Décisions
CA Versailles, ch. civ. 1-6, 25 janvier 2024, n° 23/02248
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 78F
Chambre civile 1-6
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 25 JANVIER 2024
N° RG 23/02248 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VY3N
AFFAIRE :
[K] [Z] [S] [L]
et autres
C/
S.A.S. TUV RHEINLAND FRANCE
CAISSE DES REGLEMENTS PECUNIAIRES EFFECTUES PAR LE S AVOCATS A LA COUR DE PARIS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Avril 2023 par le Juge de l'exécution de NANTERRE
N° RG : 22/07843
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 25.01.2024
à :
Me Jacques-Alexandre GENET de la SELAS ARCHIPEL, avocat au barreau de PARIS
Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [K] [Z] [S] [L]
née le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
et 6014 autres parties
Représentant : Me Jacques-Alexandre GENET de la SELAS ARCHIPEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0122 - N° du dossier E00016FR
APPELANTES
****************
S.A.S. TUV RHEINLAND FRANCE
N° Siret : 324 370 980 (RCS Nanterre)
[Adresse 3]
[Localité 5]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 2370990 - Représentant : Me Christelle COSLIN du PARTNERSHIPS HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE
****************
ASSOCIATION CAISSE DES REGLEMENTS PECUNIAIRES EFFECTUES PAR LES AVOCATS A LA COUR DE PARIS
Association déclarée et enregistrée sous le n° SIREN 784 181 216, agissant poursuites et diligences en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 4]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 189 - N° du dossier S230248 - Représentant : Me Jean-Michel HOCQUARD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0087
PARTIE INTERVENANTE FORCEÉ
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Décembre 2023, Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Fabienne PAGES, Président,
Madame Florence MICHON, Conseiller,
Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO
EXPOSÉ DU LITIGE
A la suite de deux commandements de payer et d'une première série de saisies-attribution ayant reçu mainlevée, par acte du 23 août 2022, les 6.009 personnes physiques individualisées en tête du présent arrêt en leur qualité d'appelantes (ci-après désignées : les victimes des implants PIP), agissant en vertu d'un jugement rendu le 20 janvier 2017 par le tribunal de commerce de Toulon confirmé par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence rendu le 11 février 2021, ont fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes bancaires de la société Tüv Rheinland France SAS (ci-après : TRF) ouverts dans les livres des sociétés La Société Générale SA (fructueuse à hauteur d'environ 184.290,56 euros) et BNP Paribas SA (infructueuse) à concurrence de la somme de 7.372.641,26 euros ainsi décomposée :
au titre de ce jugement
* 6.009.000 euros en principal (soit 1.000 euros au profit de chacune à titre provisonnel, déduction faite de quatre paiements partiels),
* 252.713,85 euros au titre des intérêts au taux d'intérêt légal de 4,16 % courus du 20 janvier 2017 au 23 mai 2017 sur le montant total de la condamnation en principal, soit la somme de 18.027.000 euros,
* 1.064.359,81 euros au titre des intérêts au taux légal courus du 24 mai 2017 au 23 août 2022 sur la somme de 6.009.000 euros,
au titre de cet arrêt
* 46.567,61 euros en principal représentant la différence entre, d'une part, la somme de 1.201.800 euros due au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les intérêts ayant couru sur cette somme du 11 février 2021 au 10 mai 2022 et, d'autre part, un paiement du principal à la date du 10 mai 2022.
Ces saisies-attribution ont été dénoncées à la société TRF le 31 août 2022 et par acte du 12 septembre 2022 cette dernière les a assignées en contestation de ces mesures pour en solliciter la mainlevée devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nanterre.
Par ailleurs, par acte du 20 septembre 2022, la société TRF a assigné en intervention forcée l'association Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les avocats à la cour de Paris (ci-après : la CARPA) sur le fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil à l'effet d'être relevée et garantie de toutes sommes qu'elle aurait à payer aux saisissantes en raison de la faute de gestion commise par cette dernière dans le cadre d'une saisie-conservation pratiquée en 2017 par deux avocats du barreau de Marseille, anciens conseils des victimes des implants PIP, et convertie en saisie-attribution en 2019.
Pour éclairer ce litige, il convient d'en évoquer le contexte, à savoir :
qu'il s'inscrit dans celui né de la révélation, dans les années 2010, de l'absence de conformité des 'implants mammaires pré-remplis de gel de silicone à haute cohésivité' fabriqués et commercialisés dans le monde entier depuis les années 2000 par la société varoise Poly Implant Prothèses (PIP) dirigée par monsieur [O] [A], la société en charge de la réalisation d'audits du système de gestion de la qualité, des contrôles du produit, d'efficacité et d'essais de ces prothèses étant la société Tüv Rheinland France liée à l'organisme de certification de droit allemand Tüv Rheinland LGA Products (ci-après : TRLF), puis de la dénonciation de faits délictueux auprès du Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille par l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé et l'ouverture d'une information,
que le 30 mars 2010 la société PIP a été placée en liquidation judiciaire,
qu'au pénal, par arrêt confirmatif rendu le 02 mai 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, ses dirigeants ont été déclarés coupables des délits de tromperie aggravée et d'escroquerie et condamnés,
qu'au civil, diverses décisions ont été rendues parmi lesquelles l'arrêt du 11 mai 2021 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui a confirmé un jugement rendu le 20 janvier 2017 par le tribunal de commerce de Toulon, lequel, saisi par divers distributeurs du produit, a en particulier reconnu la responsabilité de la société TRF en sa qualité de certificateur des prothèses mammaires fabriquées par la société PIP entre 2002 et 2010 à partir d'un gel non autorisé, condamné solidairement la société TRF et la société allemande TRLP à verser à chacune des femmes victimes d'implants PIP, intervenantes volontaires à l'instance, la somme provisionnelle de 3.000 euros outre celle de 100 euros au titre de leurs frais non répétibles en ordonnant une expertise,
que par arrêt rendu le 12 mai 2017 le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a rejeté une demande d'arrêt de l'exécution provisoire assortissant le jugement mais autorisé son aménagement consistant en la consignation de la somme de 1.040.500 euros pour partie à la Caisse des dépôts et consignation et pour partie sur le compte séquestre de la CARPA,
qu'il peut être ajouté que, saisie d'un pourvoi (n° 21-14843) formé à l'encontre de l'arrêt rendu le 11 février 2021 par le cour d'appel d'appel d'Aix-en-Provence (au fondement des voies d'exécution en cause), la première chambre civile de la Cour de cassation énonce, par arrêt rendu le 25 mai 2023 (publié au bulletin) :
'18. Conformément au point 2 de l'annexe XI des articles R. 665-1 à R. 665-47 du code de la santé publique et à l'article R. 5211-56, du même code, successivement applicables, d'une part, un organisme habilité peut confier à un sous-traitant des travaux spécifiques portant sur la constatation et la vérification de faits, à condition de s'assurer préalablement que les dispositions du livre V bis du code précité, dans sa rédaction applicable en la cause, et, en particulier, de l'annexe XI des articles R. 665-1 à R. 665-47, laquelle fixe les critères minimaux pour la désignation des organismes habilités, soient respectées par le sous-traitant, d'autre part, le personnel chargé du contrôle doit exécuter les opérations d'évaluation et de vérification avec la plus grande compétence requise dans le secteur des dispositifs médicaux.
19. La cour d'appel a retenu qu'en application d'un contrat conclu le 21 octobre 1997 entre les sociétés PIP, TRLP et TRF, la société TRF avait, en qualité de sous-traitante, participé conjointement avec la société TRLP aux opérations de vérification ayant permis à la société PIP d'obtenir le certificat CE le 15 mars 2004 et aux nombreux audits de surveillance entre novembre 2004 et février 2009 et qu'elle avait, comme la société TRLP, manqué à ses obligations de vigilance lors des contrôles effectués au service achats.
20. Elle a pu en déduire que la société TRF avait manqué aux engagements inhérents à l'exercice de sa mission et engagé ainsi sa responsabilité.' .
mais que cet arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a toutefois fait l'objet d'une censure partielle, avec renvoi devant cette juridiction, aux motifs suivants :
' 30. Pour condamner les sociétés TRLP et TRF à réparer l'ensemble des préjudices matériels et immatériels causés aux distributeurs des produits de la société PIP et les préjudices corporels et/ou psychologiques causés aux porteuses d'implants mammaires PIP, l'arrêt retient que les manquements des sociétés TRLP et TRF ont eu pour conséquence de permettre à la société PIP d'apposer la certification CE sur les prothèses IMGHC d'avril 2001 à mars 2010.
31. En statuant ainsi, après avoir retenu que l'utilisation frauduleuse d'un gel non autorisé avait débuté à la fin de l'année 2002 et que les incohérences dans la comptabilité matière qui auraient dû être décelées lors de l'audit des 24 au 26 novembre 2004, tenant notamment à l'absence d'achat de gel Nusil cette année-là alors que la société PIP avait produit environ 20.000 prothèses IMGHC, étaient postérieures, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé le texte susvisé.
que, par ailleurs, selon convention de procédure signée le 07 juillet 2016, entre les sociétés TRLP et TRF (représentées par le cabinet Hogan Lovells), d'une part, et les victimes des implants PIP (représentées par maîtres [F] [B] et [C] [T], avocats au barreau de Marseille), d'autre part, les premières ont déposé des sommes destinées au paiement des condamnations prononcées sur le sous-compte Carpa de leur conseil, pour un montant de 18.402.000 euros,
qu'en cours de procédure, les victimes des implants en cause qui avaient initialement désigné ces deux avocats pour assurer la défense de leurs intérêts, les ont dessaisis de leur mandat et les sociétés TRLP et TRF en ont été avisées par courriel officiel de leur nouveau conseil du 16 mai 2017,
que messieurs [B] et [T] ont obtenu du bâtonnier du barreau de Marseille une décision rendue le 12 février 2018 fixant le montant de leurs honoraires à une somme globale de 6.738.600 euros (soit la somme de 1.100 euros pour chacune de leurs 6.126 clientes) et, par ordonnance rendue le 25 juillet 2019, le président du tribunal de grande instance de Marseille a rendu exécutoire cette décision,
que le 23 mai 2017, compte tenu de l'arrêt rendu le 12 mai 2017 le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence précité et du conflit entre les avocats successifs des porteuses de prothèses PIP, la société TRF a séquestré entre les mains de la CARPA des sommes destinées au paiement des provisions allouées à ces dernières, effectuant ultérieurement à leur profit et en exécution des condamnations quatre paiements partiels entre le 28 décembre 2017 et le 24 avril 2020,
que, concomitamment, sur autorisation du juge de l'exécution de Marseille du 19 mai 2017, ces deux anciens avocats ont fait pratiquer, le 22 mai 2017, une saisie conservatoire de créance pour un montant de 6.157.000 euros entre les mains de la CARPA (sous compte du cabinet Hogan-Lovells), laquelle s'est révélée fructueuse à hauteur de 6.134.000 euros,
que par décision du 12 février 2018, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille a fixé à la somme de 1.100 euros HT par victime le montant de leurs honoraires et que le 25 juillet 2019 le président du tribunal de grande instance de Marseille a donné force exécutoire à cette décision,
que le 18 septembre 2019 et en vertu de cette décision l'huissier instrumentaire a converti en saisie-attribution la saisie conservatoire pratiquée le 22 mai 2017 précitée, que le 26 décembre 2019, sur présentation d'un certificat de non-contestation établi le 13 décembre 2019 et rectifié le 20 décembre suivant, la CARPA de Paris a libéré les fonds ainsi saisis à hauteur de la somme de 6.126.000 euros entre ses mains et il en a été donné mainlevée le 13 janvier 2020,
qu'enfin, il peut être ajouté que par jugement rendu le 17 mai 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris - saisi par la société de droit allemand TRLP de la contestation d'une saisie-attribution pratiquée le 25 août 2022 à la requête de ces mêmes victimes des implants PIP entre les mains de la CARPA et, après jonction de procédures, de l'action en garantie de la société TRLP à l'encontre de la CARPA - a 'donné mainlevée de la saisie-attribution du 25 août 2022" (étant relevé par la présente cour que le jugement ne précise pas sur quelles sommes portait la mesure), ceci après une appréciation juridique des articles 1342-2 et 1239 du code civil relatifs au paiement et une analyse factuelle le conduisant à retenir que le mouvement de fonds opéré le 26 décembre 2019 par la CARPA en exécution de la saisie-attribution pouvait être considéré comme un paiement que les victimes, se désistant d'un recours en contestation d'honoraires initié le 25 janvier 2019 contre leurs anciens avocats, ont implicitement ratifié,
Par jugement contradictoire rendu le 06 avril 2023 le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nanterre saisi de la contestation de la saisie-attribution pratiquée le 23 août 2022, a, en rappelant que sa décision est exécutoire de droit :
déclaré irrecevables les notes en délibéré de la Caisse de Règlements Pécuniaires effectuées par les avocats à la cour de Paris (CARPA), de la SAS Tüv Rheinland France et des 6.009 saisissantes listées en défense reçues par RPVA entre le 17 et le 24 mars 2023,
débouté la société Tüv Rheinland France de sa demande de mainlevée des saisies-attribution pratiquées par les 6.009 saisissantes listées en défense le 23 août 2022 auprès de la Société Générale et de la BNP Paribas,
cantonné les effets des saisies-attribution pratiquées par le 6.009 saisissantes listées en défense le 23 août 2022 auprès de la Société Générale et de la BNP Paribas à la somme de 299.281,46 euros,
débouté les parties du surplus de leurs demandes,
condamné la SAS Tüv Rheinland France à régler à la Caisse de Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris (CARPA) la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la SAS Tüv Rheinland France aux dépens de l'assignation en intervention forcée,
rejeté les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la société Tüv Rheinland France et des 6.009 saisissantes listées en tête de cette décision,
dit que la société Tüv Rheinland France et les 6.009 saisissantes listées en tête de cette décision conserveront la charge de leurs propres dépens.
Ces 6.009 victimes d'implants PIP ont interjeté appel de ce jugement selon déclaration reçue au greffe le 07 avril 2023.
Par dernières conclusions notifiées le 17 novembre 2023, madame [P] [X] [Y] et les 6.008 autres personnes physiques identifiées en tête du présent arrêt demandent à la cour, au visa des articles L 111-2, L 111-4, L 111-7, L 111-10 et L 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, 1231-7 du code civil et 700 du code de procédure civile :
d'infirmer le jugement (entrepris) en ce qu'il a cantonné les effets des saisies-attribution pratiquées par les appelantes le 23 août 2022 auprès de la Société Générale et de BNP Paribas à la somme de 299.281,46 euros et débouté les appelantes du surplus de leurs demandes,
de le confirmer pour le surplus,
statuant à nouveau
de cantonner les saisies-attribution de créances pratiquées le 23 août 2022 à la requête des appelantes à l'encontre de Tüv Rheinland France SAS entre les mains de BNP Paribas et de la Société Générale à la somme de 7.326.073,65 euros (à parfaire au jour du parfait paiement) en principal et intérêts (arrêtés au 23 août 2022, jour des saisies), due au titre du jugement rendu le 20 janvier 2017 par le tribunal de commerce de Toulon,
en tout état de cause
de débouter Tüv Rheinland France SAS de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
de condamner Tüv Rheinland France SAS aux entiers dépens de première instance et d'appel et à (leur) payer la somme de 100.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Par dernières conclusions notifiées le 09 novembre 2023 la société par actions simplifiée Tüv Rheinland France, visant les dispositions des articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, 1240 et suivants et 1342 et suivants du code civil, 112 et suivants, 550 et 649 du code de procédure civile, L. 121-2, R. 211-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution et L.133-3 du code monétaire et financier, prient la cour :
de confirmer le jugement (entrepris) en ce qu'il a rejeté les demandes des 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste est également produite en pièce n° A, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
de déclarer la société Tüv Rheinland France SAS recevable et bien fondée en son appel incident à l'encontre des 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste est également produite en pièce n° A,
de déclarer la société Tüv Rheinland France SAS recevable et bien fondée en son appel provoqué à l'encontre de la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris,
Y faisant droit,
d'infirmer le jugement (entrepris) en ce qu'il a débouté la société Tüv Rheinland France SAS de sa demande de mainlevée pure et simple des saisies-attribution pratiquées par les 6.009 personnes physiques saisissantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...), sur les comptes bancaires ouverts dans les livres de la Société Générale et de la BNP Paribas par la société Tüv Rheinland France SAS // cantonné les effets des saisies-attribution pratiquées par les 6.009 personnes physiques saisissantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...), sur les comptes bancaires ouverts dans les livres de la Société Générale et de la BNP Paribas par la société Tüv Rheinland France SAS à la somme de 299.281,46 euros au titre de créances d'intérêts // débouté la société Tüv Rheinland France SAS du surplus de ses demandes // condamné la société Tüv Rheinland France SAS à régler à la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la Cour de Paris la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile // condamné la société Tüv Rheinland France SAS aux dépens de l'assignation en intervention forcée // rejeté les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la société Tüv Rheinland France SAS,
Statuant à nouveau
* à titre principal
d'ordonner la mainlevée pure et simple des saisies-attribution pratiquées le 23 août 2022 à la demande, notamment, des 6.009 appelantes listées en tête de 'la présente', et dont la liste (...), sur les comptes bancaires ouverts dans les livres de la Société Générale et de la BNP Paribas par la société Tüv Rheinland France SAS, du fait de l'absence de créance exigible tant à titre principal qu'au titre des intérêts de retard demandés malgré les accords intervenus,
* à titre subsidiaire
de juger fautive la négligence des 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...), et de juger tardives les mesures d'exécution forcée engagées par les appelantes à l'encontre de la société Tüv Rheinland France SAS,
de condamner en conséquence in solidum les 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...), à relever et garantir la société Tüv Rheinland France SAS de toutes sommes qu'elle aurait à leur payer en conséquence de l'inopposabilité à leur endroit de la saisie conservatoire du 22 mai 2017 et ce, à concurrence de la créance globale alléguée,
- d'ordonner en conséquence la compensation de cette condamnation avec la créance globale alléguée par les 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...) contre la société Tüv Rheinland France SAS,
* plus subsidiairement encore
de faire les comptes entre les parties et de déduire de la créance alléguée par les 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...),
' le montant de la dette dont le paiement de la société Tüv Rheinland France SAS les a libérées, soit 6.009.000 euros,
' le montant de la dette dont elles sont redevables envers la société Tüv Rheinland France SAS en raison de la cassation de l'arrêt n° 2021/39 du 11 février 2021 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, soit 200 euros pour chacune des appelantes listées en tête des présentes et dont la liste (...) représentant globalement un montant de 1.208.000 euros,
* à titre infiniment subsidiaire
de juger la faute de la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris dans sa gestion des saisies de créance pratiquées les 22 mai 2017 et 5 juillet 2021 sur le compte CARPA du conseil de la société Tüv Rheinland France SAS, dont la validité et l'effet sont contestés par les 6.009 appelantes listées (...),
de condamner en conséquence la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris à relever et garantir la société Tüv Rheinland France SAS de toutes sommes qu'elle aurait à payer aux 6.009 appelantes listées en tête des présentes et dont la liste (...) à concurrence de la créance alléguée par ces 6.009 appelantes,
de condamner la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris à payer à la société Tüv Rheinland France SAS la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
* en tout état de cause
d'exonérer la société Tüv Rheinland France SAS de la majoration des intérêts en application de l'article L.133-3 du code monétaire et financier,
de débouter les 6.009 appelantes listées en tête des présentes et dont la liste (...) ainsi que la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
de condamner in solidum les 6.009 appelantes listées en tête des présentes et dont la liste (...) à payer à la société Tüv Rheinland France SAS la somme de 50.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
L'association Caisse de Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris (CARPA) a notifié des conclusions le 10 novembre 2023 mais par ordonnance rendue le 06 décembre 2023, le président de la présente chambre de la cour, au visa de l'article 905-2 al.3 du code de procédure civile, de sa demande d'observations écrites du 23 novembre 2023 et des observations écrites déposées le 28 novembre 2023, a déclaré irrecevables les conclusions déposées par cette intimée à l'appel provoqué le 10 novembre 2023 en rappelant que cette ordonnance peut faire l'objet d'un déféré à la cour dans les 15 jours de sa date, ceci au motif que l'intimée à l'appel provoqué n'a pas conclu dans le délai imparti.
Cette décision n'a pas été déférée à la cour.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de mainlevée des deux saisies-attribution pratiquées le 23 août 2022
Il convient de rappeler que pour débouter la société TRF de sa demande de mainlevée pure et simple de ces mesures, le juge de l'exécution a liminairement rappelé que l'erreur sur le montant des sommes dues en vertu du titre exécutoire est sans incidence sur la validité de l'acte d'exécution qui demeure valable à concurrence du montant réel de la dette limitant les effets de la mesure.
Et pour décider de son cantonnement, il a porté son appréciation sur chacun des quatre postes figurant dans le décompte de la créance des saisissantes (explicité ci-avant).
Il a ainsi jugé que la créance revendiquée en principal n'était plus exigible au jour des saisies-attribution en cause du fait de la libération par la CARPA, en suite de la saisie-attribution antérieurement pratiquée par les anciens avocats des défenderesses pour avoir paiement de leurs honoraires, de la somme de 6.126.000 euros et eu égard à la quittance reçue de ces avocats par la société TRF.
Que, par ailleurs, la saisie-conservatoire du 22 mai 2017 a produit les effets d'une consignation, arrêtant le cours des intérêts.
Qu'en revanche étaient dus les intérêts ayant couru depuis le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon jusqu'à la date des séquestres, de même que ceux dus au titre des condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile prononcées par la cour d'appel d'Aix-en-Provence après imputation d'un paiement.
Il a donc exclu de la créance de 7.372.641,26 euros revendiquée par les saisissantes la créance en principal de 6.009.000 et celle au titre des intérêts sur cette somme, soit : 1.064.359,81euros, cantonnant les effets de la mesure à la somme de 299.281,46 euros cumulant les seuls intérêts retenus (252.713,85 + 46.567,61 euros).
Sur appel incident, la société TRF reprend sa demande de mainlevée des deux saisies-attribution du 23 août 2022.
Pour ce faire, elle se prévaut de l'extinction de la créance en principal, comme en a jugé le juge de l'exécution, dès la saisie conservatoire des fonds pratiquée en 2017 à l'initiative des anciens avocats des 6.009 porteuses d'implants, par effet rétroactif de la conversion de celle-ci en saisie-attribution.
Et affirme qu'aucun intérêt de retard ne peut courir sur une créance réglée, le principal ayant été séquestré le 23 mai 2017.
Pour le surplus, elle poursuit l'infirmation du jugement.
Elle soutient, d'une part, que le premier juge a méconnu la portée de la convention de procédure du 07 juillet 2016 qui consistait à geler toute exécution et à ne procéder à aucun paiement, estimant qu'elle doit s'analyser en un report de la date d'exigibilité de la créance conformément à la définition de l'article 1305 du code civil ; elle ajoute que rien ne justifie une créance d'intérêts qui aurait couru entre la décision du premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence (le 12 mai 2017) et le séquestre des fonds (le 23 mai 2017) pour partie entre les mains du bâtonnier et pour partie sur le compte séquestre de la CARPA en raison du conflit de succession d'avocats; qu'en outre, les fonds séquestrés à hauteur de 2.000 euros pour chacune des personnes concernées ont été versés entre les mains de leur nouvel avocat, selon quatre versements, dès que ce dernier a justifié de l'existence de mandats.
Elle fait valoir, d'autre part, s'agissant de la créance d'intérêts au titre de l'exécution de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qu'en raison de la censure de la Cour de cassation intervenue, selon son arrêt du 25 mai 2023, aucune somme n'est plus due en exécution de cette décision et, par conséquent, aucun intérêt de retard.
De leur côté, les appelantes poursuivent l'infirmation du jugement en affirmant, d'abord, qu'à tort le juge de l'exécution a considéré que la société TRF s'est valablement libérée des fonds du fait du paiement entre les mains de l'huissier instrumentaire lors de la saisie conservatoire et de sa conversion, retenant, à son sens en se méprenant, que le tiers saisi était la société TRF et non la CARPA désignée comme 'tiers saisi par délégation' (qui n'était débitrice d'aucune somme envers elles) et en en déduisant que la créance sollicitée était éteinte.
Elles soutiennent aussi que pour être libératoire, un paiement doit venir éteindre une dette exigible et que tel n'est pas le cas en l'espèce puisque la créance de leurs anciens avocats n'est ni exécutoire (faute de signification du titre), ni définitive, ni davantage certaine puisque, la contestant, elles ont formé un recours contre la décision de taxation et l'ordonnance la rendant exécutoire ; elles dénient, par ailleurs, toute ratification de ce versement.
Ainsi, selon elles, les saisies-attribution qu'elles ont fait pratiquer le 23 août 2022 l'ont été valablement à hauteur du principal alloué par le jugement et les intérêts qu'il a générés.
Elles contestent, ensuite, la lecture que fait la société intimée de la convention de procédure qui ne reportait en aucun cas la date d'exigibilité de la créance résultant du jugement ni ne stipulait un renoncement aux intérêts courant sur le principal ; le conflit entre avocats évoqué par leur adversaire n'a pu avoir pour effet, affirment-elles, de suspendre le cours des intérêts pas plus que la saisie-conservatoire pratiquée n'a pu valablement en interrompre le cours.
Elles en concluent que leurs saisies-attribution doivent être déclarées valables et cantonnées à la somme de 7.326.073,65 euros (soit : 6.009.000 + 252.713,85 + 1.064.359,81 euros), tirant les conséquences de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 25 mai 2023 qui a partiellement cassé l'arrêt rendu par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 11 février 2021 en renonçant à poursuivre leur validation à hauteur de la somme de 46.567,61 euros représentant les intérêts générés par la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure depuis le prononcé de l'arrêt jusqu'à son paiement.
1 - Sur la créance résiduelle en principal (soit 1.000 euros x 6009 victimes)
Afin de contester le caractère libératoire pour la société TRF du paiement effectué par la CARPA en exécution de la saisie pratiquée par leurs anciens avocats, les appelantes se prévalent d'abord et à bon droit de la qualité de tiers saisi de la CARPA.
Celle-ci ressort, en effet, clairement de la doctrine de la Cour de cassation (Cass civ 2ème, 09 janvier 2003, pourvoi n° 00-13887, publié au bulletin) énonçant :
'qu'il résulte des articles 237 et suivants du décret du 27 novembre 1991, 8 et 11 de l'arrêté du 5 juillet 1996 que la caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) est titulaire d'un compte, ouvert auprès d'une banque, sur lequel les avocats ont l'obligation légale de déposer les fonds remis par leurs clients ; que si chaque avocat est titulaire, auprès de la CARPA, d'un compte individuel et de sous-comptes-affaires, il ne dispose de la signature sur son compte individuel qu'en qualité de mandataire du président de la CARPA ; qu'en cas de signification d'une saisie portant sur les fonds déposés par un avocat au nom de son client, la CARPA a seule la qualité de tiers saisi pour l'application des articles 44 de la loi du 9 juillet 1991 et 59 du décret du 31 juillet 1992 ; que la nécessité d'interroger l'avocat titulaire du compte individuel peut constituer un motif légitime au sens de l'article 60 du même décret ; (...) que l'arrêt retient à bon droit que seule la caisse avait la qualité de tiers saisi et que la saisie n'avait pas à être dénoncée à l'avocat' .
Ce qu'a notamment pu reprendre par la suite sa chambre commerciale (Cass com, 12 avril 2005, pourvoi n° 03-19293, publié au bulletin).
Au cas particulier et comme exposé par les appelantes elles-mêmes, les procès-verbaux d'huissier ont bien été dressés à l'encontre de la CARPA de Pais avec mention du sous-compte du cabinet Puk Hogan Lovells ([Localité 8]) LLP, affaire Tuv Rheinhald /PIP (victimes PIP).
Toutefois, les appelantes ne peuvent valablement en déduire que la CARPA - 'débitrice de leur débitrice' et, non, selon elles, 'tiers saisi par délégation' qu'elles qualifient de concept juridique imaginaire créé par le premier juge - ne s'est pas dessaisie de sommes leur appartenant, de sorte que le paiement fait à leur détriment, à la suite de la conversion de la mesure conservatoire, l'a été de manière fautive et, en tout cas, sans 'un quelconque effet libératoire au profit de la société TRF, étrangère à la saisie' dès lors, d'une part, que la loi interdit aux avocats de détenir des fonds pour leurs clients et leur impose de les déposer entre les mains de la CARPA si bien qu'ils ne peuvent avoir la qualité de détendeurs de fonds, la CARPA en étant la seule véritable détentrice, et, d'autre part, que les sommes consignées sur un sous-compte ouvert, comme en l'espèce, au nom d'une partie, appartiennent à celle-ci.
Si les appelantes soutiennent ensuite que n'est que prétendue, faute de créance certaine liquide et exigible à leur encontre, la dette envers leurs anciens avocats dont elles auraient été ainsi libérées par le versement des fonds de la CARPA, et que ne peut trouver application l'article 1342-2 alinéa 2 du code civil selon lequel 'le paiement fait à une personne qui n'avait pas qualité pour le recevoir est néanmoins valable si le créancier le ratifie ou s'il en a profité', force est de considérer que la cour, saisie d'un litige dont l'objet est strictement limité à la contestation des voies d'exécution mises en oeuvre le 23 août 2022 ne saurait valablement se prononcer sur la validité ou le caractère exécutoire en vertu duquel ces anciens avocats ont converti, le 18 septembre 2019, la saisie conservatoire du 22 mai 2017 en saisie-attribution puis ont obtenu le dessaisissement des fonds par le tiers saisi.
S'agissant de leur contestation du profit tiré du paiement de cette dette d'honoraires envers leurs anciens avocats ou de sa ratification, il y a lieu de considérer que le second alinéa de cet article 1342-2 vise un tiers accipiens qui n'avait pas qualité pour le recevoir.
La cour ne pouvant, sur cette qualité, statuer qu'en termes hypothétiques, elle ne saurait suivre en leur argumentation les appelantes.
Il apparaît, en effet, qu'elles ne démontrent ni même ne prétendent s'en être acquittées et se bornent à dénier tant le principe que le quantum de cette créance d'honoraires selon un titre qui ne serait pas exécutoire alors que la société TFR se prévaut (en se reportant aux pièces adverses n° 7 et 8 et en versant les pièces 65 à 67) de leur représentation par maître [R] [V], avocat, devant le bâtonnier de Marseille, de la notification de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance de Marseille qui rendait exécutoire la décision de ce bâtonnier ainsi que de pourvois n° 19-22084 et n° 20-11130 formés par maître [V] et maître [J] [D] [I], avocate au barreau de Bogota 'déclarant agir en qualité de représentante du groupe des victimes PIP' à l'encontre d'une ordonnance sur contestation d'honoraires rendue le 25 juin 2019 par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence constatant qu'il n'a pas été régulièrement saisi, lesquels pourvois ont donné lieu à des désistements selon arrêts rendus le 09 décembre 2021.
Ces désistements emportant acquiescement à l'arrêt querellé et ,en conséquence, soumission aux chefs de celui-ci, si les appelantes invoquent l'introduction d'un recours contre les décisions fondant les voies d'exécution mises en oeuvre par leurs anciens avocats en affirmant qu' 'il prive de tout fondement la conclusion du juge de l'exécution de Paris', elles ne consacrent pas de développements à cet argument ni ne versent ce recours qu'elles situent au 16 juin 2023.
La présente cour n'a d'ailleurs pas compétence pour connaître de la contestation d'une décision d'un juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris.
Elles produisent, en revanche, en pièce n° 39, une tardive assignation devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris délivrée le 11 octobre 2023 par cinq seulement des victimes des implants PIP à l'encontre uniquement de leurs deux anciens avocats tendant à obtenir l'annulation de l'acte de conversion de la saisie conservatoire du 18 septembre 2019 et du certificat de non contestation signifié à la CARPA le 16 décembre 2019, mais ne débattent point de l'effet extinctif du paiement par le tiers saisi résultant des dispositions de l'article R 211-7 du code des procédures civiles d'exécution que la Cour de cassation a d'ailleurs été conduite à retenir (Cass civ 2ème, 23 novembre 2000, pourvoi n° 98-22795, publié au bulletin).
Par suite, dès lors que les appelantes ne démontrent pas que les avocats n'avaient pas qualité pour recevoir paiement d'une créance dont elles n'établissent pas l'absence de caractère certain, liquide et exigible, à la faveur d'une voie d'exécution qui leur a leur épargné la charge d'intérêts de retard, de frais de signification ou encore d'exécution, peut-il être incidemment observé, le premier juge doit être approuvé en ce qu'il retient que les porteuses d'implants PIP saisissantes ne sont pas fondées à revendiquer la créance en principal exigible au jour de la saisie-attribution.
2 - Sur les intérêts générés par ce principal à compter du jugement du 20 septembre 2017 jusqu'au séquestre des fonds, le 23 mai 2022 (soit : 252.713,85 euros)
L'existence de ce qui est désigné par les parties comme une convention de procédure signée par leurs conseils le 07 juillet 2016 n'est pas contestée mais elles se divisent quant à sa portée.
La société TRF, qui poursuit l'infirmation du jugement entrepris en sa validation des saisies-attribution litigieuses sur ce poste, expose qu'en marge de la procédure devant le tribunal de commerce de Toulon et en amont de son délibéré, elles sont convenues, selon un document manuscrit versé aux débats, qu'en cas de condamnation assortie de l'exécution provisoire, elles renonçaient 'à toute mesure d'exécution jusqu'à la décision du premier président de la cour d'appel sur l'exécution provisoire' et soutient que cette stipulation s'analyse comme un terme, au sens de l'article 1305 du code civil, ceci pour affirmer que la créance n'est due qu'à terme, qu'elle ne peut être exigée avant l'échéance et que la réclamation des saisissantes est 'directement contraire' à cet accord.
Toutefois, concédant que cet accord ne fait pas expressément référence à une suspension des intérêts mais en appelant à son contexte et à son esprit, elle ne peut valablement reprocher au premier juge d'avoir considéré que le terme 'mesure d'exécution' renvoyait indéniablement à l'exécution forcée et soutenir que cette expression doit être interprétée plus largement, d'autant que le conflit de succession d'avocats lui interdisait tout paiement.
Elle ne peut non plus ajouter que les quelques jours nécessaires à la constitution du séquestre entre la décision du bâtonnier l'ordonnant (le 12 mai 2017) et sa réalisation effective (le 23 mai 2017) ne sauraient lui être opposés
En effet, la suspension des voies d'exécution n'entraîne pas nécessairement l'arrêt du cours des intérêts et, sauf dénaturation de la convention en cause, elle ne stipule pas expressément qu'elle avait pour effet d'emporter irrévocablement la perte du droit aux intérêts à échoir à compter du jugement, ce dont il était loisible aux parties de convenir en des termes exprimant leur volonté dans ce sens.
En outre, les appelantes qui se prévalent des dispositions de l'article 1231-7 du code civil selon lequel 'sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement' sont justement fondées à prétendre qu'est inopérante l'invocation du conflit ayant opposé leurs avocats successifs pour justifier du retard dans le paiement.
Enfin, ne peut être accueillie l'argumentation de la société TRF relative au point de départ de l'arrêt du cours des intérêts consécutif à la mesure de séquestre ordonnée dès lors que cet arrêt intervient lors de la remise des fonds, comme cela ressort de la doctrine de la Cour de cassation énonçant, au visa de l'article 1961.3° du code civil, 'qu'il résulte de ce texte que lorsqu'il remet au séquestre désigné par justice les choses qu'il a offertes pour sa libération, le débiteur est libéré' (Cass civ 1ère, 17 février 1998, pourvoi n° 95-19305, publié au bulletin).
En conséquence, le juge de l'exécution doit être approuvé en ce qu'il retient que les victimes d'implants PIP saisissantes sont fondées à prétendre à une créance incluant lesdits intérêts.
3 - Sur les intérêts générés par la créance en principal entre le 24 mai 2017 (jour de la consignation) et le 23 août 2022 (jour des saisies-attribution litigieuses), soit la somme de 1.064.359,81 euros
Il résulte de ce qui précède, concernant la créance en principal, que les appelantes ne peuvent valablement se prévaloir de la validité de leurs saisies-attribution à hauteur de cette autre créance d'intérêts en soutenant que la saisie pratiquée par leurs anciens avocats n'a pu interrompre le cours des intérêts sur la créance en principal qu'elles revendiquent et en faisant valoir à nouveau qu'elle n'a pas été pratiquée entre les mains d'un tiers, la CARPA, à l'encontre duquel elles n'avaient aucune créance.
Sur cette autre demande, l'appréciation du premier juge doit être confirmée en ce qu'elle l'a conduit à la rejeter.
4 - Sur la créance au titre de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 11 février 2021 (soit la somme de 46.567,61 euros)
Les parties s'accordant à considérer qu'aucune somme n'est plus due au titre de l'exécution de l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence en suite de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 25 mai 2023, les saisies-attribution pratiquées le 23 août 2022 ne sauraient par conséquent être validées pour ce montant de 46.567,61 euros porté dans le décompte de la créance.
Il s'évince, par conséquent, de tout ce qui précède que les saisies-attribution litigieuses doivent être cantonnées à la somme de 252.713,85 euros.
Sur la demande indemnitaire subsidiairement formée par la société TRF
Au soutien de son appel incident, la société intimée se prévaut de l'extrême négligence des saisissantes au regard du délai qu'elles ont laissé s'écouler pour contester l'opposabilité de la mesure d'exécution que constituait la saisie conservatoire de 2017 convertie en saisie-attribution en 2019 et pour formuler leurs demandes, incriminant une 'ignorance feinte' révélatrice de la mauvaise foi de ses adversaires ou, à tout le moins, leur défaut de réaction à l'encontre de tous ceux dont elles se déclarent désormais victimes (leurs anciens conseils, l'huissier instrumentaire ou encore la CARPA).
Elle fait valoir que leur négligence fautive est la cause exclusive de son dommage consistant à devoir subir des mesures d'exécution forcée et à risquer de devoir payer deux fois une même créance pour conclure que son préjudice sera réparé par la condamnation des appelantes à lui verser toutes sommes qu'elle aurait à leur payer avec compensation consécutive.
Mais il convient de lui opposer la fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir juridictionnel du juge de l'exécution (et de la cour investie des mêmes pouvoirs) pour se prononcer sur une telle demande.
En effet, et comme énoncé par la Cour de cassation (Cass civ 2ème, 15 avril 2021, pourvoi n° 19-20281, publié au bulletin) 'en application de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, si le juge de l'exécution est compétent pour connaître de la contestation d'une mesure d'exécution forcée, il n'entre pas dans ses attributions de se prononcer sur une demande de condamnation à des dommages-intérêts contre le créancier saisissant, qui n'est pas fondée sur l'exécution ou l'inexécution dommageable de la mesure ; dès lors qu'une telle demande ne constitue pas une contestation de la mesure d'exécution au sens du texte précité, le juge de l'exécution ne dispose pas du pouvoir juridictionnel de statuer sur celle-ci.
C'est donc à juste titre que le juge de l'exécution a rappelé que l'article L 121-2 du code des procédures civiles lui donnait, certes, pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie mais, par motifs pertinents tenant à l'existence d'un vain commandement de payer du 09 juin 2022 préalable à la mise en oeuvre de la mesure en cause ou encore à ses précédents développements sur son exécution et que la cour fait siens, le premier juge a rejeté cette demande.
Le jugement mérite, ici, confirmation.
Sur la demande plus subsidiaire portant sur l'exonération des intérêts de retard formée par la société TRF
Se prévalant à nouveau en cause d'appel de l'application des dispositions de l'article 'L 133-3" (sic) du code monétaire et financier relatif à la majoration de cinq points du taux d'intérêt légal et de la possible exonération qu'il prévoit 'en considération de la situation du débiteur' (disposition ressortant, en réalité, de son article L 313-1 alinéa 2), l'intimée, citant force jurisprudences de cours d'appel, y consacre des développements pour maintenir 'de plus fort' son exonération en cas de succès des prétentions des saisissantes.
Ce faisant, elle élude tant le moyen qui lui est opposé par les appelantes que la motivation du premier juge qui a justement considéré que la demande était sans objet dans la mesure où cette majoration n'était pas sollicitée par les requérantes ni pratiquée, les intérêts énoncés correspondant au taux légal pour les personnes physiques.
En effet, le taux légal pour les particuliers au premier semestre 2017 s'établissait bien à 4,16 %, selon la publication de la Banque de France.
Cette demande ne peut qu'être rejetée et le jugement confirmé.
Sur la demande plus subsidiaire de garantie à l'encontre de la CARPA formée par la société TRF
Dès lors que la qualité de tiers saisi de la CARPA lui a été reconnue par la cour et que la saisie-attribution n'a pas été validée à hauteur de 6.009.000 euros représentant le principal alloué par le tribunal de commerce figurant et pour lequel la saisie-attribution a été pratiquée, ne saurait prospérer la demande en garantie fondée sur ces circonstances que forme la société TRF.
Comme en première instance, elle en sera déboutée.
Sur les frais non compris dans les dépens et les dépens
L'équité ne conduit pas à allouer aux parties, dès lors que chacune succombe partiellement en ses réclamations, une quelconque somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Et chacune conservera la charge de ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe ;
CONFIRME le jugement entrepris sauf en sa disposition relative au quantum du cantonnement qu'il a fixé et, statuant à nouveau dans cette limite en y ajoutant ;
Ordonne la cantonnement des saisies-attribution pratiquées le 23 août 2022 à la requête des 6009 victimes des implants PIP visées en tête du présent arrêt et sur les comptes ouverts par la société Tüv Rheinland France SAS dans les livres des sociétés BNP Paribas SA et Société Générale SA à la somme de 252.713,85 euros ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
DE
VERSAILLES
Code nac : 78F
Chambre civile 1-6
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 25 JANVIER 2024
N° RG 23/02248 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VY3N
AFFAIRE :
[K] [Z] [S] [L]
et autres
C/
S.A.S. TUV RHEINLAND FRANCE
CAISSE DES REGLEMENTS PECUNIAIRES EFFECTUES PAR LE S AVOCATS A LA COUR DE PARIS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Avril 2023 par le Juge de l'exécution de NANTERRE
N° RG : 22/07843
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 25.01.2024
à :
Me Jacques-Alexandre GENET de la SELAS ARCHIPEL, avocat au barreau de PARIS
Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES
Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [K] [Z] [S] [L]
née le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
et 6014 autres parties
Représentant : Me Jacques-Alexandre GENET de la SELAS ARCHIPEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0122 - N° du dossier E00016FR
APPELANTES
****************
S.A.S. TUV RHEINLAND FRANCE
N° Siret : 324 370 980 (RCS Nanterre)
[Adresse 3]
[Localité 5]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - N° du dossier 2370990 - Représentant : Me Christelle COSLIN du PARTNERSHIPS HOGAN LOVELLS (PARIS) LLP, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE
****************
ASSOCIATION CAISSE DES REGLEMENTS PECUNIAIRES EFFECTUES PAR LES AVOCATS A LA COUR DE PARIS
Association déclarée et enregistrée sous le n° SIREN 784 181 216, agissant poursuites et diligences en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 4]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 189 - N° du dossier S230248 - Représentant : Me Jean-Michel HOCQUARD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0087
PARTIE INTERVENANTE FORCEÉ
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Décembre 2023, Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Fabienne PAGES, Président,
Madame Florence MICHON, Conseiller,
Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO
EXPOSÉ DU LITIGE
A la suite de deux commandements de payer et d'une première série de saisies-attribution ayant reçu mainlevée, par acte du 23 août 2022, les 6.009 personnes physiques individualisées en tête du présent arrêt en leur qualité d'appelantes (ci-après désignées : les victimes des implants PIP), agissant en vertu d'un jugement rendu le 20 janvier 2017 par le tribunal de commerce de Toulon confirmé par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence rendu le 11 février 2021, ont fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes bancaires de la société Tüv Rheinland France SAS (ci-après : TRF) ouverts dans les livres des sociétés La Société Générale SA (fructueuse à hauteur d'environ 184.290,56 euros) et BNP Paribas SA (infructueuse) à concurrence de la somme de 7.372.641,26 euros ainsi décomposée :
au titre de ce jugement
* 6.009.000 euros en principal (soit 1.000 euros au profit de chacune à titre provisonnel, déduction faite de quatre paiements partiels),
* 252.713,85 euros au titre des intérêts au taux d'intérêt légal de 4,16 % courus du 20 janvier 2017 au 23 mai 2017 sur le montant total de la condamnation en principal, soit la somme de 18.027.000 euros,
* 1.064.359,81 euros au titre des intérêts au taux légal courus du 24 mai 2017 au 23 août 2022 sur la somme de 6.009.000 euros,
au titre de cet arrêt
* 46.567,61 euros en principal représentant la différence entre, d'une part, la somme de 1.201.800 euros due au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les intérêts ayant couru sur cette somme du 11 février 2021 au 10 mai 2022 et, d'autre part, un paiement du principal à la date du 10 mai 2022.
Ces saisies-attribution ont été dénoncées à la société TRF le 31 août 2022 et par acte du 12 septembre 2022 cette dernière les a assignées en contestation de ces mesures pour en solliciter la mainlevée devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nanterre.
Par ailleurs, par acte du 20 septembre 2022, la société TRF a assigné en intervention forcée l'association Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les avocats à la cour de Paris (ci-après : la CARPA) sur le fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil à l'effet d'être relevée et garantie de toutes sommes qu'elle aurait à payer aux saisissantes en raison de la faute de gestion commise par cette dernière dans le cadre d'une saisie-conservation pratiquée en 2017 par deux avocats du barreau de Marseille, anciens conseils des victimes des implants PIP, et convertie en saisie-attribution en 2019.
Pour éclairer ce litige, il convient d'en évoquer le contexte, à savoir :
qu'il s'inscrit dans celui né de la révélation, dans les années 2010, de l'absence de conformité des 'implants mammaires pré-remplis de gel de silicone à haute cohésivité' fabriqués et commercialisés dans le monde entier depuis les années 2000 par la société varoise Poly Implant Prothèses (PIP) dirigée par monsieur [O] [A], la société en charge de la réalisation d'audits du système de gestion de la qualité, des contrôles du produit, d'efficacité et d'essais de ces prothèses étant la société Tüv Rheinland France liée à l'organisme de certification de droit allemand Tüv Rheinland LGA Products (ci-après : TRLF), puis de la dénonciation de faits délictueux auprès du Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille par l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé et l'ouverture d'une information,
que le 30 mars 2010 la société PIP a été placée en liquidation judiciaire,
qu'au pénal, par arrêt confirmatif rendu le 02 mai 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, ses dirigeants ont été déclarés coupables des délits de tromperie aggravée et d'escroquerie et condamnés,
qu'au civil, diverses décisions ont été rendues parmi lesquelles l'arrêt du 11 mai 2021 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui a confirmé un jugement rendu le 20 janvier 2017 par le tribunal de commerce de Toulon, lequel, saisi par divers distributeurs du produit, a en particulier reconnu la responsabilité de la société TRF en sa qualité de certificateur des prothèses mammaires fabriquées par la société PIP entre 2002 et 2010 à partir d'un gel non autorisé, condamné solidairement la société TRF et la société allemande TRLP à verser à chacune des femmes victimes d'implants PIP, intervenantes volontaires à l'instance, la somme provisionnelle de 3.000 euros outre celle de 100 euros au titre de leurs frais non répétibles en ordonnant une expertise,
que par arrêt rendu le 12 mai 2017 le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a rejeté une demande d'arrêt de l'exécution provisoire assortissant le jugement mais autorisé son aménagement consistant en la consignation de la somme de 1.040.500 euros pour partie à la Caisse des dépôts et consignation et pour partie sur le compte séquestre de la CARPA,
qu'il peut être ajouté que, saisie d'un pourvoi (n° 21-14843) formé à l'encontre de l'arrêt rendu le 11 février 2021 par le cour d'appel d'appel d'Aix-en-Provence (au fondement des voies d'exécution en cause), la première chambre civile de la Cour de cassation énonce, par arrêt rendu le 25 mai 2023 (publié au bulletin) :
'18. Conformément au point 2 de l'annexe XI des articles R. 665-1 à R. 665-47 du code de la santé publique et à l'article R. 5211-56, du même code, successivement applicables, d'une part, un organisme habilité peut confier à un sous-traitant des travaux spécifiques portant sur la constatation et la vérification de faits, à condition de s'assurer préalablement que les dispositions du livre V bis du code précité, dans sa rédaction applicable en la cause, et, en particulier, de l'annexe XI des articles R. 665-1 à R. 665-47, laquelle fixe les critères minimaux pour la désignation des organismes habilités, soient respectées par le sous-traitant, d'autre part, le personnel chargé du contrôle doit exécuter les opérations d'évaluation et de vérification avec la plus grande compétence requise dans le secteur des dispositifs médicaux.
19. La cour d'appel a retenu qu'en application d'un contrat conclu le 21 octobre 1997 entre les sociétés PIP, TRLP et TRF, la société TRF avait, en qualité de sous-traitante, participé conjointement avec la société TRLP aux opérations de vérification ayant permis à la société PIP d'obtenir le certificat CE le 15 mars 2004 et aux nombreux audits de surveillance entre novembre 2004 et février 2009 et qu'elle avait, comme la société TRLP, manqué à ses obligations de vigilance lors des contrôles effectués au service achats.
20. Elle a pu en déduire que la société TRF avait manqué aux engagements inhérents à l'exercice de sa mission et engagé ainsi sa responsabilité.' .
mais que cet arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a toutefois fait l'objet d'une censure partielle, avec renvoi devant cette juridiction, aux motifs suivants :
' 30. Pour condamner les sociétés TRLP et TRF à réparer l'ensemble des préjudices matériels et immatériels causés aux distributeurs des produits de la société PIP et les préjudices corporels et/ou psychologiques causés aux porteuses d'implants mammaires PIP, l'arrêt retient que les manquements des sociétés TRLP et TRF ont eu pour conséquence de permettre à la société PIP d'apposer la certification CE sur les prothèses IMGHC d'avril 2001 à mars 2010.
31. En statuant ainsi, après avoir retenu que l'utilisation frauduleuse d'un gel non autorisé avait débuté à la fin de l'année 2002 et que les incohérences dans la comptabilité matière qui auraient dû être décelées lors de l'audit des 24 au 26 novembre 2004, tenant notamment à l'absence d'achat de gel Nusil cette année-là alors que la société PIP avait produit environ 20.000 prothèses IMGHC, étaient postérieures, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé le texte susvisé.
que, par ailleurs, selon convention de procédure signée le 07 juillet 2016, entre les sociétés TRLP et TRF (représentées par le cabinet Hogan Lovells), d'une part, et les victimes des implants PIP (représentées par maîtres [F] [B] et [C] [T], avocats au barreau de Marseille), d'autre part, les premières ont déposé des sommes destinées au paiement des condamnations prononcées sur le sous-compte Carpa de leur conseil, pour un montant de 18.402.000 euros,
qu'en cours de procédure, les victimes des implants en cause qui avaient initialement désigné ces deux avocats pour assurer la défense de leurs intérêts, les ont dessaisis de leur mandat et les sociétés TRLP et TRF en ont été avisées par courriel officiel de leur nouveau conseil du 16 mai 2017,
que messieurs [B] et [T] ont obtenu du bâtonnier du barreau de Marseille une décision rendue le 12 février 2018 fixant le montant de leurs honoraires à une somme globale de 6.738.600 euros (soit la somme de 1.100 euros pour chacune de leurs 6.126 clientes) et, par ordonnance rendue le 25 juillet 2019, le président du tribunal de grande instance de Marseille a rendu exécutoire cette décision,
que le 23 mai 2017, compte tenu de l'arrêt rendu le 12 mai 2017 le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence précité et du conflit entre les avocats successifs des porteuses de prothèses PIP, la société TRF a séquestré entre les mains de la CARPA des sommes destinées au paiement des provisions allouées à ces dernières, effectuant ultérieurement à leur profit et en exécution des condamnations quatre paiements partiels entre le 28 décembre 2017 et le 24 avril 2020,
que, concomitamment, sur autorisation du juge de l'exécution de Marseille du 19 mai 2017, ces deux anciens avocats ont fait pratiquer, le 22 mai 2017, une saisie conservatoire de créance pour un montant de 6.157.000 euros entre les mains de la CARPA (sous compte du cabinet Hogan-Lovells), laquelle s'est révélée fructueuse à hauteur de 6.134.000 euros,
que par décision du 12 février 2018, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille a fixé à la somme de 1.100 euros HT par victime le montant de leurs honoraires et que le 25 juillet 2019 le président du tribunal de grande instance de Marseille a donné force exécutoire à cette décision,
que le 18 septembre 2019 et en vertu de cette décision l'huissier instrumentaire a converti en saisie-attribution la saisie conservatoire pratiquée le 22 mai 2017 précitée, que le 26 décembre 2019, sur présentation d'un certificat de non-contestation établi le 13 décembre 2019 et rectifié le 20 décembre suivant, la CARPA de Paris a libéré les fonds ainsi saisis à hauteur de la somme de 6.126.000 euros entre ses mains et il en a été donné mainlevée le 13 janvier 2020,
qu'enfin, il peut être ajouté que par jugement rendu le 17 mai 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris - saisi par la société de droit allemand TRLP de la contestation d'une saisie-attribution pratiquée le 25 août 2022 à la requête de ces mêmes victimes des implants PIP entre les mains de la CARPA et, après jonction de procédures, de l'action en garantie de la société TRLP à l'encontre de la CARPA - a 'donné mainlevée de la saisie-attribution du 25 août 2022" (étant relevé par la présente cour que le jugement ne précise pas sur quelles sommes portait la mesure), ceci après une appréciation juridique des articles 1342-2 et 1239 du code civil relatifs au paiement et une analyse factuelle le conduisant à retenir que le mouvement de fonds opéré le 26 décembre 2019 par la CARPA en exécution de la saisie-attribution pouvait être considéré comme un paiement que les victimes, se désistant d'un recours en contestation d'honoraires initié le 25 janvier 2019 contre leurs anciens avocats, ont implicitement ratifié,
Par jugement contradictoire rendu le 06 avril 2023 le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nanterre saisi de la contestation de la saisie-attribution pratiquée le 23 août 2022, a, en rappelant que sa décision est exécutoire de droit :
déclaré irrecevables les notes en délibéré de la Caisse de Règlements Pécuniaires effectuées par les avocats à la cour de Paris (CARPA), de la SAS Tüv Rheinland France et des 6.009 saisissantes listées en défense reçues par RPVA entre le 17 et le 24 mars 2023,
débouté la société Tüv Rheinland France de sa demande de mainlevée des saisies-attribution pratiquées par les 6.009 saisissantes listées en défense le 23 août 2022 auprès de la Société Générale et de la BNP Paribas,
cantonné les effets des saisies-attribution pratiquées par le 6.009 saisissantes listées en défense le 23 août 2022 auprès de la Société Générale et de la BNP Paribas à la somme de 299.281,46 euros,
débouté les parties du surplus de leurs demandes,
condamné la SAS Tüv Rheinland France à régler à la Caisse de Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris (CARPA) la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la SAS Tüv Rheinland France aux dépens de l'assignation en intervention forcée,
rejeté les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la société Tüv Rheinland France et des 6.009 saisissantes listées en tête de cette décision,
dit que la société Tüv Rheinland France et les 6.009 saisissantes listées en tête de cette décision conserveront la charge de leurs propres dépens.
Ces 6.009 victimes d'implants PIP ont interjeté appel de ce jugement selon déclaration reçue au greffe le 07 avril 2023.
Par dernières conclusions notifiées le 17 novembre 2023, madame [P] [X] [Y] et les 6.008 autres personnes physiques identifiées en tête du présent arrêt demandent à la cour, au visa des articles L 111-2, L 111-4, L 111-7, L 111-10 et L 211-1 du code des procédures civiles d'exécution, 1231-7 du code civil et 700 du code de procédure civile :
d'infirmer le jugement (entrepris) en ce qu'il a cantonné les effets des saisies-attribution pratiquées par les appelantes le 23 août 2022 auprès de la Société Générale et de BNP Paribas à la somme de 299.281,46 euros et débouté les appelantes du surplus de leurs demandes,
de le confirmer pour le surplus,
statuant à nouveau
de cantonner les saisies-attribution de créances pratiquées le 23 août 2022 à la requête des appelantes à l'encontre de Tüv Rheinland France SAS entre les mains de BNP Paribas et de la Société Générale à la somme de 7.326.073,65 euros (à parfaire au jour du parfait paiement) en principal et intérêts (arrêtés au 23 août 2022, jour des saisies), due au titre du jugement rendu le 20 janvier 2017 par le tribunal de commerce de Toulon,
en tout état de cause
de débouter Tüv Rheinland France SAS de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
de condamner Tüv Rheinland France SAS aux entiers dépens de première instance et d'appel et à (leur) payer la somme de 100.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Par dernières conclusions notifiées le 09 novembre 2023 la société par actions simplifiée Tüv Rheinland France, visant les dispositions des articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, 1240 et suivants et 1342 et suivants du code civil, 112 et suivants, 550 et 649 du code de procédure civile, L. 121-2, R. 211-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution et L.133-3 du code monétaire et financier, prient la cour :
de confirmer le jugement (entrepris) en ce qu'il a rejeté les demandes des 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste est également produite en pièce n° A, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
de déclarer la société Tüv Rheinland France SAS recevable et bien fondée en son appel incident à l'encontre des 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste est également produite en pièce n° A,
de déclarer la société Tüv Rheinland France SAS recevable et bien fondée en son appel provoqué à l'encontre de la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris,
Y faisant droit,
d'infirmer le jugement (entrepris) en ce qu'il a débouté la société Tüv Rheinland France SAS de sa demande de mainlevée pure et simple des saisies-attribution pratiquées par les 6.009 personnes physiques saisissantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...), sur les comptes bancaires ouverts dans les livres de la Société Générale et de la BNP Paribas par la société Tüv Rheinland France SAS // cantonné les effets des saisies-attribution pratiquées par les 6.009 personnes physiques saisissantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...), sur les comptes bancaires ouverts dans les livres de la Société Générale et de la BNP Paribas par la société Tüv Rheinland France SAS à la somme de 299.281,46 euros au titre de créances d'intérêts // débouté la société Tüv Rheinland France SAS du surplus de ses demandes // condamné la société Tüv Rheinland France SAS à régler à la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la Cour de Paris la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile // condamné la société Tüv Rheinland France SAS aux dépens de l'assignation en intervention forcée // rejeté les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile de la société Tüv Rheinland France SAS,
Statuant à nouveau
* à titre principal
d'ordonner la mainlevée pure et simple des saisies-attribution pratiquées le 23 août 2022 à la demande, notamment, des 6.009 appelantes listées en tête de 'la présente', et dont la liste (...), sur les comptes bancaires ouverts dans les livres de la Société Générale et de la BNP Paribas par la société Tüv Rheinland France SAS, du fait de l'absence de créance exigible tant à titre principal qu'au titre des intérêts de retard demandés malgré les accords intervenus,
* à titre subsidiaire
de juger fautive la négligence des 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...), et de juger tardives les mesures d'exécution forcée engagées par les appelantes à l'encontre de la société Tüv Rheinland France SAS,
de condamner en conséquence in solidum les 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...), à relever et garantir la société Tüv Rheinland France SAS de toutes sommes qu'elle aurait à leur payer en conséquence de l'inopposabilité à leur endroit de la saisie conservatoire du 22 mai 2017 et ce, à concurrence de la créance globale alléguée,
- d'ordonner en conséquence la compensation de cette condamnation avec la créance globale alléguée par les 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...) contre la société Tüv Rheinland France SAS,
* plus subsidiairement encore
de faire les comptes entre les parties et de déduire de la créance alléguée par les 6.009 appelantes listées en tête des présentes, et dont la liste (...),
' le montant de la dette dont le paiement de la société Tüv Rheinland France SAS les a libérées, soit 6.009.000 euros,
' le montant de la dette dont elles sont redevables envers la société Tüv Rheinland France SAS en raison de la cassation de l'arrêt n° 2021/39 du 11 février 2021 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, soit 200 euros pour chacune des appelantes listées en tête des présentes et dont la liste (...) représentant globalement un montant de 1.208.000 euros,
* à titre infiniment subsidiaire
de juger la faute de la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris dans sa gestion des saisies de créance pratiquées les 22 mai 2017 et 5 juillet 2021 sur le compte CARPA du conseil de la société Tüv Rheinland France SAS, dont la validité et l'effet sont contestés par les 6.009 appelantes listées (...),
de condamner en conséquence la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris à relever et garantir la société Tüv Rheinland France SAS de toutes sommes qu'elle aurait à payer aux 6.009 appelantes listées en tête des présentes et dont la liste (...) à concurrence de la créance alléguée par ces 6.009 appelantes,
de condamner la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris à payer à la société Tüv Rheinland France SAS la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,
* en tout état de cause
d'exonérer la société Tüv Rheinland France SAS de la majoration des intérêts en application de l'article L.133-3 du code monétaire et financier,
de débouter les 6.009 appelantes listées en tête des présentes et dont la liste (...) ainsi que la Caisse des Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
de condamner in solidum les 6.009 appelantes listées en tête des présentes et dont la liste (...) à payer à la société Tüv Rheinland France SAS la somme de 50.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
L'association Caisse de Règlements Pécuniaires effectués par les Avocats à la cour de Paris (CARPA) a notifié des conclusions le 10 novembre 2023 mais par ordonnance rendue le 06 décembre 2023, le président de la présente chambre de la cour, au visa de l'article 905-2 al.3 du code de procédure civile, de sa demande d'observations écrites du 23 novembre 2023 et des observations écrites déposées le 28 novembre 2023, a déclaré irrecevables les conclusions déposées par cette intimée à l'appel provoqué le 10 novembre 2023 en rappelant que cette ordonnance peut faire l'objet d'un déféré à la cour dans les 15 jours de sa date, ceci au motif que l'intimée à l'appel provoqué n'a pas conclu dans le délai imparti.
Cette décision n'a pas été déférée à la cour.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de mainlevée des deux saisies-attribution pratiquées le 23 août 2022
Il convient de rappeler que pour débouter la société TRF de sa demande de mainlevée pure et simple de ces mesures, le juge de l'exécution a liminairement rappelé que l'erreur sur le montant des sommes dues en vertu du titre exécutoire est sans incidence sur la validité de l'acte d'exécution qui demeure valable à concurrence du montant réel de la dette limitant les effets de la mesure.
Et pour décider de son cantonnement, il a porté son appréciation sur chacun des quatre postes figurant dans le décompte de la créance des saisissantes (explicité ci-avant).
Il a ainsi jugé que la créance revendiquée en principal n'était plus exigible au jour des saisies-attribution en cause du fait de la libération par la CARPA, en suite de la saisie-attribution antérieurement pratiquée par les anciens avocats des défenderesses pour avoir paiement de leurs honoraires, de la somme de 6.126.000 euros et eu égard à la quittance reçue de ces avocats par la société TRF.
Que, par ailleurs, la saisie-conservatoire du 22 mai 2017 a produit les effets d'une consignation, arrêtant le cours des intérêts.
Qu'en revanche étaient dus les intérêts ayant couru depuis le jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulon jusqu'à la date des séquestres, de même que ceux dus au titre des condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile prononcées par la cour d'appel d'Aix-en-Provence après imputation d'un paiement.
Il a donc exclu de la créance de 7.372.641,26 euros revendiquée par les saisissantes la créance en principal de 6.009.000 et celle au titre des intérêts sur cette somme, soit : 1.064.359,81euros, cantonnant les effets de la mesure à la somme de 299.281,46 euros cumulant les seuls intérêts retenus (252.713,85 + 46.567,61 euros).
Sur appel incident, la société TRF reprend sa demande de mainlevée des deux saisies-attribution du 23 août 2022.
Pour ce faire, elle se prévaut de l'extinction de la créance en principal, comme en a jugé le juge de l'exécution, dès la saisie conservatoire des fonds pratiquée en 2017 à l'initiative des anciens avocats des 6.009 porteuses d'implants, par effet rétroactif de la conversion de celle-ci en saisie-attribution.
Et affirme qu'aucun intérêt de retard ne peut courir sur une créance réglée, le principal ayant été séquestré le 23 mai 2017.
Pour le surplus, elle poursuit l'infirmation du jugement.
Elle soutient, d'une part, que le premier juge a méconnu la portée de la convention de procédure du 07 juillet 2016 qui consistait à geler toute exécution et à ne procéder à aucun paiement, estimant qu'elle doit s'analyser en un report de la date d'exigibilité de la créance conformément à la définition de l'article 1305 du code civil ; elle ajoute que rien ne justifie une créance d'intérêts qui aurait couru entre la décision du premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence (le 12 mai 2017) et le séquestre des fonds (le 23 mai 2017) pour partie entre les mains du bâtonnier et pour partie sur le compte séquestre de la CARPA en raison du conflit de succession d'avocats; qu'en outre, les fonds séquestrés à hauteur de 2.000 euros pour chacune des personnes concernées ont été versés entre les mains de leur nouvel avocat, selon quatre versements, dès que ce dernier a justifié de l'existence de mandats.
Elle fait valoir, d'autre part, s'agissant de la créance d'intérêts au titre de l'exécution de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence qu'en raison de la censure de la Cour de cassation intervenue, selon son arrêt du 25 mai 2023, aucune somme n'est plus due en exécution de cette décision et, par conséquent, aucun intérêt de retard.
De leur côté, les appelantes poursuivent l'infirmation du jugement en affirmant, d'abord, qu'à tort le juge de l'exécution a considéré que la société TRF s'est valablement libérée des fonds du fait du paiement entre les mains de l'huissier instrumentaire lors de la saisie conservatoire et de sa conversion, retenant, à son sens en se méprenant, que le tiers saisi était la société TRF et non la CARPA désignée comme 'tiers saisi par délégation' (qui n'était débitrice d'aucune somme envers elles) et en en déduisant que la créance sollicitée était éteinte.
Elles soutiennent aussi que pour être libératoire, un paiement doit venir éteindre une dette exigible et que tel n'est pas le cas en l'espèce puisque la créance de leurs anciens avocats n'est ni exécutoire (faute de signification du titre), ni définitive, ni davantage certaine puisque, la contestant, elles ont formé un recours contre la décision de taxation et l'ordonnance la rendant exécutoire ; elles dénient, par ailleurs, toute ratification de ce versement.
Ainsi, selon elles, les saisies-attribution qu'elles ont fait pratiquer le 23 août 2022 l'ont été valablement à hauteur du principal alloué par le jugement et les intérêts qu'il a générés.
Elles contestent, ensuite, la lecture que fait la société intimée de la convention de procédure qui ne reportait en aucun cas la date d'exigibilité de la créance résultant du jugement ni ne stipulait un renoncement aux intérêts courant sur le principal ; le conflit entre avocats évoqué par leur adversaire n'a pu avoir pour effet, affirment-elles, de suspendre le cours des intérêts pas plus que la saisie-conservatoire pratiquée n'a pu valablement en interrompre le cours.
Elles en concluent que leurs saisies-attribution doivent être déclarées valables et cantonnées à la somme de 7.326.073,65 euros (soit : 6.009.000 + 252.713,85 + 1.064.359,81 euros), tirant les conséquences de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 25 mai 2023 qui a partiellement cassé l'arrêt rendu par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 11 février 2021 en renonçant à poursuivre leur validation à hauteur de la somme de 46.567,61 euros représentant les intérêts générés par la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure depuis le prononcé de l'arrêt jusqu'à son paiement.
1 - Sur la créance résiduelle en principal (soit 1.000 euros x 6009 victimes)
Afin de contester le caractère libératoire pour la société TRF du paiement effectué par la CARPA en exécution de la saisie pratiquée par leurs anciens avocats, les appelantes se prévalent d'abord et à bon droit de la qualité de tiers saisi de la CARPA.
Celle-ci ressort, en effet, clairement de la doctrine de la Cour de cassation (Cass civ 2ème, 09 janvier 2003, pourvoi n° 00-13887, publié au bulletin) énonçant :
'qu'il résulte des articles 237 et suivants du décret du 27 novembre 1991, 8 et 11 de l'arrêté du 5 juillet 1996 que la caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) est titulaire d'un compte, ouvert auprès d'une banque, sur lequel les avocats ont l'obligation légale de déposer les fonds remis par leurs clients ; que si chaque avocat est titulaire, auprès de la CARPA, d'un compte individuel et de sous-comptes-affaires, il ne dispose de la signature sur son compte individuel qu'en qualité de mandataire du président de la CARPA ; qu'en cas de signification d'une saisie portant sur les fonds déposés par un avocat au nom de son client, la CARPA a seule la qualité de tiers saisi pour l'application des articles 44 de la loi du 9 juillet 1991 et 59 du décret du 31 juillet 1992 ; que la nécessité d'interroger l'avocat titulaire du compte individuel peut constituer un motif légitime au sens de l'article 60 du même décret ; (...) que l'arrêt retient à bon droit que seule la caisse avait la qualité de tiers saisi et que la saisie n'avait pas à être dénoncée à l'avocat' .
Ce qu'a notamment pu reprendre par la suite sa chambre commerciale (Cass com, 12 avril 2005, pourvoi n° 03-19293, publié au bulletin).
Au cas particulier et comme exposé par les appelantes elles-mêmes, les procès-verbaux d'huissier ont bien été dressés à l'encontre de la CARPA de Pais avec mention du sous-compte du cabinet Puk Hogan Lovells ([Localité 8]) LLP, affaire Tuv Rheinhald /PIP (victimes PIP).
Toutefois, les appelantes ne peuvent valablement en déduire que la CARPA - 'débitrice de leur débitrice' et, non, selon elles, 'tiers saisi par délégation' qu'elles qualifient de concept juridique imaginaire créé par le premier juge - ne s'est pas dessaisie de sommes leur appartenant, de sorte que le paiement fait à leur détriment, à la suite de la conversion de la mesure conservatoire, l'a été de manière fautive et, en tout cas, sans 'un quelconque effet libératoire au profit de la société TRF, étrangère à la saisie' dès lors, d'une part, que la loi interdit aux avocats de détenir des fonds pour leurs clients et leur impose de les déposer entre les mains de la CARPA si bien qu'ils ne peuvent avoir la qualité de détendeurs de fonds, la CARPA en étant la seule véritable détentrice, et, d'autre part, que les sommes consignées sur un sous-compte ouvert, comme en l'espèce, au nom d'une partie, appartiennent à celle-ci.
Si les appelantes soutiennent ensuite que n'est que prétendue, faute de créance certaine liquide et exigible à leur encontre, la dette envers leurs anciens avocats dont elles auraient été ainsi libérées par le versement des fonds de la CARPA, et que ne peut trouver application l'article 1342-2 alinéa 2 du code civil selon lequel 'le paiement fait à une personne qui n'avait pas qualité pour le recevoir est néanmoins valable si le créancier le ratifie ou s'il en a profité', force est de considérer que la cour, saisie d'un litige dont l'objet est strictement limité à la contestation des voies d'exécution mises en oeuvre le 23 août 2022 ne saurait valablement se prononcer sur la validité ou le caractère exécutoire en vertu duquel ces anciens avocats ont converti, le 18 septembre 2019, la saisie conservatoire du 22 mai 2017 en saisie-attribution puis ont obtenu le dessaisissement des fonds par le tiers saisi.
S'agissant de leur contestation du profit tiré du paiement de cette dette d'honoraires envers leurs anciens avocats ou de sa ratification, il y a lieu de considérer que le second alinéa de cet article 1342-2 vise un tiers accipiens qui n'avait pas qualité pour le recevoir.
La cour ne pouvant, sur cette qualité, statuer qu'en termes hypothétiques, elle ne saurait suivre en leur argumentation les appelantes.
Il apparaît, en effet, qu'elles ne démontrent ni même ne prétendent s'en être acquittées et se bornent à dénier tant le principe que le quantum de cette créance d'honoraires selon un titre qui ne serait pas exécutoire alors que la société TFR se prévaut (en se reportant aux pièces adverses n° 7 et 8 et en versant les pièces 65 à 67) de leur représentation par maître [R] [V], avocat, devant le bâtonnier de Marseille, de la notification de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance de Marseille qui rendait exécutoire la décision de ce bâtonnier ainsi que de pourvois n° 19-22084 et n° 20-11130 formés par maître [V] et maître [J] [D] [I], avocate au barreau de Bogota 'déclarant agir en qualité de représentante du groupe des victimes PIP' à l'encontre d'une ordonnance sur contestation d'honoraires rendue le 25 juin 2019 par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence constatant qu'il n'a pas été régulièrement saisi, lesquels pourvois ont donné lieu à des désistements selon arrêts rendus le 09 décembre 2021.
Ces désistements emportant acquiescement à l'arrêt querellé et ,en conséquence, soumission aux chefs de celui-ci, si les appelantes invoquent l'introduction d'un recours contre les décisions fondant les voies d'exécution mises en oeuvre par leurs anciens avocats en affirmant qu' 'il prive de tout fondement la conclusion du juge de l'exécution de Paris', elles ne consacrent pas de développements à cet argument ni ne versent ce recours qu'elles situent au 16 juin 2023.
La présente cour n'a d'ailleurs pas compétence pour connaître de la contestation d'une décision d'un juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris.
Elles produisent, en revanche, en pièce n° 39, une tardive assignation devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris délivrée le 11 octobre 2023 par cinq seulement des victimes des implants PIP à l'encontre uniquement de leurs deux anciens avocats tendant à obtenir l'annulation de l'acte de conversion de la saisie conservatoire du 18 septembre 2019 et du certificat de non contestation signifié à la CARPA le 16 décembre 2019, mais ne débattent point de l'effet extinctif du paiement par le tiers saisi résultant des dispositions de l'article R 211-7 du code des procédures civiles d'exécution que la Cour de cassation a d'ailleurs été conduite à retenir (Cass civ 2ème, 23 novembre 2000, pourvoi n° 98-22795, publié au bulletin).
Par suite, dès lors que les appelantes ne démontrent pas que les avocats n'avaient pas qualité pour recevoir paiement d'une créance dont elles n'établissent pas l'absence de caractère certain, liquide et exigible, à la faveur d'une voie d'exécution qui leur a leur épargné la charge d'intérêts de retard, de frais de signification ou encore d'exécution, peut-il être incidemment observé, le premier juge doit être approuvé en ce qu'il retient que les porteuses d'implants PIP saisissantes ne sont pas fondées à revendiquer la créance en principal exigible au jour de la saisie-attribution.
2 - Sur les intérêts générés par ce principal à compter du jugement du 20 septembre 2017 jusqu'au séquestre des fonds, le 23 mai 2022 (soit : 252.713,85 euros)
L'existence de ce qui est désigné par les parties comme une convention de procédure signée par leurs conseils le 07 juillet 2016 n'est pas contestée mais elles se divisent quant à sa portée.
La société TRF, qui poursuit l'infirmation du jugement entrepris en sa validation des saisies-attribution litigieuses sur ce poste, expose qu'en marge de la procédure devant le tribunal de commerce de Toulon et en amont de son délibéré, elles sont convenues, selon un document manuscrit versé aux débats, qu'en cas de condamnation assortie de l'exécution provisoire, elles renonçaient 'à toute mesure d'exécution jusqu'à la décision du premier président de la cour d'appel sur l'exécution provisoire' et soutient que cette stipulation s'analyse comme un terme, au sens de l'article 1305 du code civil, ceci pour affirmer que la créance n'est due qu'à terme, qu'elle ne peut être exigée avant l'échéance et que la réclamation des saisissantes est 'directement contraire' à cet accord.
Toutefois, concédant que cet accord ne fait pas expressément référence à une suspension des intérêts mais en appelant à son contexte et à son esprit, elle ne peut valablement reprocher au premier juge d'avoir considéré que le terme 'mesure d'exécution' renvoyait indéniablement à l'exécution forcée et soutenir que cette expression doit être interprétée plus largement, d'autant que le conflit de succession d'avocats lui interdisait tout paiement.
Elle ne peut non plus ajouter que les quelques jours nécessaires à la constitution du séquestre entre la décision du bâtonnier l'ordonnant (le 12 mai 2017) et sa réalisation effective (le 23 mai 2017) ne sauraient lui être opposés
En effet, la suspension des voies d'exécution n'entraîne pas nécessairement l'arrêt du cours des intérêts et, sauf dénaturation de la convention en cause, elle ne stipule pas expressément qu'elle avait pour effet d'emporter irrévocablement la perte du droit aux intérêts à échoir à compter du jugement, ce dont il était loisible aux parties de convenir en des termes exprimant leur volonté dans ce sens.
En outre, les appelantes qui se prévalent des dispositions de l'article 1231-7 du code civil selon lequel 'sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement' sont justement fondées à prétendre qu'est inopérante l'invocation du conflit ayant opposé leurs avocats successifs pour justifier du retard dans le paiement.
Enfin, ne peut être accueillie l'argumentation de la société TRF relative au point de départ de l'arrêt du cours des intérêts consécutif à la mesure de séquestre ordonnée dès lors que cet arrêt intervient lors de la remise des fonds, comme cela ressort de la doctrine de la Cour de cassation énonçant, au visa de l'article 1961.3° du code civil, 'qu'il résulte de ce texte que lorsqu'il remet au séquestre désigné par justice les choses qu'il a offertes pour sa libération, le débiteur est libéré' (Cass civ 1ère, 17 février 1998, pourvoi n° 95-19305, publié au bulletin).
En conséquence, le juge de l'exécution doit être approuvé en ce qu'il retient que les victimes d'implants PIP saisissantes sont fondées à prétendre à une créance incluant lesdits intérêts.
3 - Sur les intérêts générés par la créance en principal entre le 24 mai 2017 (jour de la consignation) et le 23 août 2022 (jour des saisies-attribution litigieuses), soit la somme de 1.064.359,81 euros
Il résulte de ce qui précède, concernant la créance en principal, que les appelantes ne peuvent valablement se prévaloir de la validité de leurs saisies-attribution à hauteur de cette autre créance d'intérêts en soutenant que la saisie pratiquée par leurs anciens avocats n'a pu interrompre le cours des intérêts sur la créance en principal qu'elles revendiquent et en faisant valoir à nouveau qu'elle n'a pas été pratiquée entre les mains d'un tiers, la CARPA, à l'encontre duquel elles n'avaient aucune créance.
Sur cette autre demande, l'appréciation du premier juge doit être confirmée en ce qu'elle l'a conduit à la rejeter.
4 - Sur la créance au titre de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 11 février 2021 (soit la somme de 46.567,61 euros)
Les parties s'accordant à considérer qu'aucune somme n'est plus due au titre de l'exécution de l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence en suite de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 25 mai 2023, les saisies-attribution pratiquées le 23 août 2022 ne sauraient par conséquent être validées pour ce montant de 46.567,61 euros porté dans le décompte de la créance.
Il s'évince, par conséquent, de tout ce qui précède que les saisies-attribution litigieuses doivent être cantonnées à la somme de 252.713,85 euros.
Sur la demande indemnitaire subsidiairement formée par la société TRF
Au soutien de son appel incident, la société intimée se prévaut de l'extrême négligence des saisissantes au regard du délai qu'elles ont laissé s'écouler pour contester l'opposabilité de la mesure d'exécution que constituait la saisie conservatoire de 2017 convertie en saisie-attribution en 2019 et pour formuler leurs demandes, incriminant une 'ignorance feinte' révélatrice de la mauvaise foi de ses adversaires ou, à tout le moins, leur défaut de réaction à l'encontre de tous ceux dont elles se déclarent désormais victimes (leurs anciens conseils, l'huissier instrumentaire ou encore la CARPA).
Elle fait valoir que leur négligence fautive est la cause exclusive de son dommage consistant à devoir subir des mesures d'exécution forcée et à risquer de devoir payer deux fois une même créance pour conclure que son préjudice sera réparé par la condamnation des appelantes à lui verser toutes sommes qu'elle aurait à leur payer avec compensation consécutive.
Mais il convient de lui opposer la fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir juridictionnel du juge de l'exécution (et de la cour investie des mêmes pouvoirs) pour se prononcer sur une telle demande.
En effet, et comme énoncé par la Cour de cassation (Cass civ 2ème, 15 avril 2021, pourvoi n° 19-20281, publié au bulletin) 'en application de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, si le juge de l'exécution est compétent pour connaître de la contestation d'une mesure d'exécution forcée, il n'entre pas dans ses attributions de se prononcer sur une demande de condamnation à des dommages-intérêts contre le créancier saisissant, qui n'est pas fondée sur l'exécution ou l'inexécution dommageable de la mesure ; dès lors qu'une telle demande ne constitue pas une contestation de la mesure d'exécution au sens du texte précité, le juge de l'exécution ne dispose pas du pouvoir juridictionnel de statuer sur celle-ci.
C'est donc à juste titre que le juge de l'exécution a rappelé que l'article L 121-2 du code des procédures civiles lui donnait, certes, pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts en cas d'abus de saisie mais, par motifs pertinents tenant à l'existence d'un vain commandement de payer du 09 juin 2022 préalable à la mise en oeuvre de la mesure en cause ou encore à ses précédents développements sur son exécution et que la cour fait siens, le premier juge a rejeté cette demande.
Le jugement mérite, ici, confirmation.
Sur la demande plus subsidiaire portant sur l'exonération des intérêts de retard formée par la société TRF
Se prévalant à nouveau en cause d'appel de l'application des dispositions de l'article 'L 133-3" (sic) du code monétaire et financier relatif à la majoration de cinq points du taux d'intérêt légal et de la possible exonération qu'il prévoit 'en considération de la situation du débiteur' (disposition ressortant, en réalité, de son article L 313-1 alinéa 2), l'intimée, citant force jurisprudences de cours d'appel, y consacre des développements pour maintenir 'de plus fort' son exonération en cas de succès des prétentions des saisissantes.
Ce faisant, elle élude tant le moyen qui lui est opposé par les appelantes que la motivation du premier juge qui a justement considéré que la demande était sans objet dans la mesure où cette majoration n'était pas sollicitée par les requérantes ni pratiquée, les intérêts énoncés correspondant au taux légal pour les personnes physiques.
En effet, le taux légal pour les particuliers au premier semestre 2017 s'établissait bien à 4,16 %, selon la publication de la Banque de France.
Cette demande ne peut qu'être rejetée et le jugement confirmé.
Sur la demande plus subsidiaire de garantie à l'encontre de la CARPA formée par la société TRF
Dès lors que la qualité de tiers saisi de la CARPA lui a été reconnue par la cour et que la saisie-attribution n'a pas été validée à hauteur de 6.009.000 euros représentant le principal alloué par le tribunal de commerce figurant et pour lequel la saisie-attribution a été pratiquée, ne saurait prospérer la demande en garantie fondée sur ces circonstances que forme la société TRF.
Comme en première instance, elle en sera déboutée.
Sur les frais non compris dans les dépens et les dépens
L'équité ne conduit pas à allouer aux parties, dès lors que chacune succombe partiellement en ses réclamations, une quelconque somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Et chacune conservera la charge de ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe ;
CONFIRME le jugement entrepris sauf en sa disposition relative au quantum du cantonnement qu'il a fixé et, statuant à nouveau dans cette limite en y ajoutant ;
Ordonne la cantonnement des saisies-attribution pratiquées le 23 août 2022 à la requête des 6009 victimes des implants PIP visées en tête du présent arrêt et sur les comptes ouverts par la société Tüv Rheinland France SAS dans les livres des sociétés BNP Paribas SA et Société Générale SA à la somme de 252.713,85 euros ;
Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,