Décisions
CA Caen, 1re ch. civ., 30 janvier 2024, n° 21/01440
CAEN
Arrêt
Autre
AFFAIRE : N° RG 21/01440 - N° Portalis DBVC-V-B7F-GYFR
ARRÊT N°
ORIGINE : Décision du Juge de l'exécution de CAEN du 09 Mars 2021
RG n° 19/03506
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 30 JANVIER 2024
APPELANTE :
La S.A. INTRUM DEBT FINANCE AG
prise en la personne de son représentant légal
N° SIRET : CH -100.023.266
[Adresse 8]
[Localité 3] (SUISSE)
représentée par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN
assistée de Me Alain PIMONT, avocat au barreau de ROUEN,
INTIMÉE :
Madame [M] [R]
née le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 5]
[Adresse 7]
[Localité 5]
assistée de Me Bénédicte GUILLEMONT, avocat au barreau de CAEN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022021005062 du 19/08/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
DÉBATS : A l'audience publique du 16 novembre 2023, sans opposition du ou des avocats, Mme DELAUBIER, Conseillère, a entendu seule les observations des parties sans opposition de la part des avocats et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme COLLET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
Mme VELMANS, Conseillère,
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 30 Janvier 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 25 juin 2008, Mme [M] [R] a souscrit un crédit renouvelable utilisable par fractions et assortie de moyens d'utilisation de compte auprès de la société anonyme Fidem.
Par ordonnance en date du 28 octobre 2009 rendue par le président du tribunal d'instance de Caen et signifiée par acte d'huissier remis à étude le 2 novembre 2009, il a été enjoint à Mme [R] de payer à la société Fidem une somme en principal de 1 405,89 euros majorée des intérêts au taux légal ainsi qu'une somme de 60 euros à titre de clause pénale outre les frais et accessoires.
Le 29 janvier 2010, l'ordonnance d'injonction de payer rendue exécutoire le 7 janvier précédant ainsi qu'un commandement de payer aux fins de saisie-vente ont été signifiés par la société Fidem au domicile de Mme [R] ('Mme [R] [M] C/O Mme [L] [K]') .
Par acte sous seing privé du 18 décembre 2018, la société Bnp Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Fidem à la suite d'une fusion-absorption, a cédé une créance qu'elle détenait envers Mme [R] à la société Intrum Debt Finance AG.
Le 25 juillet 2019, la société Intrum Debt Finance AG a fait signifier à la personne de Mme [R] la cession de créance intervenue ainsi qu'un commandement aux fins de saisie-vente.
Le 12 août 2019, la société Intrum Debt Finance AG a fait pratiquer une saisie-attribution des comptes de Mme [R] entre les mains de la Banque Postale.
Le 23 octobre 2019, la société Intrum Debt Finance a fait signifier à Mme [R] un procès-verbal de saisie-vente mobilière.
Par déclaration au greffe du 21 novembre 2019 du tribunal d'instance de Caen, Mme [R] a formé opposition à l'ordonnance portant injonction de payer rendue le 28 octobre 2009.
Par acte du 22 novembre 2019, Mme [R] a fait assigner la société Intrum Debt Finance AG devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Caen aux fins d'annulation de la saisie-vente et, subsidiairement, de voir ordonner le sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 28 octobre 2009.
Par jugement du 9 mars 2021 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Caen a :
- annulé l'acte de saisie-vente en date du 23 octobre 2019 ;
- condamné la société Intrum Debt Finance AG aux entiers dépens ;
- condamné la société Intrum Debt Finance AG à payer à Me Guillemont la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
- débouté la société Intrum Debt Finance AG de ses demandes ;
- rejeté toute demande plus ample ou contraire.
Par déclaration du 21 mai 2021, la société Intrum Debt Finance AG a formé appel de ce jugement.
Par conclusions d'incident notifiées le 13 décembre 2021, Mme [R] a demandé au conseiller de la mise en état de déclarer l'appel interjeté par la société Intrum Debt Finance AG irrecevable en raison de sa tardiveté.
Par ordonnance du 8 juin 2022, le président de la première chambre civile de céans a déclaré le conseiller de la mise en état incompétent pour connaître de l'incident en application des articles R.121-20 du code des procédures civiles d'exécution et 905 du code de procédure civile.
Mme [R] ayant présenté de nouvelles conclusions d'incident le 13 juin 2022 pour les mêmes motifs ce, devant le président de la première chambre civile, celui-ci a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Intrum Debt Finance AG et débouté Mme [R] de son incident tendant à voir déclarer irrecevable l'appel interjeté le 21 mai 2021.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 27 janvier 2023, la société Intrum Debt Finance AG demande à la cour de :
- la recevoir en son appel à l'encontre du jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Caen le 9 mars 2021 et le dire bien fondé ;
- infirmer le jugement en ce qu'il :
* a annulé l'acte de saisie-vente en date du 23 octobre 2019 ;
* l'a condamnée aux entiers dépens ;
* l'a condamnée à payer à Me Guillemont la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
* l'a déboutée de ses demandes.
Par conséquent,
- débouter Mme [R] de sa demande d'annulation de la saisie-vente pratiquée le 23 octobre 2019 ;
- subsidiairement, débouter Mme [R] de sa demande de sursis à statuer ;
- condamner Mme [R] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 10 février 2023, Mme [R] demande à la cour, au visa des articles R.121-15, R.121-20 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, et 905 du code de procédure civile, de :
- débouter la société Intrum Debt Finance AG de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions ;
A titre liminaire,
- juger irrecevable l'appel interjeté par la société Intrum Debt Finance AG le 21 mai 2021, comme tardif ;
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement du juge de l'exécution du 9 mars 2021 en toutes ses dispositions à savoir :
* l'annulation de l'acte de saisie-vente,
* la condamnation de la société Intrum Debt Finance à verser à Me Guillemont la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle,
* la condamnation de la société Intrum Debt Finance aux entiers dépens;
A titre infiniment subsidiaire,
- ordonner le sursis à statuer dans l'attente de la décision sur le fond à intervenir à la suite de l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer régularisée par elle ;
En tout état de cause, et y additant,
- condamner la société Intrum Debt Finance AG à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle ;
- la condamner aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 18 octobre 2023.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
- Sur la recevabilité de l'appel :
Mme [R] soulève le caractère irrecevable comme tardif de l'appel relevé par la société Intrum Debt Finance AG le 21 mai 2021, soit plus de quinze jours après la notification du 11 mars 2021 du jugement entrepris ce, sans respect des dispositions de l'article R.121-20 du code des procédures civiles d'exécution.
Elle fait valoir que la notification du jugement à la société Intrum France dont le siège social est situé dans le Rhône et qui représentait la société Intrum Debt Finance AG devant le juge de l'exécution est parfaitement valable, la notification réalisée au représentant français d'une société étrangère étant régulière et faisant courir le délai de recours applicable aux personnes morales établies en France.
Elle précise que la société Intrum Debt Finance AG ne saurait se prévaloir d'un allongement de délai au motif que la notification du jugement n'a pas été faite au domicile élu en France, l'adresse en France n'étant pas de fait un domicile élu mais une représentation réalisée par la société Intrum France.
La société Intrum Debt Finance AG, qui rappelle avoir son siège social en Suisse, considère son appel recevable en se prévalant des dispositions de l'article 643 du code de procédure civile augmentant de deux mois le délai d'appel pour les personnes demeurant à l'étranger, peu important qu'elle ait été représentée à la procédure de saisie par la société Intrum France qui a son siège dans le Rhône. Elle ajoute qu'en tout état de cause, la notification du 11 mars 2021, faite par lettre recommandée dont elle n'a jamais accusé réception, n'a pas fait courir le délai d'appel du jugement critiqué faute pour Mme [R] d'avoir procédé à la signification de la décision.
Sur ce,
Après avoir demandé au conseiller de la mise en l'état puis au président de la chambre de la cour saisie de la présente affaire, de déclarer l'appel relevé par la société Intrum Debt Finance AG le 21 mai 2021 irrecevable comme tardif, Mme [R] réitère sa demande devant la cour et ce, pour des motifs identiques.
Aux termes de l'article 905-2 du code de procédure civile, relatif à l'instruction des appels relevant de l'article 905, parmi lesquels figurent ceux des décisions du juge de l'exécution, dispose en son dernier alinéa que les ordonnances du président ou du magistrat désigné par le premier président de la chambre saisie statuant, notamment, sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel, ont autorité de la chose jugée au principal.
La société Intrum Debt Finance AG n'a pas soulevé la fin de non-recevoir résultant de l'autorité de la chose jugée et celle-ci constitue une simple possibilité pour la cour en application du deuxième alinéa de l'article 125 du code de procédure civile, laquelle supposerait d'inviter préalablement les parties à formuler toutes observations utiles, ce qui n'a pas été effectué en l'occurrence.
Il sera alors rappelé que suivant l'article 652 du code de procédure civile, lorsqu'une partie a chargé une personne de la représenter en justice, les actes qui lui sont destinés sont notifiés à son représentant sous réserve des règles particulières à la notification des jugements.
Selon l'article 677, les jugements sont notifiés aux parties elles-mêmes.
En application de l'article R. 121-15 du code des procédures civiles d'exécution, les décisions du juge de l'exécution sont notifiées aux parties elles-mêmes par le greffe au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
L'article R.121-20 du même code précise que le délai d'appel est de quinze jours à compter de la notification de la décision.
Aux termes de l'article 682 du code de procédure civile, la notification d'un jugement est valablement faite au domicile élu en France par la partie demeurant à l'étranger.
L'article 689-1 du même code précise que toute partie demeurant à l'étranger a la faculté de déclarer au greffe de la juridiction saisie, dès l'introduction de l'instance, qu'elle élit domicile en France afin d'être rendue destinataire :
1° Des envois, remises, et notifications des actes de procédure, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des rapports et des procès-verbaux, lorsque la partie n'a pas chargé une personne demeurant en France de la représenter en justice ;
2° De la notification du jugement prévue à l'article 682 ;
3° De la notification relative à l'exercice d'une voie de recours.
La déclaration d'élection de domicile est faite par la partie elle-même ou par la personne chargée de la représenter en justice.
L'élection de domicile prend effet à l'égard de la juridiction, à compter de la déclaration faite au greffe, et à l'égard des autres parties, à compter de l'avis qui leur en est donné par la personne qui élit domicile.
Enfin, l'article 647 dispose que lorsqu'un acte destiné à une partie domiciliée en un lieu où elle bénéficierait d'une prorogation de délai est notifié à sa personne en un lieu où ceux qui y demeurent n'en bénéficieraient point, cette notification n'emporte que les délais accordés à ces derniers.
En l'espèce, il est établi que la société de droit suisse Intrum Debt Finance AG, inscrite au RCS de Zug (Suisse) sous le numéro CH 100 023 266, a son siège social situé [Adresse 8] en Suisse.
Par acte du 22 novembre 2019, Mme [R] a fait assigner devant le juge de l'exécution de Caen la société Intrum Debt Finance en reprenant les mentions relatives à son immatriculation et à son siège social en Suisse et en précisant 'représentée par la société Intrum France dont le siège social est situé [Adresse 4]' (...), ayant élu domicile en l'étude de la SCP Beaufils, Manchec, Fily, Ribeton, huissiers de justices associés, sise [Adresse 2].'
Le juge de l'exécution a rendu sa décision à l'encontre de la société Intrum Debt Finance AG, société partie à l'instance.
Le jugement a été notifié le 11 mars 2021 par le greffe du juge de l'exécution par lettre recommandée adressée à 'la société Intrum Debt Finance AG, domiciliée [Adresse 4].
S'il résulte des actes de poursuite délivrés par la société Intrum Debt Finance AG à l'encontre de Mme [R] qu'elle avait, dans ce cadre, élu domicile en l'étude de la Scp Beaufils Manchec Fily Ribeton Levêque, huissiers de justice associés, sise [Adresse 2], il ne peut être contesté que la société appelante n'a pas déclaré auprès du greffe qu'elle élisait son domicile en France en cette étude, pour la notification du jugement, en application de l'article 689-1 précité.
Par ailleurs, si la même société a mentionné dans les actes délivrés être représentée en France par la société Intrum France, cette représentation ne la dispensait pas d'une telle déclaration s'agissant spécifiquement de la notification du jugement ce, en application de l'article 689-1 2° sus visé.
En tout état de cause, il doit être relevé que la notification faite le 11 mars 2021 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à la société Intrum Debt Finance AG, à supposer celle-ci domiciliée chez la société Intrum France, ne pouvait faire courir valablement le délai d'appel dès lors que l'avis de réception n'avait pas été signé. En effet, en application de l'article 670-1 du code de procédure civile, en l'absence d'accusé de réception signé par son destinataire, il revenait à Mme [R] de procéder par voie de signification, ce qui n'a pas été effectué.
Enfin, en application de l'article 647 du code de procédure civile précité, dès lors que l'acte n'avait pas été signifié à personne, la société Intrum Debt Finance AG, société de droit suisse dont le siège social est en Suisse, ne pouvait se voir imposer le délai de 15 jours, mais devait en tout état de cause, bénéficier a minima de son augmentation de deux mois.
Pour l'ensemble de ces motifs, il doit être considéré que la société Intrum Debt Finance AG n'a pas relevé appel tardivement de sorte que son appel interjeté le 21 mai 2021 est bien recevable.
La demande présentée devant la cour par Mme [R] aux fins de voir déclarer l'appel relevé par la société Intrum Debt Finance AG irrecevable sera rejetée.
- Sur l'annulation de la saisie vente du 23 octobre 2019 :
La société Intrum Debt Finance soutient qu'elle est cessionnaire depuis le 18 décembre 2018 de la créance de la société Fidem détenue initialement envers Mme [R] et que, par conséquent, elle avait qualité à agir en exécution de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 28 octobre 2009, devenue exécutoire le 28 janvier 2010, contrairement à ce que le premier juge a considéré.
Elle prétend encore, s'agissant de l'identification de la créance cédée, qu'elle bénéficie d'un titre constatant un créance certaine, liquide et exigible en ce qu'elle a respecté les obligations relatives au transport de la créance et qu'elle justifie de l'opposabilité de la cession de la créance à l'encontre de Mme [R] en sa qualité de débiteur cédé.
Mme [R], s'appropriant les motifs du jugement, conteste la qualité à agir de la société Intrum Debt Finance AG en exécution forcée de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 28 octobre 2009, devenue exécutoire le 28 janvier 2010, dès lors que l'auteur de la mesure d'exécution forcée ne justifie pas être créancier au titre de l'offre préalable d'ouverture de crédit signée le 25 juin 2008 objet de l'injonction de payer rendue le 28 octobre 2009 constitutive du titre exécutoire sur la base duquel le commandement de payer est délivré le 25 juillet 2019 et la saisie-vente pratiquée le 23 octobre suivant.
Mme [R] demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a annulé l'acte de saisie-vente du 23 octobre 2019 au motif que la créance cédée ne peut être identifiée.
Enfin, l'intimée ajoute qu'elle n'a jamais reçu personnellement l'acte du 25 juillet 2019 de signification de la cession de créance intervenue et du commandement aux fins de saisie-vente, au motif que l'adresse portée sur cet acte n'était pas celle portée sur l'acte en date du 23 octobre 2019 et qu'il a été établi à la mauvaise adresse alors qu'elle résidait depuis plusieurs années au [Adresse 7].
Sur ce,
Aux termes de l'article L. 221-1 du code des procédures civiles d'exécution , tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par ce dernier.
La validité de l'acte de la saisie-vente doit être appréciée à la date à laquelle il a été signifié, soit en l'occurrence au 23 octobre 2019, date du procès-verbal de signification.
Mme [R] conteste la qualité à agir de la société Intrum Debt Finance AG en exécution forcée de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 28 octobre 2009, devenue exécutoire le 28 janvier 2010, dès lors que la cession de créance intervenue le 18 décembre 2018 ne saurait lui être déclarée opposable en l'absence d'identification suffisante de la créance cédée.
Si, selon l'article 1323 du code civil, le transfert de la créance s'opère, entre les parties, à la date de l'acte et est opposable aux tiers dès ce moment, l'article 1324 du même code prévoit, s'agissant du cas particulier du débiteur cédé, que la cession ne lui est opposable, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.
La cession de créance n'étant pas opposable au débiteur tant qu'il n'en aura pas été informé par notification ou qu'il n'en aura pas pris acte, à moins qu'il ait consenti à la cession en y participant, il en résulte que l'acte de saisie fondé sur un titre exécutoire obtenu par le cédant ne peut être valablement délivré par le cessionnaire au débiteur cédé qu'en vertu d'une cession du titre exécutoire préalablement notifiée à ce dernier.
Si l'acte de notification n'a pas par ailleurs à contenir les conditions de la cession, et notamment son prix, doit en revanche y figurer la substance de la convention, afin de permettre au débiteur cédé de connaître non seulement le changement de créancier et le nom de ce dernier mais également les éléments lui permettant d'identifier et individualiser la créance cédée.
En l'occurrence, il est établi par la production d'un extrait Kbis au nom de la société BNP Paribas Personnal Finance que, suite à une fusion-absorption du 7 avril 2015, cette dernière vient aux droits de la société Fidem, de sorte qu'à compter de cette date, elle était titulaire de la créance litigieuse.
Ensuite, conformément à l'article 1322 du code civil exigeant un écrit constatant la cession de créance, la société Intrum Debt Finance AG justifie par la production d'un 'bordereau de cession de créance'd'une cession de créance conclue le 18 décembre 2018 entre la société BNP Paribas Personal Finance (cédant) et la société Intrum Debt Finance AG (cessionnaire) signé par chacune, auquel est annexé au titre de la liste de créances cédées celle désignée comme suit : 'référence : 908050970 Nom : [R] Prénom: [M] Valeur faciale : 2233,82 euros.'
Seule l'opposabilité de la cession à Mme [R] est remise en cause, étant rappelé qu'entre les parties à la cession, le transfert de la créance s'opère à la date de l'acte, et qu'en application de l'article 1321 alinéa 4, la cession s'étend à ses accessoires tels qu'une action en justice ou un titre exécutoire.
Or, en application de l'article 1324 précité, la société Intrum Debt Finance AG a signifié à Mme [R] la cession de créance avec commandement aux fins de saisie-vente par acte du 25 juillet 2019 par lequel la société Intrum Debt Finance AG précise agir en vertu :
« 1/ D'un acte de cession de créance convenu sous seing privé le 18/12/2018 entre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ( cédant) et la société requérante, agissant en sa qualité
de cessionnaire, le dit acte :
- D'une part, ayant notamment pour objet la créance détenue à votre encontre au titre de l'offre préalable d'ouverture de crédit accessoire à une vente ou une prestation de services, signée le 25/06/2008 (d'un montant de 1500 €), et accessoirement, au titre de l'ordonnance exécutoire d'injonction de payer donc plus ample mention ci-après,
- d'autre part (')
2/ D'une ordonnance d'injonction de payer rendue par le juge du tribunal d'instance de Caen en date du 28/10/2009 et revêtue de la formule exécutoire par le greffier en chef dudit tribunal en date du 7/01/2010 précédemment signifié le 29/01/2010 et dont copie est remise pour simple mémoire, avec la copie du présent acte »
Cet acte de notification ayant, en ces conditions, permis à Mme [R] d'être suffisamment renseignée quant au transfert de créance opéré par l'acte du18 décembre 2018, et son accessoire, le titre exécutoire obtenu par la société Fidem aux droits de laquelle venait le cédant, il vaut notification régulière à la débitrice cédée de la cession de créance alléguée.
Au surplus, en cause d'appel, outre le contrat d'origine, la société Intrum Debt Finance produit notamment la lettre de déchéance du terme du 6 août 2009, l'historique du compte arrêté au mois d'août 2009 et le détail de la créance à septembre 2009, autant de documents remis par la société BNP Personal Finance au cessionnaire à l'occasion de la cession intervenue, tendant à confirmer que la cession intervenue portait sur le contrat souscrit le 25 juin 2008 par la débitrice cédée originellement avec la société Fidem.
Il en ressort qu'il est justifié de la qualité de la société Intrum Debt Finance AG à poursuivre en exécution forcée Mme [R] au titre de la créance cédée le 18 décembre 2008 et de son accessoire le titre exécutoire, la cession ayant été valablement notifiée à la débitrice cédée.
Mme [R] soutient encore que l'acte d'huissier du 25 juillet 2019 ne lui a pas été signifié personnellement contrairement à ce qui est indiqué dans la mesure où à cette date elle résidait déjà au [Adresse 7] à [Localité 5] et non chez sa mère.
L'acte d'huissier de signification de cession de créances et de commandement aux fins de saisie-vente précise s'agissant des 'modalités de remise à personne' qu'il a été 'remis par clerc assermenté selon les déclarations qui lui ont été faites, à Mme [M] [R], née le [Date naissance 1]/1986 à [Localité 5], demeurant à [Adresse 6] (chez Mme [K] [L]) anciennement, et actuellement, à [Adresse 7], parlant à : sa personne ainsi déclarée rencontrée à son domicile'.
L'ensemble des éléments repris par l'auteur de l'acte correspond aux précisions apportées par Mme [R] concernant son domicile.
En tout état de cause, l'éventuelle erreur de domiciliation de Mme [R] ne saurait remettre en cause la validité de la saisie-vente en présence d'un commandement de payer signifié préalablement et dont il n'est pas invoqué la nullité.
Enfin, Mme [R] fait valoir que la société Intrum Debt Finance AG ne saurait se prévaloir de la régularité de l'acte signifié avec cette précision apportée quant à la représentation du créancier poursuivant par la société Intrum France et élection de domicile en l'étude de l'huissier instrumentaire alors qu'elle conteste à l'appui de la recevabilité de son appel, être représentée par la société Intrum France et avoir élu domicile à l'étude d'huissier.
Toutefois, l'appréciation de la régularité de la notification du jugement rendu par le juge de l'exécution dans le cadre de l'appréciation de la recevabilité de l'appel, et la détermination d'une éventuelle déclaration auprès du greffe de la représentation de la société Intrum Debt Finance AG et de son élection de domicile à cette fin, est sans rapport avec celle de la régularité de l'acte d'huissier délivré le 25 juillet 2019 de sorte que ce moyen sera écarté.
En conséquence, il sera constaté que la saisie-vente a été pratiquée après notification de l'acte de cession de créance et du titre exécutoire conformément à l'article 1324 du code civil, et commandement de payer signifié à Mme [R] par acte d'huissier du 25 juillet 2019.
Du tout, il doit être considéré au 23 octobre 2019, date de signification de la saisie-vente pratiquée le même jour, qu'aucune opposition n'ayant été alors formée à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 28 octobre 2009, la société Intrum Debt Finance AG, munie d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, et après signification d'un commandement, a pu valablement faire procéder à la saisie-vente litigieuse.
Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a annulé l'acte de saisie-vente du 23 octobre 2029 et Mme [R] sera déboutée de sa demande de nullité.
- Sur la demande de sursis à statuer :
A titre subsidiaire et si la cour devait à considérer l'acte de saisie-vente comme valable, Mme [R] demande le sursis à statuer dans l'attente de la procédure d'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer toujours en cours.
La société Intrum Debt Finance AG s'oppose à cette demande au motif que l'opposition à injonction de payer est irrecevable comme tardive.
Sur ce,
Il est justifié de l'opposition formée par Mme [R] le 21 novembre 2019 à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 28 octobre 2009 par le président du tribunal d'instance de Caen, par laquelle il a été enjoint à Mme [R] de payer à la société Fidem une somme en principal de 1 405,89 euros majorée des intérêts au taux légal ainsi qu'une somme de 60 euros à titre de clause pénale outre les frais et accessoires.
L'opposition régulièrement formée, à la suite d'une mesure d'exécution forcée, contre une ordonnance portant injonction de payer rendue exécutoire, a pour effet de saisir le tribunal de la demande du créancier et de l'ensemble du litige et affecte ainsi la force exécutoire du titre fondant les poursuites, empêchant la poursuite de la procédure d'exécution forcée, sans remettre en cause les effets de l'acte de saisie dont la validité s'apprécie au moment où il a été signifié.
Il n'entre pas dans les pouvoirs de la cour, exerçant les pouvoirs du juge de l'exécution, d'apprécier la recevabilité de l'opposition formée par Mme [R] contre l'ordonnance d'injonction de payer exécutoire qui fonde les poursuites.
Pour autant, il n'y a pas lieu d'ordonner le sursis à statuer en l'absence de toute demande subsistante formée par Mme [R] et restant à trancher par la cour.
Surtout, il convient de rappeler que de plein droit, l'opposition formée à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer a pour conséquence d'empêcher la société Intrum Debt Finance AG de mener la mesure d'exécution à son terme par la vente des biens en cas de saisie-vente. Les effets de la mesure reprendront le cas échéant à l'issue du jugement à intervenir sur l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer formée par Mme [R] auprès du tribunal d'instance de Caen le 21 novembre 2019 et de l'épuisement des voies de recours.
- Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Le jugement doit être infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Toutefois, l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.
Mme [R], partie perdante, sera condamnée aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort par mise à disposition au greffe,
Rejette la demande présentée devant la cour par Mme [M] [R] aux fins de voir déclarer l'appel relevé par la société Intrum Debt Finance AG irrecevable ;
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 9 mars 2021 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Caen,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare valable la saisie-vente signifiée le 23 octobre 2019 à Mme [M] [R] par la société Intrum Debt Finance AG ;
Rejette la demande de sursis à statuer présentée par Mme [M] [R] ;
Rappelle que l'opposition formée par Mme [M] [R] auprès du tribunal d'instance de Caen le 21 novembre 2019 à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 28 octobre 2009 par le président du tribunal d'instance de Caen a pour conséquence de suspendre les effets de la mesure d'exécution et d'empêcher la société Intrum Debt Finance AG de mener la dite mesure à son terme par la vente des biens en cas de saisie-vente ;
Rappelle que les effets de la mesure reprendront le cas échéant à l'issue du jugement à intervenir sur l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer formée par Mme [M] [R] auprès du tribunal d'instance de Caen le 21 novembre 2019 et de l'épuisement des voies de recours ;
Déboute les parties de toutes autres demandes ;
Rejette les demandes présentées par Mme [M] [R] et son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et par la société Intrum Debt Finance AG en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;
Condamne Mme [M] [R] aux dépens de première instance et de la procédure d'appel et dit qu'ils seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON
ARRÊT N°
ORIGINE : Décision du Juge de l'exécution de CAEN du 09 Mars 2021
RG n° 19/03506
COUR D'APPEL DE CAEN
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 30 JANVIER 2024
APPELANTE :
La S.A. INTRUM DEBT FINANCE AG
prise en la personne de son représentant légal
N° SIRET : CH -100.023.266
[Adresse 8]
[Localité 3] (SUISSE)
représentée par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN
assistée de Me Alain PIMONT, avocat au barreau de ROUEN,
INTIMÉE :
Madame [M] [R]
née le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 5]
[Adresse 7]
[Localité 5]
assistée de Me Bénédicte GUILLEMONT, avocat au barreau de CAEN
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022021005062 du 19/08/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)
DÉBATS : A l'audience publique du 16 novembre 2023, sans opposition du ou des avocats, Mme DELAUBIER, Conseillère, a entendu seule les observations des parties sans opposition de la part des avocats et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Mme COLLET
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. GUIGUESSON, Président de chambre,
Mme DELAUBIER, Conseillère,
Mme VELMANS, Conseillère,
ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 30 Janvier 2024 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 25 juin 2008, Mme [M] [R] a souscrit un crédit renouvelable utilisable par fractions et assortie de moyens d'utilisation de compte auprès de la société anonyme Fidem.
Par ordonnance en date du 28 octobre 2009 rendue par le président du tribunal d'instance de Caen et signifiée par acte d'huissier remis à étude le 2 novembre 2009, il a été enjoint à Mme [R] de payer à la société Fidem une somme en principal de 1 405,89 euros majorée des intérêts au taux légal ainsi qu'une somme de 60 euros à titre de clause pénale outre les frais et accessoires.
Le 29 janvier 2010, l'ordonnance d'injonction de payer rendue exécutoire le 7 janvier précédant ainsi qu'un commandement de payer aux fins de saisie-vente ont été signifiés par la société Fidem au domicile de Mme [R] ('Mme [R] [M] C/O Mme [L] [K]') .
Par acte sous seing privé du 18 décembre 2018, la société Bnp Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société Fidem à la suite d'une fusion-absorption, a cédé une créance qu'elle détenait envers Mme [R] à la société Intrum Debt Finance AG.
Le 25 juillet 2019, la société Intrum Debt Finance AG a fait signifier à la personne de Mme [R] la cession de créance intervenue ainsi qu'un commandement aux fins de saisie-vente.
Le 12 août 2019, la société Intrum Debt Finance AG a fait pratiquer une saisie-attribution des comptes de Mme [R] entre les mains de la Banque Postale.
Le 23 octobre 2019, la société Intrum Debt Finance a fait signifier à Mme [R] un procès-verbal de saisie-vente mobilière.
Par déclaration au greffe du 21 novembre 2019 du tribunal d'instance de Caen, Mme [R] a formé opposition à l'ordonnance portant injonction de payer rendue le 28 octobre 2009.
Par acte du 22 novembre 2019, Mme [R] a fait assigner la société Intrum Debt Finance AG devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Caen aux fins d'annulation de la saisie-vente et, subsidiairement, de voir ordonner le sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 28 octobre 2009.
Par jugement du 9 mars 2021 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Caen a :
- annulé l'acte de saisie-vente en date du 23 octobre 2019 ;
- condamné la société Intrum Debt Finance AG aux entiers dépens ;
- condamné la société Intrum Debt Finance AG à payer à Me Guillemont la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
- débouté la société Intrum Debt Finance AG de ses demandes ;
- rejeté toute demande plus ample ou contraire.
Par déclaration du 21 mai 2021, la société Intrum Debt Finance AG a formé appel de ce jugement.
Par conclusions d'incident notifiées le 13 décembre 2021, Mme [R] a demandé au conseiller de la mise en état de déclarer l'appel interjeté par la société Intrum Debt Finance AG irrecevable en raison de sa tardiveté.
Par ordonnance du 8 juin 2022, le président de la première chambre civile de céans a déclaré le conseiller de la mise en état incompétent pour connaître de l'incident en application des articles R.121-20 du code des procédures civiles d'exécution et 905 du code de procédure civile.
Mme [R] ayant présenté de nouvelles conclusions d'incident le 13 juin 2022 pour les mêmes motifs ce, devant le président de la première chambre civile, celui-ci a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Intrum Debt Finance AG et débouté Mme [R] de son incident tendant à voir déclarer irrecevable l'appel interjeté le 21 mai 2021.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 27 janvier 2023, la société Intrum Debt Finance AG demande à la cour de :
- la recevoir en son appel à l'encontre du jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Caen le 9 mars 2021 et le dire bien fondé ;
- infirmer le jugement en ce qu'il :
* a annulé l'acte de saisie-vente en date du 23 octobre 2019 ;
* l'a condamnée aux entiers dépens ;
* l'a condamnée à payer à Me Guillemont la somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
* l'a déboutée de ses demandes.
Par conséquent,
- débouter Mme [R] de sa demande d'annulation de la saisie-vente pratiquée le 23 octobre 2019 ;
- subsidiairement, débouter Mme [R] de sa demande de sursis à statuer ;
- condamner Mme [R] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 10 février 2023, Mme [R] demande à la cour, au visa des articles R.121-15, R.121-20 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, et 905 du code de procédure civile, de :
- débouter la société Intrum Debt Finance AG de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions ;
A titre liminaire,
- juger irrecevable l'appel interjeté par la société Intrum Debt Finance AG le 21 mai 2021, comme tardif ;
A titre subsidiaire,
- confirmer le jugement du juge de l'exécution du 9 mars 2021 en toutes ses dispositions à savoir :
* l'annulation de l'acte de saisie-vente,
* la condamnation de la société Intrum Debt Finance à verser à Me Guillemont la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle,
* la condamnation de la société Intrum Debt Finance aux entiers dépens;
A titre infiniment subsidiaire,
- ordonner le sursis à statuer dans l'attente de la décision sur le fond à intervenir à la suite de l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer régularisée par elle ;
En tout état de cause, et y additant,
- condamner la société Intrum Debt Finance AG à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle ;
- la condamner aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 18 octobre 2023.
Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
- Sur la recevabilité de l'appel :
Mme [R] soulève le caractère irrecevable comme tardif de l'appel relevé par la société Intrum Debt Finance AG le 21 mai 2021, soit plus de quinze jours après la notification du 11 mars 2021 du jugement entrepris ce, sans respect des dispositions de l'article R.121-20 du code des procédures civiles d'exécution.
Elle fait valoir que la notification du jugement à la société Intrum France dont le siège social est situé dans le Rhône et qui représentait la société Intrum Debt Finance AG devant le juge de l'exécution est parfaitement valable, la notification réalisée au représentant français d'une société étrangère étant régulière et faisant courir le délai de recours applicable aux personnes morales établies en France.
Elle précise que la société Intrum Debt Finance AG ne saurait se prévaloir d'un allongement de délai au motif que la notification du jugement n'a pas été faite au domicile élu en France, l'adresse en France n'étant pas de fait un domicile élu mais une représentation réalisée par la société Intrum France.
La société Intrum Debt Finance AG, qui rappelle avoir son siège social en Suisse, considère son appel recevable en se prévalant des dispositions de l'article 643 du code de procédure civile augmentant de deux mois le délai d'appel pour les personnes demeurant à l'étranger, peu important qu'elle ait été représentée à la procédure de saisie par la société Intrum France qui a son siège dans le Rhône. Elle ajoute qu'en tout état de cause, la notification du 11 mars 2021, faite par lettre recommandée dont elle n'a jamais accusé réception, n'a pas fait courir le délai d'appel du jugement critiqué faute pour Mme [R] d'avoir procédé à la signification de la décision.
Sur ce,
Après avoir demandé au conseiller de la mise en l'état puis au président de la chambre de la cour saisie de la présente affaire, de déclarer l'appel relevé par la société Intrum Debt Finance AG le 21 mai 2021 irrecevable comme tardif, Mme [R] réitère sa demande devant la cour et ce, pour des motifs identiques.
Aux termes de l'article 905-2 du code de procédure civile, relatif à l'instruction des appels relevant de l'article 905, parmi lesquels figurent ceux des décisions du juge de l'exécution, dispose en son dernier alinéa que les ordonnances du président ou du magistrat désigné par le premier président de la chambre saisie statuant, notamment, sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel, ont autorité de la chose jugée au principal.
La société Intrum Debt Finance AG n'a pas soulevé la fin de non-recevoir résultant de l'autorité de la chose jugée et celle-ci constitue une simple possibilité pour la cour en application du deuxième alinéa de l'article 125 du code de procédure civile, laquelle supposerait d'inviter préalablement les parties à formuler toutes observations utiles, ce qui n'a pas été effectué en l'occurrence.
Il sera alors rappelé que suivant l'article 652 du code de procédure civile, lorsqu'une partie a chargé une personne de la représenter en justice, les actes qui lui sont destinés sont notifiés à son représentant sous réserve des règles particulières à la notification des jugements.
Selon l'article 677, les jugements sont notifiés aux parties elles-mêmes.
En application de l'article R. 121-15 du code des procédures civiles d'exécution, les décisions du juge de l'exécution sont notifiées aux parties elles-mêmes par le greffe au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
L'article R.121-20 du même code précise que le délai d'appel est de quinze jours à compter de la notification de la décision.
Aux termes de l'article 682 du code de procédure civile, la notification d'un jugement est valablement faite au domicile élu en France par la partie demeurant à l'étranger.
L'article 689-1 du même code précise que toute partie demeurant à l'étranger a la faculté de déclarer au greffe de la juridiction saisie, dès l'introduction de l'instance, qu'elle élit domicile en France afin d'être rendue destinataire :
1° Des envois, remises, et notifications des actes de procédure, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des rapports et des procès-verbaux, lorsque la partie n'a pas chargé une personne demeurant en France de la représenter en justice ;
2° De la notification du jugement prévue à l'article 682 ;
3° De la notification relative à l'exercice d'une voie de recours.
La déclaration d'élection de domicile est faite par la partie elle-même ou par la personne chargée de la représenter en justice.
L'élection de domicile prend effet à l'égard de la juridiction, à compter de la déclaration faite au greffe, et à l'égard des autres parties, à compter de l'avis qui leur en est donné par la personne qui élit domicile.
Enfin, l'article 647 dispose que lorsqu'un acte destiné à une partie domiciliée en un lieu où elle bénéficierait d'une prorogation de délai est notifié à sa personne en un lieu où ceux qui y demeurent n'en bénéficieraient point, cette notification n'emporte que les délais accordés à ces derniers.
En l'espèce, il est établi que la société de droit suisse Intrum Debt Finance AG, inscrite au RCS de Zug (Suisse) sous le numéro CH 100 023 266, a son siège social situé [Adresse 8] en Suisse.
Par acte du 22 novembre 2019, Mme [R] a fait assigner devant le juge de l'exécution de Caen la société Intrum Debt Finance en reprenant les mentions relatives à son immatriculation et à son siège social en Suisse et en précisant 'représentée par la société Intrum France dont le siège social est situé [Adresse 4]' (...), ayant élu domicile en l'étude de la SCP Beaufils, Manchec, Fily, Ribeton, huissiers de justices associés, sise [Adresse 2].'
Le juge de l'exécution a rendu sa décision à l'encontre de la société Intrum Debt Finance AG, société partie à l'instance.
Le jugement a été notifié le 11 mars 2021 par le greffe du juge de l'exécution par lettre recommandée adressée à 'la société Intrum Debt Finance AG, domiciliée [Adresse 4].
S'il résulte des actes de poursuite délivrés par la société Intrum Debt Finance AG à l'encontre de Mme [R] qu'elle avait, dans ce cadre, élu domicile en l'étude de la Scp Beaufils Manchec Fily Ribeton Levêque, huissiers de justice associés, sise [Adresse 2], il ne peut être contesté que la société appelante n'a pas déclaré auprès du greffe qu'elle élisait son domicile en France en cette étude, pour la notification du jugement, en application de l'article 689-1 précité.
Par ailleurs, si la même société a mentionné dans les actes délivrés être représentée en France par la société Intrum France, cette représentation ne la dispensait pas d'une telle déclaration s'agissant spécifiquement de la notification du jugement ce, en application de l'article 689-1 2° sus visé.
En tout état de cause, il doit être relevé que la notification faite le 11 mars 2021 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à la société Intrum Debt Finance AG, à supposer celle-ci domiciliée chez la société Intrum France, ne pouvait faire courir valablement le délai d'appel dès lors que l'avis de réception n'avait pas été signé. En effet, en application de l'article 670-1 du code de procédure civile, en l'absence d'accusé de réception signé par son destinataire, il revenait à Mme [R] de procéder par voie de signification, ce qui n'a pas été effectué.
Enfin, en application de l'article 647 du code de procédure civile précité, dès lors que l'acte n'avait pas été signifié à personne, la société Intrum Debt Finance AG, société de droit suisse dont le siège social est en Suisse, ne pouvait se voir imposer le délai de 15 jours, mais devait en tout état de cause, bénéficier a minima de son augmentation de deux mois.
Pour l'ensemble de ces motifs, il doit être considéré que la société Intrum Debt Finance AG n'a pas relevé appel tardivement de sorte que son appel interjeté le 21 mai 2021 est bien recevable.
La demande présentée devant la cour par Mme [R] aux fins de voir déclarer l'appel relevé par la société Intrum Debt Finance AG irrecevable sera rejetée.
- Sur l'annulation de la saisie vente du 23 octobre 2019 :
La société Intrum Debt Finance soutient qu'elle est cessionnaire depuis le 18 décembre 2018 de la créance de la société Fidem détenue initialement envers Mme [R] et que, par conséquent, elle avait qualité à agir en exécution de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 28 octobre 2009, devenue exécutoire le 28 janvier 2010, contrairement à ce que le premier juge a considéré.
Elle prétend encore, s'agissant de l'identification de la créance cédée, qu'elle bénéficie d'un titre constatant un créance certaine, liquide et exigible en ce qu'elle a respecté les obligations relatives au transport de la créance et qu'elle justifie de l'opposabilité de la cession de la créance à l'encontre de Mme [R] en sa qualité de débiteur cédé.
Mme [R], s'appropriant les motifs du jugement, conteste la qualité à agir de la société Intrum Debt Finance AG en exécution forcée de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 28 octobre 2009, devenue exécutoire le 28 janvier 2010, dès lors que l'auteur de la mesure d'exécution forcée ne justifie pas être créancier au titre de l'offre préalable d'ouverture de crédit signée le 25 juin 2008 objet de l'injonction de payer rendue le 28 octobre 2009 constitutive du titre exécutoire sur la base duquel le commandement de payer est délivré le 25 juillet 2019 et la saisie-vente pratiquée le 23 octobre suivant.
Mme [R] demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a annulé l'acte de saisie-vente du 23 octobre 2019 au motif que la créance cédée ne peut être identifiée.
Enfin, l'intimée ajoute qu'elle n'a jamais reçu personnellement l'acte du 25 juillet 2019 de signification de la cession de créance intervenue et du commandement aux fins de saisie-vente, au motif que l'adresse portée sur cet acte n'était pas celle portée sur l'acte en date du 23 octobre 2019 et qu'il a été établi à la mauvaise adresse alors qu'elle résidait depuis plusieurs années au [Adresse 7].
Sur ce,
Aux termes de l'article L. 221-1 du code des procédures civiles d'exécution , tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par ce dernier.
La validité de l'acte de la saisie-vente doit être appréciée à la date à laquelle il a été signifié, soit en l'occurrence au 23 octobre 2019, date du procès-verbal de signification.
Mme [R] conteste la qualité à agir de la société Intrum Debt Finance AG en exécution forcée de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 28 octobre 2009, devenue exécutoire le 28 janvier 2010, dès lors que la cession de créance intervenue le 18 décembre 2018 ne saurait lui être déclarée opposable en l'absence d'identification suffisante de la créance cédée.
Si, selon l'article 1323 du code civil, le transfert de la créance s'opère, entre les parties, à la date de l'acte et est opposable aux tiers dès ce moment, l'article 1324 du même code prévoit, s'agissant du cas particulier du débiteur cédé, que la cession ne lui est opposable, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.
La cession de créance n'étant pas opposable au débiteur tant qu'il n'en aura pas été informé par notification ou qu'il n'en aura pas pris acte, à moins qu'il ait consenti à la cession en y participant, il en résulte que l'acte de saisie fondé sur un titre exécutoire obtenu par le cédant ne peut être valablement délivré par le cessionnaire au débiteur cédé qu'en vertu d'une cession du titre exécutoire préalablement notifiée à ce dernier.
Si l'acte de notification n'a pas par ailleurs à contenir les conditions de la cession, et notamment son prix, doit en revanche y figurer la substance de la convention, afin de permettre au débiteur cédé de connaître non seulement le changement de créancier et le nom de ce dernier mais également les éléments lui permettant d'identifier et individualiser la créance cédée.
En l'occurrence, il est établi par la production d'un extrait Kbis au nom de la société BNP Paribas Personnal Finance que, suite à une fusion-absorption du 7 avril 2015, cette dernière vient aux droits de la société Fidem, de sorte qu'à compter de cette date, elle était titulaire de la créance litigieuse.
Ensuite, conformément à l'article 1322 du code civil exigeant un écrit constatant la cession de créance, la société Intrum Debt Finance AG justifie par la production d'un 'bordereau de cession de créance'd'une cession de créance conclue le 18 décembre 2018 entre la société BNP Paribas Personal Finance (cédant) et la société Intrum Debt Finance AG (cessionnaire) signé par chacune, auquel est annexé au titre de la liste de créances cédées celle désignée comme suit : 'référence : 908050970 Nom : [R] Prénom: [M] Valeur faciale : 2233,82 euros.'
Seule l'opposabilité de la cession à Mme [R] est remise en cause, étant rappelé qu'entre les parties à la cession, le transfert de la créance s'opère à la date de l'acte, et qu'en application de l'article 1321 alinéa 4, la cession s'étend à ses accessoires tels qu'une action en justice ou un titre exécutoire.
Or, en application de l'article 1324 précité, la société Intrum Debt Finance AG a signifié à Mme [R] la cession de créance avec commandement aux fins de saisie-vente par acte du 25 juillet 2019 par lequel la société Intrum Debt Finance AG précise agir en vertu :
« 1/ D'un acte de cession de créance convenu sous seing privé le 18/12/2018 entre la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ( cédant) et la société requérante, agissant en sa qualité
de cessionnaire, le dit acte :
- D'une part, ayant notamment pour objet la créance détenue à votre encontre au titre de l'offre préalable d'ouverture de crédit accessoire à une vente ou une prestation de services, signée le 25/06/2008 (d'un montant de 1500 €), et accessoirement, au titre de l'ordonnance exécutoire d'injonction de payer donc plus ample mention ci-après,
- d'autre part (')
2/ D'une ordonnance d'injonction de payer rendue par le juge du tribunal d'instance de Caen en date du 28/10/2009 et revêtue de la formule exécutoire par le greffier en chef dudit tribunal en date du 7/01/2010 précédemment signifié le 29/01/2010 et dont copie est remise pour simple mémoire, avec la copie du présent acte »
Cet acte de notification ayant, en ces conditions, permis à Mme [R] d'être suffisamment renseignée quant au transfert de créance opéré par l'acte du18 décembre 2018, et son accessoire, le titre exécutoire obtenu par la société Fidem aux droits de laquelle venait le cédant, il vaut notification régulière à la débitrice cédée de la cession de créance alléguée.
Au surplus, en cause d'appel, outre le contrat d'origine, la société Intrum Debt Finance produit notamment la lettre de déchéance du terme du 6 août 2009, l'historique du compte arrêté au mois d'août 2009 et le détail de la créance à septembre 2009, autant de documents remis par la société BNP Personal Finance au cessionnaire à l'occasion de la cession intervenue, tendant à confirmer que la cession intervenue portait sur le contrat souscrit le 25 juin 2008 par la débitrice cédée originellement avec la société Fidem.
Il en ressort qu'il est justifié de la qualité de la société Intrum Debt Finance AG à poursuivre en exécution forcée Mme [R] au titre de la créance cédée le 18 décembre 2008 et de son accessoire le titre exécutoire, la cession ayant été valablement notifiée à la débitrice cédée.
Mme [R] soutient encore que l'acte d'huissier du 25 juillet 2019 ne lui a pas été signifié personnellement contrairement à ce qui est indiqué dans la mesure où à cette date elle résidait déjà au [Adresse 7] à [Localité 5] et non chez sa mère.
L'acte d'huissier de signification de cession de créances et de commandement aux fins de saisie-vente précise s'agissant des 'modalités de remise à personne' qu'il a été 'remis par clerc assermenté selon les déclarations qui lui ont été faites, à Mme [M] [R], née le [Date naissance 1]/1986 à [Localité 5], demeurant à [Adresse 6] (chez Mme [K] [L]) anciennement, et actuellement, à [Adresse 7], parlant à : sa personne ainsi déclarée rencontrée à son domicile'.
L'ensemble des éléments repris par l'auteur de l'acte correspond aux précisions apportées par Mme [R] concernant son domicile.
En tout état de cause, l'éventuelle erreur de domiciliation de Mme [R] ne saurait remettre en cause la validité de la saisie-vente en présence d'un commandement de payer signifié préalablement et dont il n'est pas invoqué la nullité.
Enfin, Mme [R] fait valoir que la société Intrum Debt Finance AG ne saurait se prévaloir de la régularité de l'acte signifié avec cette précision apportée quant à la représentation du créancier poursuivant par la société Intrum France et élection de domicile en l'étude de l'huissier instrumentaire alors qu'elle conteste à l'appui de la recevabilité de son appel, être représentée par la société Intrum France et avoir élu domicile à l'étude d'huissier.
Toutefois, l'appréciation de la régularité de la notification du jugement rendu par le juge de l'exécution dans le cadre de l'appréciation de la recevabilité de l'appel, et la détermination d'une éventuelle déclaration auprès du greffe de la représentation de la société Intrum Debt Finance AG et de son élection de domicile à cette fin, est sans rapport avec celle de la régularité de l'acte d'huissier délivré le 25 juillet 2019 de sorte que ce moyen sera écarté.
En conséquence, il sera constaté que la saisie-vente a été pratiquée après notification de l'acte de cession de créance et du titre exécutoire conformément à l'article 1324 du code civil, et commandement de payer signifié à Mme [R] par acte d'huissier du 25 juillet 2019.
Du tout, il doit être considéré au 23 octobre 2019, date de signification de la saisie-vente pratiquée le même jour, qu'aucune opposition n'ayant été alors formée à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer en date du 28 octobre 2009, la société Intrum Debt Finance AG, munie d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, et après signification d'un commandement, a pu valablement faire procéder à la saisie-vente litigieuse.
Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a annulé l'acte de saisie-vente du 23 octobre 2029 et Mme [R] sera déboutée de sa demande de nullité.
- Sur la demande de sursis à statuer :
A titre subsidiaire et si la cour devait à considérer l'acte de saisie-vente comme valable, Mme [R] demande le sursis à statuer dans l'attente de la procédure d'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer toujours en cours.
La société Intrum Debt Finance AG s'oppose à cette demande au motif que l'opposition à injonction de payer est irrecevable comme tardive.
Sur ce,
Il est justifié de l'opposition formée par Mme [R] le 21 novembre 2019 à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 28 octobre 2009 par le président du tribunal d'instance de Caen, par laquelle il a été enjoint à Mme [R] de payer à la société Fidem une somme en principal de 1 405,89 euros majorée des intérêts au taux légal ainsi qu'une somme de 60 euros à titre de clause pénale outre les frais et accessoires.
L'opposition régulièrement formée, à la suite d'une mesure d'exécution forcée, contre une ordonnance portant injonction de payer rendue exécutoire, a pour effet de saisir le tribunal de la demande du créancier et de l'ensemble du litige et affecte ainsi la force exécutoire du titre fondant les poursuites, empêchant la poursuite de la procédure d'exécution forcée, sans remettre en cause les effets de l'acte de saisie dont la validité s'apprécie au moment où il a été signifié.
Il n'entre pas dans les pouvoirs de la cour, exerçant les pouvoirs du juge de l'exécution, d'apprécier la recevabilité de l'opposition formée par Mme [R] contre l'ordonnance d'injonction de payer exécutoire qui fonde les poursuites.
Pour autant, il n'y a pas lieu d'ordonner le sursis à statuer en l'absence de toute demande subsistante formée par Mme [R] et restant à trancher par la cour.
Surtout, il convient de rappeler que de plein droit, l'opposition formée à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer a pour conséquence d'empêcher la société Intrum Debt Finance AG de mener la mesure d'exécution à son terme par la vente des biens en cas de saisie-vente. Les effets de la mesure reprendront le cas échéant à l'issue du jugement à intervenir sur l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer formée par Mme [R] auprès du tribunal d'instance de Caen le 21 novembre 2019 et de l'épuisement des voies de recours.
- Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Le jugement doit être infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
Toutefois, l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.
Mme [R], partie perdante, sera condamnée aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort par mise à disposition au greffe,
Rejette la demande présentée devant la cour par Mme [M] [R] aux fins de voir déclarer l'appel relevé par la société Intrum Debt Finance AG irrecevable ;
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 9 mars 2021 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Caen,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare valable la saisie-vente signifiée le 23 octobre 2019 à Mme [M] [R] par la société Intrum Debt Finance AG ;
Rejette la demande de sursis à statuer présentée par Mme [M] [R] ;
Rappelle que l'opposition formée par Mme [M] [R] auprès du tribunal d'instance de Caen le 21 novembre 2019 à l'encontre de l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 28 octobre 2009 par le président du tribunal d'instance de Caen a pour conséquence de suspendre les effets de la mesure d'exécution et d'empêcher la société Intrum Debt Finance AG de mener la dite mesure à son terme par la vente des biens en cas de saisie-vente ;
Rappelle que les effets de la mesure reprendront le cas échéant à l'issue du jugement à intervenir sur l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer formée par Mme [M] [R] auprès du tribunal d'instance de Caen le 21 novembre 2019 et de l'épuisement des voies de recours ;
Déboute les parties de toutes autres demandes ;
Rejette les demandes présentées par Mme [M] [R] et son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et par la société Intrum Debt Finance AG en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;
Condamne Mme [M] [R] aux dépens de première instance et de la procédure d'appel et dit qu'ils seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
M. COLLET G. GUIGUESSON