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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 14 février 2024, n° 22/16120

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bio Colloidal France (SAS), Laboratoires Biorniz (SAS)

Défendeur :

Bio Colloidal France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Douillet

Conseiller :

Mme Bohee

Avocats :

Me Moisan, Me Richard, Me Lugosi, Me Boisnard, Me Moisan, Me Richard, Me Lugosi, Me Boisnard

TC Paris; du 30 août 2022; n° 2022037768

30 août 2022

Vu l'ordonnance de référé rendue le 30 août 2022 par le président du tribunal de commerce de Paris qui a :

-débouté la société Bio Colloïdal France de l'ensemble de ses demandes,

-condamné la société Bio Colloïdal France à verser à la société Biorniz la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la société Bio Colloïdal France aux entiers dépens.

Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par la société Bio Colloïdal suivant déclaration d'appel remise au greffe de la cour le 13 septembre 2022 (n° RG 22/16120).

Vu la signification faite à la société Biorniz, suivant acte d'huissier de justice du 26 décembre 2022, de la déclaration d'appel et des conclusions de l'appelante.

Vu l'avis du greffe du 27 janvier 2023 portant fixation de l'affaire à bref délai pour l'audience du 19 décembre 2023.

Vu l'appel de la même ordonnance interjeté le 4 août 2023 par la société Biorniz (n° RG 23/13787).

Vu les conclusions de la socie'te' Biorniz remises au greffe et notifiées par voie électronique le 28 septembre 2023 dans la procédure ouverte sous le n° RG 22/16120.

Vu l'ordonnance du 17 octobre 2023 prononçant la jonction des procédures respectivement ouvertes sous les n° RG 22/16120 et 23/13787 et leur poursuite sous le n° RG 22/16120.

Vu l'ordonnance sur incident rendue le 14 novembre 2023 par le magistrat chargé de la mise en état qui a :

-déclaré irrecevable l'appel interjeté le 4 août 2023 par la socie'te' Laboratoires Biorniz,

-de'claré irrecevables les conclusions de la socie'te' Laboratoires Biorniz,

-réservé les frais et dépens de l'incident.

Vu les dernières conclusions signifiées le 27 octobre 2023 par la société Bio Colloïdal (SAS), appelante, qui demande à la cour, au visa des articles 873 et 700 du code de procédure civile, de réformer en toutes ses dispositions l'ordonnance déférée et, statuant à nouveau, de :

A titre principal :

-interdire à la société Biorniz de commercialiser directement ou indirectement, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par infraction constate'e a' compter du lendemain de la signification de la de'cision a' intervenir, les produits a' base d'argent colloïdal, zinc et cuivre suivants, sous leurs emballages et présentations actuels, tels qu'illustrés dans les procès-verbaux de constat de l'étude d'huissiers de justice Ouest-Office des 19 avril, 20 avril, 4 mai et 8 juin 2022 :

- 'SILVERCOL®', argent colloïdal, 15 ppm, 500 ml et 1000 ml

- 'SILVERCOL®', argent colloïdal, 10 ppm, 1000 ml

- 'SILVERCOL®', argent colloïdal, 10 ppm, spray 250 ml

- 'SILVERCOL®', argent colloïdal, 10 ppm, 60 ml

- 'ZINECOL®', zinc 17 ppm, 500ml et 1000 ml

- 'COPPERCOL®', cuivre 10 ppm, 1000 ml

-ordonner à la société Biorniz de retirer ou faire retirer, à ses frais, de tous les points de vente (magasins et en ligne) l'ensemble des produits à base d'argent colloïdal, de zinc et cuivre, listés ci- dessus, sous leur présentation actuelle et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par infraction constatée à compter du 8ème jour suivant la signification de la décision à intervenir,

-ordonner à la société Biorniz de cesser directement ou indirectement, à ses frais, toute publicité par catalogue, documentation, brochures, supports promotionnels de quelque nature que ce soit y compris sur Internet, portant reproduction des produits à base d'argent colloïdal, de zinc et cuivre listés ci-dessus dans leurs emballages et présentations actuels et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par infraction constatée à compter du lendemain de la signification de la de'cision à intervenir,

-ordonner la cessation de l'exploitation et la fermeture du site Internet https://biorniz.fr/, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard a' compter du lendemain de la signification de la décision à intervenir,

A titre subsidiaire :

-ordonner à la société Biorniz, sous astreinte de 1.000 euros par infraction constatée passé un délai de huit jours suivant la signification de la décision à intervenir, de cesser de faire usage des termes 'BIO COLLOIDAL' et plus généralement d'éléments intellectuels et/ou d'images appartenant à la société Bio Colloïdal notamment relatifs à l'histoire de la famille [H],

En tout état de cause :

-ordonner que les astreintes ci-dessus sont prononcées pour une durée de deux mois, au-delà de laquelle il sera fait droit à nouveau,

-se réserver la liquidation de l'astreinte,

-condamner la société Biorniz au paiement de la somme de 14.471,35 euros à la société Bio Colloïdal ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.

Vu l'ordonnance de clôture du 28 novembre 2023.

SUR CE, LA COUR :

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé complet de la procédure et des moyens et prétentions des parties, à l'ordonnance entreprise et aux conclusions ci-dessus visées de l'appelante. La cour statuera en effet sur ces seules conclusions, celles de l'intimée ayant été déclarées irrecevables par l'ordonnance sur incident du 14 novembre 2023.

La société Bio Colloïdal France (ci-après Bio Colloïdal) est une société familiale, créée en 2010 par M. [E] [H], chimiste de formation, et son fils M. [R] [H], qui développe des produits paramédicaux à base d'oligo-éléments. Elle fabrique et distribue notamment une solution dermatologique constituée d'argent colloïdal.

En 2017, M. [R] [H] a cédé ses actions, représentant 51% du capital social, à sa s'ur [C], devenue depuis lors la présidente de la société. Il est cependant resté salarié dans la société jusqu'en 2019, date à laquelle il a créé à proximité du site de production de la société Bio Colloïdal, un magasin de distribution à l'enseigne Bio Fort Santé.

M. [E] [H] est resté détenteur de 49% du capital de la société Bio Colloïdal dans laquelle il a été salarié jusqu'en juillet 2021.

En octobre 2019, M. [O] [H], fils de M. [E] [H] et frère de [R] et [C] [H], a été engagé dans la société en qualité de responsable de la communication. Il a été mis fin à son contrat de travail en décembre 2019 en cours de période d'essai.

En mars 2020, M. [O] [H] a créé la société Laboratoires Biorniz, une société par actions simplifiée à associé unique avec pour objet social la 'fabrication et la vente de produits de beauté et de bien-être (compléments alimentaires et produits cosmétiques) sans finalité médicale'. Il a cédé en août 2020 ses actions à la société Rivoli participations dont il détient, avec son père M. [E] [H], le capital.

A l'occasion du lancement du site Internet de la société Biorniz, la société Bio Colloïdal aurait découvert que ses produits phares, en particulier sa solution dermatologique à base d'argent colloïdal, avaient été copiés, tant dans la présentation que dans la composition, qu'en outre, la société Biorniz s'était emparée de son histoire ainsi que de ses méthodes de promotion et de commercialisation des produits.

C'est dans ces circonstances que la société Bio Colloïdal, suivant acte d'huissier de justice du 29 juillet 2022, a fait assigner en référé devant le président du tribunal de commerce de Paris la société Biorniz en lui imputant des actes de concurrence déloyale et parasitaire constitutifs selon elle d'un trouble manifestement illicite qu'il y a lieu de faire cesser.

Le président du tribunal de commerce de Paris, selon les motifs de l'ordonnance dont appel, a constaté que la preuve n'était pas rapportée, avec l'évidence requise en référé, de la commission par la société Biorniz d'actes manifestement illicites de concurrence déloyale et parasitaire et a débouté en conséquence la société Bio Colloïdal de ses demandes.

Devant la cour, l'appelante réitère ses demandes telles que soutenues en première instance. Elle reproche à la société Biorniz de faire sienne l'histoire familiale à l'origine de la création de la société BioColloïdal à savoir la maladie de peau affectant M. [R] [H], la recherche par M. [E] [H] de traitements pour apaiser les désagréments liés à la maladie et l'élaboration de la solution à base d'argent colloïdal qui a fait la notoriété de la société. Elle observe que la société Biorniz sème la confusion dans l'esprit de la clientèle, notamment en copiant à l'identique la présentation de ses produits et, en particulier, en adoptant des flaconnages en verre ambré qu'elle était jusque là seule à utiliser. Elle ajoute que, pour lancer son activité, la société Biorniz s'est adressée à ses prestataires de service (notamment pour la réalisation de son site Internet) et à ses fournisseurs et qu'elle s'est en outre emparée de ses fichiers clients. Elle invoque enfin une collusion frauduleuse entre MM. [E], [R] et [O] [H] qui ont constitué la société Biorniz dans le but de lui porter préjudice et de nuire à sa présidente Mme [C] [H]. Elle fait valoir à cet égard que la société Biorniz a profité indûment de son savoir-faire et de ses ressources matérielles et humaines par le truchement de M. [E] [H] qui a oeuvré pour son développement alors même qu'il était salarié de la société Bio Colloïdal jusqu'à ce qu'il soit licencié en juillet 2021 avec mise à pied conservatoire en juin 2021 ainsi qu'avec le concours de M. [R] [H] qui, au mépris de l'acte de cession de ses actions de 2017, a systématiquement déréférencé, dans son magasin Bio Fort Santé, les produits Bio Colloïdal pour ne commercialiser que les produits Biorniz. L'appelante estime que ces actes commis à son préjudice constituent un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser en interdisant à la société Biorniz de poursuivre l'exploitation de son activité commerciale et, à titre subsidiaire, en lui interdisant d'utiliser dans l'exercice de cette activité le terme 'BIO COLLOIDAL' et plus généralement les éléments intellectuels et/ou d'images appartenant à la société Bio Colloïdal notamment relatifs à l'histoire de la famille [H].

Ceci posé, il importe de rappeler qu'en vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie un produit qui n'est pas protégé par un droit privatif de propriété intellectuelle peut être librement reproduit mais dans le respect des usages honnêtes et loyaux qui doivent présider à la vie des affaires. La faute de concurrence déloyale est caractérisée quand la commercialisation d'un produit similaire à celui d'un concurrent créé un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit. Le parasitisme est également illicite, consistant pour un opérateur économique, à titre lucratif et de façon injustifiée, à copier ou imiter une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire et d'investissements humains et financiers.

Il incombe à celui qui se prétend victime d'actes de concurrence déloyale ou de parasitisme d'en rapporter la preuve et de démontrer, au fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil, que les éléments constitutifs de ces comportements répréhensibles sont réunis.

Cependant, en l'espèce, la société Bio Colloïdal n'agit pas au fond mais en référé pour demander, en application des dispositions de l'article 873 du code de procédure civile, que soient ordonnées à l'encontre de la société Biorniz des mesures conservatoires afin de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de ses infractions à la règle de droit.

Il importe en conséquence de rechercher si la preuve est rapportée, avec l'évidence requise en référé, de la commission par la société Biorniz d'actes manifestement illicites de concurrence déloyale et de parasitisme au préjudice de la société Bio Colloïdal.

Or, ainsi qu'il a été exactement et pertinemment observé par le président du tribunal de commerce de Paris, les produits à base d'oligo-éléments de la société Bio Colloïdal et, en particulier, la solution d'argent colloïdal, ne font l'objet d'aucun droit privatif de propriété intellectuelle de sorte que l'appelante, qui ne peut prétendre à un monopole d'exploitation sur les oligo-éléments en général, et l'argent colloïdal en particulier, ne saurait reprocher à la société Biorniz d'utiliser ces substances pour des produits de la parapharmacie pas plus qu'elle ne saurait lui interdire de reproduire les mêmes dosages que ceux qu'elle met en oeuvre pour ses produits.

La société Bio Colloïdal affirme, mais sans en rapporter le moindre élément de preuve, que sa solution d'argent colloïdal 'est en effet inédite et unique sur le territoire français, sa fabrication par électrolyse lente, en faisant un produit stable de qualité' (page 4 de ses conclusions). Outre qu'elle ne démontre pas avoir été la première à commercialiser une solution d'argent colloïdal sur le territoire français, son message promotionnel sur Internet ne pouvant, à lui seul, être retenu comme preuve, elle ne justifie pas être 'forte d'un savoir-faire spécifique' (page 5 de ses conclusions) dans la fabrication de l'argent colloïdal par électrolyse lente et, en toute hypothèse, se garde d'établir que la société Biorniz se serait emparée de ce savoir-faire en adoptant un même procédé de fabrication par électrolyse lente. Il se déduit, du reste, de son affirmation précitée, que la fabrication de l'argent colloïdal par électrolyse lente serait une condition nécessaire, qui s'imposerait donc à tout fabricant d'un produit à base d'argent colloïdal, pour obtenir 'un produit stable de qualité'.

Il ressort encore des conclusions de la société Bio Colloïdal (page 4) que le respect d'un 'dosage de 10 ou 15 ppm (parties par million)' constitue également une condition nécessaire pour, d'une part, permettre une 'meilleure assimilation par l'organisme' et, d'autre part, assurer l'efficacité du produit car 'au-delà de 15 ppm, la solution d'argent colloïdal perd en efficacité'.

Il apparaît enfin, toujours à la lecture de ses conclusions (page 4), que le conditionnement de la solution d'argent colloïdal 'dans des bouteilles en verre ambré de qualité pharmaceutique' garantit 'une grande stabilité dans le temps' du produit, ce dont il suit que le recours à un tel conditionnement n'est pas propre à la société Bio Colloïdal mais qu'il est commandé par la nature même du produit et sa vocation à être commercialisé dans les circuits de la parapharmacie. Au surplus, si la société Bio Colloïdal prétend avoir été la seule sur le marché, jusqu'au lancement de la société Biorniz, à utiliser des bouteilles en verre ambré, elle n'apporte aucun élément probant de nature à corroborer ses allégations, force étant de constater que 'l'extrait de site de vente internet de produits concurrents', constituant sa pièce n°34, est dépourvu de date certaine, outre qu'il ne présente que deux produits concurrents appartenant respectivement aux marques Ortifo et Dr Theiss.

La société Biorniz aurait, de plus, emprunté à la société Bio Colloïdal le 'packaging distinctif et extrêmement original de ses produits caractérisé notamment par l'utilisation des couleurs bleu azurin et blanche, des motifs et écritures très épurés donnant à l'ensemble un aspect visuel sobre et raffiné'. Il ressort cependant de l'examen auquel s'est livrée la cour, que les boîtes en carton dans lesquelles sont offerts à la vente les produits Biorniz sont de couleur bleu marine et exemptes de 'bleu azurin', la couleur blanche y est à peine visible, tandis que du rouge y est utilisé pour désigner le produit contenu: 'cuivre', 'zinc'; par ailleurs, ces boîtes ne comportent que très peu de mentions verbales, au contraire des emballages utilisés pour les produits Bio Colloïdal qui en sont plus chargés et qui présentent en outre, en position de surplomb, un élément figuratif. Il s'infère de ces observations que les emballages sont différents. Au demeurant, et contrairement à ce que soutient l'appelante, il ressort de la photographie montrée en page 22 de ses conclusions que les produits concurrents, exposés côte à côte sur les rayonnages des magasins, donnent à voir une présentation distincte, exclusive de tout risque de confusion pour le consommateur d'attention moyenne.

Enfin, pour faire sa promotion, la société Biorniz se serait appropriée l'histoire familiale qui a présidé à la création de la société Bio Colloïdal, aggravant ainsi, selon cette dernière, le risque de confusion. Le texte incriminé du site Internet de la société Biorniz est signé de '[O] [H]- fondateur des Laboratoires Biorniz', et énonce sous le titre 'une belle histoire familiale': 'L'histoire débute en 2009 lorsque mon père [E] [H] découvre l'argent colloïdal aux Etats-Unis. Il souhaite en effet venir en aide à mon frère [R], atteint de la maladie de Darier, maladie de peau génétique réputée incurable. Chimiste de métier et rapidement convaincu des bienfaits de l'argent colloïdal, mon père décide de créer le laboratoire Bio Colloïdal pour faire découvrir l'argent colloïdal en France. Après avoir travaillé au sein du laboratoire Bio Colloïdal, j'ai décidé de poursuivre l'innovation en fondant les Laboratoires Biorniz afin d'offrir une gamme plus large d'oligo-éléments colloïdaux'. Or, ainsi qu'il a été justement relevé par le premier juge, la narration par le fondateur de la société Biorniz d'éléments d'histoire de la famille [H], à laquelle il appartient, n'est pas condamnable dès lors qu'elle est exempte de tout dénigrement tant à l'égard de la société Bio Colloïdal qu'à l'égard de sa présidente Mme [C] [H]. En toute hypothèse, il ne résulte aucunement d'une telle narration un risque de confusion entre les deux sociétés, M. [O] [H] précisant clairement qu'il fondait la société Biorniz, après avoir travaillé pour la société Bio Colloïdal, et qu'il déploiera désormais son activité au sein de la société nouvellement fondée. Les deux sociétés sont ainsi présentées comme des entités distinctes et un risque de confusion ne saurait résulter du seul fait que leurs fondateurs seraient issus d'une même famille.

La société Bio Colloïdal se prévaut par ailleurs, sans autre précision, de l'utilisation par la société Biorniz de son fichier client.

Or, il convient encore de rappeler que le principe applicable est celui de la liberté du commerce et de l'industrie qui implique pour les opérateurs économiques intervenant sur un même secteur d'activité de se mettre en concurrence pour conquérir et retenir la clientèle; ainsi le fait pour un opérateur d'attirer vers lui un client et de le détourner d'un concurrent ne constitue pas, en soi, un comportement fautif dès lors qu'il procède d'une saine concurrence exempte de tout comportement contraire à un exercice paisible de la liberté du commerce et de l'industrie ; le détournement de la clientèle d'un concurrent sera en revanche répréhensible s'il résulte de l'emploi, au préjudice de ce concurrent, de manoeuvres déloyales et frauduleuses et, plus généralement, de tous moyens illicites.

Faute pour l'appelante de rapporter la preuve, qui lui incombe, de la matérialité même du fait allégué d'une utilisation de son fichier client et plus généralement d'une quelconque manoeuvre illicite de détournement de sa clientèle, le grief ne saurait être retenu.

La preuve n'est pas davantage établie d'un recours aux mêmes fournisseurs, dont il appartiendrait, en toute hypothèse, à l'appelante, de démontrer le caractère répréhensible.

La société Bio Colloïdal prétend enfin être victime d'une collusion en incriminant notamment le comportement de M. [R] [H], ancien associé, qui aurait été contraire à ses engagements résultant de la cession de ses actions le 15 juin 2017. Force est toutefois de relever que si la convention de cession d'actions du 15 juin 2017 est produite aux débats (pièce n°5), la société Bio Colloïdal, qui se contente d'affirmations, se garde de se prévaloir d'une clause de non concurrence et s'abstient d'invoquer un engagement contractuel précis que M. [R] [H] aurait manifestement enfreint. Quant à M. [E] [H], qui aurait à son insu oeuvré à la création et au développement de la société Biorniz alors qu'il était son salarié, la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie, les seuls éléments soumis à l'appréciation de la cour, à savoir la lettre de mise à pied conservatoire du du 16 juin 2021 et la lettre de licenciement du 23 juillet 2021, ne pouvant être considérés comme suffisamment probants.

Il découle en définitive des motifs qui précèdent que le premier juge a retenu à juste raison que la preuve n'est pas rapportée avec l'évidence requise en référé de la commission par la société Biorniz d'actes de concurrence déloyale et parasitaire manifestement illicites.

L'ordonnance dont appel, qui rejette l'ensemble des demandes de la société Bio Colloïdal, est en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.

L'équité commande de débouter la société Bio Colloïdal de sa demande formée au titre des frais irrépétibles d'appel.

Partie perdante, elle sera condamnée aux dépens de l'appel qui comprendront les dépens de l'incident précédemment réservés par l'ordonnance du 14 novembre 2023.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance dont appel,

Déboute la société Bio Colloïdal de sa demande au titre des frais irrépétibles d'appel,

Condamne la société Bio Colloïdal aux dépens de l'appel qui comprendront les dépens de l'incident précédemment réservés par l'ordonnance du 14 novembre 2023.