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Décisions

Cass. 3e civ., 19 février 1992, n° 90-18.583

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Senselme

Rapporteur :

M. Darbon

Avocat général :

M. Sodini

Avocats :

SCP Boré et Xavier, Me Boullez

Toulouse, du 25 juin 1990

25 juin 1990

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 25 juin 1990), qu'en juillet 1987, la société Grand Hôtel de l'Opéra (GHO), maître de l'ouvrage, a confié à la société Culetto des travaux d'aménagement et d'agrandissement d'un hôtel, qui ont été entrepris sous la direction et le contrôle de M. X..., architecte ; qu'en cours de chantier, la société Culetto a établi, le 17 mars 1988, un document intitulé " devis forfaitaire " puis, en octobre 1988, un devis estimatif et quantitatif qui n'a pas fait l'objet d'une acceptation ; qu'après avoir reçu le règlement de neuf situations de travaux, la société Culetto a adressé au maître de l'ouvrage un état récapitulatif, qui a été approuvé par l'architecte uniquement en ce qui concerne les quantités de matériaux indiquées, et a assigné la société GHO en paiement du solde de ses travaux ;

Attendu que la société GHO fait grief à l'arrêt d'écarter des débats les pièces qu'elle a communiquées suivant bordereau transmis le 17 mai 1990, au cours de l'instance d'appel suivie selon la procédure à jour fixe, alors, selon le moyen, 1°) que dans ses conclusions responsives du 23 mai 1990, la société GHO avait fait valoir que la société Culetto avait demandé à la cour d'appel de rejeter les pièces qui n'étaient pas jointes à la requête présentée pour obtenir l'autorisation d'assigner à jour fixe, alors que les pièces lui ont été communiquées dans le cadre du référé devant M. le premier président et dans le cadre du référé sur exécution ; qu'en écartant les pièces communiquées des débats, sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; 2°) qu'en tout état de cause, le président peut renvoyer l'affaire à une date qu'il fixe s'il estime qu'une ultime communication de pièces suffit à la mettre en état ; qu'en écartant les pièces communiquées par la société GHO le 17 mai 1990, sans constater que l'affaire était déjà en état d'être jugée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 761 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la société GHO, après avoir communiqué vingt-huit pièces lors de la présentation de sa requête afin d'être autorisée à assigner à jour fixe pour l'audience du 28 mai 1990, en avait produit quinze autres suivant bordereau transmis le 17 mai 1990, alors que la société Culetto, intimée, n'avait pas encore conclu, la cour d'appel, qui n'avait pas à user de la faculté prévue par l'article 761 du nouveau Code de procédure civile, dont les dispositions ne sont pas applicables en la matière, a répondu aux conclusions et légalement justifié sa décision de ce chef en retenant qu'en application de l'article 918 de ce Code, la société GHO devait déposer, au secrétariat-greffe de la cour d'appel, dès la présentation de sa requête, les pièces dont elle entendait faire usage, afin que son adversaire puisse en prendre connaissance, et que les quinze pièces communiquées par le bordereau du 17 mai 1990, qui n'avaient pu être soumises en temps utile à l'examen de la société intimée, devaient être écartées des débats ;

Sur les deuxième et troisième moyens : (sans intérêt) ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que la société GHO fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une somme à la société Culetto, alors, selon le moyen, 1°) que, pour écarter la contestation élevée par la société GHO quant à la détermination des prix, la cour d'appel se borne à déclarer que cette contestation était inopérante, dès lors que l'expert n'avait pas retenu la notion de travaux en régie ; que toutefois, la cour d'appel a homologué le rapport d'expertise qui, après avoir écarté la méthode des prix unitaires consistant à évaluer objectivement le prix de l'ouvrage à dire de métreur, a retenu le mode d'évaluation faite sur les déboursés et les charges de l'entrepreneur et en l'assortissant d'un coefficient multiplicateur ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur le point de savoir pourquoi elle considérait qu'une telle méthode, opposée à celle des prix unitaires, ne revenait pas à procéder à une évaluation des travaux en régie, la cour d'appel, qui n'a pas indiqué si elle statuait en droit ou en fait quant à la notion d'évaluation de travaux en régie, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; 2°) que l'application d'un coefficient multiplicateur contrevient aux dispositions impératives et d'ordre public de l'arrêté du 31 mai 1960 ; qu'en homologuant le rapport d'expertise qui avait appliqué un tel coefficient, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Mais attendu que l'arrêté du 31 mai 1960, pris en application de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945, abrogée à l'époque des travaux, ne figurant pas parmi les textes provisoirement maintenus en vigueur en application des articles 61 et 62 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a légalement justifié sa décision de ce chef en retenant qu'aucun contrat ne liait les parties au sujet de la détermination du coût des travaux en cause ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.