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Décisions

CA Bordeaux, ch. soc. A, 24 janvier 2024, n° 21/00098

BORDEAUX

Arrêt

Autre

CA Bordeaux n° 21/00098

24 janvier 2024

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 24 JANVIER 2024

PRUD'HOMMES

N° RG 21/00098 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L33W

Madame [L] [S]

c/

Association APAJH VENANT AUX DROITS DU CMPP

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 décembre 2020 (R.G. n°20/00002) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BERGERAC, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 07 janvier 2021,

APPELANTE :

Madame [L] [S]

née le 23 Avril 1978 à [Localité 3] de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

représentée et assistée de Me Frédérique POHU PANIER, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉE :

Association Pour Adultes et Jeunes Handicapés de Dordogne (APAJH) venant aux droits du CMPP, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 1]

N° SIRET : 776 221 087 00054

représentée et assistée de Me Christophe JOLLIVET de la SELARL AGORAJURIS, avocat au barreau de PERIGUEUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 novembre 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame ROUAUD-FOLLIARD Catherine, présidente chargée d'instruire l'affaire, et Madame Sylvie TRONCHE, conseillère

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

- délibéré prorogé en raison de la charge de travail de la cour.

***



EXPOSE DU LITIGE

Mme [S], née en 1978, a été engagée en qualité de psychologue institutionnelle par l'association APAJH, par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 28 août 2017.

Mme [S] a été affectée au Centre Médico Psycho Pédagogique (CMPP) de [Localité 4].

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.

Le 14 juin 2018, une rupture conventionnelle a été proposée à Mme [S]. Elle l'a refusée par courrier du 28 juin 2018.

Mme [S] a été placée en arrêt de travail à compter du 14 juin 2018.

Par lettre datée du 4 juillet 2018, Mme [S] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 13 juillet 2018.

Mme [S] a ensuite été licenciée pour insuffisance professionnelle par lettre datée du 18 juillet 2018.

A la date du licenciement, Mme [S] avait une ancienneté de 10 mois et 20 jours et l'association occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Contestant à titre principal la validité de son licenciement, à titre subsidiaire sa légitimité et à titre infiniment subsidiaire la régularité de la procédure, Mme [S] sollicitait diverses indemnités, des dommages et intérêts pour harcèlement moral ainsi qu'un rappel d'heures complémentaires.

Elle a saisi le 1er juillet 2019 le conseil de prud'hommes de Bergerac qui, par jugement rendu le 14 décembre 2020, a :

- révoqué l'ordonnance de clôture rendue par le bureau de conciliation et d'orientation du 18 juin 2020, et clôture l'instruction du dossier au 3 septembre 2020, date de l'audience de plaidoirie,

- dit que Mme [S] ne rapporte pas la preuve qu'elle a subi un harcèlement moral,

En conséquence,

- débouté Mme [S] de sa demande de requalification de son licenciement en un licenciement nul et l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts y afférentes,

- dit que le licenciement de Mme [S] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

- débouté Mme [S] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures complémentaires ainsi que des congés payés y afférents,

- condamné l'association APAJH à payer à Mme [S] la somme de 2.743,05 euros au titre des dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière,

- débouté les parties de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- laissé à la charge des parties les dépens par elles exposés lors de l'instance.

Par déclaration du 7 janvier 2021, Mme [S] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 7 octobre 2021, Mme [S] demande à la cour de

- réformer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [S] de ses demandes au titre du harcèlement moral subi, de la nullité de son licenciement ou subsidiairement sans cause réelle ni sérieuse, de ses demandes de dommages et intérêts et rappel d'heures complémentaires,

Statuant à nouveau,

- juger que Mme [S] a été victime de faits constitutifs de harcèlement moral,

- annuler le licenciement de Mme [S] ,

- condamner l'association APAJH à régler à Mme [S] les sommes suivantes :

* 35.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

* 35.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- subsidiairement, dire que le licenciement de Mme [S] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'association APAJH à lui régler la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- à titre infiniment subsidiaire, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'association APAJH à verser à Mme [S] la somme de 2.743,05 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure irrégulière en réparation du préjudice subi,

En tout état de cause :

- condamner l'association APAJH à régler à Mme [S] la somme de 1.650,53 euros brut à titre de rappel d'heures complémentaires, outre 165,05 euros brut au titre des congés payés afférents,

- ordonner la remise sous astreinte de 250 euros par jour de retard d'une attestation Pôle emploi et d'un certificat de travail rectifiés,

- condamner l'association APAJH à verser à Mme [S] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que les sommes prononcées à l'encontre de l'association APAJH porteront intérêts au taux légal à compter de la date de saisine,

- dire que les intérêts seront capitalisés au profit de Mme [S] conformément à l'article 1343-2 du code civil,

- condamner l'association APAJH en tous les dépens, en ce compris les éventuels frais d'exécution de la décision à intervenir.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 25 octobre 2023, l'association APAJH demande à la cour de':

- déclarer Mme [S] irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes et l'en débouter,

- réformer la décision en ce qu'elle a condamné l'association APAJH à payer à Mme [S] la somme de 2.743,05 euros au titre de dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière,

Statuant à nouveau, il est demandé à la Cour de :

- débouter Mme [S] au titre de sa demande de dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière ou subsidiairement en minorer le quantum,

- confirmer la décision de première instance pour le surplus,

- condamner Mme [S] à payer la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [S] aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 octobre 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 20 novembre 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre principal, Mme [S] demande l'indemnisation d'un harcèlement moral

et la nullité de son licenciement; à titre subsidiaire, elle demande que son licenciement pour insuffisance professionnelle soit dit dépourvu de cause réelle et sérieuse.

le harcèlement moral

L' employeur tenu à une obligation de sécurité, doit assurer la protection et la santé des travailleurs dans l' entreprise et notamment prévenir les faits de harcèlement moral.

Dès lors que les faits sont avérés, la responsabilité de l' employeur est engagée, ce dernier devant répondre des agissements des personnes qui exercent de droit ou de fait une autorité sur les salariés.

Aux termes de l' article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Aux termes de l' article L. 1154-1 du code du travail, en cas de litige, si le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d' un harcèlement, au vu de ces éléments, il incombe à l' employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d' un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Pour l'essentiel, Mme [S] fait valoir qu'aucune remarque ne lui a été faite au cours des six mois de la période d'essai, que des reproches sur son travail sont apparus qui lui ont valu des entretiens pénibles et leur évocation devant des collègues de travail ou des intervenants extérieurs, qu'elle a été écartée de réunions et mise à l'écart de formations; elle ajoute que sa fiche de poste n'était pas rédigée à la fin de la relation contractuelle et que le Dr [D] ne lisait pas ses comptes-rendus, souhaitant en réalité qu'elle soit son faire-valoir et sa secrétaire particulière en dépit des missions dévolues aux psychologues cliniciens et de l'autonomie y attachée; Mme [S] affirme que ces faits de harcèlement moral ont nécessité un arrêt de travail de trois mois.

L'APAJH conteste tout harcèlement moral et fait valoir que Mme [S] avait été embauchée pour seconder le Dr [D] exerçant la responsabilité médicale et sous la hiérarchie de la direction administrative, que plusieurs réunions de recadrage ont été organisées dont le compte-rendu n'a pas été lu en public, que l'inspection du travail n'a donné aucune suite à la lettre de la salariée et qu'aucun élément médical n'établit l'existence d'un lien de causalité entre l'arrêt de travail et les conditions de travail de la salariée.

Mme [S] produit :

- son contrat de travail à temps partiel portant sur les fonctions de psychologue au sein du CMPP de [Localité 4] et mentionnant une période d'essai de six mois; la circonstance que les réunions de recadrage sont postérieures à l'issue de ce délai est inopérante dès lors l'employeur peut - dans l'exercice de son pouvoir de direction - solliciter de sa salariée qu'elle s'améliore, y compris après la période d'essai ;

-les convocations de Mme [S] à des réunions avec le Dr [D] - directrice médicale et mesdames [I] et [T], directrice générale du CMPP de la Dordogne en date des 12, 22, 26 mars 2018 ;

- un compte-rendu rédigé par l'employeur, remis en main propre à Mme [S] le 4 mai 2018, énumérant les manquements et difficultés de cette dernière dans l'exécution de ses fonctions; la conclusion est que la relation de confiance est devenue très problématique, ce qui complexifie le travail collaboratif qui est l'essence même de cette fonction institutionnelle; il est fixé une période jusqu'au 14 juin suivant permettant d'apprécier les fonctions et de recueillir les éléments d'une fiche de poste pour la finaliser ;

Aucun élément n'établit que ce compte-rendu a été lu lors d'une réunion en présence de collègues ou d'intervenants; ce document rédigé à l'issue d'une réunion tenue le 27 mai 2018, s'il est critique à l'égard de l'exécution par la salariée de son contrat de travail, répertorie les diligences devant être réalisées par elle, essentiellement la rédaction de comptes- rendus et des réunions avec la hiérarchie du CMPP.

- la lettre par laquelle Mme [S] informe les délégués du personnel qu'elle est victime de pressions de l' employeur qui l'a informée de sa volonté de mettre fin à son contrat de travail sous forme d'une rupture conventionnelle sans expliquer un motif autre qu'' on ne se comprend pas'; Mme [S] se plaint d'une mise à l'écart par l'annulation d'une formation dédiée à l'autisme les 25 et 26 juin 2018, et de ce que la proposition d'une rupture conventionnelle constituait un chantage au licenciement pour insuffisance professionnelle. Si une rupture conventionnelle du contrat de travail a été proposée par l' employeur le 14 juin 2018, il y a lieu de noter que cette date était l'issue de la période d'observation et qu'aucune référence n'est faite à un licenciement pour insuffisance professionnelle; à la date de la formation relative à l'autisme, Mme [S] était en congés pour récupération d'heures ;

-les interpellations par les délégués du personnel de l'employeur sur l'incompréhension quant au départ programmé de Mme [S]; ceux-ci ont parallèlement interpellé le directeur de l'APAJH le 27 juin 2018 au sujet de la perte d'autonomie de la salariée psychologue clinicienne. Cette allégation est imprécise;

- une fiche de poste de ses fonctions rédigée par Mme [S] et transmise à la directrice: sur ce point, il n'est pas contesté que Mme [S] a elle même rédigé sa fiche de poste mais ce point intéresse le bien - fondé du licenciement et n'est pas la marque d'un harcèlement moral ;

-des attestations louangeuses de précédents collègues de Mme [S],

- les avis d'arrêt de travail délivrés sans mention de la pathologie les nécessitant;

- le certificat délivré par le Dr [X] - [K] indiquant que les arrêts de travail de Mme [S] étaient consécutifs à une pathologie anxiodépressive majeure. Aucune autre avis médical n'est versé pour établir de lien de causalité de l'état de santé de Mme [S] avec ses conditions de travail.

Dans ces conditions, ces éléments pris dans leur ensemble, ne laissent pas présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [S] de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral et aux fins d'annulation du licenciement.

le bien-fondé du licenciement

L' insuffisance professionnelle est caractérisée par l'impossibilité du salarié à accomplir son travail de manière satisfaisante. Cette dernière doit être établie par des éléments précis étrangers à la seule interprétation subjective de l'employeur.

Au termes de la lettre de licenciement, l'employeur indique les motifs suivants:

1) s'agissant de la circulation des informations et liens avec la direction médicale :des informations incomplètes et/ ou transmises avec retard, sans hiérarchie d'urgence / importance; des difficultés relationnelles patentes et une absence d'outils de communication; des notes prises en style télégraphique à rechercher dans les dossiers pour avoir l'information; aucune préparation des dossiers examinés en réunions de synthèse hebdomadaires; une passation d'un test spécifique nécessitant pourtant une formation préalable et reconnue (ADOS) sans en avoir référé à la direction médicale ;

2)s'agissant des compétences professionnelles liées au diplôme de psychologue clinicienne : pas d'identification dans l'urgence de certaines situations confiées, traitées de fait avec un retard préjudiciable pour certains enfants; refus de recevoir des enfants en bilans diagnostiques psychologiques formalisés; pas d'élaboration clinique, d'identification des problématiques, aucune proposition d'action ou de mise en oeuvre de projet d'accompagnement en direction des enfants et de leurs familles, travail qui doit être réalisé ;

3) s'agissant du positionnement et de l'engagement, (fonction de cadre): positionnement non représentatif du CMPP auprès des partenaires; positionnement non collaboratif avec la direction médicale, positionnement qui fonde pourtant la fonction de la salariée; absence de collaboration doublée du non respect du lien de subordination avec sa hiérarchie à de multiples reprises ,non respect des consignes administratives transmise par la direction ( prise de congés, emploi du temps);

' la persistance de cette situation, alors même que ces diligences est attendu eu égard à vos fonctions de psychologue, caractérise une insuffisance professionnelle qui rend impossible la poursuite de votre contrat de travail '.

Par lettre datée du 28 juillet 2018, Mme [S] a demandé des précisions attendues quant à ce qui lui est reproché. Mme [S] fait état de son incompréhension des motifs invoqués dans la lettre de licenciement, les allégations prononcées lors de l'entretien préalable lui apparaissant non justifiées et parfois contradictoires.

L'APAJH répondra n'avoir aucun élément à ajouter, la lettre de licenciement étant particulièrement précise.

La cour constate en premier lieu que le document écrit produit sous cote 17 de l'employeur et qui aurait été rédigé par le Dr [D] n'est pas accompagné de la photocopie de la carte d'identité de la rédactrice et ne porte pas la mention qu'elle savait qu'il serait produit en justice et les sanctions en cas de fausse déclaration. Cette pièce ne répondant pas aux exigences posées par l'article 202 du code de procédure civile ne sera pas retenue.

La cour constate aussi qu'aucune fiche de poste n'a été remise à la salariée lors de la signature du contrat de travail, que Mme [S] elle même a soumis un projet de fiche de poste à l' employeur le 5 avril 2018, sans que la réponse de ce dernier ne soit produite. L'offre de recrutement ne peut palier cette absence de précisions, ses indications ne tenant pas compte du profil individuel de Mme [S], celle- ci n'ayant pas été reçue à cette date.

Enfin, aucun compte-rendu des réunions de recadrage n'est produit de sorte que la cour ne peut vérifier que Mme [S] a reçu les indications nécessaires données au cours de celles- ci.

1) Mme [S] fait valoir qu'aucune précision n'est apportée sur les difficultés organisationnelles; que des notes, rédigées avec des abréviations connues des professionnels, étaient retransmises à l'oral lors de réunions hebdomadaires et étaient versées au dossier; qu'il ne lui a jamais été demandé de dactylographier ces notes, que des cahiers de liaison existaient aussi, comportant toutes informations utiles; que le Dr [D] connaissait - via les plannings- toutes les rencontres extérieures et entretiens et que cette dernière ne lisait pas ses notes ni ne l'écoutait pendant les réunions au cours desquelles elle pouvait s'endormir.

Aucune pièce n'est produite au soutien de la réalité de difficultés organisationnelles.

Les pièces cotées 4,5 et 6 sont inopérantes : les notes manuscrites rédigées par Mme [S] l'étaient à l'issue d'un entretien ou d'un appel téléphonique. Il n'est pas établi qu'elles n'étaient pas évoquées lors de réunions hebdomadaires. Les abréviations utilisées étaient compréhensibles par des professionnels. En tout état de cause, aucune consigne de rédaction dactylographiée des notes n'est produite. Il doit aussi être souligné que les bilans rédigés par Mme [S], détenus pas l' employeur, ne sont pas produits par ce dernier. En tout cas, les bilans rédigés par Mme [S] , cotés 52 et 53 sont sont dactylographiés et clairs.

Le manque de transmission des informations n'est pas avéré, le dr [D] ayant reconnu lors de l' entretien préalable s'endormir parfois lors des réunions.

Si des difficultés relationnelles patentes sont mentionnées dans la lettre de licenciement, il n'est pas établi qu'elles l'ont été lors des réunions de recadrage.

Des pièces intéressant les emplois antérieurs à l'embauche de Mme [S], énoncent au contraire, que les parents étaient satisfaits de la prise en charge.

Quant aux tests ADOS, l'employeur ne prouve pas qu'ils étaient inutilisables voire étaient un échec total et Mme [S] explique les raisons familiales particulières expliquant la présence du frère de l'enfant. L' employeur ne conteste pas que Mme [S] avait déjà réalisé de tels tests et ne prouve pas les avoir évoqués lors des réunions de recadrage.Les insuffisances évoquées au premier alinea de la lettre de licenciement ne sont pas avérées.

2) Mme [S] fait valoir que le mail transmis par un éducateur a été reçu la veille de ses congés et qu'elle l'a traité dès son retour, qu'il n'évoquait pas d'urgence, que son statut ne l'obligeait pas à transmettre tous les mails au Dr [D]. Elle fait valoir qu'en sa qualité de psychologue clinicienne, il ne lui revenait pas d'effectuer de bilans diagnostic psychologiques, qu'elle n'était pas en charge du suivi psychologique des enfants ou du public et que de tels bilans étaient rédigés par les personnes qui effectuaient ces suivis. Elle précise qu'elle ne procédait qu'à des entretiens d'évaluation.

Sa fiche de poste était en cours d'élaboration et il ne peut lui être opposé que sa successeure réalisait des bilans diagnostique pédagogiques.

L' employeur ne produit aucune pièce précisant les faits et ne répond pas aux affirmations de la salariée sus-visées.

3) Mme [S] fait valoir qu'aucune précision n'est apportée quant au positionnement représentatif ; que le seul désaccord avec le Dr [D] était relatif au maintien d' un abonnement à une revue de psychanalyse ; qu'en prenant des rendez- vous extérieurs, elle agissait dans le périmètre de ses fonctions.

Les conclusions de l'employeur n'apportent aucune précision et ces manquements ne sont pas suffisamment établis.

Dans ces conditions, le licenciement de Mme [S] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le préjudice en résultant doit être indemnisé au regard des dispositions de l' article L.1235-3 du code du travail.

Mme [S] avait une ancienneté inférieure à une année et le montant des dommages et intérêts ne peut excéder un mois de salaire.

Mme [S] verse des avis d'impositions ne concernant pas l'année 2018. L'attestation du Pôle Emploi est datée de 2023 et aucune recherche d'emploi n'est versée.

Considération prise de l'âge de Mme [S], de son ancienneté et du montant de sa rémunération, le montant des dommages et intérêts sera fixé à hauteur de 1 800 euros.

La demande subsidiaire formulée par Mme [S] est sans objet, le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse.

le rappel d' heures complémentaires Mme [S] fait valoir qu'elle a réalisé des heures complémentaires non récupérées, qu'au 8 juin 2018, 73 heures restaient à récupérer et que son arrêt de travail l'en a empêché. Elle renvoie à un tableau et précise que la signature d'un solde de tout compte n'a d'effet libératoire qu'en cas de précision des sommes reçues et que les heures complémentaires n'y sont pas visées.

L' employeur fait état de ce que le reçu du solde de tout compte signé par la salariée sans contestation est détaillé et libératoire et que les heures complémentaires ne sont pas mentionnées parce qu'il n'y avait pas. Il estime que Mme [S] ne produit pas d'élément probant, le tableau produit n'étant pas contresigné par lui.

Le contrat de travail de Mme [S] mentionnait un travail à temps partiel de 28 heures par semaine réparti entre le temps de travail technique et le temps de travail personnel. Le solde de tout compte, signé par Mme [S] ne mentionne que des sommes étrangères aux heures complémentaires et l'effet libératoire ne porte que sur ces sommes. Mme [S] peut donc demander le paiement d'heures de travail réalisées qui ne seraient pas rémunérées.

Aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l' employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l' employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l' employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Mme [S] verse un tableau d'horaires de travail hebdomadaire avec indication des heures réalisées le mercredi et des temps de récupération.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l' employeur de fournir les horaires effectivement réalisés, peu important le défaut de signature du tableau produit.

L' employeur ne produit pas les horaires de travail réalisés par Mme [S] .

Au regard des éléments versés, la cour a la conviction, sans qu'il soit besoin de recourir à une mesure d'instruction, que l' employeur est redevable de la somme de 1 650,53 euros majorée des congés payés afférents.

Il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil en application desquelles les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1343-2.

L' employeur devra délivrer à Mme [S] une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail rectifiés dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt sans que le prononcé d'une astreinte ne soit nécessaire.

Vu l'équité, l'APAJH devra verser à Mme [S] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, l'association supportera les entiers dépens des procédures de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'exécution.

PAR CES MOTIFS

la cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [S] de ses demandes tendant au paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral et licenciement nul;

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,

-débouté Mme [S] de sa demande de paiement d'heures complémentaires,

statuant à nouveau de ces chefs,

Dit le licenciement de Mme [S] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne l'APAJH à payer à Mme [S] des dommages et intérêts à hauteur de 1 800 euros de ce chef,

Dit sans objet la demande très subsidiaire relative à la procédure de licenciement

Condamne l'APAJH à payer à Mme [S] la somme de 1 650,53 euros majorées des congés payés afférents (165,05 euros),

Dit n'y avoir lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil en application desquelles les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

Dit que l' employeur devra délivrer à Mme [S] une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail rectifiés dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt,

Condamne l'APAJH à payer à Mme [S] la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles engagés dans le cadre des procédures de première instance et d'appel,

Condamne l'APAJH aux entiers dépens des procédures de première instance et d'appel, y compris les frais d'exécution de l'arrêt.

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard