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Décisions

CA Besançon, 1re ch., 6 février 2024, n° 23/01099

BESANÇON

Arrêt

Autre

CA Besançon n° 23/01099

6 février 2024

Le copies exécutoires et conformes délivrées à

CS/FA

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Minute n°

N° de rôle : N° RG 23/01099 - N° Portalis DBVG-V-B7H-EU6P

COUR D'APPEL DE BESANÇON

1ère chambre civile et commerciale

ARRÊT DU 06 FEVRIER 2024

Décision déférée à la Cour : jugement du 27 juin 2023 - RG N°R22-4242 - TRIBUNAL DE COMMERCE DE BELFORT

Code affaire : 50B - Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

COMPOSITION DE LA COUR :

M. Cédric SAUNIER, conseiller, président d'audience

Madame Anne-Sophie WILLM, conseiller

Greffier : Mme Fabienne ARNOUX, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.

DEBATS :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 décembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés devant M. Cédric SAUNIER, conseiller, président de l'audience qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour.

LORS DU DELIBERE :

Monsieur M. Cédric SAUNIER, conseiller, président de l'audience, a rendu compte conformément à l'article 786 du code de procédure civile aux autres magistrats :

Monsieur Michel Wachter, président de chambre, et Madame Anne-Sophie WILLM, conseiller.

L'affaire oppose :

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

SARL IMMOBILIERE SAINT-GEORGES agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice

Sise [Adresse 1]

Inscrite au RCS de Paris sous le numéro 492 651 567

Représentée par Me Ludovic PAUTHIER de la SCP DUMONT - PAUTHIER, avocat au barreau de BESANCON, avocat postulant

Représentée par Me Pascal-André GERINIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ET :

INTIMÉS

Monsieur [X] [W]

né le 15 Novembre 1949 à [Localité 5], de nationalité française,

demeurant [Adresse 9]

Représenté par Me Alexandre BERGELIN, avocat au barreau de MONTBELIARD

Monsieur [P] [G]

né le 03 Février 1983 à [Localité 4], de nationalité française,

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Alexandre BERGELIN, avocat au barreau de MONTBELIARD

S.A.S L'ECRIN Venant aux droits de la société HABITAT RESIDENCES 21

[Adresse 10]

Inscrite au RCS de Belfort sous le numéro 428 905 707

Représentée par Me Alexandre BERGELIN, avocat au barreau de MONTBELIARD

S.A.R.L IMMO PRO

Sise [Adresse 3]

Inscrite au RCS de Belfort sous le numéro 792 054 470

Représentée par Me Alexandre BERGELIN, avocat au barreau de MONTBELIARD

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Michel Wachter, président de chambre et par Mme Fabienne ARNOUX, greffier lors du prononcé.

*************

Faits, procédure et prétentions des parties

La SARL Avac Immobilier, ayant pour actionnaires la SARL Holding [G], détenue intégralement par son président M. [P] [G] ainsi que la SAS L'Ecrin, détenue par M. [X] [W] Mme [N] [Z] épouse [W], M. [P] [W] et M. [R] [W], a acquis l'ensemble immobilier constituant l'ancien hôpital de [Localité 8] dans l'objectif de réaliser une résidence spécialisée.

Au cours de l'année 2018, la société Avac Immobilier est entrée en relation avec la SARL Immobilière Saint-Georges dans le cadre du projet de changement de destination de l'ensemble immobilier et de la vente des murs et la mise en location du bien auprès d'un gestionnaire professionnel spécialisé dans le secteur des résidences services.

Dans ce cadre, ont fait l'objet d'échanges entre les parties :

- d'une part un document intitulé 'mandat sans exclusivité de location de bien immobilier', prévoyant une rémunération à hauteur de 30 % hors taxes du loyer annuel hors taxes conclu avec le locataire, soit prévisionnellement la somme de 221 333 euros hors taxes sur la base d'un montant de 135 euros par mètre carré appliqué à une surface de 5 465 mètres carrés payable dès la conclusion du bail ;

- d'autre part un document intitulé 'mandat de vente sans exclusivité' prévoyant une rémunération forfaitaire à hauteur de 350 000 euros hors taxes.

Les sociétés Avac Immobilier et Immobilière Saint-Georges ont notamment engagé des discussions relatives à la SAS Villavie en qualité de potentiel partenaire.

Par l'intermédiaire de la SARL Immo Pro [Localité 6], exerçant sous l'enseigne Laforêt et ayant pour associés M. [G], la société L'Ecrin et la SAS Holding Bernardot, la société Avac Immobilier a finalement cédé le 30 septembre 2019 une partie de l'ensemble immobilier, notamment celle dédiée au projet de résidence spécialisée, à la SA Habitat résidences 21 dirigée par M. [X] [W], laquelle a ensuite transmis l'intégralité de son patrimoine à la société L'Ecrin selon traité de fusion-absorption à effet au 02 mars 2021 enregistré le 22 mars suivant.

Puis, toujours par l'intermédiaire de la même agence immobilière, la SCCV Pierval Santé a acquis le 16 octobre 2019 l'ensemble des bâtiments auprès de la société [Adresse 7] et en a confié l'exploitation à la société Villavie.

La société Immobilière Saint-Georges, estimant avoir été évincée de l'opération dans l'objectif de la priver de sa rémunération contractuelle au titre de l'assistance à maîtrise d'ouvrage et de la commercialisation a engagé une procédure à l'encontre de la société Avac Immobilier devant le tribunal de commerce de Belfort par assignation délivrée le 26 novembre 2021.

Par ailleurs, la société Immobilière Saint-Georges a, par actes délivrés le 16 décembre 2022, assigné en intervention forcée devant le tribunal de commerce de Belfort les sociétés L'Ecrin et Immo Pro [Localité 6] ainsi que MM. [X] [W] et [G], en sollicitant, au visa de l'article, 331 du code de procédure civile, la jonction avec la procédure introduite à l'encontre de la société Avac immobilier, outre la condamnation in solidum de l'ensemble des susnommés à lui payer, outre les dépens et au bénéfice de l'exécution provisoire :

- à titre principal, 'au titre de sa responsabilité contractuelle' :

. 350 000 euros HT, 420 000 euros TTC, au titre de la rémunération due pour la cession de l'ensemble immobilier ;

. 221 333 euros HT, soit 265 599,60 euros TTC, au titre de la rémunération due pour la conclusion d'un bail avec un locataire preneur, gérant le bien immobilier ;

- à titre subsidiaire, les mêmes sommes 'au titre de sa responsabilité délictuelle', outre celle de 150 000 euros HT, soit 180 000 euros TTC, au titre de l'assistance à maîtrise d'ouvrage ;

- en toute hypothèse, les sommes de :

. 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral ;

. 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de dire que l'ensemble de ces condamnations portera intérêt au taux légal augmenté de ses majorations de droit, à compter de la mise en demeure par assignation délivrée en date du 26 novembre 2020 ;

- de 'prononcer l'anatocisme'.

La société L'Ecrin, s'opposant à la jonction, concluait en première instance :

- à la nullité de l'assignation délivrée à son encontre à défaut de motivation en droit et en fait ;

- à titre subsidiaire, au rejet des demandes présentées par la société Immobilière Saint-Georges ;

- dans tous les cas, à la condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison du caractère dilatoire et abusif de la procédure, outre la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Immo Pro [Localité 6] a formulé des demandes identiques, de même que MM. [X] [W] et [G], ces deux derniers ayant en outre sollicité que le tribunal de commerce se déclare incompétent au profit du tribunal judiciaire de Montbéliard.

Par jugement rendu 27 juin 2023, le tribunal de commerce de Belfort, actant la volonté des parties lors de l'audience du 02 mai 2023 de ne plaider que la demande de jonction, a :

- rejeté l'exception de nullité pour vice de forme des assignations ;

- débouté la société immobilière Saint-Georges de sa demande de jonction ;

- jugé recevable et bien fondée l'exception d'incompétence ratione materiae soulevée par MM. [X] [W] et [G] ;

- s'est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Montbéliard ;

- renvoyé l'affaire, à défaut d'appel, devant le tribunal judiciaire de Montbéliard ;

- dit n'y avoir lieu à condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé l'exécution provisoire du jugement ;

- condamné la société Immobilière Saint-Georges à supporter les entiers dépens, dont les frais de greffe comprenant ceux liés à l'incident de procédure chiffrés à la somme de 188,80 euros.

Pour statuer ainsi, le juge de première instance a retenu :

- que si les assignations n'exposent pas les moyens de droit sur lesquels sont fondées les demandes, les faits et demandes développés dans celles-ci sont suffisamment explicites, de sorte que les parties étaient à même d'organiser leur défense, que le fondement de l'action soit délictuelle ou contractuelle, de sorte qu'aucun grief n'est établi ;

- concernant la demande de jonction, que si la société Immobilère Saint-Georges était en relations commerciales avec la société Avac Immobilier, elle n'apporte pas la preuve que MM. [X] [W] et [G] ont pris des engagements à titre personnel, ou effectué des actes de commerce avec la demanderesse, de sorte qu'il n'existe aucun lien suffisant entre les instances ;

- concernant l'exception d'incompétence, recevable car présentée avant toute défense au fond, que la société Immobilière Saint-Georges a assigné MM. [G] et [X] [W] à titre personnel et demande leur condamnation à ce titre, tandis qu'elle n'apporte pas la preuve qu'ils ont pris des engagements ou ont effectué des actes de commerce à titre personnel, de sorte que le litige avec ces personnes physiques est de la compétence du seul tribunal judiciaire ;

- qu'en cas de pluralité de défendeurs, dont les uns sont tenus civilement et les autres commercialement, la juridiction civile prévaut sur la juridiction d'exception et doit donc être saisie de l'entier litige, de sorte que MM. [G] et [X] [W] étant domiciliés dans le ressort du tribunal judiciaire de Montbéliard, celui-ci est compétent.

Selon déclaration transmise en date du 20 juillet 2023, la société Immobilière Saint-Georges a interjeté appel de ce jugement sauf en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité pour vice de forme des assignations.

Le même jour, elle a déposé ses conclusions ainsi qu'une requête aux fins d'assignation à jour fixe, autorisée par ordonnance du 31 juillet 2023.

La société Immobilière Saint-Georges a assigné à comparaître à l'audience du 05 décembre 2023 MM. [W] et [G] ainsi que les sociétés L'Ecrin et Immo Pro [Localité 6] par actes signifiés les 10 et 23 août 2023.

Aux termes de ses dernières écritures transmises le 29 novembre 2023, la société Immobilière Saint-Georges demande à la cour, au visa des articles 68 et 331 du code de procédure civile et des articles L. 110-1, L. 225-251 et L. 721-3 du code de commerce, de juger recevable son appel, d'infirmer le jugement critiqué concernant les chefs susvisés et demande à la cour statuant à nouveau :

- de débouter MM. [W] et [G] de leur exception d'incompétence ;

- de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Belfort ;

- d'ordonner la jonction de l'affaire RG 2020/004064 avec l'affaire nouvelle RG 2022/004242 afin qu'il soit statué par une seule et même décision sur l'ensemble des parties attraites en la cause par voie principale et par voie d'intervention forcée ;

- de condamner in solidum les sociétés L'Ecrin et Immo Pro [Localité 6] ainsi que MM. [W] et [G] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de les condamner in solidum aux entiers dépens de l'instance.

La société Immobilière Saint-Georges fait valoir :

A titre principal sur la demande de jonction :

- que selon la jurisprudence, un tiers peut être mis en cause dès lors qu'il y a intérêt à lui rendre commun un jugement, sans que le juge ne puisse en apprécier la pertinence ;

- qu'il est sollicité la mise en cause de MM. [W] et [P] [G] à titre personnel puisqu'ils sont à l'origine du montage juridique destiné à éviter sa rémunération, constitutif d'un abus de droit par contournement de la réglementation fiscale et d'une infraction pénale ;

- que le 'juge de la mise en état', en considérant l'absence de lien entre les actes de MM. [X] [W] et [P] [G] et de leurs sociétés parties prenantes, a commis un excès de pouvoir en appréciant la pertinence de leur mise en cause alors qu'il ne pouvait que vérifier son simple intérêt audit acte ;

- que le tribunal ne pouvait pas scinder l'instance en intervention forcée en renvoyant une partie des intervenants devant le tribunal judiciaire, ce qui est contraire à la bonne administration de la justice et risque d'entraîner une contrariété des décisions dans le cadre de ce contentieux ;

A titre subsidiaire, sur la compétence :

- que si la cour estime qu'elle n'a pas le pouvoir d'apprécier le bien-fondé ou la légalité de la décision des premiers juges, il est sollicité l'infirmation de cette décision en ce qu'elle a renvoyé les parties personnes physiques devant le tribunal judiciaire ce qui est un non-sens procédural ;

- que les fautes reprochées à MM. [W] et [G], à savoir un système de sociétés intermédiaires visant à éviter d'avoir à lui payer ses rémunérations et à générer des multiples profits commerciaux pour leurs sociétés, ont une finalité purement commerciale et sont séparables de leurs fonctions de sorte qu'elles peuvent leur être imputables personnellement ;

- que ces fautes ont été commises intentionnellement et sont d'une gravité particulière compte tenu des enjeux financiers, de sorte qu'elles sont susceptibles d'engager leur responsabilité sur le fondement des articles L. 225-251 et suivants, L. 227-8 et L. 223-22 du code de commerce et que le tribunal de commerce est compétent au visa de l'article 721-3, 2° et 3°, de ce même code.

Par leurs ultimes conclusions transmises le 30 novembre 2023, MM. [W] et [G] ainsi que les sociétés Immo Pro [Localité 6] et L'Ecrin demandent à la cour, au visa des articles 331 et suivants du code de procédure civile, 537 du même code et L. 721-3 et suivants du code de commerce :

- de déclarer irrecevable et en tout cas mal fondé l'appel de la société Immobilière Saint-Georges ;

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel ;

- de condamner la société Immobilière Saint-Georges à leur payer la somme de 1 500 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Au soutien de leurs demandes, ils font valoir :

Concernant la jonction :

- que les décisions de jonction et disjonction constituent des mesures d'administration judiciaire insusceptibles de recours et que la cour d'appel ne peut ordonner la jonction de procédures dont elle n'est pas saisie ;

Concernant la compétence :

- que l'instance engagée à leur encontre est indivisible puisque les demandes présentées le sont in solidum ;

- qu'il suffit dès lors que l'une des parties ne relève pas de la compétence commerciale pour que l'ensemble du litige relève de la compétence du tribunal judiciaire ;

- que si les deux sociétés sont commerciales, MM. [G] et [W] ne sont pas commerçants ;

- que les fautes personnelles et séparables de leurs fonctions imputées aux deux dirigeants par la société Immobilière Saint-Georges ne sont pas établies, étant précisé que MM. [G] et [W] ne sont pas intervenus à titre personnel mais en qualité de dirigeants des sociétés qu'ils représentent.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

L'affaire a été appelée à l'audience de plaidoiries du 05 décembre 2023 et la décision a été mise en délibéré au 06 février 2024.

En application de l'article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.

Motifs de la décision :

- Sur la jonction des procédures,

En application de l'article 368 du code de procédure civile, les décisions de jonction ou disjonction d'instances sont des mesures d'administration judiciaire.

Aux termes de l'article 537 du même code, les mesures d'administration judiciaire ne sont sujettes à aucun recours.

Il en résulte que les décisions de jonction ou de disjonction d'instance ne sont susceptibles d'aucun recours, y compris au motif d'un excès de pouvoir.

Dès lors, étant au surplus observé que la cour n'est pas saisie de la procédure consécutive à l'assignation délivrée le 26 novembre 2021 à l'encontre de la société Avac Immobilier, l'appel formé par la société Immobilière Saint-Georges à l'encontre du chef du jugement critiqué ayant refusé sa demande de jonction sera déclaré irrecevable.

- Sur la compétence,

Aux termes de l'article L. 721-3 du code de commerce, les tribunaux de commerce connaissent :

1° Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre artisans, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux ;

2° De celles relatives aux sociétés commerciales ;

3° De celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes.

Toutefois, les parties peuvent, au moment où elles contractent, convenir de soumettre à l'arbitrage les contestations ci-dessus énumérées. Par exception, lorsque le cautionnement d'une dette commerciale n'a pas été souscrit dans le cadre de l'activité professionnelle de la caution, la clause compromissoire ne peut être opposée à celle-ci.

Il incombe à celui qui invoque le caractère civil d'un acte de prouver que celui-ci n'a pas été accompli pour les besoins du commerce, étant rappelé que les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des contestations relatives aux sociétés commerciales.

Par ailleurs, en application des dispositions susvisées, le tribunal de commerce est compétent pour connaître des actions engagées à l'encontre du dirigeant d'une société commerciale dès lors que les faits reprochés à celui-ci se rattachent par un lien direct à la gestion de la société, le fait que les personnes physiques visées n'aient pas la qualité de commerçant étant indifférent.

En l'espèce, la société Immobilière Saint-Georges a assigné en intervention forcée devant le tribunal de commerce de Belfort MM. [W] et [G] en sollicitant leur condamnation in solidum avec les sociétés L'Ecrin et Immo Pro [Localité 6] à l'indemniser au titre de la violation du mandat de recherche de cessionnaire et de locataire qu'elle estime avoir conclu avec la société Avac Immobilier, à titre principal sur le fondement de la responsabilité contractuelle et subsidiairement sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Dès lors, les manquements reprochés personnellement aux dirigeants des entités précitées à l'occasion de l'exécution desdits mandats se rattachent par un lien direct à la gestion des sociétés L'Ecrin et Immo Pro [Localité 6], Habitat Résidence 21 et Avac Immobilier en ce qu'ils procéderaient d'une collusion organisée entre les différentes entités afin de faire échec à l'obligation contractualisée de rémunérer la société Immobilière Saint-Georges au titre de sa mission d'intermédiaire, de sorte que la circonstance qu'ils ne soient pas personnellement commerçant ou qu'il n'aient pas accompli d'actes de commerce est indifférente.

La cour observe à cet égard que MM. [W] et [G] ainsi que les sociétés Immo Pro [Localité 6] et L'Ecrin font précisément valoir dans leurs écritures que MM. [G] et [W] n'ont pu intervenir qu'en leur qualité de dirigeants des sociétés qu'ils représentent.

Indépendamment du bien-fondé de la mise en cause de la responsabilité personnelle des dirigeants, il en résulte que le tribunal de commerce est compétent de sorte que le jugement dont appel sera infirmé en ce qu'il a jugé recevable et bien fondée l'exception d'incompétence ratione materiae soulevée par MM. [X] [W] et [G], s'est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Montbéliard et a ordonné le renvoi de l'affaire devant celui-ci.

L'exception présentée par MM. [W] et [G] ainsi que par les sociétés Immo Pro [Localité 6] et L'Ecrin tirée de l'incompétence matérielle du tribunal de commerce de Belfort sera donc rejetée et celui-ci sera déclaré compétent.

Par ces motifs,

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Déclare irrecevable l'appel formé par la SARL Immobilière Saint-Georges à l'encontre du chef du jugement rendu le 27 juin 2023 entre les parties par le tribunal de commerce de Belfort l'ayant déboutée de sa demande de jonction ;

Infirme, dans les limites de l'appel, ledit jugement en ce qu'il :

- a jugé recevable et bien fondée l'exception d'incompétence ratione materiae soulevée par MM. [X] [W] et [P] [G] ;

- s'est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Montbéliard ;

- a renvoyé l'affaire, à défaut d'appel, devant le tribunal judiciaire de Montbéliard ;

- a condamné la SARL Immobilière Saint-Georges à supporter les entiers dépens ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Rejette l'exception tirée de l'incompétence matérielle du tribunal de commerce de Belfort présentée par MM. [X] [W] et [P] [G], la SAS Immo Pro [Localité 6] et la SAS L'Ecrin ;

Déclare le tribunal de commerce de Belfort compétent ;

Condamne in solidum M. [X] [W], M. [P] [G], la SARL Immo Pro [Localité 6] et la SAS L'Ecrin aux dépens de première instance et d'appel ;

Et, vu l'article 700 du code de procédure civile, les déboute de leurs demandes et les condamne in solidum à payer à la SARL Immobilière Saint-Georges la somme de 1 000 euros.

Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,