Décisions
CA Rennes, 1re ch., 19 janvier 2024, n° 22/06330
RENNES
Arrêt
Autre
1ère Chambre
ARRÊT N°23
N° RG 22/06330 - N° Portalis DBVL-V-B7G-THJW
Mme [C] [X] épouse [D]
Mme [F] [X]
C/
Mme [Y] [B] épouse [H]
M. [K] [H]
M. [E] [D]
E.A.R.L. ELEVAGE DE KEZEG
S.A. SAFER BRETAGNE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 19 JANVIER 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre entendu en son rapport,
Assesseur : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
GREFFIER :
Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 20 octobre 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 19 janvier 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
DEMANDERESSES À LA PROCÉDURE DE DÉFÉRÉ :
Madame [C] [X] épouse [D]
née le 24 Janvier 1963 à [Localité 16]
[Adresse 3]
[Localité 9]
Représentée par Me Mikaël BONTÉ, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Pierre POEY-LAFRANCE, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
Madame [F] [X]
née le 16 Décembre 1994 à [Localité 16]
[Adresse 3]
[Localité 9]
Représentée par Me Mikaël BONTÉ, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Pierre POEY-LAFRANCE, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
DÉFENDEURS À LA PROCÉDURE DE DÉFÉRÉ :
Madame [Y] [B] épouse [H]
née le 24 Janvier 1960 à [Localité 10] (BELGIQUE)
[Adresse 14]
[Localité 8]
Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Patrick EVENO, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
Monsieur [K] [H]
né le 26 Février 1963 à [Localité 15] (BELGIQUE)
[Adresse 14]
[Localité 8]
Représenté par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Patrick EVENO, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
L'EARL ELEVAGE DE KEZEG, entreprise agricole à responsabilité limitée, à capital variable, immatriculée au immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Vannes sous le n°B 437 544 026, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 13]
[Localité 8]
Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Patrick EVENO, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
Monsieur [E] [D]
né le 01 Novembre 1960 à [Localité 11] (MAROC)
[Adresse 6]
[Localité 17] (BELGIQUE)
Représenté par Me Pauline KERLOEGAN de L'AARPI CIME, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Hélène WOLFF de L'AARPI WOLFF-ZAZOUN-KLEINBOURG, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
La SAFER BRETAGNE, Société d'aménagement foncier et d'établissement rural de Bretagne agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représentée par Me Bertrand FAURE de la SELARL JURIS'ARMOR, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant acte authentique reçu le 30 décembre 2017 par Me [U], notaire à [Localité 12], l'entreprise agricole à responsabilité limitée Élevage de Kezeg (ci-après Earl de Kezeg) a vendu à Mme [C] [X] épouse [D] (ci-après Mme [D]) une propriété rurale sise à [Localité 8], [Adresse 13], cadastrée section YE n° [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 5] d'une superficie totale de 52ha 27a 16ca, édifiée de plusieurs bâtiments. Il a été stipulé que le prix de vente, soit la somme de 1'600'000 euros, sera payable «'en l'étude du notaire soussigné au plus tard le 14'mars 2018 sans intérêts», et que faute de payement «'à l'époque ci-dessus prévue, la vente sera résolue de plein droit si bon semble au vendeur... trente jours après un simple commandement de payer infructueux et contenant déclaration par le vendeur de son intention d'user du bénéfice de la présente clause'».
Le prix n'ayant pas été réglé le 14 mars 2018, l'Earl de Kezeg a, par actes du 15 mars 2018, fait délivrer à Mme [C] [D] ainsi qu'à M. [E] [D], son mari, un commandement de payer dans les trente jours la somme de 1'600'000'euros, rappelant la clause résolutoire insérée à l'acte de vente et son intention de s'en prévaloir.
Par exploit du 16 avril 2018, Mme [D] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Vannes l'Earl Élevage de Kezeg, la Safer de Bretagne et M. [H] aux fins de voir constater leurs fautes et obtenir la suspension de la clause résolutoire. Par jugement du 11 mai 2021 assorti de l'exécution provisoire, ce tribunal (devenu tribunal judiciaire) a notamment':
- déclaré Mme [F] [X] irrecevable en son intervention volontaire,
- débouté Mme [D] de sa demande de suspension de la clause résolutoire,
- condamné Mme [D] à verser à l'Earl Élevage de Kezeg la somme de 163'905'euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision,
- débouté l'Earl Élevage de Kezeg de ses demandes au titre de la dépréciation de clientèle, des frais d'entretien et de nourriture des chevaux et des frais de remise en état de la propriété,
- condamné Mme [D] à payer à Mme [H] la somme de 1'000'euros en réparation de son préjudice moral,
- débouté Mme [D] de toutes ses demandes,
- condamné Mme [D] à verser à l'Earl Élevage de Kezeg et à M. [K] [H] une somme de 5'000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [D] à verser à la Safer une somme de 1'500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Mmes [D] et [X] ont, par déclaration du 20 juillet 2021, interjeté appel de ce jugement ainsi que d'une ordonnance du juge de la mise en état en date du 21 juin 2019 rendue dans le cadre de l'instance ayant abouti à ce jugement et ayant débouté Mme [D] de ses demandes d'expertise, de constat d'huissier et de communication de pièces, la condamnant au payement d'une somme de 1'200'euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Un conseiller de la mise en état de la mise en état a été désigné le 24 septembre 2021.
Par conclusions d'incident du 18 octobre 2021, Mmes [D] et [X] ont saisi le conseiller de la mise en état aux fins qu'une expertise soit ordonnée.
Par conclusions d'incident du 10 novembre 2021, l'Earl Élevage de Kezeg et les époux [H] ont sollicité, au visa de l'article 524 du code de procédure civile, la radiation du rôle de l'affaire faute d'exécution du jugement critiqué.
Par acte du 15 février 2022, Mme [C] [D] a assigné en intervention forcée M.'[E] [D] aux fins qu'il la garantisse des condamnations prononcées à son encontre par le tribunal judiciaire de Vannes le 11 mai 2021 ou qui pourraient l'être dans le cadre de la procédure d'appel.
Par conclusions du 3 mars 2022, M. [E] [D] a saisi le conseiller de la mise en état d'un troisième incident, en l'occurrence aux fins d'irrecevabilité de l'assignation en intervention forcée qui lui a été délivrée.
Devant le conseiller de la mise en état, les parties ont conclu (cf. leurs écritures des 1er août et 2 septembre 2022) sur les trois incidents sans que ceux-ci n'aient jamais été joints.
Par ordonnance du 18 octobre 2022, le conseiller de la mise en état a':
- rejeté l'exception tirée de l'incompétence d'attribution du conseiller de la mise en état pour statuer sur une demande de radiation,
- dit que le changement de fondement légal au soutien de la demande de radiation ne constitue pas une demande nouvelle et rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée du caractère nouveau de la demande de radiation,
- ordonné la radiation de la procédure d'appel du jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 enrôlée sous le n° 21/04520 attribuée à la 1ère chambre civile,
- condamné Mme [D] aux dépens de l'incident et aux dépens d'appel,
- condamné Mme [D] à payer au titre des frais irrépétibles les sommes de :
' 2'000'euros à l'Earl Élevage de Kezeg,
' 2'000'euros à M. et Mme [H],
' 4'000'euros à M. [D],
' 2'000'euros à la Safer Bretagne,
- rejeté le surplus des demandes.
Le conseiller de la mise en état a retenu, pour radier l'affaire, que Mme [D] ne pouvait sans se contredire prétendre être dans l'incapacité de régler une somme de l'ordre de 171'000'euros et solliciter que la propriété de l'Earl de Kezeg lui soit cédée moyennant le prix de 800'000 euros, étant supposée pouvoir le régler.
Par requête du 31 octobre 2022, Mmes [C] [X] épouse [D] et [F] [X] ont déféré cette ordonnance à la cour.
Le 12 janvier 2023, Mme [C] [X] épouse [D] a déposé quatre inscriptions de faux incidentes contre':
' le jugement rendu le 11 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Vannes (RG n° 18/00663),
' l'ordonnance de référé rendue le 21 juin 2018 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Vannes (RG n° 18/00147),
' le procès verbal d'expulsion dressé les 21 et 22 janvier 2019 par Me [W], huissier de justice,
' le commandement de payer du 15 mars 2018 établi par Me [M] [A], huissier de justice.
Conformément aux dispositions de l'article 306 du code de procédure civile, ces inscriptions de faux ont été versées au dossier de l'affaire visé en objet (déféré RG n° 20/06330).
Ces inscriptions de faux ont été dénoncées le 9 février 2023 par notification entre avocats et par messagerie au procureur général ainsi qu'il résulte du dossier déposé par Mme [D] (pièce n° 125), le greffe ne paraissant pas en avoir été destinataire en copie.
Le 14 février 2023, Mme [C] [X] épouse [D] a déposé, par l'intermédiaire de son conseil, quatre inscriptions de faux incidentes contre':
' le jugement rendu le 11 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Vannes (RG n° 18/00663),
' l'ordonnance de référé rendue le 21 juin 2018 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Vannes (RG n° 18/00147),
' le procès verbal d'expulsion dressé les 21 et 22 janvier 2019 par Me [W], huissier de justice,
' le commandement de payer du 15 mars 2018 établi par Me [M] [A], huissier de justice.
Le 16 février 2023, Mme [C] [X] épouse [D] a déposé, par l'intermédiaire de son conseil, une inscription de faux incidente contre':
' l'arrêt rendu le 14 décembre 2021 par la cour d'appel de Rennes (RG n°20/05282),
Conformément aux dispositions de l'article 306 du code de procédure civile, ces cinq nouvelles inscriptions de faux ont été versées au dossier de l'affaire (déféré RG n° 22/06330).
Ces inscriptions de faux ont été dénoncés par notification entre avocats les 14 et 16 février 2023, le greffe en ayant été destinataire en copie.
Elles ont été communiquées au procureur général qui a apposé son visa les 14, 16 février et 17 mai 2023.
Le dossier a été évoqué à l'audience du 17 février 2023. Mmes [D] et [X] ayant conclu le 15'février 2023 et déposé le 16 février une requête en récusation contre le président de la chambre des déférés, l'affaire a été renvoyée au 19 mai 2023.
La demande en récusation ayant été rejetée par ordonnance du premier président rendue le 27 février 2023, le dossier a été évoqué le 19'mai, date à laquelle il a été à nouveau renvoyé pour être plaidé le 20 octobre 2023.
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Aux termes de leurs dernières écritures (18 mai 2023), Mmes [C] [X] épouse [D] et [F] [X] demandent à la cour de':
sur les inscriptions de faux':
- déclarer recevables les quatre inscriptions de faux déposées directement par Mme [D] au greffe de la cour d'appel de Rennes le 12 janvier 2023,
- déclarer recevables les quatre inscriptions de faux déposées par Mme [D] sous la constitution de Me Bonté au greffe de la cour d'appel de Rennes le 14 février 2023,
- déclarer recevable l'inscription de faux déposée par Mme [D] sous la constitution de Me Bonté au greffe de la cour d'appel de Rennes le 16 février 2023,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes du commandement de payer du 15 mars 2018 établi et signifié par Me [M] [A], huissier de justice associé de la Selarl Piquet [A] visées aux présentes constituent des faux,
- déclarer que les énonciations du commandement de payer du 15 mars 2018 établi et signifié par Me [M] [A], huissier de justice associé de la selarl Piquet-[A] visées aux présentes constituent des faux,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes de l'ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de Vannes du 21 juin 2018 (n° RG 18/00147), rendue entre l'Earl Élevage de Kezeg, M. [K] [H] et Mme [Y] [H] d'une part, et Mme'[C] [X] épouse [D], M. [E] [D] et la Safer Bretagne d'autre part, constituent des faux,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes du procès-verbal d'expulsion des 21 et 22'janvier 2019 de Maître [L] [W], huissier de justice associé de la Scp [W] Desmullier Mercadier, effectué à la demande de l'Earl Élevage de Kezeg et de M. et Mme'[H], constituent des faux,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes du jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 (n° RG 18/00663) rendu entre Mme [C] [X] épouse [D] d'une part, et Mme [Y] [H], M. [K] [H], l'Earl Élevage de Kezeg et la Safer Bretagne d'autre part, constituent des faux,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes de l'arrêt de la cour d'appel de Rennes du 14 décembre 2021 (n° RG 20/05282), rendu entre Mme [C] [D] d'une part et M.'[K] [H], Mme [Y] [H], l'Earl Élevage de Kezeg, M. [E] [D] et la société Safer Bretagne d'autre part, constituent des faux,
en conséquence':
- déclarer faux, et nul et de nul effet le commandement de payer du 15 mars 2018 établi et signifié par Me [M] [A], huissier de justice associé de la Selarl Piquet-[A],
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
- déclarer fausse, et nulle et de nul effet l'ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de vannes du 21 juin 2018 (n° RG 18/00147), rendue entre l'Earl Élevage de Kezeg, M.'[K] [H] et Mme [Y] [H] d'une part, et Mme [C] [X] épouse [D], M. [E] [D] et la Safer Bretagne d'autre part,
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
- ordonner l'audition de Me [L] [W], huissier de justice qui a dressé l'acte litigieux, de même que celles de MM. [S], [T] et [R] si la cour l'estime nécessaire,
- déclarer faux, et nul et de nul effet, le procès-verbal d'expulsion des 21 et 22 janvier 2019 de Me [L] [W], huissier de justice associé de la SCP [W] Desmullier Mercadier, effectué à la demande de l'Earl Élevage de Kezeg et de M. et Mme [H],
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
- déclarer faux, et nul et de nul effet, le jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 (n° RG 18/00663) rendu entre Mme [C] [X] épouse [D] d'une part, et Mme [Y] [H], M. [K] [H], l'Earl Élevage de Kezeg et la Safer Bretagne d'autre part,
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
- déclarer faux, et nul et de nul effet, l'arrêt de la cour d'appel de Rennes du 14 décembre 2021 (n° RG 20/05282), rendu entre Mme [C] [X] épouse [D] d'une part, et Mme [Y] [H], M. [K] [H], l'Earl Élevage de Kezeg et la Safer Bretagne d'autre part,
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
sur le déféré':
sur le premier moyen :
- déclarer que la demande de radiation de l'affaire fondée sur les dispositions de l'article 526 du code de procédure civile et d'une manière générale les conclusions d'incident n°2 et conclusions d'incident suivantes de l'Earl Élevage de Kezeg et M. et Mme [H] auraient dû être déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état, faute d'avoir été présentées dans le délai de 3 mois des conclusions des appelantes,
- déclarer que l'Earl Élevage de Kezeg et les époux [H] n'ont pas notifié au conseiller de la mise en état de conclusions d'incident tendant à obtenir la radiation de l'affaire du rôle de la cour sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile dans sa rédaction alors en vigueur, et dans le délai de trois mois pour conclure prévu par l'article 909 du code de procédure civile,
- déclarer que le conseiller de la mise en état a ainsi commis un excès de pouvoir ou, à tout le moins, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs,
en conséquence,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a ordonné la radiation de la procédure d'appel du jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 enrôlée sous le n° 21/04520 attribuée à la 1ère chambre civile,
- déclarer irrecevables la demande de radiation de l'affaire fondée sur les dispositions de l'article 526 du code de procédure civile et d'une manière générale les conclusions d'incident n° 2 et conclusions d'incident suivantes de l'Earl Élevage de Kezeg et M. et Mme'[H] faute d'avoir été présentées dans le délai de 3 mois des conclusions des appelantes,
- débouter l'Earl Élevage de Kezeg et M. et Mme [H] de leur demande de radiation,
sur le deuxième moyen :
- déclarer que l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 a repris des prétentions et moyens de l'Earl de Kezeg et des époux [H] non contenus dans leurs dernières conclusions d'incident remises au greffe et notifiées le 25 février 2022 et qu'un excès de pouvoir a donc été commis,
en conséquence,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit,
sur le troisième moyen':
- déclarer que le conseiller de la mise en état a ainsi commis un excès de pouvoir ou, à tout le moins, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a rejeté le surplus des demandes et n'a pas ordonné le sursis à statuer dans l'attente des décisions à intervenir sur les faux allégués,
- ordonner qu'il soit sursis à statuer dans l'attente des décisions à intervenir sur les onze faux allégués,
- renvoyer à la formation de jugement de la cour et fixer une date pour qu'il soit statué sur les faux allégués,
sur le quatrième moyen':
- déclarer que les conclusions d'incident n°2 de M. [E] [D] ne mentionnant aucun domicile, ainsi que ses pièces n°1 et 5 communiquées concomitamment et selon liste des pièces annexées à ces conclusions, auraient dû être déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état,
- déclarer que le conseiller de la mise en état a ainsi commis un excès de pouvoir ou, à tout le moins, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a rejeté le surplus des demandes et n'a pas déclaré irrecevables les conclusions d'incident n°2 de M. [E] [D] ne mentionnant aucun domicile, ainsi que ses pièces n°1 et 5 communiquées concomitamment et selon liste des pièces annexées à ces conclusions,
- déclarer irrecevables les conclusions d'incident n°2 de M. [E] [D] ne mentionnant aucun domicile, ainsi que ses pièces n°1 et 5 communiquées concomitamment et selon liste des pièces annexées à ces conclusions,
sur le cinquième moyen':
- déclarer que le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir ou, en tout cas, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs en considérant que l'appel interjeté par Mme [F] [X] ne pouvait être examiné et en ordonnant la radiation y compris à l'encontre de celle-ci,
- annuler et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a considéré que l'appel interjeté par Mme [F] [X] ne pouvait être examiné et en ce qu'elle a ordonné la radiation y compris à l'encontre de celle-ci,
- constater que le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir ou, en tout cas, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs en considérant que l'appel interjeté par Mme [F] [X] ne pouvait être examiné,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a considéré que l'appel interjeté par Mme [F] [X] ne pouvait être examiné,
- dire et juger qu'en tout état de cause l'appel interjeté par Mme [F] [X] pourra être examiné,
en tout état de cause
- condamner M. et Mme [H] et l'Earl Élevage de Kezeg in solidum à payer à Mme'[C] [D] et Mme [F] [X] la somme de 10'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Mme [D] rappelle le contexte conflictuel qui l'oppose à son mari notamment dans le cadre de leur divorce et les manœuvres de ce dernier pour se soustraire au payement d'une prestation compensatoire.
Elle demande à la cour de statuer, en premier lieu, sur les inscriptions de faux incidentes et, en second lieu seulement, sur le déféré.
Elle soutient que les actes (commandement de payer du 15 mars 2018, ordonnance de référé du 21 juin 2018, procès-verbal d'expulsion des 21 et 22 janvier 2019, jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 et arrêt de la cour d'appel de Rennes du 14 décembre 2021) dont se prévalent ses adversaires sont entachés de nombreuses énonciations fausses. Elle précise que les inscriptions de faux qu'elle a déposées le 12 janvier 2023 sont parfaitement recevables, aucun texte n'exigeant que l'inscription de faux incidente soit effectuée par un avocat dès lors que la procédure principale est une procédure avec représentation obligatoire. En tout état de cause, elle rappelle que ces quatre inscriptions de faux ont été déposées à nouveau par son conseil.
Pour chacun des actes incriminés, elles détaillent les assertions qui, selon elle, sont fausses.
Mmes [D] et [X] font valoir que leur demande en déféré nullité fondée sur l'excès de pouvoir commis par le conseiller de la mise en état est recevable et rappellent, à cet égard, la jurisprudence de la Cour de cassation.
Elles relèvent que si les intimés ont conclu, au visa de l'article 524 du code de procédure civile, à la radiation de l'appel dans le délai de l'article 909 du même code, ils n'ont invoqué le bon fondement (article 526 dans sa rédaction antérieure au décret du 11'décembre 2019) que le 25'février 2022, soit postérieurement à la date d'expiration de ce délai (c'est à dire postérieurement au 18'janvier 2021) et que, dès lors, le conseiller de la mise en état devait relever d'office l'irrecevabilité de cette demande qui ne pouvait plus être régularisée. Elles soutiennent que ce faisant celui-ci a commis un excès de pouvoir ou, à tout le moins, une méconnaissance de l'étendue de ses pouvoirs.
Elles prétendent, en second lieu, que le conseiller de la mise en état, visant les dernières écritures (conclusions n° 2 du 25 février 2022 et non les conclusions n° 3 du 2 septembre 2022) de l'Earl de Kezeg et des époux [H], a fait état de prétentions et de moyens ne figurant pas dans ces écritures et a donc commis, de ce fait, un excès de pouvoir.
Elles soutiennent, en troisième lieu, que le conseiller de la mise en état ne pouvait connaître de la demande de radiation sans qu'il ne soit préalablement statué sur les faux allégués et plus précisément sur l'inscription de faux concernant le jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11'mai 2021, objet de la procédure d'appel. Elles soutiennent qu'en ne se saisissant pas des inscriptions de faux déposées les 17 juin et 12 juillet 2022, dont elles ignorent si elles ont été jointes au dossier et communiquées au ministère public, le conseiller de la mise en état a commis un abus de pouvoir, ou du moins méconnu ses pouvoirs et violé plusieurs dispositions légales.
Elles demandent donc à la cour d'annuler l'ordonnance du conseiller de la mise en état, d'ordonner le sursis à statuer et de renvoyer sur l'examen de l'ensemble des faux allégués.
Elles font, en quatrième lieu, valoir que le conseiller de la mise en état devait statuer sur la fin de non recevoir que Mme [D] avait soulevée concernant les écritures de M. [D], faute par celui-ci de communiquer sa véritable adresse ce qui caractérise également un excès de pouvoir.
Elles reprochent enfin au conseiller de la mise en état d'avoir refusé de dissocier l'appel portant sur la recevabilité de l'intervention de Mme [F] [X] et de lui faire subir le sort de la radiation, ce en méconnaissance des dispositions de l'article 526 ancien du code de procédure civile et de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et de libertés fondamentales et sollicitent donc qu'il soit disjoint.
Mme [X] rappelle que le défaut d'exécution n'est pas son fait mais celui d'une autre partie.
Aux termes de leurs écritures (10 janvier 2023), M. [K] [H], Mme [Y] [B] épouse [H] et l'Earl Élevage de Kezeg demandent à la cour de':
- les dire et juger recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- dire et juger Mme [D] et Mme [F] [X] irrecevables et mal fondées en toutes leurs demandes, fins et conclusions, et les en débouter intégralement,
- déclarer irrecevable ou à tout le moins mal fondé le recours formé par Mme [D] et Mme [F] [X] à l'encontre de l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 en ce qu'elle a ordonné la radiation de l'affaire inscrite sous les références 21/04520 et attribuée à la première chambre de la cour d'appel de Rennes,
- condamner in solidum Mme [D] et Mme [F] [X] à leur payer la somme de 3'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum Mme [D] et Mme [F] [X] aux entiers dépens.
Ils rappellent les dispositions de l'article 916 du code de procédure civile qui limitent la possibilité de déférer immédiatement à la cour une ordonnance du conseiller de la mise en état. Ils ajoutent que l'ordonnance de radiation est une mesure administrative non susceptible de recours.
Aux termes de ses écritures (15 mai 2023), M. [E] [D] demande à la cour de':
- juger irrecevable Mme [C] [X] épouse [D] en son déféré,
- juger irrecevable Mme [C] [X] épouse [D] en ses déclarations d'inscription en faux incidentes':
' contre le jugement rendu le 11 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Vannes,
' contre l'arrêt rendu le 17 juin 2022 par la cour d'appel de Rennes,
' contre le jugement rendu le 21 juin 2018 par le tribunal de grande instance de Vannes,
' contre un commandement de payer du 15 mars 2018 établi par Me [M] [A]
en conséquence,
- confirmer l'ordonnance rendue le 18 octobre 2022 par le conseiller de la mise en état ayant ordonné la radiation de l'appel interjeté par Mme [X] épouse [D] en registré au répertoire général sous le n° 21/ 04520,
- condamner Mme [X] épouse [D] au paiement d'une amende civile,
- condamner Mme [X] épouse [D] aux entiers dépens et à verser à M. [E] [D] une indemnité de 7'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, M. [D] rappelle les dispositions de l'article 916 du code de procédure civile et soutient que le déféré formé contre une ordonnance de radiation est irrecevable.
Subsidiairement, il conteste tout excès de pouvoir ou méconnaissance par le juge de ses pouvoirs. Il ajoute que la demande de radiation était parfaitement justifiée et fondée, le changement de fondement légal n'ayant aucune incidence. Il s'oppose à l'argumentation fondée sur un prétendu excès de pouvoir tiré de ce que le conseiller de la mise en état aurait repris des arguments qui n'auraient pas soutenu. Il ajoute qu'aucun texte n'imposait au juge de surseoir sur la demande de radiation jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les faux prétendus. Il estime qu'à juste titre, le conseiller de la mise en état n'a pas statué sur l'irrecevabilité de ses écritures puisque l'affaire a été radiée et qu'il a fait une exact appréciation des dispositions de l'article 526 du code de procédure civile en estimant que l'appel de Mme [F] [X] ne pouvait être examiné.
En tout état de cause, il considère que les inscriptions de faux déposées sont irrecevables et en tous cas mal fondées, s'agissant soit d'erreurs matérielles soit de contestations des motivations des décisions rendues, mais en aucun cas de faux intellectuels.
La Safer de Bretagne n'a pas conclu.
SUR CE, LA COUR :
Il convient de rappeler que la cour est saisie d'une requête en déféré contre une ordonnance de radiation faute d'exécution et qu'un tel déféré est, en principe, irrecevable, la radiation pour défaut d'exécution du jugement dont appel étant, aux termes de l'article 526 al 3 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au présent litige, une simple mesure d'administration judiciaire qui, par hypothèse, ne met pas fin à l'instance et, n'est, ainsi qu'en dispose l'article 537 du même code, susceptible d'aucun recours.
Cependant, la jurisprudence admet que les ordonnances du conseiller de la mise en état qui n'entrent pas dans la liste de celles arrêtées à l'article 916 du code de procédure civile - qui, par exception au principe suivant lequel ces ordonnances ne sont susceptibles d'aucun recours indépendamment de l'arrêt sur le fond - puissent toutefois, lorsqu'elles sont entachées d'un excès de pouvoir, faire l'objet d'un déféré nullité devant la cour.
Cette solution a notamment été admise pour les ordonnances de radiation faute d'exécution de la décision critiquée dans la mesure où de telles décisions affectent l'exercice du droit d'appel (2e Civ., 9 janvier 2020, n°18-19301).
Il s'ensuit que, contrairement à ce que réclament Mmes [D] et [X], la cour doit, avant l'examen éventuel des inscriptions de faux (étant rappelé, s'agissant d'inscriptions de faux incidentes, que «'le juge se prononce sur le faux à moins qu'il ne puisse statuer sans tenir compte de la pièce arguée de faux'»), rechercher si le déféré est recevable, c'est à dire si le conseiller de la mise en état a, dans son ordonnance du 18 octobre 2022, excédé ses pouvoirs.
Les requérantes invoquent cinq moyens qu'il convient d'examiner.
Elles reprochent, en premier lieu, au conseiller de la mise en état de ne pas avoir déclaré la demande de radiation des époux [H] et de l'EARL de Kezeg irrecevable alors que le bon fondement n'a été invoqué qu'après l'expiration des délais prescrits aux articles 909, 910 et 911 du code de procédure civile.
L'article 526 al 1er du code de procédure civile (dans sa rédaction antérieure au décret du 11 décembre 2019 applicable au présent litige), énonce que «'lorsque l'exécution provisoire... a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire...'».
Il résulte de l'alinéa 2 de ce texte que la demande de l'intimé aux fins de radiation faute d'exécution doit être présentée avant l'expiration du délai qui lui est consenti pour déposer au greffe et notifier ses conclusions au fond. En l'espèce, les appelantes ayant conclu le 18'octobre 2021, le délai des intimés expirait le 18 janvier 2022 à 24h.
Il est constant que les conclusions d'incident de radiation dont les époux [H] et l'EARL de Kezeg ont saisi le conseiller de la mise en état ont été déposées au greffe et notifiées aux avocats constitués par messagerie électronique le 10 novembre 2021 à 15h34.
Ces conclusions, présentées par l'intimé dans les délais précités, sont incontestablement recevables (l'erreur de fondement juridique n'étant pas une fin de non recevoir).
Il est, en revanche, exact qu'elles visaient l'article 524 (dans sa rédaction issue du décret du 11'décembre 2019) et non l'article 526 (ancien) du code de procédure civile et que les intimés n'ont invoqué le texte effectivement applicable que dans leurs conclusions notifiées le 25 février 2022 à 13h58.
À supposer même que le conseiller de la mise en état ait commis une erreur de droit en acceptant la substitution de fondement légal pour faire droit à la demande de radiation, ce qui entrait dans ses pouvoirs, une telle erreur ne relève pas de l'excès de pouvoir, de sorte que la cour n'a pas à l'examiner.
Ce premier moyen est donc infondé.
En second lieu, les requérantes soutiennent que le juge aurait commis un excès de pouvoir en statuant sur des moyens dont il n'était pas saisi.
L'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 vise les conclusions de l'Earl de Kezeg et des époux [H] remises au greffe et notifiées le 25 février 2022 et, après avoir rappelé les prétentions des intéressés, résume leur argumentation ainsi':
«'Ils soutiennent que la demande de sursis à statuer fondée sur des inscriptions de faux est dilatoire dès lors que ces procédures tendent à critiquer des détails de rédaction des actes et décisions judiciaires pour échapper à leur exécution. Ils rappellent que Mme [D] n'a payé aucune des causes du jugement dont appel alors qu'elle prétend dans le même temps acquérir le bien litigieux pour la somme de 800.000'€. Ils ajoutent que l'échange du 17 février 2018 était téléphonique, aucune pièce écrite ne pouvant être produite pour l'établir. Enfin, la demande d'expertise leur paraît injustifiée pour un bien conforme au DTU 40.35 et qui ne présente pas d'amiante ainsi que l'a établi le rapport d'analyse du 7 mars 2019'».
Cette argumentation ne résulte pas des écritures du 25 février 2022 visées mais de celles déposées et notifiées par les époux [H] et l'Earl de Kezeg le 2 septembre 2022.
Le conseiller de la mise en état, comme toute juridiction doit statuer sur les dernières écritures des parties. En l'espèce et s'agissant des intimés, il devait donc statuer sur les écritures du 2'septembre 2022 ce qui a été manifestement le cas ainsi qu'il résulte de l'examen de la synthèse de leurs prétentions. Ce faisant, il n'a fait que satisfaire à son office sans nullement excéder ses pouvoirs. Il est, en revanche, exact que l'ordonnance déférée est manifestement entachée d'une erreur matérielle en ce qu'elle vise les écritures du 25 février et non celles du 2 septembre 2022 au vu desquelles il a statué.
Or, une simple erreur matérielle ne caractérise évidemment pas un excès de pouvoir.
Ce second moyen est également infondé.
Mmes [D] et [X] soutiennent, en troisième lieu, que le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir en refusant de surseoir à statuer jusqu'à ce que la cour ait tranché les onze inscriptions de faux incidentes dont elle était saisie.
Il convient de rappeler que, hors les cas où le sursis à statuer est une obligation pour le juge (question préjudicielle relevant de la compétence de la juridiction administrative en cas de contestation sérieuse ' loi des 16 et 24 août 1790, transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité ' article 23-3 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, action civile née d'un infraction pénale non encore examinée par le juge ' article 4 du code de procédure pénale, existence d'un délai dont jouit de droit une partie ' article 108 du code de procédure civile,...), il ne s'agit pour celui-ci que d'une faculté, disposant pour apprécier l'opportunité d'une telle mesure, d'un pouvoir discrétionnaire (Com., 29 mai 1979, pourvoi n° 77-11.083, Bull. 1979, IV, n° 181 ; 1re Civ., 16 juin 1987, pourvoi n° 85-17.200, Bull. 1987, I, n° 196 ; 2e Civ., 27 février 1991, pourvoi n° 89-11.017, Bull. 1991, II, n° 65 ; 2e Civ., 24 novembre 1993, pourvoi n° 92-16.588, Bull. 1993, II, n° 338; 2e Civ., 4 octobre 2001, pourvoi n° 99-15.576,...).
En l'occurrence, le sursis sollicité par Mes [D] et [X] ne relève pas des sursis de droit. La circonstance tirée du fait que l'une des inscriptions de faux incidente concernait le jugement soumis à la censure de la cour (TJ Vannes, 11 mai 2021) n'y change rien et il appartenait à Mme [D] si elle entendait échapper à l'exécution provisoire de cette décision, puisque celle-ci avait été ordonnée, de solliciter la consignation du montant des condamnations.
En l'état de ces éléments, c'est sans méconnaître l'étendue de ses pouvoirs que le conseiller de la mise en état a pu, passant nécessairement outre la demande de sursis, rejetée au même titre que les autres demandes, statuer sur l'incident de radiation.
La circonstance tirée du fait que le conseiller de la mise en état ne se soit pas saisi des inscriptions de faux incidentes en fixant un calendrier de procédure est indifférente dans le cadre du traitement de l'incident de radiation qui ne porte que sur le point de savoir si la décision a ou non été exécutée.
Ce moyen n'est donc pas pertinent.
Les requérantes font, en quatrième lieu, grief au conseiller de la mise en état de ne pas avoir statué sur l'irrecevabilité des conclusions d'incident n° 2, notifiées par M. [D].
Abstraction faite de ce que les trois incidents n'ont jamais été joints, ce dont les parties n'ont pas tenu compte dans leurs écritures communes, Mmes [D] et [X] demandaient notamment dans leurs dernières conclusions (n° 4) au conseiller de la mise en état de «'déclarer irrecevables les conclusions d'incident n°2 notifiées par M. [E] [D] le 16 mai 2022 ainsi que ses pièces n°1 à 5 communiquées concomitamment et selon liste des pièces annexées à ces conclusions'».
Il est exact que si le conseiller de la mise en état n'a pas statué sur cette prétention, il semble utile de rappeler que ce magistrat ' comme la cour ' ne statue que sur les dernières conclusions qui lui sont soumises. Or, les dernières conclusions d'incident de M. [D] ne sont pas celles du 16'mai 2022, mais ses conclusions n° 3 notifiées le 2 septembre 2022.
L'irrecevabilité des conclusions d'incident n° 3 du 2 septembre 2022 (comme d'ailleurs de ses conclusions d'incident n° 1 du 3 mars 2022) n'ayant pas été soulevée et ces écritures étant les seules au vu desquelles le conseiller de la mise en état doit trancher l'incident dont il est saisi, c'est sans commettre d'excès de pouvoir qu'il n'a pas statué sur l'irrecevabilité des conclusions n° 2 laquelle irrecevabilité est sans incidence sur la procédure.
En tout état de cause, les conclusions d'incident n°3 de M. [D], comme ses conclusions devant la cour en déféré comportent bien la même adresse ([Adresse 6] à [Localité 17] - Belgique) ce qui satisfait à l'obligation des articles 960 et 961 (« (les conclusions) ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l'alinéa 2 précédent (au nombre desquelles figurent l'adresse) n'ont pas été fournies ») du code de procédure civile.
Ce moyen est donc également rejeté.
Les requérantes soutiennent, en dernier lieu, qu'en ne dissociant pas de l'appel de Mme'[D] celui de Mme [X] et en privant celle-ci de son droit d'accès au juge alors qu'elle n'est en rien responsable de l'inexécution de la décision puisqu'aucune condamnation pécuniaire n'a été mise à sa charge, le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir.
Dans son ordonnance, le conseiller de la mise en état a considéré que «'par l'effet de l'indivisibilité de la radiation, l'appel interjeté par Mme [F] [X] dont l'intervention volontaire a été déclarée irrecevable dans le premier jugement ne (pouvait) dès lors être examiné'»
Si l'article 526 al 6 du code de procédure civile (dans sa rédaction antérieure au décret du 11'décembre 2019) énonce que «'(la décision de radiation) interdit l'examen des appels principaux et incidents ou provoqués'», ce texte doit être interprété à la lumière de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme qui stipule que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial.
Or, la décision rendue a pour effet d'interdire l'examen de l'appel de Mme [X] alors même qu'aucune inexécution ne peut lui être reprochée puisque le tribunal n'a pas prononcé de condamnation à son encontre, déclarant seulement son intervention volontaire irrecevable.
Il n'existe de plus, aucune indivisibilité, les prétentions de Mme [X] au fond étant dirigées non contre les époux [H] et l'Earl de Kezeg, mais exclusivement contre la Safer de Bretagne.
De ce chef, le conseiller de la mise en état a effectivement commis un excès de pouvoir. Le déféré nullité est donc recevable et l'ordonnance de mise en état doit être annulée mais seulement en ce qu'elle n'a pas disjoint l'appel de Mme [X].
La disjonction de l'appel de cette dernière sera, en conséquence, ordonnée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles':
Partie succombante Mme [D] supportera la charge des dépens.
Elle devra, en outre, verser sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile':
- une somme de 2 000 euros à l'Earl de Kezeg et aux époux [H],
- une somme de 1 500 euros à M. [E] [D].
PAR CES MOTIFS':
Statuant par arrêt rendu publiquement et contradictoirement':
Vu l'article 526 ancien du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Dit que le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir en refusant de disjoindre l'appel de Mme [F] [X] et rejette les autres moyens soulevés.
Déclare en conséquence le déféré recevable.
Annule, mais seulement en ce qu'elle a refusé de disjoindre l'appel de Mme [F] [X], l'ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 18 octobre 2022.
Statuant à nouveau de ce seul chef':
Disjoint l'appel de Mme [F] [X] à l'encontre des intimés.
Ordonne le ré-enrôlement de ce volet du dossier et renvoie l'affaire devant le conseiller de la mise en état.
Condamne Mme [C] [X] épouse [D] aux dépens.
Autorise les avocats qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre elle ceux des dépens dont ils auraient pu faire l'avance sans avoir reçu provision.
Condamne Mme [C] [X] épouse [D] à payer sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile':
- une somme de 2 000 euros à l'Earl de Kezeg et aux époux [H],
- une somme de 1 500 euros à M. [E] [D].
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
ARRÊT N°23
N° RG 22/06330 - N° Portalis DBVL-V-B7G-THJW
Mme [C] [X] épouse [D]
Mme [F] [X]
C/
Mme [Y] [B] épouse [H]
M. [K] [H]
M. [E] [D]
E.A.R.L. ELEVAGE DE KEZEG
S.A. SAFER BRETAGNE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 19 JANVIER 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre entendu en son rapport,
Assesseur : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
GREFFIER :
Madame Julie ROUET, lors des débats, et Madame Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 20 octobre 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 19 janvier 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
DEMANDERESSES À LA PROCÉDURE DE DÉFÉRÉ :
Madame [C] [X] épouse [D]
née le 24 Janvier 1963 à [Localité 16]
[Adresse 3]
[Localité 9]
Représentée par Me Mikaël BONTÉ, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Pierre POEY-LAFRANCE, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
Madame [F] [X]
née le 16 Décembre 1994 à [Localité 16]
[Adresse 3]
[Localité 9]
Représentée par Me Mikaël BONTÉ, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Pierre POEY-LAFRANCE, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
DÉFENDEURS À LA PROCÉDURE DE DÉFÉRÉ :
Madame [Y] [B] épouse [H]
née le 24 Janvier 1960 à [Localité 10] (BELGIQUE)
[Adresse 14]
[Localité 8]
Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Patrick EVENO, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
Monsieur [K] [H]
né le 26 Février 1963 à [Localité 15] (BELGIQUE)
[Adresse 14]
[Localité 8]
Représenté par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Patrick EVENO, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
L'EARL ELEVAGE DE KEZEG, entreprise agricole à responsabilité limitée, à capital variable, immatriculée au immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Vannes sous le n°B 437 544 026, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 13]
[Localité 8]
Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Patrick EVENO, Plaidant, avocat au barreau de VANNES
Monsieur [E] [D]
né le 01 Novembre 1960 à [Localité 11] (MAROC)
[Adresse 6]
[Localité 17] (BELGIQUE)
Représenté par Me Pauline KERLOEGAN de L'AARPI CIME, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Hélène WOLFF de L'AARPI WOLFF-ZAZOUN-KLEINBOURG, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
La SAFER BRETAGNE, Société d'aménagement foncier et d'établissement rural de Bretagne agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représentée par Me Bertrand FAURE de la SELARL JURIS'ARMOR, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant acte authentique reçu le 30 décembre 2017 par Me [U], notaire à [Localité 12], l'entreprise agricole à responsabilité limitée Élevage de Kezeg (ci-après Earl de Kezeg) a vendu à Mme [C] [X] épouse [D] (ci-après Mme [D]) une propriété rurale sise à [Localité 8], [Adresse 13], cadastrée section YE n° [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 5] d'une superficie totale de 52ha 27a 16ca, édifiée de plusieurs bâtiments. Il a été stipulé que le prix de vente, soit la somme de 1'600'000 euros, sera payable «'en l'étude du notaire soussigné au plus tard le 14'mars 2018 sans intérêts», et que faute de payement «'à l'époque ci-dessus prévue, la vente sera résolue de plein droit si bon semble au vendeur... trente jours après un simple commandement de payer infructueux et contenant déclaration par le vendeur de son intention d'user du bénéfice de la présente clause'».
Le prix n'ayant pas été réglé le 14 mars 2018, l'Earl de Kezeg a, par actes du 15 mars 2018, fait délivrer à Mme [C] [D] ainsi qu'à M. [E] [D], son mari, un commandement de payer dans les trente jours la somme de 1'600'000'euros, rappelant la clause résolutoire insérée à l'acte de vente et son intention de s'en prévaloir.
Par exploit du 16 avril 2018, Mme [D] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Vannes l'Earl Élevage de Kezeg, la Safer de Bretagne et M. [H] aux fins de voir constater leurs fautes et obtenir la suspension de la clause résolutoire. Par jugement du 11 mai 2021 assorti de l'exécution provisoire, ce tribunal (devenu tribunal judiciaire) a notamment':
- déclaré Mme [F] [X] irrecevable en son intervention volontaire,
- débouté Mme [D] de sa demande de suspension de la clause résolutoire,
- condamné Mme [D] à verser à l'Earl Élevage de Kezeg la somme de 163'905'euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision,
- débouté l'Earl Élevage de Kezeg de ses demandes au titre de la dépréciation de clientèle, des frais d'entretien et de nourriture des chevaux et des frais de remise en état de la propriété,
- condamné Mme [D] à payer à Mme [H] la somme de 1'000'euros en réparation de son préjudice moral,
- débouté Mme [D] de toutes ses demandes,
- condamné Mme [D] à verser à l'Earl Élevage de Kezeg et à M. [K] [H] une somme de 5'000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [D] à verser à la Safer une somme de 1'500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Mmes [D] et [X] ont, par déclaration du 20 juillet 2021, interjeté appel de ce jugement ainsi que d'une ordonnance du juge de la mise en état en date du 21 juin 2019 rendue dans le cadre de l'instance ayant abouti à ce jugement et ayant débouté Mme [D] de ses demandes d'expertise, de constat d'huissier et de communication de pièces, la condamnant au payement d'une somme de 1'200'euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Un conseiller de la mise en état de la mise en état a été désigné le 24 septembre 2021.
Par conclusions d'incident du 18 octobre 2021, Mmes [D] et [X] ont saisi le conseiller de la mise en état aux fins qu'une expertise soit ordonnée.
Par conclusions d'incident du 10 novembre 2021, l'Earl Élevage de Kezeg et les époux [H] ont sollicité, au visa de l'article 524 du code de procédure civile, la radiation du rôle de l'affaire faute d'exécution du jugement critiqué.
Par acte du 15 février 2022, Mme [C] [D] a assigné en intervention forcée M.'[E] [D] aux fins qu'il la garantisse des condamnations prononcées à son encontre par le tribunal judiciaire de Vannes le 11 mai 2021 ou qui pourraient l'être dans le cadre de la procédure d'appel.
Par conclusions du 3 mars 2022, M. [E] [D] a saisi le conseiller de la mise en état d'un troisième incident, en l'occurrence aux fins d'irrecevabilité de l'assignation en intervention forcée qui lui a été délivrée.
Devant le conseiller de la mise en état, les parties ont conclu (cf. leurs écritures des 1er août et 2 septembre 2022) sur les trois incidents sans que ceux-ci n'aient jamais été joints.
Par ordonnance du 18 octobre 2022, le conseiller de la mise en état a':
- rejeté l'exception tirée de l'incompétence d'attribution du conseiller de la mise en état pour statuer sur une demande de radiation,
- dit que le changement de fondement légal au soutien de la demande de radiation ne constitue pas une demande nouvelle et rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée du caractère nouveau de la demande de radiation,
- ordonné la radiation de la procédure d'appel du jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 enrôlée sous le n° 21/04520 attribuée à la 1ère chambre civile,
- condamné Mme [D] aux dépens de l'incident et aux dépens d'appel,
- condamné Mme [D] à payer au titre des frais irrépétibles les sommes de :
' 2'000'euros à l'Earl Élevage de Kezeg,
' 2'000'euros à M. et Mme [H],
' 4'000'euros à M. [D],
' 2'000'euros à la Safer Bretagne,
- rejeté le surplus des demandes.
Le conseiller de la mise en état a retenu, pour radier l'affaire, que Mme [D] ne pouvait sans se contredire prétendre être dans l'incapacité de régler une somme de l'ordre de 171'000'euros et solliciter que la propriété de l'Earl de Kezeg lui soit cédée moyennant le prix de 800'000 euros, étant supposée pouvoir le régler.
Par requête du 31 octobre 2022, Mmes [C] [X] épouse [D] et [F] [X] ont déféré cette ordonnance à la cour.
Le 12 janvier 2023, Mme [C] [X] épouse [D] a déposé quatre inscriptions de faux incidentes contre':
' le jugement rendu le 11 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Vannes (RG n° 18/00663),
' l'ordonnance de référé rendue le 21 juin 2018 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Vannes (RG n° 18/00147),
' le procès verbal d'expulsion dressé les 21 et 22 janvier 2019 par Me [W], huissier de justice,
' le commandement de payer du 15 mars 2018 établi par Me [M] [A], huissier de justice.
Conformément aux dispositions de l'article 306 du code de procédure civile, ces inscriptions de faux ont été versées au dossier de l'affaire visé en objet (déféré RG n° 20/06330).
Ces inscriptions de faux ont été dénoncées le 9 février 2023 par notification entre avocats et par messagerie au procureur général ainsi qu'il résulte du dossier déposé par Mme [D] (pièce n° 125), le greffe ne paraissant pas en avoir été destinataire en copie.
Le 14 février 2023, Mme [C] [X] épouse [D] a déposé, par l'intermédiaire de son conseil, quatre inscriptions de faux incidentes contre':
' le jugement rendu le 11 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Vannes (RG n° 18/00663),
' l'ordonnance de référé rendue le 21 juin 2018 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Vannes (RG n° 18/00147),
' le procès verbal d'expulsion dressé les 21 et 22 janvier 2019 par Me [W], huissier de justice,
' le commandement de payer du 15 mars 2018 établi par Me [M] [A], huissier de justice.
Le 16 février 2023, Mme [C] [X] épouse [D] a déposé, par l'intermédiaire de son conseil, une inscription de faux incidente contre':
' l'arrêt rendu le 14 décembre 2021 par la cour d'appel de Rennes (RG n°20/05282),
Conformément aux dispositions de l'article 306 du code de procédure civile, ces cinq nouvelles inscriptions de faux ont été versées au dossier de l'affaire (déféré RG n° 22/06330).
Ces inscriptions de faux ont été dénoncés par notification entre avocats les 14 et 16 février 2023, le greffe en ayant été destinataire en copie.
Elles ont été communiquées au procureur général qui a apposé son visa les 14, 16 février et 17 mai 2023.
Le dossier a été évoqué à l'audience du 17 février 2023. Mmes [D] et [X] ayant conclu le 15'février 2023 et déposé le 16 février une requête en récusation contre le président de la chambre des déférés, l'affaire a été renvoyée au 19 mai 2023.
La demande en récusation ayant été rejetée par ordonnance du premier président rendue le 27 février 2023, le dossier a été évoqué le 19'mai, date à laquelle il a été à nouveau renvoyé pour être plaidé le 20 octobre 2023.
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Aux termes de leurs dernières écritures (18 mai 2023), Mmes [C] [X] épouse [D] et [F] [X] demandent à la cour de':
sur les inscriptions de faux':
- déclarer recevables les quatre inscriptions de faux déposées directement par Mme [D] au greffe de la cour d'appel de Rennes le 12 janvier 2023,
- déclarer recevables les quatre inscriptions de faux déposées par Mme [D] sous la constitution de Me Bonté au greffe de la cour d'appel de Rennes le 14 février 2023,
- déclarer recevable l'inscription de faux déposée par Mme [D] sous la constitution de Me Bonté au greffe de la cour d'appel de Rennes le 16 février 2023,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes du commandement de payer du 15 mars 2018 établi et signifié par Me [M] [A], huissier de justice associé de la Selarl Piquet [A] visées aux présentes constituent des faux,
- déclarer que les énonciations du commandement de payer du 15 mars 2018 établi et signifié par Me [M] [A], huissier de justice associé de la selarl Piquet-[A] visées aux présentes constituent des faux,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes de l'ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de Vannes du 21 juin 2018 (n° RG 18/00147), rendue entre l'Earl Élevage de Kezeg, M. [K] [H] et Mme [Y] [H] d'une part, et Mme'[C] [X] épouse [D], M. [E] [D] et la Safer Bretagne d'autre part, constituent des faux,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes du procès-verbal d'expulsion des 21 et 22'janvier 2019 de Maître [L] [W], huissier de justice associé de la Scp [W] Desmullier Mercadier, effectué à la demande de l'Earl Élevage de Kezeg et de M. et Mme'[H], constituent des faux,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes du jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 (n° RG 18/00663) rendu entre Mme [C] [X] épouse [D] d'une part, et Mme [Y] [H], M. [K] [H], l'Earl Élevage de Kezeg et la Safer Bretagne d'autre part, constituent des faux,
- déclarer que les énonciations visées aux présentes de l'arrêt de la cour d'appel de Rennes du 14 décembre 2021 (n° RG 20/05282), rendu entre Mme [C] [D] d'une part et M.'[K] [H], Mme [Y] [H], l'Earl Élevage de Kezeg, M. [E] [D] et la société Safer Bretagne d'autre part, constituent des faux,
en conséquence':
- déclarer faux, et nul et de nul effet le commandement de payer du 15 mars 2018 établi et signifié par Me [M] [A], huissier de justice associé de la Selarl Piquet-[A],
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
- déclarer fausse, et nulle et de nul effet l'ordonnance de référé du président du tribunal de grande instance de vannes du 21 juin 2018 (n° RG 18/00147), rendue entre l'Earl Élevage de Kezeg, M.'[K] [H] et Mme [Y] [H] d'une part, et Mme [C] [X] épouse [D], M. [E] [D] et la Safer Bretagne d'autre part,
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
- ordonner l'audition de Me [L] [W], huissier de justice qui a dressé l'acte litigieux, de même que celles de MM. [S], [T] et [R] si la cour l'estime nécessaire,
- déclarer faux, et nul et de nul effet, le procès-verbal d'expulsion des 21 et 22 janvier 2019 de Me [L] [W], huissier de justice associé de la SCP [W] Desmullier Mercadier, effectué à la demande de l'Earl Élevage de Kezeg et de M. et Mme [H],
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
- déclarer faux, et nul et de nul effet, le jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 (n° RG 18/00663) rendu entre Mme [C] [X] épouse [D] d'une part, et Mme [Y] [H], M. [K] [H], l'Earl Élevage de Kezeg et la Safer Bretagne d'autre part,
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
- déclarer faux, et nul et de nul effet, l'arrêt de la cour d'appel de Rennes du 14 décembre 2021 (n° RG 20/05282), rendu entre Mme [C] [X] épouse [D] d'une part, et Mme [Y] [H], M. [K] [H], l'Earl Élevage de Kezeg et la Safer Bretagne d'autre part,
- ordonner que l'arrêt déclarant le faux sera mentionné en marge de cet acte reconnu faux,
sur le déféré':
sur le premier moyen :
- déclarer que la demande de radiation de l'affaire fondée sur les dispositions de l'article 526 du code de procédure civile et d'une manière générale les conclusions d'incident n°2 et conclusions d'incident suivantes de l'Earl Élevage de Kezeg et M. et Mme [H] auraient dû être déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état, faute d'avoir été présentées dans le délai de 3 mois des conclusions des appelantes,
- déclarer que l'Earl Élevage de Kezeg et les époux [H] n'ont pas notifié au conseiller de la mise en état de conclusions d'incident tendant à obtenir la radiation de l'affaire du rôle de la cour sur le fondement de l'article 526 du code de procédure civile dans sa rédaction alors en vigueur, et dans le délai de trois mois pour conclure prévu par l'article 909 du code de procédure civile,
- déclarer que le conseiller de la mise en état a ainsi commis un excès de pouvoir ou, à tout le moins, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs,
en conséquence,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a ordonné la radiation de la procédure d'appel du jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 enrôlée sous le n° 21/04520 attribuée à la 1ère chambre civile,
- déclarer irrecevables la demande de radiation de l'affaire fondée sur les dispositions de l'article 526 du code de procédure civile et d'une manière générale les conclusions d'incident n° 2 et conclusions d'incident suivantes de l'Earl Élevage de Kezeg et M. et Mme'[H] faute d'avoir été présentées dans le délai de 3 mois des conclusions des appelantes,
- débouter l'Earl Élevage de Kezeg et M. et Mme [H] de leur demande de radiation,
sur le deuxième moyen :
- déclarer que l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 a repris des prétentions et moyens de l'Earl de Kezeg et des époux [H] non contenus dans leurs dernières conclusions d'incident remises au greffe et notifiées le 25 février 2022 et qu'un excès de pouvoir a donc été commis,
en conséquence,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit,
sur le troisième moyen':
- déclarer que le conseiller de la mise en état a ainsi commis un excès de pouvoir ou, à tout le moins, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a rejeté le surplus des demandes et n'a pas ordonné le sursis à statuer dans l'attente des décisions à intervenir sur les faux allégués,
- ordonner qu'il soit sursis à statuer dans l'attente des décisions à intervenir sur les onze faux allégués,
- renvoyer à la formation de jugement de la cour et fixer une date pour qu'il soit statué sur les faux allégués,
sur le quatrième moyen':
- déclarer que les conclusions d'incident n°2 de M. [E] [D] ne mentionnant aucun domicile, ainsi que ses pièces n°1 et 5 communiquées concomitamment et selon liste des pièces annexées à ces conclusions, auraient dû être déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état,
- déclarer que le conseiller de la mise en état a ainsi commis un excès de pouvoir ou, à tout le moins, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a rejeté le surplus des demandes et n'a pas déclaré irrecevables les conclusions d'incident n°2 de M. [E] [D] ne mentionnant aucun domicile, ainsi que ses pièces n°1 et 5 communiquées concomitamment et selon liste des pièces annexées à ces conclusions,
- déclarer irrecevables les conclusions d'incident n°2 de M. [E] [D] ne mentionnant aucun domicile, ainsi que ses pièces n°1 et 5 communiquées concomitamment et selon liste des pièces annexées à ces conclusions,
sur le cinquième moyen':
- déclarer que le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir ou, en tout cas, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs en considérant que l'appel interjeté par Mme [F] [X] ne pouvait être examiné et en ordonnant la radiation y compris à l'encontre de celle-ci,
- annuler et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a considéré que l'appel interjeté par Mme [F] [X] ne pouvait être examiné et en ce qu'elle a ordonné la radiation y compris à l'encontre de celle-ci,
- constater que le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir ou, en tout cas, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs en considérant que l'appel interjeté par Mme [F] [X] ne pouvait être examiné,
- annuler, et à défaut infirmer l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 avec toutes les conséquences de droit en ce qu'elle a considéré que l'appel interjeté par Mme [F] [X] ne pouvait être examiné,
- dire et juger qu'en tout état de cause l'appel interjeté par Mme [F] [X] pourra être examiné,
en tout état de cause
- condamner M. et Mme [H] et l'Earl Élevage de Kezeg in solidum à payer à Mme'[C] [D] et Mme [F] [X] la somme de 10'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Mme [D] rappelle le contexte conflictuel qui l'oppose à son mari notamment dans le cadre de leur divorce et les manœuvres de ce dernier pour se soustraire au payement d'une prestation compensatoire.
Elle demande à la cour de statuer, en premier lieu, sur les inscriptions de faux incidentes et, en second lieu seulement, sur le déféré.
Elle soutient que les actes (commandement de payer du 15 mars 2018, ordonnance de référé du 21 juin 2018, procès-verbal d'expulsion des 21 et 22 janvier 2019, jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11 mai 2021 et arrêt de la cour d'appel de Rennes du 14 décembre 2021) dont se prévalent ses adversaires sont entachés de nombreuses énonciations fausses. Elle précise que les inscriptions de faux qu'elle a déposées le 12 janvier 2023 sont parfaitement recevables, aucun texte n'exigeant que l'inscription de faux incidente soit effectuée par un avocat dès lors que la procédure principale est une procédure avec représentation obligatoire. En tout état de cause, elle rappelle que ces quatre inscriptions de faux ont été déposées à nouveau par son conseil.
Pour chacun des actes incriminés, elles détaillent les assertions qui, selon elle, sont fausses.
Mmes [D] et [X] font valoir que leur demande en déféré nullité fondée sur l'excès de pouvoir commis par le conseiller de la mise en état est recevable et rappellent, à cet égard, la jurisprudence de la Cour de cassation.
Elles relèvent que si les intimés ont conclu, au visa de l'article 524 du code de procédure civile, à la radiation de l'appel dans le délai de l'article 909 du même code, ils n'ont invoqué le bon fondement (article 526 dans sa rédaction antérieure au décret du 11'décembre 2019) que le 25'février 2022, soit postérieurement à la date d'expiration de ce délai (c'est à dire postérieurement au 18'janvier 2021) et que, dès lors, le conseiller de la mise en état devait relever d'office l'irrecevabilité de cette demande qui ne pouvait plus être régularisée. Elles soutiennent que ce faisant celui-ci a commis un excès de pouvoir ou, à tout le moins, une méconnaissance de l'étendue de ses pouvoirs.
Elles prétendent, en second lieu, que le conseiller de la mise en état, visant les dernières écritures (conclusions n° 2 du 25 février 2022 et non les conclusions n° 3 du 2 septembre 2022) de l'Earl de Kezeg et des époux [H], a fait état de prétentions et de moyens ne figurant pas dans ces écritures et a donc commis, de ce fait, un excès de pouvoir.
Elles soutiennent, en troisième lieu, que le conseiller de la mise en état ne pouvait connaître de la demande de radiation sans qu'il ne soit préalablement statué sur les faux allégués et plus précisément sur l'inscription de faux concernant le jugement du tribunal judiciaire de Vannes du 11'mai 2021, objet de la procédure d'appel. Elles soutiennent qu'en ne se saisissant pas des inscriptions de faux déposées les 17 juin et 12 juillet 2022, dont elles ignorent si elles ont été jointes au dossier et communiquées au ministère public, le conseiller de la mise en état a commis un abus de pouvoir, ou du moins méconnu ses pouvoirs et violé plusieurs dispositions légales.
Elles demandent donc à la cour d'annuler l'ordonnance du conseiller de la mise en état, d'ordonner le sursis à statuer et de renvoyer sur l'examen de l'ensemble des faux allégués.
Elles font, en quatrième lieu, valoir que le conseiller de la mise en état devait statuer sur la fin de non recevoir que Mme [D] avait soulevée concernant les écritures de M. [D], faute par celui-ci de communiquer sa véritable adresse ce qui caractérise également un excès de pouvoir.
Elles reprochent enfin au conseiller de la mise en état d'avoir refusé de dissocier l'appel portant sur la recevabilité de l'intervention de Mme [F] [X] et de lui faire subir le sort de la radiation, ce en méconnaissance des dispositions de l'article 526 ancien du code de procédure civile et de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et de libertés fondamentales et sollicitent donc qu'il soit disjoint.
Mme [X] rappelle que le défaut d'exécution n'est pas son fait mais celui d'une autre partie.
Aux termes de leurs écritures (10 janvier 2023), M. [K] [H], Mme [Y] [B] épouse [H] et l'Earl Élevage de Kezeg demandent à la cour de':
- les dire et juger recevables et bien fondés en toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- dire et juger Mme [D] et Mme [F] [X] irrecevables et mal fondées en toutes leurs demandes, fins et conclusions, et les en débouter intégralement,
- déclarer irrecevable ou à tout le moins mal fondé le recours formé par Mme [D] et Mme [F] [X] à l'encontre de l'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 en ce qu'elle a ordonné la radiation de l'affaire inscrite sous les références 21/04520 et attribuée à la première chambre de la cour d'appel de Rennes,
- condamner in solidum Mme [D] et Mme [F] [X] à leur payer la somme de 3'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum Mme [D] et Mme [F] [X] aux entiers dépens.
Ils rappellent les dispositions de l'article 916 du code de procédure civile qui limitent la possibilité de déférer immédiatement à la cour une ordonnance du conseiller de la mise en état. Ils ajoutent que l'ordonnance de radiation est une mesure administrative non susceptible de recours.
Aux termes de ses écritures (15 mai 2023), M. [E] [D] demande à la cour de':
- juger irrecevable Mme [C] [X] épouse [D] en son déféré,
- juger irrecevable Mme [C] [X] épouse [D] en ses déclarations d'inscription en faux incidentes':
' contre le jugement rendu le 11 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Vannes,
' contre l'arrêt rendu le 17 juin 2022 par la cour d'appel de Rennes,
' contre le jugement rendu le 21 juin 2018 par le tribunal de grande instance de Vannes,
' contre un commandement de payer du 15 mars 2018 établi par Me [M] [A]
en conséquence,
- confirmer l'ordonnance rendue le 18 octobre 2022 par le conseiller de la mise en état ayant ordonné la radiation de l'appel interjeté par Mme [X] épouse [D] en registré au répertoire général sous le n° 21/ 04520,
- condamner Mme [X] épouse [D] au paiement d'une amende civile,
- condamner Mme [X] épouse [D] aux entiers dépens et à verser à M. [E] [D] une indemnité de 7'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, M. [D] rappelle les dispositions de l'article 916 du code de procédure civile et soutient que le déféré formé contre une ordonnance de radiation est irrecevable.
Subsidiairement, il conteste tout excès de pouvoir ou méconnaissance par le juge de ses pouvoirs. Il ajoute que la demande de radiation était parfaitement justifiée et fondée, le changement de fondement légal n'ayant aucune incidence. Il s'oppose à l'argumentation fondée sur un prétendu excès de pouvoir tiré de ce que le conseiller de la mise en état aurait repris des arguments qui n'auraient pas soutenu. Il ajoute qu'aucun texte n'imposait au juge de surseoir sur la demande de radiation jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les faux prétendus. Il estime qu'à juste titre, le conseiller de la mise en état n'a pas statué sur l'irrecevabilité de ses écritures puisque l'affaire a été radiée et qu'il a fait une exact appréciation des dispositions de l'article 526 du code de procédure civile en estimant que l'appel de Mme [F] [X] ne pouvait être examiné.
En tout état de cause, il considère que les inscriptions de faux déposées sont irrecevables et en tous cas mal fondées, s'agissant soit d'erreurs matérielles soit de contestations des motivations des décisions rendues, mais en aucun cas de faux intellectuels.
La Safer de Bretagne n'a pas conclu.
SUR CE, LA COUR :
Il convient de rappeler que la cour est saisie d'une requête en déféré contre une ordonnance de radiation faute d'exécution et qu'un tel déféré est, en principe, irrecevable, la radiation pour défaut d'exécution du jugement dont appel étant, aux termes de l'article 526 al 3 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au présent litige, une simple mesure d'administration judiciaire qui, par hypothèse, ne met pas fin à l'instance et, n'est, ainsi qu'en dispose l'article 537 du même code, susceptible d'aucun recours.
Cependant, la jurisprudence admet que les ordonnances du conseiller de la mise en état qui n'entrent pas dans la liste de celles arrêtées à l'article 916 du code de procédure civile - qui, par exception au principe suivant lequel ces ordonnances ne sont susceptibles d'aucun recours indépendamment de l'arrêt sur le fond - puissent toutefois, lorsqu'elles sont entachées d'un excès de pouvoir, faire l'objet d'un déféré nullité devant la cour.
Cette solution a notamment été admise pour les ordonnances de radiation faute d'exécution de la décision critiquée dans la mesure où de telles décisions affectent l'exercice du droit d'appel (2e Civ., 9 janvier 2020, n°18-19301).
Il s'ensuit que, contrairement à ce que réclament Mmes [D] et [X], la cour doit, avant l'examen éventuel des inscriptions de faux (étant rappelé, s'agissant d'inscriptions de faux incidentes, que «'le juge se prononce sur le faux à moins qu'il ne puisse statuer sans tenir compte de la pièce arguée de faux'»), rechercher si le déféré est recevable, c'est à dire si le conseiller de la mise en état a, dans son ordonnance du 18 octobre 2022, excédé ses pouvoirs.
Les requérantes invoquent cinq moyens qu'il convient d'examiner.
Elles reprochent, en premier lieu, au conseiller de la mise en état de ne pas avoir déclaré la demande de radiation des époux [H] et de l'EARL de Kezeg irrecevable alors que le bon fondement n'a été invoqué qu'après l'expiration des délais prescrits aux articles 909, 910 et 911 du code de procédure civile.
L'article 526 al 1er du code de procédure civile (dans sa rédaction antérieure au décret du 11 décembre 2019 applicable au présent litige), énonce que «'lorsque l'exécution provisoire... a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire...'».
Il résulte de l'alinéa 2 de ce texte que la demande de l'intimé aux fins de radiation faute d'exécution doit être présentée avant l'expiration du délai qui lui est consenti pour déposer au greffe et notifier ses conclusions au fond. En l'espèce, les appelantes ayant conclu le 18'octobre 2021, le délai des intimés expirait le 18 janvier 2022 à 24h.
Il est constant que les conclusions d'incident de radiation dont les époux [H] et l'EARL de Kezeg ont saisi le conseiller de la mise en état ont été déposées au greffe et notifiées aux avocats constitués par messagerie électronique le 10 novembre 2021 à 15h34.
Ces conclusions, présentées par l'intimé dans les délais précités, sont incontestablement recevables (l'erreur de fondement juridique n'étant pas une fin de non recevoir).
Il est, en revanche, exact qu'elles visaient l'article 524 (dans sa rédaction issue du décret du 11'décembre 2019) et non l'article 526 (ancien) du code de procédure civile et que les intimés n'ont invoqué le texte effectivement applicable que dans leurs conclusions notifiées le 25 février 2022 à 13h58.
À supposer même que le conseiller de la mise en état ait commis une erreur de droit en acceptant la substitution de fondement légal pour faire droit à la demande de radiation, ce qui entrait dans ses pouvoirs, une telle erreur ne relève pas de l'excès de pouvoir, de sorte que la cour n'a pas à l'examiner.
Ce premier moyen est donc infondé.
En second lieu, les requérantes soutiennent que le juge aurait commis un excès de pouvoir en statuant sur des moyens dont il n'était pas saisi.
L'ordonnance de mise en état du 18 octobre 2022 vise les conclusions de l'Earl de Kezeg et des époux [H] remises au greffe et notifiées le 25 février 2022 et, après avoir rappelé les prétentions des intéressés, résume leur argumentation ainsi':
«'Ils soutiennent que la demande de sursis à statuer fondée sur des inscriptions de faux est dilatoire dès lors que ces procédures tendent à critiquer des détails de rédaction des actes et décisions judiciaires pour échapper à leur exécution. Ils rappellent que Mme [D] n'a payé aucune des causes du jugement dont appel alors qu'elle prétend dans le même temps acquérir le bien litigieux pour la somme de 800.000'€. Ils ajoutent que l'échange du 17 février 2018 était téléphonique, aucune pièce écrite ne pouvant être produite pour l'établir. Enfin, la demande d'expertise leur paraît injustifiée pour un bien conforme au DTU 40.35 et qui ne présente pas d'amiante ainsi que l'a établi le rapport d'analyse du 7 mars 2019'».
Cette argumentation ne résulte pas des écritures du 25 février 2022 visées mais de celles déposées et notifiées par les époux [H] et l'Earl de Kezeg le 2 septembre 2022.
Le conseiller de la mise en état, comme toute juridiction doit statuer sur les dernières écritures des parties. En l'espèce et s'agissant des intimés, il devait donc statuer sur les écritures du 2'septembre 2022 ce qui a été manifestement le cas ainsi qu'il résulte de l'examen de la synthèse de leurs prétentions. Ce faisant, il n'a fait que satisfaire à son office sans nullement excéder ses pouvoirs. Il est, en revanche, exact que l'ordonnance déférée est manifestement entachée d'une erreur matérielle en ce qu'elle vise les écritures du 25 février et non celles du 2 septembre 2022 au vu desquelles il a statué.
Or, une simple erreur matérielle ne caractérise évidemment pas un excès de pouvoir.
Ce second moyen est également infondé.
Mmes [D] et [X] soutiennent, en troisième lieu, que le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir en refusant de surseoir à statuer jusqu'à ce que la cour ait tranché les onze inscriptions de faux incidentes dont elle était saisie.
Il convient de rappeler que, hors les cas où le sursis à statuer est une obligation pour le juge (question préjudicielle relevant de la compétence de la juridiction administrative en cas de contestation sérieuse ' loi des 16 et 24 août 1790, transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité ' article 23-3 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, action civile née d'un infraction pénale non encore examinée par le juge ' article 4 du code de procédure pénale, existence d'un délai dont jouit de droit une partie ' article 108 du code de procédure civile,...), il ne s'agit pour celui-ci que d'une faculté, disposant pour apprécier l'opportunité d'une telle mesure, d'un pouvoir discrétionnaire (Com., 29 mai 1979, pourvoi n° 77-11.083, Bull. 1979, IV, n° 181 ; 1re Civ., 16 juin 1987, pourvoi n° 85-17.200, Bull. 1987, I, n° 196 ; 2e Civ., 27 février 1991, pourvoi n° 89-11.017, Bull. 1991, II, n° 65 ; 2e Civ., 24 novembre 1993, pourvoi n° 92-16.588, Bull. 1993, II, n° 338; 2e Civ., 4 octobre 2001, pourvoi n° 99-15.576,...).
En l'occurrence, le sursis sollicité par Mes [D] et [X] ne relève pas des sursis de droit. La circonstance tirée du fait que l'une des inscriptions de faux incidente concernait le jugement soumis à la censure de la cour (TJ Vannes, 11 mai 2021) n'y change rien et il appartenait à Mme [D] si elle entendait échapper à l'exécution provisoire de cette décision, puisque celle-ci avait été ordonnée, de solliciter la consignation du montant des condamnations.
En l'état de ces éléments, c'est sans méconnaître l'étendue de ses pouvoirs que le conseiller de la mise en état a pu, passant nécessairement outre la demande de sursis, rejetée au même titre que les autres demandes, statuer sur l'incident de radiation.
La circonstance tirée du fait que le conseiller de la mise en état ne se soit pas saisi des inscriptions de faux incidentes en fixant un calendrier de procédure est indifférente dans le cadre du traitement de l'incident de radiation qui ne porte que sur le point de savoir si la décision a ou non été exécutée.
Ce moyen n'est donc pas pertinent.
Les requérantes font, en quatrième lieu, grief au conseiller de la mise en état de ne pas avoir statué sur l'irrecevabilité des conclusions d'incident n° 2, notifiées par M. [D].
Abstraction faite de ce que les trois incidents n'ont jamais été joints, ce dont les parties n'ont pas tenu compte dans leurs écritures communes, Mmes [D] et [X] demandaient notamment dans leurs dernières conclusions (n° 4) au conseiller de la mise en état de «'déclarer irrecevables les conclusions d'incident n°2 notifiées par M. [E] [D] le 16 mai 2022 ainsi que ses pièces n°1 à 5 communiquées concomitamment et selon liste des pièces annexées à ces conclusions'».
Il est exact que si le conseiller de la mise en état n'a pas statué sur cette prétention, il semble utile de rappeler que ce magistrat ' comme la cour ' ne statue que sur les dernières conclusions qui lui sont soumises. Or, les dernières conclusions d'incident de M. [D] ne sont pas celles du 16'mai 2022, mais ses conclusions n° 3 notifiées le 2 septembre 2022.
L'irrecevabilité des conclusions d'incident n° 3 du 2 septembre 2022 (comme d'ailleurs de ses conclusions d'incident n° 1 du 3 mars 2022) n'ayant pas été soulevée et ces écritures étant les seules au vu desquelles le conseiller de la mise en état doit trancher l'incident dont il est saisi, c'est sans commettre d'excès de pouvoir qu'il n'a pas statué sur l'irrecevabilité des conclusions n° 2 laquelle irrecevabilité est sans incidence sur la procédure.
En tout état de cause, les conclusions d'incident n°3 de M. [D], comme ses conclusions devant la cour en déféré comportent bien la même adresse ([Adresse 6] à [Localité 17] - Belgique) ce qui satisfait à l'obligation des articles 960 et 961 (« (les conclusions) ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l'alinéa 2 précédent (au nombre desquelles figurent l'adresse) n'ont pas été fournies ») du code de procédure civile.
Ce moyen est donc également rejeté.
Les requérantes soutiennent, en dernier lieu, qu'en ne dissociant pas de l'appel de Mme'[D] celui de Mme [X] et en privant celle-ci de son droit d'accès au juge alors qu'elle n'est en rien responsable de l'inexécution de la décision puisqu'aucune condamnation pécuniaire n'a été mise à sa charge, le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir.
Dans son ordonnance, le conseiller de la mise en état a considéré que «'par l'effet de l'indivisibilité de la radiation, l'appel interjeté par Mme [F] [X] dont l'intervention volontaire a été déclarée irrecevable dans le premier jugement ne (pouvait) dès lors être examiné'»
Si l'article 526 al 6 du code de procédure civile (dans sa rédaction antérieure au décret du 11'décembre 2019) énonce que «'(la décision de radiation) interdit l'examen des appels principaux et incidents ou provoqués'», ce texte doit être interprété à la lumière de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme qui stipule que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial.
Or, la décision rendue a pour effet d'interdire l'examen de l'appel de Mme [X] alors même qu'aucune inexécution ne peut lui être reprochée puisque le tribunal n'a pas prononcé de condamnation à son encontre, déclarant seulement son intervention volontaire irrecevable.
Il n'existe de plus, aucune indivisibilité, les prétentions de Mme [X] au fond étant dirigées non contre les époux [H] et l'Earl de Kezeg, mais exclusivement contre la Safer de Bretagne.
De ce chef, le conseiller de la mise en état a effectivement commis un excès de pouvoir. Le déféré nullité est donc recevable et l'ordonnance de mise en état doit être annulée mais seulement en ce qu'elle n'a pas disjoint l'appel de Mme [X].
La disjonction de l'appel de cette dernière sera, en conséquence, ordonnée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles':
Partie succombante Mme [D] supportera la charge des dépens.
Elle devra, en outre, verser sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile':
- une somme de 2 000 euros à l'Earl de Kezeg et aux époux [H],
- une somme de 1 500 euros à M. [E] [D].
PAR CES MOTIFS':
Statuant par arrêt rendu publiquement et contradictoirement':
Vu l'article 526 ancien du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Dit que le conseiller de la mise en état a commis un excès de pouvoir en refusant de disjoindre l'appel de Mme [F] [X] et rejette les autres moyens soulevés.
Déclare en conséquence le déféré recevable.
Annule, mais seulement en ce qu'elle a refusé de disjoindre l'appel de Mme [F] [X], l'ordonnance du conseiller de la mise en état rendue le 18 octobre 2022.
Statuant à nouveau de ce seul chef':
Disjoint l'appel de Mme [F] [X] à l'encontre des intimés.
Ordonne le ré-enrôlement de ce volet du dossier et renvoie l'affaire devant le conseiller de la mise en état.
Condamne Mme [C] [X] épouse [D] aux dépens.
Autorise les avocats qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre elle ceux des dépens dont ils auraient pu faire l'avance sans avoir reçu provision.
Condamne Mme [C] [X] épouse [D] à payer sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile':
- une somme de 2 000 euros à l'Earl de Kezeg et aux époux [H],
- une somme de 1 500 euros à M. [E] [D].
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT