CA Versailles, ch. com. 3-1, 1 février 2024, n° 22/03965
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Mercer France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Thomas
Conseillers :
Mme Gautron-Audic, Mme Meurant
Avocats :
Me Dupuis, Me Le Corroncq, Me Arena, Me Schwertz, Me de Bazelaire de Lesseux
EXPOSÉ DES FAITS
La société Mercer France, ci-après dénommée la société Mercer, est une société de conseil en ressources humaines, santé, prévoyance, retraite et investissements, qui développe son activité en France depuis mars 1993. Elle appartient à un groupe international dont la holding est la société de droit américain, Mercer LLC. Elle propose à ses clients des prestations de conseil, de courtage et de gestion de leurs contrats dans ces différents domaines.
Mme [E] [X] a été salariée de la société Cipres Vie selon contrat de travail du 18 avril 2008, puis de la société Repca en vertu d'un avenant du 28 mars 2011, cette dernière ayant absorbé la société Cipres Vie. Le 30 mars 2012, la société Repca a été cédée à la société Mercer, dont elle est devenue une filiale à 100 %. À compter du 2 janvier 2014 et par suite de la transmission universelle du patrimoine de la société Repca à la société Mercer, Mme [X] est devenue salariée de cette dernière. Elle occupait un poste de directrice d'un département au sein de la branche opérationnelle de la société consacrée à la santé et à la prévoyance, et plus précisément au sein d'un segment dénommé Momentum dédié aux clients dont l'effectif est compris entre 100 et 3.000 salariés. Son portefeuille était composé de 97 clients dont 34 clients de la société Repca. Mme [X] a démissionné de la société Mercer le 28 mars 2014 et a été embauchée par la société Ascore, filiale du groupe Axiome.
Mme [V] [C] et Mme [I] [U], membres de la même équipe que Mme [X] et anciennes salariées elles aussi de la société Cipres Vie, puis de la société Repca, ont également démissionné de leurs postes respectifs de technico-commerciale et de chargée de compte, les 15 et 16 avril 2014, avant d'être embauchées pour la première, par la société Axiome Assurances, ci-après dénommée la société Axiome, elle aussi filiale du groupe Axiome, et pour la seconde, par la société Ascore.
Estimant avoir subi une grave désorganisation du fait d'agissements déloyaux commis à son encontre par la société Axiome et ses trois anciennes salariées, la société Mercer a sollicité du président du tribunal de commerce de Nanterre l'autorisation de faire procéder par huissier de justice à des opérations de constat et de saisie de pièces dans les locaux de la société Axiome.
Par ordonnance du 30 octobre 2014, le président du tribunal de commerce a fait droit à sa requête. Le même jour, l'huissier requis, assisté d'un technicien informatique, a procédé à la saisie et à la mise sous séquestre d'un certain nombre de documents, fichiers électroniques et courriels. Cette décision a été confirmée par un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 7 avril 2016, laquelle a toutefois ordonné la restitution à la société Axiome des copies séquestrées entre les mains de l'huissier portant sur les dossiers papier originaux saisis.
C'est dans ces conditions que, par actes du 2 janvier 2015, la société Mercer a fait assigner Mmes [X], [C] et [U] et la société Axiome devant le tribunal de grande instance de Nanterre sur le fondement de l'article 1382 du code civil pour voir ordonner que les documents appréhendés par l'huissier de justice lui soient remis et condamner in solidum les défenderesses au paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison des agissements déloyaux et parasitaires commis par celles-ci.
Par ordonnance du 10 mars 2016, le juge de la mise en état a rejeté les exceptions d'incompétence de la juridiction saisie au profit du tribunal de commerce de Nanterre et de sursis à statuer soulevées par Mmes [X], [C] et [U] et la société Axiome.
Par ordonnance du 13 octobre 2016, le juge de la mise en état a notamment ordonné une expertise, confiée à M. [Y], aux fins de procéder au tri des fichiers électroniques, après avoir préalablement écarté ceux qui n'étaient pas relatifs à l'affaire, entre ceux qui ne relevaient pas du secret des affaires et les retenir, ceux qui relevaient intégralement du secret des affaires et les écarter et ceux qui relevaient pour partie du secret des affaires et pour partie de l'affaire, et procéder à leur confidentialisation avant de les retenir.
Par ordonnance du 12 janvier 2017, le retrait de l'affaire du rôle a été ordonné dans l'attente du déroulement de l'expertise.
L'expert [Y], a déposé son rapport le 13 octobre 2017.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 avril 2018, la société Mercer France a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle.
Par ordonnance du 27 juin 2019, le juge de la mise en état a déclaré irrecevables Mmes [X], [C] et [U] en leur exception d'incompétence au profit du conseil de prud'hommes de Nanterre, dès lors qu'elles avaient d'ores et déjà conclu au fond.
En cours de procédure, les sociétés Mercer et Axiome, aux droits de laquelle est intervenue la société Entoria, ont engagé des pourparlers et sont parvenues à la conclusion d'un accord transactionnel.
Par ordonnance du 25 mars 2021, le juge de la mise en état a constaté le désistement de la société Mercer de l'instance et de l'action engagées contre la société Axiome, aux droits de laquelle est venue la société Entoria.
Par jugement du 28 mars 2022, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
- Rejeté l'intégralité des demandes de la société Mercer France ;
- Condamné la société Mercer France, en réparation du préjudice moral causé par l'exercice abusif de son droit d'agir en justice, à payer à Mmes [E] [X], [I] [U] et [V] [C], la somme de 5.000 € chacune ;
- Rejeté la demande de la société Mercer France au titre des frais irrépétibles ;
- Condamné la société Mercer France à payer à Mmes [E] [X], [I] [U] et [V] [C], la somme de 15.000 € chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société Mercer France à supporter les entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût du constat d'huissier et de l'expertise ;
- Dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement.
Par déclaration du 15 juin 2022, la société Mercer a interjeté appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 6 mars 2023, la société Mercer demande à la cour de :
- Déclarer recevable et bien fondé l'appel formé par la société Mercer France ;
Y faisant droit,
- Infirmer le jugement n° 18/04054 rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre en date du 28 mars 2022 en ce qu'il a :
- Rejeté l'intégralité des demandes de la société Mercer France ;
- Condamné la société Mercer France, en réparation du préjudice moral causé par l'exercice abusif de son droit d'agir en justice, à payer à Mmes [E] [X], [I] [U] et [V] [C], la somme de 5.000 € chacune ;
- Rejeté la demande de la société Mercer France au titre des frais irrépétibles ;
- Condamné la société Mercer France à payer à Mmes [E] [X], [I] [U] et [V] [C] la somme de 15.000 € chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamné la société Mercer France à supporter les entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût du constat d'huissier et de l'expertise ;
En conséquence, statuant à nouveau,
- Juger que Mme [X], Mme [C] et Mme [U] se sont rendues coupables d'actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société Mercer France ;
- Déclarer mal fondés les appels incidents formés par Mme [X], Mme [C] et Mme [U], les en débouter ainsi que de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;
- Condamner in solidum Mme [X], Mme [C] et Mme [U] à payer chacune la somme d'1 € à la société Mercer à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice commercial et de désorganisation subie du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire ;
- Condamner in solidum Mme [X], Mme [C] et Mme [U] à payer la somme de 30.000 € à Mercer France sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner in solidum Mme [X], Mme [C] et Mme [U] aux entiers dépens, en ce compris les frais liés de constat d'huissier, d'expertise judiciaire et du sapiteur à hauteur de la somme de 30.000 €.
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 22 novembre 2023, Mme [I] [U] demande à la cour de :
- Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre le 28 mars 2022, en ce qu'il a :
- Rejeté l'intégralité des demandes de la société Mercer France ;
- Condamné la société Mercer France à payer à Mme [U] la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, en ce compris les frais du constat d'huissier et de l'expertise ;
- Juger que Mme [U] n'a pas commis d'actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société Mercer France ;
- Débouter la société Mercer France de ses demandes à l'encontre de Mme [U] ;
Si par extraordinaire, la cour jugeait que Mme [I] [U] avait commis des actes de concurrence déloyale et parasitaires au préjudice de la société Mercer France,
- Juger que Mme [U], en qualité de préposée ayant agi dans l'exercice de ses fonctions, n'est pas responsable ;
- Juger que Mme [U] a agi dans l'exercice de ses fonctions et n'a pas excédé les limites des missions qui lui étaient confiées ;
En conséquence,
- Débouter la société Mercer France de ses demandes dirigées à l'encontre de Mme [U] ;
En tout état de cause,
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre le 28 mars 2022, en ce qu'il a condamné la société Mercer France à payer à Mme [U] la somme de 5.000 € en réparation du préjudice moral causé par l'exercice abusif de son droit d'agir en justice ;
- Condamner la société Mercer France à payer à Mme [U] la somme de 51.000 € de dommages et intérêts, à titre de réparation du préjudice moral, professionnel et économique subi du fait de l'action en concurrence déloyale engagée à son encontre par la société Mercer France ;
- Condamner la société Mercer France à une amende civile de 10.000 € sur le fondement de l'article 559 du code de procédure civile ;
- Condamner la société Mercer France à payer à Mme [U] la somme de 10.000 € de dommages et intérêts, à titre de réparation du préjudice moral subi du fait de l'appel abusif engagé par la société Mercer France ;
- Condamner la société Mercer France à payer à Mme [U] la somme de 15.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la société Mercer France aux entiers dépens.
Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 12 octobre 2023, Mme [E] [X] et Mme [V] [C] demandent à la cour de :
- Confirmer le jugement du 28 mars 2022 en ce qu'il a :
- Rejeté l'intégralité des demandes de la société Mercer France ;
- Condamné la société Mercer France à payer à Mme [X] et à Mme [C], chacune, la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, en ce compris les frais du constat d'huissier et de l'expertise ;
- Juger que Mme [X] et Mme [C] n'ont pas commis d'actes de concurrence déloyale et parasitaires au préjudice de la société Mercer ;
- Débouter la société Mercer de ses demandes formées contre Mme [X] et Mme [C] ;
Si par extraordinaire, la cour jugeait que Mme [X] et Mme [C] ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaires au préjudice de la société Mercer France,
- Juger que Mmes [X] et [C] ont agi dans l'exercice de leurs fonctions et ne sont pas responsables ;
- Juger que Mmes [X] et [C] ont agi dans l'exercice de leurs fonctions et n'ont pas excédé les limites des missions qui leur étaient confiées ;
En conséquence,
- Débouter la société Mercer France de ses demandes dirigées à l'encontre de Mmes [X] et [C] ;
En tout état de cause,
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre le 28 mars 2022, en ce qu'il a condamné la société Mercer France à payer à Mmes [X] et [C] chacune la somme de 5.000 € en réparation du préjudice moral causé par l'exercice abusif de son droit d'agir en justice ;
Statuant à nouveau,
- Condamner la société Mercer à verser à Mme [X] et Mme [C] la somme de 15.000 € chacune au titre de leur préjudice moral ;
- Condamner la société Mercer à verser la somme de 30.000 € à chacune des intimées au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
- Ordonner que les frais de l'expertise accomplie par M. [Y] soient intégralement mis à la charge de la société Mercer, en ce compris les honoraires du sapiteur informatique.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 novembre 2023.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit par l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
La société Mercer fait valoir que Mmes [X], [C] et [U] ont rejoint l'entreprise à la suite du rachat de la société Repca et qu'elles ont bénéficié à cette occasion d'incitations financières avantageuses. L'appelante explique avoir été confrontée en 2014, après le versement des primes exceptionnelles, à la démission concertée de ces salariées qui ont été embauchées par la société concurrente Axiome et ont tenté de détourner 11 des 21 clients du portefeuille dont elles avaient la charge. L'appelante soutient avoir finalement perdu 12 clients : 6 clients ayant décidé de rejoindre la société Axiome, 6 autres clients étant partis chez un autre courtier, et avoir dû octroyer des baisses tarifaires pour maintenir la relation avec 2 clients.
La société Mercer expose que le marché pertinent pour apprécier les faits de concurrence déloyale est celui du marché du courtage et de la gestion des contrats de prévoyance/santé souscrits par les entreprises commerciales auprès des assureurs pour leurs salariés ; qu'il n'y a pas lieu de distinguer les volets conseil et gestion qui sont indissociables au regard de la clientèle détournée. Elle estime que la diversité de taille des différents courtiers sur le marché, les usages du courtage et la volatilité des employés ne justifient ni l'existence d'une relation intuitu personae entre le client et les salariés du courtier, ni le non-respect du principe de loyauté commerciale. Elle rappelle avoir racheté la clientèle de la société Repca moyennant le prix de 14,6 millions d'€.
La société Mercer conteste avoir eu connaissance de l'embauche des salariées par la société Axiome lors de leur départ. Elle considère que les relations de confiance existante entre ces salariées ne justifient pas la déloyauté dont elles ont fait preuve, que la relation intuitu personae existant entre les salariées et les clients n'est pas démontrée et qu'il est indifférent que le nombre de clients détournés rapporté au volume de ses activités soit peu important, la faute étant constituée du seul fait de la réalisation des actes déloyaux.
L'appelante indique que trois salariées, Mmes [M], [B] et [G], ont été approchées par Mme [X] ou Mme [C] à la suite de leur départ dans l'optique de leur recrutement par la société Axiome, caractérisant un débauchage fautif.
L'appelante explique que les saisies opérées par l'huissier de justice et le rapport d'expertise établissent que les trois salariées en cause ont, avant leur départ de l'entreprise, transféré des documents comportant des informations confidentielles, notamment des noms et coordonnées de clients et de prospects de leurs messageries professionnelles vers leurs messageries personnelles et qu'elles ont, à leur arrivée au sein de la société Axiome, transféré les documents de leurs messageries personnelles vers leurs nouvelles messageries professionnelles. La société Mercer conteste le caractère public des données transférées. Elle ajoute que des dossiers papiers relatifs à des clients lui appartenant ont été retrouvés dans les bureaux, caissons et armoires des trois salariées au sein des locaux de la société Axiome.
L'appelante soutient que le démarchage organisé par les intimées est déloyal dans la mesure où il s'est appuyé notamment sur des informations et documents obtenus par les salariées dans le cadre de leurs fonctions dans leur ancien poste, en créant une confusion entre les sociétés Mercer et Axiome et en violation des règles de confidentialité applicables au sein de la société Mercer. Elle souligne que les 11 clients démarchés représentent 50 % de la clientèle de la société Repca, qu'elle a rachetée moyennant le prix précité de 14,6 millions d'€.
La société Mercer dénonce par ailleurs :
- l'appropriation de son savoir-faire, dès lors que l'expertise a établi que les salariées ont détourné de nombreux fichiers ayant fourni un avantage concurrentiel à la société Axiome en ce qu'ils lui ont permis d'établir ses propositions commerciales et donc de démarcher plus efficacement et plus rapidement ses clients ;
- la désorganisation de l'entreprise, dès lors que les départs des intimées ont provoqué la démission de deux autres membres de l'équipe de [E] [X], ces départs massifs ayant nécessité la mise en œuvre coûteuse de sélection de nouveaux collaborateurs et la mobilisation de collaborateurs d'autres équipes, non expérimentés dans le domaine de la prévoyance/santé, leur générant un surcroît de travail.
L'appelante soutient avoir subi un préjudice commercial lié à la perte de clientèle d'un montant variant entre 2.477.515 € et 3.572.515 €, un préjudice économique consécutif à la désorganisation d'un montant de 350.000 €. Elle indique néanmoins que pour tenir compte de la situation personnelle des intimées, elle limite sa demande à 1 € de dommages et intérêts.
Elle conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement d'une somme de 5.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive, soutenant que son action est légitime et que les salariées ne démontrent pas l'existence d'un préjudice.
Elle s'oppose aux demandes reconventionnelles des intimées, considérant que la faculté de faire appel d'une décision de justice n'est que l'expression du droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et qu'il importe peu que la somme demandée de 1 € en réparation de l'ensemble des préjudices subis soit symbolique, seul étant en cause le principe de la condamnation de pratiques frauduleuses, dans son intérêt et plus généralement dans l'intérêt du marché.
Mmes [X] et [C] répondent que leurs nouvelles conditions de travail au sein de la société Mercer ont été difficiles et ont entraîné le départ de nombreux collaborateurs. Elles expliquent ne s'être nullement enrichies en intégrant la société Axiome et font valoir que cette société évolue dans une sphère totalement différente de celle de la société Mercer au regard notamment des effectifs et des chiffres d'affaires respectifs des entreprises. Elles soulignent que la société Mercer ne peut prétendre avoir subi un préjudice par la perte de 5 de ses 3.200 clients. Mmes [X] et [C] contestent toute faute et manœuvre déloyale ou parasitaire, rappelant que le débauchage est licite et que les perturbations du fonctionnement de l'entreprise inhérentes à tout départ de salariés ne peut caractériser un dommage. Elles considèrent que la concomitance des départs de Mme [X] et de Mme [C] et de leur embauche par la société Axiome ne suffit pas à établir la déloyauté reprochée. Elles soutiennent qu'un simple déplacement de clientèle ne le permet pas davantage s'il n'est pas accompagné de manœuvre déloyales, alors qu'aucun procédé déloyal n'a été mise en œuvre pour démarcher les clients, en nombre très limité, de la société Mercer, les éléments d'information communiqués résultant du processus normal de partage des informations devant être transmises dans le cadre d'un mandat d'étude ou à l'occasion d'un ordre de remplacement. Mmes [X] et [C] contestent l'existence d'un savoir-faire propre à la société Mercer, soulignant que l'appelante se prévaut de fichiers communiqués par les clients ou les assureurs dont il a été démontré qu'ils n'ont pas été détournés. Elles ajoutent qu'en tout état de cause, si l'analyse des fichiers et courriels électroniques retrouvés sur les ordinateurs de Mmes [X], [C] et [U] confirme que la société Axiome se trouvait en possession de ce type de documents de la société Mercer, cette situation était parfaitement justifiée et légitime, aucune information n'ayant été irrégulièrement soustraite. Les intimées indiquent que la désorganisation invoquée par la société Mercer lui est entièrement imputable au regard des conditions de travail difficiles et de la gestion hasardeuse de l'entreprise. Mmes [X] et [C] soulignent que la société Mercer leur a accordé une dispense de préavis. Enfin, elles soutiennent que la société Mercer ne justifie d'aucun préjudice indemnisable et qu'en leur qualité de préposées de la société Axiome, seule la responsabilité de leur employeur serait susceptible d'être engagée. A titre reconventionnel, elles réclament 15.000 € chacune de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral, en raison de l'acharnement de la société Mercer à poursuivre pendant 8 ans une procédure inutile.
Mme [U] conteste également tout acte de concurrence déloyale. Elle considère que le débauchage illicite n'est pas démontré. Elle nie tout détournement de documents internes, soutenant que les informations n'étaient pas confidentielles et que de nombreux documents lui ont été remis par les clients après son arrivée au sein de la société Axiome. Elle estime que le détournement massif de clientèle n'est pas démontré par la société Mercer qui évoque la situation de 11 de ses 3.200 clients. Elle conteste tout démarchage abusif et tout dénigrement, expliquant que les clients en cause n'étaient pas satisfaits des prestations de la société Mercer. Elle estime que le jeu de la concurrence s'est opéré dans des conditions normales. Mme [U] soutient que la désorganisation de la société Mercer qui compte 650 salariés, par le départ de 5 d'entre eux, n'est pas caractérisée. Elle rappelle que la désorganisation de l'entreprise se distingue de sa simple perturbation et que c'est la désorganisation préexistante de la société Mercer qui a provoqué son départ et celui de ses collègues. Elle souligne que l'appelante l'a dispensée de l'exécution de son préavis. Enfin Mme [U] fait valoir que la société Mercer ne justifie pas d'un préjudice indemnisable, le déplacement de clientèle, qui résulte du jeu normal de la concurrence, ne pouvant donner lieu à réparation. Subsidiairement, elle soutient que la seule responsabilité de la société Axiome, commettant, peut être engagée à l'exclusion de celle de sa préposée. Elle réclame 10.000 € de dommages et intérêts.
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En application des dispositions de l'article 1240 et 1241, anciennement 1382 et 1383, du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait mais encore par sa négligence ou par son imprudence.
Comme l'a justement rappelé le tribunal, la concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de liberté du commerce. L'appréciation de la faute doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause.
Par ailleurs, le parasitisme consiste à profiter, de manière volontaire et déloyale, sans rien dépenser, des investissements, d'un savoir-faire, de la notoriété ou du travail intellectuel d'autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel.
Il ressort des écritures des parties que le marché pertinent sur lequel les actes reprochés ont été commis est celui du courtage des contrats de santé et de prévoyance à destination des entreprises et que les volets courtage et gestion de contrat sont susceptibles d'être assumés par des intervenants distincts du marché.
La cour relève que la société Mercer n'invoque pas la violation, par ses anciennes salariées, d'une obligation contractuelle de non-concurrence ou de confidentialité.
L'appelante invoque, au soutien de sa demande indemnitaire, les mêmes fautes que celles invoquées en première instance.
Avant de les examiner, il sera rappelé que :
- Mme [X] a démissionné de la société Mercer le 28 mars 2014 et a quitté l'entreprise le 16 mai 2014 ;
- Mme [C] a démissionné de la société Mercer le 14 avril 2014 et a quitté l'entreprise le 10 juin 2014, et non le 14 juin comme le soutient à tort la société Mercer (cf sa pièce n° 17) ;
- Mme [U] a démissionné de la société Mercer le 16 avril 2014 et a quitté l'entreprise le 16 juin 2014.
Comme le soutient la société Mercer, il ressort du courriel n° 21 figurant en annexe 4 du rapport d'expertise de M. [Y], que le 9 avril 2014, Mme [U] qui démissionnera le 14 avril 2014, s'est envoyée sur sa messagerie personnelle un courriel dans lequel elle a reporté, sur six pages, de multiples pavés de signature mentionnant le nom de sociétés clientes de la société Mercer, l'identité et la fonction des interlocuteurs au sein de ces sociétés, ainsi que leurs adresse mail et coordonnées téléphoniques ; qu'elle s'est ensuite renvoyée ce courriel depuis sa messagerie personnelle vers sa nouvelle adresse mail professionnelle après son arrivée au sein de la société Axiome le 23 juin 2014.
Mme [U] soutient que le courriel ne comporte pas de données confidentielles appartenant à la société Mercer et qu'elle n'aurait eu aucune difficulté à reprendre contact avec les interlocuteurs en cause, ne serait-ce que par l'intermédiaire des réseaux sociaux professionnels tels que Linkedin. Pourtant, alors qu'il n'est pas contesté que la société Mercer a payé à la société Repca une somme de 14,6 millions d'€ afin de racheter sa clientèle, la cour constate que les pavés de signature visent nommément les contacts pertinents au sein de l'entreprise, leur fonction, leur adresse mail et pour certains d'entre eux leur ligne directe ou leur numéro de téléphone portable. Or l'intimée ne justifie pas l'affirmation selon laquelle ces données peuvent aisément être retrouvées, notamment sur les réseaux sociaux. Ces informations appartenaient à l'employeur et ne pouvaient être transférées par Mme [U] au sein de la société concurrente Axiome. Elles ont permis à Mme [U] de bénéficier d'un avantage concurrentiel en disposant, dès son arrivée au sein de la société Axiome, de toutes les informations lui permettant de démarcher immédiatement les clients de la société Mercer.
La cour constate ainsi que figurent parmi les clients dont les coordonnées ont été récupérées, le centre hospitalier de [Localité 8] ou encore l'Hôpital [9]. Or, il ressort du rapport d'expertise que le 19 juin 2014, alors que Mme [U] vient juste de rejoindre la société Axiome, cette dernière a communiqué à Mme [X] une proposition d'audit destinée à l'hôpital [9], qui a manifestement été transmise, puisque par mail du 17 octobre 2014, Mme [U] a informé Mme [X] du refus de l'hôpital. Par ailleurs, le rapport d'expertise établit également que par mail du 18 juillet 2014, soit à peine un mois après son embauche par la société Axiome, Mme [U] a adressé à Mme [S], dont les coordonnées figurent dans les pavés de signature insérés dans le mail précité du 9 avril 2014, un modèle d'ordre de remplacement désignant à effet immédiat la société Axiome à la place de la société Mercer. Il est soutenu que Mme [S] est à l'initiative de ce changement de courtier, en raison de difficultés rencontrées dans la gestion du dossier prévoyance et frais de santé du centre hospitalier de [Localité 8]. Cependant, aucun élément de preuve ne permet de corroborer ces dires.
Si, en l'absence d'obligation contractuelle de non-concurrence l'engageant personnellement, un salarié peut en principe démarcher librement la clientèle que son ancien employeur exploitait jusqu'alors, en revanche, le démarchage de la clientèle est sanctionné si les moyens employés ne sont pas conformes aux usages loyaux du commerce. Or, l'appropriation, par des procédés déloyaux, d'informations confidentielles constitue un acte de concurrence déloyale.
En l'espèce, il résulte des éléments précités que Mme [U] a détourné des informations confidentielles relatives à la clientèle appartenant à la société Mercer, afin d'en profiter dans le cadre d'une action de démarchage, dès son arrivée dans l'entreprise, caractérisant ainsi un acte de concurrence déloyale.
Par ailleurs, il ressort d'un courriel du 5 juin 2014 que Mme [C], qui terminait son préavis au sein de la société Mercer, a envoyé depuis sa messagerie personnelle, un mail à Mme [X], alors salariée de la société Axiome, afin de lui transmettre des informations concernant le client Agnès B : " [E], (')
Sur Agnès B, j'ai récupéré la fiche client. [I] vous la remettra mardi mais demain matin je regarde si je peux trouver le nom de la DRH (') ".
Il ressort de ce courriel que Mme [C] a communiqué à Mme [X] la fiche client de la société Agnès B appartenant à la société Mercer. Les salariées soutiennent que Mme [X] souhaitait obtenir les coordonnées de la directrice des ressources humaines à titre personnel pour une de ses amies qui cherchait un emploi dans la mode. Cependant, ces dires ne sont corroborés par aucun élément de preuve. En outre, si les intimées relèvent que l'appelante ne se prévaut d'aucune action de démarchage auprès de ce client, il doit être rappelé que peu importe l'usage fait des informations détenues, le seul détournement d'informations confidentielles par des procédés déloyaux constituant un acte de concurrence déloyale.
La société Mercer se prévaut également de deux courriels que Mme [C] a adressés les 10 et 11 septembre 2014 à une société d'assurance LAMGD afin de solliciter de cette dernière ses propositions tarifaires dans le cadre d'une "étude des régimes prévoyance et frais de santé" pour les sociétés Endemol et Endemol Fiction, clientes de la société Mercer, laquelle soutient que sont joints à ces emails des fichiers de données lui appartenant.
Les fichiers en cause, produits en annexe 4 du rapport d'expertise, concernent la typologie des salariés de la société Endemol France et le détail des cotisations et des remboursements de frais de santé pour les années 2012 et 2013, avec la mention des taux d'évolution, pour les sociétés Endemol et Endemol France. Les intimées ne contestent pas que ces fichiers proviennent de la société Mercer et expliquent que Mme [F], de la société Endemol, après avoir sollicité les nouvelles coordonnées de Mme [X], a souhaité mettre en concurrence de nouveaux courtiers, cette démarché ayant été à l'origine d'un déjeuner avec l'intimée dont la facture est produite.
Cependant, la cour constate qu'il n'est pas démontré que Mme [F] est à l'origine d'une quelconque demande concernant une mise en concurrence, alors que les intimées expliquent qu'au regard de la déontologie applicable en matière de courtage, lorsqu'un client souhaite interroger un nouveau courtier, il lui adresse un mandat exclusif d'étude permettant à ce dernier, afin de réaliser son étude, voire un appel d'offres auprès des assureurs, de récupérer les pièces contractuelles nécessaires. Les intimées précisent également que le nouveau courtier peut obtenir les informations contractuelles ou relatives à la gestion du contrat de la part du client ou de l'assureur ou encore de l'ancien courtier, après autorisation de l'assureur.
S'agissant des clients Endemol et Endemol France, alors clientes de la société Mercer, Mmes [X] et [C] ne produisent aucun mandat d'étude.
En outre, il doit être souligné que la facture relative à un déjeuner de deux personnes est datée du 15 septembre 2014 ; qu'elle est donc postérieure aux mails des 10 et 11 septembre 2014 invoqués par l'appelante.
Il apparaît ainsi que Mme [C], alors salariée de la société Axiome, a utilisé des fichiers appartenant à la société Mercer, comportant des informations confidentielles relatives notamment aux frais exposés pour les salariés des sociétés Endemol et Endemol France, sans justifier d'une détention régulière de ces données au regard des usages de la profession, afin de procéder à une mise en concurrence, sans demande préalable, et permettre à Mme [X], à l'occasion d'un déjeuner ultérieur, de proposer à Mme [F], une mise en concurrence. La détention des informations confidentielles précitées a procuré un avantage certain à Mmes [C] et [X] dans le cadre de la mise en concurrence entreprise, l'assureur démarché bénéficiant du nombre et de la typologie des salariés, du montant des cotisations et des différents frais de santé exposés, ainsi que de leur évolution entre 2012 et 2013. La concurrence déloyale est établie.
En revanche, pour l'ensemble des autres faits, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte, que les premiers juges ont écarté tout fait de concurrence déloyale à l'égard des intimées.
*****
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que Mmes [X], [C] et [U] ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Mercer susceptibles de justifier l'allocation des dommages et intérêts sollicités. Toutefois, les intimées soutiennent, au visa de l'article 1242 du code civil, que leur responsabilité ne peut être engagée dès lors qu'elles ont agi en qualité de préposées de la société Axiome. La société Mercer ne répond pas sur ce point.
L'article 1242 alinéa 1 du code civil dispose que : "On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde."
L'alinéa 5 de ce texte ajoute que sont responsables :
"Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés".
Comme le rappellent les intimées, n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant.
Or, la société Mercer ne conteste pas qu'aux termes des conclusions n° 3 notifiées le 21 octobre 2020, soit avant la transaction régularisée avec la société Axiome, elle concluait que :
« Depuis que les intimées ne font plus défense commune et surtout dans ses dernières conclusions, la société Axiome tente de se dissocier de Mmes [C], [U] et [X]. Elle prétend qu'il n'y aurait pas de preuve d'un démarchage directement imputable à la société Axiome et surtout qu'elle n'aurait pas dicté à ses "salariés" une stratégie de démarchage de clientèle. Bref, à l'écouter, ces pratiques auraient presque été perpétuées dans ses locaux à son insu » Soyons sérieux ! En employant le vocable de "salariés", elle reconnait cependant l'existence même d'un lien de subordination de Mesdames [C], [U] et [X] à son égard et donc la circonstance selon laquelle celles-ci ont agi pour le compte de leur employeur de l'époque, à savoir la société Axiome. D'ailleurs, le débauchage de personnel a été mené par la société Axiome, les détournements de fichiers ont transité par les boites emails de la société Axiome et les documents usurpés ont servi les intérêts économiques de la société Axiome en captant de manière déloyale la clientèle.
(')
Ces mécanismes contractuels [de commissionnement sur les affaires nouvelles] témoignent de la mise en place d'un système de rémunération incitative orchestrée entre la société Axiome et ses salariées pour inciter celles-ci à entreprendre un démarchage systématique, agressif et déloyal des clients de la société Mercer.
Ce faisant, la société Axiome a joué un rôle actif, en parfaite connaissance, dans la mise en œuvre des agissements déloyaux de ses salariées en leur fournissant les moyens matériels et humains et en les incitant financièrement à de tels comportements.
(')
En l'espèce, il est incontestable que les agissements des anciennes salariées, notamment l'utilisation de fichiers de la société Mercer par Mmes [C], [X] et [U], ont été commis au profit de la société Axiome.
(') la circonstance que les agissements aient été réalisés dans son intérêt et par des employées, dont elle était responsable au moment des faits, a pour effet d'engager sa responsabilité pleine et entière vis-à-vis de la société Mercer" (souligné par la cour).
Dès lors que la société Mercer a reconnu que les actes de concurrence déloyale ont été commis dans le cadre de la mission à elles confiée par la société Axiome, qui doit selon l'appelante en supporter l'entière responsabilité et alors que la société Mercer a conclu une transaction avec la société Axiome, la responsabilité de Mmes [X], [C] et [U] ne peut être engagée au titre des actes réalisés alors qu'elles étaient salariées de la société Axiome.
Toutefois, les détournements du fichier clients et de la fiche Agnès B auxquels se sont livrés Mme [U] le 9 avril 2014 et Mme [C] le 5 juin 2014 ont été commis alors que ces dernières étaient encore salariées de la société Mercer. Ces faits engagent leur responsabilité et justifient leur condamnation au paiement de la somme de 1 € de dommages et intérêts chacune au profit de la société Mercer.
L'appelante sollicitant la condamnation des intimées au paiement de la somme de 1 € chacune, il n'y a pas lieu à comdamnation in solidum.
En revanche, aucun fait de concurence déloyale antérieur à son arrivée au sein de la société Axiome n'est caractérisé à l'égard de Mme [X], le jugement entrepris sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté la société Mercer de la demande indemnitaire à son égard de dommages et interêts.
Sur les demandes reconventionnelles,
Pour les motifs précités, l'existence d'actes de concurrence déloyale imputables à Mmes [X], [C] et [U] est établie et Mmes [C] et [U] sont condamnées à l'indemnisation sollicitée. En outre, l'exercice d'un droit ne dégénère en abus qu'en cas de faute équipollente au dol qui n'est pas démontrée en l'espèce par les intimées. Au surplus, la cour constate que Mme [X] invoque un préjudice moral qui n'est démontré par aucun élément de preuve. Le préjudice professionnel invoqué n'est pas davantage justifié. Aussi, par infirmation du jugement, Mme [X] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts et il n'y a pas lieu à condamner la société Mercer au paiement d'une amende civile.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,
Au regard des circonstances du litige, le jugement sera infirmé des chefs des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile et chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel, ainsi que de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté la société Mercer de sa demande indemnitaire à l'égard de Mme [E] [X] et en ce qu'il a rejeté la demande de la société Mercer France au titre des frais irrépétibles ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne Mme [I] [U] et Mme [V] [C] à payer à la société Mercer la somme de 1 € à titre de dommages et intérêts chacune ;
Déboute les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.