Cass. 2e civ., 9 juin 2022, n° 21-10.724
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 14 septembre 2020), par acte du 23 mai 2007, [N] [L] et Mme [M] [O] ont cédé une parcelle située au [Adresse 9] à M. [K] [T] [E], aux droits duquel est venue la SCI C2JM (la SCI). La SCI a assigné les consorts [L], ayants droit de [N] [L], décédé, pour les voir condamner notamment au paiement de diverses sommes du fait d'une servitude sur le fonds tandis que les consorts [L] ont soutenu que l'acte de vente était un faux et conclu à la nullité de la vente. La société E Lebrère-Montalban et L Montalban (la SCP), notaire instrumentaire, est intervenue volontairement à l'instance aux fins de juger notamment que l'acte de vente ne constitue pas un faux.
2. Par jugement du 11 janvier 2018, le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre a dit que l'acte authentique n'était pas un faux, prononcé la nullité pour dol de la vente consentie le 23 mai 2007 et débouté les parties du surplus de leurs demandes.
3. La SCI a relevé appel de ce jugement par déclaration du 26 avril 2018 en intimant neuf des consorts [L] ainsi que la SCP. Une seconde déclaration d'appel du 30 avril 2018 a intimé M. [U] [C] [L], omis de la première déclaration ; les deux déclarations ont été jointes le 14 mai 2018.
4. Le 14 septembre 2018, les consorts [L] ont saisi le conseiller de la mise en état d'un incident de caducité de la déclaration d'appel et ont déféré à la cour d'appel son ordonnance du 25 mars 2019 ayant rejeté leur demande.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
6. La SCI fait grief à l'arrêt de déclarer caduque la déclaration d'appel remise au greffe le 28 [en réalité 26] avril 2018 en ce qu'elle est dirigée contre la SCP Lebrère-Montalban, ainsi que la déclaration d'appel remise au greffe le 30 avril 2018, enrôlées après jonction sous le numéro 18/562 et de dire que sa décision mettait fin à l'instance numéro 18/562, alors « que la cour d'appel, statuant sur déféré d'une ordonnance du conseiller de la mise en état, ne peut connaître de prétentions ou soulever d'office des incidents qui n'ont pas été soumis au conseiller de la mise en état ; qu'en l'espèce, la cour d'appel était saisie d'un déféré à l'encontre d'une ordonnance du conseiller de la mise en état se bornant à statuer sur un incident soulevé par les seuls consorts [L], intimés, tiré de la caducité de la déclaration d'appel du 28 avril 2018 ; qu'en retenant que la déclaration d'appel du 28 avril 2018 était caduque à l'égard de la SCP Lebrère-Montalban, qui n'avait pas soumis un tel incident au conseiller de la mise en état, et que la déclaration d'appel du 30 avril 2018 était également caduque, la cour d'appel, qui a statué sur des incidents non soumis au conseiller de la mise en état, a violé les articles 914 et 916 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 914 et 916 du code de procédure civile :
7. Il résulte du premier de ces textes que les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu'à la clôture de l'instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat, tendant notamment à prononcer la caducité de l'appel.
8. Selon le second, les ordonnances du conseiller de la mise en état ne sont susceptibles d'aucun recours indépendamment de l'arrêt sur le fond. Toutefois, elles peuvent être déférées par requête à la cour d'appel dans les quinze jours de leur date lorsqu'elles ont pour effet de mettre fin à l'instance, lorsqu'elles constatent son extinction ou lorsqu'elles ont trait à des mesures provisoires en matière de divorce ou de séparation de corps. Elles peuvent être déférées dans les mêmes conditions lorsqu'elles statuent sur une exception de procédure, sur un incident mettant fin à l'instance, sur une fin de non-recevoir ou sur la caducité de l'appel.
9. Il en découle que la cour d'appel, saisie sur déféré, ne peut statuer que dans le champ de compétence d'attribution du conseiller de la mise en état et ne peut connaître de prétentions ou d'incidents qui ne lui ont pas été soumis.
10. Pour prononcer la caducité de la déclaration d'appel du 26 avril 2018 en ce qu'elle est dirigée notamment contre la SCP Lebrère-Montalban et celle du 30 avril 2018 dirigée contre M. [U] [C] [L], la cour d'appel, saisie du déféré formé contre une ordonnance d'un conseiller de la mise en état ayant rejeté un incident de caducité de l'appel soulevé par un seul des intimés, relève d'office que le litige est indivisible à l'égard de l'ensemble des intimés.
11. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est prononcée sur des incidents qui n'avaient pas été soumis au conseiller de la mise en état, a violé les textes susvisés.
Mise hors de cause
12. Il n'y a pas lieu de mettre hors de cause les consorts [L] dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
REJETTE la demande de mise hors de cause de Mme [M] [O] veuve [L], Mme [P] [L] épouse [W], Mme [J] [L], M. [H] [L], M. [N] [L], M. [X] [L], M. [U] [C] [L], Mme [F] [L] épouse [A], Mme [R] [L] épouse [S], Mme [Y] [L] ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré caduque la déclaration d'appel du 26 avril 2018 à l'égard de la société E Lebrère-Montalban et L Montalban et en ce qu'il a déclaré caduque la déclaration d'appel du 30 avril 2018 à l'égard de M. [U] [C] [L], l'arrêt rendu le 14 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre autrement composée.
Condamne Mme [M] [O] veuve [L], Mme [P] [L] épouse [W], Mme [J] [L], M. [H] [L], M. [N] [L], M. [X] [L], M. [U] [C] [L], Mme [F] [L] épouse [A], Mme [R] [L] épouse [S], Mme [Y] [L], la société E Lebrère-Montalban et L Montalban aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille vingt-deux.