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Décisions

CA Chambéry, 1re ch., 6 février 2024, n° 21/01510

CHAMBÉRY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

MMA IARD Assurances Mutuelles (Sté)

Défendeur :

Alpes Technologies (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pirat

Conseillers :

Mme Reaidy, Mme Real del Sarte

Avocats :

SCP Bessault Madjeri Saint-Andre, SCP Dizier, Selarl Jurisophia Savoie

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’A…

3 juin 2021

Faits et procédure

En 2004, la société Bazin Henri (Sarl) a réalisé des travaux d'installation d'une armoire de batteries de condensateurs au sein du local transformateur dédié aux installations électriques de la société Jemaplast (Sasu), usine de fabrication de pièces techniques à base de plastiques. La batterie a été fabriquée par la société Alpes Technologies (Sas), aux droits de laquelle se trouve désormais la société Legrand France.

En 2011, la société Bazin Henri a procédé au remplacement de trois platines de condensateurs et d'un condensateur fixe avec disjoncteur de la batterie ont été remplacées en 2011 par la société Bazin Henti ainsi que d'un condensateur fixe avec disjoncteur, matériel fabriqué et fourni par la société Alpes Technologies.

Selon facture en date du 25 septembre et intervention du 14 octobre 2015, la société Alpes Technologies intervenait sur l'armoire de batteries de condensateurs pour remplacer différents composants pour cette même batterie de condensateurs, dont deux racks de condensateurs, un régulateur Varmétrique et un condensateur Alpivar.

Le 25 août 2017, un incendie se déclarait dans le poste électrique de l'usine de la société Jemaplast.

Par acte d'huissier en date du 14 novembre 2017, la société Jemaplast et ses assureurs la société Mma Iard Assurances Mutuelles et la société Mma Iard (Sa) assignaient la société Alpes Technologies et la société Cdeg Electricité Générale devant le président du tribunal de grande instance d'Albertville notamment aux fins de voir ordonner une expertie.

Par ordonnance du 12 décembre 2017 du juge des référés d'Albertville, unee expertise était confiée à M. [Y] [D], expert judiciaire, lequel s'adjoignait un sapiteur en la personne de M. [J]. L'expert déposait son rapport en date du 7 mai 2019.

Par actes d'huissier des 10 et 11 décembre 2019, les sociétés Mma Iard Assurances Mutuelles, Mma Iard, Jemaplast assignaient la société Jemaplast et son assureur, la société XL Insurance Company Se et la société Alpes Technologies devant le Tribunal de grande instance d'Annecy notamment aux fins de se faire indemniser de leurs dommages matériels et immatériels.

Par jugement du 3 juin 2021, le tribunal de grande instance d'Annecy, devenu le tribunal judiciaire à compter du 1er janvier 2020, a :

- Débouté la société Jemaplast, la société Mma Iard et la société Mma Iard Assurances Mutuelles de l'ensemble de leurs demandes ;

- Condamné la société Jemaplast, la société Mma Iard et la société Mma Iard Assurances Mutuelles à verser à la société Alpes Technologies la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société Jemaplast, la société Mma Iard et la société Mma Iard Assurances Mutuelles au paiement des entiers dépens avec distraction au profit de Me [B] [G].

Au visa principalement des motifs suivants :

La société Alpes Technologies ne pouvait être qualifiée de constructeur au sens des articles 1792 et 1792-1 du code civil, dès lors, elle ne pouvait voir sa responsabilité engagée sur le fondement de la garantie décennale ;

Si des éléments permettaient de mettre en cause les condensateurs de type Alpivar 3 fabriqués par la société Alpes Technologies, il n'était pas établi avec certitude qu'ils étaient atteints d'un vice et qu'ils avaient entraîné l'incendie ;

Sans certitude sur la cause du départ de feu, il ne pouvait être conclu au fait que ces condensateurs ne présentaient pas la sécurité à laquelle il était légitime de s'attendre, dès lors, les conditions de la responsabilité du fait des produits défectueux n'étaient pas non plus réunies.

Par déclaration au greffe du 16 juillet 2021, la société Jemaplast, la société Mma Iard et la société Mma Iard Assurances Mutuelles interjetaient appel de la décision en toutes ses dispositions.

Prétentions et moyens des parties

Par dernières écritures en date du 11 octobre 2021, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Jemaplast, la société Mma Iard et la société Mma Iard Assurances Mutuelles sollicitent l'infirmation de la décision et demandent à la cour de :

A titre principal,

- Condamner solidairement la société Alpes Technologies et la société XL Insurance Company Se à les indemniser sur le fondement de l'article 1792 du code civil, au titre de la responsabilité décennale de la société Alpes Technologies ;

A titre subsidiaire,

- Condamner solidairement la société Alpes Technologies et la société XL Insurance Company Se à les indemniser sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil, au titre de la garantie des vices cachés due par la société Alpes Technologies ;

A titre infiniment subsidiaire,

- Condamner solidairement la société Alpes Technologies et la société XL Insurance Company Se à les indemniser sur le fondement des articles 1245 et suivants du code civil, au titre de la responsabilité du fait des produits défectueux ;

A titre très infiniment subsidiaire,

- Interroger MM. [D] et [J] à préciser la cause de l'incendie survenu dans les locaux de la société Jemaplast ;

Par voie de conséquence,

- Condamner solidairement la société Alpes Technologies et la société XL Insurance Company Se à leur payer :

- la somme 187 513,85 euros au titre des dommages matériels et la somme de 133 813.50 euros au titre des dommages immatériels ;

- la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la somme de 19 416,66 euros correspondant aux frais d'expertise judiciaire ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance de référé, de première instance et de la présente instance sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile, dont distraction au profit de la Selarl C. & D. Pelloux, société d'avocats, pour la procédure de première instance, et au profit de la Scp Bessault Madjeri Saint-André, société d'avocats, pour la procédure d'appel ;

- Rejeter toutes fins ou prétentions contraires.

Au soutien de leurs prétentions, la société Jemaplast et les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles font valoir notamment que :

' sur le fondement de la responsabilité décennale, la société Alpes Technologies était liée à la société Jemaplast par un contrat de louage d'ouvrage en fournissant des éléments d'équipement, sources de l'incendie, rendant atteinte à la destination de l'entier ouvrage ;

' sur le fondement des vices cachés, l'incendie a pris au niveau du rack n°4 de l'armoire de condensateurs, dont les éléments avaient changé par la société Alpes Technologies, fabricant et installateur, en 2015, sachant que les condensateurs fabriqués entre juin 2014 et décembre 2015 ont fait ensuite l'objet d'un rappel en raison d'un défaut de fabrication susceptible d'entraîner un départ de feu ;

' sur le fondement des produits défecteux, la société Alpes Technologies avait produit des condensateurs qui n'offraient pas la sécurité qu'il était légitime d'en attendre.

Par dernières écritures en date du 14 septembre 2023, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Legrand France, venant aux droits de la société Alpes Technologies, et la société XL Insurance Company Se sollicitent de la cour de :

- Adjuger à la société Legrand France venue aux droits de la société Alpes Technologies et à la société XL Insurance Company Se l'entier bénéfice de leurs présentes conclusions d'intimées ;

Ce faisant,

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Annecy en date du 3 juin 2021 ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Débouter les sociétés Mma Iard Assurances Mutuelles, Mma Iard et Jemaplast de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions formées à leur encontre en ce qu'elles sont mal fondées ;

- Condamner solidairement les sociétés Mma Iard Assurances Mutuelles, Mma Iard et Jemaplast à leur payer une somme de 10 000 euros chacune en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner solidairement les sociétés Mma Iard Assurances Mutuelles, Mma Iard SA et Jemaplast aux entiers dépens dont distraction au profit de Me [U] [R] de la SCP Max Joly et Associés, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Au soutien de leurs prétentions, la société Legrand France et la société XL Insurance Company Se font valoir notamment que :

' la société Alpes Technologies n'a jamais été liée à la société Jemaplast par un contrat de louage d'ouvrage et l'intervention de la société Alpes Technologies en 2015 ne s'inscrit pas dans une opération de construction, outre le fait que le produit installé n'a pas été conçu et fabriqué spécifiquement pour l'ouvrage concerné ;

' la preuve d'un défaut ou d'un vice, antérieur ou concomittant à la vente, ayant nécessaire affecté la batterie de compensation et qui aurait casé l'incendie n'est pas établie ;

' l'existence d'une incertitude quant au caractère défectueux ou non d'un produit doit profiter au fabricant.

Une ordonnance en date du 9 octobre 2023 a clôturé l'instruction de la procédure. L'affaire a été plaidée à l'audience du 7 novembre 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l'audience ainsi qu'à la décision entreprise.

Motivation

MOTIFS ET DÉCISION

I - Sur la responsabilité sur le fondement de la garantie décennale (demande principale)

En vertu de l'article 1792 al 1 du code civil, 'Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination'.

L'article 1792-1 précisant notamment dans son alinéa 1 (les autre alinéas ne concernant pas le cas d'espèce) " Est réputé constructeur de l'ouvrage :Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage'.

L'application de ces dispositions nécessite en tout premier lieu de démontrer l'existence d'un contrat de louage d'ouvrage et d'un ouvrage pour que les garanties légales et notamment la garantie décennale puissent être envisagées.

D'une part, la société Alpes Technologies est intervenue en septembre-octobre 2015 pour remplacer un régulateur, la batterie fixe, un double rac PH20+4040 et un rac PH8040 déjà remplacé en 2011 par la société Bazin, par des racs de même capacité situés aux niveaux 3 et 4 de l'armoire, une batterie fixe identique et un régulateur Alptec. La société Alpes Technologies qui fabrique ces éléments en série n'a pas fourni de travail spécifique en vertu d'indications particulières rendant impossible de substituer au produit commandé un autre équivalent. La prestation accomplie par la société Alpes Technologies ne présentait pas un caractère unique, de sorte que la société Alpes Technologies n'était pas lié par un contrat d'entreprise mais par un contrat de vente à la société Jemaplast.

D'autre part, et surabondamment, il n'existe pas d'ouvrage au sens de l'article 1792 précité. En effet, le local électrique, construit avec la première partie de l'usine, puisqu'il s'est retrouvé ensuite entouré des bâtiments après les extensions, date de 1996, comme précisé dans le rapport d'expertise privée Focalyse. L'implantation d'une armoire de batteries de condensateurs en 2004, soit 13 ans au surplus avant l'incendie, par une autre entreprise que la société Jemaplast, ne constitue pas non plus un ouvrage au sens de l'article précité, puisqu'il s'agit d'un équipement en tant que tel installé dans le local électrique comme les autres équipements de l'installation (cellules haute tension, transformateur, disjoncteur général, tableau, disjoncteur particulier..) de sorte que le remplacement de trois condensateurs et autres composants de cette armoire de batteries ne peut pas entrer dans le cadre de la garantie décennale.

Ainsi, c'est à bon droit que le premier juge a écarté toute responsabilité de la société Alpes Technologies (société Legrand France) sur ce fondement.

II - Sur la responsabilité des vices cachés (demande subsidiaire)

En vertu de l'article 1641 du code civil, 'le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus'.

Il incombe à l'acheteur de rapporter l'existence d'un vice caché. Il appartient donc à la société Jemaplast de démontrer qu'un ou plusieurs éléments changés par la société Alpes Technologies en septembre-octobre 2015 dans l'armoire de batteries de condensateurs présentait un vice caché qui a été à l'origine de l'incendie.

Au vu des constatations tant de l'expert judiciaire que de l'expert mandaté par l'assureur de la société Jemaplast, la société Focalyse, seule l'armoire de batteries de condensateurs a été entièrement détruite, ainsi que la quasi-totalité des matériaux combustibles qui la constituaient. La société Focalyse a conclu que l'examen intérieur du poste permettait de localiser un foyer principal d'incendie au niveau de l'armoire de batteries de condensateurs ce qui était en cohérence avec l'absence de coupure électrique et le maintien en fonction des ventilateurs. Il en est de même de l'expert judiciaire qui a indiqué 'les dégradations observées au sein du local de transformation ne laissent aucun doute sur un foyer d'incendie ayant débuté au niveau de l'armoire de condensateurs. Les dommages sur les autres éléments électriques....... situés dans le local ne sont que les conséquences de l'incendie'. Cette constatation n'est d'ailleurs pas contestée par les parties.

L'expert judiciaire a tenté de préciser dans l'armoire de condensateurs l'endroit du départ de l'incendie. Il l'a situé au niveau du rack inférieur soit le rack n°4 qui a été remplacé par la société Alpes Technologies lors de son intervention de 2015. Toutefois, l'expert [D] se contente d'affirmer cette conclusion sans aucune démonstration, hormis la présence de calamine sur la tôle latérale gauche à hauteur du rack 4. Le sapiteur, M. [J] a précisé que le rack 4 (gradin 4) d'une puissance de 20 et 40 kVar était équipé de deux contacteurs du constructeur LSIS. Il a constaté un impact thermique au niveau de la tôle latérale gauche plus précisément au niveau de la zone des condensateurs du gradin n°4. Il a aussi ajouté que les contacteurs LSIS n'avaient jamais fait l'objet de rappel par la société Legrand France et continuaient à être utilisés. Selon lui, il ressortait des constatations réalisées sur l'armoire que le point chaud de l'incendie se situait au niveau du gradin n°4 et selon lui, l'on pouvait écarter le fait que la cause de l'incendie soit imputable à la défaillance d'un contacteur du constructeur GE-ABB équipant les gradins 1 et 2. Ainsi, les éléments permettant de s'orienter vers un départ de feu au niveau du Rack n°4 sont déjà fragiles.

En outre, sur la cause même du départ de feu, l'expert [D] a conclu 'il est quasiment impossible de déterminer avec précision l'élément qui est à l'origine de l'incendie en raison de l'état de dégradation très important qui fait que beaucoup d'éléments ont disparu et plus particulièrement les condensateurs' avant d'ajouter 'l'hypothèse la plus vraisemblable reste donc celle de l'inflammation d'un condensateur au niveau du rack n°4". Par ailleurs, le sapiteur a procédé à l'examen des autres hypothèses formulées par la société Alpes Technologies. et s'agissant de l'hypothèse deux (problème sur les contacts de pré-charge des contacteurs), il n'a pas pu donné d'avis puisqu'il n'avait retrouvé aucun contract de pré-charge dans les vestiges et surtout a indiqué que l'expert s'était prononcé sur un départ de feu au niveau du rack 4 et non du rack 2 concerné par cette hypothèse, ce qui ramène à la fragilité des constatations déjà évoquée, même s'il a plutôt adhéré au rejet de cette hypothèse au vu de ses remarques sur l'avis technique de la société ABB (rack 2). En tout état de cause, l'expert et son sapiteur n'ont formulé qu'une hypothèse soit un départ de feu dans les condensateurs du rack 4 mais sans certitude et ont pu noter un défaut de maintenance de la part de la société Jemaplast s'agissant de certains contacteurs et les contacts de pré-charge à remplacer tous les cinq ans.

Il convient également de souligner que l'expertise s'est aussi appuyée, pour retenir cette hypothèse comme étant la plus vraisemblable, sur un rappel effectué par la société Alpes Technologies en mai 2017 (et non en 2016 comme le dit l'expert) portant sur les condensateurs Alpivar acquis entre juin 2014 et décembre 2015. Cette information résultait du rapport d'expertise privée Focalyse évoquant le rappel de condensateurs mais également 'semblait-il' de certains contacteurs, sans autre précision. Dans son dire n°3, la société Alpes Technologies fait état d'un rappel qualité en 2017 ayant porté sur une partie de la production de condensateurs de type Alpivar 3 lié à 'une recrudescence d'incidents' en relation avec le fonctionnement des surpresseurs et plus particulièrement à la circulation du gaz qui pouvait avoir tendance à se diriger vers la paroi entre la bobine et le boîtier polypropylène avec toutefois des conditions de test plus contraignantes que celles recommandées par la norme IEC 60831-2, lesquelles ne déclenchaient pas de départ de feu. Toutefois, l'expert et le sapiteur n'ont fait aucune observation sur les causes de ce rappel, l'expert se contentant de reprendre la cause énoncée par la société Alpes Technologies dans son dire, aucun test n'ayant été réalisé par les experts sur des condensateurs Alpivar construits pendant la période litigieuse. En outre, la société Jemaplast qui a la charge de la preuve, n'a apporté aucun élément contraire à la discussion. En conséquence, aucun lien ne peut être fait entre cette campagne de rappel qualité et l'incendie qui s'est déclenché dans le local électrique de la société Jemaplast fin août 2017.

Dès lors, la preuve de l'existence d'un vice caché qui aurait été en lien direct avec l'incendie n'a pas été rapportée par la société Jemaplast et les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles.

Ainsi, c'est à bon droit que le premier juge a écarté toute responsabilité de la société Alpes Technologies (société Legrand France) sur ce fondement.

III - Sur la responsabilité du fait des produits défectueux (demande à titre infiniment subsidiaire)

Aux termes de l'article 1245 du code civil, 'le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime'.

Par ailleurs, l'article 1245-3 prévoit que : 'Un produit est défectueux au sens du présent chapitre lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre.

Dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation.

Un produit ne peut être considéré comme défectueux par le seul fait qu'un autre, plus perfectionné, a été mis postérieurement en circulation'.

En outre, l'article 1245-8 énonce que 'le demandeur doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage'.

Parmi les différentes conditions d'application de cette responsabilité, il est nécessaire pour la société Jemaplast d'apporter la preuve d'un défaut des éléments composant la batterie de condensateurs plus particulièrement du rack 4, à supposer que l'incendie ait effectivement pris dans ce rack.

Cependant, le caractère défectueux des produits fabriqués par la société Alpes Technologies n'est pas rapporté par les appelantes et le fait que la société Alpes Technologies ait mis en oeuvre une campagne de rappel sur certains de ses produits n'était pas suffisant pour démontrer qu'un défaut aurait nécessairement affecté les produits vendus, d'autant que l'expert n'a pas pu être affirmatif sur la cause de départ de l'incendie.

Ainsi, c'est à bon droit que le premier juge a écarté toute responsabilité de la société Alpes Technologies (société Legrand France) sur ce fondement.

IV - Sur les demandes accessoires

Succombant, la société Jemaplast et les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles seront condamnées in solidum aux dépens distraits au profit de Me Puig de la Scp Max Joly et Associés sur son affirmation de droit et il ne sera pas fait droit à leur demande d'indemnité procédurale.

L'équité commande de faire droit à la demande d'indemnité procédurale des intimées à hauteur de 5 000 euros.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Jemaplast et les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles in solidum aux dépens distraits au profit de Me Puig de la Scp Max Joly et Associés sur son affirmation de droit

Déboute la société Jemaplast et les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles de leur demande d'indemnité procédurale,

Condamne la société Jemaplast et les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles in solidum à payer à la société Legrand France et à la société XL Insurance Company Se ensemble une indemnité procédurale à hauteur d'appel de 5 000 euros.