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Décisions

CA Colmar, ch. 2 a, 7 février 2024, n° 21/04250

COLMAR

Arrêt

Autre

CA Colmar n° 21/04250

7 février 2024

MINUTE N° 54/2024

Copie exécutoire

aux avocats

Le 7 février 2024

La greffière

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 7 FÉVRIER 2024

Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/04250 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HV2F

Décision déférée à la cour : 21 Septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg

APPELANT et INTIMÉ SUR APPEL INCIDENT :

Monsieur [L] [F]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Valérie BISCHOFF-DE OLIVEIRA, Avocat à la cour

INTIMÉE et APPELANTE SUR APPEL INCIDENT :

La S.A.S. GRENKE LOCATION prise en la personne de son représentant légal

ayant siège [Adresse 1]

représentée par Me Katja MAKOWSKI, Avocat à la cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Septembre 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nathalie HERY, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie HERY, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Myriam DENORT, Conseillère

Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE

En présence de Madame Ophélie CRAMILLY, Greffière stagiaire

ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement, après prorogation du 24 janvier 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Nathalie HERY, Conseillère faisant fonction de Présidente, et Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Entre le 1er mars 2016 et le 5 juillet 2016, le Docteur [L] [F], médecin généraliste a souscrit auprès de la SAS Grenke Location quatre contrats de location portant sur du matériel de téléphonie fourni par la SAS Unirezo.

Le 16 février 2018, la société Grenke Location a procédé à la résiliation anticipée des contrats pour non-paiement des loyers, le 16 février 2018 pour 1'un, et le 18 septembre 2018, pour les autres, a sommé M. [F] de lui régler des indemnités et de lui restituer le matériel loué.

Après une dernière mise en demeure restée sans suite, la société Grenke Location, le 10 septembre 2019, a fait assigner M. [F] devant le tribunal de grande instance de Strasbourg à fin de paiement d'une indemnité de résiliation et de restitution du matériel.

Par jugement du 21 septembre 2021, le tribunal judiciaire remplaçant le tribunal de grande instance, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a :

- débouté M. [F] de :

* sa demande tendant à voir ordonner une mesure de conciliation ou de médiation,

* sa demande tendant à voir ordonner une expertise en écritures ;

- dit que les contrats litigieux ont bien été conclus par la société Grenke Location et M. [F] ;

- constaté que M. [F] ne soulevait aucune fin de non-recevoir et a déclaré recevable l'action introduite par la société Grenke Location ;

- débouté M. [F] de ses demandes tendant à :

* voir déclarer nuls les contrats litigieux ;

* ce qu'il soit enjoint à la société Grenke Location de produire un décompte précis ;

* voir annuler les indemnités de résiliation prévues aux contrats ;

- déclaré lesdites indemnités manifestement excessives et, en conséquence, a ramené à 5% la majoration de 10% contractuellement prévue et, en conséquence, a condamné M. [F] à payer à la société Grenke Location :

* au titre du contrat du 1er mars 2016 :

. une somme de 1 101,60 euros portant intérêts au taux légal augmentés de 5 points à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers échus impayés,

. une somme de 5 049 euros majorée de 5% soit une somme totale de 5 301,45 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers à échoir,

. une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement,

* au titre du contrat du 10 mars 2016 :

. une somme de 1 293,88 euros portant intérêts au taux légal augmentés de 5 points à compter du 16 février 2018, au titre des loyers échus impayés,

. une somme de 6 240 euros majorée de 5 % soit une somme totale de 6 552 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 février 2018, au titre des loyers à échoir,

. une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement,

* au titre du contrat du 20 mai 2016 :

. une somme de 1 944 euros portant intérêts au taux légal augmentés de 5 points à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers échus impayés,

. une somme de 7 920 euros majorée de 5 soit une somme totale de 8 316 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers à échoir,

. une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement,

* au titre du contrat du 5 juillet 2016 :

. une somme de 403,20 euros portant intérêts au taux légal augmentés de 5 points à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers échus impayés,

. somme de 2 184 euros majorée de 5% soit une somme totale de 2 293,20 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers à échoir.

. une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement ;

- condamné M. [F] à restituer à la société Grenke Location:

. une centrale téléphonique Aastra-Mitel, un poste numérique Aastra, un serveur NAS TO et un poste sans fil, objets du contrat du 1er mars 2016,

. un serveur MS WIN 7, un ARM brassage switch, un switch 12u, un onduleur et un 2lic office, objets du contrat du 10 mars 2016,

. un système AASTRA430, un poste DECT, un serveur informatique + sauvegarde et un onduleur sur batterie, objets du contrat du 20 mai 2016,

. un téléphone sl 910, un poste 4370, une switch VDSL et un portier, objets du contrat du 5 juillet 2016,

ceci, sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification du présent jugement ;

- dit n'y avoir lieu d'allouer quelque montant que ce soit à la société Grenke Location au titre des frais irrépétibles ;

- condamné M. [F] aux entiers dépens.

Le tribunal a fait état de ce que sa saisine avait notamment été précédée d'une lettre de mise en demeure dans laquelle la société Grenke Location déclarait ne pas être opposée à un règlement amiable du litige et invitait M. [F] à lui faire part de sa position et à lui communiquer les coordonnées de son conseil, aucune suite n'ayant été donnée à cette proposition.

Après avoir débouté M. [F] de sa demande tendant à voir ordonner une mesure de conciliation ou de médiation, de sa demande d'expertise en écriture et avoir retenu l'existence des quatre contrats en cause, le tribunal a considéré que M. [F] ne pouvait voir déclarer nuls les contrats en cause aux motifs que ces contrats n'avaient été conclus qu'entre Unirezo et lui-même, que seule leur première page avait été paraphée, ce qui importait peu, qu'ils avaient été signés en blanc, ce qui ne relevait que de sa propre responsabilité, qu'aucun bordereau de rétractation ne lui avait été fourni, alors qu'il n'avait, cependant, pas usé du délai supplémentaire qui en résultait pour bénéficier de cette faculté et qu'aucun double ne lui avait été laissé, alors que la société Unirezo n'avait pas été appelée dans la cause.

Le tribunal a indiqué que M. [F] ne rapportait pas la preuve de ce que le matériel n'avait jamais donné satisfaction, qu'il faisait, pour partie, double emploi et qu'il n'avait cessé d'en proposer la restitution.

Après avoir constaté que la société Grenke Location avait produit les relevés de compte des quatre contrats de location de longue durée conclus avec M. [F] lesquels démontraient que la première avait pris en compte les versements d'ores et déjà effectués, le tribunal, au regard de l'existence d'impayés, a retenu qu'était justifiée la résiliation anticipée des quatre contrats par la société Grenke Location, par application de l'article 10 des conditions générales.

Faisant ensuite application des articles 11 et 17 des conditions générales des contrats sur les sommes dues en cas de résiliation et après avoir qualifié de clause pénale les indemnités de résiliation prévues et rappelé que le juge avait le pouvoir de les modérer lorsqu'elles sont manifestement excessives, le tribunal a décidé de ramener la majoration à 5 %.

M. [L] [F] a formé appel à l'encontre de ce jugement par voie électronique le 30 septembre 2021. L'affaire a été inscrite sous le n°R21/4250.

M. [L] [F] a de nouveau formé appel le 2 décembre 2021. L'affaire a été inscrite sous le n°RG 21/4932.

Ces deux affaires ont été jointes le 29 juin 2022.

L'instruction a été clôturée le 2 mai 2023.



PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 26 janvier 2023, M. [F] demande à la cour de :

sur l'appel principal :

- le recevoir en son appel, l'y déclarer bien-fondé ;

en conséquence,

- infirmer le jugement entrepris ;

et statuant à nouveau :

- déclarer nul l'acte introductif d'instance ;

à titre subsidiaire :

- prononcer la nullité du contrat litigieux ;

à titre plus subsidiaire :

- constater le jeu de l'exception d'inexécution ;

- déclarer la clause exonératoire de responsabilité abusive ;

en conséquence :

- la déclarer réputée non écrite ;

en tous cas :

- débouter la société Grenke Location de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

sur l'appel incident :

- déclarer la société Grenke Location mal fondée en son appel incident ;

en conséquence :

- le rejeter ;

- débouter la société Grenke Location de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

en tout cas :

- condamner la société Grenke Location en tous les frais et dépens de première instance et d'appel et à lui payer une somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur l'appel principal, in limine litis, M. [F] indique que l'assignation est nulle puisqu'elle ne répond pas aux conditions énoncées par l'article 56 code de procédure civile alors en vigueur, imposant de faire des diligences pour parvenir à une résolution amiable du litige, le non-respect de cette formalité lui ayant causé un grief puisqu'il n'a pas pu s'expliquer et qu'un contentieux n'a pu être évité.

M. [F] expose que la société Grenke Location se prévaut de contrats irréguliers dans la mesure où ces actes ne comportaient aucun bordereau détachable de rétractation, les dispositions de l'article L.311-6 du code de la consommation en vigueur à l'époque n'ayant pas été respectées.

Il ajoute que n'ont pas plus été respectées les dispositions de l'article L.121-22 du code de la consommation devenu L.221-3 du code de la consommation lesquelles prévoient que les dispositions des sections 2, 3 et 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. Il précise que, sous l'empire de cet ancien article, et en application d'une jurisprudence constante, il incombait au juge de rechercher si les contrats conclus avaient un rapport direct ou indirect avec l'activité du contractant professionnel ; si le rapport était indirect avec l'activité du professionnel, cet article permettait d'appliquer les dispositions consuméristes relatives au démarchage aux contrats.

Il rappelle l'article liminaire du code de la consommation qui définit le consommateur comme toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole.

Il renvoie, d'une part, à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union Européenne sur la notion de professionnel considérée comme fonctionnelle et impliquant, donc, d'apprécier si le rapport contractuel s'inscrit dans le cadre des activités auxquelles une personne se livre à titre professionnel, et, d'autre part, à la jurisprudence de la Cour de cassation qui juge que le contrat qui n'est pas en lien direct avec l'activité professionnelle et qui ne s'inscrit pas dans le cadre des activités auxquelles la personne se livre à titre professionnel bénéficie des dispositions du code de la consommation.

Il soutient que la location de matériel téléphonique ne faisant pas partie des actes auxquels il se livre dans le cadre de son activité de médecin, les dispositions du code de la consommation lui sont applicables.

Il ajoute que l'article L.121-18 du code de la consommation applicable au moment des faits n'a pas plus été respecté, celui-ci imposant, pour tout professionnel, dans le cadre d'un contrat conclu hors établissement, la délivrance d'une information sur son droit de rétractation puisqu'en effet les informations précontractuelles n'ont pas été fournies et qu'il n'y avait pas de formulaire de rétractation.

Il en déduit que le contrat est nul.

M. [F] invoque également l'exception d'inexécution faisant valoir que le matériel n'a jamais donné satisfaction de sorte qu'il a même déposé plainte à l'encontre de l'installateur.

Il souligne que les faits ont eu lieu à une époque où il avait passé plusieurs commandes de matériel, par le biais d'un démarchage véhément et où il était particulièrement vulnérable subissant un divorce difficile et venant de perdre son père.

Il précise qu'il ne conteste pas avoir reçu le matériel mais conteste l'avoir commandé, qu'il n'a jamais utilisé ce matériel qui était à la disposition de la société Grenke Location.

Ayant restitué le matériel, il considère que sa condamnation à le restituer figurant dans le jugement n'a plus d'objet.

Sur la clause exonérant la société Grenke Location de toute responsabilité en cas de difficultés rencontrées avec le matériel loué, M. [F] soutient que pouvant être considéré comme un non-professionnel au sens du code de la consommation, il est en droit de se prévaloir des dispositions de ce code.

Il se prévaut des dispositions de l'article L.132-1 du code de la consommation dans sa version applicable aux faits de l'espèce aux termes desquelles sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Il précise que le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties apparaissant lorsqu'il n'existe aucune réciprocité dans les obligations du consommateur envers le professionnel, en particulier lorsque les clauses sont exclusivement rédigées au détriment du consommateur.

Il fait état de ce qu'il a été jugé que cette clause, présente dans les conditions générales de la société Grenke Location, apparaissait comme abusive et devait être réputée non écrite.

Arguant de ce qu'une telle clause dégage de toute responsabilité le professionnel, au détriment de l'autre partie, M. [F] considère qu'elle doit être réputée non écrite, en vertu de l'article L.132-1 susvisé.

Sur la clause pénale, M. [F] indique que la clause des contrats litigieux selon laquelle en cas de résiliation anticipée des contrats, le locataire doit s'acquitter d'une majoration des intérêts de retard de 10% a un caractère manifestement excessif.

Il fait état d'une jurisprudence qui a retenu qu'il incombait au juge d'examiner d'office la conformité de cette clause aux dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives en recherchant si celle-ci n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du non-professionnelle ou consommateur.

A titre subsidiaire il fait relever que la majoration de 10% à titre de sanction prévue par l'article 11 du contrat est une clause pénale qui en l'espèce doit être réduite à 0% et non simplement à 5% compte tenu des agissements du fournisseur et de l'inertie de Grenke Location face à ce dernier et à un contrat comportant des indications insuffisantes.

Aux termes de ses conclusions transmises par voie électronique le 31 janvier 2023, la société Grenke Location demande à la cour de :

- déclarer l'appel de M. [L] [F] mal fondé ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Strasbourg du 21 septembre 2021 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il déclaré les indemnités de résiliation manifestement excessives et a, en conséquence, ramené à 5 % la majoration de 10 % contractuellement prévue et dit n'y avoir lieu de lui allouer quelque montant que ce soit au titre des frais irrépétibles ;

- déclarer son appel incident portant sur le montant de l'indemnité de résiliation et l'article 700 du code de procédure civile recevable et bien fondé ;

en conséquence :

- à propos du contrat de location n° 055-38928 du 1er mars 2016 :

· confirmer la décision en ce qu'elle a condamné M. [F] au paiement de la somme de 1 101,60 euros augmentée des intérêts légaux augmentés de cinq points à compter du 18 septembre 2018, au paiement de la somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement, et à restituer le matériel, objet du contrat de location n°055-038928 (indiqué sur la facture du 3 mars 2016 émise par la société Unirezo : une centrale téléphonique Aastra-Mitel, un poste numérique Aastra, un serveur NAS TO et un sans fil), sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration du délai d'un mois suivant la signification du jugement,

· l'infirmer sur le montant de l'indemnité de résiliation,

· condamner M. [F] au paiement de la somme de 5 049 euros majorée de 10%, soit la somme de 5 553,90 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 18 septembre 2018 ;

- à propos du contrat de location n°055-038979 du 10 mars 2016 :

· confirmer la décision en ce qu'elle a condamné M. [F] au paiement de la somme de 1 293,88 euros augmentée des intérêts légaux augmentés de cinq points à compter du 16 février 2018, au paiement de la somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement, à restituer le matériel, objet du contrat de location n° 055-038979 (indiqué sur la facture du 9 mars 2016 émise par la société Unirezo : un serveur MS WIN 7, un ARM brassage switch, un switch 12u, un onduleur et un 2lic office), sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration du délai d'un mois suivant la signification du jugement,

· l'infirmer sur le montant de l'indemnité de résiliation,

· condamner M. [F] au paiement de la somme de 6 240 euros majorée de 10 %, soit la somme de 6 864 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 16 février 2018 ;

- à propos du contrat de location n°055-039616 du 20 mai 2016 :

· confirmer la décision en ce qu'elle a condamné M. [F] au paiement de la somme de 1 944 euros augmentée des intérêts légaux augmentés de cinq points à compter du 18 septembre 2018, au paiement de la somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement, à restituer le matériel, objet du contrat de location n° 055-039616 (indiqué sur la facture du 23 mai 2016 émise par la société Unirezo : un système AASTRA430, un poste DECT, un serveur informatique + sauvegarde et un onduleur sur batterie), sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration du délai d'un mois suivant la signification du jugement,

· l'infirmer sur le montant de l'indemnité de résiliation,

· condamner M. [F] au paiement de la somme de 7 920 euros majorée de 10%, soit la somme de 8 712 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 18 septembre 2018 ;

- à propos du contrat de location n°055-040041 du 5 juillet 2016 :

· condamner M. [F] au paiement de la somme de 403,20 euros augmentée des intérêts légaux augmentés de cinq points à compter du 18 septembre 2018, au paiement de la somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement, à restituer le matériel, objet du contrat de location n° 055-040041 (indiqué sur la facture du 7 juin 2016 émise par la société Unirezo : un téléphone sl 910, un poste 4370, un switch VDSL et un portier), sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration du délai d'un mois suivant la signification du jugement,

· l'infirmer sur le montant de l'indemnité de résiliation,

· condamner M. [F] au paiement de la somme de 2 184 euros majorée de 10 %, soit la somme de 2 402,40 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 18 septembre 2018 ;

en tout état de cause :

- débouter M. [F] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

- infirmer la décision en ce qu'elle a été déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [F] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance.

- condamner M. [F] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel ;

- condamner M. [F] aux entiers frais et dépens de l'instance d'appel et de ceux de la première instance.

S'agissant de l'assignation, la société Grenke Location soutient qu'elle a envoyé par avocat une lettre recommandée avec demande d'avis de réception de mise en demeure, datée du 19 mars 2019 à laquelle M. [F] n'a jamais donné suite, ce qui témoigne du désintérêt de ce dernier pour trouver une solution amiable. Elle se rallie à la motivation du premier juge sur ce point.

Elle souligne que, d'une part, avant la résiliation des contrats, M. [F] a été destinataire de quatre mises en demeure pour chacun des contrats auxquelles il n'a pas répondu et que, d'après la réception des lettres de résiliation, il ne s'est pas plus manifesté.

Elle considère qu'elle a tout mis en œuvre avant d'être obligée de saisir la justice et dit ne pas comprendre le grief allégué par M. [F].

Sur la validité du contrat de location, la société Grenke Location soutient que :

- l'article L.311-6 du code de la consommation, en vigueur à la date des contrats souscrits ne s'applique pas puisqu'il concerne les crédits à la consommation,

- l'article L.121-22 du même code, alors en vigueur, concerne la « publicité portant sur des opérations commerciales réglementées » et a été créé le 1er juillet 2016 soit postérieurement à la signature des trois premiers contrats,

- l'article L.221-3 est également entré en vigueur le 1er juillet 2016 et ne s'applique donc pas en l'espèce.

Elle entend rappeler que l'absence de bordereau de rétractation n'emporte pas comme conséquence la nullité du contrat mais la prorogation d'une durée de douze mois du délai de rétractation, ce qu'a souligné le premier juge.

Elle souligne que M. [F] n'a jamais sollicité la nullité des contrats de location, tout comme il n'a jamais exercé son droit de rétractation et qu'il a exécuté spontanément les contrats de location pendant deux années avant d'arrêter, sans explications, de régler les loyers, de sorte que, par son comportement, il a confirmé les contrats de location.

Sur l'exception d'inexécution soulevée par l'appelant, la société Grenke Location indique qu'aucune preuve n'est apportée aux débats ni élément nouveau par rapport au jugement de première instance qui l'a débouté sur ce point, dont elle reprend la motivation.

Elle considère avoir parfaitement respecté ses obligations contractuelles puisqu'elle a acheté les matériels au fournisseur et les a donnés en location au locataire.

Elle entend rappeler qu'il y a eu quatre bons de livraison signés sans réserve à des dates différentes, ce qui démontre que M. [F] a conclu les contrats de location en connaissance de cause et qu'il a arrêté volontairement de respecter ses obligations contractuelles.

S'agissant de la clause l'exonérant de toute responsabilité en cas de difficultés rencontrées avec le matériel loué, la société Grenke Location fait valoir qu'il s'agit d'une clause habituelle et d'usage dans ce type de contrat qui ne crée aucun déséquilibre, le locataire, en cas de problème avec le matériel, devant logiquement solliciter le fournisseur dudit matériel, ce que M. [F] n'a jamais fait.

Elle ajoute que M. [F] prétend que le matériel n'a jamais fonctionné mais il a néanmoins réglé les loyers pendant deux ans, ne s'est jamais expliqué sur les dysfonctionnements allégués et n'a fourni aucune preuve sur ce point.

Elle expose qu'aux termes des contrats, le locataire est seul responsable de son choix du fournisseur, le bailleur ne pouvant à quelque titre que ce soit être appelé en responsabilité et qu'il appartenait à l'appelant de se retourner contre son propre fournisseur.

Sur la majoration de 10 %, la société Grenke Location précise qu'elle découle de l'application des conditions générales et soutient qu'elle n'a pas à subir les conséquences découlant du comportement malhonnête de son cocontractant dont le comportement lui a causé un préjudice certain et incontestable, le matériel n'ayant pas été restitué.

Elle souligne que le matériel ne lui a toujours pas été restitué.

La société Grenke Location se prévaut d'un préjudice découlant de ce qu'elle s'est acquittée de la totalité du prix d'acquisition du matériel dès la signature par le client du procès-verbal de réception en mobilisant un capital qui a vocation à s'amortir sur la durée contractuelle, de telle sorte que la défaillance du locataire lui a fait perdre d'une part le capital investi, mais d'autre part la rentabilité escomptée de l'opération de location qui constitue l'un de ses objectifs prioritaires en tant qu'organisme de financement, soulignant que le matériel ne lui a jamais été restitué, de sorte qu'elle est privée de sa jouissance et que si elle parvient à récupérer ce matériel d'occasion, la possibilité de le relouer est impossible et la somme qu'elle obtiendra, en cas de vente, sera dérisoire en comparaison de ce qu'elle aurait perçue si le contrat de location avait été exécuté.

Elle considère que ses demandes sont également justifiées au regard des dispositions de l'article 1231-1 du code civil.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions transmises aux dates susvisées.



MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de nullité de l'assignation du 10 septembre 2019

Aux termes des dispositions de l'article 56 du code de procédure civile, en vigueur au 10 septembre 2019, l'assignation, à peine de nullité, précise les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public.

La nullité dont se prévaut M. [F] étant une nullité de forme, elle est soumise aux dispositions de l'article 112 du code de procédure civile lesquelles prévoient que la nullité des actes de procédure peut être invoquée au fur et à mesure de leur accomplissement mais est couverte si celui qui l'invoque a, postérieurement à l'acte critiqué, fait valoir des défenses au fond.

Force est de constater que M. [F] soulève cette nullité pour la première fois, à hauteur d'appel, alors qu'il a conclu au fond en première instance, de sorte que l'exception de nullité est irrecevable, étant, en outre, souligné que, l'assignation litigieuse, au titre des diligences entreprises par la société Grenke Location en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, précise que celle-ci a adressé à M. [F] une mise demeure à laquelle il n'a pas donné suite.

Sur le fond

Sur la demande de nullité des contrats pour non-respect des dispositions du code de la consommation

Sur l'application des dispositions du code de la consommation aux contrats litigieux

M. [F] soutient que les contrats ne respectent pas les dispositions des articles L.311-6, L.121-22 devenu L.221-3, L.121-18 du code de la consommation et doivent être déclarés nuls sans faire de distinction entre les contrats alors que, considération prise de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 entrée en vigueur le 1er juillet 2016 ayant modifié ledit code, les contrats litigieux ne sont pas tous soumis aux mêmes dispositions.

C'est par erreur que M. [F] a indiqué que l'article L.121-22 du code de la consommation était devenu l'article L.221-3. En effet, l'article L.221-3 du code de la consommation entré en vigueur le 1er juillet 2016 et donc susceptible de ne s'appliquer qu'au seul contrat litigieux conclu après cette date, soit le 5 juillet 2016 indique que les dispositions des sections 2, 3, 6 du chapitre concernant les contrats conclus à distance et hors établissement applicables aux relations entre consommateurs et professionnels sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels, dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq. Cet article L.221-3 a repris les dispositions de l'article L.121-16-1 III du même code d'ordre public lequel s'applique aux trois autres contrats et disposait que les sous-sections 2, 3, 6, 7 et 8, applicables aux relations entre consommateurs et professionnels étaient étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entrait pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci était inférieur ou égal à cinq.

Il n'est pas contesté que les contrats en cause ont été souscrits hors établissement, entre professionnels, au sens des dispositions légales ni même que le nombre de salariés employés par M. [F] était inférieur ou égal à cinq.

Les contrats litigieux portaient sur la location de matériel de téléphonie à M. [F] dont l'activité professionnelle était la médecine générale ; leur objet n'avait aucun lien avec la compétence nécessaire à ce dernier pour pratiquer son activité professionnelle de médecine générale n'incluant pas de compétences en matière de téléphonie et n'entrait donc pas dans le champ de son activité principale.

Il s'en déduit que M. [F] disposait d'un droit de rétraction au sujet duquel il n'a reçu aucune information néanmoins obligatoire et qu'il n'a pas été mis en mesure d'utiliser un bordereau de rétractation lui permettant d'exercer ce droit, tel que le prévoyait pour les contrats souscrits le 1er mars 2016, le 10 mars 2016 et le 20 mai 2016, les articles L.121-17 I 2° et L.121-18-1 du code de la consommation, dans leur version applicable aux faits de l'espèce et tel que le prévoyaient pour le contrat souscrit le 5 juillet 2016, les articles L.221-8, L.221-5 et L.221-9 du code de la consommation, dans leur version applicable aux faits de l'espèce.

Sur la sanction encourue

S'agissant des contrats souscrits le 1er mars 2016, le 10 mars 2016 et le 20 mai 2016, par application des dispositions de l'article L.121-18-1 du code de la consommation, dans sa version applicable aux faits de l'espèce, lorsque les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation mentionnées au premier ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue.



S'agissant du contrat souscrit le 5 juillet 2016, aux termes des dispositions de l'article L. 242-1 du code de la consommation, dans sa version applicable à la date de ce contrat, les dispositions de l'article L.221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Considérant qu'aucun des contrats litigieux ne mentionne les dispositions susvisées qui prévoient la nullité du contrat en cas de manquement aux obligations d'information, l'exécution spontanée des contrats pendant deux ans par M. [F] et le fait qu'il n'ait jamais demandé la nullité de ces contrats ne pouvaient couvrir les vices qui les affectaient, M. [F] étant dans l'ignorance de la sanction attachée aux dispositions non respectées.

Dès lors, il y a lieu d'annuler tous les contrats litigieux et donc d'infirmer le jugement entrepris de ce chef.

Sur la demande de restitution des matériels

Cette demande ayant été faite sur le fondement de la résiliation des contrats est rejetée. Le jugement entrepris est infirmé de ce chef.



Sur les dépens et les frais de procédure non compris dans les dépens

Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu d'allouer quelque montant que ce soit à la société Grenke Location au titre des frais irrépétibles mais est infirmé en ce qu'il a condamné M. [F] aux dépens.

La société Grenke Location est condamnée aux dépens de la procédure de premier ressort et de la procédure d'appel. Elle est condamnée à payer à M. [F] la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure exposés en premier ressort et à hauteur d'appel. La société Grenke Location est déboutée de sa demande formulée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant, publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré :



DÉCLARE irrecevable la demande de nullité de l'assignation du 10 septembre 2019 ;



INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 21 septembre 2021 en ce qu'il a :



- débouté M. [F] de ses demandes tendant à voir déclarer nuls les contrats litigieux ;

- condamné M. [F] à payer à la société Grenke Location :

* au titre du contrat du 1er mars 2016 :

. une somme de 1 101,60 euros portant intérêts au taux légal augmentés de 5 points à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers échus impayés,

. une somme de 5 049 euros majorée de 5% soit une somme totale de 5 301,45 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers à échoir,

. une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement,

* au titre du contrat du 10 mars 2016 :

. une somme de 1 293,88 euros portant intérêts au taux légal augmentés de 5 points à compter du 16 février 2018, au titre des loyers échus impayés,

. une somme de 6 240 euros majorée de 5 % soit une somme totale de 6 552 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 février 2018, au titre des loyers à échoir,

. une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement,

* au titre du contrat du 20 mai 2016 :

. une somme de 1 944 euros portant intérêts au taux légal augmentés de 5 points à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers échus impayés,

. une somme de 7 920 euros majorée de 5 soit une somme totale de 8 316 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers à échoir,

. une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement,

* au titre du contrat du 5 juillet 2016 :

. une somme de 403,20 euros portant intérêts au taux légal augmentés de 5 points à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers échus impayés,

. somme de 2 184 euros majorée de 5% soit une somme totale de 2 293,20 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2018, au titre des loyers à échoir.

. une somme de 40 euros au titre des frais de recouvrement ;

- condamné M. [F] à restituer à la société Grenke Location:

. une centrale téléphonique Aastra-Mitel, un poste numérique Aastra, un serveur NAS TO et un poste sans fil, objets du contrat du 1er mars 2016,

. un serveur MS WIN 7, un ARM brassage switch, un switch 12u, un onduleur et un 2lic office, objets du contrat du 10 mars 2016,

. un système AASTRA430, un poste DECT, un serveur informatique + sauvegarde et un onduleur sur batterie, objets du contrat du 20 mai 2016,

. un téléphone sl 910, un poste 4370, une switch VDSL et un portier, objets du contrat du 5 juillet 2016,

ceci, sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification du présent jugement ;

- condamné M. [F] aux entiers dépens ;



CONFIRME pour le surplus et dans les limites de l'appel le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 21 septembre 2021 ;



Statuant de nouveau sur les points infirmés et y ajoutant :



ANNULE les contrats du 1er mars 2016, du 10 mars 2016, du 20 mai 2016 et du 5 juillet 2016 ;

DÉBOUTE la SAS Grenke Location de sa demande de restitution des matériels afférents aux contrats du 1er mars 2016, du 10 mars 2016, du 20 mai 2016 et du 5 juillet 2016, en ce qu'elle est fondée sur la résiliation des contrats et de ses demandes en paiement au titre de ces contrats ;

CONDAMNE la SAS Grenke Location aux dépens de la procédure de premier ressort et de la procédure d'appel ;



DÉBOUTE la SAS Grenke Location de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés à hauteur d'appel ;



CONDAMNE la SAS Grenke Location à payer à M. [L] [F] la somme de 3 000 euros (trois mille euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procédure non compris dans les dépens exposés en premier ressort et à hauteur d'appel.

La greffière, La conseillère,