Décisions
CA Riom, ch. soc., 16 janvier 2024, n° 21/01698
RIOM
Autre
Autre
16 JANVIER 2024
Arrêt n°
FD/SB/NS
Dossier N° RG 21/01698 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FUYP
[F] [U]
/
Association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ venant aux droit de l'Association CLIC LIVRADOIS FOREZ (CLIC)
jugement au fond, origine conseil de prud'hommes - formation paritaire de clermont ferrand, décision attaquée en date du 30 juin 2021, enregistrée sous le n° f 18/00195
Arrêt rendu ce SEIZE JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Sophie NOIR, Conseiller
Mme Frédérique DALLE, Conseiller
En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et de Mme Séverine BOUDRY greffier lors du prononcé
ENTRE :
Mme [F] [U]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Sandrine MARTINET-BEUNIER, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANTE
ET :
Association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ venant aux droit de l'Association CLIC LIVRADOIS FOREZ (CLIC)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Henri ARSAC de la SCP ARSAC, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMEE
Mr RUIN, Président en son rapport après avoir entendu les représentants des parties à l'audience publique du 09 Octobre 2023, la Cour a mis l'affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Madame [F] [U], née le 19 décembre 1988, a été embauchée pour la période du 11 novembre 2009 au 15 novembre 2010 par l'association CLIC LIVRADOIS FOREZ (renommée depuis association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ), en qualité de conseillère en économie sociale et familiale, suivant contrat(s) de travail à durée déterminée, à temps partiel (20 heures hebdomadaires) puis à temps complet.
A compter du 16 novembre 2010, la relation contractuelle s'est poursuivie entre les parties dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, Madame [F] [U] étant employée sur un poste de coordonnateur de santé en gériatrie.
Le 1er janvier 2013, par avenant au contrat de travail, Madame [F] [U] s'est vue attribuer 30 points de coefficient supplémentaires, celle-ci ayant alors bénéficié d'un coefficient majoré à 509 points.
Par avenant au contrat de travail en date du 1er juillet 2013, Madame [F] [U] a été promue au poste de coordinatrice du service CLIC.
Par courrier daté du 14 février 2018, Madame [F] [U] a démissionné de son emploi.
Par requête en date du 3 avril 2018, Madame [F] [U] a saisi le conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND aux fins notamment de voir juger qu'elle bénéficiait du statut cadre, qu'elle a effectué des heures supplémentaires et complémentaires non rémunérées et obtenir les rappels de salaires afférents, outre juger qu'elle a été victime d'une pression psychologique de la part de son employeur et qu'au vu des manquements graves de ce dernier, sa démission est équivoque, requalifier en conséquence ladite démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir l'indemnisation afférente.
L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 14 mai 2018 et, comme suite au constat de l'absence de conciliation, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Par jugement rendu contradictoirement le 30 juin 2021 (audience du 17 mai 2021), le conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND a :
- jugé recevables mais non fondées les demandes présentées par Madame [F] [U] ;
- jugé que la rupture du contrat de travail à l'initiative de la salariée produit les effets d'une démission ;
- débouté Madame [F] [U] de l'ensemble de ses demandes ;
- débouté l'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS de sa demande reconventionnelle ;
- condamné Madame [F] [U] aux dépens.
Par déclaration en date du 26 juillet 2021, Madame [F] [U] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 2 juillet 2021.
Vu les conclusions notifiées à la cour le 12 octobre 2021 par Madame [F] [U],
Vu les conclusions notifiées à la cour le 10 janvier 2022 par l'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ,
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 11 septembre 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières écritures, Madame [F] [U] demande à la cour de :
- juger qu'elle avait le statut cadre au vu des missions exercées et au vu de la CCN applicable, en conséquence, condamner l'employeur à lui verser la somme de 4.866,98 euros brut à titre de rappel de salaire pour un coefficient 532 sur les trois dernières années, incluant les congés payés afférents ;
- juger qu'elle a réalisé des heures supplémentaires et des heures complémentaires qui n'ont pas été rémunérées et en conséquence condamner l'employeur à lui payer la somme de 4.955 euros brut à titre de rappel de salaire pour un coefficient 532 s'agissant des heures supplémentaires non payées en 2016 et des heures complémentaires non payées à compter de novembre 2016 incluant les congés payés afférents, en deniers ou quittance valable, dès lors que le dernier bulletin de salaire mentionne le paiement de la somme de 2.032,62 euros brut au titre des heures supplémentaires ;
- juger qu'elle a été victime d'une pression psychologique exercée dans le cadre de l'exercice de ses fonctions et que l'employeur informé n'a pas agi pour la protéger, manquant ainsi à son obligation de sécurité de résultat ;
- juger qu'au vu des manquements graves de l'employeur, sa démission est équivoque, en conséquence :
- requalifier sa démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et juger que la prise d'acte est fondée, en conséquence requalifier ladite prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- condamner l'employeur à lui verser la somme de 3.770 euros brut au titre de l'indemnité légale de licenciement ;
- condamner l'employeur à lui verser la somme de 4.147 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois en qualité de cadre), congés payés afférents inclus, en deniers et quittance dès lors qu'elle a effectué 12 jours de préavis non rémunéré ;
- condamné l'employeur à lui payer la somme de 3.770 euros au titre de l'article L. 1235-3 du code du travail ;
- juger que l'ensemble des sommes produiront intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement dont il est fait appel ;
- condamner l'employeur à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose tout d'abord avoir été promue le 1er juillet 2013 au poste de coordinatrice du CLIC, que son statut et son coefficient de rémunération sont néanmoins demeurés inchangés et ce alors même que les dispositions conventionnelles applicables à la présente relation contractuelle de travail prévoient au contraire un positionnement au statut cadre. Elle réclame ainsi le rappel de salaire afférent à la reclassification de son emploi.
Elle explique ensuite que son contrat de travail à durée indéterminée prévoyait un temps de travail complet équivalent à 35 heures et qu'à partir de novembre 2016, celui-ci a été ramené à 80%. Elle considère toutefois que nonobstant cette réduction de son temps de travail, elle a continué à effectuer les mêmes tâches et missions qu'auparavant et correspondant à temps plein. Elle soutient par ailleurs que l'employeur ne lui a pas rémunéré les heures complémentaires et supplémentaires ainsi accomplies et réclame le rappel de salaire afférent.
Elle prétend ensuite avoir fait l'objet de harcèlement moral et de pression psychologique et invoque les griefs suivants :
- elle n'a pas bénéficié de la classification conventionnelle correspondant aux missions réellement exercées ;
- elle a été victime d'une différence de traitement s'agissant de son positionnement conventionnel ;
- elle a dû gérer une difficulté administrative dont l'employeur était à la source durant son congé maternité ;
- elle n'a bénéficié d'aucune visite médicale de reprise à l'issue de son congé maternité ;
- elle n'a pas été remplie de l'intégralité de ses droits en matière de salaire ;
- elle n'a régularisé aucun avenant au contrat de travail s'agissant de son passage à temps partiel à 80% ;
- elle a subi une pression psychologique quotidienne de la part de Madame [B], ancienne présidente du CLIC.
Elle prétend que l'employeur était dûment informé de l'ensemble des difficultés ainsi rencontrées dans l'exercice de ses fonctions et considère que sa démission est en conséquence équivoque et doit produire les effets d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, et subséquemment, ceux d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dont elle réclame l'indemnisation.
Dans ses dernières écritures, l'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et condamner Madame [F] [U] à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle objecte tout d'abord, concernant la demande de reclassification présentée par la salariée, que celle-ci ne disposait pas des qualifications nécessaires ni ne répondait aux conditions conventionnelles requises pour bénéficier de complément encadrement. Elle ajoute que dans l'hypothèse où la cour se référerait à la fiche de poste cadre social, comme le fait à tort la salariée, elle ne pourra que constater que Madame [U] a bénéficié d'un coefficient supérieur à celui conventionnellement institué. Elle réfute par ailleurs le bien fondé de la comparaison effectuée par l'appelante avec Madame [I] l'ayant remplacée dans ses fonctions durant son congé maternité au motif que cette dernière ne justifie pas d'un profil et d'expériences professionnelles identiques. Elle conclut ainsi au débouté de la salariée.
Elle fait valoir, s'agissant de la demande de rappel de salaires pour heures supplémentaires, que le calcul produit par la salariée est d'une part inexact en ce qu'elle se contente de multiplier le nombre d'heures revendiqué par le taux horaire et d'en majorer le montant de 10% sans distinction aucune de la nature réelle desdites heures et sans tenir compte de ce que sa durée du travail était calculée sur une moyenne de deux semaines et, d'autre part, imprécis en ce qu'elle s'abstient d'y joindre un décompte détaillé des heures qu'elle prétend avoir réalisées. Elle relève en outre que le montant réclamé par la salariée ne tient pas compte des jours de récupération dont elle a bénéficié ni des heures supplémentaires lui ayant été rémunérées. Elle en déduit que la salariée ne produit aucun élément probant
et considère que celle-ci a été remplie de l'intégralité de ses droits en matière de salaire.
Concernant la démission de la salariée, elle fait valoir l'absence de matérialité des griefs et rappelle que son positionnement hiérarchique et son coefficient conventionnel étaient parfaitement justifiés compte tenu des fonctions réellement exercées, de son expérience professionnelle et diplômes, qu'elle a été remplie de l'ensemble de ses droits en matière de rémunération dès lors que l'ensemble des heures de travail qu'elle a pu accomplir au-delà de son temps contractuel ont donné lieu soit à paiement, soit à récupération. Elle conteste enfin que Madame [F] [U] ait fait l'objet de pression psychologique ou de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral et indique à cet égard avoir toujours accompagné la salariée dans son évolution professionnelle et ce notamment en finançant intégralement son projet de formation à [Localité 5] et que cette dernière ne produit aucun élément probant de nature à objectiver ses propos. Elle considère que la rupture du contrat de travail ne peut que s'analyser en une démission en l'absence de toute faute qu'elle aurait commise et qui aurait été de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.
Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.
MOTIFS
- Sur la classification professionnelle -
En principe, le contrat de travail précise la qualification professionnelle du salarié en référence à la classification fixée par la convention collective applicable dans l'entreprise.
La classification professionnelle d'un salarié dépend des fonctions effectivement exercées.
Il appartient au salarié d'établir que les fonctions qu'il exerce réellement correspondent à la classification revendiquée. Un salarié ne peut pas revendiquer une qualification subordonnée à un diplôme qu'il n'a pas ou à des fonctions qu'il n'exerce pas.
En cas de litige, il appartient au juge d'apprécier les fonctions réellement exercées par le salarié en référence à la classification fixée par la convention collective applicable dans l'entreprise.
Le juge doit appliquer les dispositions des conventions collectives à la lettre et ne peut les dénaturer. Lorsque la convention collective prête à interprétation, le juge fait prévaloir la classification qui se rapproche des fonctions exercées par le salarié. Si l'emploi réellement occupé par le salarié n'est pas prévu par la convention collective applicable, le classement se fait au niveau correspondant au poste le plus proche.
En cas de sous-classement, le salarié doit être replacé de manière rétroactive au niveau de classification et de rémunération auquel son poste correspond. Dans les limites de la prescription extinctive, le salarié peut alors prétendre à un rappel de salaire correspondant au minimum conventionnel afférent à ce coefficient et à des dommages-intérêts s'il justifie d'un préjudice particulier (comme la perte d'une partie de ses droits à retraite).
Madame [U] expose avoir été promue le 1er juillet 2013 au poste de coordinatrice du CLIC, que son statut et son coefficient de rémunération sont néanmoins demeurés inchangés et ce alors même que les dispositions conventionnelles applicables prévoient au contraire un positionnement au statut cadre. Elle réclame ainsi le rappel de salaire afférent à la reclassification de son emploi.
L'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS objecte que la salariée ne disposait pas des qualifications nécessaires ni ne répondait aux conditions conventionnelles requises pour bénéficier du complément encadrement. Elle ajoute que dans l'hypothèse où la cour se référerait à la fiche de poste cadre social, comme le fait à tort la salariée, elle ne pourra que constater que Madame [U] a bénéficié d'un coefficient supérieur à celui conventionnellement institué. Elle réfute par ailleurs le bien fondé de la comparaison effectuée par l'appelante avec Madame [I], qui l'a remplacée dans ses fonctions durant son congé maternité, au motif que cette dernière ne justifie pas d'un profil et d'expériences professionnelles identiques. Elle conclut ainsi au débouté de la salariée.
En l'espèce, Madame [F] [U] a été embauchée pour la période du 11 novembre 2009 au 15 novembre 2010 par l'association CLIC LIVRADOIS FOREZ (renommée depuis association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ), en qualité de conseillère en économie sociale et familiale, suivant contrat(s) de travail à durée déterminée, à temps partiel (20 heures hebdomadaires) puis à temps complet. A compter du 16 novembre 2010, la relation contractuelle s'est poursuivie entre les parties dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, Madame [F] [U] étant employée sur un poste de coordonnateur de santé en gériatrie.
Le 1er janvier 2013, par avenant au contrat de travail, Madame [F] [U] s'est vue attribuer 30 points de coefficient supplémentaires, celle-ci bénéficiant alors d'un coefficient majoré à 509 points.
Par avenant au contrat de travail en date du 1er juillet 2013, Madame [F] [U] a été promue au poste de coordinatrice du service CLIC.
L'annexe II de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 précise la liste des emplois placés dans la catégorie des cadres, liste aux termes de laquelle le métier de 'coordinateur ' n'est pas mentionné.
Cependant, il ressort de la fiche de poste de coordinateur du service CLIC en question, établie par l'employeur, que ledit poste est qualifié comme relevant de celui de 'cadre social'.
La fiche 'cadre social' de la convention collective nationale précise que le cadre social est chargé de la responsabilité et de la coordination des assistants sociaux, du fonctionnement et de l'organisation du service social et que le coefficient de référence trouvant à s'appliquer est de 507.
A titre de disposition spécifique, il est précisé que le cadre social qui a au moins 10 assistants sociaux sous ses ordres ou qui exerce son activité sur plusieurs secteurs géographiques (40.000 à 50.000 habitants ou qui est responsable de l'organisation et du fonctionnement du service départemental) bénéficie d'un complément encadrement de 25 points.
Enfin, l'avenant n° 2010-01 du 12 mars 2010 a créé une fiche métier 'coordonnateur de secteur', qui doit assurer 'la mise en oeuvre et la coordination des activités en mobilisant les ressources nécessaires' et qui doit 'être titulaire d'un diplôme ou d'une certification de niveau III ou avoir une expérience professionnelle reconnue par l'employeur'.
Madame [U], qui bénéficiait d'un coefficient de 509 points depuis le 1er janvier 2013, considère qu'elle devait bénéficier des dispositions de la convention collective nationale applicable relatives aux cadres socio-éducatifs, soit un coefficient de 507 majoré de 25 points, au vu des missions d'encadrement exercées. Elle fait valoir en ce sens qu'alors qu'elle était en congé maternité de mars 2016 à novembre 2016, elle a été remplacée par Madame [I], qui a été recrutée à un niveau cadre avec un coefficient de 507 majoré de 25 points.
Il est constant que Madame [U] bénéficiait d'un coefficient de référence supérieur à celui prévu par la convention collective en ce qui concerne le poste de cadre social, soit un coefficient de 509 au lieu de 507.
Cependant, l'employeur établit qu'elle ne remplissait pas les conditions permettant de percevoir un complément encadrement de 25 points, au vu du nombre de personnes travaillant dans l'équipe, à savoir 5 salariés, et de l'absence d'exercice d'activités sur les secteurs géographiques visés par la convention collective.
Par ailleurs, il résulte des éléments versés à la procédure que Madame [I] avait une expérience plus importante dans le milieu médico-social et était titulaire du certificat d'aptitude aux fonctions d'encadrement et de responsable d'unité d'intervention sociale (CAFERIUS), contrairement à Madame [U], ceci alors que l'employeur fait état de difficultés de recrutement au poste précédemment occupé par cette dernière.
Ces éléments objectifs, à savoir l'expérience professionnelle, le niveau de diplôme ainsi que les difficultés de recrutement de l'employeur au poste en question, sont de nature à justifier de l'application différenciée du complément encadrement de 25 points entre les deux salariées.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que Madame [F] [U] n'est pas fondée à demander la revalorisation de son coefficient ainsi que son rappel de salaire.
- Sur les heures supplémentaires et complémentaires -
Les heures supplémentaires sont les heures de travail effectif accomplies au-delà de la durée hebdomadaire légale (35 heures selon l'article L. 3121-27du code du travail) ou de la durée considérée comme équivalente si elle existe (article L. 3121-28 , ancien L.3121-22).
La durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles (article L. 3121-1 du code du travail).
En matière d'heures supplémentaires, le régime probatoire est fixé par l'article L. 3171-4 du code du travail, en tenant compte des articles L. 3171-2 et L. 3171-3 du code du travail qui déterminent les obligations de l'employeur relatives au décompte du temps de travail.
Il en résulte qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, le juge évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Les heures complémentaires ouvrent droit à une majoration de salaire.
Sauf mise en oeuvre d'un complément d'heures, toutes les heures effectuées au-delà de la durée du travail prévue au contrat de travail à temps partiel en accord avec l'employeur sont des heures complémentaires, qu'elles soient imposées par l'employeur ou réalisées sur la base du volontariat ou prévues par avenant au contrat de travail.
À défaut de stipulation conventionnelle, chaque heure complémentaire accomplie donne lieu à une majoration de salaire égale à 10 % pour chacune des heures complémentaires accomplies dans la limite du dixième des heures prévues au contrat de travail et à 25 % pour chacune des heures accomplies entre le dixième et le tiers des heures prévues au contrat de travail.
Les règles de preuve en matière d'heures complémentaires sont les mêmes que pour les heures supplémentaires.
Madame [U] explique que son contrat de travail à durée indéterminée prévoyait un temps de travail complet équivalent à 35 heures et qu'à partir de novembre 2016, celui-ci a été ramené à 80%. Elle considère toutefois que, nonobstant cette réduction de son temps de travail, elle a continué à effectuer les mêmes tâches et missions qu'auparavant et correspondant à un temps plein. Elle soutient par ailleurs que l'employeur ne lui a pas rémunéré les heures complémentaires et supplémentaires ainsi accomplies et réclame le rappel de salaire afférent.
L'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS réplique que le calcul produit par la salariée est d'une part inexact en ce qu'elle se contente de multiplier le nombre d'heures revendiqué par le taux horaire et d'en majorer le montant de 10% sans distinction aucune de la nature réelle desdites heures et sans tenir compte de ce que sa durée du travail était calculée sur une moyenne de deux semaines et, d'autre part, imprécis en ce qu'elle s'abstient d'y joindre un décompte détaillé des heures qu'elle prétend avoir réalisées. Elle relève en outre que le montant réclamé par la salariée ne tient pas compte des jours de récupération dont elle a bénéficié ni des heures supplémentaires lui ayant été rémunérées. Elle en déduit que la salariée ne produit aucun élément probant et considère que celle-ci a été remplie de l'intégralité de ses droits en matière de salaire.
En l'espèce, il est constant que Madame [U] a bénéficié d'une réduction de son temps de travail à hauteur de 80% à compter du 28 novembre 2016 et que ses horaires étaient répartis de la façon suivante:
- semaine 1: 4 jours x 8 heures, soit 32 heures ;
- semaine 2: 3 jours x 8 heures, soit 24 heures ;
- soit une moyenne de 28 heures sur deux semaines.
La salariée revendique un rappel de 52,25 heures supplémentaires en 2016 non rémunérées, ainsi que de 204,25 heures complémentaires en 2017 non rémunérées.
A l'appui de ses demandes, Madame [U] fournit un tableau récapitulatif mensuel établi par ses soins détaillant les heures complémentaires et supplémentaires non rémunérées. Elle verse également aux débats un tableau complémentaire plus détaillé comportant un calcul journalier et hebdomadaire des heures travaillées par la salariée.
Ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
En réponse, l'employeur fait valoir qu'il ressort des tableaux détaillés fournis par la salariée que celle-ci a bénéficié de nombreuses récupérations sur la période considérée, à savoir 35 heures de récupération en 2016 ainsi que 9 jours (8 heures par jour) de récupération courant 2017: le 20 janvier, le 27 janvier, le 28 février, le 1er mars, le 13 avril, du 26 au 28 avril, le 26 mai, le 2 juin et le 2 août.
L'employeur verse également aux débats le bulletin de salaire du mois de février 2018 de Madame [U], faisant apparaître le paiement de 109,5 heures majorées à 25% pour un montant de 2.032,62 euros, étant précisé que la salariée demande une majoration de 10% sur l'ensemble des heures complémentaires et supplémentaires dont elle fait état.
Ainsi, il convient de considérer, à l'instar de la juridiction de première instance, que les demandes formulées par Madame [U] n'intègrent ni les heures de récupération dont elle a bénéficié, ni le paiement d'heures majorées à 25 % apparaissant au bulletin de salaire pour le mois de février 2018.
Ainsi, au vu de l'ensemble de ces éléments, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [U] de ses demandes de rappels de salaire liés aux heures complémentaires et supplémentaires, ces demandes n'apparaissant pas fondées.
- Sur la rupture du contrat de travail -
Le harcèlement, sexuel ou moral, s'intègre désormais dans une problématique plus vaste, à savoir la prévention des risques psycho-sociaux et la prise en compte juridique de la souffrance au travail.
Aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Le harcèlement moral suppose l'existence d'agissements répétés, peu importe que les agissements soient ou non de même nature, qu'ils se répètent sur une brève période ou soient espacés dans le temps.
En application de l'article L.1154-1 du même code, en cas de litige relatif à l'application de l'article L.1152-1 et de l'article L.1153-1, il appartient au salarié concerné de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié fait connaître à l'employeur sa décision de rompre le contrat de travail. Elle peut être notifiée à tout moment, même en cours d'arrêt de travail pour cause de maladie, et doit répondre à certaines conditions de fond et de forme.
La démission doit avoir été librement consentie, c'est-à-dire que le salarié doit avoir la capacité de démissionner et son consentement ne doit pas avoir été vicié. À défaut, la démission est nulle et la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement abusif. Il appartient au salarié d'apporter la preuve que son consentement a été vicié.
La démission n'est pas librement consentie lorsqu'elle est donnée dans un état psychologique anormal, sous le coup de la colère ou de l'émotion, ou lorsque le salarié n'a pas les capacités intellectuelles pour mesure la portée de son acte. La démission n'est pas librement consentie lorsqu'elle intervient sous la contrainte ou la pression de l'employeur, notamment en cas de menace d'une plainte pénale ou d'un licenciement, lorsque le salarié s'est trouvé dans une situation d'infériorité ou d'intimidation.
La démission doit en outre procéder d'une volonté claire et non équivoque de rompre le contrat de travail. Elle ne peut donc pas se présumer.
La démission est nécessairement équivoque lorsque le salarié énonce, dans la lettre de rupture, les faits qu'il reproche à l'employeur. Même notifiée sans réserve, la démission peut être jugée équivoque si elle est remise en cause dans un délai raisonnable par le salarié et s'il est établi qu'un différend antérieur ou contemporain à la rupture opposait les parties.
La démission du salarié entraîne la rupture automatique et définitive du contrat de travail. Elle marque le point de départ du préavis et n'a pas à être acceptée par l'employeur. Tout licenciement intervenant postérieurement à la démission du salarié est sans effet.
Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission
qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail.
Madame [U] prétend avoir fait l'objet d'un harcèlement moral et de pressions psychologiques de la part de son employeur, ces faits l'ayant conduite à démissionner dans des conditions équivoques. Elle invoque, aux termes de ses dernières conclusions écrites, les griefs suivants:
- elle n'a pas bénéficié de la classification conventionnelle correspondant aux missions réellement exercées ;
- elle a été victime d'une différence de traitement s'agissant de son positionnement conventionnel ;
- elle a dû gérer une difficulté administrative dont l'employeur était à la source durant son congé maternité ;
- elle n'a bénéficié d'aucune visite médicale de reprise à l'issue de son congé maternité ;
- elle n'a pas été remplie de l'intégralité de ses droits en matière de salaire ;
- elle n'a régularisé aucun avenant au contrat de travail s'agissant de son passage à temps partiel à 80% ;
- elle a subi une pression psychologique quotidienne de la part de Madame [B], ancienne présidente du CLIC.
Elle prétend que l'employeur était dûment informé de l'ensemble des difficultés ainsi rencontrées dans l'exercice de ses fonctions et considère que sa démission est en conséquence équivoque et doit produire les effets d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, et subséquemment, ceux d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dont elle réclame l'indemnisation.
L'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS objecte de l'absence de matérialité des griefs qu'elle lui oppose et rappelle que son positionnement hiérarchique et son coefficient conventionnel étaient parfaitement justifiés compte tenu des fonctions réellement exercées, de son expérience professionnelle et diplômes, qu'elle a été remplie de l'ensemble de ses droits en matière de rémunération dès lors que l'ensemble des heures de travail qu'elle a pu accomplir au-delà de son temps contractuel ont donné lieu soit à paiement, soit à récupération. Elle conteste enfin que Madame [F] [U] ait fait l'objet de pression psychologique ou de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral et indique à cet égard avoir toujours accompagné la salariée dans son évolution professionnelle et ce notamment en finançant intégralement son projet de formation à [Localité 5] et que cette dernière ne produit aucun élément probant de nature à objectiver ses propos. Elle considère que la rupture du contrat de travail ne peut que s'analyser en une démission en l'absence de toute faute qu'elle aurait commise et qui aurait été de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.
En l'espèce, aux termes de la lettre de démission adressée à l'employeur par Madame [U] en date du 14 février 2018, cette dernière fait clairement état de sa 'décision de démissionner de [son] poste de Coordinatrice, dans le but de mettre fin au contrat de travail' et de sa volonté 'de ne pas effectuer la totalité du préavis et, par conséquent, de quitter l'Association le 28 février 2018".
Il ressort par ailleurs de la lecture de ladite lettre de démission que Madame [U] fait état du fait que son employeur a refusé sa demande de reclassification à un niveau cadre majoré de 25 points au titre d'un complément d'encadrement, du non-paiement de certaines heures complémentaires et supplémentaires ainsi que d'une 'absence de reconnaissance de [son] travail' et d'une 'attitude méprisante de certains administrateurs à [son] égard.'
La cour ayant déjà retenu que les demandes de la salariée portant sur la reclassification professionnelle et les heures complémentaires et supplémentaires n'étaient pas fondées, ces griefs ne sont pas établis.
Il y a lieu dès lors d'examiner uniquement les autres griefs évoqués par la salariée, à savoir, la gestion d'une difficulté administrative dont l'employeur était à la source durant son congé maternité, l'absence de visite médicale de reprise à l'issue de son congé maternité, l'absence d'un avenant au contrat de travail régularisant son passage à temps partiel à 80% ainsi qu'une pression psychologique quotidienne subie de la part de Madame [B], ancienne présidente du CLIC.
S'agissant de la pression psychologique subie de la part de Madame [B], la salariée produit deux échanges de courriels avec Monsieur [N], président de l'association, en date du 16 mars 2017 et du 30 mars 2017. Il ressort cependant de la lecture desdits courriels que Madame [U], ne met jamais explicitement en cause Madame [B], ancienne présidente du CLIC faisant toujours partie des administrateurs de l'association, mais évoque simplement une 'réunion déstabillisante' et des regrets face à 'l'attitude de certains administrateurs à [son] égard'.
L'absence d'avenant au contrat de travail de la salariée régularisant son passage à temps partiel à 80% ne peut être considérée comme ayant porté préjudice à la salariée dans la mesure où il est constant, et non contesté par la salariée, que le passage à temps partiel à 80% lui a été accordé et mis en place en conformité totale avec les demandes de la salariée (courrier en date du 19 août 2016), selon un format prévoyant une moyenne de travail de 28 heures sur deux semaines.
S'agissant de l'absence de visite médicale de reprise à l'issue de son congé maternité, si Madame [U] établit qu'elle a réclamé l'organisation d'une telle visite par courriel adressé à Monsieur [N] en date du 26 janvier 2017, il est constant que cette situation a été rapidement régularisée, la visite médicale s'étant déroulée le 1er février 2017, et qu'il s'agit d'un fait isolé.
Vu les principes et observations susvisés, la cour considère que Madame [U] ne présente pas des faits matériels, précis et concordants, lesquels, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Les faits invoqués ne permettent donc pas de retenir une faute commise par l'employeur de nature à rendre équivoque la démission de la salariée et de permettre la requalification de ladite démission en une prise d'acte ayant les effets d'une licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de requalification de la démission en une prise d'acte, a dit que la rupture du contrat de travail produisait les effets d'une démission et a débouté Madame [U] de ses demandes indemnitaires afférentes.
- Sur les frais irrrépétibles et les dépens -
Les dispositions du jugement déféré relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance seront confirmées.
En équité, il n'y a pas lieu de prononcer une condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Madame [U], qui succombe en son recours, sera condamnée au paiement des dépens en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Confirme le jugement ;
Y ajoutant,
- Condamne Madame [F] [U] aux dépens d'appel ;
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le Greffier, Le Président,
S. BOUDRY C. RUIN
Arrêt n°
FD/SB/NS
Dossier N° RG 21/01698 - N° Portalis DBVU-V-B7F-FUYP
[F] [U]
/
Association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ venant aux droit de l'Association CLIC LIVRADOIS FOREZ (CLIC)
jugement au fond, origine conseil de prud'hommes - formation paritaire de clermont ferrand, décision attaquée en date du 30 juin 2021, enregistrée sous le n° f 18/00195
Arrêt rendu ce SEIZE JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d'Appel de RIOM, composée lors du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Sophie NOIR, Conseiller
Mme Frédérique DALLE, Conseiller
En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et de Mme Séverine BOUDRY greffier lors du prononcé
ENTRE :
Mme [F] [U]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Sandrine MARTINET-BEUNIER, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANTE
ET :
Association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ venant aux droit de l'Association CLIC LIVRADOIS FOREZ (CLIC)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Henri ARSAC de la SCP ARSAC, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMEE
Mr RUIN, Président en son rapport après avoir entendu les représentants des parties à l'audience publique du 09 Octobre 2023, la Cour a mis l'affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
Madame [F] [U], née le 19 décembre 1988, a été embauchée pour la période du 11 novembre 2009 au 15 novembre 2010 par l'association CLIC LIVRADOIS FOREZ (renommée depuis association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ), en qualité de conseillère en économie sociale et familiale, suivant contrat(s) de travail à durée déterminée, à temps partiel (20 heures hebdomadaires) puis à temps complet.
A compter du 16 novembre 2010, la relation contractuelle s'est poursuivie entre les parties dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, Madame [F] [U] étant employée sur un poste de coordonnateur de santé en gériatrie.
Le 1er janvier 2013, par avenant au contrat de travail, Madame [F] [U] s'est vue attribuer 30 points de coefficient supplémentaires, celle-ci ayant alors bénéficié d'un coefficient majoré à 509 points.
Par avenant au contrat de travail en date du 1er juillet 2013, Madame [F] [U] a été promue au poste de coordinatrice du service CLIC.
Par courrier daté du 14 février 2018, Madame [F] [U] a démissionné de son emploi.
Par requête en date du 3 avril 2018, Madame [F] [U] a saisi le conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND aux fins notamment de voir juger qu'elle bénéficiait du statut cadre, qu'elle a effectué des heures supplémentaires et complémentaires non rémunérées et obtenir les rappels de salaires afférents, outre juger qu'elle a été victime d'une pression psychologique de la part de son employeur et qu'au vu des manquements graves de ce dernier, sa démission est équivoque, requalifier en conséquence ladite démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir l'indemnisation afférente.
L'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation s'est tenue en date du 14 mai 2018 et, comme suite au constat de l'absence de conciliation, l'affaire a été renvoyée devant le bureau de jugement.
Par jugement rendu contradictoirement le 30 juin 2021 (audience du 17 mai 2021), le conseil de prud'hommes de CLERMONT-FERRAND a :
- jugé recevables mais non fondées les demandes présentées par Madame [F] [U] ;
- jugé que la rupture du contrat de travail à l'initiative de la salariée produit les effets d'une démission ;
- débouté Madame [F] [U] de l'ensemble de ses demandes ;
- débouté l'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS de sa demande reconventionnelle ;
- condamné Madame [F] [U] aux dépens.
Par déclaration en date du 26 juillet 2021, Madame [F] [U] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié à sa personne le 2 juillet 2021.
Vu les conclusions notifiées à la cour le 12 octobre 2021 par Madame [F] [U],
Vu les conclusions notifiées à la cour le 10 janvier 2022 par l'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ,
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 11 septembre 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières écritures, Madame [F] [U] demande à la cour de :
- juger qu'elle avait le statut cadre au vu des missions exercées et au vu de la CCN applicable, en conséquence, condamner l'employeur à lui verser la somme de 4.866,98 euros brut à titre de rappel de salaire pour un coefficient 532 sur les trois dernières années, incluant les congés payés afférents ;
- juger qu'elle a réalisé des heures supplémentaires et des heures complémentaires qui n'ont pas été rémunérées et en conséquence condamner l'employeur à lui payer la somme de 4.955 euros brut à titre de rappel de salaire pour un coefficient 532 s'agissant des heures supplémentaires non payées en 2016 et des heures complémentaires non payées à compter de novembre 2016 incluant les congés payés afférents, en deniers ou quittance valable, dès lors que le dernier bulletin de salaire mentionne le paiement de la somme de 2.032,62 euros brut au titre des heures supplémentaires ;
- juger qu'elle a été victime d'une pression psychologique exercée dans le cadre de l'exercice de ses fonctions et que l'employeur informé n'a pas agi pour la protéger, manquant ainsi à son obligation de sécurité de résultat ;
- juger qu'au vu des manquements graves de l'employeur, sa démission est équivoque, en conséquence :
- requalifier sa démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et juger que la prise d'acte est fondée, en conséquence requalifier ladite prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- condamner l'employeur à lui verser la somme de 3.770 euros brut au titre de l'indemnité légale de licenciement ;
- condamner l'employeur à lui verser la somme de 4.147 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis (2 mois en qualité de cadre), congés payés afférents inclus, en deniers et quittance dès lors qu'elle a effectué 12 jours de préavis non rémunéré ;
- condamné l'employeur à lui payer la somme de 3.770 euros au titre de l'article L. 1235-3 du code du travail ;
- juger que l'ensemble des sommes produiront intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement dont il est fait appel ;
- condamner l'employeur à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose tout d'abord avoir été promue le 1er juillet 2013 au poste de coordinatrice du CLIC, que son statut et son coefficient de rémunération sont néanmoins demeurés inchangés et ce alors même que les dispositions conventionnelles applicables à la présente relation contractuelle de travail prévoient au contraire un positionnement au statut cadre. Elle réclame ainsi le rappel de salaire afférent à la reclassification de son emploi.
Elle explique ensuite que son contrat de travail à durée indéterminée prévoyait un temps de travail complet équivalent à 35 heures et qu'à partir de novembre 2016, celui-ci a été ramené à 80%. Elle considère toutefois que nonobstant cette réduction de son temps de travail, elle a continué à effectuer les mêmes tâches et missions qu'auparavant et correspondant à temps plein. Elle soutient par ailleurs que l'employeur ne lui a pas rémunéré les heures complémentaires et supplémentaires ainsi accomplies et réclame le rappel de salaire afférent.
Elle prétend ensuite avoir fait l'objet de harcèlement moral et de pression psychologique et invoque les griefs suivants :
- elle n'a pas bénéficié de la classification conventionnelle correspondant aux missions réellement exercées ;
- elle a été victime d'une différence de traitement s'agissant de son positionnement conventionnel ;
- elle a dû gérer une difficulté administrative dont l'employeur était à la source durant son congé maternité ;
- elle n'a bénéficié d'aucune visite médicale de reprise à l'issue de son congé maternité ;
- elle n'a pas été remplie de l'intégralité de ses droits en matière de salaire ;
- elle n'a régularisé aucun avenant au contrat de travail s'agissant de son passage à temps partiel à 80% ;
- elle a subi une pression psychologique quotidienne de la part de Madame [B], ancienne présidente du CLIC.
Elle prétend que l'employeur était dûment informé de l'ensemble des difficultés ainsi rencontrées dans l'exercice de ses fonctions et considère que sa démission est en conséquence équivoque et doit produire les effets d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, et subséquemment, ceux d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dont elle réclame l'indemnisation.
Dans ses dernières écritures, l'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et condamner Madame [F] [U] à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle objecte tout d'abord, concernant la demande de reclassification présentée par la salariée, que celle-ci ne disposait pas des qualifications nécessaires ni ne répondait aux conditions conventionnelles requises pour bénéficier de complément encadrement. Elle ajoute que dans l'hypothèse où la cour se référerait à la fiche de poste cadre social, comme le fait à tort la salariée, elle ne pourra que constater que Madame [U] a bénéficié d'un coefficient supérieur à celui conventionnellement institué. Elle réfute par ailleurs le bien fondé de la comparaison effectuée par l'appelante avec Madame [I] l'ayant remplacée dans ses fonctions durant son congé maternité au motif que cette dernière ne justifie pas d'un profil et d'expériences professionnelles identiques. Elle conclut ainsi au débouté de la salariée.
Elle fait valoir, s'agissant de la demande de rappel de salaires pour heures supplémentaires, que le calcul produit par la salariée est d'une part inexact en ce qu'elle se contente de multiplier le nombre d'heures revendiqué par le taux horaire et d'en majorer le montant de 10% sans distinction aucune de la nature réelle desdites heures et sans tenir compte de ce que sa durée du travail était calculée sur une moyenne de deux semaines et, d'autre part, imprécis en ce qu'elle s'abstient d'y joindre un décompte détaillé des heures qu'elle prétend avoir réalisées. Elle relève en outre que le montant réclamé par la salariée ne tient pas compte des jours de récupération dont elle a bénéficié ni des heures supplémentaires lui ayant été rémunérées. Elle en déduit que la salariée ne produit aucun élément probant
et considère que celle-ci a été remplie de l'intégralité de ses droits en matière de salaire.
Concernant la démission de la salariée, elle fait valoir l'absence de matérialité des griefs et rappelle que son positionnement hiérarchique et son coefficient conventionnel étaient parfaitement justifiés compte tenu des fonctions réellement exercées, de son expérience professionnelle et diplômes, qu'elle a été remplie de l'ensemble de ses droits en matière de rémunération dès lors que l'ensemble des heures de travail qu'elle a pu accomplir au-delà de son temps contractuel ont donné lieu soit à paiement, soit à récupération. Elle conteste enfin que Madame [F] [U] ait fait l'objet de pression psychologique ou de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral et indique à cet égard avoir toujours accompagné la salariée dans son évolution professionnelle et ce notamment en finançant intégralement son projet de formation à [Localité 5] et que cette dernière ne produit aucun élément probant de nature à objectiver ses propos. Elle considère que la rupture du contrat de travail ne peut que s'analyser en une démission en l'absence de toute faute qu'elle aurait commise et qui aurait été de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.
Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.
MOTIFS
- Sur la classification professionnelle -
En principe, le contrat de travail précise la qualification professionnelle du salarié en référence à la classification fixée par la convention collective applicable dans l'entreprise.
La classification professionnelle d'un salarié dépend des fonctions effectivement exercées.
Il appartient au salarié d'établir que les fonctions qu'il exerce réellement correspondent à la classification revendiquée. Un salarié ne peut pas revendiquer une qualification subordonnée à un diplôme qu'il n'a pas ou à des fonctions qu'il n'exerce pas.
En cas de litige, il appartient au juge d'apprécier les fonctions réellement exercées par le salarié en référence à la classification fixée par la convention collective applicable dans l'entreprise.
Le juge doit appliquer les dispositions des conventions collectives à la lettre et ne peut les dénaturer. Lorsque la convention collective prête à interprétation, le juge fait prévaloir la classification qui se rapproche des fonctions exercées par le salarié. Si l'emploi réellement occupé par le salarié n'est pas prévu par la convention collective applicable, le classement se fait au niveau correspondant au poste le plus proche.
En cas de sous-classement, le salarié doit être replacé de manière rétroactive au niveau de classification et de rémunération auquel son poste correspond. Dans les limites de la prescription extinctive, le salarié peut alors prétendre à un rappel de salaire correspondant au minimum conventionnel afférent à ce coefficient et à des dommages-intérêts s'il justifie d'un préjudice particulier (comme la perte d'une partie de ses droits à retraite).
Madame [U] expose avoir été promue le 1er juillet 2013 au poste de coordinatrice du CLIC, que son statut et son coefficient de rémunération sont néanmoins demeurés inchangés et ce alors même que les dispositions conventionnelles applicables prévoient au contraire un positionnement au statut cadre. Elle réclame ainsi le rappel de salaire afférent à la reclassification de son emploi.
L'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS objecte que la salariée ne disposait pas des qualifications nécessaires ni ne répondait aux conditions conventionnelles requises pour bénéficier du complément encadrement. Elle ajoute que dans l'hypothèse où la cour se référerait à la fiche de poste cadre social, comme le fait à tort la salariée, elle ne pourra que constater que Madame [U] a bénéficié d'un coefficient supérieur à celui conventionnellement institué. Elle réfute par ailleurs le bien fondé de la comparaison effectuée par l'appelante avec Madame [I], qui l'a remplacée dans ses fonctions durant son congé maternité, au motif que cette dernière ne justifie pas d'un profil et d'expériences professionnelles identiques. Elle conclut ainsi au débouté de la salariée.
En l'espèce, Madame [F] [U] a été embauchée pour la période du 11 novembre 2009 au 15 novembre 2010 par l'association CLIC LIVRADOIS FOREZ (renommée depuis association AUTONOMIE EN LIVRADOIS FOREZ), en qualité de conseillère en économie sociale et familiale, suivant contrat(s) de travail à durée déterminée, à temps partiel (20 heures hebdomadaires) puis à temps complet. A compter du 16 novembre 2010, la relation contractuelle s'est poursuivie entre les parties dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, Madame [F] [U] étant employée sur un poste de coordonnateur de santé en gériatrie.
Le 1er janvier 2013, par avenant au contrat de travail, Madame [F] [U] s'est vue attribuer 30 points de coefficient supplémentaires, celle-ci bénéficiant alors d'un coefficient majoré à 509 points.
Par avenant au contrat de travail en date du 1er juillet 2013, Madame [F] [U] a été promue au poste de coordinatrice du service CLIC.
L'annexe II de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 précise la liste des emplois placés dans la catégorie des cadres, liste aux termes de laquelle le métier de 'coordinateur ' n'est pas mentionné.
Cependant, il ressort de la fiche de poste de coordinateur du service CLIC en question, établie par l'employeur, que ledit poste est qualifié comme relevant de celui de 'cadre social'.
La fiche 'cadre social' de la convention collective nationale précise que le cadre social est chargé de la responsabilité et de la coordination des assistants sociaux, du fonctionnement et de l'organisation du service social et que le coefficient de référence trouvant à s'appliquer est de 507.
A titre de disposition spécifique, il est précisé que le cadre social qui a au moins 10 assistants sociaux sous ses ordres ou qui exerce son activité sur plusieurs secteurs géographiques (40.000 à 50.000 habitants ou qui est responsable de l'organisation et du fonctionnement du service départemental) bénéficie d'un complément encadrement de 25 points.
Enfin, l'avenant n° 2010-01 du 12 mars 2010 a créé une fiche métier 'coordonnateur de secteur', qui doit assurer 'la mise en oeuvre et la coordination des activités en mobilisant les ressources nécessaires' et qui doit 'être titulaire d'un diplôme ou d'une certification de niveau III ou avoir une expérience professionnelle reconnue par l'employeur'.
Madame [U], qui bénéficiait d'un coefficient de 509 points depuis le 1er janvier 2013, considère qu'elle devait bénéficier des dispositions de la convention collective nationale applicable relatives aux cadres socio-éducatifs, soit un coefficient de 507 majoré de 25 points, au vu des missions d'encadrement exercées. Elle fait valoir en ce sens qu'alors qu'elle était en congé maternité de mars 2016 à novembre 2016, elle a été remplacée par Madame [I], qui a été recrutée à un niveau cadre avec un coefficient de 507 majoré de 25 points.
Il est constant que Madame [U] bénéficiait d'un coefficient de référence supérieur à celui prévu par la convention collective en ce qui concerne le poste de cadre social, soit un coefficient de 509 au lieu de 507.
Cependant, l'employeur établit qu'elle ne remplissait pas les conditions permettant de percevoir un complément encadrement de 25 points, au vu du nombre de personnes travaillant dans l'équipe, à savoir 5 salariés, et de l'absence d'exercice d'activités sur les secteurs géographiques visés par la convention collective.
Par ailleurs, il résulte des éléments versés à la procédure que Madame [I] avait une expérience plus importante dans le milieu médico-social et était titulaire du certificat d'aptitude aux fonctions d'encadrement et de responsable d'unité d'intervention sociale (CAFERIUS), contrairement à Madame [U], ceci alors que l'employeur fait état de difficultés de recrutement au poste précédemment occupé par cette dernière.
Ces éléments objectifs, à savoir l'expérience professionnelle, le niveau de diplôme ainsi que les difficultés de recrutement de l'employeur au poste en question, sont de nature à justifier de l'application différenciée du complément encadrement de 25 points entre les deux salariées.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que Madame [F] [U] n'est pas fondée à demander la revalorisation de son coefficient ainsi que son rappel de salaire.
- Sur les heures supplémentaires et complémentaires -
Les heures supplémentaires sont les heures de travail effectif accomplies au-delà de la durée hebdomadaire légale (35 heures selon l'article L. 3121-27du code du travail) ou de la durée considérée comme équivalente si elle existe (article L. 3121-28 , ancien L.3121-22).
La durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles (article L. 3121-1 du code du travail).
En matière d'heures supplémentaires, le régime probatoire est fixé par l'article L. 3171-4 du code du travail, en tenant compte des articles L. 3171-2 et L. 3171-3 du code du travail qui déterminent les obligations de l'employeur relatives au décompte du temps de travail.
Il en résulte qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, le juge évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Les heures complémentaires ouvrent droit à une majoration de salaire.
Sauf mise en oeuvre d'un complément d'heures, toutes les heures effectuées au-delà de la durée du travail prévue au contrat de travail à temps partiel en accord avec l'employeur sont des heures complémentaires, qu'elles soient imposées par l'employeur ou réalisées sur la base du volontariat ou prévues par avenant au contrat de travail.
À défaut de stipulation conventionnelle, chaque heure complémentaire accomplie donne lieu à une majoration de salaire égale à 10 % pour chacune des heures complémentaires accomplies dans la limite du dixième des heures prévues au contrat de travail et à 25 % pour chacune des heures accomplies entre le dixième et le tiers des heures prévues au contrat de travail.
Les règles de preuve en matière d'heures complémentaires sont les mêmes que pour les heures supplémentaires.
Madame [U] explique que son contrat de travail à durée indéterminée prévoyait un temps de travail complet équivalent à 35 heures et qu'à partir de novembre 2016, celui-ci a été ramené à 80%. Elle considère toutefois que, nonobstant cette réduction de son temps de travail, elle a continué à effectuer les mêmes tâches et missions qu'auparavant et correspondant à un temps plein. Elle soutient par ailleurs que l'employeur ne lui a pas rémunéré les heures complémentaires et supplémentaires ainsi accomplies et réclame le rappel de salaire afférent.
L'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS réplique que le calcul produit par la salariée est d'une part inexact en ce qu'elle se contente de multiplier le nombre d'heures revendiqué par le taux horaire et d'en majorer le montant de 10% sans distinction aucune de la nature réelle desdites heures et sans tenir compte de ce que sa durée du travail était calculée sur une moyenne de deux semaines et, d'autre part, imprécis en ce qu'elle s'abstient d'y joindre un décompte détaillé des heures qu'elle prétend avoir réalisées. Elle relève en outre que le montant réclamé par la salariée ne tient pas compte des jours de récupération dont elle a bénéficié ni des heures supplémentaires lui ayant été rémunérées. Elle en déduit que la salariée ne produit aucun élément probant et considère que celle-ci a été remplie de l'intégralité de ses droits en matière de salaire.
En l'espèce, il est constant que Madame [U] a bénéficié d'une réduction de son temps de travail à hauteur de 80% à compter du 28 novembre 2016 et que ses horaires étaient répartis de la façon suivante:
- semaine 1: 4 jours x 8 heures, soit 32 heures ;
- semaine 2: 3 jours x 8 heures, soit 24 heures ;
- soit une moyenne de 28 heures sur deux semaines.
La salariée revendique un rappel de 52,25 heures supplémentaires en 2016 non rémunérées, ainsi que de 204,25 heures complémentaires en 2017 non rémunérées.
A l'appui de ses demandes, Madame [U] fournit un tableau récapitulatif mensuel établi par ses soins détaillant les heures complémentaires et supplémentaires non rémunérées. Elle verse également aux débats un tableau complémentaire plus détaillé comportant un calcul journalier et hebdomadaire des heures travaillées par la salariée.
Ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
En réponse, l'employeur fait valoir qu'il ressort des tableaux détaillés fournis par la salariée que celle-ci a bénéficié de nombreuses récupérations sur la période considérée, à savoir 35 heures de récupération en 2016 ainsi que 9 jours (8 heures par jour) de récupération courant 2017: le 20 janvier, le 27 janvier, le 28 février, le 1er mars, le 13 avril, du 26 au 28 avril, le 26 mai, le 2 juin et le 2 août.
L'employeur verse également aux débats le bulletin de salaire du mois de février 2018 de Madame [U], faisant apparaître le paiement de 109,5 heures majorées à 25% pour un montant de 2.032,62 euros, étant précisé que la salariée demande une majoration de 10% sur l'ensemble des heures complémentaires et supplémentaires dont elle fait état.
Ainsi, il convient de considérer, à l'instar de la juridiction de première instance, que les demandes formulées par Madame [U] n'intègrent ni les heures de récupération dont elle a bénéficié, ni le paiement d'heures majorées à 25 % apparaissant au bulletin de salaire pour le mois de février 2018.
Ainsi, au vu de l'ensemble de ces éléments, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté Madame [U] de ses demandes de rappels de salaire liés aux heures complémentaires et supplémentaires, ces demandes n'apparaissant pas fondées.
- Sur la rupture du contrat de travail -
Le harcèlement, sexuel ou moral, s'intègre désormais dans une problématique plus vaste, à savoir la prévention des risques psycho-sociaux et la prise en compte juridique de la souffrance au travail.
Aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Le harcèlement moral suppose l'existence d'agissements répétés, peu importe que les agissements soient ou non de même nature, qu'ils se répètent sur une brève période ou soient espacés dans le temps.
En application de l'article L.1154-1 du même code, en cas de litige relatif à l'application de l'article L.1152-1 et de l'article L.1153-1, il appartient au salarié concerné de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié fait connaître à l'employeur sa décision de rompre le contrat de travail. Elle peut être notifiée à tout moment, même en cours d'arrêt de travail pour cause de maladie, et doit répondre à certaines conditions de fond et de forme.
La démission doit avoir été librement consentie, c'est-à-dire que le salarié doit avoir la capacité de démissionner et son consentement ne doit pas avoir été vicié. À défaut, la démission est nulle et la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement abusif. Il appartient au salarié d'apporter la preuve que son consentement a été vicié.
La démission n'est pas librement consentie lorsqu'elle est donnée dans un état psychologique anormal, sous le coup de la colère ou de l'émotion, ou lorsque le salarié n'a pas les capacités intellectuelles pour mesure la portée de son acte. La démission n'est pas librement consentie lorsqu'elle intervient sous la contrainte ou la pression de l'employeur, notamment en cas de menace d'une plainte pénale ou d'un licenciement, lorsque le salarié s'est trouvé dans une situation d'infériorité ou d'intimidation.
La démission doit en outre procéder d'une volonté claire et non équivoque de rompre le contrat de travail. Elle ne peut donc pas se présumer.
La démission est nécessairement équivoque lorsque le salarié énonce, dans la lettre de rupture, les faits qu'il reproche à l'employeur. Même notifiée sans réserve, la démission peut être jugée équivoque si elle est remise en cause dans un délai raisonnable par le salarié et s'il est établi qu'un différend antérieur ou contemporain à la rupture opposait les parties.
La démission du salarié entraîne la rupture automatique et définitive du contrat de travail. Elle marque le point de départ du préavis et n'a pas à être acceptée par l'employeur. Tout licenciement intervenant postérieurement à la démission du salarié est sans effet.
Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission
qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail.
Madame [U] prétend avoir fait l'objet d'un harcèlement moral et de pressions psychologiques de la part de son employeur, ces faits l'ayant conduite à démissionner dans des conditions équivoques. Elle invoque, aux termes de ses dernières conclusions écrites, les griefs suivants:
- elle n'a pas bénéficié de la classification conventionnelle correspondant aux missions réellement exercées ;
- elle a été victime d'une différence de traitement s'agissant de son positionnement conventionnel ;
- elle a dû gérer une difficulté administrative dont l'employeur était à la source durant son congé maternité ;
- elle n'a bénéficié d'aucune visite médicale de reprise à l'issue de son congé maternité ;
- elle n'a pas été remplie de l'intégralité de ses droits en matière de salaire ;
- elle n'a régularisé aucun avenant au contrat de travail s'agissant de son passage à temps partiel à 80% ;
- elle a subi une pression psychologique quotidienne de la part de Madame [B], ancienne présidente du CLIC.
Elle prétend que l'employeur était dûment informé de l'ensemble des difficultés ainsi rencontrées dans l'exercice de ses fonctions et considère que sa démission est en conséquence équivoque et doit produire les effets d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, et subséquemment, ceux d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dont elle réclame l'indemnisation.
L'association AUTONOMIE EN LIVRADOIS objecte de l'absence de matérialité des griefs qu'elle lui oppose et rappelle que son positionnement hiérarchique et son coefficient conventionnel étaient parfaitement justifiés compte tenu des fonctions réellement exercées, de son expérience professionnelle et diplômes, qu'elle a été remplie de l'ensemble de ses droits en matière de rémunération dès lors que l'ensemble des heures de travail qu'elle a pu accomplir au-delà de son temps contractuel ont donné lieu soit à paiement, soit à récupération. Elle conteste enfin que Madame [F] [U] ait fait l'objet de pression psychologique ou de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral et indique à cet égard avoir toujours accompagné la salariée dans son évolution professionnelle et ce notamment en finançant intégralement son projet de formation à [Localité 5] et que cette dernière ne produit aucun élément probant de nature à objectiver ses propos. Elle considère que la rupture du contrat de travail ne peut que s'analyser en une démission en l'absence de toute faute qu'elle aurait commise et qui aurait été de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.
En l'espèce, aux termes de la lettre de démission adressée à l'employeur par Madame [U] en date du 14 février 2018, cette dernière fait clairement état de sa 'décision de démissionner de [son] poste de Coordinatrice, dans le but de mettre fin au contrat de travail' et de sa volonté 'de ne pas effectuer la totalité du préavis et, par conséquent, de quitter l'Association le 28 février 2018".
Il ressort par ailleurs de la lecture de ladite lettre de démission que Madame [U] fait état du fait que son employeur a refusé sa demande de reclassification à un niveau cadre majoré de 25 points au titre d'un complément d'encadrement, du non-paiement de certaines heures complémentaires et supplémentaires ainsi que d'une 'absence de reconnaissance de [son] travail' et d'une 'attitude méprisante de certains administrateurs à [son] égard.'
La cour ayant déjà retenu que les demandes de la salariée portant sur la reclassification professionnelle et les heures complémentaires et supplémentaires n'étaient pas fondées, ces griefs ne sont pas établis.
Il y a lieu dès lors d'examiner uniquement les autres griefs évoqués par la salariée, à savoir, la gestion d'une difficulté administrative dont l'employeur était à la source durant son congé maternité, l'absence de visite médicale de reprise à l'issue de son congé maternité, l'absence d'un avenant au contrat de travail régularisant son passage à temps partiel à 80% ainsi qu'une pression psychologique quotidienne subie de la part de Madame [B], ancienne présidente du CLIC.
S'agissant de la pression psychologique subie de la part de Madame [B], la salariée produit deux échanges de courriels avec Monsieur [N], président de l'association, en date du 16 mars 2017 et du 30 mars 2017. Il ressort cependant de la lecture desdits courriels que Madame [U], ne met jamais explicitement en cause Madame [B], ancienne présidente du CLIC faisant toujours partie des administrateurs de l'association, mais évoque simplement une 'réunion déstabillisante' et des regrets face à 'l'attitude de certains administrateurs à [son] égard'.
L'absence d'avenant au contrat de travail de la salariée régularisant son passage à temps partiel à 80% ne peut être considérée comme ayant porté préjudice à la salariée dans la mesure où il est constant, et non contesté par la salariée, que le passage à temps partiel à 80% lui a été accordé et mis en place en conformité totale avec les demandes de la salariée (courrier en date du 19 août 2016), selon un format prévoyant une moyenne de travail de 28 heures sur deux semaines.
S'agissant de l'absence de visite médicale de reprise à l'issue de son congé maternité, si Madame [U] établit qu'elle a réclamé l'organisation d'une telle visite par courriel adressé à Monsieur [N] en date du 26 janvier 2017, il est constant que cette situation a été rapidement régularisée, la visite médicale s'étant déroulée le 1er février 2017, et qu'il s'agit d'un fait isolé.
Vu les principes et observations susvisés, la cour considère que Madame [U] ne présente pas des faits matériels, précis et concordants, lesquels, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Les faits invoqués ne permettent donc pas de retenir une faute commise par l'employeur de nature à rendre équivoque la démission de la salariée et de permettre la requalification de ladite démission en une prise d'acte ayant les effets d'une licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de requalification de la démission en une prise d'acte, a dit que la rupture du contrat de travail produisait les effets d'une démission et a débouté Madame [U] de ses demandes indemnitaires afférentes.
- Sur les frais irrrépétibles et les dépens -
Les dispositions du jugement déféré relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance seront confirmées.
En équité, il n'y a pas lieu de prononcer une condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Madame [U], qui succombe en son recours, sera condamnée au paiement des dépens en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
- Confirme le jugement ;
Y ajoutant,
- Condamne Madame [F] [U] aux dépens d'appel ;
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le Greffier, Le Président,
S. BOUDRY C. RUIN