Cass. 3e civ., 21 janvier 2015, n° 13-13.377
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Terrier
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Spinosi et Sureau
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 novembre 2012), que la société Port Médoc, maître d'ouvrage, a confié la réalisation d'un port de plaisance à la société Guintoli, entreprise générale, laquelle a sous-traité à la société Océa l'aménagement des pontons et catways ; que le port a été mis en service le 4 juillet 2004 et qu'après divers désordres constatés de novembre 2005 à septembre 2006, la réception des travaux est intervenue le 13 septembre 2006 ; qu'à la suite de nouveaux désordres en décembre 2006, la société Port Médoc, après expertise, a assigné la société Guintoli, la société Océa et la société Axa France, assureur de cette société, en indemnisation de ses préjudices ;
Sur le premier moyen pris en sa seconde branche, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté que la société Port Médoc avait été autorisée par ordonnance du président du tribunal de commerce à assigner la société Océa dans des délais réduits et relevé qu'à l'audience du 19 février 2010 le tribunal avait fixé un calendrier de procédure, la cour d'appel, qui, sans être tenue de rechercher si la condition d'urgence admise par cette ordonnance était remplie, a retenu que la société Océa ne démontrait pas l'existence d'un grief découlant de la délivrance de l'assignation en exécution de cette ordonnance et justifiant son annulation, a légalement justifié sa décision ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que la société Océa avait accepté, en toute connaissance de cause, de participer pendant plusieurs années aux opérations d'expertise avec l'expert désigné par le tribunal de commerce et retenu que cette société ne démontrait pas en quoi la prestation de serment de l'expert devant ce tribunal était irrégulière, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur une renonciation de la société Océa à invoquer la nullité de la nomination de l'expert et, sans être tenue de répondre à des conclusions fondant la nullité de cette nomination sur l'absence d'objectivité du rapport d'expertise, a déduit de ces seuls motifs que la demande d'annulation du rapport d'expertise ne pouvait être accueillie, a légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que les épures de structure initiales des catways effectuées par la société Océa n'étaient pas judicieuses, que leurs plans d'exécution étaient sommaires, faute d'avoir été précédés par la réalisation d'un carnet de détail, d'un carnet de repérage des sections et d'un carnet de détail des assemblages par soudure, et que la résistance et la stabilité des éléments et assemblages travaillant à la fatigue avaient été affaiblies par la mauvaise réalisation des travaux de soudure en usine et sur site, ce qui rendait l'ouvrage impropre à sa destination, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur l'absence de réaction de la société Océa devant l'hypothèse d'une houle de 1,90 m et n'était pas tenue de répondre à des conclusions invoquant une cause étrangère constituée par une faute de la société Guintoli que ses constatations rendaient inopérantes, a pu déduire de ces seuls motifs que la demande de la société Port Médoc devait être accueillie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le quatrième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la société Océa à verser à la société Port Médoc la somme de 1 115 822,55 euros toutes taxes comprises et rejeter ses demandes reconventionnelles, l'arrêt retient qu'il confirme les sommes allouées par le tribunal, lequel a fait sien le récapitulatif du coût des remises en état et réparations établi par l'expert ainsi que le partage des responsabilités préconisé par celui-ci ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Océa qui soutenait que le préjudice de la société Port Médoc, société commerciale, devait être évalué hors taxes, ni aux moyens contestant les éléments de ce préjudice et demandant le remboursement des réparations effectuées à ses frais avancés et le versement de la retenue de garantie, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la première branche du premier moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Océa à verser la somme de 1 115 822,55 euros TTC à la société Port Médoc et rejette ses demandes reconventionnelles, l'arrêt rendu le 22 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.