrer au laboratoire.

Elle ne peut cependant lui reprocher un manquement contractuel dès lors que s'agissant d'un domaine touchant à la sécurité des personnes et à l'ordre public cette dernière lui avait rappelé qu'elle ne souhaitait pas livrer un matériel non abouti.

La société REDCORE affirme encore qu'à l'occasion de l'expertise de décembre 2017 la société CASTEL D'AGARD a effectué une livraison de munitions au laboratoire, gravées « CREL2017-M. [X]-CAL.44/83SP » et qui, de ce fait n'apparaissaient pas en lien avec la société REDCORE, créant ainsi des difficultés au niveau administratif .

Les appelantes ne démontrent pas que la société CASTEL D'AGARD, fabricante, était informée des modalités de fournitures des armes au laboratoire et de l'obligation de passer par REDCORE.

Au demeurant le laboratoire a accusé réception à [S] [X] de l'envoi des 50 cartouches sans noter de difficultés, restant même en attente du lanceur.

La société REDCORE dénonce aussi l'explosion de munitions au cours de ces essais et un défaut de similarité entre les cartouches testées.

Ces tests étaient justement destinés à assurer la conformité de ces armes à leur usage.

La société REDCORE a pourtant proposé aux polices municipales des armes dont elle savait qu'elles n'étaient pas encore validées et susceptibles de faire l'objet d'un changement de réglementation.

La modification qui est intervenue par arrêté du 3 juillet 2019 n'a en effet plus permis que les polices municipales soient dotées du LBD. La société REDCORE ne peut donc se plaindre de retours d'armes, de remises et d'annulation de commandes par ses propres clients alors que sa précipitation à les placer sur les marchés est à l'origine de cette situation.

Il convient donc de rejeter l'exception d'inexécution soulevée par les appelantes pour ne pas régler les sommes qui sont dues à la société CASTEL D'AGARD.

Pour soutenir ses demandes financières la société CASTEL D'AGARD verse des factures (pièce 9, 11, 10 et 12 ) :

- une facture émise le 30 décembre 2017 relative à des lanceurs de balle de défenses kann CLR 44, ( n° 2016- 0008, 2016-0010, n° 2017-0001, n° 2017-0002,n° 2017-0003,n° 2017-0004,n° 2017-0005,n° 2017-0006 n° 2017-0007, n° 2017-0008, n° 2017-0009) des protections rail Piccatiny, un écouvillon , des anneaux de grenadière une découpe et assemblage mousse dans une valise des munitions MATT 44 et des frais d'expédition pour un montant de 26 741 euros HT ( 32 089,20 TTC) (pièce 10) ;

- une facture émise le 31 janvier 2018 relative à des lanceurs de balle de défenses kann CLR 44, ( n° 2017- 0010, 2017-0011, n° 2017-0012, n° 2017-0013,n° 2017-0015,n° 2017-0016,n° 2017-0017,n° 2017-0018) une protection rail Piccatiny, un écouvillon , un anneau de grenadière, une découpe et assemblage mousse dans une valise, et des frais d'expédition pour un montant de 12 893 euros HT ( 15 471,60 euros TTC);

- une facture émise le 28 février 2018 relative à une livraison d'un LBD CLR 44 n° 2017-0014, un écouvillon, un anneau de grenadière, une découpe et assemblage mousse sur la valise pour un montant de 1648 euros HT (1977, 20 euros TTC).

La société REDCORE ne démontre pas avoir réglé ou restitué ces armes et ces munitions.

La créance d'un montant de 1 390 euros HT (1692 euros TTC) est donc justifiée.

Le total des factures s'élève à un montant de 41 282 euros HT ( 49 538 euros TTC)

A défaut de précisions à ce titre, la créance de la société CASTEL D'AGARD est fixée à la hauteur de sa demande soit la somme de 42 607 euros TTC.

Il convient donc de fixer la créance de la société CASTEL D'AGARD à la procédure collective de la société REDCORE à la somme de 42 607 euros TTC.

Le jugement est confirmé de ce chef, étant précisé qu'il y aura lieu de fixer la créance et non de prononcer une condamnation à paiement.

La société CASTEL D'AGARD sollicite aussi que sa créance soit également fixée à la somme de 1 360 euros HT (1692 euros TTC) au titre d'une facture émise le 25 janvier 2017 correspondant à deux pistolets SARSILMAZ mod B6C (n° 59 et 69) black et 4 chargeurs(pièce 29.1), armes de démonstration non restituées par REDCORE.

La société REDCORE ne démontre pas avoir réglé ou restitué ces armes et ces munitions.

Il convient également de fixer la créance de la société CASTEL D'AGARD à la procédure collective de la société REDCORE à la somme de 1 390 euros HT.

La restitution des armes.

La société CASTEL D'AGARD demande la restitution des armes suivantes :

- une arme neutralisée LBD 4-4R et numérotée 2016-0002, pour présentation (pièce 27),

- un LBD 44R portant le numéro de fabrication n° 2016-0012 avec protection de rail Picatinny envoyée le 10 janvier 2017 pour démonstration, (pièce 20.2);

- un LBD 44R n° 2017-0008 avec écouvillon qui a été retourné par un client de REDCORE, qui a fait l'objet d'une facture impayée de la part de REDCORE et pour lequel un avoir a été proposé, (pièce 23)

- un pistolet semi-automatique modèle B60 finition black de calibre 7,65 Br millimètres numéroté n° T1102-16AL00056, (pièce 31)

- un pistolet semi-automatique modèle CM9 finition black de calibre 9 x 19 millimètres numéroté T1102-14C00355,

- un pistolet semi-automatique modèle CM9 finition Stainless Steel calibre 9 x 19 millimètres numérote T1102-15C02123, (pièce 32),

- un revolver modèle SR38 finition Stainless Steel calibre 38 Special numerote T1102- 15100096 (pièce 31).

Dans ses écritures la société REDCORE reconnaît qu'agissant en exécution de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Lorient du 12 février 2019, la société CASTEL D'AGARD a fait saisir à titre conservatoire dans ses locaux :

- un lanceur de balles de défense de 44 millimètres n° 2016-0012,

- un pistolet semi-automatique modèle B6C finition black de calibre 7,65 Br millimètres numéroté n° T1102-16AL00056,

-un pistolet semi-automatique modèle CM9 finition black de calibre 9 x 19 millimètres numéroté n° T1102-14C00355,

- un pistolet semi-automatique modèle CM9 finition Stainless Steel de calibre 9 x 19 millimètres numéroté n° T1102-15C02123,

- un revolver modèle SR38 finition Stainless Steel calibre 38 spécial numéroté T1102-15l00096.

La société REDCORE ne démontre pas qu'elle aurait restitué ou réglé ces armes.

Cependant la saisie conservatoire ayant été levée, la société CASTEL D'AGARD ne démontre pas qu'elle a respecté la procédure en revendication prévue aux articles L 624- 16 et suivants du code de commerce. Sa demande de restitution est irrecevable en ce qu'elle est formée devant le juge du fond.

Le jugement est réformé de ce chef.

La concurrence déloyale,

La société CASTEL D'AGARD considère que la société REDCORE a commis des actes de concurrence déloyale en s'appropriant ses travaux de conception pour la mise au point du LBD 44R et créer un LBD qui en est la copie servile commercialisé sous la marque ISDE.

La société CASTEL D'AGARD ne démontre pas les procédés déloyaux de la société REDCORE alors qu'elle était parfaitement informée des pratiques de sa partenaire.

En effet comme le montrent les échanges entre les parties, dès le 1er février 2017 [S] [X] sollicite auprès de la société REDCORE, des bons de livraison correspondant à des commandes des polices municipales de [Localité 12] et de [Localité 15].

Ces bons de commandes font apparaitre clairement ISDE et la phrase ISDE est la marque de REDCORE SAS (pièce 20.3).

Il en est de même s'agissant des commandes pour la police municipale de [Localité 8] (pièce 33).

[S] [X] était donc informé que la société REDCORE vend ses armes en faisant apparaitre la mention ISDE.

La société CASTEL D'AGARD ne verse aucune pièce de nature à démontrer qu'au cours de ses relations avec REDCORE elle a dénoncé ce fonctionnement. Elle l'a donc cautionné.

Elle ne peut non plus reprocher à la société REDCORE d'avoir agi aux fins d'obtenir des autorisations à son nom et non pour le compte de la société CASTEL D' AGARD puisque justement REDCORE était chargée d'intercéder auprès des autorités dans ce cadre.

La société CASTEL D'AGARD n'a pas déposé de brevet, de marques et effectué les démarches de nature à protéger ses créations. Elle a également abandonné la procédure envisagée un temps pour contester les dépôts effectués à l'INPI par REDCORE.

En outre la pièce 34 qu'elle produit pour établir la copie servile de ses produits concerne une grenade de désencerclement TANN DMP CHOC pour laquelle aucune pièce ne vient démontrer qu'elle serait fabriquée à partir des travaux de CASTEL D'AGARD.

Les demandes de la société CASTEL D'AGARD au titre de la concurrence déloyale sont rejetées.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Les demandes de dommages et intérêts de la société REDCORE.

La société REDCORE ne démontrant pas les fautes de la société CASTEL D'AGARD sa demande de dommages et intérêts est rejetée.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Les demandes annexes,

Il n'est pas inéquitable de fixer la créance de la société CASTEL D'AGARD au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 5 000 euros, le jugement étant infirmé en ce qu'il avait condamné la société REDCORE à payer cette somme.

La société REDCORE est condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Confirme le jugement en ce qu'il a :

- Dit que Monsieur [G] [X] possède la capacité juridique nécessaire pour engager la société CASTEL D'AGARD dans ses relations contractuelles avec la société REDCORE;

- Dit que la lettre d'intention proposée par la société REDCORE à la société CASTEL D'AGARD a valeur contractuelle ;

- Dit que la société CASTEL D'AGARD n'a pas manqué à ses obligations contractuelles liées à une supposée qualité de sous-traitant;

- Débouté la société REDCORE de sa demande visant à obtenir des dommages et intérêts au titre des préjudices suivants :

- Commercial à hauteur de 200.000 euros ;

- Atteinte à sa réputation commerciale et à son image de marque à hauteur de 30.000 euros

- Débouté la société REDCORE de son exception d'inexécution ;

- Débouté la société CASTEL D'AGARD de sa demande visant à obtenir une somme de 50.000 euros du chef de concurrence déloyale au titre de son préjudice commercial ;

- Débouté la société REDCORE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement ;

- Condamné la société REDCORE aux entiers dépens de l'instance, dont les frais de greffe liquidés à la somme de 73,22 euros TTC.

- Infirme le jugement pour le reste;

Statuant à nouveau :

- Fixe la créance de la société CASTEL D'AGARD à la procédure collective de la société REDCORE à la somme en principal de 42 607 euros TTC au titre des factures impayées retenues par le premier juge ;

- Fixe la créance de la société CASTEL D'AGARD à la procédure collective de la société REDCORE à la somme de 1 390 euros HT au titre de la facture émise le 25 janvier 2017 et non retenue par le premier juge ;

- Déclare irrecevables les demandes de restitutions d'armes présentées par la société CASTEL D'AGARD ;

- Rejette les autres demandes des parties ;

- Fixe la créance de la société CASTEL D' AGARD à la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure ;

- Condamne la société REDCORE aux dépens d'appel.