CA Nîmes, 4e ch. com., 26 janvier 2024, n° 22/02047
NÎMES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Cabinet House & Co (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Codol
Conseillers :
Mme Ougier, Mme Vareilles
Avocats :
Me Guittard, Me Ambrosino
Vu l'appel interjeté le 15 juin 2022 par Madame [T] [S] à l'encontre du jugement prononcé le 3 mai 2022 par le tribunal judiciaire de Carpentras, dans l'instance n°20/01220,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 6 décembre 2023 par l'appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 5 décembre 2023 par la S.A.S. Cabinet House & Co, intimée et appelante incidente, et le bordereau de pièces qui y est annexé,
Vu l'ordonnance du 17 novembre 2023 de clôture de la procédure à effet différé au 7 décembre 2023,
Par acte sous signature privée du 2 janvier 2016, la société Cabinet House & Co, exerçant une activité d'intermédiaire dans le domaine immobilier, a donné à Madame [T] [S] un mandat d'agent commercial.
Le 25 août 2020, un protocole de rupture amiable a été signé entre les parties, stipulant notamment la rupture d'un commun accord sans indemnité, la restitution des clés de l'agence, la confirmation des obligations de confidentialité ressortissant du contrat de l'agent commercial, la renonciation à se prévaloir de la clause de non concurrence et le droit de suite sur quatre dossiers.
Le 1er septembre 2020, Madame [S] a été embauchée en qualité de responsable commerciale par la SARL Agence du Centre exerçant une activité d'agence immobilière sous l'enseigne Bonfils Immobilier.
Monsieur [O] [X] qui était également lié avec la société Cabinet House & Co par un mandat d'agent commercial a fait part le 7 septembre 2020 à cette dernière de sa décision de rompre leurs relations contractuelles afin de rejoindre l'agence Bonfils Immobilier.
Postérieurement à la signature du protocole de rupture amiable, Madame [T] [S] a sollicité le paiement de factures. La société Cabinet House & Co lui a demandé de rectifier le montant des dites factures au motif qu'elles étaient erronées.
Par exploit du 16 novembre 2020, la société Cabinet House & Co a fait assigner Madame [T] [S] devant le tribunal judiciaire de Carpentras aux fins de la voir condamner à lui réparer divers préjudices. En effet, cette société faisait valoir que son ancien agent s'était livré à des actes caractérisant une violation de son obligation de loyauté et de fidélité, avait procédé à une surfacturation de ses commissions, s'était livré à un détournement de clientèle et enfin avait commis une tentative de détournement de fonds et de captation illégale d'honoraires.
Par jugement du 3 mai 2022, le tribunal judiciaire de Carpentras a :
-Condamné Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House & Co la somme de 52 819,84 euros au titre d'un trop perçu de commissions
-Condamné chaque partie à supporter les dépens
-Rejeté les autres demandes.
Le 15 juin 2022, Madame [T] [S] a interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l'appelante demande à la cour, au visa des articles 1193 et suivants, 2044 et suivants du code civil, des articles L. 134-1, L. 134-3, L. 134-14 du code de commerce, de :
-Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Carpentras en date du 3 mai 2022 en ce qu'il a rejeté les demandes de la SAS House and Co tendant à la condamnation de Madame [T] [S] à lui verser les sommes de 5 000 euros au titre de son préjudice moral pour déloyauté au titre de la violation de la stipulation de fidélité, 26 870 euros au titre de son préjudice économique, 53 000 euros au titre de la perte de son résultat causé par des agissements déloyaux, 50 000 euros au titre de la perte de chance de conclure, 5 000 euros au titre de son préjudice moral pour déloyauté au titre de la tentative de captation illégale d'honoraires et 2 400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation au titre de la location d'un bureau à hauteur de 12 800 euros;
-Réformer pour le surplus et, statuant à nouveau,
A titre principal,
-Débouter la SAS House and Co de sa demande de condamnation au titre du trop-perçu sur les commissions versées à Madame [T] [S];
-Condamner la société House and Co à verser à Madame [T] [S] les commissions relevant de son droit de suite à savoir :
13 000 € TTC au titre de la vente Gamba;
1 050 € TTC au titre de la vente [Y];
1 000 € TTC au titre de la vente SCI Papalines;
1 187 € TTC au titre de la vente Boursier.
A titre subsidiaire,
-Fixer le montant du trop-perçu de commissions à la somme de 38 028,17 euros;
-Condamner la société House and Co à verser à Madame [T] [S] la somme de 13 478,33 euros à titre de rappel de commissions dues au titre du droit de suite;
-Ordonner la compensation des créances.
En tout état de cause,
-Dire et juger que lesdites sommes allouées à Madame [T] [S] au titre du rappel de commission porteront intérêts au taux légal à compter du 3 décembre 2020 et ordonner leur capitalisation à compter de cette même date;
-Condamner la société House and Co à verser à Madame [T] [S] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;
-Condamner la SAS House and Co à verser à Madame [T] [S] la somme de 3 600 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Frédéric Guittard, Avocat sur son offre de droit, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, l'appelante fait valoir que la société House & Co ne démontre aucun manquement dans l'exécution de son mandat et ne caractérise pas une entrave volontaire à la réalisation d'un dossier dont elle avait la charge; l'intimée ne rapporte pas la preuve d'une tentative de détournement de collaborateurs par l'appelante; ainsi, si des collaborateurs ont quitté l'agence House & Co, cela relève de l'unique volonté des personnes concernées, mues par un souhait de changement de carrière professionnelle; Madame [S] n'a donc jamais participé à la moindre opération de détournement de l'équipe exerçant au sein de la société House & Co; au surplus, elle n'était pas employeur ou associée de la société Bonfils mais simplement salariée, de sorte qu'elle ne procédait ni aux embauches ni aux licenciements; la société intimée ne rapporte pas la preuve d'une baisse soudaine de son chiffre d'affaire due à la perte de Monsieur [O] [X], agent commercial; ainsi, la société House & Co ne peut démontrer que cet agent aurait accompli des diligences permettant d'assurer de manière certaine un chiffre d'affaires alors même que les ventes immobilières sont incertaines; en outre, l'intimée ne produit aucune pièce comptable pour l'année 2020, de sorte que le montant du préjudice invoqué ne peut être certain; l'intimée ne produit aucune pièce justifiant de son préjudice moral et ne démontre pas en quoi Madame [S] se serait livrée à un débauchage de ses agents commerciaux ou aurait détourné des clients; la tentative de détournement de fonds et de captation illégale d'honoraires n'est pas avérée; ainsi, la société House and Co a reconnu devoir des honoraires à l'appelante mais ne les lui a jamais versés; dans le protocole de rupture amiable signé entre les parties, celles-ci ont purgé les éventuelles réclamations pouvant découler de l'exécution et de la rupture du contrat d'agent commercial en renonçant à tout recours réciproque dont cette convention aurait pu être le fondement et en fixant de manière définitive le montant des commissions revenant à l'appelante dans le cadre de son droit de suite; ainsi, une telle transaction peut mettre un terme à une contestation née ou prévenir une contestation à naître aux termes de l'article 2044 du code civil; en outre, les termes du protocole prévoient qu'aucun des signataires ne s'est réservé la possibilité de revenir sur cette transaction venant clôturer quatre années de collaboration; il n'y a eu aucune dissimulation par Madame [S] dont les honoraires ont été réglés pendant quatre années sur la base des factures émises; il ne s'agissait donc pas de factures ponctuelles et isolées mais bien de documents récurrents sur la base desquels la société House and Co a tenu sa comptabilité, de sorte que cette dernière aurait pu facilement s'apercevoir d'une telle dissimulation; la société House and Co a fait fi du principe fondant l'application de la taxe sur la valeur ajoutée, à savoir 'la neutralité fiscale' puisque si elle soutient avoir reversé trop peu de taxe sur la valeur ajoutée sur la base de la prétendue surfacturation de Madame [S], cela induirait que cette dernière a collecté trop de taxe sur la valeur ajoutée, avant de la reverser à l'administration fiscale; les factures émises l'étaient d'un commun accord sur la base d'un pourcentage hors taxes appliqué à une commission d'agence également calculée hors taxes; la société House and Co conservait 5% des honoraires revenant à Madame [S] afin de couvrir notamment la mise à disposition d'un bureau, de sorte que les prétentions de l'intimé sont en contradiction avec la pratique contractuelle; l'appelante ne saurait donc être doublement débitrice d'une location qu'elle a régulièrement acquittée par retenue directe effectuée par la société House and Co sur lesdites commissionnements; chaque facture de Madame [S] a fait l'objet d'une vérification et d'un pointage préalablement à son règlement, de telle sorte que si elle avait procédé à une surfacturation, la société House and Co s'en serait aperçue; il lui a été reconnu, dans le protocole d'accord, un droit de suite sur plusieurs dossiers dont la signature était imminente; elle est donc fondée à récupérer les commissions de ces dossiers; la société House and Co a introduit cette instance dans l'unique but de retarder le paiement des commissions à Madame [S], de sorte que cette procédure est abusive.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, l'intimée et appelante incidente demande à la cour au visa des articles L. 134-4 et suivants du code de commerce, des articles 1104, 1194, 1231 et suivants du code civil, du contrat d'agent commercial, de :
A titre principal,
-Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Carpentras en date du 3 mai 2022 en ce qu'il condamne Madame [T] [S] au titre d'un trop perçu de commission ;
-Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Carpentras en date du 3 mai 2022,en ce qu'il a fixé à 66 098,17 euros le montant du trop-perçu de commission et rejeté les autres demandes de la société Cabinet House & Co tendant à la condamnation de Madame [T] [S] à lui verser les sommes de 5 000 euros au titre de son préjudice moral résultant de la violation de son obligation de loyauté et de fidélité, 26 870 euros au titre de son préjudice économique résultant de la violation de son obligation de loyauté et de fidélité, 53 000 euros au titre de la perte de son résultat d'exploitation causé par des agissements déloyaux, 50 000 euros au titre de la perte de chance de conclure, 5 000 euros au titre de son préjudice moral pour déloyauté au titre de la tentative de captation illégale d'honoraires, 2 400 euros en applications des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il a fait droit à la demande de Madame [S] tendant à la condamnation de la société Cabinet House and Co à lui verser 13 478,33 euros à titre de rappel de commissions dues au titre du droit de suite ;
Statuant à nouveau, vu les articles 551 et 909 du code de procédure civile,
-Condamner Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House and Co la somme de 72 772 euros au titre du trop-perçu sur les commissions réglées, assortie du taux de l'intérêt légal à compter de la mise en demeure;
-Condamner Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House and Co la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral résultant de la violation de son obligation de loyauté et de fidélité, assortie du taux de l'intérêt légal à compter de la mise en demeure;
-Condamner Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House and Co la somme de 26 870 euros au titre de son préjudice économique résultant de la violation de son obligation de loyauté et de fidélité, assortie du taux de l'intérêt légal à compter de la mise en demeure ;
-Condamner Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House and Co la somme de 53 000 euros, au titre de la perte de son résultat causé par des agissements déloyaux, assortie du taux de l'intérêt légal à compter de la mise en demeure ;
-Condamner Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House and Co la somme de 50 000 euros, au titre de la perte de chance de conclure, assortie du taux de l'intérêt légal à compter de la mise en demeure ;
-Condamner Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House and Co la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral pour déloyauté au titre de la tentative de captation illégale d'honoraires, assortie du taux de l'intérêt légal à compter de la mise en demeure
-Débouter Madame [T] [S] de sa demande tendant à la condamnation de la société House & Co à lui verser la somme de 13 478,33 euros à titre de rappel de commissions au titre du droit de suite;
A titre subsidiaire :
-Confirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions;
En tout état de cause :
-Débouter Madame [T] [S] de toutes ses demandes plus amples ou contraires ;
-Débouter Madame [T] [S] de sa demande tendant à la condamnation de la société Cabinet House and Co à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
-Condamner Madame [T] [S] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Jean-Michel Ambrosino, Avocat au Barreau d'Avignon;
-Condamner Madame [T] [S] à payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Au soutien de ses prétentions, l'intimée fait valoir qu'il est reproché à Madame [S] d'avoir planifié son départ de longue date en usant de manœuvres préjudiciables à la société House and Co et ce alors même qu'elle travaillait encore pour cette dernière; Madame [S] a souhaité débaucher des agents commerciaux qui étaient également sous contrat avec l'intimée, notamment en dénigrant celle-ci auprès d'eux et en tentant de les convaincre de mettre un terme à leur collaboration pour partir travailler chez son nouvel employeur; ces sollicitations se sont soldées par une embauche de Monsieur [X] par l'agente Bonfils; Madame [S] a donc bien manqué à son obligation de loyauté; en outre, l'appelante a pour responsabilité au sein de l'agence Bonfils de recruter les commerciaux, de sorte qu'elle a pu peser dans l'embauche de Monsieur [X]; enfin, Madame [S] occupe désormais le poste de responsable commerciale au sein de cette même agence et a nécessairement un pouvoir de décision sur l'embauche des personnes constituant les équipes; le départ de Monsieur [X] formenté par Madame [S] a généré un préjudice pour la société House and Co qui a soudainement perdu un agent commercial et, par voie de conséquence, une part significative de chiffre d'affaires, les attributions d'une relation commerciale pérenne et la notoriété qu'elle a développée autour de ses agents; l'intimée a donc subi un préjudice moral et économique; le montant chiffré à 26 870 euros au titre du préjudice économique ne correspond pas au chiffre d'affaires qui aurait été réalisé par Monsieur [X] mais à la part prévisible du chiffre d'affaires produit par lui qui serait restée à la société House and Co, déduction faite de la quote part revenant à l'agent commercial; au surplus, la transaction immobilière n'est pas une activité aléatoire; en outre, si le chiffre d'affaires attendu repose en partie sur les diligences de l'agent lui-même, il repose sur sur l'agence qui lui met à disposition un droit d'exercer, une image, des outils et une notoriété; s'il y a eu une baisse du nombre de transaction de 80% sur la période du premier confinement en 2020, il y a ensuite eu une forte augmentation des ventes immobilières dans le Vaucluse, de sorte que sur la totalité de l'année 2020, cette baisse n'aura finalement été que de 2,8% par rapport à l'année 2019; les difficultés de reprise éprouvées par l'intimée ne sont donc pas dues à un prétendu effondrement global du marché mais bien à l'attitude de sabotage entreprise par Madame [S]; Madame [S] a créé sa propre société ayant pour activité les transactions immobilières et dont le siège est fixé à l'adresse de la société Bonfils; de plus, par assemblée générale extraordinaire des associés de la société Agence du Centre (Bonfils Immobilier), il a été voté la cession des parts de la société Hegu au profit de la société [S] et a agrée Madame [S] en qualité d'associée; par ailleurs, cette dernière se présente elle-même comme directrice associée des Agences Bonfils Immobilier sur ses réseaux sociaux; l'appelante s'est livrée, de fin 2019 à juin 2020, à un travail de sabotage de l'activité de la société House and Co et de dénigrement systématique en remettant constamment en cause ses recommandations et en tentant de débaucher plusieurs membres de son équipe à la concurrence; ces manœuvres déloyales ont alors eu pour effet de créer un climat délétère chez l'intimée, sabotant la production du 1er trimestre 2020; en déstabilisant certains collaborateurs de la société House and Co, Madame [S] a affaibli la structure de l'intérieur et c'est après son départ que les résultats de l'équipe et la production de chiffres d'affaires se sont améliorées, preuve de ce qu'elle avait pour but de nuire à l'intimée; de plus, Madame [T] [S] avait surfacturé les honoraires ressortant de son activité, en ajoutant la TVA (20%) aux commissions stipulées dans le contrat alors que la TVA doit être incluse dès le départ dans le montant de la commission calculée selon un pourcentage variable dont l'assiette est en HT; dès lors, par la faute de l'appelante, la société House and Co est aujourd'hui en difficulté avec le service des impôts puisque la surfacturation de Madame [S] a généré un excédent de TVA déductible pour l'intimée; cette dernière se trouve de ce fait redevable d'une dette importante à l'égard des services fiscaux alors que celle-ci ne lui incombe pas; au surplus, cette modalité de facturation n'a pas été décidée d'un commun accord avec le représentant de la société House and Co puisque si tel avait été le cas, un avenant aurait été signé entre les parties ; le protocole de rupture amiable n'est pas constitutif d'une transaction puisqu'au moment de sa signature, aucun litige n'était né; il s'agit donc d'une simple rupture amiable qui ne vient pas mettre un terme aux responsabilités des parties; ainsi, la société House and Co n'a découvert la surfacturation qu'après la signature du protocole, de sorte qu'il ne peut être considéré qu'elle aurait renoncé à tout recours concernant des faits dont elle n'avait pas connaissance; le droit de suite de Madame [S] à hauteur de 13 000 euros n'est pas remis en cause mais sa créance a été effacée par le jeu de la compensation intervenue avec la créance de la société House and Co d'un montant de 12 800 euros au titre de la location du bureau locatif par l'appelante; cette dernière a alors perçu la somme de 200 euros qui lui était due; en outre, la redevance de 5% dont elle prétend s'être acquittée concerne la mise à disposition d'un bureau dans l'agence qui n'est pas exclusivement réservé à un agent et qui sert à accueillir du public, mais ne concerne pas la location de son bureau privatif utilisé quotidiennement; les agissements de Madame [S] dans les semaines ayant précédé la rupture de son contrat ont eu pour effet soit un détournement pur et simple de clientèle, soit une perte de chance pour l'intimée de conclure des mandats ou les mener à terme et en tirer les fruits afférents; en effet, l'appelante a transféré sur son adresse mail personnelle des courriels envoyés par des clients intéressés par des biens initialement sur sa boîte mail professionnelle; en outre, elle a archivé des mandats de vente en cours dans le système informatique du mandant, sans son consentement et sans dénonciation préalable de ces mandats alors qu'elle n'avait aucun intérêt à le faire puisque les ventes ne s'étaient pas réalisées; ainsi, l'appelante s'est assurée que les clients dont elle avait la charge et la responsabilité n'auraient plus aucune nouvelle de la société House and Co; le 30 septembre 2020, Madame [S] a tenté de capter illégalement des fonds destinés à son ancien mandant en demandant, par l'intermédiaire de son conseil, aux notaires de lui verser directement et en totalité des honoraires relatifs à certains dossiers; au surplus, cette somme était bien supérieure à la quote-part devant lui bénéficier réellement au titre de son droit de suite.
Pour un plus ample exposé, il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.
MOTIFS
1) Sur la violation de la clause contractuelle de fidélité et de l'obligation légale de loyauté
L'intimée reproche à Madame [T] [S] d'avoir planifié son départ de longue date, usant de manœuvres préjudiciables à son ancien mandant, et d'avoir débauché Monsieur [O] [X] qui collaborait avec elle comme agent commercial .
L'intimée invoque les dispositions de l'article L. 134-4 du code de commerce qui édictent que les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information.
L'intimée oppose à l'appelante la clause de fidélité aux termes de laquelle l'agent commercial ne peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente sans l'accord exprès de l'agence. D'une façon générale, il s'interdit pendant la durée du mandat tout acte de concurrence. Pendant toute la durée du contrat et une année après sa fin, pour quelque cause qu'elle survienne, le mandant et l'agent commercial s'engagent à ne pas recruter comme salarié ni utiliser directement ou indirectement les employés et anciens employés de l'autre contractant.
Selon la définition donnée par le dictionnaire Larousse, l'employé est une catégorie particulière de salarié qui travaille dans un bureau, une administration, un magasin ou chez un particulier.
Monsieur [O] [X] était lié avec la société Cabinet House & Co par un contrat d'agent commercial. Il n'était donc pas l'employé de la société Cabinet House & Co de sorte qu'aucune violation de la clause de fidélité n'est caractérisée.
Il ne saurait être fait grief à Madame [T] [S] qui était insatisfaite de sa collaboration avec la société Cabinet House & Co d'avoir envisagé d'ouvrir sa propre agence puis, d'avoir établi des contacts avec d'autres agences immobilières, dès le début de l'année 2020, pour tenter de trouver de nouvelles conditions de travail. De même, Madame [T] [S] n'a pas commis de faute en se renseignant sur les éventuelles charges qui découleraient de la prise en location d'un local commercial, en sollicitant un devis d'assurance.
La société Cabinet House & Co verse au débat des captures d'écran que Monsieur [I] [E] atteste avoir consenti à fournir et qui relatent des conversations qu'il a eues avec Madame [T] [S].
Cependant, comme l'ont observé les premiers juges, certains passages des conversations ont été rayés de sorte qu'il est impossible de remettre les propos écrits par Madame [T] [S] dans leur contexte. De plus, il est surtout question du projet avorté de Madame [T] [S] de rejoindre l'agence Laforêt et, en particulier, le 22 janvier 2020, elle se vante de pouvoir y faire venir Monsieur [I] [E], Madame [U] et Monsieur [O] [X], sans que ces annonces qui relèvent de la fanfaronnade n'aient été suivies d'effets. Le message dans lequel Madame [T] [S] explique qu'en ce moment, elle négocie son équipe n'est pas daté de sorte qu'il est impossible de savoir si elle évoque son projet au sein de l'agence Laforêt ou de l'agence Bonfils. Le premier message échangé au cours de la journée du 27 juin 2020 est tronqué si bien qu'il est difficile de lui donner un sens certain. Le fait que Madame [T] [S] interroge un autre agent commercial, Monsieur [I] [E], au sujet de ses intentions futures, et lui fasse part de son opinion selon laquelle il est de son intérêt de quitter la société Cabinet House & Co, dans laquelle elle sous-entend qu'il n'a pas d'avenir, n'est pas constitutif de manœuvres tendant à saboter l'activité de la société Cabinet House & Co. En effet, Monsieur [I] [E] est un professionnel indépendant, sans lien de subordination avec la société Cabinet House & Co, et le souhait de Madame [T] [S] de travailler avec des personnes qu'elle apprécie est légitime. Au surplus, Madame [T] [S] n'est pas parvenue à ses fins puisque Monsieur [I] [E] a continué à travailler pour le compte de la société Cabinet House & Co, en dépit des conseils insistants prodigués par Madame [T] [S].
S'agissant de Madame [L] [U], il résulte du courrier du 12 avril 2019 versé aux débats qu'elle travaillait pour le compte de l'agence Bonfils jusqu'à ce qu'elle rompe le contrat le 19 avril 2019, ce qui corrobore le témoignage de Monsieur [H] [N], supérieur hiérarchique de Madame [T] [S], selon lequel il n'a jamais été question que l'agence Bonfils reprenne Madame [L] [U] dans ses effectifs, même avec la perspective de l'arrivée de Madame [T] [S].
S'agissant de Monsieur [O] [X], ce dernier atteste de son désir ancien de changement de structure et des entretiens professionnels passés dans ce but avec d'autres agences immobilières, un an avant son départ de la société Cabinet House & Co. Monsieur [Z], responsable de l'agence Bonfils, confirme que Monsieur [O] [X] était déjà en contact avec lui, avant même l'arrivée de Madame [T] [S]. Au surplus, Madame [T] [S] n'est devenue associée au sein de la société Cabinet House & Co qu'un an après son embauche et il n'est pas établi qu'au mois de septembre 2019, en sa qualité de directrice commerciale, elle avait le pouvoir de recruter Monsieur [O] [X] au sein de l'agence Bonfils.
Les affirmations vagues et imprécises de Monsieur [I] [E] et de Madame [L] [U] sur la mauvaise ambiance et le climat délétère entretenus par Madame [T] [S] au sein de la société Cabinet House & Co qui auraient freiné la reprise de l'activité après le premier confinement, sont insuffisantes pour caractériser le dénigrement systématique à l'origine d'une désorganisation de l'entreprise.
Par conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont débouté la société Cabinet House & Co de sa demande en dommages-intérêts au titre de la violation de la clause contractuelle de fidélité et de l'obligation légale de loyauté.
2) Sur la surfacturation des honoraires
Aux termes de l'article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.
Ce contrat doit être rédigé par écrit.
En l'espèce, le protocole de rupture amiable signé le 25 août 2020 met un terme, sans réserve, sans recours et sans indemnités de part et d'autre, au mandat d'agent commercial immobilier liant les parties.
Cette convention s'est bornée à organiser les modalités de la rupture intervenue d'un commun accord du mandat d'agent commercial donné à l'appelante. Elle n'a pas eu pour objet de mettre fin à un différend ou de prévenir une contestation à naître qui n'était alors aucunement prévisible, portant sur le caractère indu des commissions déjà payées.
Dès lors, en l'absence de concessions réciproques et donc de transaction portant sur la situation litigieuse, les prétentions de l'intimée concernant les surfacturations d'honoraires sont recevables.
L'article 9 du mandat d'agent commercial immobilier stipule que, sur toutes les affaires réalisées par son intermédiaire, l'agent commercial perçoit un pourcentage sur le montant des honoraires hors taxes effectivement perçus par l'agence, soit sur le montant des honoraires restant à l'agence après paiement des honoraires pouvant éventuellement être dus à un ou d'autres confrères ou intermédiaires, pourcentage fixé à 70% dont 5% de retenue correspondant aux montants de la redevance du forfait cité à l'article 3 du mandat.
L'annexe au mandat prévoit que les agences partenaires et le cabinet House&Co se réservent les possibilités de pratiquer des délégations de mandat et de l'inter-cabinet au cas par cas et que, dans ces cas-là, l'agent commercial pourra prétendre à 50% HT de la prescription qui aura été perçue par le cabinet.
Il ressort des factures versées aux débat que Madame [T] [S] s'est fait payer par la société Cabinet House & Co des honoraires qu'elle a fixés en appliquant le pourcentage prévu contractuellement non pas sur la commission hors taxes revenant à l'agence sur les ventes immobilières mais sur la commission toutes taxes comprises.
Le compagnon de Madame [T] [S], enseignant certifié de mathématiques, atteste avoir rencontré le dirigeant de la société Cabinet House & Co, lors d'un entretien informel, au cours duquel il lui a expliqué que le calcul effectué sur la commission toutes taxes comprises aboutissait au même résultat; le dirigeant de la société Cabinet House & Co aurait compris son raisonnement et admis qu'il devait rémunérer Madame [T] [S] sur le montant toutes taxes comprises.
Cependant, l'exemple chiffré donné par le compagnon de Madame [T] [S], dans son témoignage écrit, part du postulat que lorsqu'on applique le pourcentage revenant à l'agent commercial sur la commission hors taxes, la société Cabinet House & Co doit rajouter la taxe sur la valeur ajoutée au résultat obtenu, ce qui revient à faire supporter par la société Cabinet House & Co la taxe sur la valeur ajoutée sur la rémunération revenant à l'agent. Or, l'article 2 du mandat d'agent commercial prévoit que d'une manière générale, l'agent supporte personnellement et exclusivement toutes les charges sociales et fiscales lui incombant (taxe sur la valeur ajoutée , taxe professionnelle, BNC, etc..).
Par conséquent, le calcul exact consiste à appliquer le pourcentage auquel l'agent a droit sur le montant hors taxes de la commission de vente pour aboutir ainsi à la rémunération toutes taxes comprises que la société Cabinet House & Co doit verser à l'agent, à charge pour ce dernier de prélever sur la dite rémunération la taxe sur la valeur ajoutée à reverser à l'Etat.
Eu égard aux liens affectifs l'unissant à Madame [T] [S], le témoignage de son compagnon selon lequel il aurait persuadé le dirigeant de la société Cabinet House & Co d'augmenter la rémunération à laquelle l'agent commercial avait droit pour compenser son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée n'est pas convaincant.
Certaines factures portent la mention manuscrite 'OK'; toutefois, l'auteur de cette annotation n'est pas connu; la signification de la mention est également incertaine; elle peut laisser seulement entendre qu'une personne a pointé les factures.
Pour la première fois en appel, Madame [T] [S] verse au débat un message électronique du 6 mai 2020 émanant du directeur de la société Cabinet House & Co qui lui confirme le montant de dix rémunérations à venir sur des dossiers ayant donné lieu à des compromis de vente, sous réserve de la signature définitive des actes de vente.
La société Cabinet House & Co conteste formellement être à l'origine du message, faisant valoir que le directeur de l'agence était malade, à cette date, et dans l'incapacité de travailler ; de plus, le message émane d'une boîte mail générale que Madame [T] [S] a pu utiliser en sélectionnant la signature pré-enregistrée du directeur de la société Cabinet House & Co. Le message électronique du 6 mai 2020 est donc dénué de valeur probante dans la mesure où l'identité de son auteur est incertaine.
En l'absence d'élément probant, il n'est pas démontré que la société Cabinet House & Co ait été animée d'une intention libérale l'ayant amenée à payer à Madame [T] [S] un montant d'honoraires dépassant celui convenu contractuellement.
La négligence de la société Cabinet House & Co qui a omis de vérifier le contenu des factures communiquées par Madame [T] [S], avant de les régler, ne constitue pas un obstacle à l'exercice de l'action en répétition de l'indu.
Si certaines factures d'honoraires litigieuses sont communiquées en double exemplaire, le tableau récapitulatif qui est versé au débat ne les comptabilise pas plusieurs fois. Le calcul effectué n'est donc pas erroné de ce fait.
Madame [T] [S] soutient que le préjudice subi par la société Cabinet House & Co ne saurait porter que sur la période susceptible de faire l'objet d'un droit de reprise de l'administration fiscale, soit jusqu'à la fin de la 3ème année suivant celle au cours de laquelle la taxe sur la valeur ajoutée est devenue exigible.
Mais, comme le fait observer Madame [T] [S] elle-même, le fait que la taxe sur la valeur ajoutée soit reversée par la société Cabinet House & Co ou par elle-même, est sans influence sur le montant de la taxe sur la valeur ajoutée à collecter en valeur absolue par l'administration fiscale. Madame [T] [S] ne justifie pas avoir formé une réclamation auprès de l'administration fiscale au titre d'un trop versé de taxe sur la valeur ajoutée et sa demande se heurterait également à la prescription extinctive de trois année en la matière. Il s'en suit qu'il n'y a pas lieu de limiter les demandes présentées par la société Cabinet House & Co à la période non couverte par la prescription dans la mesure où il n'est pas démontré que l'administration fiscale n'ait pas été remplie de ses droits et qu'elle soit amenée à opérer une rectification.
Le préjudice de la société Cabinet House & Co consiste dans le fait qu'elle a payé à Madame [T] [S] une commission d'un montant plus élevé que celui qui était convenu ainsi qu'une part de taxe sur la valeur ajoutée que cette dernière aurait du supporter. Il n'y a donc pas lieu de déduire la taxe sur la valeur ajoutée du montant des sommes indues.
Le tableau récapitulatif des surfacturations fait apparaître un total de 72 111,70 euros et non de 72 772 euros comme réclamé par la société Cabinet House & Co. Ce montant comprend la surfacturation de 2 166 euros pratiquée à l'occasion de la vente Gamba au titre de laquelle la commission due à Madame [T] [S] n'a pas été payée. Par conséquent, les surfacturations effectuées au préjudice de la société Cabinet House & Co s'élèvent à 69 945,70 euros.
En l'absence de mise en demeure, la condamnation prononcée emportera intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 16 novembre 2020.
S'agissant des quatre dossiers sur lesquels Madame [T] [S] disposait d'un droit de suite, les premiers juges ont retenu, à juste titre, que la société Cabinet House & Co était redevable de la somme de 13 278,33 euros, après avoir appliqué le mode de calcul adéquat avec pourcentage appliqué sur les commissions hors taxes perçues par l'agence immobilière, et déduit la somme de 200 euros versée à Madame [T] [S].
Madame [T] [S] a signé le 4 mai 2015 un contrat de location de bureau privatif moyennant un loyer de 200 euros par mois qui s'ajoute à la retenue de 2,50 % pratiquée sur les honoraires pour la mise à disposition d'un espace travail et accès copieur dans l'agence prévue par l'article 3 du mandat d'agent commercial immobilier.
Madame [T] [S] ne rapporte pas la preuve du paiement du loyer du bureau privatif mis à sa disposition en sus de l'espace collectif de travail, en dépit d'une note du 4 mai 2016 attirant l'attention des agents sur le fait qu'en cas de non paiement de la prestation, celle-ci serait soldée à la fin du mandat en prélèvement sur les sommes pouvant leur être dues ou à défaut, au moyen d'un appel de fonds unique.
La dette de loyer du bureau privatif n'a pas été évoquée lors de la signature du protocole de rupture amiable qui n'a réglé que la question de l'indemnité à laquelle la résiliation du contrat aurait pu donner droit si elle avait été fautive.
La demande de la société Cabinet House & Co est donc recevable et bien fondée ; elle ne tend qu'au rejet de la demande en paiement des commissions au titre du droit de suite de 13 278,33 euros, après compensation avec la dette de loyer de 12 800 euros ; il n'y a donc pas lieu de condamner Madame [T] [S] au paiement du reliquant de 478,33 euros, sous peine de statuer ultra petita.
3) Sur le détournement de clientèle et la perte de chance de conclure
La société Cabinet House & Co verse au débat des messages émanant pour certains du mois de juillet 2020 de personnes intéressées par des annonces de vente de biens immobiliers. Madame [T] [S] a transféré les dits messages sur son adresse mail personnelle le 22 août 2020, soit trois jours avant son départ de la structure.
Il n'est pas pour autant établi que Madame [T] [S] se soit abstenue de contacter ces potentiels candidats acquéreurs, avant de quitter la société Cabinet House & Co, cette dernière ne produisant qu'un commentaire de mécontentement d'un vendeur du 9 janvier 2021. Il ne peut être tiré de conséquence sur la clientèle de la société Cabinet House & Co de la conservation par Madame [T] [S] des dits messages, après la rupture de son mandat avec la société Cabinet House & Co, dans la mesure où, comme l'ont relevé les premiers juges, il n'est pas démontré qu'elle ait tenté de se faire consentir un nouveau mandat par les vendeurs pour les biens concernés, après son embauche au sein de l'agence Bonfils. En effet, la société Cabinet House & Co communique à ce sujet un seul message d'un vendeur qui se contente d'indiquer, de manière très lapidaire, avoir reçu un coup de fil de Madame [T] [S], le lendemain d'un rendez-vous fixé chez le notaire pour une vente dans laquelle elle avait servi d'intermédiaire, sans précision aucune sur l'objet de l'appel téléphonique reçu.
L'historique du logiciel qui est communiqué par la société Cabinet House & Co établit que Madame [T] [S] a archivé le 17 août 2020 cinq biens donnés en vente qui sont facilement identifiables grâce aux numéros de mandats et aux noms des vendeurs mentionnés sur la droite. L'archivage s'est accompagné d'une désactivation de l'envoi de la newsletter et du reporting vendeur.
Il résulte du mandat de vente [V] et des fiches techniques des autres biens immobiliers que les mandats litigieux expiraient les 30 août, 20 septembre, 27 septembre 2020, 23 octobre et 21 janvier 2021 de sorte qu'ils étaient bien en cours lorsque Madame [T] [S] a procédé à l'archivage prématuré.
Seul le bien de Monsieur [V] a fait l'objet le 5 novembre 2020 d'une annonce de l'agence Bonfils mais le mandat donné à la société Cabinet House & Co expirait automatiquement le 27 septembre 2020 et n'était pas exclusif ; or il n'est pas établi que le contrat avec l'agence Bonfils ait été conclu après l'embauche de Madame [T] [S]. Le détournement de la clientèle n'est, par conséquent, pas avéré.
Madame [T] [S] ne démontre pas la volonté des propriétaires de mettre fin aux mandats concernés et donc l'utilité de l'archivage auquel elle a procédé. Elle a donc bien commis une faute dans la mesure où la clientèle appartient exclusivement à l'agence et qu'il ne lui appartenait pas de faire disparaître des dossiers du logiciel de gestion de cette dernière, de sa propre initiative et sans motif légitime. Il est inopérant que la société Cabinet House & Co ne rapporte pas la preuve que les archivages aient profité à l'agence Bonfils ; le préjudice est constitué dès lors que la société Cabinet House & Co n'a pas été en mesure de faire diligence pour présenter les biens à la vente jusqu'à ce qu'elle découvre la démarche effectuée par Madame [T] [S] et procède à l'annulation de l'archivage, à tout le moins jusqu'à l'assignation du 16 novembre 2020 qui y fait allusion. La perte de chance de la société Cabinet House & Co de percevoir des commissions d'un montant maximum de 83 000 euros si la vente avait été conclue par son intermédiaire sera évaluée à 8 000 euros.
S'agissant d'une créance à caractère indemnitaire, la condamnation prononcée emportera intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt, en application de l'article 1231-7 du code civil.
4) Sur la tentative de détournement de fonds et de captation illégale d'honoraires
Madame [T] [S] qui était créancière de la société Cabinet House & Co, au titre de son droit de suite, a adressé le 28 septembre 2020 par l'intermédiaire de son conseil un courrier à un notaire chargé d'une vente afin de solliciter qu'il conserve en ses livres la commission d'agence due à la société Cabinet House & Co, le temps que soit aplanie la difficulté. Cependant le notaire chargé de la vente a alerté la société Cabinet House & Co qui l'a mis en demeure de lui verser la commission lui revenant dès la réitération de la vente par acte authentique de sorte que le notaire n'a pas procédé à la retenue sollicitée par Madame [T] [S].
L'intention de Madame [T] [S] de détourner des fonds et de capter illégalement des honoraires n'est nullement avérée alors qu'elle a simplement souhaité que le notaire retienne provisoirement une commission dont elle s'estimait en partie créancière.
La faute alléguée n'est pas caractérisée et il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges de débouter la société Cabinet House & Co de sa demande en paiement de la somme de 5 000 euros pour préjudice moral.
5) Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive
La société Cabinet House & Co a obtenu gain de cause dans l'essentiel de ses prétentions de sorte que le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [T] [S] de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive.
6) Sur les frais du procès
Il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les parties de leurs demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné chacune à supporter ses dépens.
Madame [T] [S] qui succombe sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'intimée et de lui allouer une indemnité de 3 000 euros, à ce titre.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a :
-condamné Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House & Co la somme de 52 819,84 euros au titre d'un trop perçu de commissions
-débouté de la société Cabinet House & Co de sa demande de compensation du loyer de bureau privatif avec les commissions au titre du droit de suite,
-débouté de la société Cabinet House & Co de sa demande au titre de la perte de chance de conclure
L'infirme sur le surplus des dispositions soumises à la cour
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House & Co la somme de 69 945,70 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2020 au titre des surfacturations
Condamne Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House & Co la somme de 8 000 euros au titre de la perte de chance de conclure, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt
Constate que les commissions au titre du droit de suite ont été payées par compensation avec les loyers du bureau privatif
Déboute, par conséquent, Madame [T] [S] de sa demande en paiement des commissions au titre du droit de suite
Y ajoutant,
Condamne Madame [T] [S] aux entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de Me Ambrosino, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
Condamne Madame [T] [S] à payer à la société Cabinet House & Co une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Arrêt signé par la présidente et par la greffiere.