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Décisions

CA Pau, ch. soc., 18 janvier 2024, n° 22/00808

PAU

Arrêt

Autre

CA Pau n° 22/00808

18 janvier 2024

TP/SB

Numéro 24/167

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 18/01/2024

Dossier : N° RG 22/00808 - N° Portalis DBVV-V-B7G-IE4O

Nature affaire :

Contestation du motif non économique de la rupture du contrat de travail

Affaire :

[BK] [SZ]

C/

S.A.S. EAO FRANCE

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 18 Janvier 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 11 Octobre 2023, devant :

Mme PACTEAU, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame LAUBIE, Greffière.

Madame SORONDO, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Madame PACTEAU et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame CAUTRES, Président

Madame SORONDO, Conseiller

Mme PACTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [BK] [SZ]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Comparant assisté de Maître DAURES de la SARL OREN AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

S.A.S. EAO FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Maître DA SILVA de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de LYON

sur appel de la décision

en date du 04 MARS 2022

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BAYONNE

RG numéro : 21/00045

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [BK] [SZ] a été embauché par la SAS EAO France, à compter du 1er septembre 2015, selon contrat à durée indéterminée, en qualité de responsable grands comptes ferroviaires, statut cadre, selon un forfait de 218 jours travaillé moyennant une rémunération annuelle de 48.000 euros, outre une part variable de rémunération en fonction des objectifs définis.

Par avenant, à compter du 1er novembre 2016, M. [SZ] a poursuivi la part sédentaire de son travail depuis son domicile.

Le 27 février 2020, il a été placé en arrêt de travail jusqu'au 27 mars 2020.

En avril, M. [M], directeur général ayant pris ses fonctions le 4 décembre 2019, a proposé au salarié une rupture conventionnelle.

Du 29 avril 2020 au 10 juillet 2020, M. [SZ] a de nouveau été placé en arrêt de travail.

Le 19 mai 2020, M. [SZ] a été convoqué à un entretien préalable fixé le 4 juin 2020.

Le 30 juin 2020, il a été licencié pour faute simple.

Le 10 février 2021, M. [SZ] a saisi la juridiction prud'homale au fond d'une contestation de son licenciement et de demandes de rappels de salaire et sommes subséquentes.

Par jugement du 4 mars 2022, le conseil de prud'hommes de Bayonne a':'

>À titre principal, (sic)

- débouté M. [BK] [SZ] de ses demandes de rappel de salaire en paiement d'heures supplémentaires, de repos compensateur et de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- fixé le salaire mensuel moyen des 12 derniers mois à 7960,54 euros,

- dit et jugé que M. [BK] [SZ] n'a pas fait l'objet d'un harcèlement moral,

- débouté M. [BK] [SZ] de ses demandes de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant de harcèlement moral, de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant de l'obligation de sécurité et de prévention des agissements de harcèlement moral, de dommages et intérêts pour licenciement nul, de rappel de l'indemnité légale de licenciement,

- débouté M. [BK] [SZ] de sa demande de rappel de salaire pour part variable de sa rémunération,

- débouté M. [BK] [SZ] de sa demande de rappel de salaire au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés.

> À titre subsidiaire, (sic)

- dit et jugé que le licenciement de M. [BK] [SZ] est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société EAO France à payer à M. [BK] [SZ] la somme de 47 500 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [BK] [SZ] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

- condamné la société EAO France à payer à M. [BK] [SZ] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit qu'il n'y a lieu d'assortir cette décision d'une mesure d'exécution provisoire.

- Laissé à la charge de la société EAO France le support de l'intégralité des dépens de l'instance.

Le 18 mars 2022, M. [BK] [SZ] a interjeté appel partiel du jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.

Dans ses conclusions adressées au greffe par voie électronique le 23 décembre 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, M. [BK] [SZ] demande à la cour de':

- Dire et Juger recevable et bien fondé son appel interjeté le 18 mars 2022,

> À titre principal :

- Dire et Juger que M. [BK] [SZ] a été victime d'un harcèlement moral à l'origine de son licenciement,

- Dire et Juger que la société EAO France a manqué à son obligation de sécurité et de prévention des agissements de harcèlement moral,

- Dire et Juger que la société EAO France s'est volontairement abstenue d'appliquer à M. [BK] [SZ] les mesures de protection de la santé et de la sécurité des salariés bénéficiant d'une convention de forfait en jours sur l'année,

- Dire et Juger que la convention de forfait en jours sur l'année est inopposable à M. [BK] [SZ],

- Dire et Juger que l'élément intentionnel du travail dissimulé est établi,

En conséquence':

- Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- A titre principal :

' Débouté M. [BK] [SZ] de ses demandes de rappel de salaire en paiement d'heures supplémentaires, de repos compensateur et de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

' Fixé le salaire mensuel moyen des 12 derniers mois à 7960,54 euros,

' Dit et jugé que M. [BK] [SZ] n'a pas fait l'objet d'un harcèlement moral,

' Débouté M. [BK] [SZ] de ses demandes de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant de harcèlement moral, de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant de l'obligation de sécurité et de prévention des agissements de harcèlement moral, de dommages et intérêts pour licenciement nul, de rappel de l'indemnité légale de licenciement,

' Débouté M. [BK] [SZ] de sa demande de rappel de salaire pour part variable de sa rémunération,

' Débouté M. [BK] [SZ] de sa demande de rappel de salaire au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés.

- A titre subsidiaire,

' Dit et jugé que le licenciement de M. [BK] [SZ] est sans cause réelle et sérieuse,

' Condamné la société EAO France à payer à M. [BK] [SZ] la somme de 47500 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' Débouté M. [BK] [SZ] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

' Condamné la société EAO France à payer à M. [BK] [SZ] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dit qu'il n'y a lieu d'assortir cette décision d'une mesure d'exécution provisoire.

Et, statuant à nouveau':

- Fixer le salaire de référence de M. [BK] [SZ] à la somme de 10 238,35 euros bruts de charges sociales et de CSG CRDS,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 40 953,4 euros nets de charges sociales et de CSG CRDS (4 mois de son salaire de référence) à titre de réparation de son préjudice moral résultant du harcèlement moral,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 30 715,05 euros nets de charges sociales et de CSG CRDS (3 mois de son salaire de référence) à titre de réparation de son préjudice moral résultant de la violation de l'obligation de sécurité et de prévention des agissements de harcèlement moral,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 2 894,71 euros nets de charges sociales et de CSG CRDS à titre de rappel d'indemnité légale de licenciement,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 122 860,2 euros nets de charges sociales et de CSG CRDS (12 mois de son salaire de référence) à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 81 561,61 euros bruts de charges sociales et de CSG CRDS à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaire pour la période octobre 2017 - octobre 2020,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 8 156,16 euros bruts de charges sociales et de CSG CRDS à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés afférentes,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 18 816,84 euros bruts de charges sociales et de CSG CRDS au titre de la contrepartie obligatoire en repos

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 1 881,68 euros bruts de charges sociales et de CSG CRDS à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 61 430,1 euros nets de charges sociales et de CSG CRDS de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 5 100,59 euros bruts de charges sociales et de CSG CRDS à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de la somme de 8 662,53 euros bruts de charges sociales et de CSG CRDS au titre de la part variable de sa rémunération,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 866,25 euros bruts de charges sociales et de CSG CRDS d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

- Condamner la société EAO France à remettre à M. [BK] [SZ] sous astreinte de 150 euros par jours de retard passé un délai de 8 jours à compter de la notification du Jugement : un reçu pour solde de tout compte rectifié, une attestation Pôle emploi rectifiée et les bulletins de salaires rectifiés,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Dire que l'ensemble des condamnations à intervenir porteront intérêt à compter de l'introduction de la demande, avec capitalisation annuelle des intérêts par l'application de l'article 1343-2 du Code Civil,

- Ordonner l'exécution provisoire sur l'ensemble de la décision à intervenir conformément à l'article 515 du Code de procédure civile,

- Condamner la société EAO France aux entiers dépens qui comprendront ceux éventuels d'exécution.

> A titre subsidiaire :

Si par extraordinaire votre Cour confirme le Jugement déféré en ce qu'il a jugé que M. [BK] [SZ] n'établit pas avoir été victime d'un harcèlement moral :

- Dire et Juger que le licenciement de M. [BK] [SZ] a été notifié en violation de la garantie d'emploi instaurée à l'article 16 de la convention collective nationale de la métallurgie,

- Dire et Juger que les griefs de la lettre de licenciement sont prescrits, non fautifs et fallacieux,

- Dire et Juger que, en tout état de cause, les griefs de la lettre de licenciement ne caractérisent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement,

En conséquence,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 30 715,05 euros nets de charges sociales et de CSG CRDS (3 mois de son salaire de référence) à titre de réparation de son préjudice moral résultant des circonstances brutales et vexatoires de son licenciement,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de 61 430,1 euros nets de charges sociales et de CSG CRDS (6 mois de son salaire de référence) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Condamner la société EAO France à lui verser la somme de de 907,46 euros à titre de rappel de part variable de rémunération,

Dans ses conclusions responsives et récapitulatives adressées au greffe par voie électronique le 15 mars 2023, auxquelles il y a lieu de se référer pour l'exposé des faits et des moyens, la société EAO France, formant appel incident, demande à la cour de':

- Juger mal fondé et injustifié l'appel interjeté par M. [SZ],

> Le rejetant,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [SZ] des demandes suivantes :

* 40.953,4 euros a titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,

* 30.715,05 euros à titre de dommages~intérêts pour violation de l'obligation de sécurité,

* 2.894,71 euros titre de rappel d'indemnité de licenciement,

* 122.860,2 euros euros titre de dommages-intérêts pour nullité du licenciement,

* 81.561,61 euros à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires,

* 8.156,16 euros au titre des congés payes incidents,

* 18.816,84 euros à titre de contrepartie obligatoire de repos,

* 1.881,68 euros au titre des congés paye incidents,

* 61.430,1 euros à titre d'indemnité pour travail dissimule,

* 5.100,59 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés,

* 8.662,53 euros à titre de rappel sur part variable,

* 866,25 euros au titre des congés payés incidents,

* 30.715,05 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral en raison du licenciement brutal et vexatoire,

* 907,46 6 à titre de rappel de salaire sur part variable,

> Faisant droit à l'appel incident de la société EAO France,

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société EAO France au paiement des sommes suivantes :

* 47.500 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

* 1.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

Statuant à nouveau

I ' Sur la demande principale

- Juger que M. [SZ] ne rapporte pas de faits qui laisseraient supposer qu'il aurait été victime de harcèlement moral de la part de M. [M],

- Juger que M. [SZ] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que la société EAO France n'aurait pas respecté son obligation de sécurité notamment en matière de prévention du harcèlement moral ou au titre d'une visite médicale de reprise qui n'aurait pas été organisée,

En conséquence

- Débouter M. [SZ] de sa demande de dommages-intérêts pour nullité du licenciement,

Subsidiairement

- Fixer la moyenne des 12 derniers mois de salaire a la somme brute de 7.960,54 euros en cas de condamnation déterminée en mois de salaire,

II ' Sur la demande subsidiaire

- Juger que le licenciement de M. [SZ] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- Juger que le licenciement de M. [SZ] n'est pas intervenu de manière brutale et vexatoire,

En conséquence

- Débouter M. [SZ] de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse et pour licenciement brutal et vexatoire,

Subsidiairement

- Fixer la moyenne des 12 derniers mois de salaire à la somme brute de 7960,54 euros en cas de condamnation déterminée en mois de salaire,

III ' Sur les heures supplémentaires

- Juger que le forfait en jours prévu contractuellement est opposable à M. [SZ] et le débouter de sa demande de rappel d'heures supplémentaires, et de ses autres demandes accessoires,

Subsidiairement si la Cour décidait que le forfait en jours n'est pas opposable :

- Juger que M. [SZ] ne justifie pas avoir effectué des heures supplémentaires,

En conséquence

- Débouter M. [SZ] de ses demandes de rappel de salaire, repos compensateurs et travail dissimulé,

- Le condamner au remboursement de la somme de 7.927 32 euros au titre des RTT pris sur les trois années précédant la rupture du contrat,

IV - Sur le solde de tout compte

- Juger que M. [SZ] a été intégralement rempli de ses droits à la réception de son solde de tout compte,

En conséquence

- Débouter M. [SZ] de toutes ses demandes fins et prétentions à ce titre,

En tout état de cause

- Condamner M. [SZ] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'en tous les dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail

- le rappel d'heures supplémentaires et le repos compensateur

[BK] [SZ] fonde les demandes formulées de ces chefs sur le fait que la convention de forfait en jours qui lui était appliquée lui est inopposable au motif que la société EAO France n'a respecté aucune des mesures prévues par l'article 14.2 de l'accord national du 28 juillet 1998 de la branche de la métallurgie.

Sur l'opposabilité de la convention de forfait en jours

Le contrat de travail par lequel M. [SZ] a été engagé le 1er septembre 2015 dispose, dans son article 4.1 sur la durée du travail':

«'votre horaire de travail sera celui en vigueur au sein de notre société pour les cadres en forfait en jours sur l'année et en accord avec la convention collective.

La société EAO France SAS applique, comme ''forfait annuel en jours'' une base annuelle de 218 jours incluant la journée de solidarité prévue par l'article L.3133-7 du code du travail.

Le décompte se fait en journée, sur les jours ouvrables de l'entreprise, c'est-à-dire, à la date de signature': du lundi au vendredi inclus.

Dans vos tâches quotidiennes vous disposez d'une large autonomie dans la gestion de votre emploi du temps, afin d'assumer ces responsabilités au moment le plus opportun. Ces responsabilités supposent donc une obligation de disponibilité telle que le temps que vous passez au travail ne peut être déterminé qu'a posteriori'».

Le contrat poursuit qu'en sus de ses congés payés, le salarié aura également droit à 12 jours de RTT par an, le lundi de Pentecôte, 12ème RTT de EAO France étant considéré comme la journée de solidarité et n'étant dès lors ni travaillé, ni payé.

L'avenant signé le 1er novembre 2016 n'a pas remis en cause ces dispositions.

L'article 14.2 de l'accord national du 28 juillet 1998 de la branche de la métallurgie dispose notamment que le forfait en jours s'accompagne d'un contrôle du nombre de jours travaillés. Afin de décompter le nombre de journées ou de demi-journées travaillées, ainsi que celui des journées ou demi-journées de repos prises, l'employeur est tenu d'établir un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées, ainsi que le positionnement et la qualification des jours de repos en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail auxquels le salarié n'a pas renoncé dans le cadre de l'avenant à son contrat de travail visé au 2e alinéa ci-dessus. Ce document peut être tenu par le salarié sous la responsabilité de l'employeur.

Le supérieur hiérarchique du salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours assure le suivi régulier de l'organisation du travail de l'intéressé et de sa charge de travail.

En outre, le salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours bénéficie, chaque année, d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées l'organisation et la charge de travail de l'intéressé et l'amplitude de ses journées d'activité. Cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés. A cet effet, l'employeur affichera dans l'entreprise le début et la fin de la période quotidienne du temps de repos minimal obligatoire visé à l'alinéa 7 ci-dessus. Un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir d'autres modalités pour assurer le respect de cette obligation.

Il est constant qu'il incombe à l'employeur de rapporter la preuve qu'il a respecté les stipulations de l'accord collectif destinées à assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés soumis au régime du forfait en jours. A défaut, il en résulte un manquement de l'employeur à ses obligations légales et conventionnelles pour s'assurer, de façon effective et concrète, du temps de travail effectué par le salarié, de sorte que la convention de forfait en jours du salarié est privée d'effet. Celui-ci est dès lors fondé à solliciter le paiement d'heures supplémentaires effectuées et non rémunérées.

En l'espèce, la société EAO France ne produit aucun document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées ni aucun compte-rendu d'entretien annuel portant sur la charge de travail et l'amplitude des journées d'activité de M. [SZ]. Elle se borne à répondre à ce dernier qui soutient qu'il n'a bénéficié d'aucun entretien individuel au cours desquels son temps et sa charge de travail auraient été évoqués': «'il n'en est rien et il est pour le moins surprenant que M. [SZ] n'ait jamais imaginé se plaindre de sa situation personnelle ni de la charge de travail qui était la sienne'».

La société EAO France succombe donc dans la preuve qui lui incombe de démontrer qu'elle a respecté les stipulations de l'accord collectif destinées à assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés soumis au régime du forfait en jours.

Faute pour l'employeur d'avoir exécuté valablement les mesures conventionnelles et légales en vigueur, la convention de forfait du salarié est donc privée d'effet'et permet l'application des règles relatives aux heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale du travail, soit au-delà de 35 heures hebdomadaires.

Sur les heures supplémentaires

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Par ailleurs, la qualité de cadre et l'existence d'une liberté d'organisation dans le travail ne suffisent pas à exclure le droit au paiement d'heures supplémentaires. Le salarié peut en effet prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord au moins implicite de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

En l'espèce, M. [SZ] expose qu'il a effectué de nombreuses heures supplémentaires' non rémunérées.

Pour étayer ses dires, il produit des tableaux détaillés reprenant les heures qu'il affirme avoir accomplies jour par jour depuis le 1er janvier 2017, avec cette précision que, dans les limites de la prescription, il sollicite un rappel de salaire correspondant aux heures effectuées à compter du 1er octobre 2017. Ces tableaux indiquent des journées de travail habituellement de 8 heures à 12 heures puis de 13 heures à 18 heures, du lundi au vendredi. M. [SZ] précise, pour certains jours, avoir débuté son travail avant 8 heures ou l'avoir terminé après 18 heures et entend le démontrer par la production d'e-mails.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre.

Celui-ci fait valoir que':

le salarié travaillait depuis son domicile de sorte que son temps de travail ne pouvait pas être vérifié,

le tableau produit, établi à partir de mails, n'est pas probant,

l'envoi et la réception de mails tôt le matin ou tard le soir ne sont pas de nature à justifier l'amplitude du travail quotidien,

M. [SZ] étant parfaitement autonome dans l'organisation de son travail et pouvait vaquer à ses occupations personnelles dans la journée sans que cela ne génère des heures supplémentaires,

la régularité des horaires mentionnés au tableau est incompatible avec des fonctions de commercial,

M. [SZ] ne verse aucun autre document, comme un agenda rempli au fil de l'eau, pas plus qu'il ne justifie de ses déplacements professionnels.

Il appert de relever que les emails versés aux débats sont, pour la plupart, des réponses à des courriels reçus quelques heures voire quelques jours auparavant, et d'une manière générale au cours des horaires de travail que le salarié indique comme étant habituels. Aucun élément ne permet de justifier ces réponses avant 8 heures ou après 18 heures. De plus, il n'est pas permis de vérifier que, entre ces plages horaires déterminées par les envois et réceptions de mails, M. [SZ] était constamment à la disposition de son employeur. Les amplitudes retenues par rapport aux horaires d'envoi ou de réception de ces mails ne sauraient donc être retenues.

Toutefois, la mise en œuvre d'une convention de forfait en jours destinée à faciliter l'organisation de son travail par le salarié, avec l'octroi de jours de RTT, permet de considérer que les parties, et notamment l'employeur, avaient conscience que la durée habituelle du travail de M. [SZ] serait supérieure à 35 heures par semaine.

Si l'employeur ne produit aucun élément de nature à comptabiliser le temps de travail réellement effectué par son salarié, il appert de relever que la nature du poste de M. [SZ] et les contraintes induites en terme de déplacements, rencontres avec les clients, mais également le mode d'exercice de son emploi, en télétravail la majorité du temps, rendent peu probables les horaires quotidiens fixes auxquels il fait référence.

A l'examen de tous ces éléments, la cour a acquis la conviction que M. [SZ] a accompli des heures supplémentaires au-delà des 35 heures hebdomadaires, mais dans une moindre mesure que le total auquel il est parvenu, la cour retenant la réalisation de 5 heures supplémentaires par semaine, sur une base de 44 semaines travaillées par an.

Sa demande sera donc accueillie à hauteur de la somme forfaitaire de 32 000 euros bruts pour la période du 1er octobre 2017 au mois de septembre 2020, outre 3200 euros bruts au titre des congés payés y afférents.

La décision querellée sera en conséquence infirmée de ce chef.

Sur la contrepartie obligatoire en repos

Selon l'article L.3121-30 du code du travail, les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire en repos.

En vertu de l'article D.3121-23 du même code, lorsque le contrat de travail prend fin avant que le salarié ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos déjà acquise ou avant qu'il n'ait acquis des droits minimaux permettant la prise du repos, le salarié reçoit une indemnité correspondante en espèce.

Dans le cas de M. [SZ], la convention collective de la métallurgie fixe le contingent annuel des heures supplémentaires à 220 heures.

Or, le quantum des heures supplémentaires retenu ci-dessus atteint tout juste ce contingent de sorte que M. [SZ] n'est pas fondé en sa demande de contrepartie en repos.

Il sera débouté de cette demande.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur les jours de RTT

Il est constant que la privation d'effet d'une convention de forfait annuel en jours permet à l'employeur de demander le remboursement des jours de réduction du temps de travail dont a pu bénéficier le salarié sur une période déterminée.

Il résulte en l'espèce des éléments du dossier que, en application de la convention de forfait en jours, M. [SZ] a bénéficié de jours de RTT qui se révèlent indus en raison de l'inopposabilité de ladite convention à son égard.

Il doit donc en restituer la valeur à la société EAO France, soit la somme de 7927,32 euros.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

- sur le harcèlement moral

En application de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Il incombe alors à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, M. [SZ] soutient avoir fait l'objet d'un harcèlement moral caractérisé par les agissements suivants ayant eu pour effet de dégrader son état de santé':

la multiplication des reproches injustifiés de la part de M. [M] à la suite de son refus de s'engager sur des objectifs qu'il estimait irréalistes et irréalisables, alors qu'il avait toujours été félicité pour son travail par les plus hautes instances du groupe EAO, qu'il a toujours dépassé ses objectifs et qu'il n'a jamais fait l'objet de sanction depuis sa prise de fonction';

M. [M] lui a imposé de travailler sur des jours de repos qu'il avait validés le 9 janvier 2020 et lui a reproché avoir découvert, le 12 février 2020, qu'il avait pris une semaine de vacances';

après un mois de collaboration, M. [M] lui a prêté l'intention de démissionner et a expressément écrit qu'il se réjouissait de son départ prochain du groupe';

[Y] [M] a continué de lui adresser des mails pendant sa période de congés';

[Y] [M] a tenté de lui imposer, du jour au lendemain, un déplacement à Olten en Suisse alors qu'il n'existait aucune situation d'urgence impérieuse et lui a reproché de ne pas avoir satisfait à sa demande';

[Y] [M] lui a imposé une modification de son contrat de travail en lui ordonnant d'effectuer, en plus de ses propres missions, certaines tâches qui étaient dévolues à l'ingénieur technique et qualité [V] [I], qui avait démissionné le 28 janvier 2020';

[Y] [M] lui a hurlé dessus, le 27 février 2020, alors qu'il était au volant de son véhicule, et l'a menacé de rompre son contrat de travail';

[Y] [M] n'a pris strictement aucune mesure pour préserver son état de santé en s'abstenant notamment d'organiser une visite médicale de reprise';

M. [M] a mis ses menaces à exécution dès le mois de mars 2020 en effectuant tous les actes préparatoires à son remplacement';

M. [M] a tenté de lui imposer une rupture conventionnelle de son contrat de travail';

M. [M] a engagé une procédure disciplinaire pendant son arrêt maladie et l'a licencié pour des motifs fallacieux portant atteinte à son intégrité professionnelle alors que la décision de rompre le contrat de travail était prise dès le mois de mars 2020.

Au soutien de ses affirmations, il produit les éléments suivants':

des tableaux révélant qu'il a dépassé ses objectifs chaque année entre 2016 et 2019, jusqu'à 120,24% de réussite cette dernière année.

Des mails écrits en langue anglaise qu'il indique être des messages de félicitations. Ces courriels, écrits entre le 20 avril 2018 et le 13 décembre 2019, émanent d'[U] [LW], directeur commercial du groupe EAC, de [P] [K], directeur général de la filiale suisse et de Kurt Loosli, président du groupe EAO, emploient tous le terme «'congratulations'». Bien que non traduits en langue française, il est permis de voir que ces messages constituent des félicitations adressées à M. [SZ].

Un courrier du 28 novembre 2019 signé de [P] [K] et de [Y] [M], son successeur au poste de directeur général, non traduit, mais qui se comprend comme étant un courrier de félicitations adressé à [BK] [SZ] faisant référence aux meilleurs résultats de l'histoire de la société et lui offrant un «'petit cadeau pour Noël'» en remerciement de son engagement.

Ces éléments attestent du retour très positif qu'a eu M. [SZ] de la part de ses supérieurs hiérarchiques au cours des années 2018 et 2019 face à ses bons résultats.

Un mail de [Y] [M] en date du 6 février 2020 lui adressant les objectifs attendus pour 2020. Le directeur général lui écrit': «'je pense que ces objectifs sont ambitieux, toutefois ils prennent en considération la réalité du budget accordé par la direction du groupe EAO'». Il est demandé au salarié de faire retour du fichier joint, signé et daté pour accord.

Des échanges de mails des 7 et 9 janvier avec [Y] [M] au sujet des congés pour janvier et février 2020, sans précision quant aux jours concernés, ce qui ne permet pas de vérifier les affirmations de M. [SZ] à ce sujet.

Un mail de M. [M] en date du 12 février 2020 en réponse au message d'absence envoyé automatiquement depuis la boîte mail de M. [SZ], qui annonce son retour le 24 février 2020 et renvoie sur deux de ses collègues selon les demandes des clients. [Y] [M] se déclare surpris de recevoir ce message d'absence alors que M. [SZ] travaille le lendemain. Il lui demande de faire un point sur les projets en cours et de le lui transmettre ainsi qu'aux deux autres collègues pour que des réponses soient apportées aux demandes urgentes de ses clients pendant son absence.

Un échange de mails en date du 14 février 2020 entre M. [SZ] et M. [M] au sujet de la proposition d'objectifs pour l'année 2020.

Dans son mail, [Y] [M] propose une nouvelle convention d'objectifs en faisant référence à un entretien qui s'est déroulé la veille entre M. [SZ] et M. [OK], directeur des ressources humaines, et en indiquant qu'à cette occasion M. [SZ] aurait annoncé son intention de quitter la société EAO France, en concluant': «'dans ce contexte (le regard critique de M. [SZ] sur les objectifs globaux et l'interrogation quant à son adhésion aux valeurs et à la culture de la société EAO), nous nous félicitons de ta décision de vouloir quitter la société, même si avec ton départ annoncé nous perdons un collaborateur commercial performant qui a marqué positivement EAO France ces dernières années'».

[BK] [SZ] a reçu ce courriel pendant sa période d'absence pour congés mais y a quand même répondu en en réfutant les propos': «'il n'a jamais été question à ce jour que je vous fasse parvenir ma démission'». Il y ajoute qu'il reste sceptique sur la réalisation des objectifs qui lui sont confiés et qu'il juge très ambitieux voire irréalisables.

[BK] [SZ] adresse à nouveau un mail à ce sujet le 24 février 2020 confirmant son scepticisme face aux objectifs proposés en concluant que ceux-ci ne sont pas signables en l'état.

[Y] [M] lui répond le lendemain en lui demandant de lui faire parvenir par retour une proposition d'objectifs sur laquelle [BK] [SZ] est en mesure de s'engager pour l'année 2020, puis, le 27 février 2020 à 8h06, il lui demande de lui envoyer sa réponse au plus tard pour le 28 février, précisant qu'il n'est pas envisageable que le sujet de la définition des objectifs annuels se prolonge davantage.

Un échange de mails du 14 février 2020 où M. [SZ] envoie à M. [M], en réponse à sa demande, les sujets à traiter en son absence. M. [M] lui répond qu'il n'a pas à recevoir tous les e-mails auxquels M. [SZ] n'a pas répondu et lui indique qu'il est dans son intérêt de répondre aux demandes des clients auparavant suivies par [V] [I] afin de maintenir des relations constructives avec eux.

Cet échange ne permet pas de connaître le contenu des sujets à traiter adressés par M. [SZ] à M. [M] ainsi que ce dernier le lui avait demandé le 12 février 2020 dans un mail rappelé ci-dessus.

Un mail du 18 février 2020 de M. [M] qui attire l'attention de M. [SZ] sur une invitation Outlook qu'il lui a fait parvenir la veille, toujours pendant sa période d'absence, pour une réunion en présentiel à Olten en Suisse le 26 février 2020 à 8h30, soit le surlendemain de son retour de congé.

[BK] [SZ] y répond à son retour, le lundi 24 février 2020 à 17h23 en indiquant son impossibilité de se rendre à Olten et proposant d'être joint par téléphone. Il précise qu'il lui faut être prévenu à l'avance pour qu'il puisse s'organiser et que du lundi au mercredi, cela lui est impossible.

[Y] [M] lui répond 20 minutes plus tard qu'il maintient la réunion du surlendemain, par téléphone. Il lui rappelle que son poste impose qu'il soit en mesure de se déplacer pour visiter les clients en France et/ou participer à des réunions au siège à Olten, de manière flexible en fonction des besoins. Il lui demande de prendre ses dispositions pour que ce soit effectif et lui demande de partager son calendrier Outlook avec les détails illimités afin d'avoir une vision claire de son emploi du temps et des visites clients planifiées.

Un mail du 21 février 2020 de M. [M] qui demande à M. [SZ] d'adresser désormais toutes ses offres par Salesforce et non plus par mail, afin qu'elles puissent être retrouvées facilement pendant ses congés ou déplacements. Ce courriel a été envoyé le vendredi à 17h02. Il est conclu par la phrase': «'merci de prendre connaissance et d'appliquer sans délai'».

Le courriel envoyé le mercredi 26 février 2020 à 18h58 par M. [M] dans lequel il reprécise à M. [SZ] «'quelques éléments fondamentaux'» et lui demande «'d'adapter [son] activité'» à ceux-ci. Il s'agit d'un rappel des missions qu'impose le poste de responsable grands comptes. M. [SZ] estime que l'un des points évoqués, à savoir le «'suivi des points qualité et transmission des retours et réclamations pour traitement par les services concernés chez EAO (transmission par l'intermédiaire du CRM)'» était dévolu à l'ingénieur technique et qualité qu'était [V] [I].

Un mail de M. [M] en date du 31 mars 2020 demandant à M. [SZ] de le mettre systématiquement en copie de ses échanges avec ses clients afin de connaître les sujets en cours en cas de congé ou absence à venir, à la suite des difficultés rencontrées pour retrouver les informations concernant les projets ferroviaires durant son arrêt maladie.

Le courrier joint à son mail du 26 mai 2020 adressé aux dirigeants du groupe EAO par lequel il dénonce le harcèlement moral qu'il dit subir de la part de M. [M].

Des copies d'écran de l'agenda partagé de M. [M] et de M. [G] [N] révélant qu'ils ont reçu deux responsables commerciaux spécialisés dans le ferroviaire les 18 et 20 mars 2020, dont l'un, M. [IH], a été engagé par la suite et a débuté une formation le 6 juillet 2020. M. [SZ] affirme que ce recrutement avait pour but de le remplacer.

L'attestation de [O] [X], compagne de [BK] [SZ], qui indique avoir reçu un appel de ce dernier, le 27 février 2020, environ une heure après son départ le matin. Elle indique que celui-ci «'avait du mal à se calmer entre pleurs et chamboulement. Il [lui] a expliqué qu'il a eu un échange téléphonique quelques minutes auparavant avec M. [M] qui l'a mis dans cet état'». Elle poursuit être allée chercher son compagnon et l'avoir conduit chez le médecin traitant qui l'a placé en arrêt maladie.

Elle témoigne également de la journée du 30 mars 2020, jour de reprise de son poste par [BK] [SZ] après son arrêt maladie en précisant que ce dernier a reçu un appel de M. [M] qu'il a mis en haut parleur': «'lors de cet appel, M. [M] a clairement et sans détour reproché à [BK] d'avoir été arrêté pour un arrêt maladie de ''complaisance'' ('). M. [M] était agressif dans ses propos et dur envers [BK] le considérant comme responsable de la situation. Il a à plusieurs reprises rabaissé le travail de [BK] et remis en question sa façon de travailler de manière peu constructive'».

Cette attestation est à prendre en considération avec mesure compte tenu du lien unissant le témoin à M. [SZ].

Un arrêt de travail du 27 février 2020 au 13 mars 2020, prolongé jusqu'au 27 mars 2020 inclus. Est également produite une ordonnance du 28 février 2020 prescrivant un antidépresseur et un anxiolytique.

Un courrier de [W] [E], président de la SAS EAO France, en date du 17 avril 2020 par laquelle il est proposé à M. [SZ] un entretien le 27 avril suivant pour mettre fin à son contrat de travail dans le cadre d'une rupture conventionnelle.

L'enregistrement audio d'un extrait d'une conversation que M. [SZ] dit avoir eue avec M. [M] en visioconférence le 27 avril 2020. La retranscription par voie d'huissier concerne 3 phrases dites par deux interlocuteurs différents, l'un évoquant à l'autre l'existence de différentes possibilités pour mettre fin au contrat d'un collaborateur.

Des arrêts de travail à compter du 29 avril 2020 jusqu'au 10 juillet 2020, consécutif à l'entretien entre M. [M] et M. [SZ], pendant lesquels a été initiée la procédure qui a donné lieu au licenciement pour faute simple de M. [SZ] par courrier du 30 juin 2020.

Il ressort de tous ces éléments qu'à compter du début de l'année 2020, alors que ses résultats étaient très bons et avaient donné lieu à des louanges de la part de ses supérieurs, M. [SZ] a eu des relations tendues avec M. [M] alors arrivé à la direction générale de la société EAO, dans un contexte de fixation des objectifs annuels.

[BK] [SZ] a, au cours de cette période, eu des arrêts maladie et un traitement d'antidépresseur et anxiolytique.

Les éléments produits, pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral.

Or, à la lecture des pièces de la société EAO France, qui sont peu ou prou identiques à celles versées par M. [SZ], il appert de relever que':

Le mail de M. [M] en date du 12 février 2020 ne saurait être compris comme étant un reproche à M. [SZ] d'avoir pris une semaine de congés. Il est l'expression de la surprise d'un directeur général face à une absence annoncée d'une dizaine de jours de la part d'un collaborateur qu'il sait être en réunion le lendemain ainsi que de la demande de transmission des informations relatives à ses dossiers afin que les urgences de ceux-ci puissent être suivies durant son absence.

L'échange de mails initié le 14 février 2020 a pour but de parvenir à la fixation des objectifs de M. [SZ] pour l'année 2020, de manière négociée comme l'exige son contrat de travail.

Aucun élément ne permet de relever une quelconque pression à ce sujet.

L'indication, dans un autre mail du 14 février 2020, selon laquelle, tant que [V] [I] n'est pas remplacé, les sujets concernant les clients grands comptes sont à traiter par [BK] [SZ], ne constitue pas une modification de son contrat de travail comme le soutient ce dernier.

Si la proposition de réunion pour la date du 26 février 2020 intervenue pendant la période d'absence de M. [SZ] était alors malvenue puisque adressée au cours des congés du salarié, il appert d'observer que M. [M] a accédé à la demande de M. [SZ] que cette réunion, fût-elle non urgente, s'effectue par téléphone.

Aucun élément ne permet d'établir que M. [SZ] a pris connaissance du mail envoyé par M. [M] le 21 février 2020 après 17h avant son retour à son poste le lundi 24 février 2020 matin. Sa réponse le 24 février à plus de 17h à un mail envoyé le 18 février 2020 laisse au contraire penser que le salarié a pris connaissance, à son retour, des courriels qui lui ont été adressés pendant ses congés.

Si [BK] [SZ] vit la demande de M. [M] d'être mis systématiquement en copie de ses échanges avec ses clients afin de connaître les sujets en cours en cas de congé ou absence à venir, comme une discrimination, il doit être au contraire considéré que cette requête a seulement pour but, à défaut d'autres éléments, de faciliter le suivi des dossiers de M. [SZ] durant ses absences. La société EAO produit par ailleurs un mail également du 31 mars 2020 envoyé à M. [SZ] et M. [N], ainsi qu'à [J] [H] et [L] [U] en copie. M. [M] leur demande d'appliquer dès à présent la procédure suivante': envoi systématique en copie cachée CCI de leurs échanges clients à son attention dans l'objectif de permettre, en cas d'absence de l'un ou l'autre, de savoir quels sont les antécédents d'échanges avec les clients.

A la suite de l'examen comparé de toutes les pièces versées aux débats que la cour a été mise en mesure d'exploiter, ce qui n'est pas le cas d'une pièce en clé USB non attestée par un constat d'huissier ainsi que des courriels et autres pièces en langue anglaise non traduits et non aisément compréhensibles, il appert de considérer que, s'il y a bien eu un désaccord entre M. [SZ] et M. [M] au sujet de la fixation des objectifs du premier pour l'année 2020 et que celui-ci a été en arrêt maladie pendant plusieurs semaines pour un syndrome anxio dépressif avec mise en place d'un traitement par antidépresseur et anxiolytiques, la cour n'est pas en mesure d'établir l'existence d'agissements répétés de la part de M. [M] non justifiés objectivement, de sorte que le harcèlement moral dont se plaint M. [SZ] n'est pas constitué, le fait de ne pas avoir procédé à une visite médicale de reprise après l'arrêt maladie du 27 février au 27 mars 2020 et d'avoir tenté une rupture conventionnelle du contrat de travail avant d'engager une mesure de licenciement étant insuffisants pour caractériser un tel harcèlement moral.

[BK] [SZ] sera en conséquence débouté de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral et pour manquement à l'obligation de sécurité et de prévention des agissements de harcèlement moral.

Le jugement querellé sera confirmé de ces chefs.

Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail

Le harcèlement moral dont se prévaut M. [SZ] n'étant pas constitué, la demande de nullité de son licenciement sur ce fondement ainsi que la demande indemnitaire subséquente doivent être rejetées, de sorte que le jugement déféré sera confirmé sur ces points.

[BK] [SZ] demande, à titre subsidiaire, qu'il soit jugé que son licenciement a été notifié en violation de la garantie d'emploi instituée à l'article 16 de la convention collective nationale de la métallurgie, que les griefs de la lettre de licenciement soient jugés prescrits, non fautifs et fallacieux et en tout état de cause sans cause réelle et sérieuse.

Sur la garantie d'emploi

Selon l'article'16 1° de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13'mars 1972, Les absences relevant de maladie ou d'accident, y compris les accidents du travail, et justifiées dès que possible par certificat médical pouvant donner lieu à contre-visite, à la demande de l'entreprise, ne constituent pas une rupture du contrat de travail.

A l'issue de la durée d'indemnisation à plein tarif, l'employeur pourra prendre acte de la rupture par force majeure du contrat de travail par nécessité de remplacement effectif. Dans ce cas, la notification du constat de la rupture sera faite à l'intéressé par lettre recommandée.

Lorsque l'employeur aura pris acte de la rupture du contrat de travail, il devra verser à l'intéressé une indemnité égale à celle que celui-ci aurait perçue s'il avait été licencié sans que le délai-congé ait été observé.

Cette indemnité remplace, pour la période à laquelle elle correspond, celle à plein tarif ou à demi-tarif découlant du barème prévu au 2° ci-dessous.

Si, à la date à laquelle le préavis aurait pris fin en cas de licenciement avec observation du délai-congé, l'indisponibilité pour maladie ou accident persiste toujours, le solde de l'indemnisation de maladie restant dû continuera d'être versé jusqu'à épuisement des droits ouverts au début de l'indisponibilité en cours au jour de la rupture.

L'ingénieur ou cadre bénéficiera, en outre, le jour de la constatation de la rupture par l'employeur, d'une indemnité égale à l'indemnité de congédiement à laquelle lui aurait donné droit son ancienneté s'il avait été licencié, ou d'une allocation égale à l'allocation de fin de carrière à laquelle lui aurait donné droit son ancienneté s'il avait été mis à la retraite.

Au cours de l'absence de l'ingénieur ou cadre pour maladie ou accident, l'employeur peut rompre le contrat de travail en cas de licenciement collectif ou de suppression de poste, à charge pour lui de verser à l'ingénieur ou cadre licencié l'indemnité de préavis en tenant compte des dispositions des alinéas 4 et 5 du présent article, et de régler l'indemnité de congédiement, le cas échéant.

De même, l'employeur peut mettre à la retraite un ingénieur ou cadre absent pour maladie ou accident, en respectant les prescriptions de l'article 31.

Lorsque le contrat se trouve rompu dans les conditions précitées, l'intéressé bénéficie d'un droit de priorité au réengagement qui sera satisfait dans la mesure du possible.

Il est constant qu'une convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c'est-à-dire d'abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d'un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l'objectif social du texte.

Ainsi, les dispositions conventionnelles susvisées n'interdisent pas le licenciement du salarié pendant la suspension de son contrat de travail pour maladie pour d'autres causes que la maladie, la garantie d'emploi pour une durée déterminée n'étant prévue que pour le licenciement à la suite d'une absence pour maladie et nécessité de remplacement, et prévoient les conditions de l'attribution de l'indemnité de préavis en l'étendant pour certains licenciements spécifiques. (Cass Soc 8 février 2023, n°21-16.805)

[BK] [SZ], qui a été licencié pour faute simple, ne peut donc se prévaloir d'une quelconque garantie d'emploi.

Sa demande sur ce fondement sera donc rejetée.

Sur le bien fondé du licenciement

En application de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse. La cause réelle est celle qui présente un caractère d'objectivité et d'exactitude. La cause sérieuse suppose une gravité suffisante.

Aux termes de l'article L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement, le cas échéant complétée dans les conditions fixées par l'article R.1232-13 du même code, comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

Suivant l'article L.1232-5 du code du travail, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Suivant l'article L.1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

Dès lors que les faits sanctionnés ont été commis plus de deux mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement des poursuites. La prise en compte d'un fait antérieur à deux mois peut cependant intervenir s'il s'est poursuivi ou réitéré dans ce délai.

Le délai de deux mois s'apprécie du jour où l'employeur a eu connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits fautifs reprochés au salarié, étant précisé que c'est à l'employeur qu'incombe la charge de la preuve qu'il n'a eu cette connaissance des faits fautifs que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de la procédure disciplinaire.

En l'espèce, il résulte de la lettre de notification du licenciement pour faute simple de M. [SZ] en date du 30 juin 2020, dont les termes fixent les limites du litige, que les motifs de la rupture du contrat de travail sont les suivants':

« 1) Vous ne répondez pas aux sollicitations des clients dans un délai raisonnable ou vos réponses ne sont pas adaptées dans la forme comme sur le fond. Ces exemples se sont multipliés de façon continue depuis le mois de janvier 2020, notamment mais non exclusivement : Avec la société FAIVELY du Groupe WABTEC au point que Monsieur [D] [A] a demandé l'intervention directe de Monsieur [M] en indiquant que « je crois que Monsieur [SZ] a vraiment décidé de « planter » ce projet » ; les difficultés se sont poursuivies en avril avec la question des pénalités réclamées par Madame [S], à laquelle vous avez fait une réponse inappropriée et non documentée, sans traiter réellement le sujet ;

Avec les interlocuteurs ALSTOM STRASBOURG qui ont encore relancé fin avril sur une quotation demandée depuis février 2020 ;

Avec les interlocuteurs ALSTOM BELFORT qui ont relancé le 18 mai sur une demande restée sans réponse de votre part depuis le 27 mars 2020.

Votre manque de réactivité entraîne une insatisfaction grandissante des clients et nuit à l'image de la société.

2) vous n'utilisez pas les outils de travail (CRM SALESFORCE) comme vous devez le faire, ce qui ne permet pas le partage des informations avec en particulier vos collègues de l'administration des ventes.

Malgré un rappel sur ce point en février dernier après constatation du fait que trois offres seulement étaient documentées sur SALESFORCE, vous n'avez pas corrigé ce point, ce qui d'une part, empêche le suivi de votre activité, d'autre part, complique le travail de l'équipe, en particulier de l'administration des ventes qui doit constamment vérifier les informations fournies pour effectuer ses propres tâches ce qui devient encore plus compliqué lorsque vous êtes absent ou en déplacement.

Or, vous avez été absent plusieurs semaines ces derniers mois et de ce fait le suivi de vos clients a nécessité un travail beaucoup plus important en termes de temps et d'énergie pour vos collègues qui aurait été évité si vous aviez respecté les règles.

De même, malgré des instructions claires et précises données en janvier 2019 par Monsieur [P] [K] à toute l'équipe, vous n'utilisez pas l'outil SIAXMA pour vos congés et vos RTT : cette situation a entraîné des erreurs dans les décomptes des congés sur vos bulletins de paie (en juillet 2019 et à nouveau en octobre 2019), erreurs que vous vous êtes gardé de signaler et qui ont donc été découvertes récemment, à l'occasion des vérifications des congés au 31 mai 2020.

3) votre communication avec vos interlocuteurs internes n'est pas adéquate sur la forme et sur le fond ; vos propos ne sont pas acceptables dans un cadre professionnel ; ils montrent que vous refusez de tenir compte de la stratégie définie par la maison mère visant à travailler avec nos clients internationaux dans un cadre global (monde) et non pas purement français ; quelques exemples :

- vous aviez déjà été rappelé à l'ordre sur ce sujet en septembre 2017 par [U] [LW] puis en janvier 2018 par [R] [C], Responsable des pays exports hors UE ;

- [T] [B] Directeur général EAO BENELUX a rencontré les mêmes difficultés avec vous en 2019 ;

- vous avez été à nouveau rappelé à l'ordre par [R] [C] le 4 avril 2020 à la suite d'un mail où vous vous permettiez de lui écrire qu'il ne respectait pas les règles internes EAO, que vous alliez en avertir la Direction générale ALSTOM et que son attitude était inacceptable ;

- vous vous permettez d'intervenir dans les tâches de votre collègue [Z] [F], le 12 mai, alors que vous êtes en arrêt maladie, ce qui n'est de toute façon pas votre rôle quelque soit le sujet.

4) Vous ne tenez aucun compte des instructions données par votre supérieur hiérarchique :

- vous n'avez pas appliqué la demande de Monsieur [M] du 21 février 2020 de documenter SALESFORCE avec l'ensemble des offres que vous transmettez ; entre fin mars et fin avril vous avez continué à transmettre des offres par mail et non pas, comme demandé, par SALESFORCE ;

- vous n'avez pas, contrairement à vos collègues, appliqué la demande du 31 mars 2020 faite à toute l'équipe d'adresser en copie à Monsieur [M] tous vos mails clients ;

- Vous n'avez pas non plus tenu compte de ses demandes en avril d'utiliser exclusivement la liste de prix 2020 définie en décembre 2019 par Monsieur [K].

Le non-respect persistant des instructions données par votre hiérarchie ne permet pas un travail efficace vis-à-vis des clients comme vis-à-vis de vos collègues et perturbe le bon fonctionnement de l'équipe EAO FRANCE.

5) Vous avez refusé de signer vos objectifs pour 2020 malgré le fait qu'ils ont été modifiés le 10 avril 2020 pour tenir compte de vos observations formulées le 3 avril 2020 ; vous vous êtes contenté d'indiquer, le 14 avril que ces objectifs n'étaient plus acceptables parce que vous ne suiviez plus en direct le projet ALSTOM INDE.

Après vérification il est apparu que votre contestation n'est pas fondée et ne peut justifier votre refus de signer les objectifs 2020, ce dont vous avez été averti par mail du 19 mai dernier. »

[BK] [SZ] fait valoir au préalable que la décision de rompre son contrat n'a aucun lien de causalité avec les faits qui lui sont reprochés dans la lettre du 30 juin 2020 et qu'elle a été prise avant même l'engagement de la procédure de licenciement.

Il a été vu ci-avant, dans le cadre de la demande relative au harcèlement moral, que M. [Y] [M] et M. [G] [N] ont reçu deux responsables commerciaux spécialisés dans le ferroviaire les 18 et 20 mars 2020, dont l'un, M. [IH], a été engagé par la suite et a débuté une formation le 6 juillet 2020.

La société EAO ne conteste pas avoir procédé à ce recrutement. Elle affirme que cette embauche n'était pas destinée à remplacer M. [SZ] mais à renforcer la force commerciale dans une logique d'augmentation générale des objectifs de l'entreprise.

Aucun élément ne permet d'établir que cette embauche visait à remplacer M. [SZ], alors même qu'il est justifié qu'une annonce pour le recrutement d'un responsable grands comptes ferroviaires a été publiée le 1er juillet 2020.

Sur le bien-fondé du licenciement en lui-même, il appert d'examiner successivement les motifs invoqués.

- sur la relation avec les clients

Il est reproché à M. [SZ] un manque de réactivité entraînant une insatisfaction grandissante chez les clients.

La société EAO France verse à ce sujet des mails émanant de la société Faiveley en janvier 2020, au sujet desquels M. [M] écrit à l'appelant dès le 20 janvier 2020. Ce client a contacté directement M. [M] le 25 février 2020 lui demandant de le contacter en précisant': «'je crois que M. [SZ] a vraiment décidé de ''planter'' ce dossier'».

Force est de constater que ce fait était connu de la société plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement par la convocation à l'entretien préalable suivant courrier du 19 mai 2020.

Aucun élément ne permet d'établir qu'il s'est poursuivi par la suite, de sorte qu'il doit être considéré comme prescrit.

Concernant ce même client, il est fait grief à M. [SZ] d'avoir «'fait preuve d'une certaine brutalité totalement incompatible avec ses fonctions s'agissant d'une demande de pénalité'».

Est produit le mail du client en date du 14 février 2020, la réponse de M. [SZ] le 7 avril 2020 et celle de M. [M] le lendemain, qui ne fait nullement ressortir que le courriel de M. [SZ] était inadapté. Il est seulement demandé au salarié d'apporter plus d'explications au client concernant la demande d'annulation des pénalités.

Concernant le client Alstom, aucune pièce en langue française n'est produite et ne permet de vérifier la réalité de ce fait.

Ce premier grief n'est donc pas constitué.

- sur l'absence d'utilisation des outils de l'entreprise

Il est reproché à M. [SZ] de ne pas avoir envoyé toutes les offres commerciales par le système Salesforce, malgré un rappel en février 2020.

[BK] [SZ] admet que toutes les offres inférieures à 10 000 euros étaient envoyées par e-mail directement aux clients avec, en copie, les assistantes des ventes de la société EAO.

Par mail du 20 février 2020, soit bien antérieur à l'engagement de la procédure de licenciement, M. [M] a écrit à M. [SZ] pour lui demander «'à compter de maintenant de n'envoyer aucune offre par e-mail mais uniquement en passant par Salesforce'», dans le but de faciliter la gestion de celles-ci pendant les absences du salarié.

Ce mail confirme qu'avant cette date, il n'était pas imposé à M. [SZ] de faire passer toutes ses offres commerciales par le système Salesforce.

Aucun élément ne permet de vérifier qu'après cette date les offres adressées par M. [SZ] n'étaient pas diffusées par ce système Salesforce.

Ce fait n'est donc pas caractérisé.

Il est également fait grief à M. [SZ] de ne pas avoir utilisé l'outil Siaxma pour ses congés et ses RTT.

[BK] [SZ] ne le conteste pas mais argue du fait que le logiciel était en langue allemande.

Il est par ailleurs établi qu'avant l'arrivée de M. [M] et même lors de sa demande de congés du 7 janvier 2020 adressée à ce dernier, M. [SZ] n'est pas passé par ce logiciel mais a écrit directement à son supérieur hiérarchique qui a validé ses demandes. M. [M] lui-même a accepté sa dernière demande présentée en janvier 2020.

Ce fait n'est donc pas établi comme étant fautif et, de surcroît, il remonte à plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement.

- sur la communication interne

Il est ici reproché à M. [SZ] d'avoir tenu, à des collègues, des propos déplacés voire inconvenants dans des mails.

La société EAO entend démontrer ce grief par la production de trois échanges de mails écrits en langue anglaise non traduits et non aisément compréhensibles par la cour, de sorte qu'il sera considéré que ce grief n'est pas démontré et donc pas établi.

- sur le non respect des instructions données

Il a été vu précédemment que le fait que M. [SZ] n'ait pas documenté toutes les offres dans le logiciel Salesforce ne pouvait être retenu.

Il lui est pas ailleurs reproché de ne pas avoir mis M. [M] en copie de tous les mails clients. Cette demande a été présentée à M. [SZ] le 31 mars 2020, ainsi qu'aux autres salariés de la société.

Mais aucun élément ne permet d'établir que cette demande n'a pas été respectée.

Au contraire, l'échange de mails utilisé par la société EAO France pour étayer le fait que M. [SZ] n'a pas pris en compte une information relative aux tarifs à pratiquer révèle que M. [SZ] a mis M. [M] en copie des échanges avec le client Alstom.

Concernant ce dernier fait relatif aux tarifs pratiqués, les échanges de mails produits montrent que M. [M] a demandé à M. [SZ] de pratiquer les tarifs convenus à une réunion commerciale du 3 décembre 2019, lui a demandé de lui faire un retour et, en l'absence de réponse, a réitéré sa demande les 16 puis 21 avril 2020.

Ce fait apparaît ainsi établi.

Il ne saurait toutefois constituer à lui seul un motif sérieux de licenciement.

- sur le refus de signer les objectifs pour 2020

Il est reproché à M. [SZ] d'avoir refusé de signer les objectifs pour l'année 2020.

Son contrat de travail prévoyait que les objectifs étaient contractualisés et devaient faire l'objet chaque année d'un avenant.

Il ne peut être reproché à M. [SZ] d'avoir refusé de s'engager sur les objectifs qui lui étaient soumis. En tout état de cause, ce refus ne saurait être assimilé à un comportement fautif alors même que les objectifs proposés par M. [M] étaient bien supérieurs à ceux qui avaient été atteints par M. [SZ] en 2019.

De surcroît, le refus de M. [SZ] a été énoncé plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement.

Au regard de tous ces éléments, il appert que le licenciement pour faute simple de M. [SZ] n'est pas justifié par des faits établis et suffisamment graves pour motiver la rupture de la relation contractuelle.

Il convient donc de confirmer le jugement déféré qui a décidé que le licenciement de M. [SZ] était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement

Sur le rappel d'indemnité légale de licenciement

Selon l'article L.1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

L'article R.1234-4 du même code dispose':

Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

1° Soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à douze mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l'ensemble des mois précédant le licenciement ;

2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.

Sur la base des salaires perçus entre le 1er octobre 2019 et le 30 septembre 2020, auxquels s'ajoutent les heures supplémentaires accordées, proratisées sur cette période de 12 mois, le salaire mensuel de référence pour le calcul de l'indemnité de licenciement s'élève à 8849,43 euros brut.

L'indemnité de licenciement, pour les 5 ans et 1 mois d'ancienneté, s'élève à':

8849,43 / 4 x 5 + 8849,43 / 4 x 1/12 = 11 246,15 euros.

La société EAP France a versé à M. [SZ] une indemnité de licenciement de 10 116,53 euros, de sorte qu'il lui reste dû un solde de 1129,62 euros qu'elle sera condamnée à lui payer.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application de l'article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux en fonction de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise.

Pour un salarié ayant 5 années complètes d'ancienneté à l'expiration du préavis, dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés ainsi que cela ressort de l'attestation «'Assedic'», cette indemnité est comprise entre un montant minimal de 1,5 mois de salaire brut et un montant maximal de 6 mois de salaire brut.

Compte tenu de la rémunération mensuelle brute perçue par M. [SZ], de son ancienneté au sein de l'entreprise, de son âge ainsi que de sa situation personnelle et sociale justifiée au dossier, il y a lieu de confirmer la décision du conseil de prud'hommes de Pau qui lui a alloué la somme de 47 500 euros, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire

L'indemnité pour rupture vexatoire a pour objet d'indemniser, non pas la rupture elle-même, mais les conditions de cette rupture lorsque ces conditions se sont avérées fautives et préjudiciables.

Il appartient toutefois au salarié qui en sollicite le paiement de démontrer l'existence d'une faute de la part de son employeur, d'un préjudice en résultant pour lui et du lien de causalité entre les deux.

En l'espèce, M. [SZ] n'apporte aucun élément déterminant à ce sujet. Il fait en effet référence à son remplacement prématuré dont il a été examiné ci-avant qu'il n'était pas établi.

Il invoque également une tentative de rupture conventionnelle pas plus constituée.

Il n'apporte par ailleurs aucune pièce justifiant d'un préjudice distinct de celui qui est déjà réparé par l'octroi des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, destinés à réparer le préjudice issu de la rupture infondée du contrat de travail.

Il convient donc de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a débouté les parties du surplus de leurs prétentions et ainsi [BK] [SZ] de cette demande indemnitaire.

Sur les autres demandes financières

Sur l'indemnité pour travail dissimulé

Selon les dispositions de l'article L.8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article L.8223-1 du code du travail dispose pour sa part qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

La dissimulation d'emploi salarié prévu par l'article L8221-5 du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie, un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.

Il appartient au salarié de démontrer que l'employeur a volontairement dissimulé une partie du temps de travail du salarié en ne lui payant pas ses heures supplémentaires. Cette intention ne peut pas se déduire de la seule absence de preuve, par l'employeur, des horaires effectués par son salarié. Par ailleurs, l'inopposabilité de la convention de forfait en jours est insuffisante pour caractériser en soi cette intention.

En l'espèce, il résulte toutefois des éléments du dossier, à savoir les tableaux produits par M. [SZ], comparés aux bulletins de paie sur lesquels apparaissent les jours de congés et de RTT acquis et pris, que le salarié à travaillé plus de jours que ne le permettait la convention de forfait en jours.

En 2018 et 2019, il a travaillé 220 jours alors que la convention de forfait prévoyait une base de 218 jours incluant la journée annuelle de solidarité, alors même qu'en 2019 il a profité de congés pour événements familiaux pendant 4 jours.

L'employeur, qui avait la charge d'éditer les bulletins de paie qui relèvent les jours de congés et de RTT acquis et pris, ne pouvait dès lors ignorer que son salarié avait effectué des jours de travail non rémunérés.

Il ne s'explique pas sur ce point, se retranchant uniquement derrière le fait que le caractère intentionnel ne peut se déduire de la seule application d'une convention de forfait illicite, licéité que M. [SZ] n'a d'ailleurs pas discutée au sujet de la convention de forfait en jours stipulée dans son contrat de travail.

Au regard de ces éléments, il appert de considérer que la société EAO n'a pas mentionné sur les bulletins de paie tous les jours de travail accomplis, de manière intentionnelle puisqu'elle ne pouvait ignorer les jours durant lesquels son salarié était en congé ou en RTT. Elle devait s'assurer de la prise effective de ces jours ou, à tout le moins de leur rémunération en contrepartie, ce qui n'a délibérément pas été fait, de sorte que le travail dissimulé est caractérisé.

Une indemnité de 6 mois de salaire sera versée à M. [SZ] en application des textes susvisés, soit la somme de 53 096,58 euros.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur le rappel de congés payés

Il résulte de l'article L.3141-24 du code du travail, le congé annuel ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.

Cette indemnité ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.

Cette rémunération, sous réserve du respect des dispositions légales, est calculée en fonction :

1° Du salaire gagné dû pour la période précédant le congé ;

2° De la durée du travail effectif de l'établissement.

Il ressort des dispositions de l'article L.3141-25 du même code que les avantages en nature dont le salarié continue à bénéficier au cours de ses congés (logement, voiture dont il garde l'usage) suivent le même régime juridique que lorsque le salarié n"est pas en congé : ils n'ont donc pas à être pris en compte dans le calcul de l'indemnité.

Dans le cas présent, il ressort des éléments du dossier, et en particulier du bulletin de paie du mois d'octobre 2020 que M. [SZ] disposait, à la fin de la relation de travail, de 51 jours de congés acquis au titre de la période 2019/2020 et de 9 jours pour la période suivante.

Il a été payé de 52 jours de congés, à la lecture du solde de tout compte, pour la somme totale de 15 592,33 euros.

Il aurait dû percevoir, pour les 51 jours acquis et sur la base du salaire brut, dont doit être déduit l'avantage en nature pour le véhicule, la somme de':

pour le jour de congé de la période 2017/2018': 303,26 euros,

pour les 25 jours de congé de la période 2018/2019': 8136,71 euros,

pour les 25 jours de congé de la période 2019/2020': 8889 euros,

soit la somme totale de 17 328,97 euros.

Il lui reste donc dû un reliquat de 1736,64 euros auquel s'ajoute l'indemnité pour les 9 jours acquis au titre de la période 2020/2021, sur la base d'un salaire brut mensuel de 5620 euros, soit 2299,09 euros.

La société EAO France sera donc condamnée à payer à M. [SZ] la somme de 4035,73 euros au titre du solde de l'indemnité de congés payés.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur la part variable de rémunération

[BK] [SZ] sollicite le paiement d'un rappel de part variable de rémunération pour la période correspondant à son préavis, dont il a été dispensé de l'exécution par son employeur.

L'article L.1234-5 du code du travail, dans ses deux premiers alinéas, dispose que, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.

L'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise.

Il est constant que le salarié a ainsi droit au paiement de la prime sur objectifs à laquelle il aurait pu prétendre s'il avait travaillé et qui doit être calculée à partir de la moyenne annuelle de sa rémunération.

En l'espèce, la rémunération variable de M. [SZ] n'était soumise à aucune condition de présence dans l'entreprise.

Il a perçu, en octobre 2020, la somme de 531,22 euros au titre de la rémunération variable de la période juillet 2020 ' septembre 2020, somme très inférieure aux montants perçus pour les périodes précédentes.

Sur la base des montants perçus au titre des primes d'objectifs durant l'année précédant la rupture de la relation contractuelle, M. [SZ] aurait dû percevoir une prime d'objectif en octobre 2020 d'un montant de':

(4125 + 2670,71 + 6849,95 + 3290,03 + 3191,25) x 3/12 = 5031,73 euros

Il lui est donc dû un solde de 4500,51 euros au titre de la prime variable pendant le préavis.

La société EAO France sera condamnée à lui payer cette somme.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur la demande au titre du solde de tout compte

[BK] [SZ] demande à ce titre le paiement de la somme de 907,46 euros que la société EAO aurait reconnu lui devoir au titre de la part variable sur rémunération, mentionnée sur un bulletin de paye rectificatif de novembre 2020, et qu'elle ne lui aurait pas réglée.

Or, cette somme est incluse dans la somme allouée ci-dessus, de sorte que la demande de M. [SZ] à ce titre sera rejetée.

Le jugement querellé, qui n'a pas statué sur cette demande, sera complété sur ce point.

Sur les demandes accessoires

Les sommes allouées porteront intérêts au taux légal comme suit':

pour les créances de nature salariale, à compter du 3 mars 2021, date de retour de l'accusé de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation, à laquelle était jointe la requête du salarié, seule date certaine valant mise en demeure au sens de l'article 1231-6 du code civil,

pour les créances de nature indemnitaire, à compter de la décision en fixant le quantum, conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil.

Il sera par ailleurs ordonné la capitalisation des intérêts dus pour au moins une année, dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil.

Il y a lieu d'enjoindre à la société EAO France de remettre à M. [BK] [SZ] un reçu pour solde de tout compte rectifié, une attestation Pôle emploi rectifiée et les bulletins de salaires rectifiés, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à frais irrépétibles.

La société EAO France qui succombe principalement en cause d'appel, devra en supporter les dépens.

Elle sera en outre condamnée à payer à M. [SZ] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Bayonne en date du 4 mars 2022 hormis ses dispositions relatives aux heures supplémentaires, aux jours RTT, au rappel d'indemnité légale de licenciement, au travail dissimulé, au rappel d'indemnité compensatrice de congés payés et au solde de la part variable de rémunération';

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant':

CONDAMNE la société EAO France à payer à M. [BK] [SZ] les sommes de':

- 32 000 euros au titre des heures supplémentaires pour la période du 1er octobre 2017 au 30 septembre 2020, outre 3 200 au titre des congés payés y afférents,

- 1 129,62 euros au titre du rappel de l'indemnité légale de licenciement,

- 53 096,58 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,

- 4 035,73 euros au titre du solde de l'indemnité de congés payés,

- 4 500,51 euros au titre du solde de la part variable de rémunération pendant le préavis';

DEBOUTE M. [BK] [SZ] de sa demande au titre du solde de tout compte';

CONDAMNE M. [BK] [SZ] à restituer à la société EAO France un indu de

7 927,32 euros au titre des RTT';

DIT que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal comme suit':

- pour les créances de nature salariale, à compter du 3 mars 2021,

- pour les créances de nature indemnitaire, à compter de la décision en fixant le quantum';

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil';

ENJOINT à la société EAO France de remettre à M. [BK] [SZ] un reçu pour solde de tout compte rectifié, une attestation Pôle emploi rectifiée et les bulletins de salaires rectifiés';

DIT n'y avoir lieu à astreinte';

CONDAMNE la société EAO France aux dépens d'appel';

CONDAMNE la société EAO France à payer à M. [BK] [SZ] la somme de

1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Madame CAUTRES, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,