Décisions
CA Paris, Pôle 4 - ch. 4, 16 janvier 2024, n° 21/11336
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 4
ARRÊT DU 16 JANVIER 2024
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/11336 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD4HR
Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2021 -Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de PARIS RG n° 11-20-7301
APPELANT
Monsieur [O] [L] [N] né le 24 Juillet 1990 à [Localité 6] (91)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Maël MONFORT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0109
INTIMÉE
Madame [Z] [V] épouse [G] née le 07 Janvier 1963 à [Localité 8] (75)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Marie-hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 Décembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Nicolette GUILLAUME, Présidente de chambre
Mme Marie MONGIN, Conseiller
M. Claude CRETON, Président magistrat honoraire
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Claude CRETON dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Nicolette GUILLAUME, Présidente de chambre et par Gisèle MBOLLO, Greffière chambre 4-4, présente lors de la mise à disposition.
*****
Par acte du 30 décembre 2016, Mme [V] a donné à bail à M. [L] [N] un appartement situé à [Localité 7], [Adresse 2].
Se plaignant des nuisances causées par la locataire de l'appartement du dessus, Mme [R], également locataire de Mme [V], M. [L] [N] a assigné cette dernière en paiement de la somme de 32 187,50 euros en réparation de son préjudice de jouissance, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [V] a assigné en intervention forcée Mme [R] et sollicité sa condamnation à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ainsi que la résiliation du bail. Elle a en formé une demande reconventionnelle en résiliation du bail la liant à M. [L] [N], en expulsion et en paiement d'une indemnité d'occupation. Elle a en outre sollicité la condamnation de M. [L] [N] et de Mme [R] à lui payer en application de l'article 700 du code de procédure civile respectivement 6 000 euros et 5 000 euros.
Par jugement du 19 mai 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :
- débouté M. [L] [N] de ses demandes ;
- prononcé la résiliation du bail conclu avec M. [L] [N], ordonné son expulsion et l'a condamné à lui payer une indemnité d'occupation égale au montant du loyer qui aurait été dû si le bail avait été poursuivi ;
- débouté Mme [V] de sa demande de résiliation du bail la liant à Mme [R] ;
- condamné M. [L] [N] à payer à Mme [V] la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts et la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour débouter M. [L] [N] de ses demandes, le tribunal, après avoir constaté que celui-ci produisait trois déclarations de main courante de 2016 et 2019 faisant état de tapages nocturnes provenant de l'appartement de Mme [R] et deux plaintes déposées l'une le 16 mai 2019 pour tapage nocturne et l'autre le 19 septembre 2019 contre le fils de Mme [R] pour menaces de mort, a retenu que les mains courantes ne relatent que les déclarations de M. [L] [N] et que les nuisances alléguées ne sont établies par aucun élément, que le voisin de Mme [R] a déclaré n'avoir jamais été dérangé par le bruit venant de son appartement depuis son arrivée en 2019, qu'un autre voisin a déclaré n'avoir entendu du bruit qu'à deux reprises en 2019, enfin que les plaintes pénales n'ont donné lieu à aucune suite. Le tribunal a ajouté que Mme [V] justifie avoir pris des mesures afin de faire cesser les troubles allégués en organisant une tentative de conciliation entre Mme [R] et M. [L] [N], qui, après s'être rendu au premier rendez-vous organisé par le conciliateur a refusé de se rendre aux suivants, puis en faisant délivrer à Mme [R] un commandement de respecter ses obligations locatives et en lui rappelant son obligation de jouissance paisible.
Pour prononcer la résiliation du bail conclu entre Mme [V] et M. [L] [N], le tribunal a retenu que celui-ci a commis des manquements graves et répétés aux obligations du bail. Il s'est fondé sur les pièces du dossier qui établissent que deux personnes se trouvant à son domicile ont poussé violemment un occupant de l'appartement du dessous, M. [A], qui était venu se plaindre du bruit. Il s'est en outre fondé sur un procès-verbal de police établissant que le même jour ces deux personnes, dont M. [L] [N] a refusé de donner l'identité, ont porté des coups de poing et des gifles au fils mineur de Mme [R].
M. [L] [N] a interjeté appel de ce jugement à l'encontre de Mme [V] en ses dispositions le déboutant de ses demandes, prononçant la résiliation du bail, son expulsion et sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation, de dommages-intérêts, d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens. Il demande à la cour de rejeter les demandes de Mme [V], d'ordonner sa réintégration dans le logement et de condamner Mme [V] à lui payer la somme de 40 317,50 euros en réparation de son préjudice de jouissance, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour établir la réalité des nuisances alléguées, M. [L] [N] se fonde sur les réclamations qu'il a adressées à Mme [V] le 12 juillet 2016 et le 13 septembre 2016 faisant état des nuisances sonores provenant de l'appartement de Mme [R], puis fin 2017 suite à la plainte pour menaces de mort commises par le voisin du dessus. Il fait valoir que ces réclamations sont restées sans effet et qu'ensuite Mme [V] a entrepris de présenter les faits en lui imputant la responsabilité des troubles causés dans l'immeuble. Il explique avoir refusé de se rendre à la tentative de conciliation organisée par Mme [V] au motif, dont celle-ci avait été informée, que la précédente réunion n'avait abouti à aucun résultat et que les nuisances avaient perduré. Il fait également état de la condamnation prononcée par le tribunal de police du chef de tapage nocturne contre un voisin qui a été condamné à lui payer la somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts. Il indique avoir été contraint d'adresser à Mme [V] le 8 janvier 2019 et le 22 mars 2019 de nouvelles réclamations qui sont restées sans effet. Il explique ensuite que l'altercation qu'il a eue le 10 janvier 2020 avec le voisin du dessous s'inscrit dans le contexte des nuisances qu'il subit depuis quatre ans. Il appuie ses allégations sur deux attestations émanant de copropriétaires et d'une personne qui occupe son appartement depuis mai 2019. Il fait enfin valoir que les violences commises par les deux personnes qui occupaient son logement ne lui sont pas imputables et que celles qu'il a commises à l'encontre de M. [A] sont isolées et s'inscrivent dans le climat délétère régnant dans l'immeuble.
Mme [V] conclut d'abord à la nullité des conclusions d'appel de M. [L] [N] qui ont d'abord indiqué qu'il est domicilié '[Adresse 2]' alors que suite à un commandement de quitter les lieux il a restitué les clefs de l'appartement le 22 juillet 2021, puis à [Localité 7], [Adresse 4], sans justifier la réalité de cette adresse malgré la sommation de communiquer tout justificatif qui lui a été adressée.
A titre subsidiaire, elle demande à la cour d'écarter des débats les pièces de M. [L] [N] faute d'établissement d'un bordereau permettant d'identifier ces pièces, de rejeter la pièce n° 14 'générique et non identifiable' ainsi que 'les attestations de complaisance manifestement irrégulières, non manuscrites et/ou non datées de M. [X] et de Mme [K] [Y], amis de M. [L] [N]'.
Elle conclut à la confirmation du jugement en ses dispositions relatives à M. [L] [N] et fait valoir qu'il n'est pas établi que les nuisances dont il se plaint excèdent les inconvénients normaux du voisinage alors que celui-ci a menacé Mme [R] et son fils mineur occupant le sixième étage et M. et Mme [A] occupant le quatrième étage, a occasionné de manière répétée des nuisances sonores, amenant M. et Mme [A] a déposé une plainte pénale. Elle ajoute que Mme [R] a déclaré qu'il avait jeté de l'eau de javel sur ses meubles, qu'il a eu une altercation dans la rue avec M. [A] le 1er mai 2019, qu'il a lui même déclaré dans une plainte pénale avoir fait usage d'une bombe lacrymogène contre son voisin qui était venu se plaindre qu'il faisait trop de bruit. Elle rappelle les violences commises le 10 janvier 2020 par deux personnes occupant l'appartement de M. [L] [N] à l'encontre de M. [A] qui lui avait demandé de cesser les nuisances sonores, ces violences n'ayant cessé que lorsque M. [L] [N] leur a donné l'ordre d'arrêter. Elle rappelle également les violences commises par M. [L] [N] et ces deux personnes le même soir contre le fils mineur de Mme [R]. Mme [V] fait également état des menaces adressées le 20 janvier 2020 par M. [L] [N] à M. [A] et au fils de Mme [R].
Mme [V] soutient en outre qu'après avoir reçu les plaintes de M. [L] [N] visant Mme [R], elle a mis en oeuvre des mesures appropriées afin d'y remédier en organisant une tentative de conciliation et en adressant à Mme [R] une mise en demeure puis en lui faisant délivrer un commandement de respecter ses obligations locatives. Elle ajoute qu'elle s'est rendue dans l'immeuble pour enquêter sur l'existence de nuisances et que deux attestations établies par deux occupants de l'immeuble, dont un voisin de palier de Mme [R], n'ont pas confirmé l'existence des nuisances reprochées à cette dernière.
Elle réclame en outre la condamnation de M. [L] [N] à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel et moral et une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [V] a formé un appel provoqué contre Mme [R] et réclame sa condamnation à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle. A titre subsidiaire, elle demande également à la cour de constater ou de prononcer la résiliation du bail la liant à Mme [R], d'ordonner son expulsion sous astreinte, de l'autoriser à faire transporter les biens garnissant les locaux dans un garde-meuble de son choix aux frais et risques de Mme [R], de la condamner au paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant égal à celui du loyer et des charges, cette indemnité d'occupation étant portée au double au cas où elle ne libérerait pas les lieux, et de la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [R] n'a pas constitué avocat.
SUR CE :
Considérant que dans la déclaration d'appel du 17 juin 2021, M. [L] [N] mentionne l'adresse de l'appartement objet du bail conclu avec Mme [V] qu'il n'a quitté que le 22 juillet suivant ; qu'ayant ensuite quitté ce logement, il indique dans ses dernières conclusions demeurer à [Localité 7], [Adresse 4] ; que faute de preuve que cette adresse est fictive ou a été indiquée avec une intention frauduleuse, Mme [V] n'est pas fondée à réclamer la nullité de ces conclusions ;
Considérant que les pièces communiquées par M. [L] [N] ont été énumérées précisément dans un bordereau annexé à ses conclusions, y compris la pièce numéro 14 correspondant, conformément à l'identification qui en est faite, à des 'plaintes pénales' ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu d'écarter les attestations produites par M. [L] [N] au motif qu'il s'agit d'attestations de complaisance, qu'elles ne sont pas manuscrites et ne sont pas datées, s'agissant d'éléments de preuve qu'il appartient à la cour d'examiner ;
Considérant que M. [L] [N] fonde ses demandes sur les nuisances sonores reprochées à Mme [R] et reproche à Mme [V] de n'avoir pas pris les mesures pour y mettre fin ; que toutefois, la gravité et la persistance de ces nuisances ne résultent que des déclarations de M. [L] [N] et de la personne qui occupe son logement avec lui, les voisins de Mme [R] ayant au contraire déclaré n'avoir jamais eu à se plaindre de telles nuisances ; que M. [L] [N] n'est donc pas fondé à réclamer à Mme [V] l'indemnisation d'un préjudice qui n'est pas établi alors qu'en outre celle-ci justifie, dès la réception des plaintes que lui a adressées M. [L] [N], y avoir pertinemment répondu en organisant une tentative de conciliation et en adressant à Mme [R] un commandement de respecter son obligation de jouissance paisible ;
Considérant que Mme [V] a versé aux débats :
- un procès-verbal de plainte pénale déposée le 10 janvier 2020 par [E] [U], alors mineur représenté par son père, demeurant dans l'immeuble, qui a déclaré avoir été agressé par M. [L] [N] et par une personne présente à son domicile qui lui ont porté plusieurs gifles ;
- un procès-verbal de plainte pénale déposée le 13 janvier 2020 par un colocataire, M. [A], déclarant avoir eu une première altercation avec M. [L] [N] le 1er mai 2019, que le 28 décembre 2019 et le 31 décembre 2019, après avoir contacté celui-ci pour lui demander de mettre fin à des nuisances sonores répétées, il a été victime de menaces et que le 10 janvier 2020, suite à de nouvelles nuisances sonores, il s'est présenté à son domicile et a été agressé par M. [L] [N] et par deux individus présents à son domicile ;
Considérant qu'il est ainsi établi que le comportement de M. [L] [N], tenu de l'obligation de jouir paisiblement du logement dans le respect du voisinage, a gravement porté atteinte à la tranquillité des occupants de l'immeuble et manqué de manière répétée à cette obligation, ce qu'établit également la décision de M. [A] qui a donné congé à Mme [V] en raison des nuisances et des agressions commises par M. [L] [N] ; que c'est donc à juste titre que le tribunal a prononcé la résiliation du bail conclu entre Mme [V] et M. [L] [N] et ordonné les mesures subséquentes ;
Considérant qu'est sans objet l'appel en garantie formé par Mme [V] contre Mme [R] et que la demande de résiliation du bail conclu avec cette dernière n'est pas fondée dès lors que les nuisances qui lui sont reprochées n'ont pas été établies ;
PAR CES MOTIFS : statuant publiquement
Rejette la demande d'annulation des conclusions de M. [L] [N]
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [L] [N] et le condamne à payer à Mme [V] la somme de 1 800 euros ;
Le condamne aux dépens qui pourront être recouvrés directement, pour ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, par Maître Dujardin conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 4
ARRÊT DU 16 JANVIER 2024
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/11336 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD4HR
Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Mai 2021 -Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de PARIS RG n° 11-20-7301
APPELANT
Monsieur [O] [L] [N] né le 24 Juillet 1990 à [Localité 6] (91)
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Maël MONFORT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0109
INTIMÉE
Madame [Z] [V] épouse [G] née le 07 Janvier 1963 à [Localité 8] (75)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Marie-hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 05 Décembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Nicolette GUILLAUME, Présidente de chambre
Mme Marie MONGIN, Conseiller
M. Claude CRETON, Président magistrat honoraire
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Claude CRETON dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Gisèle MBOLLO
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Nicolette GUILLAUME, Présidente de chambre et par Gisèle MBOLLO, Greffière chambre 4-4, présente lors de la mise à disposition.
*****
Par acte du 30 décembre 2016, Mme [V] a donné à bail à M. [L] [N] un appartement situé à [Localité 7], [Adresse 2].
Se plaignant des nuisances causées par la locataire de l'appartement du dessus, Mme [R], également locataire de Mme [V], M. [L] [N] a assigné cette dernière en paiement de la somme de 32 187,50 euros en réparation de son préjudice de jouissance, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [V] a assigné en intervention forcée Mme [R] et sollicité sa condamnation à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ainsi que la résiliation du bail. Elle a en formé une demande reconventionnelle en résiliation du bail la liant à M. [L] [N], en expulsion et en paiement d'une indemnité d'occupation. Elle a en outre sollicité la condamnation de M. [L] [N] et de Mme [R] à lui payer en application de l'article 700 du code de procédure civile respectivement 6 000 euros et 5 000 euros.
Par jugement du 19 mai 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :
- débouté M. [L] [N] de ses demandes ;
- prononcé la résiliation du bail conclu avec M. [L] [N], ordonné son expulsion et l'a condamné à lui payer une indemnité d'occupation égale au montant du loyer qui aurait été dû si le bail avait été poursuivi ;
- débouté Mme [V] de sa demande de résiliation du bail la liant à Mme [R] ;
- condamné M. [L] [N] à payer à Mme [V] la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts et la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour débouter M. [L] [N] de ses demandes, le tribunal, après avoir constaté que celui-ci produisait trois déclarations de main courante de 2016 et 2019 faisant état de tapages nocturnes provenant de l'appartement de Mme [R] et deux plaintes déposées l'une le 16 mai 2019 pour tapage nocturne et l'autre le 19 septembre 2019 contre le fils de Mme [R] pour menaces de mort, a retenu que les mains courantes ne relatent que les déclarations de M. [L] [N] et que les nuisances alléguées ne sont établies par aucun élément, que le voisin de Mme [R] a déclaré n'avoir jamais été dérangé par le bruit venant de son appartement depuis son arrivée en 2019, qu'un autre voisin a déclaré n'avoir entendu du bruit qu'à deux reprises en 2019, enfin que les plaintes pénales n'ont donné lieu à aucune suite. Le tribunal a ajouté que Mme [V] justifie avoir pris des mesures afin de faire cesser les troubles allégués en organisant une tentative de conciliation entre Mme [R] et M. [L] [N], qui, après s'être rendu au premier rendez-vous organisé par le conciliateur a refusé de se rendre aux suivants, puis en faisant délivrer à Mme [R] un commandement de respecter ses obligations locatives et en lui rappelant son obligation de jouissance paisible.
Pour prononcer la résiliation du bail conclu entre Mme [V] et M. [L] [N], le tribunal a retenu que celui-ci a commis des manquements graves et répétés aux obligations du bail. Il s'est fondé sur les pièces du dossier qui établissent que deux personnes se trouvant à son domicile ont poussé violemment un occupant de l'appartement du dessous, M. [A], qui était venu se plaindre du bruit. Il s'est en outre fondé sur un procès-verbal de police établissant que le même jour ces deux personnes, dont M. [L] [N] a refusé de donner l'identité, ont porté des coups de poing et des gifles au fils mineur de Mme [R].
M. [L] [N] a interjeté appel de ce jugement à l'encontre de Mme [V] en ses dispositions le déboutant de ses demandes, prononçant la résiliation du bail, son expulsion et sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation, de dommages-intérêts, d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens. Il demande à la cour de rejeter les demandes de Mme [V], d'ordonner sa réintégration dans le logement et de condamner Mme [V] à lui payer la somme de 40 317,50 euros en réparation de son préjudice de jouissance, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour établir la réalité des nuisances alléguées, M. [L] [N] se fonde sur les réclamations qu'il a adressées à Mme [V] le 12 juillet 2016 et le 13 septembre 2016 faisant état des nuisances sonores provenant de l'appartement de Mme [R], puis fin 2017 suite à la plainte pour menaces de mort commises par le voisin du dessus. Il fait valoir que ces réclamations sont restées sans effet et qu'ensuite Mme [V] a entrepris de présenter les faits en lui imputant la responsabilité des troubles causés dans l'immeuble. Il explique avoir refusé de se rendre à la tentative de conciliation organisée par Mme [V] au motif, dont celle-ci avait été informée, que la précédente réunion n'avait abouti à aucun résultat et que les nuisances avaient perduré. Il fait également état de la condamnation prononcée par le tribunal de police du chef de tapage nocturne contre un voisin qui a été condamné à lui payer la somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts. Il indique avoir été contraint d'adresser à Mme [V] le 8 janvier 2019 et le 22 mars 2019 de nouvelles réclamations qui sont restées sans effet. Il explique ensuite que l'altercation qu'il a eue le 10 janvier 2020 avec le voisin du dessous s'inscrit dans le contexte des nuisances qu'il subit depuis quatre ans. Il appuie ses allégations sur deux attestations émanant de copropriétaires et d'une personne qui occupe son appartement depuis mai 2019. Il fait enfin valoir que les violences commises par les deux personnes qui occupaient son logement ne lui sont pas imputables et que celles qu'il a commises à l'encontre de M. [A] sont isolées et s'inscrivent dans le climat délétère régnant dans l'immeuble.
Mme [V] conclut d'abord à la nullité des conclusions d'appel de M. [L] [N] qui ont d'abord indiqué qu'il est domicilié '[Adresse 2]' alors que suite à un commandement de quitter les lieux il a restitué les clefs de l'appartement le 22 juillet 2021, puis à [Localité 7], [Adresse 4], sans justifier la réalité de cette adresse malgré la sommation de communiquer tout justificatif qui lui a été adressée.
A titre subsidiaire, elle demande à la cour d'écarter des débats les pièces de M. [L] [N] faute d'établissement d'un bordereau permettant d'identifier ces pièces, de rejeter la pièce n° 14 'générique et non identifiable' ainsi que 'les attestations de complaisance manifestement irrégulières, non manuscrites et/ou non datées de M. [X] et de Mme [K] [Y], amis de M. [L] [N]'.
Elle conclut à la confirmation du jugement en ses dispositions relatives à M. [L] [N] et fait valoir qu'il n'est pas établi que les nuisances dont il se plaint excèdent les inconvénients normaux du voisinage alors que celui-ci a menacé Mme [R] et son fils mineur occupant le sixième étage et M. et Mme [A] occupant le quatrième étage, a occasionné de manière répétée des nuisances sonores, amenant M. et Mme [A] a déposé une plainte pénale. Elle ajoute que Mme [R] a déclaré qu'il avait jeté de l'eau de javel sur ses meubles, qu'il a eu une altercation dans la rue avec M. [A] le 1er mai 2019, qu'il a lui même déclaré dans une plainte pénale avoir fait usage d'une bombe lacrymogène contre son voisin qui était venu se plaindre qu'il faisait trop de bruit. Elle rappelle les violences commises le 10 janvier 2020 par deux personnes occupant l'appartement de M. [L] [N] à l'encontre de M. [A] qui lui avait demandé de cesser les nuisances sonores, ces violences n'ayant cessé que lorsque M. [L] [N] leur a donné l'ordre d'arrêter. Elle rappelle également les violences commises par M. [L] [N] et ces deux personnes le même soir contre le fils mineur de Mme [R]. Mme [V] fait également état des menaces adressées le 20 janvier 2020 par M. [L] [N] à M. [A] et au fils de Mme [R].
Mme [V] soutient en outre qu'après avoir reçu les plaintes de M. [L] [N] visant Mme [R], elle a mis en oeuvre des mesures appropriées afin d'y remédier en organisant une tentative de conciliation et en adressant à Mme [R] une mise en demeure puis en lui faisant délivrer un commandement de respecter ses obligations locatives. Elle ajoute qu'elle s'est rendue dans l'immeuble pour enquêter sur l'existence de nuisances et que deux attestations établies par deux occupants de l'immeuble, dont un voisin de palier de Mme [R], n'ont pas confirmé l'existence des nuisances reprochées à cette dernière.
Elle réclame en outre la condamnation de M. [L] [N] à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel et moral et une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [V] a formé un appel provoqué contre Mme [R] et réclame sa condamnation à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle. A titre subsidiaire, elle demande également à la cour de constater ou de prononcer la résiliation du bail la liant à Mme [R], d'ordonner son expulsion sous astreinte, de l'autoriser à faire transporter les biens garnissant les locaux dans un garde-meuble de son choix aux frais et risques de Mme [R], de la condamner au paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant égal à celui du loyer et des charges, cette indemnité d'occupation étant portée au double au cas où elle ne libérerait pas les lieux, et de la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [R] n'a pas constitué avocat.
SUR CE :
Considérant que dans la déclaration d'appel du 17 juin 2021, M. [L] [N] mentionne l'adresse de l'appartement objet du bail conclu avec Mme [V] qu'il n'a quitté que le 22 juillet suivant ; qu'ayant ensuite quitté ce logement, il indique dans ses dernières conclusions demeurer à [Localité 7], [Adresse 4] ; que faute de preuve que cette adresse est fictive ou a été indiquée avec une intention frauduleuse, Mme [V] n'est pas fondée à réclamer la nullité de ces conclusions ;
Considérant que les pièces communiquées par M. [L] [N] ont été énumérées précisément dans un bordereau annexé à ses conclusions, y compris la pièce numéro 14 correspondant, conformément à l'identification qui en est faite, à des 'plaintes pénales' ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu d'écarter les attestations produites par M. [L] [N] au motif qu'il s'agit d'attestations de complaisance, qu'elles ne sont pas manuscrites et ne sont pas datées, s'agissant d'éléments de preuve qu'il appartient à la cour d'examiner ;
Considérant que M. [L] [N] fonde ses demandes sur les nuisances sonores reprochées à Mme [R] et reproche à Mme [V] de n'avoir pas pris les mesures pour y mettre fin ; que toutefois, la gravité et la persistance de ces nuisances ne résultent que des déclarations de M. [L] [N] et de la personne qui occupe son logement avec lui, les voisins de Mme [R] ayant au contraire déclaré n'avoir jamais eu à se plaindre de telles nuisances ; que M. [L] [N] n'est donc pas fondé à réclamer à Mme [V] l'indemnisation d'un préjudice qui n'est pas établi alors qu'en outre celle-ci justifie, dès la réception des plaintes que lui a adressées M. [L] [N], y avoir pertinemment répondu en organisant une tentative de conciliation et en adressant à Mme [R] un commandement de respecter son obligation de jouissance paisible ;
Considérant que Mme [V] a versé aux débats :
- un procès-verbal de plainte pénale déposée le 10 janvier 2020 par [E] [U], alors mineur représenté par son père, demeurant dans l'immeuble, qui a déclaré avoir été agressé par M. [L] [N] et par une personne présente à son domicile qui lui ont porté plusieurs gifles ;
- un procès-verbal de plainte pénale déposée le 13 janvier 2020 par un colocataire, M. [A], déclarant avoir eu une première altercation avec M. [L] [N] le 1er mai 2019, que le 28 décembre 2019 et le 31 décembre 2019, après avoir contacté celui-ci pour lui demander de mettre fin à des nuisances sonores répétées, il a été victime de menaces et que le 10 janvier 2020, suite à de nouvelles nuisances sonores, il s'est présenté à son domicile et a été agressé par M. [L] [N] et par deux individus présents à son domicile ;
Considérant qu'il est ainsi établi que le comportement de M. [L] [N], tenu de l'obligation de jouir paisiblement du logement dans le respect du voisinage, a gravement porté atteinte à la tranquillité des occupants de l'immeuble et manqué de manière répétée à cette obligation, ce qu'établit également la décision de M. [A] qui a donné congé à Mme [V] en raison des nuisances et des agressions commises par M. [L] [N] ; que c'est donc à juste titre que le tribunal a prononcé la résiliation du bail conclu entre Mme [V] et M. [L] [N] et ordonné les mesures subséquentes ;
Considérant qu'est sans objet l'appel en garantie formé par Mme [V] contre Mme [R] et que la demande de résiliation du bail conclu avec cette dernière n'est pas fondée dès lors que les nuisances qui lui sont reprochées n'ont pas été établies ;
PAR CES MOTIFS : statuant publiquement
Rejette la demande d'annulation des conclusions de M. [L] [N]
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [L] [N] et le condamne à payer à Mme [V] la somme de 1 800 euros ;
Le condamne aux dépens qui pourront être recouvrés directement, pour ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, par Maître Dujardin conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente