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Décisions

Cass. com., 20 décembre 2023, n° 21-20.019

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vigneau

Rapporteur :

Mme Lefeuvre

Avocats :

Me Haas, SARL Le Prado - Gilbert

Fort de France, du 25 mai 2021

25 mai 2021

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Fort de France, 25 mai 2021), rendu sur renvoi après cassation (Com., 10 avril 2019, pourvoi n° 17-19.474), à l'occasion d'une instance l'opposant à M. [H], son ancien gérant et associé, la société à responsabilité limitée Amazone métal a, le 13 juin 2013, demandé l'annulation de la convention de découvert en compte courant ouvert au nom de la société TMB ainsi que la condamnation de M. [H] à lui payer une somme égale au montant du découvert.

2. Ce dernier a opposé à cette demande la prescription triennale prévue à l'article L. 223-23 du code de commerce.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. [H] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société Amazone métal la somme de 463 972,68 euros à titre de dommages et intérêts au titre du compte courant annulé, avec intérêts au taux légal à compter du 13 juin 2012, alors « que les actions en responsabilité à l'encontre des dirigeants prévues aux articles L. 223-19 et L. 223-22 se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation ; qu'en considérant que la demande de condamnation au paiement de la somme de 463 972,68 euros à titre de dommages-intérêts, formée par la société Amazone Métal à l'encontre de son ancien dirigeant, était soumise à la prescription quinquennale de droit commun, quand une telle action ne peut être fondée que sur les dispositions de l'article L. 223-22 du code de commerce, de sorte qu'elle est nécessairement soumise à la prescription triennale, la cour d'appel a violé les articles L. 223-22 et L. 223-23 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 223-22 et L. 223-23 du code de commerce :

4. Aux termes du premier de ces textes, les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.

5. Aux termes du second, les actions en responsabilité prévues à l'article L. 223-22 du code de commerce se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation.

6. Pour retenir que la prescription quinquennale est applicable à la demande de la société Amazone métal et en déduire que cette demande n'est pas prescrite, l'arrêt, après avoir retenu que M. [H], ancien gérant de cette société, est le réel titulaire du compte courant débiteur, par le jeu de l'interposition de la société TMB, retient qu'en application de l'article L. 223-21 du code de commerce, toute convention de compte courant débiteur est nulle, notamment lorsqu'elle a été obtenue par personne interposée, qu'une telle nullité a pour conséquence l'anéantissement rétroactif du contrat en toutes ses dispositions et l'obligation pour le titulaire du compte courant débiteur par interposition de personne de restituer les fonds, et que l'action en nullité de la convention de compte courant débiteur présentée par la société Amazone métal, qui est distincte de l'action en responsabilité du dirigeant visée à l'article L. 223-22 du code de commerce, est soumise au délai de prescription quinquennale prévu à l'article L. 110-4 du code de commerce.

7. En statuant ainsi, alors qu'elle condamnait M. [H], par confirmation du jugement entrepris, non pas à la restitution du solde débiteur du compte courant ouvert au nom de la société TMB, personne interposée, à la suite de l'annulation de la convention de découvert en compte, mais au paiement de dommages et intérêts, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement entrepris, il condamne M. [H] à payer à la société Amazone métal la somme de 463 972,68 euros à titre de dommages et intérêts et en ce qu'il
statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 25 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Cayenne.