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Décisions

Cass. 1re civ., 6 juillet 2022, n° 21-11.310

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Rapporteur :

Mme Kerner-Menay

Avocat :

SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre

Tours, du 2 déc. 2020

2 décembre 2020

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (2 décembre 2020), rendu en dernier ressort, le 5 février 2019, Mme [I] et M. [N] ont, en vue de leur mariage prévu les 27 et 28 juin 2020, conclu un contrat de réservation d'une salle auprès de la société A&P Réceptions (la société) et ont payé un acompte de 1 650 euros. Le contrat stipulait qu'en cas d'annulation de la manifestation par le client, le montant de la location resterait intégralement dû à la société, sauf cas de force majeure.

2. Après avoir demandé à la société, le 21 avril 2020, le report de la location en raison de la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid 19, Mme [I] et M. [N] ont, le 11 mai 2020, sollicité la résolution du contrat et la restitution de l'acompte versé en invoquant l'existence d'une force majeure.

3. Le 4 juin 2020, ils ont obtenu à l'encontre de la société une ordonnance portant injonction de payer la somme de 1 650 euros avec intérêts au taux légal au titre de la restitution de l'acompte versé. La société a formé opposition en réclamant le paiement de différentes sommes.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le second moyen, réunis

Enoncé des moyens

4. Par son premier moyen, la société fait grief au jugement de la condamner à payer à M. [N] et Mme [I] certaines sommes en remboursement de l'acompte versé et au titre du préjudice moral et de rejeter l'intégralité de ses demandes, alors :

« 1°/ que si la force majeure permet au débiteur d'une obligation contractuelle d'échapper à sa responsabilité et d'obtenir la résolution du contrat, c'est à la condition qu'elle empêche l'exécution de sa propre obligation ; qu'en retenant que « la progression de la crise sanitaire et l'absence de fin de celle-ci » étaient constitutives d'une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de la société à reverser à M. [N] et à Mme [I] les sommes perçues, quand cette situation n'empêchait aucunement ces derniers d'exécuter l'obligation dont ils étaient débiteurs, mais uniquement de profiter de la prestation dont ils étaient créanciers, le tribunal judiciaire a violé l'article 1218 du code civil ;

2°/ que pour qu'un événement de force majeure soit caractérisé, celui-ci doit avoir pour effet de rendre impossible l'exécution de son obligation par le débiteur ; qu'en retenant que « la progression de la crise sanitaire et l'absence de fin de celle-ci »étaient constitutives d'une situation de force majeure, empêchant l'exécution de l'obligation pesant sur Mme [I] et M. [N], alors que ces derniers avaient déjà exécuté cette obligation, le tribunal judiciaire n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi l'article 1218 du code civil ;

3°/ que le débiteur d'une obligation contractuelle de somme d'argent inexécutée ne peut s'exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure ; qu'en retenant que « la progression de la crise sanitaire et l'absence de fin de celle-ci » étaient constitutives d'une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de la société à reverser à Mme [I] et à M. [N] les sommes perçues, quand ces derniers étaient uniquement débiteurs d'une obligation de somme d'argent au titre du solde du prix de la prestation, le tribunal judiciaire a violé l'article 1218 du code civil. »

5. Par son second moyen, la société fait le même grief au jugement alors « qu'en retenant que « la progression de la crise sanitaire et l'absence de fin de celle-ci » caractérisaient la force majeure et que « l'irrésistibilité est caractérisée par le fait qu'il était et qu'il est impossible de prévenir le dommage » pour prononcer la résolution du contrat, sans répondre aux conclusions de l'exposante faisant valoir que M. [N] et Mme [I] « ont versé aux débats un nouveau contrat de location conclu avec un autre prestataire pour le week-end du 26 et 27 juin 2021, ce qui démontre leur volonté de maintenir la prestation à une date ultérieure », le tribunal judiciaire a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation et sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes que la cour d'appel a estimé, au vu des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, qu'était caractérisé un cas de force majeure rendant impossible l'exécution des obligations contractuelles et justifiant, en application de la clause du contrat, un remboursement de l'acompte versé.

7. Le moyen, nouveau et mélangé de fait, en ce qu'il se prévaut de l'impossibilité de s'exonérer d'une obligation contractuelle monétaire inexécutée en invoquant un cas de force majeure, et comme tel irrecevable, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.