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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 18 janvier 2024, n° 20/05889

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Rome Richelieu (SARL), Pra Chapel (SCI), Societe Immobiliere du Chapitre (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Chalbos

Conseillers :

Mme Vignon, Mme Martin

Avocats :

Me Simon-Thibaud, Me Semelaigne, Me Blanc, Me Brun-Schiappa

TJ Marseille, 12 mars 2020, n° 17/03683

12 mars 2020

EXPOSE DU LITIGE

Le 1er juillet 2005, la SARL Rome Richelieu a fait l'acquisition d'un fonds de commerce de bar-brasserie-snack, exploité dans des locaux sis [Adresse 6], propriété de la SCI Pra Chapel.

Préalablement, par acte du 20 mai 2005 à effet du 1er mai 2005, la SCI Pra Chapel a consenti à la SARL Rome Richelieu un bail commercial pour une durée de neuf années, soit jusqu'au 30 avril 2014, relativement aux locaux susvisés, composés:

- d'un magasin situé au rez-de-chaussée de l'immeuble [Adresse 6] et angle [Adresse 10], avec façade sur ladite place,

- du sous sol ( niveau -1),

- de la moitié de la grande cave donnant sur la cour ( niveau -2).

Le 12 avril 2013, un avenant a été conclu au bail commercial, la société Rome Richelieu, ayant accepté l'emprise d'un ascenseur que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble projetait de faire installer, a reçu en contrepartie de la SCI Pra Chapel la jouissance de la totalité de la cave.

Le 23 décembre 2013, la SARL Rome Richelieu a signifié à la SCI Pra Chapel une demande de renouvellement du bail commercial aux mêmes charges et conditions.

Selon exploit du 21 mars 2014, la SCI Pra Chapel a accepté la demande de nouvellement du preneur avec une augmentation du loyer annuel à compter du 1er mai 2014.

Par ailleurs, un différend est survenu entre les parties relativement à un arriéré d'indexation du loyer commercial, créance contestée par la SARL Rome Richelieu. Les parties se sont toutefois rapprochées et ont régularisé, le 13 avril 2015, un avenant par lequel la SCI Pra Chapel renouvelle au profit de la SARL Rome Richelieu le bail commercial litigieux pour une durée de neuf années consécutives à compter du 1er mai 2014 pour expirer le 30 avril 2023.

La SARL Rome Richelieu envisageant de vendre son fonds de commerce, un état des lieux a été réalisé le 26 octobre 2016, en présence de la bailleresse, de l'expert mandaté par cette dernière, de deux huissiers de justice, du conseil du preneur ainsi que du cessionnaire pressenti, afin que soit contradictoirement constaté l'état du local donné à bail. Une forte dégradation du plancher du magasin, lequel s'est effondré en partie, a pu être constatée. Elle a été attribuée aux infiltrations en provenance de la cuisine de l'établissement et à l'obturation des conduits de ventilation. Le coût des travaux de reprise a été chiffré selon devis de la SARL BMG en date du 16 décembre 2016, à la somme de 64.860 €.

Selon acte sous seing privé du 30 novembre 2016, la SARL Rome Richelieu a vendu son fonds de commerce à la SAS Le Richelieu, par l'intermédiaire de la société Immobilière du Chapitre.

Par exploit d'huissier en date du 23 décembre 2016, la SCI Pra Chapel a, en application de l'article L 141-14 du code de commerce, formé opposition au prix de vente du fonds de commerce entre les mains du mandataire désigné, la société Immobilière du Chapitre, en joignant le devis de la SARL BMG d'un montant de 64.860 €.

Selon acte du 27 mars 2017, la SCI Pra Chapel a fait assigner la SARL Rome Richelieu devant le tribunal de grande instance de Marseille pour l'entendre condamner à lui verser la somme de 64.860 € au titre des travaux de reprise des locaux loués.

La société Rome Richelieu a fait l'objet d'une décision de dissolution anticipée et M. [J] [D] a été désigné en qualité de liquidateur amiable. Celui-ci a ordonné la clôture des opérations de liquidation selon une assemblée du 15 mai 2017 et la société a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 12 juin 2017.

Par ordonnance en date du 3 août 2017, le président du tribunal de commerce a désigné Me

[E] [R], ès qualités de mandataire ad'hoc de la société Rome Richelieu.

Par actes d'huissier en date des 26 et 28 septembre 2017, la société Pra Chapel a appelé en la cause, Me [R], M. [J] [D], ancien gérant et liquidateur de la société Rome Richelieu, la SAS Le Richelieu et la société Immobilière du Chapitre.

Les différentes procédures ont fait l'objet d'une jonction.

Par jugement en date du 12 mars 2020, le tribunal judiciaire de Marseille a :

- condamné la société Rome Richelieu liquidée, représentée par Me [R], à verser à la société Pra Chapel la somme de 65.263,99 €,

- dit que la somme de 64.800 € séquestrée entre les mains de la société Immobilière du Chapitre le 23 décembre 2016 sera attribuée à la société Pra Chapel,

- condamné M. [J] [D] à verser à la société Pra Chapel la somme de 10.500 € et celle de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [J] [D] aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire,

- rejeté toute autre demande des parties.

Pour statuer en ce sens, le tribunal a retenu que:

- l'état des lieux établi le 26 octobre 2016 a été effectué au contradictoire des parties, que M. [M], expert a constaté l'extrême dégradation du plancher de l'immeuble et en a imputé l'origine à un défaut d'entretien de la société Rome Richelieu, défaut d'entretien manifesté par des infiltrations provenant de la cuisine du restaurant, l'obturation des conduits de ventilation et l'absence pendant plusieurs années d'un bac à graisse,

- en l'état de ces constatations, la société Rome Richelieu doit être condamnée à verser à la société Pra Chapel la somme de 65.263,99 €,

- aux termes de l'article L 237-12 du code de commerce, le liquidateur est responsable vis-à-vis de la société et des tiers des conséquences des fautes qu'il commet dans l'exercice de ses fonctions, que M. [J] [D], en faisant clôturer de manière active les opérations de liquidation de la société Rome Richelieu alors que celle-ci était assignée en justice et que des frais étaient à prévoir, a commis une faute dont il doit répondre, la SCI Pra Chapel démontrant avoir dû exposer la somme de 10.500 €,

- M. [D] ne peut se prévaloir de l'absence de l'état des lieux, celui-ci n'étant pas obligatoire au moment des faits, l'article 1731 du code civil y suppléant et la société Rome Richelieu n'a pas sollicité un état des lieux lors du renouvellement du bail,

- M. [D] conteste les faits mais ne produit aucune facture tendant à démontrer l'existence d'un entretien régulier des locaux loués.

Par déclaration en date du 29 juin 2020, M. [J] [D] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées et signifiées le 15 novembre 2023, M. [J] [D] demande à la cour de:

Vu les dispositions du nouvel article L 145-40-1 du code de commerce,

Vu les dispositions du nouvel article L 145-40-2 du code de commerce,

Vu les dispositions de l'article L 145-35 du code de commerce,

Vu les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile,

Vu les dispositions des articles 1754 et 1755 du code civil,

Vu les dispositions des articles 1719 et 1720 du code civil,

Vu les dispositions du nouvel article L 721-3 du code de commerce,

Vu les dispositions de l'article 1240 du code civil,

Vu les dispositions des articles 6 et 9 du code de procédure civile,

Vu les dispositions de l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme,

Vu les dispositions de l'article 1er 2° de l'ordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016 relative au statut de commissaire de justice;

Au principal,

- dire et juger que le jugement entrepris a violé les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile et de l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme, en se fondant exclusivement sur le rapport de M. [M],

- déclarer nuls les procès-verbaux de constat dressés le 26 octobre 2016 et le 5 décembre 2016 par Me [C], huissier de justice à [Localité 8], ou les déclarer non opposables,

- en conséquence infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Marseille,

Statuant à nouveau,

- condamner la SCI Pra Chapel au remboursement de toutes les sommes perçues en exécution du jugement entrepris,

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 64.860 €, somme qu'elle a perçue de la société Immobilière du Chapitre le 16 juin 2020, et qui représente une partie de la vente de son fonds de commerce,

-sinon, condamner la SCI Pra Chapel à régler à Me [R], mandataire ad'hoc de la SARL Rome Richelieu la somme de 64.860 € à tort saisie, à charge de la reverser à M. [J] [D],

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 10.500 €, somme versée au titre des dommages et intérêts,

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 3.000 €, somme versée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 549,57 €, somme versée au titre des dépens de première instance, en exécution des termes du jugement entrepris,

Y ajoutant,

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 10.000 € à titre de légitimes dommages et intérêts,

Au subsidiaire,

- dire et juger que la SARL Rome Richelieu a respecté son obligation d'entretenir les lieux loués,

- en conséquence infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Marseille,

Statuant à nouveau,

- condamner la SCI Pra Chapel au remboursement de toutes les sommes perçues en exécution du jugement entrepris,

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 64.860 €, somme qu'elle a perçue de la société Immobilière du Chapitre le 16 juin 2020, et qui représente une partie de la vente de son fonds de commerce,

-sinon, condamner la SCI Pra Chapel à régler à Me [R], mandataire ad'hoc de la SARL Rome Richelieu la somme de 64.860 € à tort saisie, à charge de la reverser à M. [J] [D],

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 10.500 €, somme versée au titre des dommages et intérêts,

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 3.000 €, somme versée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 549,57 €, somme versée au titre des dépens de première instance, en exécution des termes du jugement entrepris,

Y ajoutant,

- condamner la SCI Pra Chapel à payer à M. [J] [D] la somme de 10.000 € à titre de légitimes dommages et intérêts,

- en tout état de cause, condamner la SCI Pra Chapel au paiement de la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Il relate qu'aucun état des lieux d'entrée n'a été effectué, que néanmoins, lors de la prise de possession des locaux en 2005, son attention a été attirée par l'existence d'un trou béant d'environ un mètre de diamètre dans le plancher de la cave, au niveau -1, que le représentant de la SCI Pra Chapel lui a toutefois indiqué qu'il prévoyait de gros travaux de rénovation de l'immeuble et donc de réparer le trou constaté dans le plancher de la cave, ce qui ne sera jamais effectué.

Il conclut au caractère infondé de la condamnation prononcée à l'encontre de la SARL Rome Richelieu, société liquidée, pour violation du principe du contradictoire:

- le premier juge a fait siennes les constatations du rapport de M. [M], mandaté par la SCI Pra Chapel et présent le jour de l'établissement de l'état des lieux le 26 octobre 2016,

- l'huissier instrumentaire n'a pas hésité, en violation de sa mission, à porter des appréciations subjectives sur les constatations réalisées, au préjudice du locataire,

- il n'a pas été prévenu de l'intervention de M. [M] et a simplement toléré sa présence,

- M. [M] a pris une part active à cet état des lieux en dictant à l'huissier ce qu'il devait consigner dans son constat et a ensuite rédigé, à la demande et au seul profit du bailleur, un rapport intitulé ' rapport de visite d'expertise' en imputant la responsabilité des dégradations constatées à l'exploitation du fonds par le preneur, sans que l'on puisse déterminer sur quels éléments il s'est fondé pour parvenir à de telles conclusions, d'autant qu'il ne disposait d'aucun élément de comparaison, en l'absence d'état des lieux d'entrée,

- ce compte rendu de visite fait état de diligences entreprises par M. [M] postérieurement et sur la base d'un constat d'huissier non contradictoire du 5 décembre 2016, dressé à la requête de la SCI Pra Chapel, en l'état d'une prétendue évolution des désordres,

- ce rapport ne signale à aucun moment que les locaux ont été loués durant plus de 11 ans et que l'exercice de l'activité commerciale pendant une telle durée est de nature à entraîner immanquablement des dégradations en raison de l'usage normal et de l'usure intrinsèque de l'immeuble,

- le premier juge s'est fondé exclusivement sur le rapport de M. [M] réalisé à la demande du bailleur pour dire que la SARL Rome Richelieu aurait manqué à son obligation d'entretien des lieux loués alors qu'une mesure d'expertise judiciaire était pourtant incontournable,

- il s'est également fondé sur un devis de travaux qui n'a aucun lien avec les constatations prétendument faites par M. [M],

- une expertise amiable, qu'elle soit contradictoire ou non ne peut suffire à elle seule à fonder une décision de justice, de sorte que le tribunal a violé le principe du contradictoire édicté par les articles 16 du code de procédure civile et 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme,

- il est également fondé à solliciter la nullité des deux procès-verbaux de constat dressés les 26 octobre 2016 et 5 décembre 2016 par Me [C], huissier de justice, qui n'est autre que le conjoint de Me Florence Blanc, conseil de la SCI Pra Chapel, alors que l'huissier ne peut pas instrumenter pour ses propres parents.

En tout état de cause, il soutient que la SARL Rome Richelieu a respecté son obligation d'entretien des lieux loués:

- le premier juge a retenu comme date de renouvellement du bail celle du 1er mars 2014 alors que les parties ont conclu postérieurement à cette date, un avenant de renouvellement du bail commercial le 13 avril 2015, a ainsi fait une analyse inexacte du rapport contractuel et une mauvaise application des dispositions légales au rapport contractuel,

- l'avenant de renouvellement, daté et signé le 13 avril 2015, est soumis au nouveau régime du bail commercial prévu par la loi Pinel du 18 juin 2014, applicable à compter du 5 novembre 2014, en ce qu'il forme et constitue un nouveau bail,

- le nouvel article L 145-40-1 du code de commerce d'ordre public rend obligatoire l'établissement d'un état des lieux même dans le cadre du'n renouvellement du bail,

- l'avenant de renouvellement ne contient pas davantage, en annexe, l'information imposée au bailleur portant sur les travaux qu'il envisage de réaliser dans les trois mois à venir et ceux déjà effectué au cours des trois années précédentes,

- même si le contrat prévoit une date d'effet antérieure à la réforme intervenue, c'est la date de la signature du contrat qu'il convient de prendre en compte pour déterminer la loi applicable,

- la présence d'une clause expresse d'exclusion des dispositions de la loi Pinel en page 3 de l'avenant doit être réputée nulle ou non écrite,

- la loi Pinel prévoit qu'en l'absence de diligences du bailleur pour que l'état des lieux soit établi, celui-ci sera privé de la présomption de l'article 1731 du code civil,

- il produit aux débats de nombreuses factures justifiant des réparations locatives qui ont été effectuées, démontrant ainsi l'entretien régulier des lieux loués,

- les dégradations invoquées préexistaient à la prise de possession des lieux par la SARL Rome Richelieu, et notamment l'existence d'un trou dans le plancher de la cave, ainsi qu'il en ressort du témoignage du précédent exploitant du fonds de commerce,

- la réparation de ce trou dans le plancher relève des grosses réparations qui sont à la charge du bailleur, qui au demeurant n'a effectué aucun travaux d'entretien ou de réparation de l'immeuble durant toute la durée de la location et ce, contrairement à ses engagements.

Il ajoute que la SCI Pra Chapel n'a subi aucun préjudice, que suite à la cession par la SARL Rome Richelieu de son fonds de commerce, elle pu immédiatement relouer son bien, sans entreprendre de travaux préalables et pour un loyer supérieur.

Il sollicite enfin la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a été condamné à verser à la bailleresse une somme de 10.500 € à titre de dommages et intérêts alors que cette dernière n'a jamais communiqué la moindre pièce justifiant de la dépense qu'elle prétend avoir exposée.

La SCI Pra Chapel, suivant ses dernières conclusions déposées et notifiées par RPVA le 23 octobre 2023, demande à la cour de :

Vu les dispositions de l'article R 211-4 11° du code de l'organisation judiciaire,

Vu les dispositions des articles 1728 et 1731 du code civil,

Vu les dispositions des articles 1303 et 1304 du code civil,

Vu les dispositions des articles L 237-12 du code de commerce et 1240 du code civil ( anciennement 1382 du code civil),

Vu les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile,

Vu l'avis de la Cour de cassation du 11 octobre 2022,

- déclarer irrecevables comme nouvelles les demandes de M. [J] [D] tendant à voir:

* juger que le jugement entrepris a été rendu en violation des dispositions de l'article 16 du code de procédure civile et de l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme,

* déclarer nuls les procès-verbaux de constats des 26 octobre 2016 et 5 décembre 2016,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Marseille,

- débouter M. [J] [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires,

- condamner M. [J] [D] aux entiers dépens d'appel par application de l'article 696 du code civil,

- condamner M. [J] [D] à payer à la SCI Pra Chapel la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle rappelle que le fondement juridique de son action à l'encontre de la SARL Rome Richelieu, liquidée et représentée par Me [R], mandataire ad'hoc repose sur les articles 1728 et 1731 du code civil et qu'en l'espèce, elle reproche au preneur un défaut d'entretien des lieux loués, à l'origine de désordres nécessitant des travaux de remise en état importants qui doivent être mis à la charge de son ancienne locataire.

Elle précise qu'elle recherche la responsabilité de M. [D], ancien gérant et liquidateur amiable de la société Rome Richelieu, au visa de l'article L 237-12 du code de commerce, au titre du préjudice qu'elle a subi du fait de la clôture prématurée et précipitée des opérations de liquidation.

Elle souligne que comme en première instance, Me [R], ès qualités de mandataire ad'hoc de la société Rome Richelieu s'en rapporte à justice, que ladite société liquidée ne peut être représentée que par son mandataire désigné à cet effet par ordonnance du tribunal de commerce et que seul Me [R] peut valablement conclure et se positionner dans les intérêts de son administrée.

Elle oppose à M. [D] l'irrecevabilité des demandes tendant à dire et juger que le jugement entrepris a violé le principe du contradictoire et tendant à voir prononcer la nullité des procès-verbaux de constat du 26 octobre et 5 décembre 2016 comme étant nouvelles en cause d'appel.

Sur l'absence d'état des lieux d'entrée et la présomption de l'article 1731 du code civil, elle fait valoir que :

- aucun état des lieux n'a été établi lors de la prise de possession en 2005, une telle formalité n'étant alors pas obligatoire et la présomption de l'article 1731 du code civil permettant alors d'y suppléer,

- la société Rome Richelieu est donc présumée avoir reçu, en 2005, les lieux en bon état,

- les dispositions de la loi Pinel entrée en vigueur le 20 juin 2014 ne sont pas applicables en ce que les parties se sont entendues sur un renouvellement du bail à compter du 1er mai 2014, quand bien même l'avenant a été formalisé postérieurement, étant souligné que le preneur n'a pas sollicité d'établissement d'état des lieux lors du renouvellement du bail,

- en application de l'article L 145-40-1 du code de commerce, pour qu'un état des lieux soit effectué, il faut non seulement la conclusion d'un bail mais aussi une prise de possession des lieux, laquelle ne peut intervenir que lors de la conclusion du contrat initial, alors qu'en l'espèce, lors du renouvellement du bail, la société Rome Richelieu était déjà en possession des lieux.

Elle soutien que les désordres litigieux sont exclusivement imputables à un défaut d'entretien du preneur, qu'elle justifie avoir été obligée d'intervenir à plusieurs reprises auprès du preneur afin que celui-ci installe un bac à graisse pour éviter les obstructions répétées des écoulements, que les constatations en date du 26 octobre 2016 ont été faites au contradictoire de la société Rome Richelieu, de son représentant, M. [D], de son conseil et en présence de son propre huissier, de sorte que la force probante du constat de Me [C] ne peut être remise en cause. Elle relève que la cause des désordres constatés a également été consignée dans le rapport de visite rédigé ultérieurement par M. [M], qui était présent le 26 octobre 2016, étant précisé qu'il n'y a pas eu de nouvelle visite de celui-ci et qu'à la lecture de son compte rendu, il est manifeste que le preneur n'a pas entretenu les lieux loués.

Elle conteste l'affirmation de M. [D] qui prétend que la société Rome Richelieu a rempli son obligation d'entretien, qu'il produit pour la première fois en cause d'appel, diverses factures relatives à des interventions qui sont pour la plupart liées à l'activité de restauration qui y était exploitée et, pour d'autres, ont été purement et simplement falsifiées. Elle expose, que contrairement aux allégations adverses, elle justifie que les travaux de remise en état ont bien été commandées et payés par ses soins. Elle estime que concernant la prétendue préexistence des désordres, les témoignages produits par l'appelant sont dépourvues de toute valeur probante, étant précisé que M. [D] et son prédécesseur n'ont jamais dénoncé au bailleur un quelconque trou dans le plancher et un risque d'effondrement, ce qu'ils n'auraient pas manqué de faire si effectivement de tels dommages existaient.

Elle observe, en outre, que M. [J] [D] a commis une faute en ne provisionnant pas la totalité de la réclamation de la SCI Pra Chapel et en clôturant les opérations de liquidation amiable alors qu'une procédure judiciaire étant en cours et que le passif de la société Rome Richelieu n'était pas réglé, sollicitant la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné ce dernier à lui verser une somme de 10.500 € à titre de dommages et intérêts.

La SCP [E]. [R] & A. [L], représentée par Me [E] [R], prise en sa qualité de mandataire ad'hoc de la SARL Rome Richelieu, dans ses conclusions signifiées par RPVA le 29 octobre 2020, demande à la cour de :

- donner acte à la SCP [E]. [R] & A. [L], représentée par Me [E] [R], ès qualités de mandataire ad'hoc, de ce qu'elle s'en rapporte à justice,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La société Immobilière du Chapitre, dans ses conclusions signifiées par RPVA le 26 novembre 2020, demande à la cour de :

- donner acte à la société Immobilière du Chapitre de ce qu'elle a remis les fonds pour un montant de 64.860 € à la SCI Pra Chapel, en exécution du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Marseille en date du 12 mars 2020, signifié à son encontre le 4 juin 2020 et assorti de l'exécution provisoire,

- donner acte à la société Immobilière du Chapitre de ce qu'elle s'en rapporte à justice,

- condamner toute partie succombante à payer à la société Immobilière du Chapitre une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner toute partie succombante aux dépens.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 21 novembre 2023.

MOTIFS

Sur l'irrecevabilité des demandes de M. [J] [D]

Au visa de l'article 564 du code de procédure civile, la SCI Pra Chapel oppose à M. [J] [D] l'irrecevabilité de ses demandes tendant à voir:

- juger que le jugement entrepris a été rendu en violation des dispositions de l'article 16 du code de procédure civile et de l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme,

- déclarer nuls les procès-verbaux de constats des 26 octobre 2016 et 5 décembre 2016 ou les déclarer non opposables.

M. [J] [D] n'a pas répondu à cette fin de non de recevoir.

En vertu de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer la compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la révélation d'un fait.

La SCI Pra Chapel verse aux débats les conclusions récapitulatives de première instance notifiées le 30 septembre 2019 dans les intérêts de M. [J] [D] à la lecture desquelles il apparaît que celui-ci n'a jamais demandé au tribunal de déclarer nuls les procès-verbaux de constats des 26 octobre 2016 et 5 décembre 2016 ou de les déclarer non opposables.

Cette demande est donc irrecevable comme étant nouvelle en cause d'appel.

En revanche, tel n'est pas le cas de la demande tendant à voir juger que le jugement entrepris a été rendu en violation des dispositions de l'article 16 du code de procédure civile et de l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'homme, dès lors qu'une telle prétention s'analyse comme une critique de la décision frappée d'appel.

Sur l'action de la SCI Pra Chapel à l'encontre de la SARL Rome Richelieu, liquidée, représentée par Me [R], ès qualités de mandataire ad'hoc désigné à cet effet

La SCI Pra Chapel reproche à la SARL Rome Richelieu, avec qui elle était liée par un bail commercial, un défaut d'entretien des lieux loués ayant rendu nécessaire l'accomplissement de travaux de remise en état pour une somme de 64.860 € TTC, à laquelle s'ajoutent les frais de l'opposition au prix de vente par acte extra judiciaire du 23 décembre 2016, soit un total de 65.263,99 €.

Comme le souligne à juste titre la SCI Pra Chapel, la SARL Rome Richelieu, société liquidée, ne peut être représentée que par son mandataire ad'hoc désigné à cet effet selon ordonnance du 3 août 2017 du président du tribunal de commerce de Marseille et seul Me [E] [R], ès qualités, peut valablement conclure et se positionner dans les intérêts de son administrée.

Or, comme en première instance, Me [R], dans ses conclusions en cause d'appel, s'en rapporte à justice.

M. [J] [D] a été mis en cause, à titre personnel, en sa qualité d'ancien liquidateur de la SARL Rome Richelieu. Il n'a donc pas qualité pour demander à son profit le remboursement de sommes auxquelles la société Rome Richelieu a été condamnée par le premier juge au profit de la SCI Pra Chapel, ni encore moins pour solliciter le paiement desdites sommes au profit de Me [R], ès qualités de mandataire ad'hoc, à charge pour ce dernier de les lui reverser.

M. [D] était certes le gérant de la SARL Rome Richelieu mais pour autant seule celle-ci a qualité de preneur de locaux loués à la SCI Pra Chapel et est débitrice d'une obligation d'entretien envers la bailleresse. Cette société, aujourd'hui liquidée, est exclusivement représentée par son mandataire ad'hoc, Me [R], qui a seul qualité pour la défendre et former en son nom des demandes.

Sur le fond, il est constant que les parties sont en l'état d'un acte en date du 20 mai 2005, à effet du 1er mai 2005, par lequel la SCI Pra Chapel a donné à bail commercial à la société Rome Richelieu, des locaux sis [Adresse 6] à [Localité 9].

Ledit bail comporte une clause intitulée ' entretien, travaux, réparation' stipulant que ' Pendant le cours du présent bail et de ses renouvellements, le preneur devra entretenir les biens loués constamment en bon état d'entretien et de réparation de toutes sortes quelles qu'en soient la nature et l'importance, à l'exclusion de ce que le bailleur conserve à sa charge (...) Le preneur supportera toutes les réparations, y compris celles visées à l'article 606 du code civil, en raison d'un défaut d'entretien ou d'exécution des travaux lui incombant ou en cas de dégradations de son fait, de celui de sa clientèle ou de son personnel (...)'

Aucun état des lieux n'a été effectué lors de la prise de possession par le preneur en mai 2005, une telle formalité n'étant pas obligatoire à cette date, l'article 1731 du code civil y suppléant.

En vertu de cet article, la société Rome Richelieu est présumée avoir reçu les lieux en bon état de réparations locatives.

La loi dite Pinel en date du 18 juin 2014, entrée en vigueur le 20 juin 2014, a certes introduit un nouvel article L 145-40-1 du code de commerce qui dispose que ' Lors de la prise de possession des locaux par le locataire en cas de conclusion d'un bail, de cession du droit au bail, de cession ou de mutation à titre gratuit du fonds et lors de la restitution des locaux, un état des lieux est établi contradictoirement et amiablement par le bailleur et le locataire ou par un tiers mandaté par eux. L'état des lieux est joint au contrat de location ou, à défaut, conservé par chacune des parties. Si l'état des lieux ne peut être établi dans les conditions prévues au premier alinéa, il est établi par un huissier de justice, sur l'initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire. Le bailleur qui n'a pas fait toutes diligences pour la réalisation de l'état des lieux ne peut invoquer la présomption de l'article 1731 du code civil.'

Néanmoins, comme le fait observer la SCI Pra Chapel, les parties se sont entendues sur un renouvellement du bail à compter du 1er mai 2014, quand bien même l'avenant a été formalisé postérieurement et, surtout, en vertu du texte précité, un état des lieux n'est exigé que lors de la prise de possession des locaux par le locataire, prise de possession qui, par définition, n'intervient qu'une fois, lors de la conclusion du contrat initial.

En l'occurrence, lors du renouvellement du bail, la société Rome Richelieu était déjà en possession des lieux depuis 2005.

La présomption de l'article 1731 doit donc trouver pleine et entière application, le premier juge ayant par ailleurs relevé que le preneur n'a pas sollicité un état des lieux lors du renouvellement du bail et il ressort de l'avenant signé le 13 avril 205 que ce dernier a déclaré ' avoir une parfaite connaissance desdits locaux pour les occuper déjà et les accepte en conséquence dans l'état où ils se trouvent, sans réclamation, ni recours d'aucune sorte'.

L'état des lieux établi le 26 octobre 2016 par Me [C] a été effectué au contradictoire des parties, à savoir en présence de M. [G], représentant la SCI Pra Chapel, M. [M], expert près de la cour d'appel mandaté par la SCI Pra Chapel, Mme [D], épouse de l'appelant, le conseil de la SARL Rome Richelieu ainsi qu'un huissier mandaté par cette dernière et, le cessionnaire pressenti.

L'huissier a ainsi pu relever dans la cave n° 7au niveau -2, que ' en entrant à gauche, en plafond de l'angle, au-dessus d'un bac à graisse soutenu par des briques cassées, je constate un effondrement partiel des voûtains. Une grande quantité de salpêtre est visible sur ces voûtains. Au-dessus du bac à graisse, le plafond présente un taux d'humidité supérieur à 80% selon une mesure effectuée par M. [M] devant moi (...) Je constate les mêmes dégradations en plafond, au niveau du côté [Adresse 4], où les voûtains présentent cette fois un effondrement partiel d'une profondeur d'environ 9 cm (...) M. [W], après concertation avec M. [M] m'indique (...)' La ventilation naturelle des caves a été supprimée (..) Le bac à graisse n'a été mis en oeuvre qu'en 2015. Du fait de l'absence de bac à graisse, les tuyaux d'écoulement des eaux se bouchaient régulièrement et l'eau usée ressortait dans la cour et les caves (...) La cave 7 est située sous la cuisines, une partie des voûtains s'est effondrée. Cela est dû l'absence d'étanchéité du plancher des cuisines et les fuites répétitives en provenance des cuisines, lave vaisselle en particulier (...) ' Pour une description plus générale de la pièce, je note que les quatre murs sont partiellement recouverts de salpêtre. En plafond, de nombreuses traces de salpêtre sont également visibles. Les fers des voûtains de la totalité du plafond sont oxydés et présentent un état de dégradation. Le sol de la pièce est encombré de matériaux hétéroclites (...) Dans la cave n° 4, M. [W], en concertation avec M. [M] m'indique ' dans cette cave, le plafond avec poutre bois et enfustage bois s'est partiellement effondré; cet effondrement est dû d'une part à une trop grande humidité des caves en sous-face du plancher et aux eaux de condensation du groupe froid de la pompe à bière qui ne sont pas évacuées, les condensats sont récupérés dans une simple boîte de conserve.' Je me rends dans la cave n° 6, placée sous la chambre froide du restaurant, je note dans cette pièce que les fers en plafond sont oxydés et dégradés de manière importante; je note également la présence d'une infiltration d'eau immédiatement en entrant dans la pièce à gauche . M.. [W] après concertation avec M. [M] l'indique ' l'absence d'isolation du sol de la chambre froide située au dessus a entraîné une condensation en sous face du plancher de la cave n° 6(..) '

L'huissier a également constaté, dans la cuisine, que ' le plafond est dégradé en fond de pièce suite à un ancien dégât des eaux. Je note un petit affaissement au sol sur environ 10 cm où le carrelage est fendu ' , dans la réserve [Adresse 10] que ' au fond de la pièce, je constate un trou de 55 cm de large et 93 cm de long, protégé par des planches amovibles. Le sol de la pièce est dégradé et en très mauvais état' et dans la salle sous-sol, ' la porte vers la salle de repos placée sous les escaliers comporte un trou important en son centre'.

Enfin, il a relevé, dans la cave n° 1, située sous les toilettes du restaurant, que 'les enfustages en bois sont pourris. M. [G], après concertation avec M. [M] m'indique '(...) le plancher sous le carrelage n'est pas étanché, les eaux de l'entretien quotidien et l'humidité des caves maintiennent une humidité qui entraîne un pourrissement des planches d'enfustage et de la poutraison'.

Il en résulte que l'huissier a personnellement constaté des désordres et recueilli les observations de M. [M] sur leurs causes et consigné le tout dans son procès-verbal.

Force est de constater que la SARL Rome Richelieu qui était présente et dûment assistée de son conseil, n'a pas fait la moindre observation, remarque ou contestation et n'a pas demandé la SCP Bernard, également présente et qu'elle avait mandatée d'apposer la moindre remarque.

Le procès-verbal de constat dressé le même jour par la SCP Bernard, confirme l'existence des désordres constatés par Me [C], à savoir la présence d'infiltrations récurrentes, l'effondrement partiel des voûtains, la présence de salpêtres recouvrant les murs de la cave.

M. [M], dans son rapport établi suite à la visite contradictoire réalisée le 26 octobre 2016, confirme ce qu'il avait alors indiqué à Me [C] et que ce dernier avait consigné dans son procès-verbal de constat, à savoir que:

- l' importante humidité présente dans les caves enterrées du 2ème sous-sol ne peut plus dans le cas présent s'évacuer car leurs soupiraux de ventilation ( sur la [Adresse 10] et [Adresse 7]) ont été fermés, de sorte que la ventilation naturelle des caves a été supprimée dans sa quasi totalité,

- le mauvais état du plancher des cuisines formant le plafond de la cave n° 7 est dû à l'absence de bac à graisse pendant plusieurs années ( installation en 2015), aux multiples infiltrations au niveau de l'alimentation de la machine à laver la vaisselle et de l'évier, au PVC cassé en provenance de l'arrière de l'armoire frigo,

- l'affaiblissement de la structure du plancher de la chambre froide est dû à la non isolation thermique du sol de la chambre froide et à une réparation inefficace des fuites sur l'écoulement du condensat,

- l'effondrement du plancher de la réserve formant le plafond des caves n° 4 et 5 est dû à un pourrissement des planches d'enfustage ( les condensats sont récupérés dans une simple boîte de conserve) et des fuites d'eau en provenance du RDC vers le 1er sous-sol ( écoulements en provenance de la machine à café, machine à glaçons, évier derrière le comptoir du bar,

- les eaux de l'entretien quotidien et l'humidité des caves maintiennent une humidité des planches d'enfustage et de la poutraison des sanitaires des clients.

Enfin, le procès-verbal de constat du 5 décembre 2016, n'est pas au contradictoire de la SARL Rome Richelieu mais a été dressé juste après la cession le 30 novembre 2016 par cette dernière de son fonds à la SAS Richelieu, à la demande de celle-ci lors de sa prise de possession des locaux et en présence de la SCI Pra Chapel. Il ressort de ce constat qu' a été relevé, dans la cuisine, la présence de vieux scotch grossièrement peint pour combler l'absence de plinthe permettant l'étanchéité du sol ainsi que sur les jointures du tuyau d'évacuation, que sous le lave vaisselle, le sol est fortement dégradé et s'affaisse fortement, qu'en sortant de la cuisine, le mur qui était recouvert d'étagères présente une importante dégradation due à des infiltrations et que de manière générale, les éléments retirés comportent d'importantes quantités de graisse et que les éléments électriques à proximité sont en très mauvais état. Dans le local à l'arrière du bar, l'état du sol est également très dégradé et les différents conduits vétustes et dégradés.

Ces différents éléments établissement qu'incontestablement la SARL Rome Richelieu n'a pas entretenu les lieux qui lui ont été donnés à bail, en violation des obligations qui lui incombent.

En outre, il ne peut être reproché au premier juge de ne pas avoir respecté le principe du contradictoire comme s'étant appuyé sur le rapport de visite de M. [M], alors que ce document fait suite à l'état des lieux contradictoire effectué en 26 octobre 2016 en présence de toutes les parties. En outre, ce rapport est corroboré par le procès-verbal de constat d'huissier du 26 octobre 2016 de Me [C], celui dressé le même jour par la SCP Bernard et enfin celui en date du 5 décembre 2016, lesquels font état des mêmes désordres qui ne peuvent que résulter d'un défaut d'entretien du preneur et non pas d'une usure normale des lieux loués pendant 11 ans, laquelle ne conduit pas à un pourrissement des planchers et un effondrement des voûtains.

Alors que M. [J] [D] n'avait communiqué en première instance aucune facture tendant à démontrer l'existence d'un entretien régulier des locaux, il produit désormais devant la cour un certain nombre de factures dont il y a lieu de relever que:

- une partie est étrangère l'entretien des lieux loués ( pièces 23, 24, 29 à 31 afférentes à la véranda, non comprise dans le bail commercial, pièce 34: facture d'entretien de la chambre froide, pièces 35 à 41 concernant l'entretien des extincteurs, obligation inhérente à l'exploitation d'un établissement accueillant du public, pièce 42 relative à l'installation d'une climatisation, pièces 46 à 57 relatives à la collecte d'huiles usagées propres, obligation propre aux métiers de bouche, pièces 61 à 63 concernant le dégraissage de la hotte aspirante et pièces 70 et 71, redevance réglée pour la vérification du monte-charge),

- d'autres sont des simples devis, la mention manuscrite ' facture réglée en espèces' étant dépourvue de valeur probatoire ( pièce 32),

- d'autres ont été, ainsi qu'en justifie la SCI Pra Chapel, falsifiées ( pièce 44 concernant la prétendue pose d'un bas à graisse en 2011 alors qu'il n'a été installé qu'en avril 2015 ainsi qu'il en résulte de la facture produite par la société Pomeco datée du 27 avril 2015, pièce 43 intitulée ' facture recherche de fuite' alors que seul un devis a été établi,

- d'autres sont anecdotiques ( pièce 22: achat d'un système de ferme porte pour 42,11 € ) .

Quant à l'affirmation de M. [D] qui prétend que les désordres préexistaient à la prise de possession des lieux par la SARL Rome Richelieu, en 2005, s'appuyant notamment sur le témoignage de son prédécesseur, M. [T], la cour observe que le preneur n'a jamais informé le bailleur, ni formulé la moindre demande à ce titre, ce qui ne manque pas d'étonner s'agissant de la présence alléguée d'un véritable trou dans le plancher, ni au moment de la conclusion du bail, ni lors de son renouvellement, la seule contestation émise par cette dernière portant sur un arriéré d'indexation.

La société Pra Chapel produit un devis de la société BMG du 16 décembre 2016 d'un montant de 64.860 € TTC, portant sur des travaux en lien avec les désordres constatés ( démolition des planchers hauts des caves, évacuation et traitement des déchets, rebouchage des trous et scellement des anciennes poutres, réouverture des anciens soupiraux, réalisation d'un nouveau plancher poutrelle, étanchéité liquide et carrelage dans cuisine).

Elle justifie par ailleurs de la réalisation de ces travaux finalement par l'entreprise ETS Veres ainsi qu'il en ressort de la facture acquittée en date du 10 juin 2019 selon plusieurs situations de travaux, pour un montant de 64.904,40 € TTC et des prestations identiques à celles figurant sur le devis de la société BMG.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que le tribunal a retenu que la société Rome Richelieu était redevable d'une somme de 65.263,99 €, correspondant au coût des travaux de remise en état ( 64.860 €), outre les frais d'opposition au prix de vente par acte d'huissier du 23 décembre 2016 ( 403,99 €).

Sur la responsabilité de M. [J] [D]

En application de l'article L 237-12 du code de commerce, le liquidateur est responsable, tant à l'égard de la société, que des tiers, des conséquences dommageables des fautes commises par lui dans l'exercice de ses fonction.

Il est constant, en l'espèce, que la société Rome Richelieu a fait opposition au prix de vente par acte d'huissier en date du 23 décembre 2016 et a introduit la présente procédure à l'encontre de la société Rome Richelieu par assignation du 27 mars 2017.

Il est toutefois établi que cette société a été liquidée et que son ancien gérant et liquidateur amiable, M. [J] [D] a clôturé les opérations de liquidation selon assemblée générale du 15 mai 2017, l'extrait K Bis révélant que la société a été radiée dès le 15 juin 2017.

Or, la clôture de la liquidation ne peut être prononcée que si les comptes ont été apurés et les dettes intégralement payés. En effet, la liquidation amiable impose l'apurement intégral du passif et des droits et obligations de la société. Tel n'est pas lorsque la société est engagée dans une instance judiciaire, ce que dont l'appelant avait parfaitement connaissance.

M. [D], en clôturant de manière précipitée les opérations de liquidation amiable de la société Rome Richelieu alors que celle-ci était assignée en justice et que des frais étaient à prévoir, a commis une faute contraignant la SCI Pra Chapel à exposer de nouveaux frais ( frais d'avocat et de greffe ) pour faire désigner un mandataire ad'hoc afin de représenter la société liquidée, régler les honoraires du mandataire et régulariser la procédure à l'égard de ce dernier en faisant délivrer une assignation ( frais d'avocat et d'huissier).

Il ressort des deux ordonnances du président du tribunal de commerce de Marseille en date du 3 août 2017 et du 3 novembre 2020 que la SCI Pra Chapel a été condamnée à verser, à titre de provisions à valoir sur ses honoraires, à Me [R], les sommes respectives de 1.000 € ( procédure de première instance) et 1.200 € ( procédure d'appel), outre les dépens.

Bien qu'elle n'en justifie pas du montant, la SCI Pra Chapel a, à chaque fois, été contrainte d'exposer des frais d'avocats afin de déposer une requête en désignation d'un mandataire ad'hoc ainsi que des frais d'huissier puisqu'elle a été contrainte de régulariser la procédure en assignant Me [R] devant le tribunal judiciaire de Marseille.

La cour dispose ainsi de suffisamment d'éléments pour chiffrer le préjudice subi par la SCI Pra Chapel en lien avec la faute commise par M. [J] [D] à la somme de 5.000 €.

Le jugement entrepris sera, en conséquence, confirmé sauf sur le quantum des dommages et intérêts alloués à la SCI Pra Chapel, qui sera ramené à 5.000 €.

Au regard de la solution apportée au présent litige, la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive présentée par l'appelant ne peut qu'entrer en voie de rejet.

Aucune circonstance ne justifie de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Vu l'article 696 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe et par arrêt contradictoire,

Déclare irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande de M. [J] [D] tendant à voir déclarer nuls les procès-verbaux de constats des 26 octobre 2016 et 5 décembre 2016 ou les déclarer non opposables,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné M. [J] [D] à payer à la SCI Pra Chapel la somme de 10.500 € à titre de dommages et intérêts,

Statuant sur ce point,

Condamne M. [J] [D] à payer à la SCI Pra Chapel la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts,

Y ajoutant,

Déboute M. [J] [D] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Laisse les dépens de la procédure d'appel à la charge de M. [J] [D].