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Décisions

Cass. 1re civ., 6 avril 2022, n° 21-12.045

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Rapporteur :

M. Chevalier

Avocat général :

M. Poirret

Avocats :

SCP Duhamel, Rameix, Gury, Maitre, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle

Paris, du 24 nov. 2020

24 novembre 2020

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 novembre 2020), par un accord conclu le 27 mai 2016, réitéré le 24 novembre suivant, la société Athmo, représentée par son dirigeant, M. [V], a cédé ses actions de la société Aciernet à la société Aciernet Capital.

2. Invoquant avoir assisté la société Athmo lors de la cession, M. [N], expert-comptable, l'a assignée en reconnaissance d'un contrat de louage d'ouvrage et paiement de la rémunération prévue dans un sms de M. [V] du 6 novembre 2015. La société Athmo a contesté l'existence d'un tel contrat et conclu, subsidiairement, à sa nullité en ce qu'il prévoyait uniquement des honoraires de résultat.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société Athmo fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de M. [N], alors « qu'un contrat ne peut déroger à l'ordre public ; que les honoraires rémunérant les missions effectuées par un expert-comptable ne peuvent être calculés sur la base d'un pourcentage des résultats financiers obtenus par les clients ; que la fixation d'un honoraire de résultat constitue un manquement aux règles déontologiques d'ordre public gouvernant la profession d'expert comptable ; qu'en jugeant cependant que le contrat verbal conclu le 6 novembre 2015 entre la société Athmo et M. [N], expert-comptable, dans le cadre de la cession des actions de la société Aciernet n'encourait pas la nullité, tandis qu'il avait été conclu en méconnaissance de la règle déontologique d'ordre public prohibant le pacte de quota litis, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et s'est fondée sur un motif inopérant tiré de l'absence d'illicéité de la prestation objet du contrat, a violé l'article 24 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 novembre 1945 dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-443 du 30 avril 2014, applicable au litige, ainsi que l'article 6 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 24 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-443 du 30 avril 2014 :

4. Selon ce texte, les honoraires de l'expert-comptable doivent constituer la juste rémunération du travail fourni comme du service rendu et ne peuvent en aucun cas être calculés d'après les résultats financiers obtenus par les clients.

5. Il en résulte qu'un contrat conclu entre un expert-comptable et son client, en ce qu'il fixe les honoraires dus en fonction de tels résultats, est illicite et, partant, nul, de sorte que le montant des honoraires dus à l'expert-comptable doit être déterminé en fonction du travail fourni et du service rendu.

6. Pour accueillir la demande de M. [N], après avoir admis l'existence d'un contrat de louage d'ouvrage et constaté qu'il prévoyait des honoraires de résultat, l'arrêt retient que les règles de déontologie, dont l'objet est de fixer les devoirs des membres de la profession, ne sont assorties que de sanctions disciplinaires et n'entraînent pas, à elles seules, la nullité des contrats conclus en infraction à leurs dispositions et que la société Athmo invoque une contrariété à l'ordre public sans toutefois la caractériser ni même l'expliciter.

7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.