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Décisions

CA Bordeaux, 2e ch. civ., 25 juillet 2013, n° 12/06091

BORDEAUX

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Rougefort France (SARL)

Défendeur :

Miller Squared Inc (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme O'yl

Conseillers :

M. Bancal, Mme Rouger

Avocats :

Me Berland, Me Frago, Me Blanchy, Me de Seze

T. com. Bordeaux, du 12 oct. 2012, n° 20…

12 octobre 2012

La SARL ROUGEFORT FRANCE qui exerce une activité de commercialisation de vins est en relation d'affaires avec la société de droit américain MILLER SQUARED INC, importateur ;

Lui faisant reproche de ne pas s'être acquittée d'une part du solde dû , à savoir 436 838,79 $ US , sur 12 factures portant sur des vins argentins et d'autre part de 3 factures portant sur des vins français d'un montant de 121 188,02 € , la SARL ROUGEFORT faisait assigner en paiement la société MILLER SQUARED INC devant le tribunal de commerce de BORDEAUX ;

Par la décision critiquée cette juridiction s'est déclarée incompétente et a renvoyé la SARL ROUGEFORT FRANCE à mieux se pourvoir ; elle a en outre condamné la SARL ROUGEFORT FRANCE à payer à la société MILLER SQUARED INC une somme de 1500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

la SARL ROUGEFORT qui a formé contredit le 25 octobre 2012 demande à la cour au visa de l'article 46 du code de procédure civile de :

- constater que le lieu de livraison de partie des marchandises vendues à la société MILLER SQUARED INC relève du ressort des juridictions de BORDEAUX

- dire en conséquence compétent le tribunal de commerce de BORDEAUX pour connaître du litige

- renvoyer les parties devant le tribunal de commerce de BORDEAUX afin qu'il soit statué sur le fond ;

Elle considère que c'est à tort que le tribunal de commerce a estimé que la livraison effective des marchandises et/ ou le lieu de l'exécution de sa prestation était intervenue sur le territoire des ETATS UNIS ; elle fait valoir que s'il est exact qu'une partie des marchandises vendues sont des vins argentins dont la livraison est intervenue par la remise au transporteur sur le territoire argentin , une partie importante de ces marchandises est constituée de vins de BORDEAUX dont la livraison est intervenue dans le ressort du tribunal de commerce de BORDEAUX;

La société MILLER SQUARED INC demande à la cour de :

- constater que les lieux de livraison de l'intégralité des vins sont situés aux ETATS UNIS

- confirmer le jugement d'incompétence du tribunal de commerce de BORDEAUX et renvoyer la société ROUGEFORT FRANCE à mieux se pourvoir

- condamner la société ROUGEFORT FRANCE aux dépens du contredit et à lui payer une somme de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Elle estime que le litige concerne des ventes internationales de marchandises entre professionnels avec un vendeur français , un acheteur américain et des marchandises livrées aux ETATS UNIS ; elle souligne tout d'abord que la majeure partie des vins , à savoir des vins argentins , ont été livrés en ARGENTINE et ne saurait de ce fait relever de la compétence française ; ensuite elle relève s'agissant des vins français que les bons de commande qui avaient été versés aux débats en première instance par la SARL ROUGEFORT FRANCE précisaient les lieux de livraison des vins aux ETATS UNIS ;

*

Le contredit formé le 25 octobre 2012 par la SARL ROUGEFORT FRANCE dans les formes et délais des articles du code de procédure civile est recevable ;

En droit français la compétence internationale, sauf convention , est régie par les règles internes de compétence territoriale , à savoir les articles 42 à 46 du code de procédure civile, quelles que soient la loi applicable au fond et la nationalité des parties ;

La société de droit américain MILLER SQUARED INC, société défenderesse, a son siège social aux ETATS UNIS à BUFFALO GROVE (état de l' ILLINOIS) ;

Selon l'article 46 du code de procédure civile le demandeur peut notamment saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, en matière contractuelle , la juridiction du lieu de livraison effective de la chose ou du lieu de l'exécution de la prestation de service ;

D'une part les trois factures n°8090538, 9100379 et 10110212 relatives à la vente de vins d'appellation d'origine contrôlée POMEROL ou LALANDE de POMEROL dont se prévaut la SARL ROUGEFORT FRANCE pour conclure à la compétence de la juridiction bordelaise portent certes en référence « départ Pomerol » mais les bons de commande concernant ces vins portent la mention « expédier à MILLER SQUARED INC » ; il s'en déduit que le lieu de livraison effective se situe aux ETATS UNIS dans l'état de l'Illinois ;

D'autre part les bons de commande relatifs aux douze factures de vente de vins argentins mentionnent : « country of export : USA, country of manufacture: ARGENTINA , country of ultimate destination : USA » ; le lieu de livraison de ces vins se situe donc aussi aux ETATS UNIS auprès de la société MILLER SQUARED INC ;

En conséquence c'est avec justesse que le premier juge faisant application des dispositions de l'article 46 du code de procédure civile a considéré que le tribunal de commerce de BORDEAUX n'était pas compétent pour statuer sur la demande en paiement de la SARL ROUGEFORT FRANCE, le lieu de livraison des marchandises dont elle réclamait le paiement se situant aux ETATS UNIS à BUFFALO GROVE ;

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société MILLER SQUARED INC à hauteur de 2000 €;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement par arrêt contradictoire prononcé par sa mise à disposition au greffe

- déclare recevable mais mal fondé le contredit formé par la SARL ROUGEFORT FRANCE à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de BORDEAUX en date du 12 octobre 2012

- confirme en conséquence le jugement déféré

- condamne la SARL ROUGEFORT FRANCE à payer à la société MILLER SQUARRED INC une somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- la condamne aux dépens du contredit qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.