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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 21 février 2024, n° 21/04301

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Marbrerie Des Yvelines (SAS)

Défendeur :

Cosentino (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Douillet

Conseillers :

Mme Barutel, Mme Bohée

Avocats :

Me De La Taille, Me Roche, Me Boccon Gibod, Me Boneva-Desmicht

T. com. Versailles, du 10 mai 2017

10 mai 2017

La société de droit espagnol COSENTINO et la société française COSENTINO SURFACES FRANCE (précédemment STONE SERVICES OF FRANCE) (ci-après, les sociétés COSENTINO) sont membres du groupe COSENTINO et fabriquent et distribuent des surfaces innovantes haut de gamme, en particulier en quartz sous la marque « SILESTONE », à destination des professionnels, en vue de leur transformation et distribution dans plus de 60 pays, ces surfaces étant en particulier utilisées pour la réalisation de plans de travail de cuisines et dans les salles de bains. Le groupe COSENTINO est présenté comme le leader mondial du marché et membre de l'A.ST.A WORLD-WIDE, association qui regroupe les fabricants de quartz.

Les sociétés COSENTINO indiquent que les produits qu'elles mettent sur le marché sont fabriqués en conformité avec la réglementation européenne en vigueur, notamment celle applicable aux produits entrant en contact avec les aliments, sont garantis sans émission de polluants, ne comportent pas de risque de migration et sont fabriqués sur un site répondant aux normes ISO 9001 et ISO 14001 certifiant de l'attention portée au système de qualité et à la protection de l'environnement, outre que des mesures de sécurité complémentaires sont mises en place dans les ateliers (systèmes d'aération, port de protections pour les salariés').

La société MARBRERIE DES YVELINES (ci-après, la société MDY) exploite une marbrerie spécialisée dans la création et la fourniture de matériaux et autres aménagements intérieurs et extérieurs, en fabriquant notamment des plans de travail en marbre, granit et pierres naturelles. Elle indique qu'elle fabriquait jusqu'en 2013 des plans de travail en quartz de synthèse.

Le quartz est un minéral composé d'une combinaison d'oxygène et de silicium (lequel est présent dans l'atmosphère à hauteur de 27 %), donnant lieu à la silice cristalline (SiO2).

En janvier 2017, la société MDY a publié, sur son site internet ainsi que sur les réseaux sociaux les résultats de plusieurs rapports scientifiques émanant de l'Institut de Recherche et d'Expertise Scientifique (IRES) tendant à établir que le quartz exposerait le consommateur final à de graves problèmes de santé. Ces publications étaient accompagnées de plusieurs articles et vidéos diffusés par M. [V], président de la société MDY.

Par ordonnance de référé rendue le 10 mai 2017 par le président du tribunal de commerce de Versailles, l'association A.ST.A WORLD-WIDE a obtenu la condamnation de la société MDY à cesser, sous quelque forme que ce soit, la dénonciation de l'utilisation du quartz de synthèse dans les plans de travail.

La société MDY ayant relevé appel de cette ordonnance, la cour d'appel de Versailles, dans un arrêt du 22 février 2018, l'a infirmée en toutes ses dispositions, disant n'y avoir lieu à référé sur les demandes de l'association A.ST.A WORLD-WIDE - retenant notamment qu'au regard du droit d'alerte et des interrogations persistantes et légitimes sur la nocivité du quartz de synthèse utilisé pour les plans de travail de cuisine, le caractère manifeste du dénigrement n'était pas établi avec l'évidence requise en référé -, tout en ordonnant une expertise ayant notamment pour objet de rechercher si les plans de travail en quartz de synthèse présentent un danger pour la santé des consommateurs. Cette expertise n'a pas eu lieu, faute de consignation par l'association A.ST.A WORLD-WIDE.

Sur le pourvoi formé par l'association A.ST.A WORLD-WIDE, la Cour de cassation, dans un arrêt du 4 mars 2020, a cassé partiellement l'arrêt de la cour d'appel, seulement en ce que, infirmant l'ordonnance de référé, cette cour avait jugé n'y avoir lieu à référé.

Dans un arrêt du 6 mai 2021, devenu définitif, la cour d'appel de Versailles désignée comme cour de renvoi, a confirmé l'ordonnance de référé, sauf en ce qu'elle a ordonné la publication de son dispositif sous astreinte.

Estimant que la société MDY poursuivait sa campagne de dénigrement, et que celle-ci visait désormais plus particulièrement COSENTINO, et après une lettre de mise en demeure du 21 janvier 2019 qu'elles ont estimée vaine, les société COSENTINO ont, par acte du 15 mai 2019, fait assigner la société MDY devant le tribunal de commerce de Paris pour demander réparation d'actes de dénigrement et de pratiques commerciales trompeuses, sur le fondement de l'article 1240 du code civil et des articles L. 122-1-1, L.121-2 et suivants du code de la consommation.

Dans un jugement du 22 février 2021, le tribunal de commerce de Paris a notamment :

- débouté les demanderesses de leurs demandes de réparation en raison de leur trouble commercial et de leur perte de marge ;

- condamné la société MDY à payer aux demanderesses ensemble, à charge pour elles de se répartir la somme, la somme de 100 000 € au titre de leur préjudice moral ;

- débouté les demanderesses de leurs demandes de publication ou d'information ;

- condamné la société MDY à retirer, sous astreinte de 200 € par jour de retard, dans les huit jours de la signification du jugement, de son site internet et des réseaux professionnels, sous astreinte de 200 € par jour de retard, dans un délai de huit jours de la signification du présent jugement et pour une durée de trente jours à l'issue de laquelle les demanderesses pourront en demander le renouvellement auprès du juge de l'exécution si nécessaire, tel que :

- retrait du site internet MDY-France.com de l'encart dans la rubrique Produits relatif à l'alerte sanitaire prétendument consécutive l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 22/02/2018 et de l'article du 6/03/2018 intitulé « arrêt de la commercialisation des plans de cuisine en quartz » ;

- s'agissant de la page Facebook de MDY France : retrait du lien vers le journal télévisé France du 30/11/2018 ; retrait du lien vers la vidéo YouTube intitulée « les dangers sanitaires du quartz de synthèse utilisé dans les cuisines » publiée le 12/10/2018 ;

- et s'agissant du site Viméo : retrait de la vidéo intitulée « Alerte sur la toxicité des plans de travail en quartz de synthèse » par [K] [V] MDY, publiée le 6/02/2017 ;

- débouté les demanderesses de leurs demandes à l'encontre du site de l'AMEF [Association des Marbriers Ecologiques de France qui avait accueilli sur son site internet les messages de MDY] ;

- condamné la société MDY à payer aux demanderesses la somme totale de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement sans caution et nonobstant appel ;

- condamné la société MDY aux entiers dépens de l'instance.

La société MDY a interjeté appel de ce jugement le 5 mars 2021.

Le 24 septembre 2021, les sociétés COSENTINO ont transmis des conclusions d'incident aux fins de voir constater que la société MDY n'avait pas exécuté le jugement dont appel assorti de l'exécution provisoire, de voir prononcer la radiation de l'affaire du rôle sur le fondement de l'article 524 du code de procédure civile et de voir condamner la société MDY à lui régler une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par une ordonnance sur incident rendue le 12 octobre 2021, le magistrat chargé de la mise en état a :

- dit que l'exécution provisoire aurait pour la société MDY des conséquences manifestement excessives ;

- dit n'y avoir lieu d'ordonner la radiation de l'affaire ;

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné les sociétés COSENTINO aux dépens de l'incident.

Dans ses dernières conclusions récapitulatives numérotées 3, transmises le 22 juin 2023, la société MDY, appelante, demande à la cour de :

Vu les articles 1240 du code civil et 899 et suivants du code de procédure civile,

- à titre principal,

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a :

- condamné la société MDY à payer aux sociétés COSENTINO, ensemble, à charge pour elles de se répartir la somme, la somme de 100.000 euros titre de leur préjudice moral ;

- condamné la société MDY à retirer, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, dans les 8 jours de la signification du jugement, de son site Internet et des réseaux professionnels, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, dans un délai de 8 jours de la signification du jugement et pour une durée de trente jours à l'issue de laquelle les demanderesses en demanderont le renouvellement au juge de l'exécution si nécessaire, tels que :

* retrait du site Internet mdy-france.com de l'encart dans la rubrique Produits relatif à l'alerte sanitaire prétendument consécutive à l'arrêt de la Cour d'Appel de VERSAILLES du 22 février 2018 et de l'article du 6 mars 2018 intitulé « Arrêt de la commercialisation des plans de cuisine en quartz » ;

* s'agissant de la page Facebook de MDY France : retrait du lien vers le journal télévisé de France 3 du 30 novembre 2018 ; Retrait du lien vers la vidéo YouTube intitulée « Les dangers sanitaires du quartz de synthèse utilisé dans les cuisines » publiée le 12 octobre 2018 ;

* et s'agissant du site Viméo : Retrait de la vidéo intitulée « ALERTE sur la TOXICITE des PLANS DE TRAVAIL en QUARTZ par [K] [V] MDY » publiée le 6 février 2017 ;

- condamné la société MDY à payer aux sociétés COSENTINO la somme totale de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société MDY aux entiers dépens de l'instance dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 130,83 € dont 21,59 € de TVA,

- et statuant à nouveau, de rejeter l'ensembles des moyens, fins et prétentions des sociétés CONSENTINO,

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour admettrait l'existence du préjudice moral des sociétés CONSENTINO, de ramener la condamnation de la société MDY à de plus justes proportions, soit à hauteur d'une somme inférieure à 5.000 euros,

- en tout état de cause, de condamner les sociétés CONSENTINO à payer à la société MDY la somme de 20.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions numérotées 3, transmises le 18 septembre 2023, les sociétés COSENTINO, intimées, demandent à la cour de :

Vu les articles L. 121-1, L. 121-2 et suivants du code de la consommation,

Vu l'article 1240 du code civil,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a qualifié les propos tenus par la société MDY à l'encontre du groupe COSENTINO de propos dénigrants ;

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société MDY à indemniser le préjudice moral des sociétés COSENTINO, mais l'infirmer sur le quantum ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à la société MDY de cesser immédiatement la diffusion de tout message dénigrant ou trompeur sur les articles de COSENTINO et les plans de travail en quartz ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à la société MDY de retirer de son site Internet et réseaux professionnels et sociaux, sous astreinte provisoire de 200 euros par jour de retard dans un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement à intervenir et pour une durée de trente jours à l'issue de laquelle les intimées en demanderont le renouvellement au juge de l'exécution si nécessaire, comme suit :

- s'agissant du site Internet https://www.mdy-france.com/ :

Retrait de l'encart dans la rubrique "Produits" relatif à l'alerte sanitaire prétendument consécutive à l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 22 février 2018 ;

Retrait de l'article du 6 mars 2018 intitulé "Arrêt de la commercialisation des plans de cuisine en quartz" ;

- s'agissant de la page Facebook de MDY France :

Retrait du lien vers le journal télévisé de France 3 du 30 novembre 2018 ;

Retrait du lien vers la vidéo YouTube intitulée "Les dangers sanitaires du quartz de synthèse utilisé dans les cuisines" publiée le 12 octobre 2018 ;

- s'agissant du site Viméo :

Retrait de la vidéo intitulée "ALERTE sur la TOXICITE des PLANS DE TRAVAIL en QUARTZ par [K] [V] MDY" publiée le 6 février 2017 ;

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société MDY à verser la somme de 15.000 euros aux sociétés COSENTINO au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- l'infirmer en ce qu'il a :

- débouté les demanderesses de leurs demandes de réparation en raison de leur trouble commercial et de leur perte de marge ;

- débouté les demanderesses de leurs demandes de publication ou d'information ;

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires mais seulement lorsqu'il a débouté les sociétés COSENTINO S.A. et Stone Services of France ;

- en conséquence, statuant à nouveau,

- juger que la société MDY s'est rendue coupable de pratiques commerciales trompeuses ;

- condamner la société MDY à payer aux sociétés COSENTINO la somme de 100.000 euros chacune, à titre de dommages et intérêts, en réparation de leur préjudice moral ;

- condamner la société MDY à payer aux sociétés COSENTINO la somme de 100.000 euros chacune, à titre de dommages et intérêts en raison du trouble commercial subi par elles du fait des agissements déloyaux et anticoncurrentiels de la société MDY ;

- condamner la société MDY à payer la somme de 29.441,95 euros à la société COSENTINO SURFACES FRANCE (anciennement STONE SERVICES OF FRANCE), en raison de la perte de marge brute sur coûts variables liée aux agissements déloyaux de la société MDY ;

- ordonner à la société MDY de retirer de son site Internet et réseaux professionnels et sociaux, sous astreinte provisoire de 200 euros par jour de retard dans un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement à intervenir et pour une durée de trente jours à l'issue de laquelle les intimées en demanderont le renouvellement au juge de l'exécution si nécessaire, comme suit :

- s'agissant de la page Facebook de MDY France :

Retraits de l'ensemble des commentaires dénigrants et trompeurs à propos des Articles et produits en quartz ;

- s'agissant du site de l'AMEF https://www.amef-asso.org/, en tant que membre-fondateur de cette association et propriétaire des études mises à la disposition de l'AMEF :

Retrait du lien vers la vidéo YouTube intitulée "Les dangers sanitaires du quartz de synthèse utilisé dans les cuisines" publiée le 12 octobre 2018 ;

Retrait de la publication biaisée sur les études menées et suppression du lien de téléchargement vers lesdites études ;

Retrait du lien vers le journal télévisé de France 3 du 30 novembre 2018 ;

Retrait des publications intitulées "Des plans de cuisine qui rendraient malade", "Les plans en quartz posent un risque pour les ouvriers", "Les plans de cuisine en quartz de synthèse sont-ils dangereux'" et "Silicose, la malédiction des comptoirs" ;

- ordonner la publication du jugement à intervenir dans trois journaux au choix des sociétés COSENTINO et aux frais de la société MDY et ce, dans la limite de 10.000 euros, TVA en sus, compte tenu des tarifs en vigueur, ainsi que sur le site Internet de la société MDY (www.mdy-france.com), sur la page Facebook de MDY France et sur le site Internet de l'AMEF (https://www.amef-asso.org/), pour une durée de trois mois, et ce sous astreinte provisoire de 1.000 euros par jour de retard dans un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement à intervenir et pour une durée de trente jours à l'issue de laquelle les Intimées en demanderont le renouvellement au juge de l'exécution si nécessaire ;

- ordonner à la société MDY d'informer les différents sites, journaux, blogs visés en pièce n° 33 et le magazine 60 Millions de Consommateurs ayant repris son message d'alerte du détournement des données scientifiques et de l'inexactitude des informations ainsi communiquées sur la prétendue nocivité des plans de travail en quartz, et de justifier des diligences ainsi accomplies ;

- en toute hypothèse,

- débouter la société MDY de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société MDY à payer aux sociétés COSENTINO la somme de 20.000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société MDY aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur les actes de concurrence déloyale reprochés à la société MDY

La concurrence déloyale est sanctionnée au titre de la responsabilité civile de droit commun prévue à l'article 1240 du code civil, selon lequel « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer », lorsqu'ils excédent les limites admises dans l'exercice des activités économiques, au nom du principe de la liberté du commerce. Elle peut revêtir notamment la forme d'actes de dénigrement consistant, au-delà d'une forme de critique admissible parce qu'objective et mesurée, à divulguer une information, ayant ou non une base exacte, de nature à jeter le discrédit sur l'activité, les produits ou services d'un opérateur économique et à en tirer profit, ou encore celle de pratiques commerciales trompeuses prévues par le code de la consommation.

Sur le dénigrement

Il sera préalablement indiqué que dans son jugement le tribunal a estimé que le dénigrement dénoncé par les sociétés COSENTINO était caractérisé. Il a retenu, en substance, que malgré des interrogations persistantes et légitimes partagées par des « professionnels avertis comme MDY », la nocivité du quartz de synthèse pour la santé du consommateur n'avait pas été établie ; que les propos litigieux, tenus sans réserve ni retenue par la société MDY et son président, étaient dénigrants ; qu'en l'absence de certification d'organismes de santé publique incontestables, la société MDY ne pouvait, au nom du principe de précaution ou du droit d'alerte, jeter le discrédit de façon agressive sur le composant des plans de travail vendus par son concurrent et ce, afin de promouvoir ses propres produits et ainsi détourner la clientèle de ce concurrent à son profit.

A l'appui de sa demande d'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée au titre du dénigrement, la société MDY fait valoir, de première part, que cette décision tend à vider de sens le principe même du lanceur d'alerte, notion introduite par l'article 6 de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi « Sapin II » ; qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass.com., 4 mars 2020, n° 18-15.651) que le dénigrement ne peut viser qu'un « produit », tel que le SILESTONE, et non un matériau, tel que le quartz de synthèse ou encore la silice cristalline ; que ni MDY ni son président n'ont jamais mis en cause un produit déterminé, ni même une marque ou une société en particulier, mais uniquement un matériau : le quartz de synthèse et certains éléments dangereux qui le composent, tels que la silice cristalline ; que ses messages et articles n'ont jamais désigné nommément les sociétés COSENTINO, lesquelles n'étaient pas non plus identifiables ; qu'il est vain pour les intimées de prétendre que l'origine des produits analysés par l'IRES et le laboratoire LNE est incertaine, alors que ces derniers, en leur qualité de professionnels engageant leur responsabilité, n'ont pas manqué de préciser qu'il s'agissait de produits fabriqués par COSENTINO lorsque cette information ressortait des échantillons fournis ; que l'identification de COSENTINO ou de la marque « SILESTONE » dans les articles de presse produits par les intimées ne peut être imputée à la seule volonté de MDY.

Elle argue, de deuxième part, qu'à supposer que le quartz de synthèse puisse être considéré comme un produit au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation, l'alerte qu'elle a relayée ne constitue pas un dénigrement dès lors que l'information en cause se rapporte à un sujet d'intérêt général, repose sur une base factuelle suffisante, et a été exprimée avec une certaine mesure ; qu'il ne fait aucun doute que l'information litigieuse se rapporte à un sujet d'intérêt général tenant à la santé publique, la question de la dangerosité du quartz de synthèse se posant d'ailleurs tant pour les travailleurs que pour les consommateurs ; qu'au vu des éléments scientifiques dont disposait MDY sur le matériau quartz de synthèse - les deux rapports rendus par l'IRES les 9 décembre 2016 et 25 janvier 2017 qui ont par la suite été confirmés par les autres investigations auxquelles MDY a fait procéder -, l'information en cause était fondée sur une base factuelle suffisante et exprimée de manière nuancée au vu de la gravité des risques pour la santé ; que l'information donnée n'a pas nécessairement à être exacte sur le plan scientifique au moment où elle est lancée, cette exactitude pouvant être simplement présumée au vu des informations scientifiques à la disposition du lanceur d'alerte, quitte à ce que son exactitude soit démontrée ou non par les pouvoirs publics, une fois que ceux-ci se sont emparés du sujet, par exemple dans le cadre d'une expertise telle que celle menée depuis 2015 par l'ANSES, ou telle que celle ordonnée par la cour d'appel de Versailles dans son arrêt du 22 février 2018 ; que la notion de base factuelle suffisante n'implique pas qu'une vérité scientifique soit établie pour alerter le public, l'utilité des lanceurs d'alerte étant justement d'agir pour que la vérité scientifique soit établie sur tel ou tel sujet d'intérêt général ; que la légalité de l'alerte suppose seulement l'existence de soupçons, lesquels concernaient en l'espèce des risques gravissimes pour la santé publique, et que ces soupçons soient suffisamment étayés au regard d'un faisceau d'indices scientifiques (n'excluant pas les constations empiriques), sans considération des conséquences économiques qu'une telle alerte peut présenter pour les sociétés commercialisant des matériaux présentant des risques gravissimes pour la santé publique ; que la Cour de cassation accorde ces dernières années une attention accrue à la liberté d'expression des lanceurs d'alerte en matière de santé publique et n'est guère encline à les sanctionner, notamment au titre du dénigrement (Cass, 1ère civ., 11 juillet 2018, n° 17-21.457 pour un complément alimentaire pour enfants) ; que le critère de la nuance dépend du degré de suffisance de la base factuelle sur laquelle repose l'information, mais aussi du sujet sur lequel porte cette information, de sorte que, s'agissant de la santé publique, les alertes lancées sont presque toujours considérées comme « graves » et donc peu nuancées ; que les informations qu'il lui est reproché d'avoir divulguées reposaient non seulement sur la décision de l'ANSES, prise en 2015, de mener une expertise en la matière, qui aboutira à un rapport du 25 avril 2019 recommandant la transposition en droit français de la reconnaissance des travaux exposant à la poussière de silice cristalline comme procédés cancérogènes, mais sur les conclusions alarmantes des deux rapports émis par l'IRES en 2016 et 2017, lesquels constituaient bien une base factuelle suffisante dans la mesure où l'alerte de l'exposante visait le quartz de synthèse, d'une manière générale, et non, un produit en particulier fabriqué ou distribué par telle ou telle société ; que si elle a maintenu sa démarche d'information du grand public après avoir été assignée en référé par l'association A.ST.A WORLD-WIDE, c'est parce que la cour d'appel de Versailles lui a donné gain de cause en 2018 ; qu'au vu notamment du dernier rapport de l'IRES de 2019 et du rapport de l'ANSES, la démarche de la société MDY n'a jamais constitué un quelconque dénigrement à l'encontre des sociétés COSENTINO.

Les sociétés COSENTINO répondent que le dénigrement s'applique aussi bien à des produits qu'à des matériaux et qu'en tout état de cause, le nom de COSENTINO est associé aux matériaux dont la sécurité a été mise en cause par la société MDY ; que le dénigrement est sanctionné dès lors que la victime est nommée mais également lorsqu'elle est identifiable et qu'en l'espèce, le groupe espagnol COSENTINO, leader sur le marché, est visé par MDY, soit directement soit indirectement ; qu'au travers du dénigrement, transparait l'intérêt direct de MDY d'attaquer ses concurrents afin de promouvoir ses produits, en particulier en grès, granit et céramique, l'appelante recherchant purement et simplement la substitution des articles fabriqués par COSENTINO au profit de ses propres produits ; que sous couvert d'informer le consommateur dans le cadre d'une démarche prônant la protection de la santé des consommateurs, il y a en réalité manipulation des faits et des données à des fins purement commerciales, les consommateurs étant invités à se tourner particulièrement vers le granit que MDY se vante d'avoir largement développé ; que malgré deux juridictions l'ayant condamnée pour deux campagnes de dénigrement successives en l'absence de base factuelle suffisante, MDY continue d'affirmer que l'alerte n'a pas nécessairement à être exacte sur le plan scientifique au moment où elle est lancée, cette exactitude pouvant être simplement présumée au vu des informations scientifiques à la disposition du lanceur d'alerte, quitte à ce que son exactitude soit démontrée ou non par les pouvoirs publics ; que ce faisant, MDY tente de minimiser le rapport de l'ANSES, autorité publique indépendante, qu'elle cite lorsqu'il sert sa cause, qui confirme l'absence de base factuelle suffisante mise en lumière par la Cour de cassation et ce, dès le début de la campagne de dénigrement en 2017, et invente sans fondement une présomption de véracité même en l'absence d'informations scientifiques ; qu'en tout état de cause, les propos litigieux manquent de toute mesure.

Ceci étant exposé, les faits reprochés à la société MDY sont les suivants (pages 10 à 12 conclusions des intimées) :

- une vidéo intitulée "Les dangers sanitaires du quartz de synthèse utilisé dans les cuisines" publiée le 12 octobre 2018 sur la chaîne YouTube RT France, dans laquelle M. [V], président de la société MDY, déclare notamment : « Nous avons interrogé les industriels qui nous ont recommandé de plutôt s'occuper de notre boulot que de la composition des produits » ; « nous avons arrêté en 2013 malgré que nous soyons l'un des premiers clients en fait du plus gros industriel mondial » ; « ce produit a des problèmes à la fabrication parce qu'il s'émane énormément mais aussi à la consommation parce qu'il ne résiste pas ni au soleil ni à la chaleur et il est instable lorsqu'il est en contact avec ces éléments » ;

- un encart inséré en fin de cette vidéo comportant la déclaration suivante attribuée à COSENTINO : « Nos produits sont tout à fait sans danger pour le particulier. Ils répondent à des critères de qualité élevée et sont conformes à toutes les exigences techniques imposées par les normes existantes. A ce jour, aucun problème n'a d'ailleurs été remonté aux services qualité de l'entreprise » et le logo de COSENTINO (pièce n° 26) :

- plusieurs messages postés par M. [V] sur la page Facebook de la société MDY (procès-verbal du 27 décembre 2018 - pièce 25 COSENTINO), notamment :

- les propos tenus par M. [V] au journal télévisé de France 3 du 30 novembre 2018 : « La seule différence avec l'amiante c'est que l'on n'utilisait pas l'amiante pour faire à manger alors que là ce produit-là qui a une quarantaine de produits qui sont nocifs on l'utilise pour rouler une tarte, pour pouvoir en fait préparer des légumes, ses fruits tout ça ; c'est fait pour ça un plan de cuisine » (procès-verbal de constat du 4 décembre 2018 - pièce 27 COSENTINO).

La matérialité de ces messages et déclarations n'est pas contestée par la société MDY.

Dans un arrêt du 12 décembre 2018, la Cour de cassation a jugé que « même en l'absence d'une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la publication, par l'une, de propos de nature à jeter le discrédit sur un produit fabriqué ou commercialisé par l'autre, peut constituer un acte de dénigrement, sans que la caractérisation d'une telle faute exige la constatation d'un élément intentionnel ; ['] cependant, lorsque les appréciations portées sur un produit concernent un sujet d'intérêt général et reposent sur une base factuelle suffisante, leur divulgation relève du droit à la liberté d'expression, qui inclut le droit de libre critique, et ne saurait, dès lors, être regardée comme fautive, sous réserve qu'elles soient exprimées avec une certaine mesure».

Il n'est pas contesté par les sociétés COSENTINO que l'éventuelle dangerosité pour les consommateurs de l'utilisation de plans de cuisines en quartz de synthèse, autrement dit, composé de silice cristalline, est un sujet d'intérêt général.

A la fin de l'année 2018 (octobre /décembre 2018), époque des propos litigieux, à laquelle il convient de se placer pour vérifier si ces propos reposaient sur une base factuelle suffisante, deux rapports commandés par la société MDY à l'IRES (Institut de Recherche et d'Expertise Scientifique), en date des 9 décembre 2016 et 25 janvier 2017, avaient conclu en ces termes : « Un nombre important de substances potentiellement dangereuses pour la santé a été mise en évidence dans le matériau soumis à l'examen. Les COV [composés organiques volatiles] et les COSV (HAP, phtalates') [composés organiques semi-volatiles] sont susceptibles de contaminer l'air ambiant par simple chauffage du matériau. De plus, en raison de sa teneur élevée en métaux lourds (cadmium), il ne peut pas être considéré comme un déchet inerte/non dangereux. En conséquence, il est recommandé : de limiter l'utilisation du matériau ; d'éviter une utilisation domestique ou professionnelle du matériau ; de porter des équipements de protection individuelle (EPI) adaptés lors de la manipulation et du travail du matériau (découpe) ; de considérer le matériau comme un déchet dangereux ».

Par ailleurs, l'ANSES (agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) s'était auto-saisie, le 16 novembre 2015, aux fins de « la réalisation d'une expertise en vue de mettre à jour les connaissances concernant les dangers, expositions et risques relatifs à la silice cristalline et de proposer d'éventuelles mesures de réduction des risques et de prévention ».

Cependant, comme l'a retenu la cour d'appel de Versailles dans son arrêt du 6 mai 2021 (rendu dans l'instance en référé), les deux rapports précités de l'IRES ont été très critiqués par deux experts mandatés par l'association A.ST.A WORLD-WIDE, MM. [Z] et [T], qui ont eux-mêmes rendu séparément plusieurs rapports (10 avril, 9 octobre et 21 novembre 2017) soulignant le caractère subjectif des conclusions de l'IRES ne reposant sur aucun test de risque de contamination des aliments et de l'air par le matériau, l'absence de certification de l'IRES pour l'analyse de matériaux solides et de compétence pour juger de l'adaptation du matériau à son usage et l'extrapolation qui était faite des résultats d'analyse effectués sur des échantillons broyés. Ils indiquaient qu'à supposer que les résultats soient fiables, ils ne permettaient pas de caractériser la dangerosité alléguée « des composés 'emprisonnés' dans la masse y restant à jamais et d'autres pouvant s'en échapper extrêmement lentement, en restant en dessous des seuils de toxicité définis par les normes et réglementations » et affirmaient que les conclusions et recommandations de l'IRES étaient « inutilement alarmistes et fortement excessives ».

En outre, dans un article « Les plans de cuisine en quartz de synthèse sont-ils dangereux ' » du 8 mars 2017, le magazine 60 millions de consommateurs rapportait l'avis de la DGCCRF qu'il avait interrogée, selon lequel les conditions dans lesquelles avaient été menés les tests de l'IRES étaient « drastiques » et « non comparables avec les conditions réelles d'utilisation », ajoutant « qu'il n'est pas certain que le quartz [naturel] ou le granit extraits ne conduisent pas à des résultats similaires en termes de composition, avec de telles conditions d'extraction, sans que leur sécurité ait été remise en cause », l'article du magazine se concluant par « Des tests complémentaires ' et notamment en conditions réelles d'utilisation ' s'avèrent donc nécessaires pour lever les doutes » (pièce 21 COSENTINO).

Par ailleurs, la société MDY a fait réaliser deux études par le laboratoire LNE (laboratoire national de métrologie et d'essais) visant à évaluer, en condition réelle d'utilisation par le consommateur de plans de cuisines (i.e. sans broiement des échantillons de quartz de synthèse), sur deux types de quartz de synthèse (le « Stone Italiana » et le « Rosso Monza »), le « risque sanitaire chimique de plan de travail en quartz synthétique après vieillissement et comparaison aux limites du règlement UE n° 10/2111 (Plastiques) et à l'arrêté du 7 novembre 1985 (Céramique) ». Ce laboratoire a remis deux rapports en date du 30 janvier 2018, concluant pour le produit « Stone Italiana », que « la limite de migration spécifique du dibutylphtalate (DIBP) est dépassée dans le cas du vieillissement par abrasion. Pour l'ensemble des autres valeurs, lorsque les limites réglementaires sont applicables, la migration mesurée ne dépasse pas la limite réglementaire. Il est à noter que la migration du DIBP n'est pas négligeable pour l'ensemble des 3 vieillissements [par abrasion, par UV et par température] » et, pour le produit « Rosso Monza » que « Pour l'ensemble des autres valeurs, lorsque les limites réglementaires sont applicables, la migration mesurée ne dépasse pas la limite réglementaire. Il est à noter que la migration du DIBP n'est pas négligeable dans le cas du vieillissement par la température » (pièces 30 et 31 COSENTINO).

En outre, les intimées produisent un document intitulé « Pollution de l'environnement & migration des composants chimiques lors de l'utilisation plateaux en quartz de synthèse » qui constitue une synthèse, en date du 5 mars 2018, réalisée par M. [M] de l'IRES (précité), de diverses études commanditées par MDY, réalisées notamment par le LNE, entre mai 2017 et janvier 2018, au terme duquel l'expert conclut notamment que les différentes analyses démontrent « la présence de métaux lourds, de solvants et de plastifiants qui peuvent être transférés dans l'alimentation en contact avec le matériau » et aussi « qu'ils ne présentent pas de risque sanitaire pour le contact alimentaire (conforme aux valeurs seuils de migration) » (pièce 32 COSENTINO).

En l'état de ces éléments, il ne peut être retenu que les messages et déclarations précités de la société MDY, intervenus au dernier trimestre de l'année 2018, visant à alerter le public sur les dangers encourus par les utilisateurs de plans de travail de cuisines contenant de la silice cristalline, reposaient sur une base factuelle suffisante au regard de la gravité des propos litigieux.

Il doit cependant être tenu compte des éléments postérieurs à l'époque des faits litigieux pour une complète et plus exacte appréciation du litige.

Ainsi, l'ANSES a rendu son rapport, en date du 25 avril 2019, intitulé « Dangers, expositions et risques relatifs à la silice cristalline », qui porte essentiellement sur les risques encourus par les professionnels manipulant de la silice cristalline sans pour autant écarter ceux auxquels sont exposés les consommateurs. Il conclut qu'« au regard des niveaux d'exposition observés actuellement en France et des excès de risques disponibles dans la littérature, l'existence d'un risque sanitaire particulièrement élevé (supérieur à 1 pour 1 000) pour la population professionnelle exposée à la silice cristalline est confirmée. La valeur actuelle de la VLEP-8h [valeur limite professionnelle sur 8 heures, en France] de 0,1 mg.m3 n'est pas suffisamment protectrice ». Le comité d'experts spécialisés (CES) ayant procédé à l'étude émet un certain nombre de recommandations, expressément endossées par l'ANSES (page 36 du rapport), destinées au milieu professionnel, visant notamment à améliorer la surveillance médicale des travailleurs exposés (les risques identifiés encourus par les professionnels étant essentiellement respiratoires : cancer du poumon, silicose, maladies respiratoires non malignes) et également à « transposer en droit français, et ce dans les meilleurs délais, la reconnaissance des travaux exposant à la poussière de silice cristalline mentionnés dans la directive 2017/2388 comme procédés cancérogènes », à « réviser les VLEP pour la silice cristalline, compte tenu des risques sanitaires mis en évidence (') », à « généraliser la mise en place de mesures de prévention telles que le travail à l'humide et/ou le captage à la source en vérifiant systématiquement au préalable leur efficacité en fonction des outils et techniques utilisés, y compris dans les chantiers mobiles » et de « réaliser un effort de sensibilisation aux risques liés à l'exposition à la silice cristalline et aux mesures de prévention auprès des professionnels, et ce quel que soit le secteur d'activité, incluant aussi bien les secteurs traditionnels (extraction, BTP') que les secteurs plus récents (exemple des secteurs mettant en œuvre des pierres artificielles') ». Pour ce qui concerne les risques encourus par les consommateurs, le rapport conclut que « les quelques données connues sur les niveaux d'exposition à la silice cristalline de la population générale ne permettent pas de réaliser une évaluation des risques sanitaires » ; il émet cependant également des recommandations destinées à la « prévention en population générale » consistant à « surveiller dans le cadre de la réglementation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement (') pour les carrières, les émissions de silice cristalline, notamment à l'attention des riverains de ce type d'installation (') » et à « sensibiliser les particuliers utilisant des matériaux contenant de la silice cristalline ou réalisant des opérations de bricolage telles que découpe de carrelage ou de béton, ponçage de mortier, etc. aux risques liés à une exposition par inhalation à la silice cristalline. Cela peut supposer de développer de nouveaux moyens de communication et d'information sur les risques dans les points de vente et à destination des particuliers »

1: Mise en gras ajoutée par la cour.

(pièce 7 MDY).

Si, au vu de cet avis de l'ANSES d'avril 2019 qui préconise de « sensibiliser les particuliers utilisant des matériaux contenant de la silice cristalline » - ce qui est précisément le cas de particuliers utilisant au quotidien un plan de travail en quartz de synthèse dans leur cuisine -, en développant l'information « sur les risques dans les points de vente et à destination des particuliers », ce dont on peut raisonnablement déduire l'existence de l'exposition à un danger lors de la mise en contact avec ce matériau, au demeurant clairement mise en évidence pour les travailleurs ayant à le manipuler (notamment lors de découpes réalisées aux domiciles des particuliers lors de « chantiers mobiles »), la base factuelle n'apparaît plus insuffisante, ainsi que l'a retenu la cour d'appel de Versailles dans son arrêt du 6 mai 2021, il reste que les propos tenus devaient, pour ne pas revêtir de caractère dénigrant, respecter une certaine mesure.

Or, force est de constater que les propos incriminés, très péremptoires, péjoratifs et anxiogènes (« il [le quartz de synthèse] ne résiste pas ni au soleil ni à la chaleur et il est instable lorsqu'il est en contact avec ces éléments ; « si vous aviez un enfant malade du poison de ces plans' » ; « ces plans ont déjà provoqué des dizaines de mort et des centaines de cas de cancers identifiés » ; « des dizaines de morts et des milliers de malades gravement touchés » ; « c'est comme l'amiante, très nocif au façonnage et à la manipulation » ; « tous les quartz de synthèse ont jusqu'à quarante composants perturbateurs endocriniens et cancérigènes » ; « bombe chimique » ; « vendre des plans de cuisines pleins de composants cancérigènes »), parfois expressément démentis par les études de l'IRES commandées par la société MDY elle-même (« le quartz contient de l'amiante' ») (cf. rapport d'analyse de l'IRES du 14 septembre 2016 - pièce 11 COSENTINO), sont largement dépourvus de cette mesure, qui était d'autant plus nécessaire que l'avis de l'ANSES est nuancé s'agissant de l'utilisation du quartz de synthèse par les consommateurs et qu'il est constant qu'à ce jour, le quartz de synthèse reste autorisé pour la réalisation de plans de cuisines, les sociétés COSENTINO justifiant par ailleurs de plusieurs certificats de compliance (conformité) délivrés par GREENGUARD, EUROFINS, VERITAS, pour son produit SILESTONE.

Ainsi, les propos et messages incriminés, qui excèdent les limites de la liberté d'expression, jettent le discrédit sur les plans de travail en quartz de synthèse fabriqués et commercialisés par les sociétés COSENTINO et présentent un caractère dénigrant.

La société MDY argue vainement que le dénigrement ne serait pas constitué dès lors que ses propos ne visent qu'un matériau, le quartz de synthèse, et non un produit, le produit SILESTONE produit et commercialisé par les sociétés COSENTINO. En effet, aucun texte ni aucune jurisprudence ne confirme une telle limitation et si le quartz de synthèse mis en cause dans les propos litigieux n'est pas systématiquement désigné expressément comme celui de marque « SILESTONE » des sociétés intimées, il est acquis que le groupe COSENTINO est l'un des leaders du marché du quartz de synthèse (cf. article 60 millions de consommateurs de mars 2017 précité) et que son nom est étroitement associé à ce matériau, de sorte qu'il ne peut être contesté que les sociétés intimées sont parfaitement identifiables dans les propos litigieux. Au demeurant, elles soulignent à juste raison que COSENTINO est parfois visé, directement dans la vidéo de RT France par l'apposition du logo du groupe qui comporte l'élément verbal COSENTINO (pièce n° 26), et indirectement dans des messages postés sur la page Facebook de la société MDY où il est fait mention du « principal industriel espagnol qui masque la dangerosité réelle de son produit en France' » ou de « Silestone » qui est la marque sous laquelle est distribuée le quartz de synthèse des sociétés COSENTINO.

Enfin, comme l'ont retenu les premiers juges, ce dénigrement est associé par la société MDY à une communication en faveur de ses propres produits en grès ou granit présentés comme naturels et donc sans danger (« La première économie à faire et d'acheter directement vos plans chez des façonniers comme MDY' Vous constaterez que beaucoup de produits naturels sont meilleur marché que des produits synthétiques achetés chez les cuisinistes ! » (compte Facebook de MDY - pièce 17 COSENTINO) ; « des alternatives minérales naturelles existent de longue date et ne présentent aucun danger pour la santé » (article de M. [V] sur le site internet de la société MDY du 2 février 2017 ' pièce 15) ; « Le marbre ne convient pas, il n'est pas assez résistant pour aller en cuisine. En matériau naturel, seul le granit est prescrit » (procès-verbal de constat sur la page Facebook de la société MDY - pièce 25)).

Sur les pratiques commerciales trompeuses

Les sociétés COSENTINO soutiennent que la société MDY s'est rendue coupable de pratiques commerciales trompeuses (i) en trompant les consommateurs sur le quartz de synthèse en fournissant, via l'AMEF (association des marbriers écologiques de France), les résultats des analyses de l'IRES réalisées dans des conditions déconnectées des conditions réelles d'utilisation des plans de travail tout en passant sous silence les résultats du laboratoire LNE montrant au contraire l'absence de risque pour la santé et la sécurité des consommateurs, (ii) en le trompant également sur les produits qu'elle commercialise et (iii) en invitant le consommateurs à délaisser les produits en quartz de synthèse, dont ceux fabriqués par COSENTINO, expressément visé, au profit de produits vantés comme étant naturels ; que ces pratiques ont directement influencé les habitudes de consommation du public à leur détriment alors que seule une potentialité d'effets suffit à caractériser la faute ; que les produits en grès ou granit vendus par MDY contiennent tous de la silice cristalline : 93 % pour les plans en grès et 74,5 % pour les plans en granit ; que le granit recommandé par MDY contient par ailleurs du radon qui est un gaz radioactif ; que quelle que soit la composition des plans, c'est la migration de leurs composants en conditions réelles d'utilisation qu'il importe de vérifier ; que la manière dont MDY fait la promotion du granit en éludant cet aspect fondamental du débat qu'elle a elle-même généré pour des raisons purement commerciales démontre que son but est uniquement orienté vers la substitution des produits en quartz au profit des siens ; qu'en outre, MDY s'est livrée à de nombreuses comparaisons hasardeuses entre le scandale très médiatisé de l'amiante qui a choqué l'opinion et le quartz, de nature à dissuader les consommateurs de se tourner vers les produits en quartz, MDY véhiculant volontairement un message anxiogène allant jusqu'à soutenir que le quartz contiendrait de l'amiante, ce qui a été pourtant contredit par l'IRES.

La société MDY répond que les conditions de l'existence de pratiques commerciales trompeuses ne sont pas réunies ; qu'en effet, de première part, les informations divulguées ne sont pas fausses dès lors qu'elle produit un grand nombre de pièces démontrant le bien-fondé de l'alerte qu'elle a relayée ; qu'elle n'a jamais caché les résultats du laboratoire LNE qui ne contredisent pas ceux de l'IRES dans la mesure où les conditions dans lesquelles ces résultats ont été obtenus ne sont pas les mêmes ; qu'au demeurant, les conclusions du laboratoire LNE ne démontrent pas le respect de toutes les limites réglementaires et ne concernent que les cas où les limites réglementaires sont applicables, ce qui n'est pas le cas, par exemple, pour des tests de vieillissement par la température avec une exposition à 210° pendant 24 h ; que la nocivité alléguée des produits en granit n'est nullement démontrée et ne fait l'objet d'aucune polémique ; que de seconde part, les intimées ne démontrent pas que les informations litigieuses auraient altéré, ou auraient été seulement susceptibles d'altérer, le comportement du consommateur ; qu'en tout état de cause, elle ne s'est nullement placée en situation de concurrence déloyale vis-à-vis de sociétés COSENTINO en détournant leur clientèle dès lors que depuis qu'elle a cessé la commercialisation des plans de travail en quartz de synthèse en 2013 son chiffre d'affaires et sa marge brute ont considérablement baissé.

Ceci étant exposé, l'article L. 121-1 du code de la consommation dispose que « Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.

Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service (')

Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-2 à L. 121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L. 121-6 et L. 121-7 ».

L'article L. 121-2 du code de la consommation dispose que « Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes :

(...)

2° Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants :

(...)

b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, notamment au regard des règles justifiant l'apposition des mentions ' fabriqué en France ' ou ' origine France ' ou de toute mention, signe ou symbole équivalent, au sens du code des douanes de l'Union sur l'origine non préférentielle des produits, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l'usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, notamment son impact environnemental, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service (') ».

Il en découle qu'une pratique commerciale n'est trompeuse que lorsqu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur.

En l'espèce, les sociétés CONSENTINO fournissent un courrier en date du 1er décembre 2018 par lequel une cliente ayant commandé un plan de travail Silverstone demande, au nom du principe de précaution, son remplacement par un produit équivalent en pierre naturelle, expliquant avoir appris en regardant l'émission de France 3 du 30 novembre que le quartz de synthèse était mis en cause pour sa toxicité et mentionnant l'arrêt de la cour d'appel de Versailles de février 2018, ainsi que le fait que l'enseigne LEROY MERLIN avait décidé de ne plus commercialiser ce produit.

Cependant, les sociétés COSENTINO n'établissent pas que les messages diffusés par la société MDY ont altéré, ou ont seulement pu altérer, de façon substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Les premiers juges ont à cet égard justement relevé que des informations évoquant la possible toxicité du quartz de synthèse avaient été diffusées par d'autres que la société MDY et les intimées elles-mêmes fournissent une importante revue de presse faisant état des mêmes accusations à l'encontre des plans de travail en quartz de synthèse que celles portées par la société MDY (leur pièce 33), outre que le rapport précité de l'ANSES d'avril 2019 révèle que le débat sur la toxicité de ce matériau existait bien avant la démarche de la société MDY et de son président et que, comme il a été dit, l'ANSES avait pris l'initiative de se saisir de cette question dès 2015, ce qui tend à confirmer l'existence d'interrogations antérieures sur la toxicité du quartz de synthèse. Par ailleurs, les intimées ne justifient d'aucune baisse de leurs chiffres d'affaires depuis l'expression par la société MDY et son président des informations litigieuses, alors que l'appelante indique que son chiffre d'affaires a fortement baissé depuis qu'elle a cessé de commercialiser des plans de travail en quartz de synthèse et établit qu'elle a enregistré un résultat net négatif au titre de l'exercice du 30 juin 2019 au 30 juin 2020. Enfin, la toxicité alléguée des plans de cuisine en granit n'est étayée par aucun élément.

Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés COSENTINO de leur demande au titre des pratiques commerciales trompeuses.

Sur la réparation du préjudice né du dénigrement

Les sociétés CONSENTINO sollicitent une substantielle augmentation des dommages et intérêts alloués en première instance, faisant valoir que MDY a porté atteinte à l'image de leurs produits, en particulier les produits « SILESTONE », ainsi qu'à leur réputation commerciale ; que le climat de suspicion entretenu autour de ses plans de cuisines est alimenté depuis janvier 2017 et a fait l'objet de nombreux articles sur le sujet de la part de différents médias ; que le préjudice moral est incontestable et propre à chacune des deux sociétés qui opèrent sur des marchés distincts ; qu'elles subissent également un trouble commercial dès lors que les actes déloyaux auxquels s'est livrée MDY lui a permis de conquérir des parts de marché et, par voie de conséquence, a privé COSENTINO d'une clientèle potentielle qui s'est détournée de l'achat d'articles en quartz sur la seule base des affirmations péremptoires de la société MDY ; que ce trouble commercial est irréversible, une partie de l'opinion étant désormais définitivement acquise à l'idée de la prétendue dangerosité des produits en quartz, ce qui l'oblige à déployer des efforts considérables pour tenter de regagner une confiance injustement perdue ; que MDY est allé jusqu'à des démarches en présentiel chez certains de ses clients ; qu'enfin, COSENTINO a eu à déplorer de nombreuses annulations de commandes, notamment celles de la société KINGFISHER, propriétaire de CASTORAMA, génératrices d'une perte de chiffre d'affaires et de la perte de la marge brute afférente ; qu'outre les mesures de retrait déjà ordonnées par le tribunal, il convient de faire droit à ses autres demandes accessoires indispensables, concernant le retrait des messages, publications et liens litigieux, tant sur la page Facebook de MDY que sur le site de l'AMEF, comme l'information forcée par MDY des différents journaux ou sites ayant relayé son message et la publication de la décision.

La société MDY répond que les intimées n'établissent pas les préjudices qu'elles prétendent avoir subis, ni dans leur principe, ni dans leur étendue ; que sa démarche s'inscrivant depuis 2017 dans le cadre d'un débat d'intérêt général bien antérieur et de grande ampleur puisqu'existant tant au niveau national qu'international, et portant d'une manière générale sur les risques pour la santé humaine liés aux matériaux comportant de la silice cristalline, tels que le quartz de synthèse, à l'origine de diverses maladies graves, telles que la silicose, la sclérodermie systémique ou différentes formes de cancer, les articles de presse produits par les société COSENTINO ne peuvent être imputés à sa seule démarche et portent surtout sur l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles en 2018 à la suite de la procédure en référé engagée contre MDY ; que de même, il ne peut être attribué à ses alertes les prétendues demandes de remplacement des plans de travail SILESTONE présentées par des consommateurs et annulations de commandes ; que la volonté de la société KINGFISHER est motivée par un problème de qualité des produits quartz, bien distinct de la question de la nocivité de ces produits ; que le montant cumulé des annulations de commande s'élève à la somme de 4. 678,24 € et que la perte de marge évaluée par COSENTINO n'excède pas 29 441,95 € ; qu'elle n'a nullement pris des parts de marché au détriment des sociétés COSENTINO ; que la réparation d'un préjudice moral ne se justifie pas dès lors que la dangerosité des matériaux à base de quartz de synthèse est aujourd'hui reconnue par les pouvoirs publics (l'ANSES et la cour d'appel de Versailles), tant pour les professionnels que pour les consommateurs. Elle indique enfin que c'est en dépit de ses intérêts immédiats qu'elle a choisi de renoncer à commercialiser des plans de cuisine en quartz synthétique compte tenu des risques pour la santé humaine que ces produits représentent et que son exercice comptable 2019/2020 fait apparaître un déficit de plus de 169 000 €.

Sur les demandes indemnitaires

Les sociétés COSENTINO justifient que la société PIERRES ET DESIGN a décidé de suspendre, au nom du principe de précaution, la commercialisation des plans de travail en quartz (courrier du 17 mars 2017), mais cette annulation n'est pas liée directement aux propos litigieux puisqu'elle est motivée par le rapport d'analyses établi par l'IRES à l'initiative de la société MDY, trouvé par l'intéressée sur les réseaux sociaux, auquel il n'est pas fait grief d'être dénigrant. Il en est de même de l'annulation d'une commande en mars 2017 par la société MARBRERIE PROVENCALE auprès de la société PREMIUM CUISINES, que les intimées présentent comme l'un de leurs distributeurs. Les annulations de commandes par les sociétés MARBRERIE PITIE et CBU ne sont pas motivées et rien ne permet d'établir qu'elles sont liées aux faits de dénigrement. Et dans son courriel du 8 janvier 2019, la société KINGFISHER (CASTORAMA) fait part de sa décision de cesser la relation commerciale, l'expliquant par des « problèmes de qualité dont font l'objet les produits quartz et en raison de leur dangerosité » sans que cette décision puisse être rattachée avec certitude aux propos incriminés. Les démarches alléguées de la société MDY auprès de clients des sociétés COSENTINO ne ressortent pas clairement de la pièce 14 à laquelle elles se réfèrent.

Pour autant, les propos dénigrants émis par la société MDY, sur les réseaux sociaux, sur internet et à la télévision, à l'encontre des plans de travail en quartz de synthèse fabriqués et commercialisés par les sociétés COSENTINO ont nécessairement, de par leur large diffusion, entraîné un trouble commercial pour ces dernières, d'autant que la société MDY faisait parallèlement et accessoirement la promotion des plans de travail en « matières naturelles » qu'elle propose désormais.

Par ailleurs, comme les premiers juges l'ont retenu, les sociétés COSENTINO ont subi un préjudice moral du fait de ces propos sans nuance ni mesure visant leurs produits qui ont ainsi nécessairement porté atteinte à leur réputation commerciale. La somme allouée par les premiers juges à ce titre sera néanmoins ramenée à de plus justes proportions eu égard au rapport de l'ANSES d'avril 2019 qui, comme il a été vu, n'écartait nullement les dangers liés à l'utilisation de produits en quartz de synthèse pour les utilisateurs de plans de travail en quartz de synthèse.

La cour est ainsi en mesure de fixer à la somme de 20 000 € la somme devant compenser le trouble commercial des sociétés COSENTINO ensemble et à 30 000 € celle venant réparer leur préjudice moral.

La demande au titre de la perte de marge brute subie du fait de la défection du client KINGFISHER (CASTORAMA) sera rejetée pour les raisons ci-avant exposées.

Le jugement sera réformé en ce sens.

Sur les autres demandes

L'évolution du litige, du fait de la publication du rapport de l'ANSES d'avril 2019, conduit à rejeter l'ensemble des mesures complémentaires demandées, au demeurant en des termes trop imprécis, que ce soit au titre des mesures de retrait des différents messages, publications et liens litigieux, tant sur la page Facebook de MDY que sur le site de l'AMEF, laquelle n'est pas partie au litige, ou au titre de la demande d'information forcée par la société MDY en direction des différents médias ayant relayé ses messages ou encore au titre de la mesure de publication de la présente décision.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société MDY, partie perdante pour l'essentiel, 1sera condamnée aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

La somme qui doit être mise à la charge de la société MDY au titre des frais non compris dans les dépens exposés par les sociétés COSENTINO peut être équitablement fixée à 5 000 €, cette somme complétant celle allouée en première instance.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

débouté les sociétés COSENTINO de leurs demandes de réparation en raison de leur perte de marge,

débouté les sociétés COSENTINO de leurs demandes de publication ou d'information,

débouté les sociétés COSENTINO de leurs demandes à l'encontre du site de l'AMEF,

condamné la société MDY aux dépens et à payer aux sociétés COSENTINO la somme totale de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

L'infirme pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la société MARBRERIE DES YVELINES (MDY) a commis des actes de dénigrement au préjudice des sociétés COSENTINO,

La condamne à payer aux sociétés COSENTINO, ensemble, la somme de 20 000 € en réparation de leur préjudice commercial et celle de 30 000 € en réparation de leur préjudice moral,

Condamne la société MARBRERIE DES YVELINES (MDY) aux dépens d'appel et au paiement aux sociétés COSENTINO de la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les demandes plus amples ou contraires.