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Décisions

CA Poitiers, 1re ch., 23 janvier 2024, n° 22/00508

POITIERS

Arrêt

Autre

CA Poitiers n° 22/00508

23 janvier 2024

ARRÊT N° 26

N° RG 22/00508

N° Portalis DBV5-V-B7G-GPNR

S.C.I. [W]

C/

[A]

Loi n° 77-1468 du30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire

Le à

Le à

Le à

Copie gratuite délivrée

Le à

Le à

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 23 JANVIER 2024

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 janvier 2022 rendu par le Tribunal Judiciaire des SABLES D'OLONNE

APPELANTE :

S.C.I. [W]

[Adresse 5]

ayant pour avocat Me Henri BODIN de la SELARL BODIN AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau des SABLES D'OLONNE

INTIMÉS :

Monsieur [S] [A]

né le 16 Juillet 1952 à [Localité 7](49)

[Adresse 6]

Madame [K] [C] épouse [A]

née le 05 Octobre 1956 à [Localité 8] (62)

[Adresse 6]

ayant pour avocat Me François-hugues CIRIER de la SCP CIRIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Madame Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par acte du 9 septembre 2010, la sci [W] a acquis des époux [S] [A] et [K] [C] un local commercial situé aux [Localité 10] (Vendée), cadastré section AM [Cadastre 1].

La parcelle contiguë est cadastrée section AM n° [Cadastre 2]. Elle provient, ainsi que la parcelle cadastrée section AM [Cadastre 1], de la division d'une même parcelle.

Les époux [S] [A] et [K] [C] se sont engagés à l'acte de vente à :

- déplacer à leurs frais et sous leur responsabilité dans le délai de trois mois la sortie de la climatisation côté [Adresse 3] ;

- faire effectuer dans le même délai les travaux d'obturation des fenêtres donnant sur le jardin dépendant de la propriété voisine (parcelle AM n° [Cadastre 2]), par la pose de pavés de verre translucides.

Par acte du 26 septembre 2013, les époux [S] [A] et [K] [C] ont vendu la parcelle cadastrée AM [Cadastre 2] à [I] [O]. Celle-ci a déposé une demande de permis de construire d'une maison individuelle. Ce permis a été délivré le 3 mars 2014. La sci [W] a exercé le 18 avril 2014 un recours contre cette décision.

Par acte du 12 août 2015, la Sci [W] a fait assigner devant le tribunal de grande instance des Sables-d'Olonne les époux [S] [A] et [K] [C] ainsi que [I] [O]. Elle a demandé de :

- condamner sous astreinte les vendeurs à faire déplacer la sortie de la climatisation côté [Adresse 3] et à faire effectuer les travaux d'obturation par des pavés de verre translucides des fenêtres donnant sur le jardin dépendant de la propriété voisine ;

- l'autoriser à faire réaliser ces travaux aux frais des vendeurs en cas de carence de ces derniers ;

- condamner les vendeurs à lui payer la somme de 273.750 € au titre de l'astreinte conventionnelle et celle de 5.000 € en réparation de son préjudice moral.

L'affaire a été retirée du rôle par ordonnance du 4 décembre 2015, afin de permettre aux parties de convenir d'un accord.

Par conclusions du 14 avril 2017, la sci [W] a sollicité le réenrôlement de l'affaire.

Par acte du 3 août 2018, la sci [W] a acquis de [I] [O] la parcelle cadastrée section AM n° [Cadastre 2].

Par ordonnance du 10 septembre 2019, le juge de la mise en état a rejeté l'exception d'incompétence au profit du juge de l'exécution soutenue par les époux [S] [A] et [K] [C].

Dans ses dernières écritures, la sci [W] a conclu au rejet des demandes des époux [S] [A] et [K] [C] et demandé de les condamner au paiement des sommes de :

-7.042,93 € correspondant au coût des travaux qu'elle a dû faire exécuter ;

- 346.650 € au titre de la liquidation de l'astreinte conventionnelle stipulée ;

- 5.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi.

Les époux [S] [A] et [K] [C] ont conclu au rejet de ces demandes. Ils ont soulevé l'irrecevabilité de l'action de la sci [W], le fonds dominant et le fonds servant ayant été réunis en une même main. Subsidiairement, ils ont demandé d'annuler l'acte du 9 septembre 2010 en raison du lien de parenté du notaire ayant instrumenté avec [B] [W]. Ils ont en outre soutenu leur bonne foi et l'impossibilité de déplacer la climatisation en raison des règles du plan local d'urbanisme.

[I] [O] a, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, demandé de condamner les demandeurs à lui payer à titre de dommages et intérêts les sommes de 31.869,70 € en réparation de son préjudice matériel et de 5.000 € en réparation de son préjudice moral.

Par jugement du 18 janvier 2022, le tribunal judiciaire (anciennement tribunal de grande instance) des Sables-d'Olonne a statué en ces termes :

'DÉCLARE la SCI [W] irrecevable en son action exercée contre Monsieur [S] [A] et Madame [K] [C] épouse [A] ;

REJETTE en conséquence les demandes formées par la SCI [W] en remboursement de travaux, en paiement d'astreinte et en dommages et intérêts pour préjudice moral ;

DÉBOUTE Madame [I] [O] de l'ensemble de ses demandes de dommages et intérêts dirigées contre Monsieur [S] [A] et Madame [K] [C] épouse [A], comme mal fondées ;

DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article700 du code de procédure civile et REJETTE les demandes formées à ce titre ;

DÉBOUTE les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif ;

CONDAMNE la SCI [W] aux entiers dépens, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

DIT n'y avoir lieu d'assortir la présente décision de l'exécution provisoire'.

Il a considéré que :

- les vendeurs avaient réalisé les travaux d'obturation convenus ;

- le plan local d'urbanisme créait un obstacle de droit au déplacement de la climatisation ;

- l'acquisition par la sci [W] de la parcelle n° [Cadastre 2] avait éteint les servitudes la grevant au profit de la parcelle AM [Cadastre 1].

Il a rejeté les demandes de [I] [O] en l'absence de faute des vendeurs, en raison de la stipulation de servitudes à l'acte de vente et en l'absence de preuve d'un dol des vendeurs.

Par déclaration reçue au greffe le 24 février 2022, la sci [W] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 2 juin 2022, elle a demandé de :

'INFIRMER le Jugement du Tribunal Judicaire des Sables d'Olonne en date du 18 janvier 2022 (RG n° 17/00405) en ce qu'il :

-« DECLARE la SCI [W] irrecevable en son action exercée contre Monsieur [S] [A] et Madame [K] [C] épouse [A]

-REJETTE en conséquence les demandes formées par la SCI [W] en remboursement de travaux, en paiement d'astreinte et en dommages et intérêts pour préjudice moral ;

-DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et REJETTE les demandes formées à ce titre ;

-DEBOUTE les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif ;

-CONDAMNE la SCI [W] aux entiers dépens, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

ET STATUANT À NOUVEAU

- CONDAMNER IN SOLIDUM LES ÉPOUX [A] à verser à la SCI [W] la somme de 7.042,93 EUR TTC au titre du remboursement des travaux que la SCI [W] a dû exécuter correspondant à ceux auxquels ils s'étaient engagés et à ceux permettant de supprimer les servitudes de fait qu'ils ont laissé exister entre les deux fonds.

-CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [A] et Madame [K] [A] payer à la SCI [W] LA SOMME DE 346.650,00 EUR au titre de l'astreinte non réductible figurant à l'acte notarié,

-Dire, s'il est jugé qu'il s'agit d'une clause pénale réductible, n'y avoir lieu à réduction de ladite somme en deçà de la somme de 32 000,00 €, montant des divers postes de préjudice effectivement subis à raison des manquements contractuels de les époux [A] et condamner les époux [A] au paiement de ladite somme ;

-CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [A] et Madame [K] [A] à verser à la SCI [W] LA SOMME DE 7.000,00 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure Civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel

CONDAMNER IN SOLIDUM Monsieur [S] [A] et Madame [K] [A] AUX ENTIERS DÉPENS de la procédure de première instance et d'appel ; lesquels comprendront le coût du procès-verbal de constat'.

Elle a soutenu la recevabilité de son action. Elle a exposé que les vendeurs n'avaient pas exécuté leurs engagements contractuels en n'ayant pas obturé les vues par les pavés de verre ainsi que convenu et déplacé la climatisation. Elle a fait observer que le plan local d'urbanisme s'opposant à ce déplacement avait été approuvé en 2018 alors même que l'engagement datait de l'année 2010 et que l'ensemble des travaux devait être effectué dans les trois mois de la vente. Elle a ajouté que la parcelle voisine n'avait été acquise que pour remédier aux difficultés rencontrées par [I] [O] et elle-même en raison des manquements de leurs vendeurs.

Elle a soutenu que ceux-ci étaient tenus sur le fondement de la garantie d'éviction et en raison de leur manquement à leur obligation de loyauté envers [I] [O] qu'ils n'avaient pas tenue informée de leurs engagements et des servitudes grevant la parcelle acquise faisant obstacle au projet de construction. Elle a ajouté que les vendeurs avaient ainsi engagé leur responsabilité contractuelle et délictuelle.

Elle a conclu au rejet de la demande de nullité de l'acte de vente du 9 septembre 2010, d'une part l'action étant prescrite, d'autre part le notaire ayant instrumenté n'ayant épousé la soeur de son gérant que postérieurement à l'établissement de l'acte de vente.

Elle a maintenu sa demande :

- de remboursement du coût des travaux réalisés ;

- d'indemnisation d'un préjudice moral ;

- de liquidation de l'astreinte conventionnelle pour un montant au 10 avril 2017 de 346.650 € (150 € x 365 jours x 6 ans + 150 € x 121 jours).

Elle a ajouté que l'indemnisation de son préjudice ne pouvait être inférieure à 32.000 €.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 août 2022, les époux [S] [A] et [K] [C] ont demandé de :

'Vu les articles 122 et 31 du Code de procédure civile,

Vu l'article 564 du Code de procédure civile,

Vu l'article 1626 du Code civil,

Vu l'article 1231-5 du Code civil,

[...]

- CONFIRMER purement et simplement le jugement rendu par le Tribunal judiciaire des SABLES D'OLONNE des SABLES D'OLONNE en date du 18 janvier 2022 [N°RG 17/00405] en ce qu'il a :

. « déclaré la SCI [W] irrecevable en son action exercée contre Monsieur [S] [A] et Madame [K] [C] épouse [A] »,

. « rejeté en conséquence, les demandes formées par la SCI [W] en remboursement des travaux, en paiement d'astreinte, et en dommages et intérêts pour préjudice moral » ;

En tout état de cause,

- REJETER l'intégralité des demandes formées par la SCI [W] à l'endroit des époux [A] comme étant irrecevables et mal fondées ;

Y ajoutant,

- CONDAMNER la SCI [W] au paiement de la somme de 10.000 euros aux époux [A], au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens'.

Ils ont maintenu que l'action de l'appelante était irrecevable, d'une part pour défaut d'intérêt à agir, les travaux d'obturation des vues ayant été réalisés, d'autre part le plan local d'urbanisme s'opposant au déplacement de la climatisation, enfin l'appelante étant désormais propriétaire des deux parcelles et toute servitude étant éteinte par application de l'article 705 du code civil. Ils ont ajouté que la sci [W] avait obtenu le permis de démolir les constructions existantes et de construire une maison en bois sur la parcelle cadastrée section AM n° [Cadastre 2].

Ils ont ajouté qu'était nouvelle en cause d'appel la demande de la sci [W] présentée sur le fondement de la garantie d'éviction.

L'ordonnance de clôture est du 16 octobre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

RAPPEL DES STIPULATIONS CONTRACTUELLES

Il a été stipulé en pages 16 et 17 de l'acte de vente du 9 septembre 2010 que :

'RAPPEL DE SERVITUDES :

Aux termes d'un acte reçu par Maître [F], Notaire à [Localité 9] le 17 janvier 2007, dont une copie authentique a été publié au bureau des hypothèques de LES SABLES D OLONNES, le 2mars 2007 volume 2009P, numéro 2284, contenant vente du BIEN par la SCI dénommée « JLR » au profit du VENDEUR, il a été constitué une servitude ci-après littéralement rapportée :

« CONSTITUTION DE SERVITUDE

Servitude de surplomb du compresseur pour climatisation en haut du mut nord, canalisations d'évacuation des eaux usées (toilettes et lavabos) au bas du mur nord

Fonds dominant:

Identification du ou des propriétaire(s) du fonds dominant : Monsieur et Madame [A] acquéreurs aux présentes mma' '

Commune : [Localité 10]

Désignation cadastrale : section AM numéro [Cadastre 1]

Fonds servant :

Identification du ou des propriétaire (s) su fonds servant / la SCI JLR, vendeur aux présentes

Commune : [Localité 10]

Désignation cadastrale : section AM numéro [Cadastre 2]

Origine de propriété :

Fonds dominant : Monsieur et Madame [A] en sont propriétaires par les présentes.

Fonds servant : la SCI JLMR en est propriétaire comme indiqué au paragraphe effet relatif'.

En page 17 de cet acte, il a été stipulé que :

'Aux termes de l'avant-contrat conclu entre les parties, en date aux SABLES D'OLONNE du 10 juillet 2010, il a notamment été stipulé ce qui suit, littéralement rapporté :

Sous le paragraphe « SERVITUDES » :

« Convention particulière :

A titre de convention particulière, les parties conviennent expressément que le VENDEUR devra, à ses frais et sous sa responsabilité, déplacer la sortie de la climatisation côté [Adresse 3] et ce, dans un délai de trois mois à compter du jour de réitération des présentes par acte authentique. »

Sous le paragraphe « CONDITIONS PARTICULIERES » :

« Ient : Le VENDEUR s'engage à faire effectuer les travaux d'obturation des fenêtres donnant sur le jardin dépendant de la propriété voisine, par des pavés de verre translucides.

Ces travaux seront réalisés par le VENDEUR à ses frais et sous sa responsabilité dans les trois mois de la date de réitération des présentes par acte authentique, ainsi qu'il s'y oblige expressément.

IIent : Le VENDEUR déclare sous sa responsabilité que l'ensemble des travaux stipulés à la charge de la SCl dénommée « J.L.R » aux termes de l'acte reçu par Maître [F], Notaire à [Localité 9], le 17 janvier 2007 (fermeture de l'accès au vide sanitaire, travaux de déplacement des compteurs électrique et eaux, obturation des ouvertures), ont bien été réalisés et qu'il n'existe à ce jour aucun compte ni litige entre eux à ce sujet. »

Le VENDEUR déclare réitérer aux présentes les engagements qui précèdent et s'engage expressément à les exécuter ou les faire exécuter dans les trois mois des présentes.

L'ACQUEREUR déclare prendre acte de ces engagements et en faire son affaire personnelle, sans recours contre le notaire soussigné'.

SUR LA RECEVABILITÉ DE L'ACTION

L'article 31 du code de procédure civile dispose que : 'L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé'.

La recevabilité de l'action s'apprécie à la date à laquelle est engagée.

Au cas d'espèce, la sci [W] est propriétaire de la parcelle n° [Cadastre 1]. Son titre stipule à son profit une servitude de surplomb du fonds voisin et un engagement des vendeurs de faire réaliser divers travaux.

La sci [W] a dès lors intérêt et qualité à agir. Son action est en conséquence recevable, indépendamment de son bien fondé.

Le jugement sera pour ces motifs réformé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la sci [W].

SUR L'APPAREIL DE CLIMATISATION

Par courrier en date du 3 juin 2014, le sci [W] Immo a indiqué aux intimés que :

'Comme suite à notre entretien téléphonique de ce jour, et comme acté lors de notre transaction du 9 septembre 2010, nous nous permettons d'attirer votre attention sur votre engagement à procéder à certains aménagements, et, en particulier, de déplacement de la sortie de la climatisation côté [Adresse 3] dans un délai de 3 mois. Or, à ce jour, ces travaux n'ont pas été réalisés'.

Les époux [S] [A] et [K] [C] ont répondu par courrier en date du 10 juin 2014 que :

'Comme suite au courrier daté du 03 juin 2014 et reçu ce matin le 10 juin 2014, je vous confirme que nous avons vendu en septembre 2013 à Madame [O] [I], une maison située au [Adresse 3]

Lorsque nous vous avons vendu le 9 septembre via l'étude de Maitre [F], votre beau frère, nous avions évoqué et ce, à ma demande, le fait de déplacer, à mes frais la sortie de la climatisation coté jardin du [Adresse 4]

bel afin de ne pas générer une gêne, pour nous propriétaire du [Adresse 3], malheureusement la mairie des [Localité 10] n'a pas admis ce déplacement côté rue, nous avons donc laissé le climatiseur côté jardin'.

L'article 11.1.11. Equipements techniques du plan local d'urbanisme dispose que :

'Les équipements techniques (exemple : appareils de climatisation, pompe à chaleur, antennes, paraboles) doivent être parfaitement intégrés à la composition architecturale du bâtiment et être non visibles depuis la ou les voies desservant la parcelle, à hauteur d'homme.

En cas d'impossibilité technique avérée, les antennes et paraboles pourront être tolérées en façade du domaine public mais leur positionnement devra permettre de limiter leur impact visuel.

En aucun cas, les équipements techniques ne seront acceptés en surplomb du domaine public'.

Par courrier en date du 10 septembre 2015, le maire de la commune des [Localité 10] a répondu aux intimés que :

'J'ai bien reçu votre courrier en date du 25 août 2015 qui a retenu toute mon attention.

Vous m'indiquez souhaiter déplacer une équipement de climatisation. Ce type de travaux nécessite le dépôt d'un dossier de Déclaration Préalable de travaux (formulaire joint), en trois exemplaires.

Néanmoins, je vous informe que le règlement du Plan Local d'Urbanisme n'autorise pas les climatiseurs en surplomb ou visibles du domaine public'.

Le premier plan d'occupation des sols a été approuvé le 4 juillet 1980. Il a fait l'objet ainsi que le plan local d'urbanisme postérieur de diverses modifications. La dernière remonte au 6 juin 2015, date d'un jugement de la juridiction administrative.

Il n'est pas justifié aux débats que :

- les dispositions du plan d'occupation des sols puis du plan local d'urbanisme ont été adoptées postérieurement à la vente au profit de la sci [W] ;

- le déplacement tel que convenu de l'appareil de climatisation se justifiait par une impossibilité technique.

Les échanges épistolaires précités établissent que les vendeurs n'ont pas cherché à se soustraire à leurs obligations contractuelles.

Ce plan local d'urbanisme fait obstacle à l'exécution par les vendeurs de leur engagement de déplacer l'appareil de climatisation. Cette inexécution contractuelle n'est dès lors pas fautive.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la sci [W] relatives au déplacement de l'appareil de climatisation.

SUR L'OBTURATION DES FENÊTRES

Maître [H] [M], huissier de justice associé aux [Localité 10], a sur la requête de l'appelante dressé le 24 juillet 2014 un procès-verbal de constat. Elle a indiqué en page 2 que :

'Depuis l'intérieur de l'immeuble de la requérante, je constate dans les pièces du fond, et notamment le bureau, la cuisine et la salle d'eau la présence d'ouvertures donnant en façade arrière vers la propriété de Mme [O]. Je constate que ces ouvertures sont doublées par un vitrage légèrement opaque et tenu par une structure de tasseaux en bois peints reposant sur l'appui de fenêtre.

A cet instant, Monsieur [W] me précise que ces ouvertures auraient dû être fermées par un vitrage en pavés de verre.

Je constate l'absence de pavés de verre au niveau de ces ouvertures'.

Les intimés n'ont pas exécuté leur engagement de faire poser des pavés de verre. Ils ne justifient d'aucun motif de cette inexécution.

Aucune facture des travaux réalisés n'a été produite.

L'engagement des vendeurs avait pour finalité de supprimer les vues droites sur le fonds voisin.

Les vitrages posés par les vendeurs, s'ils semblent avoir rempli cet office, ne sont pas conformes aux prévisions contractuelles.

Le devis en date du 1er mai 2018 de la société MCS a pour objet des travaux de réfection de toilettes, de la salle de pause et d'un bureau. La pose de carreaux de verre n'a été prévue que dans cette dernière pièce. Le coût toutes taxes comprises de la pose de ces pavés est de 1.516,83 €.

La sci [W] est fondée à demander paiement de cette somme.

Il est indifférent que la sci Sceri ait par la suite acquis la propriété de la parcelle n° [Cadastre 2]. Le jugement sera réformé de ce chef.

SUR LA CLAUSE PÉNALE

L'article 1152 du code civil dans sa version applicable au litige dispose que :

' Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite'.

L'acte du 9 septembre 2010 stipule en pages 17 et 18 que :

'Il est expressément convenu qu'au cas où les travaux sus-indiqués ne seraient pas exécutés dans les trois mois des présentes, le VENDEUR s'oblige à régler à L'ACQUEREUR, qui l'accepte, une indemnité forfaitaire de CENT CINQUANTE EUROS (150,00 EUR) par jour de retard à titre de clause pénale sans que cette clause vaille novation de droit ou prorogation de délai, et sans préjudice du droit de L'ACQUEREUR de poursuivre l'exécution des travaux.

Cette indemnité est stipulée non réductible même en cas d'exécution partielle des travaux'.

Le montant de cette pénalité, calculée par jour de retard sans limite de temps, est manifestement excessive.

Son montant sera, par application des dispositions précitées, réduit à 2.500 €.

SUR LES AUTRES DEMANDES DE LA SCI [W]

Celle-ci ne justifie pas de l'inexécution des travaux stipulés à la charge de la sci J.L.R, auteur des intimés et que ces derniers avaint déclaré à l'acte de vente avoir été réalisés.

La sci [W] n'est dès lors pas fondée en ses prétentions. Le jugement sera confirmé de ce chef.

SUR LES DÉPENS

La charge des dépens de première instance et d'appel incombe aux intimés.

SUR LES DEMANDES PRÉSENTÉES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Le premier juge a équitablement apprécié n'y avoir lieu de faire application de ces dispositions.

Il serait par ailleurs inéquitable et préjudiciable aux droits de l'appelante de laisser à sa charge les sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens d'appel. Il sera pour ce motif fait droit à la demande formée de ce chef pour le montant ci-après précisé, incluant le coût du procès-verbal de constat qu'a fait dresser l'appelante.

PAR CES MOTIFS,

statuant dans les limites de l'appel interjeté, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement du 18 janvier 2022 du tribunal judiciaire des Sables-d'Olonne sauf en ce qu'il :

'DÉBOUTE Madame [I] [O] de l'ensemble de ses demandes de dommages et intérêts dirigées contre Monsieur [S] [A] et Madame [K] [C] épouse [A], comme mal fondées ;

DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article700 du code de procédure civile et REJETTE les demandes formées à ce titre ;

DIT n'y avoir lieu d'assortir la présente décision de l'exécution provisoire',

et statuant à nouveau,

CONDAMNE in solidum les époux [S] [A] et [K] [C] à payer à la sci [W] les sommes de :

- 1.516,83 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice matériel ;

- 2.500 € à titre de clause pénale ;

CONDAMNE in solidum les époux [S] [A] et [K] [C] aux dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE in solidum les époux [S] [A] et [K] [C] à payer en cause d'appel à la sci [W] la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,