Livv
Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. com., 7 février 2024, n° 20/02314

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

NRC (EURL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chevrier

Conseillers :

Mme Piedagnel, M. Alzingre

Avocats :

Me Akhoun, Me Gangate

TJ Saint Pierre, du 13 nov. 2020, n° 19/…

13 novembre 2020

LA COUR

Suivant acte sous signature privée du 1er avril 2005, M. [B] [F] a donné à bail à M. [A] [M] une partie d'une parcelle située [Adresse 1] (974) en vue de la création d'un fonds de commerce de vente de voiture automobile d'occasion, neuf, ou location de voiture, sous l'enseigne ALO Auto Location Occasion, moyennant le versement d'un loyer de 905 euros mensuel.

Suivant acte d'huissier délivré le 4 décembre 2018, M. [F] s'est vu signifier une copie de l'acte authentique de cession de fonds de commerce signé le 25 septembre 2018 entre M. [Y] et l'EURL NRC, représentée par son gérant M. [N] [H], aux termes duquel il était cédé le fonds de commerce de vente de véhicules neufs et d'occasion, de location de voitures et de réparation de véhicules automobiles légers, connu sous le nom commercial ALO, ce fonds comprenant le droit au bail pour le temps restant à courir dans les locaux où il est exploité.

Suivant lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) du 7 décembre 2020, M. [F] s'est opposé à cette vente au motif que l'activité exercée n'était pas conforme au bail signé le 1er avril 2005.

Par acte d'huissier en date du 25 novembre 2019, M. [F] a fait assigner la société NRC devant le tribunal judiciaire de Saint Pierre de la Réunion aux fins de résiliation du bail commercial, expulsion de la société NRC et condamnation à lui payer une indemnité d'occupation de 1.500 euros par mois ainsi qu'une somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles, et ce, sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

La société NRC a soulevé la nullité de l'assignation et de la sommation, le caractère non écrit de la clause du bail prohibant la cession du fonds et la prescription de la demande de résiliation fondée sur le changement d'activité. A titre reconventionnel, elle a sollicité la condamnation de M. [F] à lui payer les sommes de 20.000 euros au titre de son préjudice moral, 20.000 euros pour procédure abusive et 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

C'est dans ces conditions que, par jugement rendu le 13 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Saint Pierre de la Réunion a :

  - Prononcé la résiliation du bail commercial liant M. [B] [F] et l'EURL NRC portant sur les locaux sis AV n° [Cadastre 2] [Adresse 1] (974) à compter de ce jour ;

  - Condamné l'EURL NRC, et tous occupants de son chef à quitter les lieux occupés sis AV n° [Cadastre 2] [Adresse 1] (974) ;

  - Condamné l'EURL NRC à payer à M. [B] [F] une indemnité d'occupation 1.100 euros par mois soit 36,67 euros par jour à compter de ce jour et jusqu'à son départ des lieux loués caractérisé par la remise des clefs ;

  - Rejeté les demandes reconventionnelles de l'EURL NRC ;

  - Condamné l'EURL NRC à payer à M. [B] [F] une indemnité de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

  - Condamné l'EURL NRC aux dépens de l'instance ;

  - Ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration au greffe en date du 10 décembre 2020, la société NRC a interjeté appel de cette décision.

Par jugement en date du 29 décembre 2020, le tribunal mixte de commerce de Saint Pierre de la Réunion a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de l'EURL NRC.

Par acte d'huissier en date du 17 mars 2021, M. [F] a assigné et signifié la déclaration d'appel et ses conclusions à la SELARL Élise De Laissardière, ès qualités d'administrateur judiciaire de l'EURL NRC.

Par jugement en date du 29 juin 2021, le tribunal mixte de commerce de Saint Pierre a convertit la procédure de redressement judiciaire ouverte au profit de l'EURL NRC en liquidation judiciaire et nommé la SELAS EGIDE prise en la personne de Me [U] [D], mandataire judiciaire, en qualité de liquidateur.

Suivant ordonnance sur incident du 29 novembre 2021, le conseiller de la mise en état a :

  - Déclaré recevable M. [B] [F] en sa demande de caducité de l'appel ;

  - Débouté M. [B] [F] de sa demande tendant à voir, dire et juger que l'acte d'appel n'a pas d'effet dévolutif et la cour non saisie ;

  - Dit n'y avoir lieu à prononcer la caducité de l'appel ;

  - Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

  - Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;

La société NRC n'a pas reconclu après l'incident.

Par arrêt mixte du 30 juin 2023, la cour a :

  - Constaté l'effet dévolutif de l'appel sur les chefs du jugement critiqués relatifs à la résiliation du bail, l'expulsion de l'EURL NRC et la condamnation à paiement de cette dernière d'une indemnité d'occupation ;

Avant dire droit,

  - Ordonné la réouverture des débats, afin de permettre à M. [F] de produire le bail commercial établi le 30 septembre 2013 le liant à M. [Y] et figurant dans l'acte de cession de fonds de commerce du 25 septembre 2018 et aux parties de faire toutes observations utiles sur ce point, y compris sous forme de conclusions ;

  - Renvoyé à l'audience de mise en état du 18 septembre 2023;

  - Réservé l'ensemble des demandes et les dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 octobre 2023 et l'affaire a reçu fixation pour être plaidée à l'audience rapporteur du 8 novembre 2023.

* * *

Dans ses uniques conclusions transmises par voie électronique le 15 septembre 2021, l'EURL NRC, représentée par son mandataire liquidateur la SELAS EGIDE prise en la personne de Me Hoareau (la société NRC), demande, au visa des articles 1134 et 1184 du code civil dans leur rédaction antérieure à la réforme de 2016 et applicable au cas d'espèce, 145-16 et suivant du code de commerce, de :

  - Déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par l'EURL NRC ;

  - Débouter l'intimé de sa demande de caducité qui est irrecevable pour n'avoir pas été présentée au conseiller de la mise en état ;

  - Infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau ;

  - Constater que le notaire a respecté la procédure relative à la cession du fonds de commerce ;

  - Dire et juger la cession de fonds de commerce régulière et opposable au bailleur ;

  - Constater que l'activité de mécanique a toujours existé depuis 20 ans ;

  - Constater que la mention mécanique était apposée sur la rue ;

  - Constater que les renouvellements de bail sont postérieurs à l'adjonction de l'activité mécanique ;

  - Dire et juger que le bailleur a implicitement accepté de manière non-équivoque la modification de la destination par le locataire ;

En conséquence,

  - Constater que la clause résolutoire n'est pas visée par le bailleur ;

  - Dire et juger qu'il n'existe pas de motif légitime suffisamment grave afin de requérir la résiliation du bail commercial ;

  - Condamner M. [F] à payer au liquidateur la somme de 50.000 euros au titre de réparation du dommage causé par la présente procédure ;

En tous les cas,

  - Décharger le liquidateur des condamnations prononcées contre lui en principal, intérêts, frais et accessoires ;

  - Condamner M. [F] à payer au liquidateur la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

  - Le condamner en tous les dépens ;

  - Débouter M. [F] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

  - Dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par Maître Iqbal Akhoun, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 janvier 2022, M. [F] demande à la cour, au visa des articles 562 et 901 du code de procédure civile, 1217, 1224, 1227, 1229, 1728 et 1741 du code civil et L. 145-16 et L. 145-47 du code de commerce, de :

  - Voir dire et juger que la déclaration ne répond pas aux exigences des articles 562 et 901 du code de procédure civile et que l'effet dévolutif de l'appel n'a pas opéré ;

  - Voir dire et juger que la cour non saisie par la déclaration d'appel, et ce avec toutes conséquences de droit ;

A défaut,

  - Voir débouter l'EURL NRC de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

  - Voir confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

En tout cas,

Y ajoutant,

  - Voir condamner l'EURL NRC à payer à M. [F] la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont le coût des actes de Me [C] [T].

S'agissant de la réouverture des débats, et suivant observations transmises par RPVA le 14 septembre 2023, M. [F] a indiqué ne pas retrouver l'acte notarié du 30 septembre 2013, ajoutant que ledit acte a été fourni par l'une des parties et qu'en ce qu'il le concerne, il a toujours fait référence au seul bail du 1er avril 2005.

* * *

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l'exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

A titre liminaire

Pour rappel, en vertu de l'arrêt mixte du 30 juin 2023, la cour est uniquement saisie des chefs du jugement critiqué clairement identifiables, à savoir en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail commercial et ses conséquences immédiates : l'expulsion de la société NRS à compter du jugement et la condamnation de cette dernière à payer à M. [F] une indemnité d'occupation 1.100 euros par mois soit 36,67 euros par jour à compter du jugement et jusqu'à son départ des lieux loués caractérisé par la remise des clefs.

Par ailleurs, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » lorsqu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

En l'espèce, la cour relève que si la société NRS invoque dans sa partie discussion la « violation du principe du contradictoire » par le tribunal au motif que celui-ci « n'a pas pris en considération les pièces produites aux débats qui démontrent que le propriétaire a mis en œuvre la procédure de résiliation du bail, de mauvaise foi, en raison du refus du locataire d'accepter une augmentation excessive du loyer », il n'en titre aucune conséquence juridique dans le dispositif de ses conclusions.

Enfin, conformément aux dispositions des articles 4 et 12 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et, si le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, il ne peut changer la dénomination ou le fondement juridique lorsque les parties, en vertu d'un accord exprès et pour les droits dont elles ont la libre disposition, l'ont lié par les qualifications et points de droit auxquels elles entendent limiter le débat.

Il s'ensuit qu'aucune des parties n'a entendu, ni produire, ni faire d'observation, sur le bail commercial conclu le 30 septembre 2013 entre MM. [F] et [Y] évoqué dans l'acte de cession du fonds de commerce et qu'il s'ensuit que le litige est limité aux stipulations du bail conclu le 1er avril 2005 entre MM. [F] et [Y] et dont M. [F] demande la résiliation pour manquement aux obligations contractuelles du preneur, à la lumière de l'acte de cession de fonds de commerce conclu entre M. [Y] et la société NRS.

Sur la résiliation du bail commercial conclu entre M. [F] et la société NRC le 1er avril 2005

La société NRC soutient en substance que c'est à tort que le tribunal a prononcé la résiliation du bail au motif qu'il existe une violation grave de ses obligations dès lors que :

  - La cession du fonds de commerce n'était pas soumise à l'autorisation préalable et par écrit du bailleur qui ne peut donc lui reprocher aucun manquement contractuel ;

  - M. [F] a accordé à ses locataires implicitement et de manière non équivoque l'autorisation de pratiquer l'activité de mécanique en renouvelant successivement les baux.

En tout état de cause, la société NRC fait valoir que la gravité des infractions aux clauses du bail s'apprécie au jour où le juge statue sur la demande de résiliation judiciaire, or, elle a cessé l'exploitation de l'activité de réparation de véhicules automobiles et est de bonne foi. Elle en déduit qu'il n'y a donc pas lieu de prononcer la résiliation quand des infractions mineures ont disparu à cette date.

M. [F] fait valoir pour l'essentiel que les violations persistantes et graves du bail justifient que celui-ci soit résilié aux torts exclusifs de la société NRC avec toutes conséquences de droit dans les termes du dispositif. Il argue que :

  - La cession du fonds de commerce est intervenue sans son accord ;

  - Il n'a jamais autorisé l'activité de réparation de véhicules automobiles ;

  - La société NRC était parfaitement informée de l'interdiction de modification ou d'adjonction d'activités ;

  - La société NRC a officialisé sa décision d'exercer une activité principale et non accessoire de garage en violation des termes du bail ;

  - La société NRC n'a pas respecté les dispositions du bail concernant l'occupation des lieux : des véhicules étaient garés sur le chemin d'accès commun à l'autre locataire de l'immeuble et des poteaux ont été installés sur l'assiette du chemin.

Sur ce,

D'une part,

Il ressort des dispositions de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 que :

'Les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que leur consentement mutuel ou pour des causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi.'

D'autre part,

Il résulte des dispositions de l'article 1184 du même code dans sa rédaction applicable au litige que :

'La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de point droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.'

La résolution peut être prononcée aux torts de l'un des cocontractants ou à leurs torts réciproques. La résolution judiciaire entraîne l'anéantissement rétroactif du contrat. Les parties doivent donc procéder à la restitution en nature des prestations reçues sauf si les choses ne sont plus entières. Si, dans un contrat synallagmatique à exécution successive, la résiliation judiciaire n'opère pas pour le temps où le contrat a été régulièrement exécuté, la résolution judiciaire pour absence d'exécution ou exécution imparfaite dès l'origine entraîne l'anéantissement rétroactif du contrat. La résiliation judiciaire des contrats à exécution successive ne prend pas nécessairement effet à la date de la décision qui la prononce.

Enfin,

Aux termes de l'article 1717 du code civil :

« Le preneur a le droit de sous-louer, et même de céder son bail à un autre, si cette faculté ne lui a pas été interdite.

Elle peut être interdite pour le tout ou partie.

Cette clause est toujours de rigueur. »

L'article 1717 du code civil pose le principe de la liberté de cession de bail par le preneur si cette faculté ne lui a pas été interdite : c'est l'application, au contrat de bail, du principe général de la liberté des conventions.

La réglementation relative à la cession du bail commercial est précisée à l'article L. 145-16 du code de commerce qui dispose en son premier alinéa, dans sa rédaction applicable au litige : « Sont également réputées non écrites, quelle qu'en soit la forme, les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail ou les droits qu'il tient du présent chapitre à l'acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise. »

Ainsi, l'article L. 145-16 institue un régime dérogatoire au droit commun, en prohibant les clauses d'interdiction de cession du bail à l'acquéreur du fonds de commerce, l'article 1717 restant applicable à la cession isolée du bail.

La nullité édictée par l'article L. 145-16 du code de commerce concerne les clauses interdisant toute cession du bail conjointement à la cession du fonds de commerce.

Les clauses qui rendent la cession impossible à certaines personnes ou dans certaines situations sont également visées par ce texte, telles les clauses dites " clauses de sélection " qui interdisent de céder le bail à une société ou à une personne morale, celles interdisant tout nantissement du droit au bail, ou encore la clause imposant au preneur une exploitation personnelle pendant les 3 dernières années du bail.

Les clauses qui subordonnent la cession à des contraintes particulières, mais sans empêcher la cession, sont valables.

La validité de ces clauses est strictement limitée aux baux commerciaux.

Une jurisprudence constante et ancienne reconnaît que les clauses qui exigent l'autorisation du bailleur restent valables même dans le cas d'une cession concomitante du bail et du fonds de commerce au même acquéreur.

Les motifs de refus d'agrément sont soumis au contrôle judiciaire.

Le refus injustifié du bailleur peut entraîner sa condamnation à des dommages-intérêts ; les tribunaux peuvent également autoriser la cession, en se fondant sur l'abus de droit.

En l'absence de réponse à une demande d'agrément présentée en conformité avec la clause imposant l'agrément avant l'enregistrement de l'acte, le preneur est en droit de demander une autorisation judiciaire de cession. L'absence de réponse à une demande d'agrément peut également entraîner la condamnation du bailleur à des dommages-intérêts équivalents au prix de la cession envisagée.

La clause d'agrément s'impose au cédant, et la Cour de cassation reconnaît le pouvoir souverain des juges du fond d'apprécier la gravité de l'infraction à la clause du bail soumettant à l'agrément du bailleur la cession envisagée, et de prononcer la résiliation du contrat.

En cas de non-respect de la clause d'agrément, le bailleur est fondé à solliciter en référé la constatation de la clause résolutoire, ainsi que la condamnation du preneur au paiement des loyers et indemnités d'occupation dues, en sus de son expulsion.

La signification postérieure de l'acte de cession au bailleur qui n'a pas été appelé à l'acte, faite en application des articles 1690 et 2075 du code civil, n'est pas de nature à régulariser une violation de la clause du bail prévoyant un agrément préalable du bailleur. La sanction du non-respect de cette clause est l'inopposabilité de la cession au bailleur.

En l'espèce, suivant acte sous signature privée dénommé « BAIL COMMERCIAL D'OCCUPATION DES LIEUX » conclu le 1er avril 2005, M. [B] [F] a donné à bail à M. [A] [M] « une partie du terrain situé [Adresse 1], vers l'arrière de côté de la ravine et qui se trouve à l'arrière du snack bar [6], d'une superficie de 400 m² environ (25m x 16m = 400m²) pour la partie occupée A et 172 m² (23m x 7,50m = 172m²) pour la partie occupée B soit au total A+B = 572 M², sur la parcelle cadastrales AV n° [Cadastre 2] en vue de la création uniquement vente de voiture automobile d'occasion, neuf, et de location de voitures SOUS ENSEIGNE « A.L. O. » Auto Location Occasion, interdiction de faire autre commerce et autre chose mentionnée ci-dessus, à défaut de ne pas respecter les conditions ci-dessus le contrat pourra être résilié de plein droit. », moyennant un loyer annuel de 10.860 euros HT, soit 905 euros HT par mois, étant précisé qu'exceptionnellement en raison des travaux d'amélioration apportés par l'occupant, tels que la clôture et tous les déblais qui se trouvent sur l'emplacement B à enlever et qui resteront acquis à M. [F], le loyer mensuel pour la première année sera de 610 euros HT, et la deuxième année de 700 euros HT, pour une « durée de 3-6-9 », à compter du 1er avril 2005.

Aux termes de l'article « 7. CLAUSE ET OBLIGATIONS PRINCIPALES D'OCCUPATION DES LIEUX » :

« Ne pas louer, ni céder son droit d'occupation des lieux en partie ou en totalité, sans le consentement exprès et par écrit de Monsieur [B] [F].

Ne pas ajouter d'activité complémentaire et supplémentaire en annexe, ni transformer l'activité principale (vente de voiture automobile d'occasion, neuf et location de voiture) sans le consentement exprès et par écrit du propriétaire Monsieur [B] [F].

(...) ».

L'article « 9. CLAUSE DE NUISANCE » est ainsi rédigée :

« Ne pas nuire à la tranquillité, ni faire de bruit, ni de tapage aux occupant de l'immeuble et [6] sous peine de résiliation du bail d'occupation des lieux.

Ne pas bloquer l'entrée, ni stationner dans l'entrée principale, côté [Adresse 7], car il s'agit d'une entrée commune (voir le plan descriptif, partie teintée en jaune A et B). »

Suivant procès-verbal de constat daté du 18 juillet 2018 et la demande de M. [H], l'huissier de justice a constaté la présence de deux enseignes mentionnant une activité de « mécanique auto » installées aux deux entrées, ainsi qu'un atelier d'entretien courant et de réparation mécanique de véhicule automobile installé à l'arrière des véhicules affectés à la location ou la vente occupant une grande partie de la parcelle exploitée par l'enseigne ALO ; M. [Y] lui ayant déclaré qu'il exerce une activité de réparation mécanique des véhicules automobiles depuis plus d'une dizaine d'années sur les lieux loués.

Par LRAR datée du 14 août 2018, M. [F] rappelle à M. [Y] certaines clauses dudit bail, à savoir les paragraphes 1 et 2 de l'article 7 concernant les clauses et obligations principales d'occupation des lieux.

En réponse, par LRAR datée du 17 août 2018 M. [Y] s'étonne de l'augmentation de loyer annoncée et correspondant à une hausse de 36 % et y oppose un refus, ajoutant :

« Aussi, je tiens à vous signifier que l'activité de Mécanique générale a toujours été pratiquée sur le site de l'activité, ce que vous avez pu constater par vous-même lors de vos passages sur le site. En effet, nous effectuons régulièrement l'entretien de nos voitures de location et de nos véhicules d'occasion en vente au garage et cela ne constitue à ce jour aucune gêne pour le voisinage environnant.

Si nous ne parvenons pas à un accord, je serais dans l'obligation de mener une action en justice pour faire valoir mes droits, et ainsi obtenir des dommages et intérêts. » ;

Suivant acte notarié du 25 septembre 2018, M. [Y] a cédé à l'EURL NRC, représentée par son gérant M. [N] [H], un fonds de commerce de vente de véhicules neufs et d'occasion, de location de voitures et de réparation de véhicules automobiles légers situé à [Adresse 1] lui appartenant, connu sous le nom commercial ALO comprenant les éléments incorporels, dont l'enseigne ALO, le nom commercial ALO, la clientèle, l'achalandage y attachés, le droit au bail pour le temps restant à courir et les éléments corporels (matériel, mobilier, flotte de véhicules de location) moyennant le prix de 300.000 euros.

Aux termes du paragraphe « ENONCIATION DU BAIL » (page 8) :

Le CEDANT déclare que les locaux dans lesquels le fonds objet des présentes est exploité lui ont été donné à bail par Monsieur [B] [F], demeurant (') aux termes d'un acte sous seing privé en date à [Localité 5] du 30 septembre 2013, et ce pour une durée de neuf (9) années ayant commencé à courir le 1er octobre 2013 pour se terminer le 30 septembre 2022.

(')

  - Destination des locaux :

Le CEDANT déclare qu'aux termes de l'acte de bail ci-dessus visé, la destination des locaux a été stipulée ainsi qu'il suit :

« Le preneur ne pourra utiliser les locaux loués que pour l'exercice de son activité de vente de véhicules automobiles, neufs ou d'occasion, et de location de véhicules, à l'exclusion de toute autre activité. »

[...]

Le CEDANT déclare en ce sens qu'il exerce dans les locaux susvisés l'activité suivante :

La vente de véhicules neufs et d'occasion, de location de voitures et de réparation de véhicules automobiles légers.

Pleinement informés par le Notaire soussigné des stipulations de l'article 5 du bail commercial lequel prévoit :

« Il ne pourra sous aucun prétexte, modifier cette destination ou changer la nature du commerce exploité dans les locaux loués, ni même adjoindre à ce commerce des activités connexes ou complémentaires, sans s'être conformé préalablement aux procédures prévues à cet effet par les articles L. 145-47 et suivants du code de commerce. »

Le CEDANT déclare et garantit que le BAILLEUR est pleinement informé que l'activité exercée dans le local ci-dessus désigné comporte l'adjonction de l'activité de réparation de véhicules automobiles léger sans qu'il n'ait formalisé son accord expressément mais que celle-ci fait l'objet d'une tolérance qui n'a jamais suscité de remise en cause du bail de la part du BAILLEUR.

Le CESSIONNAIRE déclare avoir été particulièrement mis en garde par le notaire soussigné du fait qu'une tolérance ne constitue en aucun cas un droit acquis opposable au BAILLEUR qui pourrait parfaitement mettre en application la disposition ci-dessus retranscrite. Pleinement informé et déclarant avoir parfaite compréhension de cette mise en garde, le CESSIONNAIRE déclare expressément et irrévocablement vouloir faire son affaire personnelle des conséquences liées à la déspécialisation du bail ou à la mise en conformité de son activité à celle qui est strictement définie aux termes du bail commercial ci-dessus.

Il requière expressément le notaire soussigné de procéder aux présentes sans plus attendre et vouloir faire son affaire personnelle des suites éventuelles sans recours contre quiconque.

(')

  - Cession du bail :

Les clauses du bail relatives à la cession du bail sont ci-après littéralement rapportées :

« Le preneur ne pourra céder son droit au présent bail, en totalité ou en partie, qu'avec l'agrément préalable du BAILLEUR qui devra être donné par écrit, excepté son successeur dans son propre commerce.

Le BAILLEUR devra être convoqué à la signature de l'acte de cession par lettre avec accusé de réception au moins quinze (15) jours avant la cession projetée.

Le cessionnaire restera garant solidairement envers le BAILLEUR au paiement des loyers et accessoires et à l'exécution de l'ensemble des clauses du présent bail.

Les cessionnaires successifs seront tenus envers le BAILLEUR, solidairement avec le PRENEUR au paiement des loyers accessoires et à l'exécution des clauses du présent bail, pour la période du bail en cours au moment de la cession quand bien même ils ne seraient plus dans les locaux et auraient eux-mêmes cédés leurs droits.

L'acte de cession devra être signifié au BAILLEUR dans les conditions de l'article 1690 du Code Civil, sauf si celle-ci est réalisée par acte authentique avec acceptation du BAILLEUR. »

Selon le paragraphe « NOTIFICATION AU BAILLEUR (page 11) :

« Le CEDANT déclare et garantit que le BAILLEUR est :

Monsieur [B] [F], né (')

Que ce dernier a été dûment convoqué aux présentes par courrier recommandé avec avis de réception sous les références 2C 096 6011707 3.

En son absence aux présentes, la présente cession sera notifiée au bailleur par les soins du notaire soussigné conformément aux dispositions de l'article 1327-1 du Code Civil afin qu'elle lui soit opposable, et ce sans délai aux frais du CESSIONNAIRE.

Une copie exécutoire par extrait de la cession sera remise au bailleur aux frais du cessionnaire. »

Enfin, le paragraphe « CHARGES ET CONDITIONS » stipule (page 17) :

« (')

1/ A la charge du cessionnaire :

(')

b) Bail

Il exécutera aux lieu et place du CEDANT, à compter de la même date, les charges et conditions du bail ci-dessus visé, et paiera les loyers à leur échéance. Le terme en cours sera partagé entre les parties au prorata de leur temps de jouissance, tout règlement à ce sujet devra intervenir dans les huit jours du présent acte.

(...) »

Par LRAR datée du 12 novembre 2018 M. [F] a informé M. [Y] de l'augmentation du loyer mensuel à 1.079 € HT à compter du 01/10/2018, calculé selon l'indice des loyers commerciaux (ILC) tout en rappelant les stipulations figurant aux paragraphes 1 et 2 de l'article 7 concernant les clauses et obligations principales d'occupation des lieux comme dans son précédent courrier.

En réponse, suivant LRAR datée du 21 novembre 2018, M. [H], gérant de la société NRC, a pris acte de l'augmentation du loyer qui sera appliqué à compter du 1er octobre 2018, ne la contestant pas, et a ajouté :

« Concernant l'article 7 du bail rappelé dans votre correspondance, je me permets de vous rappeler que cet article ne s'applique pas en matière de cession de fonds de commerce, mais uniquement à la cession du droit au bail. En effet, en droit, aucun propriétaire ne peut s'opposer à une cession du fonds de commerce, c'est pourquoi, le fonds a été cédé à la société EURL NRC, en conformité avec les exigences légales.

Par ailleurs, aucune nouvelle activité n'a été rajoutée, l'activité mécanique existe depuis plus de 15 ans, ce dont vous avez parfaitement connaissance. Je vous rappelle que Monsieur [Y] a lui-même fait l'acquisition de ce fonds de commerce auprès de Monsieur [E] dont l'activité principale était la mécanique générale (Attestation jointe). »

Est joint au courrier une attestation de M. [E] datée du 11 mai 2005 portant signature et justificatif d'identité par laquelle il « reconnais avoir cédé pour la somme de 10.000 euros le pas de porte du garage situé à (') ainsi que le matériel de mécanique répertorié ci-dessus » (Outillage mécanique, 1 compresseur, 1 poste à soudure, 2 containers, 1 palan électrique, pièces mécaniques diverses) « ainsi que l'aménagement du terrain afin de continuer une activité de mécanique » ;

Par LRAR datée du 7 décembre 2018, M. [F] a demandé au président du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre de retirer l'activité de mécanique de l'extrait Kbis de la société ALO, auquel il lui a été répondu qu'il était impossible de procéder à cette modification d'activité et que seul M. [Y] pouvait y procéder (lettre du 17 décembre 2018).

Suivant LRAR datée du 7 décembre 2018, M. [F] informe Me [Z], notaire qu'il conteste et fait opposition à ladite vente pour les raisons suivantes : il n'a jamais été informé de cette vente de fonds de commerce avant la signification, on ne lui a jamais transmis aucun projet de compromis de vente de fonds de commerce pour accord, aucun bail commercial avec la société NRC n'a été signé à ce jour et M. [Y] a modifié son activité le 12 mai 2016 en y ajoutant la réparation de véhicules automobiles légers : mécanique, sans son accord.

Par LRAR datée du 12 décembre 2018, M. [F] écrit à M. [Y] :

« Par la présente, je vous informe que les clauses du bail commercial du 01 Avril 2005 n'ont pas été respectées à savoir :

. Le rajout de l'activité « Mécanique », sans mon accord exprès et écrit comme précisé dans le second paragraphe de la seconde page

. Le fonds de commerce a été vendu le 25 septembre 2018 à la société NRC devant Me [Z] et ce, sans mon accord exprès et écrit pour la cession de droit de bail commercial du 01 Avril 2005

. Aucun bail commercial n'a été signé avec la société EURL NRC. De ce fait, seul le bail commercial du 01 Avril 2005 est en vigueur sur la parcelle AV [Cadastre 2].

Il est important de noter que nous ne nous opposons pas à la vente de ce fonds de commerce, à la seule condition que l'activité reste identique à celle indiquée sur le bail commercial du 01 Avril 2005, qui est, je vous le rappelle : « vente de voiture automobile d'occasion, neuf, et location de voiture ».

La vente du fonds de commerce ne doit pas entraîner le changement de l'activité principale, activité précisée dans le bail commercial du 01 Avril 2005.

Aussi, et ce sont pour toutes ces raisons que je vous demande que la vente du fonds de commerce respecte strictement l'activité principale, précisée dans le bail commercial du 01 Avril 2005.

Si vous maintenez l'activité de mécanique, je vous informe de la résiliation du bail du 01 Avril 2005 de plein droit pour non-respect des clauses.

Sans réponse de votre part dans un délai de 15 jours, je serai dans l'obligation de mener une action en justice afin de faire valoir mes droits et résilier le bail commercial du 01 Avril 2005. »

En réponse, par courrier du 14 décembre 2019, Me [Z], notaire, indique à M. [F] qu'il lui a adressé une LRAR le 4 juin 2018 l'informant du projet de cession, cette lettre lui a été retournée avec « mention avisé non réclamé », porte à sa connaissance les dispositions de l'article L. 145-16 du code de commerce selon lequel « Sont également réputées non écrites, quelle qu'en soit la forme, les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail ou les droit qu'il tient du présent chapitre à l'acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise », lui confirme que la conclusion d'un nouveau bail avec le repreneur n'est pas obligatoire, l'acte d'acquisition du fonds de commerce valant titre de preneur à l'acquéreur du fonds.

L'acte de vente de fonds de commerce a été signifié à M. [F] le 15 décembre 2018.

En réponse à la lettre du 12 décembre 2018, par LRAR datée du 26 décembre 2018, M. [H], gérant, se plaint d'être l'objet de pressions depuis plusieurs mois (a tenté de lui imposer une augmentation de loyer « totalement » illégale, a essayé de lui imposer un nouveau bail) et écrit :

« En premier lieu et contrairement à vos affirmations, la cession d'un fonds de commerce ne requiert pas d'autorisation écrite et préalable du bailleur, lequel ne peut en aucun cas s'opposer à la cession d'un fonds de commerce, comme le prouve l'article L. 145-16 alinéa 1 du code de commerce.

Il n'y avait pas davantage de nécessité d'établir un nouveau bail.

Du reste, je vous confirme que le notaire vous a convoqué pour assister à la signature de la cession du fonds de commerce, mais étiez absent.

Par ailleurs, il n'y a jamais eu de rajout d'activité nouvelle puisqu'avant même 2005, l'activité de mécanique était exercée, à titre accessoire, en complément des autres activités, à savoir, location et vente de véhicule.

Nous disposons d'un procès-verbal de constat d'huissier qui rapporte la preuve qu'avant 2005, seule l'activité mécanique était exercée.

Dans le cadre d'une éventuelle action en justice, nous ne manquerons pas de former une demande reconventionnelle en dommages-intérêts à votre encontre pour abus de droit résultant de votre comportement nuisible. »

En réponse au courrier du 26 décembre 2018, par LRAR datée du 28 décembre 2018, M. [F] nie tout harcèlement de sa part et indique avoir rencontré M. [H] avec M. [Y] avant l'acte de vente « pour trouver une solution amiable dans la bonne continuité de l'activité » Il lui reproche d'avoir été « catégoriquement fermé à toute discussion » et rappelle avoir « toujours dit accepter la cession du bail et la vente du fonds de commerce à condition de respecter les activités précisées dans le bail commercial du 01 Avril 2005 ». Il se plaint du non-respect des articles 4 (dépôt de garantie : le dépôt de garantie égal à 2 mois de loyer HT soit 2.158 € n'a pas été réglé) 8 (embellissement du site : il doit retirer les 2 poteaux à l'entrée côté rue Général Lambert qui soutiennent l'enseigne latérale et sont placés dans le passage commun installés sans son accord) et 9 (clause de nuisance : il ne doit pas bloquer l'entrée principale car il s'agit d'une entrée commune, ce passage devant être vide en cas d'intervention des pompiers). Il l'informe de son souhait de modifier le bail à « l'article 7 en précisant que le locataire ne peut ni louer, ni céder son droit d'occupation des lieux en partie ou en totalité, et ni céder son fonds de commerce sans le consentement exprès et écrit de Monsieur [B] [F] » et lui indique qu'un avenant au bail commercial du 1er avril 2005 lui sera transmis prochainement. S'agissant de la seule activité autorisée (vente de voiture automobile d'occasion, neuf et location de voiture), rappelée dans chacun de ses courriers ainsi que dans l'acte de vente du 25 septembre 2018, il rappelle qu'il n'a jamais donné son accord verbal et écrit pour le rajout de l'activité mécanique et écrit notamment : « Il a été porté à ma connaissance que Mr [Y] faisait de la petite mécanique pour les besoins des véhicules de son parc de location et non pas un service de garage pour des véhicules extérieurs avec une facturation de prestation de service. » Enfin, après lui avoir rappelé que l'adjonction d'une nouvelle activité est soumise à l'accord du propriétaire conformément à l'article L. 145-47 du code de commerce, il lui demande de modifier son Kbis et de « supprimer l'activité Mécanique (') auprès du registre du commerce du TGI de Saint Pierre » ;

Suivant procès-verbal de constat daté du 29 janvier 2019 et la demande de M. [F] l'huissier de justice a constaté la présence de trois véhicules garés dans le chemin d'accès vers les locaux loués à la société NRC.

Suivant acte d'huissier du 25 février 2019, (remise à personne morale) M. [F] a fait sommation à la société NRC de :

  - Cesser toute activité de réparation de véhicule mécanique ;

  - Régler 2158 € (2 mois de louer) de dépôt de garantie que M. [Y] n'a pas encore réglé ;

  - Retirer les 2 poteaux à l'entrée côté [Adresse 7] qui soutiennent l'enseigne latérale ;

  - Ne pas bloquer ni stationner dans l'entrée principale commune ;

  - Ne plus garer ou stationner des véhicules ans l'entrée commune.

Suivant procès-verbal de constat daté du 25 février 2019 et la demande de M. [F], l'huissier de justice a constaté la présence de deux véhicules garés dans le chemin d'accès vers les locaux loués à la société NRC, à l'entrée du chemin d'accès donnant sur la rue Général Lambert, la présence d'un grand panneau fixé au sol par deux poteaux avec indication « Auto Location Occasion ' Vente et dépôt ' mécanique auto ' remorquage 0692975070 ' contrôle et recharge clim , fixe 0262 49 70 19 ' GSM 0692 65 51 40 », ainsi que la présence d'un petit bureau pour M. [H] et un grand hangar non fermé en plusieurs partie avec un aménagement pour réparation des voitures, un stock de pièces diverses pour voiture (roues, portières et pièces diverses), M. [H] lui ayant déclaré faire aussi de la location de véhicule et un peu de réparation.

La société NRC a réglé le dépôt de garantie (LRAR datée du 11 mars 2019) à M. [F].

Suivant courrier simple daté du 25 septembre 2019, M. [F] informe la société NRC de l'augmentation annuelle du loyer à compter du 1er octobre 2019, à hauteur de 1.105 euros HT calculé selon l'ILC.

Suivant extrait K bis édité le 27 mars 2019, la SARL dénommé EURL NRC a pour activités principales : « En tous pays : les activités d'exploitation principale de garagiste, de vente de véhicule d'occasion, la location de courte durée de véhicules automobiles sans chauffeur ».

Il ressort de ce qui précède qu'il est constant que le bail commercial du 5 avril 2001 prévoit en son article 7 l'interdiction pour le preneur de céder son droit d'occupation des lieux en partie ou en totalité, sans le consentement exprès et par écrit du bailleur.

Cette clause est parfaitement valable conformément aux dispositions de l'article 1717 du code civil.

Pour autant, s'agissant en l'espèce d'une cession de fonds de commerce comprenant le droit au bail, il convient d'appliquer l'article L. 145-16 du code de commerce.

En l'espèce, l'article 7 du bail du 1er avril 2005 prévoit, non pas une interdiction rendant impossible la cession du droit au bail, mais une obligation pour le preneur d'obtenir le consentement exprès et par écrit du bailleur, ce qui est parfaitement valable pour autant que le refus du bailleur soit justifié.

La cour relève qu'en outre, s'agissant de la cession du bail, il est stipulé dans la cession du fonds de commerce que « Le preneur ne pourra céder son droit au présent bail, en totalité ou en partie, qu'avec l'agrément préalable du BAILLEUR qui devra être donné par écrit, excepté son successeur dans son propre commerce » et que « Le BAILLEUR devra être convoqué à la signature de l'acte de cession par lettre avec accusé de réception au moins quinze (15) jours avant la cession projetée. »

Il est également indiqué dans l'acte de cession de fonds de commerce que le bailleur « a été dûment convoqué aux présentes par courrier recommandé avec avis de réception sous les références 2C 096 6011707 3 » et que « En son absence aux présentes, la présente cession sera notifiée au bailleur par les soins du notaire soussigné conformément aux dispositions de l'article 1327-1 du Code Civil afin qu'elle lui soit opposable, et ce sans délai aux frais du CESSIONNAIRE. »

Dans son courrier du 14 décembre 2015, le notaire indique à M. [F] lui avoir adressé une LRAR le 4 juin 2018 l'informant du projet de cession, cette lettre lui a été retournée avec « mention avisé non réclamé ».

La cession du fonds de commerce du 4 décembre 2018 a été signifiée à M. [F] le 15 décembre 2018.

M. [F] n'a jamais donné son accord à la cession de fonds de commerce, si ce n'est à la condition « de respecter les activités précisées dans le bail commercial du 01 Avril 2005 » (courriers des 12 et 28 décembre 2018).

S'agissant précisément de cette condition, la cour constate que l'obligation pour le preneur de « Ne pas ajouter d'activité complémentaire et supplémentaire en annexe, ni transformer l'activité principale (vente de voiture automobile d'occasion, neuf et location de voiture) sans le consentement exprès et par écrit du propriétaire Monsieur [B] [F]. » est clairement énoncée à l'article 7 du bail du 1er avril 2005.

La cour relève en outre que :

  - La cession du fonds de commerce y fait clairement référence dans le paragraphe « Destination des locaux » : « Le preneur ne pourra utiliser les locaux loués que pour l'exercice de son activité de vente de véhicules automobiles, neufs ou d'occasion, et de location de véhicules, à l'exclusion de toute autre activité. »

  - Le notaire rappelle les stipulations de l'article 5 du bail commercial lequel prévoit : « Il ne pourra sous aucun prétexte, modifier cette destination ou changer la nature du commerce exploité dans les locaux loués, ni même adjoindre à ce commerce des activités connexes ou complémentaires, sans s'être conformé préalablement aux procédures prévues à cet effet par les articles L. 145-47 et suivants du code de commerce. »

  - Enfin, le cessionnaire « déclare avoir été particulièrement mis en garde par le notaire (') qu'une tolérance ne constitue en aucun cas un droit acquis opposable au BAILLEUR qui pourrait parfaitement mettre en application la disposition ci-dessus retranscrite. Pleinement informé et déclarant avoir parfaite compréhension de cette mise en garde » le cessionnaire déclare expressément et irrévocablement vouloir faire son affaire personnelle des conséquences liées à la déspécialisation du bail ou à la mise en conformité de son activité à celle qui est strictement définie aux termes du bail commercial ci-dessus. »

  - Tandis que M. [Y] déclare qu'il exerce dans les locaux l'activité de « vente de véhicules neufs et d'occasion, de location de voitures et de réparation de véhicules automobiles légers »

Il ressort des éléments du dossier que la question de l'activité de réparation est au c'ur des discussion dès le 14 août 2018, de nombreux courriers ayant été échangés avant la cession du fonds de commerce (14 et 18 août, 12 et 21 novembre et 7 et 12 décembre 2018), M. [F] ayant même sollicité le retrait de l'activité réparation automobile de véhicules légers de la société ALO (M. [Y]) auprès du président du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre le 7 décembre 2018, et ce, en vain et également mandaté un huissier de justice aux fins de constat (procès-verbaux de constat des 18 juillet 2018 et 25 février 2018), outre une sommation (25 février 2019). Il est également produit deux courriers postérieurs à ladite cession (26 et 28 décembre 2018) y faisant référence.

Il s'ensuit que rien ne permet d'établir que M. [F] ait donné son accord exprès et par écrit à la cession envisagée, ni même qu'il ait donné un accord implicite et non équivoque à ladite cession, comme le relève à juste titre les premiers juges.

Il est également reproché au preneur d'avoir contrevenu à l'article 9 du bail du 1er avril 2005 qui stipule que le preneur ne doit pas bloquer l'entrée, ni stationner dans l'entrée principale, côté [Adresse 7], car il s'agit d'une entrée commune, ce qui est justifié par les procès-verbaux de constat des 18 juillet 2018 et des 29 janvier et 25 février 2019 et fait l'objet d'un courrier de M. [F] à M. [H] le 28 décembre 2018.

Il est ainsi établi que le refus de M. [F] d'autoriser la cession du fonds de commerce est parfaitement légitime compte tenu des manquements tant du cédant, M. [Y] n'ayant pas obtenu le consentement exprès et écrit de M. [F] du preneur, que de M. [H], gérant de la société NRC, cessionnaire, qui était parfaitement informé de la difficulté tenant à l'activité de réparation, mis en garde « du fait qu'une tolérance ne constitue en aucun cas un droit acquis opposable au BAILLEUR » et « Pleinement informé », celui-ci déclarant « expressément et irrévocablement vouloir faire son affaire personnelle des conséquences liées à la déspécialisation du bail » qui relève des articles L. 145-47 et suivants du code du commerce, de même que l'interdiction de bloquer l'entrée et stationner dans l'entrée principale et commune située côté [Adresse 7].

Il est également établi que ces manquements constituent une violation grave des obligations du preneur, en ce qu'ils contreviennent aux stipulations du bail et à la volonté du bailleur justifiant la résiliation judiciaire du bail à ses torts.

Enfin, la cour ne peut que constater que si la société NRC soutient qu'elle a cessé l'exploitation de l'activité de réparation de véhicules automobiles, elle n'en justifie pas.

C'est donc par une juste appréciation des faits et par des motifs pertinents que les premiers juges ont prononcé la résiliation judiciaire du bail aux torts du preneur, ordonné son expulsion et condamné celui-ci à payer une indemnité d'occupation fixée à 1.100 euros.

Le jugement sera par conséquent confirmé en toutes ses dispositions.

Sur la demande de dommages et intérêts

La société NRC qui succombe, est mal fondée en sa demande de dommages et intérêts contre M. [F] pour procédure abusive.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

A hauteur d'appel, l'équité commande d'écarter l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à la présente procédure et les dépens seront considérés comme frais privilégiés de la procédure collective de la SARL NRC.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe, conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Saint Pierre de la Réunion ;

Y ajoutant

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que les dépens seront considérés comme frais privilégiés de la procédure collective de la SARL NRC.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.