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Décisions

CA Douai, ch. 2 sect. 2, 16 février 2017, n° 15/02339

DOUAI

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cubit France technologies (SA)

Défendeur :

Aluminium Feron Gmbh & co (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Fontaine

Conseillers :

Mme André, Mme Cordier

Avocats :

Me Khayat, Me Andries

T. com. Dunkerque, du 17 nov. 2014, n° 2…

17 novembre 2014

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Cubit France technologies (CFT) est spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de tickets magnétiques.

La société Aluminium Feron Gmbh, quant à elle, est spécialisée dans la production de matériaux ou composants en forme de bande confectionnés à partir d'aluminium, cuivre, acier, plastique et papier.

Le 18 mai 2011, la société CFT a commandé auprès de la société Aluminium Feron, société à responsabilité limitée de droit allemand, par l'intermédiaire de son représentant pour la France, la société Dispatec, des bobines de papier Tritex, dont la livraison devait intervenir le 15 juin 2011.

Le 22 juin 2011, la société Dispatec a informé la société CFT d'une erreur intervenue dans l'enregistrement de la commande passée le 18 mai 2011 auprès de la société Aluminium Feron, la livraison ayant été reportée, de ce fait, au 29 juillet 2011.

La Société CFT a produit alors 500 000 tickets avec les bobines reçues pour un client à Tenerife, qui quelques mois après, se plaignait de la mauvaise qualité des tickets et de l'impossibilité de les utiliser, à raison d'un défaut de planéité, ce qui occasionnait des bourrages dans les équipements.

À la suite d'échange avec l'intermédiaire des essais ont été réalisés et la société CFT a refusé de régler la facture.

Par ordonnance du 07 janvier 2013, statuant sur requête en injonction de payer européenne de la société Aluminium Feron Gmbh et co (ayant siège en Allemagne), le président du tribunal de commerce de Dunkerque a enjoint à la S. A. Cubit France technologies ( CFT) de payer à la requérante la somme de 13 699,80 euros en principal, outre dépens dont 38,87 € pour frais de greffe. Cette décision a été signifiée le 12 février 2013.

Par déclaration reçue au greffe le 27 février 2013, la société Cubit France technologies a formé opposition à cette décision qui lui avait été signifiée le 12/02/2013.

Sur opposition, à la demande de la société Cubit France technologies, par jugement contradictoire et en premier ressort en date du 17 novembre 2014, le tribunal de commerce de Dunkerque a, en vertu des dispositions de l'article L 424-12 du code de procédure civile, :

- condamné la société Cubit France technologies à payer à la société Aluminium Feron Gmbh & co, la somme de 13 699,80 euros en principal, majorée des intérêts à compter du 12 février 2013 au taux légal défini par l'article L.313-2 du code monétaire et financier,

- rejeté toute demande indemnitaire supplémentaire,

- vu la nature et l'ancienneté du litige, prononce l'exécution provisoire de la présente décision,

- condamné la société Cubit France technologies aux entiers dépens, incluant ceux de l'ordonnance ainsi que de sa signification, outre les dépens.

Par déclaration en date du 16 avril 2015, la société Cubit France technologies a interjeté appel de la décision.

MOYENS ET PRÉTENTIONS :

Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 29 décembre 2015, la Société Cubit France technologies demande à la cour de :

- réformer dans son intégralité le jugement rendu le 17 novembre 2014,

- en conséquence, au visa des articles 144 et 146 du code de procédure civile,

- ordonner avant dire droit une mesure d'expertise judiciaire sur les bobines de papiers Tritex restantes de la commande avec pour mission de :

- se rendre sur les lieux où sont entreposées les bobines de papiers,

- identifier précisément les bobines, objet de la présente affaire,

- se faire communiquer tout document utile,

- entendre tout sachant,

- déterminer les caractéristiques essentielles du papier Tritex et décrire les éventuels défauts de conformité apparents et cachés,

- constater précisément si les bobines présentent un défaut de planéité et une délimination,

- préciser si les bobines de papiers Tritex répondent à l'usage auquel on les destinait,

- fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la cour de déterminer les responsabilités encourues et d'évaluer s'il y a lieu les préjudices subis,

- sur le fond, au visa des articles 35 et suivants de la convention des nations unies sur les contrats de vente internationale de marchandises,

- la dire et juger recevable en son opposition,

- constater et juger que la Société Aluminium Feron a manqué à son obligation essentielle de délivrance conforme,

- débouter la même de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- en tout état de cause,

- condamner la Société Aluminium Feron à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers frais et dépens.

Au soutien de sa demande d'expertise technique sur les bobines litigieuses, elle fait valoir que :

- cette mesure est nécessaire pour déterminer si les bobines fournies présentaient des non conformités ;

- elle n'a pas pour but de suppléer sa carence dans l'administration de la preuve ;

- elle est en mesure de verser aux débats de nombreux éléments (échanges de mails démontrant que les bobines de papier reçues étaient affectées d'un défaut de planéité et d'une délimination, photos prises afin de corroborer les constations) ;

- tant la société Aluminium Feron que la société Dispatec ont refusé de se rendre, en son sein, pour prendre part à la reproduction de tickets avec les bobines litigieuses, les bobines, à ce jour, ayant été réexpédiées à la société Aluminium Feron, à leur demande, la mettant ainsi dans l'impossibilité d'établir leur défectuosité tant par voie de constat que par un expert agrémenté.

Sur la non conformité de la marchandise livrée, elle mentionne :

- un défaut de planéité et une dénonciation, dès la réception des marchandises, de la qualité des marchandises, qui lui avaient été livrées compte tenu des défauts du produit livré,

- l'application nécessaire de la convention de Vienne, s'agissant d'un litige ayant trait à la vente de marchandise entre une société établie en Allemagne et un acheteur établi en France, étant précisé que les deux pays ont tous deux adhérés à ladite convention,

- la production des bobines litigieuses faite en urgence suite à l'erreur commise par Dispatec dans le cadre de l'enregistrement de la commande qui peut expliquer ce défaut.

Elle se prévaut de :

- l'article 35 de la convention de vente internationale de marchandises, mettant à la charge du vendeur une obligation essentielle, à savoir celle de livrer une marchandise conforme au contrat,

- de l'article 36 de la convention, qui dispose, quant à lui, que le vendeur est responsable conformément au contrat et à la présente convention, de tout défaut de conformité qui existe au moment du transfert des risques à l'acheteur, même si ce défaut n'apparaît qu'ultérieurement,

- de l'article 39 alinéa 2 qui offre un délai de deux ans à compter de la remise effective de la marchandise pour dénoncer un défaut apparu tardivement,

Elle estime ne pas être déchue de son droit d'invoquer le défaut de conformité de la marchandise au motif que le délai raisonnable n'avait pas été respecté, soulignant que la dénonciation de la non conformité est intervenue le 7 octobre 2011, à réception de la réclamation de sa co contractante, soit dans un délai raisonnable en raison des faits de l'espèce : multiplicité des intervenants, type de marchandises, urgence dans laquelle elle a livré la marchandise, la société Dispatec ayant égaré sa commande et la livraison étant intervenue avec retard alors même que son client attendait le produit.

Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 14 septembre 2015, la SARL Aluminium Feron Gmbh demande à la cour, au visa des dispositions des articles 54 et suivants et 78 de la convention des Nations unies sur les contrats de vente internationale de marchandises ( CVIM) , de l'article 4- 1- a) du Règlement Rome l; du paragraphe 288 du code civil allemand, de :

- à titre principal,

- constater que la demande d'expertise de la société Cubit France technologies SA a pour unique but de pallier la propre carence de cette dernière dans l'administration de la preuve,

- dire et juger que l'expertise judiciaire demandée par la société Cubit France technologies SA est inutile, frustratoire et inopérante,

- dire et juger que la société Cubit France technologies SA reste lui devoir, à titre principal la somme de 13 699,80 euros au titre de la marchandise impayée,

- dire et juger que cette somme génère des intérêts de retard à un taux de huit points au dessus du taux de base allemand à compter du 1er octobre 2011,

- dire et juger que la société Cubit France technologies SA est déchue du droit d'invoquer la non conformité des marchandises qui lui ont été vendues pour non respect du délai de dénonciation prévu à l'article 39 alinéa 1 de la convention de Vienne,

- dire et juger qu'à défaut d'avoir prononcé la résiliation du contrat de vente dans un délai raisonnable au sens de l'article 49 de la CVIM la société Cubit France technologies SA ne saurait en aucun cas être libérée de son obligation de paiement du prix,

- à titre subsidiaire,

- dire et juger que la société Cubit France technologies SA ne rapporte pas la

preuve de l'existence d'un défaut de conformité de la marchandise livrée qui lui soit imputable,

- en conséquence,

- confirmer le jugement entrepris, sauf en sa disposition majorant la somme en principal des intérêts à compter du 12 février 2013 au taux légal défini par l'article L. 313-2 du code monétaire et financier,

- et statuant à nouveau sur ce chef,

- fixer les intérêts moratoires à un taux de huit points au dessus du taux de base allemand à compter du 1er octobre 2011,

- condamner la société Cubit France technologies SA à lui payer la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 code de procédure civile,

- condamner la société Cubit France technologies SA aux entiers frais et dépens, y compris ceux de la procédure d'injonction de payer.

Elle fait remarquer que la société CFT se prévaut d'une modification unilatérale de la quantité commandée, sans qu'elle ne l'ait acceptée et s'appuie sur une date de livraison fictive qu'elle tente de fixer unilatéralement ; que toutefois la société CFT n'y attache aucune conséquence juridique.

Elle s'oppose à la demande d'expertise avant dire droit des bobines soulignant que cette demande n'est pas recevable car elle a pour unique dessein de pallier la carence de la société CFT dans l'administration de la preuve ; que les allégations de non conformité de la société CFT sur lesquelles elle fonde sa demande, ne reposent que sur des échanges de courriers entre les parties imprécis et des photographies indistinctes ; que ces éléments qui n'ont pas de nature contradictoire ne prouvent en aucune façon la non conformité des bobines, la société CFT n'ayant même pas pris la peine d'étayer ses allégations par un constat d'huissier ou par un rapport d'expertise détaillé.

Elle précise apporter la preuve que les bobines sont exemptes de tout vice, puisqu'elle a testé les bobines litigieuses et a pu constater que celles ci étaient exemptes de tout défaut, ce dont elle a informé la société CFT par courriel du 21 mars 2012.

Sur les sommes dues, elle mentionne que les parties ont conclu un contrat de vente de marchandises dans lequel elle s'est engagée à livrer à l'appelante les bobines commandées à cette dernière pour un prix de 13 669,80 euros ; que l'article 59 de la CVIM est applicable et que le contrat prévoyait des conditions de paiement qui sont incluses dans l'offre de la société CFT.

Elle soutient que le refus de paiement est injustifié ; que le prix était exigible dès le 30 septembre 2011 et que le prétendu défaut de conformité serait apparu suite à la réclamation de son cocontractant espagnol en date du 5 octobre 2011 ; que le prix n'était ainsi pas payé à la date contractuelle, sans pour autant que la société CFT ait pu à cette date avoir eu connaissance du prétendu vice de conformité.

Si la cour devait considérer que la société CFT rapportait la preuve d'un défaut de conformité de la marchandise livrée, alors elle ne pourrait que constater que cette dernière est déchue de son droit de se prévaloir de tout défaut de conformité en application des articles 38 et 39 de la CVIM (examen des marchandises à réception et délais raisonnables).

Elle souligne que tout porte à croire que la société CFT n'a pas procédé à un examen de la marchandise dans le bref délai à compter de la réception, en tout état de cause, elle n'en apporte pas la preuve qui lui incombe.

A titre subsidiaire, elle maintient qu'à défaut d'avoir résolu le contrat dans un délai raisonnable, la société CFT ne saurait en aucun cas être libérée de son obligation de paiement ; que la société CFT allègue être libérée de son obligation de paiement du prix, sans préciser sur quel fondement juridique elle fonde cette prétention ; que la résolution du contrat ayant un tel effet, l'article 81 alinéa 1 de la CVIM aurait du être appliquée pour fonder son refus de paiement ; que les formalités de l'article 26 de la même convention (déclaration de résolution du contrat n'ayant d'effet que si elle est faite par notification à l'autre partie) font défaut en l'espèce.

Sur le défaut, elle précise qu'aucun élément permet d'affirmer l'existence d'un vice antérieur à l'utilisation ; que la société CFT a accepté la livraison en signant tant le bon de livraison que la liste de colisage, sans émettre aucune réserve ; qu'elle n'a fait part du prétendu défaut de conformité que par courrier en date du 7 octobre 2011, et ce après avoir reçu la première lettre de relance en paiement ; que rien ne permet d'affirmer que la production ait été faite en urgence.

Elle soutient que les tests effectués établissent sa bonne foi et la livraison conforme.

Sur les intérêts moratoires, la société demande d'infirmer le jugement sur ce point, des lors que les intérêts de retard courent en l'espèce à compter du 1er octobre 2011 soit le lendemain de la date d'exigibilité de la facture, et avec application d'un taux d'intérêt de huit points au dessus du taux de base allemand (article78 de la convention).

Elle précise que s'agissant du montant des intérêts, la CVIM ne comportant aucune disposition sur le

taux d'intérêts de retard applicable, il y a lieu de se référer aux règles de conflit de lois applicables en l''espèce pour déterminer la loi applicable au contrat s'agissant des questions non traitées par la CVIM ; que le contrat liant les sociétés ayant été conclu postérieurement au 17 décembre 2009, la loi applicable à ce contrat se détermine en application du Règlement (CE) n°593/2008 du parlement européen et du conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (ci après « Règlement Rome I '') et que l'article 4-1- a) du Règlement Rome I dispose que : « le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle '' ; que le taux d'intérêts de retard applicable en l'espèce se détermine en application de la loi allemande, et plus précisément du paragraphe 288 du code civil allemand.

MOTIFS :

- Remarques :

' Aux termes de l'article 2 alinéa 1er de la constitution du 4 octobre 1958, la langue de la République est le français.

Cette obligation d'utiliser la langue française s'impose au juge ainsi qu'aux parties, tant pour leurs écritures que pour les actes et documents qu'elles présentent au juge.

Si l'ordonnance de Villers Cotterêts du 25 août 1539 ne vise que les actes de procédure, le juge est fondé dans l'exercice de son pouvoir souverain, à écarter comme élément de preuve un document écrit en langue étrangère, faute de production d'une traduction en langue française.

Il appartient donc au juge du fond d'apprécier, y compris d'office et sans avoir à inviter au préalable les parties à fournir une traduction, s'il convient ou non d'écarter un document rédigé en langue étrangère.

En l'espèce, les pièces 4, 7, 14, et 15, produites par la société Cubit France technologies, rédigée, soit en langue anglaise, soit en espagnol, ne sont pas traduites.

Il convient en conséquence d'écarter ces pièces des débats.

Cependant, en ce qui concerne la pièce 14 de l'appelant non traduit, l'intimé offre une traduction en français de ladite pièce en pièce 13, dont il pourra être tenu compte.

- Sur la demande d'expertise :

Aux termes des dispositions de l'article 144 du code de procédure civile, les mesures d'instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer.

Conformément aux dispositions de l'article 146 du code de procédure civile, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.

*****

Alors même que la livraison des biens litigieux aurait eu lieu le 29 juillet 2011, ce n'est qu'en cause d'appel que la société Cubit France technologies sollicite à titre principal une expertise, arguant de l'absence de conformité de la chose livrée.

Or, les allégations de non conformité sur lesquelles la société Cubit France technologies fonde sa

demande d'expertise, ne reposent que sur quelques mails et courriers, échangés notamment avec son intermédiaire, échanges qui demeurent pour le moins imprécis et qui émanent en grande partie d'elle même, ce qui les prive de tout intérêt, nul ne pouvant se constituer de preuve à soi même.

De même, des photographies sont produites pour attester de la non conformité, sans qu'il soit possible de déterminer ni l'auteur desdites photographies, ni la date, ni le contexte dans lequel elles ont été prises, soit après transformation par la société Cubit France technologies et avant transport au client final ou après transport.

Aucun élément n'est apporté pour permettre de déterminer dans quelles circonstances précises les opérations de transformation ont été réalisées, notamment sur quelle machine, alors même que la société Feron met en cause, depuis l'origine, le processus de réalisation des tickets par la société Cubit.

De plus, la société Cubit France technologies est particulièrement taisante sur les constatations matérielles qui pourraient être faites, dans le cadre d'une mission d'expertise éventuellement confiée à un technicien, alors même que plus de 5 ans se sont écoulés depuis la livraison, qu'elle s'est départie des bobines sans qu'il ne soit établi que la société Feron soit encore en possession des bobines litigieuses et sans que puisse être déterminée la machine utilisée pour réaliser la transformation des bobines.

Surtout, la société Cubit France technologies tente de tirer bénéfice du refus de la société Feron de venir en ses locaux pour réaliser des tests contradictoires puis du retour fait par ses soins des bobines dans les locaux de cette dernière, pour justifier sa demande en cause d'appel.

Or, ces faits sont totalement inopérants, puisqu'ils n'empêchaient aucunement l'appelante, en son temps - le retour des bobines à la société Feron n'ayant été réalisé qu'en février 2012 -, de procéder à des constatations, dignes de ce nom, notamment par le biais de constat d'huissier, d'une expertise privée. Une demande de mesure d'instruction in futurum aurait en outre tout à fait pu être envisagée.

Disposant alors de tous les éléments en sa possession (machine utilisée et bobines litigieuses jusqu'à leur réexpédition), en atteste d'ailleurs la réédition gratuite de tickets effectuée par ses soins en faveur de son client, elle ne saurait, en cause d'appel, se prévaloir de sa seule carence dans l'administration de la preuve, pour solliciter une mesure expertale.

Elle fait état de difficultés dans la réédition des tickets, ayant donné lieu également à des difficultés soit moindre soit similaire, sans encore qu'aucun élément objectif et probant ne soit versé aux débats.

En conséquence, il convient de débouter la société Cubit France technologies de sa demande d'expertise avant dire droit.

- Sur la demande en paiement et la livraison de bien conforme :

' Aux termes des dispositions de l'article 35 de la convention des Nations unies sur les contrats de vente internationale de marchandises (dites 'convention de Vienne'), le vendeur doit livrer des marchandises dont la quantité, la qualité et le type répondent à ceux qui sont prévus au contrat, et dont l'emballage ou le conditionnement correspond à celui qui est prévu au contrat.

À moins que les parties n'en soient convenues autrement, les marchandises ne sont conformes au contrat que si elles sont propres aux usages auxquels serviraient habituellement des marchandises du même type.

L'article 36 de la convention de Vienne dispose que le vendeur est responsable, conformément au contrat et à la présente convention, de tout défaut de conformité qui existe au moment du transfert

des risques à l'acheteur, même si ce défaut n'apparaît qu'ultérieurement.

Conformément à l'article 38 de la même convention, l'acheteur doit examiner les marchandises ou les faire examiner dans un délai aussi bref que possible eu égard aux circonstances, l'article 39 disposant que l'acheteur est déchu du droit de se prévaloir d'un défaut de conformité s'il ne le dénonce pas au vendeur, en précisant la nature de ce défaut, dans un délai raisonnable à partir du moment où il l'a constaté ou aurait dû le constater et dans tous les cas, est déchu du droit de s'en prévaloir, s'il ne le dénonce pas au plus tard dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les marchandises lui ont été effectivement remises.

L'article 49 de cette convention prévoit que lorsque le vendeur a livré les marchandises, l'acheteur est déchu du droit de déclarer le contrat résolu s'il ne l'a pas fait en cas de contravention autre que la livraison tardive, dans un délai raisonnable à partir du moment où il a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance de cette contravention.

' Aux termes des dispositions de l'article 54 de la convention, l'obligation qu'a l'acheteur de payer le prix comprend celle de prendre les mesures et d'accomplir les formalités destinées à permettre le paiement du prix qui sont prévues par le contrat ou par les lois et les règlements.

Selon l'article 59 de ladite convention, l'acheteur doit payer le prix à la date fixée au contrat ou résultant du contrat et de la présente convention, sans qu'il soit besoin d'une demande ou autre formalité de la part du vendeur.

Conformément à l'article 78 de ce texte, si une partie ne paie pas le prix ou toute autre somme due, l'autre partie a droit à des intérêts sur cette somme, sans préjudice des dommages et intérêts qu'elle serait fondée à demander en vertu de l'article 74 de la convention.

* * *

' La présente vente, au vu de son caractère international et au vu de la localisation des sièges respectifs des parties en cause, est soumise à la convention des nations unies sur les contrats de vente internationale de marchandises du 11 avril 1980.

Même si la société Cubit France technologies consacre de longs développements sur la date de livraison envisagée et les quantités sollicitées, non respectées selon elle par la société Aluminium Feron, elle n'en tire aucune conséquence juridique, limitant sa seule critique effective au défaut de conformité de la chose livrée pour refuser le paiement des prestations.

Seul ce point sera donc examiné par la cour.

' La société Feron ne saurait légitimement soutenir que la société Cubit France technologies serait nécessairement déchue de son droit à se prévaloir de tout défaut de conformité en application des dispositions de l'article 38 et 39 de la convention internationale précitée.

Il ressort des courriers et mails échangés entre les parties (pièces appelant 6, 8 et 9 ; pièces 13 Feron), mais également des énonciations des écritures des parties, non contestées devant la cour, qu'après la livraison des bobines intervenue fin juillet 2011, dès la réception par la société Cubit France technologies de la dénonciation par son propre client de dysfonctionnements dans l'usage des tickets produits à partir des bobines, soit le 5 octobre 2011, cette dernière a répercuté les difficultés à son propre fournisseur le 7 octobre 2011 (mail du 7 octobre 2011, comprenant sa réclamation et quelques photographies émanant du client), aucun élément du dossier ne permettant d'affirmer que l'éventuel défaut était perceptible auparavant par la société Cubit France technologies.

En conséquence, au vu des circonstances de la cause, la réclamation de la société Cubit France

technologies est intervenue dans un délai raisonnable après la dénonciation par son propre client du défaut qu'elle allègue.

' Pour être libérée de son obligation de payer le prix, la société Cubit France technologies se prévaut de défauts de conformité de la marchandise livrée, qui consisteraient, selon elle, en un défaut de planéité des tickets produits à partir des bobines et une délamination du papier, étant précise que dans ces dernières écritures elle ne reprend expressément que le défaut de planéité.

Cependant, force est de constater que la société Cubit France technologies se contente en la matière de simples affirmations puisque :

- les quelques mails épars et les photographies jointes ne permettent nullement de déterminer si les éventuels défauts allégués sont imputables à la société Feron et aux bobines livrées par cette dernière,

- aucune constatation précise n'a été effectuée sur les biens livrés avant tout

processus supplémentaire de transformation industrielle (production des tickets) et/ou de transports,

- des désordres issus de ces opérations, notamment une défectuosité des machines utilisées pour effectuer la production de ticket ou des dégradations survenues dans le cadre du transport, ne peuvent être totalement écartés,

- les dires de la société Cubit France technologies, selon lesquels ces défauts seraient imputables à une production par la société Feron des bobines en urgence à raison de l'erreur commise dans l'enregistrement initial de la commande par la société Dispatech ne sont corroborés par aucun élément objectif.

À juste titre les premiers juges ont donc estimé que les défauts allégués n'étaient pas prouvés et ne pouvaient être opposés valablement par la société Cubit France technologies à la demande en paiement effectuée par la société Feron. La décision de première instance sera confirmée de ce chef

' À la suite d'une offre de prix n°7310 du 13 mai 2011 et des échanges de mail entre la société CFT et la société Feron des 16 et 18 mai 2011, une commande de bobines a été régularisée en date du 18 mai 2011 pour un montant de 13 669,80 euros.

Si les mails subséquents à l'offre de prix du 13 mai 2011 ont permis d'ajuster le prix convenu les parties, à savoir un prix réduit à 118 euros les 100 m² ( au lieu de 120 euros), aucun autre élément n'était discuté, et notamment pas les conditions de paiement.

Or, l'offre de prix mentionnait un paiement 60 jours fin de mois, la société Cubit France technologies ne discutant pas cet élément.

Cette échéance était d'ailleurs reprise sur la facture édictée le 29 juillet 2011, qui mentionnait un paiement au 30 septembre 2011.

La société Cubit France technologies a accepté la livraison en signant tant le bon de commande que la liste de colisage, et ce sans réserve, le 29 juillet 2011.

Or, malgré l'existence de relances, cette facture demeure impayée. Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges, en application des dispositions de l'article 54 de la convention précitée, ont condamné la société Cubit France technologies à payer à la société Feron la somme de 13 669,80 euros.

' Si l'article 78 de la convention envisage la possibilité pour la partie non payée de solliciter, outre des dommages et intérêts éventuellement, des intérêts, il n'en demeure pas moins que la convention de Vienne ne comporte aucune disposition spécifique pour déterminer le taux d'intérêt de retard applicable s'agissant d'une vente internationale.

Pour les matières non tranchées par la convention, les questions seront réglées conformément à la loi applicable en vertu des règles de droit international privé.

Le règlement Rome 1 du 17 juin 2008 fait suite et remplace la convention de Rome du 19 juin1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles internationales.

Il s'en évince que les parties d'un contrat peuvent choisir la loi régissant le contrat, étant précisé qu'à défaut de choix exprès entre les parties, dont en l'espèce il n'est pas justifié, le type de contrat détermine la loi applicable.

Or, en application de l'article 4-1 a) du règlement Rome I selon lequel' le contrat de vente de biens est régi par la loi du pays dans lequel le vendeur à sa résidence habituelle', la loi applicable aux relations contractuelles litigieuses, pour les questions

non couvertes par la convention internationale de Vienne est le droit allemand, et plus précisément le paragraphe 288 du code civil allemand.

Il résulte de ce texte, produit par l'intimé avec sa traduction française, que le taux d'intérêts applicable, s'agissant d'un contrat conclu entre deux commerçants, est de huit points au dessus du taux de base allemand conformément aux dispositions de l'aliéna 2.

En conséquence, la condamnation portera intérêt à un taux de huit points au dessus du taux de base allemand conformément à l'aliéna 2 de l'article 288 du code civil allemand, à compter de la date d'exigibilité de la facture, soit le1er octobre 2011 conformément aux dispositions des articles 59 et 78 de la convention de Vienne.

Sur ce point, le jugement déféré devra donc être amendé.

- Sur les dépens et accessoires :

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la société Cubit France technologies succombant en ses prétentions, elle sera condamnée aux dépens d'appel.

Les dispositions de la décision de première instance relatives aux dépens et à l'indemnité procédurale seront donc confirmées, l'intimée ne formant pas d'appel incident du chef des dispositions de première instance l'ayant débouté de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En outre, il convient de condamner la société Cubit France technologies à payer à la société Feron la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Cubit France technologies ne peut qu'être déboutée de sa demande d'indemnité procédurale.

PAR CES MOTIFS :

ECARTE les pièces non traduites 4, 7, 14 et 15 produites par la Société Cubit technologies France des débats ;

REJETTE la demande d'expertise présentée par la Société Cubit France technologies;

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Dunkerque en date du 17 novembre 2014, sauf en ces dispositions concernant les intérêts moratoires ;

Statuant à nouveau de ce seul chef,

DIT que la condamnation portera intérêt à un taux de huit points au dessus du taux de base allemand à compter de la date d'exigibilité de la facture, soit le1er octobre 2011 ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la Société Cubit France technologies à payer à la société Aluminium Feron Gmbh la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la société Cubit France technologies de sa demande d'indemnité procédurale ;

CONDAMNE la société Cubit France technologies aux dépens d'appel.