Décisions
CA Orléans, comm.d'indemn.de la det., 25 janvier 2024, n° 23/01117
ORLÉANS
Autre
Autre
COUR D'APPEL D'ORLÉANS
PREMIÈRE PRÉSIDENCE
RÉPARATION A RAISON D'UNE DÉTENTION
DÉCISION du :
25/01/2024
I.D.P N° :
7/2023
N° RG 23/01117 - N° Portalis DBVN-V-B7H-GY5L
Arrêt N° :
NOTIFICATIONS le : 25/01/2024
[V] [B]
la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES
Me [R] [I]
L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ÉTAT
PG
PARTIES EN CAUSE
Madame [V] [B], demeurant Chez Mme [H] [B] - [Adresse 1]
NON COMPARANTE .
Représentée par Me Audrey PALMACE de la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avocats au barreau d'ORLEANS
Demanderesse suivant requête en date du : 22 Mai 2023
L'agent judiciaire de l'Etat
représenté par Me Johan HERVOIS , avocat au barreau d'ORLEANS
Le ministère public
représenté par Madame Christine TEIXIDO, Avocat Général.
COMPOSITION DE LA COUR
Président : Sébastien EVESQUE, Conseiller à la Cour d'Appel d'Orléans, en remplacement de Madame la première présidente par ordonnance n°279/2023 en date du 25 septembre 2023
Greffier : Madame Fatima HAJBI, greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉROULEMENT DES DÉBATS :
A l'audience publique du 15 Décembre 2023, ont été entendus:
la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, Conseil de la requérante, en ses explications,
Me Johan HERVOIS, Conseil de l'agent judiciaire de l'État en ses explications,
Le Ministère Public en ses réquisitions,
L'Avocat de la requérante ayant eu la parole en dernier
Le Conseiller faisant fonction de Premier Président a ensuite déclaré que la décision serait prononcée le 25 janvier 2024.
DÉCISION:
Prononcé le 25 JANVIER 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Le Conseiller faisant fonction de Premier Président,
Assisté de Madame Fatima HAJBI, greffier ,
Sur la requête, enregistrée le 22 Mai 2023 sous le numéro IDP 7/2023 - RG N° N° RG 23/01117 - N° Portalis DBVN-V-B7H-GY5L concernant [V] [B].
Vu les pièces jointes à la requête,
Vu les conclusions, régulièrement notifiées,
de l'Agent Judiciaire de l'État, du 04 juillet 2023,
du Procureur Général près cette Cour, du 25 juillet 2023,
Vu les conclusions en réponse du 02 octobre 2023, déposées par le Conseil du requérant.
Vu les conclusions en réponse de l'agent judiciaire de l'Etat en date du 19 octobre 2023
Vu la lettre recommandée avec demande d'avis de réception par laquelle a été notifiée le 13 novembre 2023, la date de l'audience, fixée au 15 DECEMBRE 2023.
Les débats ayant eu lieu, en l'absence d'opposition en audience publique, au cours de laquelle ont été entendus la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, Conseil de la requérante, Me HERVOIS, représentant l'Agent Judiciaire de l'État, Madame Christine TEIXIDO, Avocat Général, le Conseil de la demanderesse ayant eu la parole en dernier lieu.
EXPOSE DU LITIGE
FAITS ET PROCÉDURE
Madame [V] [B] a été incarcérée le 18 janvier 2021 par l'ordonnance de placement en détention provisoire du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans du même jour dans le cadre de sa mise en examen pour des faits de violence suivie de mutilation ou d'infirmité permanente sur un mineur de 15 ans par un ascendant ou une personne ayant autorité sur la victime.
Par ordonnance du 12 mai 2021, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans a dit n'y avoir lieu à prolonger la détention provisoire de Madame [V] [B] et a placé cette dernière sous contrôle judiciaire.
Madame [V] [B] a été remise en liberté assortie du contrôle judiciaire le 17 mai 2021.
Par son ordonnance de non-lieu partiel et de mise en accusation devant la cour d'assises du Loiret du 16 décembre 2022, le juge d'instruction du tribunal judiciaire d'Orléans a prononcé un non-lieu à l'encontre de Madame [V] [B] pour les faits poursuivis.
Par requête arrivée au greffe de la cour d'appel d'Orléans le 22 mai 2023, Madame [V] [B] présentait une demande d'indemnisation se fondant sur les articles 149 et suivants du code de procédure pénale.
Cette requête a été transmise par le greffe de la cour d'appel le 22 mai 2023 au procureur général près la cours d'appel en copie de la requête et, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du même jour, à l'agent judiciaire de l'État.
L'agent judiciaire de l'État a adressé ses conclusions à la cour le 4 juillet 2023. Elles ont été transmises au conseil de Madame [V] [B] par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 11 juillet 2023 et reçue le 13 juillet 2023. Elles ont été transmises en copie au procureur général le 11 juillet 2023.
Le ministère public a adressé ses conclusions à la cour le 25 juillet 2023. Ces conclusions ont été transmises au conseil de Madame [V] [B] et au conseil de l'agent judiciaire de l'État par lettres recommandées avec accusé de réception adressées le 27 juillet 2023 et reçues les 28 et 29 avril 2023.
Madame [V] [B] a adressé des conclusions en réponse reçues par le greffe de la cour le 2 octobre 2023 et transmises au procureur général près la cours d'appel en copie le 3 octobre 2023 et, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du même jour et reçue le 5 octobre 2023, au conseil de l'agent judiciaire de l'État.
L'agent judiciaire de l'État a adressé ses conclusions récapitulatives à la cour le 19 octobre 2023. Elles ont été transmises au conseil de Madame [V] [B] par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 24 octobre 2023 et reçue le 25 octobre 2023. Elles ont été transmises en copie au procureur général le 24 octobre 2023.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 15 décembre 2023 par lettres recommandées avec accusé de réception adressées le 13 novembre 2023 et reçues les 14 et 15 novembre 2023.
Elles ont comparu, soutenant chacune oralement les conclusions déposées.
L'affaire a été mise en délibéré avec indication que la décision serait rendue le 25 janvier 2024.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions en réponse reçues le 20 octobre 2023 et auxquelles la cour renvoie pour de plus amples développements, Madame [V] [B] expose avoir été placée en détention provisoire du 18 janvier 2021 au 18 mai 2021. Elle précise avoir fait l'objet d'un non-lieu suite à l'ordonnance du 16 décembre 2022 du juge d'instruction du tribunal judicaire d'Orléans.
Elle évoque avoir subi une détention injustifiée pendant 121 jours.
Au titre de son préjudice matériel, elle expose avoir engagé des frais d'avocat en lien direct avec sa privation de liberté et en sollicite l'indemnisation à hauteur de 2400 euros TTC.
Elle expose également avoir subi une perte de salaire du fait de la détention et en sollicite l'indemnisation à hauteur de 6108,39 euros.
Au titre de son préjudice moral, elle expose les éléments suivants :
Le choc carcéral subi est très important dès lors qu'elle était âgée de 26 ans et n'avait jamais été incarcérée auparavant ;
Son préjudice est aggravé par la séparation brutale d'avec son fils [L] ;
Son préjudice est aggravé car elle a dû faire le deuil de son aîné en détention ;
Son préjudice est aggravé par les conditions de son incarcération au centre pénitentiaire d'[Localité 3]-[Localité 4], notamment du fait de l'hostilité des autres détenues.
Elle sollicite la somme de 25000 euros en réparation de son préjudice moral.
Elle sollicite enfin que lui soit versée la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
***
Par ses conclusions récapitulatives arrivées à la cour d'appel le 19 octobre 2023, auxquelles la cour renvoie pour de plus amples développements, l'agent judiciaire de l'État présente les arguments et moyens suivants :
La recevabilité de la requête n'est pas justifiée en l'absence de preuve du caractère définitif de l'ordonnance de non-lieu ;
La durée de la détention indemnisable est de 120 jours ;
Le casier judiciaire de Madame [V] [B] ne porte la mention d'aucune condamnation ;
La séparation de Madame [V] [B] et ses enfants résulte davantage de la mise en examen que de la détention ;
Madame [V] [B] a bénéficié de deux autorisations exceptionnelles de sorties suite au décès de son fils ;
La requérante n'établit pas la difficulté des conditions de détention qu'elle aurait réellement subies et le rapport d'enquête de personnalité souligne au contraire que sa détention s'est passée dans de bonnes conditions ;
La facture d'honoraires d'avocat produite est une simple facture de provision qui ne mentionne pas des diligences qui seraient toutes en lien avec la détention ;
L'agent judiciaire de l'État consent à verser la somme de 6108,39 euros en réparation de la perte de salaires de la requérante ;
Les sommes sollicitées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas justifiées.
L'agent judiciaire de l'État conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que la somme mise à la charge de l'État au titre de la réparation du préjudice moral de Madame [V] [B] soit limitée à 13000 euros, que son préjudice matériel soit indemnisé par la somme de 6108,39 euros et qu'elle soit déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ou, à titre subsidiaire, que celle-ci soit réduite à de plus justes proportions.
***
Par des écritures reçues le 25 juillet 2023, le procureur général propose de suivre la position de l'agent judiciaire de l'État et conclut à ce qu'il soit alloué à Madame [V] [B] la somme de 13000 euros au titre de son préjudice moral. Il demande que la requérante soit déboutée de ses prétentions au titre de la perte de revenus et propose que la somme de 900 euros lui soit octroyée en réparation des frais d'avocat du fait de la détention en raison de la nature de l'affaire. Enfin, il propose que la somme de 800 euros lui soit octroyée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Les parties ont été régulièrement convoquées et entendues à l'audience tenue le 15 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la requête
Selon les dispositions combinées des articles 149-1, 149-2 et R. 26 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, a droit, à sa demande, à la réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.
Il lui appartient, dans les six mois de cette décision, de saisir le premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle la décision a été prononcée, par une requête, signée de sa main ou d'un mandataire.
L'article R. 26 du code de procédure pénale précise que le délai de six mois prévu à l'article 149-2 ne court à compter de la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive que si, lors de la notification de cette décision, la personne a été avisée de son droit de demander une réparation ainsi que des dispositions de l'article 149-1,149-2 et 149-3 (premier alinéa).
L'ordonnance du juge d'instruction prononçant un non-lieu à l'encontre de Madame [V] [B] a été rendue le 16 décembre 2022.
La présente requête a été reçue au greffe de la cour d'appel le 22 mai 2023 soit, dans le délai de six mois prévu à l'article 149-2 du code pénal.
L'agent judiciaire de l'État soutient que le certificat de non-appel versé au débat par la requérante n'est pas daté et qu'il ne mentionne pas explicitement qu'aucun appel n'aurait été inscrit à l'encontre de l'ordonnance du 16 décembre 2022.
Cependant, il ne ressort d'aucun élément du dossier que l'ordonnance en question aurait fait l'objet d'un appel, alors que le certificat de non-appel versé au dossier par la requérante, certes non daté, mentionne expressément le numéro de parquet 21018000077, identique à celui mentionné dans l'ordonnance du 16 décembre 2022 prononçant le non-lieu.
Par conséquent, il y a lieu de considérer que cette décision n'a pas fait l'objet d'un appel et est devenue définitive de telle sorte que la requête de Madame [V] [B] est recevable.
Sur la durée de la période à indemniser
Il ressort des éléments versés au dossier que Madame [V] [B] a été placée en détention provisoire du 18 janvier 2021 au 17 mai 2021.
En application des dispositions des articles 149 et suivants du code de procédure pénale, la période d'incarcération ouvrant droit à indemnisation a donc couru pendant 120 jours.
C'est cette période qui sera prise en compte pour calculer le montant de l'indemnisation.
Sur le préjudice moral
Madame [V] [B] a fait l'objet d'une détention provisoire non justifiée pour une durée de 120 jours.
La privation de liberté entraîne nécessairement un préjudice moral résultant du choc ressenti par une personne injustement privée de liberté.
Il est constant que le casier judiciaire de Madame [V] [B] ne portait la trace d'aucune mention de condamnation antérieure à la période de détention de telle sorte que son préjudice moral est majoré de ce fait.
La requérante soutient que son préjudice serait majoré du fait d'une séparation brutale d'avec son fils [L], alors âgé de quatre mois.
L'agent judiciaire de l'État soutient que cette séparation est moins le résultat du placement de Madame [V] [B] en détention provisoire que de la procédure pénale conduite à son encontre. Il souligne ainsi que dans son jugement du 28 janvier 2021, le juge des enfants du tribunal judiciaire d'Orléans a réservé les droits de Madame [V] [B] et de Monsieur [X] [N] « compte tenu de la procédure pénale en cours ». Cependant, il ressort du jugement du juge des enfants du tribunal judiciaire d'Orléans du 1er juillet 2021 qu'en l'absence d'interdiction de contact entre Madame [V] [B] et son fils [L] dans le cadre de son contrôle judiciaire, un droit de visite médiatisé a pu être mis en place à compter de la fin de sa détention provisoire. Il ressort également du jugement du 24 juin 2022 du juge des enfants du tribunal judiciaire d'Orléans que Madame [V] [B] a mis à profit ce droit de visite pour aller voir son fils [L] dans le cadre de visites médiatisées.
Dans ces conditions, la détention provisoire de Madame [V] [B] l'a bien privée de la possibilité de voir son fils [L], seulement âgé de quelques mois, dans le cadre de visites médiatisées qui auraient pu être mises en place dès le début de la procédure pénale. Il en sera tenu compte dans l'appréciation de son préjudice moral.
Madame [V] [B] soutient ensuite que son préjudice moral est aggravé par le fait qu'elle a dû faire le deuil de son fils [P] en détention et que, si elle a pu bénéficier d'une autorisation exceptionnelle de sortie le 22 janvier 2021, elle n'a pu l'accompagner lors de ses funérailles à Mayotte.
L'agent judiciaire de l'État soutient que Madame [V] [B] a également bénéficié d'une seconde autorisation exceptionnelle de sortie le 9 février 2021.
Si la requérante soutient n'avoir pu accompagner son fils lors de ses funérailles à Mayotte, outre le fait que cette affirmation n'est étayée par aucun élément, cette impossibilité est moins le résultat de la détention provisoire que celui de la procédure pénale alors en cours. En effet, même lorsque Madame [V] [B] a été remise en liberté, la mesure d'assignation à résidence prise à son encontre dans le cadre de la procédure pénale lui interdisait de sortir des limites territoriales de la [2] métropolitaine de telle sorte qu'elle n'aurait en tout état de cause pas pu se rentre à Mayotte.
Cependant, et même si elle a pu bénéficier de deux autorisations exceptionnelles de sortie le 22 janvier et le 9 février 2021, la détention de Madame [V] [B] a nécessairement impacté les conditions dans lesquelles celle-ci a dû faire le deuil de son fils de telle sorte que son préjudice moral est majoré.
Madame [V] [B] soutient également que son préjudice serait aggravé du fait des conditions de son incarcération. Elle invoque au soutien de son argumentaire un rapport du contrôleur général des lieux de privation de liberté tiré de la visite du centre pénitentiaire d'[Localité 3]-[Localité 4] du 4 au 14 avril 2016. Outre que le rapport invoqué n'est pas contemporain de la période pour laquelle l'indemnisation est sollicitée, ces éléments de portée générale ne permettent pas de justifier les conditions d'incarcération que la requérante aurait personnellement subies. À l'inverse, il ressort des éléments de la procédure et notamment du rapport d'enquête de personnalité du 10 juin 2021 que la détention de la requérante s'est déroulée dans de bonnes conditions de telle sorte que son préjudice n'est pas majoré de ce fait.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, le préjudice moral pour la détention provisoire de Madame [V] [B] est indemnisé par la somme de 18000 euros.
Sur le préjudice matériel
Madame [V] [B] sollicite la somme de 2400 euros au titre des frais d'avocat liés au contentieux de la détention.
Elle verse à ce titre au débat une facture n° 34820 du 25 janvier 2021 pour un montant de 2400 euros TTC. Il apparaît cependant sur le détail de la facture que celle-ci porte sur une première provision et non sur des honoraires définitifs et qu'elle porte sur des diligences qui ne sont pas exclusivement en lien avec la détention de telle sorte que les demandes effectuées sur le fondement de cette facture seront rejetées.
Cependant, il ressort des pièces versées au dossier qu'une enquête de faisabilité de placement sous assignation à résidence avec surveillance électronique a été formulée par l'avocat de Madame [V] [B] le 16 avril 2021 et que c'est sur la base de cette enquête que cette dernière a été libérée par l'ordonnance du 12 mai 2021 du juge des libertés et de la détention.
Dans ces conditions, le préjudice tiré des frais d'avocat liés au contentieux de la détention est indemnisé par la somme de 1000 euros.
Madame [V] [B] sollicite par ailleurs la somme de 6 108,39 euros en réparation de son préjudice tiré de la perte de salaires.
L'agent judiciaire de l'État consent à s'acquitter de cette somme. Par conséquent il y a lieu d'allouer à Madame [V] [B] la somme de 6 108,39 euros en réparation de sa perte de salaires.
Le préjudice matériel de Madame [V] [B] est donc indemnisé par la somme totale de 7 108,39 euros.
Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Aucune convention d'honoraires, devis ou facture de nature à établir le montant des honoraires sollicités par son conseil dans le cadre de la présente instance n'étant produite, il sera alloué à Madame [V] [B] une indemnité de procédure de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par décision susceptible de recours devant la commission nationale de réparation des détentions,
DÉCLARE Madame [V] [B] recevable en sa requête en indemnisation,
ALLOUE à Madame [V] [B] la somme de 18000 euros (DIX HUIT MILLE EUROS) en réparation de son préjudice moral,
ALLOUE à Madame [V] [B] la somme de 7 108,39 euros (SEPT MILLE CENT HUIT EUROS ET TRENTE-NEUF CENTIMES) en réparation de son préjudice matériel,
ALLOUE à Madame [V] [B] la somme de 1000 euros (MILLE EUROS) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
LAISSE les dépens à la charge du Trésor public,
RAPPELLE que cette décision est assortie de l'exécution provisoire de plein droit,
DIT que la présente décision sera notifiée à la requérante et à l'agent judiciaire de l'État dans les formes prescrites à l'article R. 38 du code de procédure pénale et qu'une copie en sera remise au procureur général près la cour d'appel d'Orléans.
La présente décision a été signée par Monsieur Sébastien Evesque, conseiller faisant fonction de premier président, et Madame Fatima Hajbi, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,
[G] [Z]
Le conseiller faisant fonction de Premier Président,
[E] [T]
PREMIÈRE PRÉSIDENCE
RÉPARATION A RAISON D'UNE DÉTENTION
DÉCISION du :
25/01/2024
I.D.P N° :
7/2023
N° RG 23/01117 - N° Portalis DBVN-V-B7H-GY5L
Arrêt N° :
NOTIFICATIONS le : 25/01/2024
[V] [B]
la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES
Me [R] [I]
L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ÉTAT
PG
PARTIES EN CAUSE
Madame [V] [B], demeurant Chez Mme [H] [B] - [Adresse 1]
NON COMPARANTE .
Représentée par Me Audrey PALMACE de la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avocats au barreau d'ORLEANS
Demanderesse suivant requête en date du : 22 Mai 2023
L'agent judiciaire de l'Etat
représenté par Me Johan HERVOIS , avocat au barreau d'ORLEANS
Le ministère public
représenté par Madame Christine TEIXIDO, Avocat Général.
COMPOSITION DE LA COUR
Président : Sébastien EVESQUE, Conseiller à la Cour d'Appel d'Orléans, en remplacement de Madame la première présidente par ordonnance n°279/2023 en date du 25 septembre 2023
Greffier : Madame Fatima HAJBI, greffier, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉROULEMENT DES DÉBATS :
A l'audience publique du 15 Décembre 2023, ont été entendus:
la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, Conseil de la requérante, en ses explications,
Me Johan HERVOIS, Conseil de l'agent judiciaire de l'État en ses explications,
Le Ministère Public en ses réquisitions,
L'Avocat de la requérante ayant eu la parole en dernier
Le Conseiller faisant fonction de Premier Président a ensuite déclaré que la décision serait prononcée le 25 janvier 2024.
DÉCISION:
Prononcé le 25 JANVIER 2024 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Le Conseiller faisant fonction de Premier Président,
Assisté de Madame Fatima HAJBI, greffier ,
Sur la requête, enregistrée le 22 Mai 2023 sous le numéro IDP 7/2023 - RG N° N° RG 23/01117 - N° Portalis DBVN-V-B7H-GY5L concernant [V] [B].
Vu les pièces jointes à la requête,
Vu les conclusions, régulièrement notifiées,
de l'Agent Judiciaire de l'État, du 04 juillet 2023,
du Procureur Général près cette Cour, du 25 juillet 2023,
Vu les conclusions en réponse du 02 octobre 2023, déposées par le Conseil du requérant.
Vu les conclusions en réponse de l'agent judiciaire de l'Etat en date du 19 octobre 2023
Vu la lettre recommandée avec demande d'avis de réception par laquelle a été notifiée le 13 novembre 2023, la date de l'audience, fixée au 15 DECEMBRE 2023.
Les débats ayant eu lieu, en l'absence d'opposition en audience publique, au cours de laquelle ont été entendus la SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, Conseil de la requérante, Me HERVOIS, représentant l'Agent Judiciaire de l'État, Madame Christine TEIXIDO, Avocat Général, le Conseil de la demanderesse ayant eu la parole en dernier lieu.
EXPOSE DU LITIGE
FAITS ET PROCÉDURE
Madame [V] [B] a été incarcérée le 18 janvier 2021 par l'ordonnance de placement en détention provisoire du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans du même jour dans le cadre de sa mise en examen pour des faits de violence suivie de mutilation ou d'infirmité permanente sur un mineur de 15 ans par un ascendant ou une personne ayant autorité sur la victime.
Par ordonnance du 12 mai 2021, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans a dit n'y avoir lieu à prolonger la détention provisoire de Madame [V] [B] et a placé cette dernière sous contrôle judiciaire.
Madame [V] [B] a été remise en liberté assortie du contrôle judiciaire le 17 mai 2021.
Par son ordonnance de non-lieu partiel et de mise en accusation devant la cour d'assises du Loiret du 16 décembre 2022, le juge d'instruction du tribunal judiciaire d'Orléans a prononcé un non-lieu à l'encontre de Madame [V] [B] pour les faits poursuivis.
Par requête arrivée au greffe de la cour d'appel d'Orléans le 22 mai 2023, Madame [V] [B] présentait une demande d'indemnisation se fondant sur les articles 149 et suivants du code de procédure pénale.
Cette requête a été transmise par le greffe de la cour d'appel le 22 mai 2023 au procureur général près la cours d'appel en copie de la requête et, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du même jour, à l'agent judiciaire de l'État.
L'agent judiciaire de l'État a adressé ses conclusions à la cour le 4 juillet 2023. Elles ont été transmises au conseil de Madame [V] [B] par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 11 juillet 2023 et reçue le 13 juillet 2023. Elles ont été transmises en copie au procureur général le 11 juillet 2023.
Le ministère public a adressé ses conclusions à la cour le 25 juillet 2023. Ces conclusions ont été transmises au conseil de Madame [V] [B] et au conseil de l'agent judiciaire de l'État par lettres recommandées avec accusé de réception adressées le 27 juillet 2023 et reçues les 28 et 29 avril 2023.
Madame [V] [B] a adressé des conclusions en réponse reçues par le greffe de la cour le 2 octobre 2023 et transmises au procureur général près la cours d'appel en copie le 3 octobre 2023 et, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du même jour et reçue le 5 octobre 2023, au conseil de l'agent judiciaire de l'État.
L'agent judiciaire de l'État a adressé ses conclusions récapitulatives à la cour le 19 octobre 2023. Elles ont été transmises au conseil de Madame [V] [B] par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 24 octobre 2023 et reçue le 25 octobre 2023. Elles ont été transmises en copie au procureur général le 24 octobre 2023.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 15 décembre 2023 par lettres recommandées avec accusé de réception adressées le 13 novembre 2023 et reçues les 14 et 15 novembre 2023.
Elles ont comparu, soutenant chacune oralement les conclusions déposées.
L'affaire a été mise en délibéré avec indication que la décision serait rendue le 25 janvier 2024.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions en réponse reçues le 20 octobre 2023 et auxquelles la cour renvoie pour de plus amples développements, Madame [V] [B] expose avoir été placée en détention provisoire du 18 janvier 2021 au 18 mai 2021. Elle précise avoir fait l'objet d'un non-lieu suite à l'ordonnance du 16 décembre 2022 du juge d'instruction du tribunal judicaire d'Orléans.
Elle évoque avoir subi une détention injustifiée pendant 121 jours.
Au titre de son préjudice matériel, elle expose avoir engagé des frais d'avocat en lien direct avec sa privation de liberté et en sollicite l'indemnisation à hauteur de 2400 euros TTC.
Elle expose également avoir subi une perte de salaire du fait de la détention et en sollicite l'indemnisation à hauteur de 6108,39 euros.
Au titre de son préjudice moral, elle expose les éléments suivants :
Le choc carcéral subi est très important dès lors qu'elle était âgée de 26 ans et n'avait jamais été incarcérée auparavant ;
Son préjudice est aggravé par la séparation brutale d'avec son fils [L] ;
Son préjudice est aggravé car elle a dû faire le deuil de son aîné en détention ;
Son préjudice est aggravé par les conditions de son incarcération au centre pénitentiaire d'[Localité 3]-[Localité 4], notamment du fait de l'hostilité des autres détenues.
Elle sollicite la somme de 25000 euros en réparation de son préjudice moral.
Elle sollicite enfin que lui soit versée la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
***
Par ses conclusions récapitulatives arrivées à la cour d'appel le 19 octobre 2023, auxquelles la cour renvoie pour de plus amples développements, l'agent judiciaire de l'État présente les arguments et moyens suivants :
La recevabilité de la requête n'est pas justifiée en l'absence de preuve du caractère définitif de l'ordonnance de non-lieu ;
La durée de la détention indemnisable est de 120 jours ;
Le casier judiciaire de Madame [V] [B] ne porte la mention d'aucune condamnation ;
La séparation de Madame [V] [B] et ses enfants résulte davantage de la mise en examen que de la détention ;
Madame [V] [B] a bénéficié de deux autorisations exceptionnelles de sorties suite au décès de son fils ;
La requérante n'établit pas la difficulté des conditions de détention qu'elle aurait réellement subies et le rapport d'enquête de personnalité souligne au contraire que sa détention s'est passée dans de bonnes conditions ;
La facture d'honoraires d'avocat produite est une simple facture de provision qui ne mentionne pas des diligences qui seraient toutes en lien avec la détention ;
L'agent judiciaire de l'État consent à verser la somme de 6108,39 euros en réparation de la perte de salaires de la requérante ;
Les sommes sollicitées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas justifiées.
L'agent judiciaire de l'État conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que la somme mise à la charge de l'État au titre de la réparation du préjudice moral de Madame [V] [B] soit limitée à 13000 euros, que son préjudice matériel soit indemnisé par la somme de 6108,39 euros et qu'elle soit déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ou, à titre subsidiaire, que celle-ci soit réduite à de plus justes proportions.
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Par des écritures reçues le 25 juillet 2023, le procureur général propose de suivre la position de l'agent judiciaire de l'État et conclut à ce qu'il soit alloué à Madame [V] [B] la somme de 13000 euros au titre de son préjudice moral. Il demande que la requérante soit déboutée de ses prétentions au titre de la perte de revenus et propose que la somme de 900 euros lui soit octroyée en réparation des frais d'avocat du fait de la détention en raison de la nature de l'affaire. Enfin, il propose que la somme de 800 euros lui soit octroyée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Les parties ont été régulièrement convoquées et entendues à l'audience tenue le 15 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la requête
Selon les dispositions combinées des articles 149-1, 149-2 et R. 26 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, a droit, à sa demande, à la réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.
Il lui appartient, dans les six mois de cette décision, de saisir le premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle la décision a été prononcée, par une requête, signée de sa main ou d'un mandataire.
L'article R. 26 du code de procédure pénale précise que le délai de six mois prévu à l'article 149-2 ne court à compter de la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive que si, lors de la notification de cette décision, la personne a été avisée de son droit de demander une réparation ainsi que des dispositions de l'article 149-1,149-2 et 149-3 (premier alinéa).
L'ordonnance du juge d'instruction prononçant un non-lieu à l'encontre de Madame [V] [B] a été rendue le 16 décembre 2022.
La présente requête a été reçue au greffe de la cour d'appel le 22 mai 2023 soit, dans le délai de six mois prévu à l'article 149-2 du code pénal.
L'agent judiciaire de l'État soutient que le certificat de non-appel versé au débat par la requérante n'est pas daté et qu'il ne mentionne pas explicitement qu'aucun appel n'aurait été inscrit à l'encontre de l'ordonnance du 16 décembre 2022.
Cependant, il ne ressort d'aucun élément du dossier que l'ordonnance en question aurait fait l'objet d'un appel, alors que le certificat de non-appel versé au dossier par la requérante, certes non daté, mentionne expressément le numéro de parquet 21018000077, identique à celui mentionné dans l'ordonnance du 16 décembre 2022 prononçant le non-lieu.
Par conséquent, il y a lieu de considérer que cette décision n'a pas fait l'objet d'un appel et est devenue définitive de telle sorte que la requête de Madame [V] [B] est recevable.
Sur la durée de la période à indemniser
Il ressort des éléments versés au dossier que Madame [V] [B] a été placée en détention provisoire du 18 janvier 2021 au 17 mai 2021.
En application des dispositions des articles 149 et suivants du code de procédure pénale, la période d'incarcération ouvrant droit à indemnisation a donc couru pendant 120 jours.
C'est cette période qui sera prise en compte pour calculer le montant de l'indemnisation.
Sur le préjudice moral
Madame [V] [B] a fait l'objet d'une détention provisoire non justifiée pour une durée de 120 jours.
La privation de liberté entraîne nécessairement un préjudice moral résultant du choc ressenti par une personne injustement privée de liberté.
Il est constant que le casier judiciaire de Madame [V] [B] ne portait la trace d'aucune mention de condamnation antérieure à la période de détention de telle sorte que son préjudice moral est majoré de ce fait.
La requérante soutient que son préjudice serait majoré du fait d'une séparation brutale d'avec son fils [L], alors âgé de quatre mois.
L'agent judiciaire de l'État soutient que cette séparation est moins le résultat du placement de Madame [V] [B] en détention provisoire que de la procédure pénale conduite à son encontre. Il souligne ainsi que dans son jugement du 28 janvier 2021, le juge des enfants du tribunal judiciaire d'Orléans a réservé les droits de Madame [V] [B] et de Monsieur [X] [N] « compte tenu de la procédure pénale en cours ». Cependant, il ressort du jugement du juge des enfants du tribunal judiciaire d'Orléans du 1er juillet 2021 qu'en l'absence d'interdiction de contact entre Madame [V] [B] et son fils [L] dans le cadre de son contrôle judiciaire, un droit de visite médiatisé a pu être mis en place à compter de la fin de sa détention provisoire. Il ressort également du jugement du 24 juin 2022 du juge des enfants du tribunal judiciaire d'Orléans que Madame [V] [B] a mis à profit ce droit de visite pour aller voir son fils [L] dans le cadre de visites médiatisées.
Dans ces conditions, la détention provisoire de Madame [V] [B] l'a bien privée de la possibilité de voir son fils [L], seulement âgé de quelques mois, dans le cadre de visites médiatisées qui auraient pu être mises en place dès le début de la procédure pénale. Il en sera tenu compte dans l'appréciation de son préjudice moral.
Madame [V] [B] soutient ensuite que son préjudice moral est aggravé par le fait qu'elle a dû faire le deuil de son fils [P] en détention et que, si elle a pu bénéficier d'une autorisation exceptionnelle de sortie le 22 janvier 2021, elle n'a pu l'accompagner lors de ses funérailles à Mayotte.
L'agent judiciaire de l'État soutient que Madame [V] [B] a également bénéficié d'une seconde autorisation exceptionnelle de sortie le 9 février 2021.
Si la requérante soutient n'avoir pu accompagner son fils lors de ses funérailles à Mayotte, outre le fait que cette affirmation n'est étayée par aucun élément, cette impossibilité est moins le résultat de la détention provisoire que celui de la procédure pénale alors en cours. En effet, même lorsque Madame [V] [B] a été remise en liberté, la mesure d'assignation à résidence prise à son encontre dans le cadre de la procédure pénale lui interdisait de sortir des limites territoriales de la [2] métropolitaine de telle sorte qu'elle n'aurait en tout état de cause pas pu se rentre à Mayotte.
Cependant, et même si elle a pu bénéficier de deux autorisations exceptionnelles de sortie le 22 janvier et le 9 février 2021, la détention de Madame [V] [B] a nécessairement impacté les conditions dans lesquelles celle-ci a dû faire le deuil de son fils de telle sorte que son préjudice moral est majoré.
Madame [V] [B] soutient également que son préjudice serait aggravé du fait des conditions de son incarcération. Elle invoque au soutien de son argumentaire un rapport du contrôleur général des lieux de privation de liberté tiré de la visite du centre pénitentiaire d'[Localité 3]-[Localité 4] du 4 au 14 avril 2016. Outre que le rapport invoqué n'est pas contemporain de la période pour laquelle l'indemnisation est sollicitée, ces éléments de portée générale ne permettent pas de justifier les conditions d'incarcération que la requérante aurait personnellement subies. À l'inverse, il ressort des éléments de la procédure et notamment du rapport d'enquête de personnalité du 10 juin 2021 que la détention de la requérante s'est déroulée dans de bonnes conditions de telle sorte que son préjudice n'est pas majoré de ce fait.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, le préjudice moral pour la détention provisoire de Madame [V] [B] est indemnisé par la somme de 18000 euros.
Sur le préjudice matériel
Madame [V] [B] sollicite la somme de 2400 euros au titre des frais d'avocat liés au contentieux de la détention.
Elle verse à ce titre au débat une facture n° 34820 du 25 janvier 2021 pour un montant de 2400 euros TTC. Il apparaît cependant sur le détail de la facture que celle-ci porte sur une première provision et non sur des honoraires définitifs et qu'elle porte sur des diligences qui ne sont pas exclusivement en lien avec la détention de telle sorte que les demandes effectuées sur le fondement de cette facture seront rejetées.
Cependant, il ressort des pièces versées au dossier qu'une enquête de faisabilité de placement sous assignation à résidence avec surveillance électronique a été formulée par l'avocat de Madame [V] [B] le 16 avril 2021 et que c'est sur la base de cette enquête que cette dernière a été libérée par l'ordonnance du 12 mai 2021 du juge des libertés et de la détention.
Dans ces conditions, le préjudice tiré des frais d'avocat liés au contentieux de la détention est indemnisé par la somme de 1000 euros.
Madame [V] [B] sollicite par ailleurs la somme de 6 108,39 euros en réparation de son préjudice tiré de la perte de salaires.
L'agent judiciaire de l'État consent à s'acquitter de cette somme. Par conséquent il y a lieu d'allouer à Madame [V] [B] la somme de 6 108,39 euros en réparation de sa perte de salaires.
Le préjudice matériel de Madame [V] [B] est donc indemnisé par la somme totale de 7 108,39 euros.
Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Aucune convention d'honoraires, devis ou facture de nature à établir le montant des honoraires sollicités par son conseil dans le cadre de la présente instance n'étant produite, il sera alloué à Madame [V] [B] une indemnité de procédure de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par décision susceptible de recours devant la commission nationale de réparation des détentions,
DÉCLARE Madame [V] [B] recevable en sa requête en indemnisation,
ALLOUE à Madame [V] [B] la somme de 18000 euros (DIX HUIT MILLE EUROS) en réparation de son préjudice moral,
ALLOUE à Madame [V] [B] la somme de 7 108,39 euros (SEPT MILLE CENT HUIT EUROS ET TRENTE-NEUF CENTIMES) en réparation de son préjudice matériel,
ALLOUE à Madame [V] [B] la somme de 1000 euros (MILLE EUROS) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
LAISSE les dépens à la charge du Trésor public,
RAPPELLE que cette décision est assortie de l'exécution provisoire de plein droit,
DIT que la présente décision sera notifiée à la requérante et à l'agent judiciaire de l'État dans les formes prescrites à l'article R. 38 du code de procédure pénale et qu'une copie en sera remise au procureur général près la cour d'appel d'Orléans.
La présente décision a été signée par Monsieur Sébastien Evesque, conseiller faisant fonction de premier président, et Madame Fatima Hajbi, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,
[G] [Z]
Le conseiller faisant fonction de Premier Président,
[E] [T]