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Décisions

CA Grenoble, ch. com., 25 janvier 2024, n° 22/00120

GRENOBLE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Square Info (SAS)

Défendeur :

Siegried@Melanie (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Figuet

Conseillers :

Mme Faivre, M. Bruno

Avocats :

Me Lovera, Me Rigoulot

TJ Valence, du 9 déc. 2021, n° 20/01040

9 décembre 2021

Faits et procédure :

1. La Sci Siegried@Mélanie est propriétaire, [Adresse 1] (26), d'un local commercial situé dans un ensemble immobilier appelé «Espace Diamant». Suivant contrat du 22 juin 2015, ce local constituant le lot n°3 a été donné à bail commercial à la Sas Square Info, pour une durée de neuf années expirant le 30 juin 2024, moyennant le paiement d'un loyer de 18.000 euros payable mensuellement.

2. Par courrier du 12 février 2019 remis en main propre, la Sci Siegried@Mélanie a informé la Sas Square Info de son intention de vendre le local au prix de 186.000 euros TTC. Par acte d'huissier du 8 mars 2019, la Sas Square Info a fait part au vendeur de son intention de faire usage de son droit de préemption, d'accepter la cession au prix de 186.000 euros, et d'avoir recours pour ce faire à un prêt.

3. Par courrier du 21 mars 2019, le bailleur a pris acte de l'exercice par la Sas Square Info de son droit de préemption et lui a demandé de se rapprocher de son banquier pour finaliser l'opération. Aux termes de ce même courrier, elle a rappelé que la Sas Square Info s'opposait à la vente du local à la Sci Cockazz et se portait en conséquence acquéreur du lot n°3 aux mêmes conditions, à savoir 155.000 euros HT pour les murs et 55.000 euros HT pour les travaux réalisés à l'occasion de l'aménagement du local.

4. Aucune vente n'est intervenue, la Sci Siegried@Mélanie a fait délivrer à la Sas Square Info un commandement le 12 juin 2019 aux fins d'obtenir la justification d'une assurance et le paiement de la somme de 4.152,96 euros au titre des loyers et charges arrêtés au 11 juin 2019.

5. Par courrier recommandé avec avis de réception du 14 novembre 2019 adressé au conseil de la Sci Siegried@Mélanie, le conseil de la Sas Square Info a sollicité la régularisation de la vente au prix de 186.000 euros, suite à l'acceptation par acte d'huissier du 8 mars 2019 de l'offre d'acquisition, l'informant également qu'à défaut, sa cliente saisira la juridiction compétente pour faire valoir ses droits. Il n'a pas été donné suite à ce courrier et en conséquence, la Sas Square Info a assigné la Sci Siegried@Mélanie devant le tribunal judiciaire de Valence le 29 avril 2020.

6. Par jugement du 9 décembre 2021, le tribunal judiciaire a':

- débouté la Sas Square Info de ses demandes, fins et prétentions';

- débouté la Sci Siegried@Mélanie de sa demande reconventionnelle tendant au constat du jeu de la clause résolutoire du bail commercial du 22 juin 2015 et à l'expulsion de la Sas Square Info';

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile';

- condamné la Sas Square Info aux entiers dépens.

7. La société Square Info a interjeté appel de cette décision le 5 janvier 2022, en ce qu'elle a été déboutée de ses demandes'; en ce que le tribunal a dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a condamnée aux dépens.

L'instruction de cette procédure a été clôturée le 28 septembre 2023.

Prétentions et moyens de la société Square Info':

8. Selon ses conclusions remises le 5 décembre 2022, elle demande à la cour, au visa de l'article L.145-46 I du code de commerce, des articles 1304 (ex. 1178) 1221 et 1231 du code civil':

- de la déclarer recevable et bien fondée en son appel';

- y faisant droit, d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la concluante de ses demandes';

- y faisant droit, et statuant à nouveau, d'ordonner l'exécution forcée de la vente du local commercial par l'intimée à la concluante';

- d'assortir l'exécution forcée de ladite vente d'une astreinte à la charge de l'intimée d'un montant de 100 euros par jour de retard, à compter de la signification du jugement à intervenir jusqu'à la signature de l'acte authentique définitif de la vente du local commercial';

- de condamner l'intimée à verser à la concluante la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts, au titre de la résistance abusive à la signature de la vente';

- de condamner l'intimée à verser à la concluante la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts, au titre de la perte de chance de conclure la vente';

- de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté l'intimée de sa demande de constat de la clause résolutoire contenue dans le bail commercial, de sa demande d'expulsion et de règlement d'arriérés de loyers';

- par conséquent, de débouter l'intimée de son appel incident';

- en tout état de cause, de condamner l'intimée à régler à la concluante la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

- de la condamner aux dépens avec distraction au profit de maître Mickaël Lovera, avocat.

Elle expose':

9. - que suite à l'exercice du droit de préemption et de l'acceptation du prix de 186.000 euros TTC par la concluante, l'intimée a cependant modifié unilatéralement le prix dans son courrier du 21 mars 2019, pour le porter à 155.000 euros HT pour les murs et à 55.000 euros HT pour les travaux exécutés'; que la concluante a déposé un dossier de prêt et a obtenu un financement pour 203.000 euros, les documents étant déposés auprès du notaire chargé de la vente, mais que depuis le 5 juillet 2019, date de l'expiration du délai légal, l'intimée n'a toujours pas régularisé la vente bien que toutes les conditions sont réunies';

10. - que la demande d'exécution forcée de la vente du local est bien fondée au regard de l'article L145-46-1 du code de commerce et des articles 1221 et 1304-3 (anciennement 1178) du code civil, puisque la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement'; qu'en l'espèce, la concluante a respecté ses obligations afin de pouvoir exercer son droit de préemption, alors que l'intimée a subitement modifié le prix de la vente'; qu'il y a eu accord sur la chose et le prix lors de la signification de l'exploit informant l'intimée de l'exercice du droit de préemption le 8 mars 2019'; que suite à la modification du prix par l'intimée, un nouveau délai aurait dû être ouvert afin de permettre à la concluante d'accepter le prix et de préparer la vente'; que l'intimée a ainsi commis une faute en empêchant la concluante de pouvoir bénéficier de son droit de préférence, ce que n'a pas pris en compte le tribunal';

11. - que la résistance abusive de l'intimée a occasionné un préjudice à la concluante devant être indemnisé par l'allocation de 5.000 euros'; que la concluante a subi une perte de chance de racheter le local commercial, à hauteur des fonds mobilisés et empruntés pour cette acquisition, justifiant l'octroi de 100.000 euros';

12. - concernant l'appel incident de l'intimée, que si elle a fait délivrer un commandement de payer le 12 juin 2019, elle a cependant sollicité l'expulsion de la concluante par assignation du 19 avril 2020, sans ainsi solliciter cette expulsion dans le mois de cette signification'; qu'elle a fait délivrer un second commandement le 15 octobre 2019, ce qui sous-entend qu'elle a renoncé au bénéfice du premier'; que peu importe que l'intimée bénéfice d'un délai de cinq ans pour recouvrer des loyers'; qu'elle n'a pas fait constater l'acquisition de la clause résolutoire prévue dans le bail sur la base de ce second commandement';

13. - que l'appel incident ne porte que sur la disposition du jugement ayant rejeté la demande tendant au constat de la clause résolutoire, de sorte que la cour n'est saisi que de ce chef, et non d'une action tendant à solliciter la résiliation judiciaire du bail';

14. - que la concluante a régularisé en grande partie la dette locative depuis la signification du commandement du 12 juin 2019'; que l'intimée a manqué à l'obligation d'exécuter son obligation de bonne foi en délivrant un commandement visant la clause résolutoire alors que le délai pour conclure la vente aux conditions acceptées par les parties n'était pas expiré'; que ce commandement n'est qu'un moyen de pression afin que la concluante renonce à son droit de préemption'; que si l'intimée indique qu'elle n'a pas renoncé au bénéfice du premier commandement, dans la mesure où le second a été délivré pour les mêmes motifs, cela démontre que l'intimée a mis en œuvre de mauvaise foi le premier, d'autant qu'elle ne demande pas le paiement de loyers impayés.

Prétentions et moyens de la Sci Siegried@Mélanie':

15. Selon ses conclusions remises le 26 septembre 2022, elle demande à la cour, au visa des articles L145-41, L145-46 du code du commerce, 1121 et 1231 du code civil':

- à titre principal, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Sas Square Info de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions et l'a condamnée aux entiers dépens';

- à titre incident, de réformer ce jugement en ce qu'il a débouté la concluante de sa demande reconventionnelle tendant au constat du jeu de la clause résolutoire du bail commercial du 22 juin 2015 et à l'expulsion de la Sas Square Info; en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile;

- en tout état de cause, de condamner la Sas Square Info à verser la somme de 5.000 euros à la concluante en application de l'article 700 du code de procédure civile';

- de condamner la Sas Square Info aux dépens.

L'intimée soutient':

16. - que l'acceptation de l'offre d'achat de l'appelante du 8 mars 2019 était subordonnée à la condition suspensive d'obtenir une offre de prêt, et ainsi imparfaite, la rencontre des volontés n'intervenant que lors de la signature de l'acte authentique, accompagné d'une offre de prêt conforme dans le délai imparti';

17. - que l'appelante soutient à tort avoir obtenu un accord de prêt, ne produisant aucun document du Crédit Agricole le confirmant, mais produisant seulement un courrier transmis le 6 juillet, soit deux jours avant la fin du délai de réalisation de la vente, par lequel la banque lui a indiqué son accord, sous la condition de fournir les éléments du dossier'; que ce courrier ne respecte pas le formalisme imposé par l'article 5 de la loi du 13 juillet 1979, concernant l'offre de prêt adressé par le prêteur'; que ce courrier ne vise aucun taux, et ne contient pas les mentions que doit contenir une véritable offre de prêt, ce qui démontre qu'en quatre mois, l'appelante n'avait entrepris aucune démarche';

18. - qu'en l'absence d'offre de prêt, la vente n'a pu ainsi se réaliser dans le délai prévu par l'article L145-45-1 du code de commerce, de sorte que l'offre de vente est devenue caduque, ce qu'a retenu le tribunal';

19. - que si l'appelante invoque des manquements de la concluante en ce qu'elle a proposé une seconde offre à un prix plus élevé treize jours après l'acceptation de la première offre, cela est inopérant faute de justifier des moyens nécessaires pour obtenir le financement dans le délai imparti, ce qu'a également retenu le tribunal'; que le prix de la vente mentionné dans la seconde offre était de 210.000 euros, de sorte que le montant du prêt ne pouvait être de 203.000 euros';

20. - concernant l'acquisition de la clause résolutoire, que le commandement du 12 juin 2019 a visé l'obligation de justifier d'une assurance et de payer les loyers et charges arriérés pour 4.321,41 euros, conformément à la clause insérée dans le bail, selon le décompte établi par l'agence Les Allées'; que les causes de ce commandement n'ont pas été réglées'; que le second commandement du 15 octobre 2019 est fondé sur les mêmes griefs, et ne peut être assimilé à une renonciation tacite aux effets du premier commandement';

21. - que la concluante a demandé l'infirmation du jugement déféré sur ces points, conformément aux articles 548 et 901 du code de procédure civile, de sorte que le constat de la clause résolutoire impose le prononcé de la résiliation du bail';

22. - que peu importe que la demande en paiement soit intervenue dix mois après la signification du commandement, puisque l'action en paiement des loyers commerciaux se prescrit par cinq ans, et non selon le délai de prescription biennale prévu par l'article L145-60 du code de commerce'; que ce délai de dix mois ne peut constituer une faute';

23. - que si l'appelante soutient avoir régularisé en grande partie l'arriéré depuis la signification du commandement du 12 juin 2019, le juge doit constater l'acquisition de la clause résolutoire quelle que soit la gravité de l'infraction alléguée', même si le preneur est de bonne foi'; que la régularisation n'est intervenue que le 13 janvier 2020, soit après l'acquisition de la clause résolutoire un mois après la délivrance du commandement.

*****

24. Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS DE LA DECISION :

1) Sur la réalisation de la vente':

25. Selon le tribunal, la Sci Siegried@Mélanie a remis en main propre à la Sas Square Info le 12 février 2019 un courrier lui notifiant son intention de vendre les locaux donnés en location. Cette notification satisfait aux prescriptions de l'article L.145-43-1 précité dès lors que les quatre premiers alinéas dudit article sont reproduits dans le courrier et que les conditions de la vente sont précisées, le versement du prix devant intervenir comptant le jour de la signature de l'acte authentique. Le tribunal a précisé que le prix de vente figurant sur le courrier de notification est de 186.000 euros (soit 155.000 euros HT + 31.000 euros correspondant à la TVA applicable) et non de 210.000 euros comme l'indique à tort la Sci Siegried@Mélanie dans ses écritures.

26. Le premier juge a retenu que le 8 mars 2019, la Sas Square Info a notifié, par acte d'huissier, son accord et l'exercice par conséquent de son droit de préemption. Ainsi qu'elle le souligne, son acceptation porte sur l'offre de vente qui lui a été notifiée le 12 février 2019, soit au prix de 186.000 euros. Aussi, la Sci Siegried@Mélanie ne pouvait prendre acte de cette acceptation en considérant que le prix de la transaction était en réalité de 210.000 euros (soit 155.00 euros HT pour les murs et 55.000 euros HT pour les travaux exécutés). Dans la mesure où la Sas Square Info a indiqué, dans l'acte d'huissier du 8 mars 2019, qu'elle entendait recourir à un prêt pour financer cette acquisition, elle disposait, par application de l'article L.145-46-1 du code de commerce, d'un délai de quatre mois à compter du 8 mars 2019 pour réaliser la vente aux conditions figurant dans l'offre de vente notifiée le 12 février 2019, la notion de réalisation de la vente devant s'entendre de la réitération de la vente par-devant notaire et du paiement du prix.

27. Le tribunal a indiqué que si ce délai de quatre mois est un délai extinctif au-delà duquel l'acceptation est sans effet selon les termes de l'article L.145-46-1 du code de commerce, il est constant toutefois que le preneur peut, même après l'expiration dudit délai, contraindre le vendeur à réitérer la vente dès lors qu'il a lui-même mis en oeuvre toutes les conditions lui incombant en sa qualité d'acquéreur et que le défaut de réitération est imputable au bailleur qui doit dès lors en supporter les conséquences.

28. Il a retenu qu'en l'occurrence, ce n'est qu'en date du 5 juillet 2019 que le Crédit Agricole Sud Rhône Alpes a informé la Sas Square Info de son accord de principe pour l'octroi d'un prêt de 203.000 euros remboursable sur 12 ans, fixant toutefois comme conditions préalables la fourniture des «derniers éléments au dossier'''; que ce document a été adressé par le notaire de la Sas Square Info au notaire du bailleur et qu'il a été demandé le 6 juillet 2019 au notaire de la Sas Square Info de confirmer que l'offre de prêt était éditée, ce à quoi il a été répondu le 8 juillet 2019 qu'il n'y aurait pas d'offre de prêt et que la banque avait simplement besoin d'un projet pour débloquer les fonds.

29. Selon le premier juge, il est indéniable, au vu de ces éléments, qu'à la date du 8 juillet 2019, la vente ne pouvait être réitérée, compte tenu de l'accord de principe de la banque donné seulement trois jours avant et de l'impossibilité évidente pour l'étude notariale de préparer l'acte et d'organiser dans ce laps de temps très court un rendez-vous de signature. De surcroît, il importe de rappeler que la réalisation de la vente s'entend, ainsi qu'il en a été fait état, non seulement de la signature, mais également du paiement effectif du prix, lequel devait intervenir comptant le jour de signature.

30. Le tribunal a indiqué que ces circonstances sont étrangères à la Sci Siegried@Mélanie, et que force est de constater que la Sas Square Info ne démontre pas, ne donnant aucune précision sur les démarches effectuées pour obtenir un financement et le moment où elle s'est rapprochée de sa banque, avoir mis en oeuvre les moyens nécessaires pour l'obtention d'un financement dans les délais requis. Aussi, il importe peu que la Sci Siegried@Mélanie ait, sans justification aucune, modifié les conditions de la vente dans son courrier du 21 mars 2019, puis fait signifier, en date du 12 juin 2019, un commandement dans la mesure où, quand bien même aucune modification ne serait intervenue ni aucun commandement délivré, la réitération de la vente ne pouvait, pour les motifs précités, avoir lieu dans le délai de quatre mois prescrit par la loi.

31. En conséquence, le premier juge a considéré que l'acceptation de l'offre de vente est devenue caduque, et il a débouté par conséquent la Sas Square Info de sa demande d'exécution forcée.

32. La cour relève que selon l'article L145-46-1 du code de commerce, lorsque le propriétaire d'un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci, il en informe le locataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement. Cette notification doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente envisagée. Elle vaut offre de vente au profit du locataire. Ce dernier dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception de cette offre pour se prononcer. En cas d'acceptation, le locataire dispose, à compter de la date d'envoi de sa réponse au bailleur, d'un délai de deux mois pour la réalisation de la vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l'acceptation par le locataire de l'offre de vente est subordonnée à l'obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois. Si, à l'expiration de ce délai, la vente n'a pas été réalisée, l'acceptation de l'offre de vente est sans effet.

33. En l'espèce, il est constant que l'appelante a accepté d'acquérir le local commercial au prix fixé initialement pour 186.000 euros TTC, soit 155.000 euros HT outre 31.000 euros au titre de la TVA, suite à l'offre faite par l'intimée par lettre recommandée avec accusé de réception. L'exploit du 8 mars 2019 signifiant cette acceptation au bailleur a expressément indiqué que le preneur a entendu recourir à un prêt pour son financement. Il en résulte que la vente devait intervenir dans le délai de quatre mois à compter du 8 mars 2019.

34. Il n'a pas été justifié ni devant le tribunal, ni devant la cour, des diligences accomplies par l'appelante afin d'obtenir ce financement. Elle n'a produit qu'un courrier du Crédit Agricole du 5 juillet 2019, indiquant un accord de principe afin de réaliser le projet, au prix de 203.000 euros, mais sous la condition de fournir les derniers éléments du dossier, sans autre précision, alors que le délai imparti pour régulariser la vente, par acte authentique, expirait le 8 juillet 2019. Dans son courrier du 19 juin 2020 adressé à l'avocat de l'intimée, maître [T], notaire, a indiqué que cette lettre de la banque lui a été adressée le 5 juillet 2019, qu'il a en conséquence demandé au notaire du preneur le 6 juillet de lui confirmer que l'offre de prêt était éditée, mais que ce notaire lui a répondu le 8 juillet qu'il n'y avait pas d'offre de prêt et que la banque avait simplement besoin d'un projet pour débloquer les fonds.

35. La cour constate que les dispositions des articles L313-1 et suivants du code de la consommation ne sont pas applicables à l'opération projetée par l'appelante, ne concernant que les prêts immobiliers souscrits par des consommateurs, ou pour des opérations dont la preuve n'est pas rapportée. L'article 6 du bail stipule en effet que l'objet de l'exploitation des lieux est la vente d'objets technologiques, les prestations et la maintenance informatique, le développement de logiciels et la création Web. Il ne s'agit donc que de locaux à usage purement professionnel. En conséquence, la discussion de l'intimée concernant l'application de la loi du 13 juillet 1979 est inopérante, outre le fait que cette loi est abrogée.

36. Cependant, ainsi qu'énoncé par le premier juge, le délai de quatre mois prévu par le code de commerce pour régulariser la vente est un délai extinctif, au-delà duquel l'acceptation du preneur n'a plus d'effet. En la cause, l'appelante disposait de ce délai pour parvenir au bouclage de son dossier financier, alors que la lettre du Crédit Agricole indique que ce dossier n'était pas complet trois jours avant l'expiration du délai pour que l'acte authentique constatant la vente soit signé. L'appelante n'évoque aucune cause justifiant ce retard, et l'acceptation tardive de la banque du principe de l'octroi du prêt.

37. Au sens de l'article 1304 du code civil, l'exercice du droit de préemption de l'appelante était suspendue à l'obtention du prêt. Or, à la date à laquelle ce droit a expiré, cette condition n'a pas été réalisée, sans qu'il soit justifié du fait du bailleur ayant rendu impossible l'obtention de ce prêt avant la date prévue pour la signature de la vente, ainsi que retenu par le premier juge. Il en résulte que le tribunal a exactement considéré que l'acceptation de l'offre de vente est devenue caduque.

38. Si l'appelante souligne le fait que le prix de la cession a été modifié par le bailleur, le premier juge a exactement indiqué que ce fait est sans incidence, puisqu'en tout état de cause, aucun financement définitif n'avait été accepté à la date de la signature de l'acte authentique, le dossier du preneur restant à finaliser trois jours avant la vente effective. En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté l'appelante de ses demandes concernant l'exécution forcée de cette vente.

2) Concernant les demandes indemnitaires de la société Square Info':

39. S'agissant de sa demande de dommages et intérêts au titre d'une résistance abusive de l'intimée de parfaire la vente, en considération des éléments qui précèdent, l'appelante ne pouvait qu'être déboutée de cette prétention. Le jugement déféré sera également confirmé sur ce point.

40. Concernant sa demande formée au titre de la perte de la chance d'acquérir les locaux commerciaux, ainsi que relevé par le tribunal, la carance de l'appelante est à l'origine de l'absence de la possibilité de régulariser la vente dans le délai de quatre mois imparti par le code de commerce. Le jugement déféré sera également confirmé sur ce point.

41. Il en résulte que la décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a débouté l'appelante de ses demandes.

3) Concernant la demande reconventionnelle de la société Siegried@Mélanie':

42. Ainsi qu'énoncé par le tribunal, la Sci Siegried@Mélanie a fait délivrer le 12 juin 2019 à la Sas Square Info un commandement aux fins d'obtenir la justification par le preneur d'une couverture d'assurance et le paiement de loyers et charges en retard. Il a retenu qu'il n'est pas discuté que les sommes réclamées n'ont pas été intégralement payées dans le délai d'un mois suivant la signification du 12 juin 2019.

43. La cour constate que selon ce commandement, la somme de 4.152,96 euros était alors réclamée, au titre du décompte arrêté au 11 juin 2019. Devant la cour, l'intimée produit le second commandement signifié le 15 octobre 2019, ne visant désormais que le paiement des loyers et charges arriérés, pour 4.244,16 euros, au titre du décompte arrêté au 11 octobre 2019.

44. Suite à la délivrance du premier commandement visant la clause résolutoire insérée au bail, l'intimée n'a engagé aucune instance visant l'acquisition de la résolution du contrat. La cour constate d'ailleurs que selon le décompte annexé au second commandement, le preneur avait régularisé sa situation, l'arrêté du compte au 12 juillet 2019 ne mentionnant plus aucun solde à sa charge. Ce fait explique l'absence d'engagement d'une instance afin d'obtenir le constat de la clause résolutoire. Ce relevé permet d'ailleurs de constater que jusqu'au 1er septembre 2019, le solde du compte a toujours été à zéro.

45. Il en résulte que le tribunal a justement énoncé qu'en délivrant ce nouveau commandement de payer, il est manifeste que la Sci Siegried@Mélanie a entendu renoncer tacitement à se prévaloir du commandement délivré le 12 juin 2019. Sa demande tendant au constat du jeu de la clause résolutoire du bail et à l'expulsion de la Sas Square Info ne pouvait ainsi qu'être rejetée.

46. La cour relève en outre, comme soutenu par le preneur, que devant elle, le bailleur se contente de solliciter la réformation du jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande reconventionnelle tendant au constat du jeu de la clause résolutoire et à l'expulsion du preneur. Il ne forme cependant pas de demande visant à constater l'acquisition de la clause résolutoire et à voir ordonner l'expulsion du locataire en cas d'infirmation du jugement entrepris. Tenue par le dispositif des conclusions de l'intimée, la cour ne peut ainsi constater l'acquisition de la clause résolutoire et ordonner l'expulsion de l'appelante.

47. Il en résulte que le jugement déféré sera également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de l'intimée.

48. Chacune des parties succombant en ses prétentions, il est équitable de laisser à leur charge les frais et dépens qu'elles ont engagés devant la cour, par application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles L145-46-1 du code de commerce, les articles 1304'et suivants du code civil, les articles 548, 901 et 954 alinéa 3 du code de procédure civile ;

Confirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour ;

y ajoutant';

Laisse à chacune des parties la charge de frais et dépens qu'elle a exposés en cause d'appel'; et autorise Maître [D] a recouvrer directement ceux pour lesquels il n'a pas reçu provision ;