CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 21 février 2024, n° 22/00525
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Xplorer (SARL)
Défendeur :
Kooistra Detectors B.V. (Société de droit néerlandais)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Douillet
Conseillers :
Mme Barutel, Mme Bohée
Avocats :
Me Schmitt, Me Junca, Me Bouadana, Me Lacker
EXPOSE DU LITIGE
La société française Xplorer conçoit, fabrique et vend des appareils de détection de métaux sous le nom commercial et la marque « XP Metal Detectors » et notamment des détecteurs de métaux classiques ou primaires, composés d'une canne, d'un boîtier et d'un disque, et des détecteurs de métaux spéciaux ou secondaires, appelés « pointer » ou détecteurs de proximité.
Elle est titulaire :
de la marque semi-figurative de l'Union européenne XP METAL DETECTORS n° 4 900 155 (« n°155 ») déposée le 14 février 2006, enregistrée le 26 mars 2007 pour désigner des « détecteurs de métaux » en classe 9 :
des marques verbales française et de l'Union européenne DEUS, déposées respectivement le 16 juin 2008 sous le numéro 3 582 785 (« n°785 »), et le 24 mai 2018 sous le numéro 17 907 004 (« n°004 »), pour désigner des « détecteurs de métaux » en classe 9.
La société Deteknix Inc devenue depuis la société Quest, (ci-après, « Deteknix ») est une société de droit des États-Unis qui conçoit, fabrique et commercialise également des détecteurs de métaux. Son président, M. [S] [Y] [G] a déposé le 14 mai 2014 la marque figurative européenne XPOINTER n° 012874681 pour désigner les « détecteurs de métaux » en classe 9, marque enregistrée le 24 septembre 2014.
La société de droit néerlandais Kooistra Metal Detectors BV (ci-après, « Kooistra ») est l'un de ses distributeurs.
La société Xplorer impute à la société Deteknix, ainsi qu'à son distributeur Kooistra, la contrefaçon de la marque semi-figurative XP METAL DETECTORS par la vente de produits dénommés «XPointer », ainsi que la contrefaçon de sa marque DEUS, par la représentation d'un casque audio revêtu de cette marque dans des publicités pour des produits Deteknix/Quest, tels que constatées, selon elle, dans un procès-verbal de constat établi le 26 septembre 2017 et a mis en demeure ces deux sociétés de cesser leurs agissements le 8 juin 2018.
La société Xplorer a ainsi fait assigner les sociétés Deteknix et Kooistra en contrefaçon et concurrence déloyale et parasitaire les 11 et 14 janvier 2019 devant le tribunal judiciaire de Paris.
Par ordonnance du 5 juin 2020, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société Kooistra, au motif que celle-ci permettait la commercialisation des produits litigieux en France, entre autres pays.
Par un jugement du 16 novembre 2021, dont appel, le tribunal judicaire de Paris a :
Rejeté la demande de la société Kooistra detectors bv tendant à écarter certaines pièces des débats ;
Rejeté les demandes de la société Xplorer en indemnisation et interdiction au titre d'une contrefaçon de la marque semi-figurative de l'Union européenne n° 4 900 155 « XP Metal Detectors » ;
Rejeté les demandes de la société Xplorer en indemnisation et interdiction au titre d'une contrefaçon de la marque verbale française n° 3 582 785 « DEUS » et de la marque verbale de l'Union européenne n° 17907004 « DEUS » ;
Rejeté la demande de la société Xplorer en interdiction et indemnisation au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ;
Condamné la société Xplorer aux dépens ainsi qu'à payer 30 000 euros à la société Kooistra detectors bv au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Le 30 décembre 2021, la société Xplorer a interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance sur incident du 7 mars 2023, le conseiller chargé de la mise en état a :
Déclaré caduc l'appel formé le 31 décembre 2021 par la société Xplorer à l'encontre de la société Deteknix,
Déclaré irrecevables les conclusions signifiées le 25 octobre 2022 par la société Xplorer,
Débouté la société Kooistra Detectors Bv de ses autres demandes,
Invité la société Xplorer à régulariser ses conclusions en tenant compte de la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la société Deteknix et de l'irrecevabilité de ses écritures suite à l'appel incident de la société Kooistra Detectors Bv en supprimant les passages répondant à l'appel incident,
Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Réservé les dépens.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives numérotées 4, notifiées le 11 octobre 2023, la société Xplorer, appelante, demande à la cour de :
Infirmer le jugement du Tribunal Judiciaire de Paris du 16 novembre 2021 RG 19/00988 en ce qu'il a :
Rejeté les demandes de la société Xplorer en indemnisation et interdiction au titre d'une contrefaçon de la marque semi-figurative de l'Union européenne n° 4900155 « XP metal detectors » ;
Rejeté les demandes de la société Xplorer en indemnisation et interdiction au titre d'une contrefaçon de la marque verbale française n°3582785 « DEUS » et de la marque verbale de l'Union Européenne n°17907004 « DEUS » ;
Rejeté la demande de la société Xplorer en interdiction et indemnisation au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ;
Condamné la société Xplorer aux dépens ainsi qu'à payer 30 000 euros à la société Kooistra Detectors BV au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Rejeter toutes conclusions contraires de la société Kooistra Detectors BV comme infondées et injustifiées.
Vu les articles 9 2. b) et 17 du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017,
Vu l'ancien article L. 717-1 du Code de la propriété intellectuelle,
Condamner la société Kooistra Detectors BV pour avoir commis des actes de contrefaçon à l'encontre de la société XPlorer en exploitant le signe « XPointer » sous des formes similaires à la marque européenne antérieure « XP metal detectors » n° 4900155 pour désigner des produits identiques et générant ainsi un risque de confusion dans l'esprit du public.
En conséquence,
Condamner la société Kooistra Detectors BV à payer à la société XPlorer la somme de 50 000 euros en indemnisation de son préjudice.
Vu les articles 9 2. c) et 17 du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017,
Vu l'ancien article L. 713-5 alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles 1240 et 1241 du Code civil,
Condamner la société Kooistra Detectors BV pour avoir commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire en portant atteinte à la renommée de la marque « XP metal detectors», faisant l'objet d'un enregistrement européen sous le numéro 49000155, par dilution de son caractère distinctif.
En conséquence,
Condamner la société Kooistra Detectors BV à payer à la société XPlorer la somme de 50 000 euros en indemnisation de son préjudice.
Vu les articles 9 2. b), 14, 17 du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017,
Vu les anciens articles L. 713-2, L. 713-6, L.716-1, L. 717-1 Code de la propriété intellectuelle,
Condamner la société Kooistra Detectors BV pour avoir commis des actes de contrefaçon à l'encontre de la société XPlorer en reproduisant illicitement la marque « DEUS » , faisant l'objet d'un enregistrement européen sous le numéro 17907004 et d'un enregistrement français sous le numéro 3582785, sur une publicité diffusée sur le site Internet « maisondeladetection.com » et sur une publicité publiée sur le magazine The Searcher pour faire la promotion de produits identiques à ceux pour lesquels elle est protégée.
En conséquence,
Condamner la société Kooistra Detectors BV à payer à la société XPlorer la somme de 50.000 euros en indemnisation de son préjudice.
Vu les articles 9 2. c) et 17 du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017,
Vu l'ancien article L. 713-5 alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles 1240 et 1241 du Code civil,
Condamner la société Kooistra Detectors BV pour avoir commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire à l'encontre de la société XPlorer en portant atteinte à la renommée de sa marque « DEUS », faisant l'objet d'un enregistrement européen sous le numéro 17907004 et d'un enregistrement français sous le numéro 3582785, pour l'avoir reproduite de manière injustifiée dans une publicité diffusée sur le site Internet «maisondeladetection.com » et une publicité publiée sur le magazine The Searcher dans l'objectif de faire la promotion de leurs propres produits.
En conséquence,
Condamner la société Kooistra Detectors BV à payer à la société XPlorer la somme de 50 000 euros en indemnisation de son préjudice.
Vu les articles 699 et 700 du Code de procédure civile,
Condamner la société Kooistra Detectors B la somme de 80.945 euros à la société XPlorer en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamner la société Kooistra Detectors BV aux entiers frais et dépens au profit de Me Philippe Schmitt.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives, numérotées 2, notifiées le 18 septembre 2023, la société Kooistra, intimée et appelante incidente, demande à la cour de :
Vu notamment les articles L. 713-3, et L. 716-5 du Code de la Propriété Intellectuelle,
Vu l'article 61 du RÈGLEMENT (UE) 2017/1001,
À titre principal,
Confirmer le jugement attaqué dans toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a jugé qu'il n'y avait pas d'atteinte à la marque figurative « XP metal detectors » ni à la marque DEUS.
De manière subsidiaire :
Juger irrecevable les demandes de la société XPLORER car elles se heurtent à l'autorité de la chose jugée du fait d'une part du caractère définitif de l'ordonnance du Conseiller de la mise en état 7 mars 2023 à l'égard de toutes les parties et donc de l'autorité de la chose jugée du jugement du 16 novembre 2021 à l'égard de DETEKNIX (aujourd'hui dénommée CHECKPOINT SECURITY INC., ci-après dénommée DETEKNIX) et d'autre part de l'indivisibilité des actes reprochés à la fois à la société KOOISTRA et à la société DETEKNIX reprochés par la société XPLORER notamment dans son assignation.
Juger irrecevable les dernières conclusions de la société XPLORER car elles se heurtent à l'autorité de la chose jugée du fait d'une part du caractère définitif de l'ordonnance du Conseiller de la mise en état 7 mars 2023 à l'égard des autres les parties et donc de l'autorité de la chose jugée du jugement du 16 novembre 2021 à l'égard de DETEKNIX et d'autre part de l'indivisibilité des actes reprochés à la fois à la société KOOISTRA et à la société DETEKNIX reprochés par la société XPLORER notamment dans son assignation.
De manière infiniment subsidiaire, en tant que de besoin infirmer le jugement entrepris :
Infirmer le jugement en ce qu'il a jugé recevable à agir en contrefaçon de « marques communautaires » et de marque française la société XPLORER,
Juger irrecevable et infondée à agir en contrefaçon de « marques communautaires » et de marque française la société XPLORER, car celle-ci ne démontre ni sa titularité ni l'existence d'actes de contrefaçon ou de concurrence déloyale relevant des juridictions françaises
Juger que conformément à la décision du juge de la mise en état du 5 juin 2020 la compétence du tribunal est limitée aux faits ayant eu lieu en France.
Dire et juger que la société KOOISTRA DETECTORS BV n'est pas le revendeur en charge de la France pour les produits « QUEST » ou « DETEKNIX».
Juger que la société KOOISTRA DETECTORS BV n'avait pas de site en français depuis 2013,
Juger que l'existence d'un site aux États-Unis disponible à l'adresse deteknix.com en anglais vendant des produits en dollars ne constitue pas un usage dans la vie des affaires en France et qu'en tout état de cause ces faits ne sont pas imputables à la société KOOISTRA DETECTORS BV qui n'est pas propriétaire de ce site et Infirmer le jugement en tant que de besoin sur ce point,
Constater que la marque de l'Union européenne DEUS déposée le 24 mai 2018 est postérieure à la publication du magazine The Searcher du mois d'avril 2017
Juger qu'elle est donc inopposable,
Juger que la société KOOISTRA DETECTORS BV n'avait aucun contrôle sur le, contenu du site deteknix.com et qu'elle ne peut en être responsable et qu'en tout état cause ces faits sont couverts par l'autorité de la chose jugée du jugement attaqué.
Juger que la publication dans la revue en anglais « The Searcher » éditée au Royaume-Uni d'une publicité destinée au public britannique avec des prix en livres sterling ne constitue pas un usage dans la vie des affaires en France et qu'en tout état de cause ces faits ne sont pas imputables à la société KOOISTRA DETECTORS BV.
Juger que la société KOOISTRA DETECTORS BV n'a pas demandé la publication des annonces publicitaires dans la revue The Searcher, car son site internet et son nom ne sont pas indiqués et que cela a été confirmé par l'attestation du directeur de la publication et que ces faits ne lui sont donc pas imputables.
Juger que l'existence du site deteknix-eu.com en anglais ne vendant aucun produit ne constitue pas un usage dans la vie des affaires en France et qu'aucun préjudice n'est démontré en France pour la période non prescrite.
Constater que selon l'extrait Whois de deteknix-eu.com ce nom de domaine a été créé le 8 mars 2016 et que le site n'a donc pu exister qu'après cette date et que le site n'a donc pas pu être utilisé pour recruter des distributeurs en France, le réseau de distributeurs existant déjà puisque que le QUEST X POINTER était en vente sur le site la maisondelatection.com depuis au moins le 18 juillet 2015. (voir pièce 10.1)
Juger qu'il n'y a pas de contrefaçon de la marque figurative de l'Union européenne « XP METAL DETECTORS », car les signes sont différents et qu'il n'y a pas de risque de confusion.
Juger que l'usage de la marque DEUS ne porte pas à confusion et qu'il s'agit d'un usage en tant que référence nécessaire et qu'il n'est pas démontré qu'il s'agit d'un usage déloyal.
Juger qu'il n'est pas démontré que la marque figurative de l'Union européenne « XP METAL DETECTORS » ou la marque de l'Union européenne DEUS ou la marque française DEUS soit renommée ou notoire pour les détecteurs de métaux et qu'aucune atteinte ou dilution ou modification du comportement du consommateur n'est démontrée.
Constater qu'en tout état de cause, la société KOOISTRA DETECTORS BV n'utilise pas le signe « XPOINTER » ou le signe « DEUS » à titre de marque en France et qu'il n'y a pas lieu à prononcer une astreinte.
Dire et juger que l'usage de la marque « DEUS » pour le casque compatible avec les détecteurs de métaux « DEUS » dans une publication anglaise à l'initiative d'une société américaine et d'une société britannique n'est pas imputable à la société KOOISTRA DETECTORS BV et qu'elle ne saurait en être responsable.
Dire et juger que la société KOOISTRA DETECTORS BV n'a pas commis d'actes de contrefaçon ni d'acte de concurrence déloyale sur le territoire français.
En conséquence, en tout état de cause,
Débouter la société SARL XPLORER de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Juger que la responsabilité de la société KOOISTRA DETECTORS BV est limitée aux actes commis sur le territoire français et qu'il n'y a aucun préjudice imputable à la société KOOISTRA DETECTORS BV qui n'a vendu et ne vend aucun produit portant les marques XP, XPOINTER ou DEUS en France.
Juger qu'il n'y a pas lieu à prononcer une condamnation pour les actes de la société DETEKNIX ou des revendeurs de la société DETEKNIX car ces actes ont été jugés comme étant licites par le jugement du Tribunal Judiciaire du 16 novembre 2021 qui est aujourd'hui définitif pour ces faits et qui a autorité de la chose jugée, de plus il y a lieu de constater que l'appelante n'a pas assigné les distributeurs français et anglais de la société DETEKNIX.
Condamner la société SARL XPLORER à verser à la société KOOISTRA DETECTORS BV la somme supplémentaire de 40 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner la société SARL XPLORER aux entiers dépens, ceux-ci incluant les frais de constat d'huissiers, dont distraction sera ordonnée au profit de Maître Julien LACKER, Avocat Associé de l'AARPI GOMIS & LACKER AVOCATS, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 octobre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.
A titre liminaire, la cour rappelle que dans la mesure où le conseiller de la mise en état a déclaré caduc l'appel formé le 31 décembre 2021 par la société Xplorer à l'encontre de la société Deteknix, le jugement en ses dispositions la concernant est devenu définitif.
Sur le chef du jugement non critiqué,
Le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a rejeté la demande de la société Kooistra tendant à écarter certaines pièces des débats.
Il est donc définitif de ce chef.
Sur les atteintes à la marque semi-figurative de l'Union européenne XP METAL DETECTORS n° 4900155
La société Xplorer soutient essentiellement que la société Kooistra a commis des actes de contrefaçon de sa marque par imitation en proposant à la vente sur son site internet des produits identiques à ceux visés dans son enregistrement créant un risque de confusion pour le même public d'attention moyenne concerné, en utilisant des signes similaires, particulièrement en raison de la reprise de l'élément distinctif et dominant « XP » de sa marque. Elle critique le raisonnement du tribunal qui a retenu une faible similitude entre les signes à partir d'un raisonnement, selon elle, erroné en isolant notamment arbitrairement la lettre X du signe contesté et sans appliquer le principe de l'interdépendance des facteurs. Elle estime que le préjudice subi en conséquence de ces faits de contrefaçon doit être réparé par l'octroi d'une somme de 50.000 €.
La société Xplorer invoque, également, l'atteinte à la renommée de sa marque entraînant la dilution de son caractère distinctif. Elle estime démontrer la renommée de sa marque au travers notamment d'extraits de magazines ou de sites internet, de sa présence dans des séries télévisées, de dépenses marketing sur le territoire pertinent, soit l'Union européenne et notamment le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Italie et la France.
La société Xplorer estime que l'implication de la société Kooistra dans les faits dénoncés ressort d'abord de l'ordonnance du juge de la mise en état qui a autorité de la chose jugée sur ce point, mais aussi des nombreux éléments de preuves versés attestant des liens entre les sociétés Kooistra et Deteknix, ainsi que du rôle de la société Kooistra dans la distribution des produits Deteknix depuis le site internet www.deteknix-eu.com en Europe et en France.
Elle sollicite à ce titre une somme de 50.000€ en réparation du préjudice subi.
La société Kooistra rappelle être une société néerlandaise qui vend aux Pays Bas des détecteurs de métaux de différentes marques et estime avoir été assignée à tort, pour des actes commis aux Etats Unis, au Royaume-Uni et en France et par des sociétés tierces dont elle n'est pas responsable. Elle précise que le site internet litigieux créé le 8 mars 2016 était désactivé depuis au moins le 13 avril 2018, soit 8 mois avant que l'assignation ne soit délivrée.
Elle demande la confirmation du jugement rendu soulignant que l'exploitation de la marque XPOINTER ne porte pas atteinte à la marque opposée, rappelant que le X dans le domaine de la détection n'est pas distinctif, car il indique la cible à trouver, que le terme Pointer est descriptif pour les objet visés, et que le signe dans son ensemble sera lu X POINTER et non XP OINTER, comme tente de l'analyser artificiellement son adversaire, soulignant que le public pertinent est un public de spécialistes avec un niveau d'attention plus élevé, écartant d'autant tout risque de confusion et alors que de nombreuses autres sociétés concurrentes utilisent également la lettre X pour exploiter leurs produits.
Elle conteste la notoriété de la marque opposée, estimant notamment que la preuve de l'intensité de l'usage au sein de l'UE fait défaut.
De manière subsidiaire, si la cour ne confirmait par le jugement, elle soutient que les demandes se heurtent à une fin de non-recevoir tenant à l'autorité de la chose jugée, l'action en contrefaçon et en concurrence déloyale et parasitaire ayant été rejetée définitivement à l'égard de la société Deteknix, les faits en cause étant indivisibles et aucun fait distinct ne lui étant imputé, outre qu'il n'est pas apporté la preuve qu'une atteinte aux droits de la société Xplorer a été commis.
Elle plaide également qu'il n'y a pas eu d'usages des marques dans la vie des affaires en France rappelant qu'elle ne vend pas les produits de la société Deteknix en France qui dispose de distributeurs distincts et que les actes commis à l'étranger, au Royaume Uni ou aux Etats Unis, échappent à la compétence des juges français car ils ne visent pas le public français. Elle ajoute que le constat réalisé pour le compte de la société Xplorer ne permet nullement de constater l'existence d'un site internet en français et, qu'en tout état de cause, aucune vente depuis son site n'a été constatée en France, de sorte qu'il n'existe aucun préjudice.
A titre infiniment subsidiaire, elle soutient que les actes en cause ne lui sont pas imputables et que, dans la mesure où il a été jugé définitivement que la société Deteknix n'était pas coupable de contrefaçon, elle-même ne peut être tenue solidairement responsable d'actes jugés non contrefaisants.
La société Kooistra conteste également les actes de concurrence déloyale et parasitaire soulignant l'absence de risque de confusion dans l'esprit du public.
Sur l'imitation de la marque,
Aux termes des dispositions de l'article 9 sur le « droit conféré par la marque de l'Union européenne » du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne:
« 2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque : (')
b)ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque; (')
3. Il peut notamment être interdit, en vertu du paragraphe 2 :
a) d'apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement ;
b) d'offrir les produits, de les mettre sur le marché ou de les détenir à ces fins sous le signe, ou d'offrir ou de fournir des services sous le signe ;
c) d'importer ou d'exporter les produits sous le signe ; (')
e) d'utiliser le signe dans les papiers d'affaires et la publicité ».
Par ailleurs, en vertu de l'ancien article L.713-2 du code de propriété intellectuelle, dans sa rédaction applicable à la cause:
« Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire :
a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que : "formule, façon, système, imitation, genre, méthode", ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement ;
b) La suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée. »
Et selon l'ancien article L. 713-3 du même code :
« Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public :
a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ;
b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement. »
Sur la comparaison des produits,
La cour constate que le signe XPOINTER contesté est exploité pour vendre des « pointers », soit des détecteurs de métaux, produits identiques à ceux visés en classe 9 par la marque XP METAL DETECTORS opposée.
Sur la comparaison des signes,
Le signe contesté ne constituant pas la reproduction à l'identique de la marque première qui lui est opposée, il convient de rechercher s'il n'existe pas entre les deux signes un risque de confusion, lequel comprend le risque d'association, qui doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce, le risque étant d'autant plus élevé que la marque antérieure possède un caractère distinctif important, soit intrinsèquement, soit en raison de sa connaissance par une partie significative du public concerné par les produits ou services en cause. Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par les marques, en tenant compte notamment des éléments distinctifs et dominants de celles-ci.
La jurisprudence européenne a, par ailleurs, précisé que dans le cadre de l'examen de l'existence d'un risque de confusion, l'appréciation de la similitude entre deux marques ne revient pas à prendre en considération uniquement un composant d'une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d'opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans leur ensemble, ce qui n'exclut pas que l'impression d'ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants.
Ainsi, si deux marques ont en commun un composant, il faut rechercher si ce composant est susceptible de dominer à lui seul l'image de la marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l'impression d'ensemble produite par celle-ci, ou s'il occupe une place distinctive autonome, sans pour autant être dominante.
Ce n'est donc que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l'appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l'élément dominant, la Cour de justice ajoutant, que « le fait qu'un élément ne soit pas négligeable ne signifie pas qu'il soit dominant, de même que le fait qu'un élément ne soit pas dominant n'implique nullement qu'il soit négligeable ».
La cour rappelle que le public pertinent à prendre en compte est le consommateur d'attention moyenne des produits ou services visés au dépôt dont le niveau d'attention varie en fonction de la catégorie de ces produits ou services.
En l'espèce, le public pertinent est constitué des professionnels ou des amateurs de détection de métaux, soit un public spécialisé, les détecteurs de métaux n'étant pas des produits de consommation courante et destinés « au grand public » contrairement à ce que soutient l'appelante, outre que le prix d'achat de ce type de matériel est relativement conséquent. Il en découle que ce public présente un niveau d'attention supérieur à la moyenne.
Il convient donc de comparer les signes en litige avant de procéder à l'appréciation du risque de confusion pouvant exister entre eux pour ce public.
Contrairement à ce que soutient l'intimée, les signes contestés à comparer avec la marque opposée sont les seuls termes XPOINTER tels que ci-dessus reproduits et non le signe « QUEST X POINTER » le signe QUEST apparaissant comme une marque ombrelle nettement dissociée du signe verbal XPOINTER désignant le produit en cause.
La marque européenne antérieure,
Les signes contestés,
Visuellement, les signes en cause commencent tous les deux par deux lettres XP et l'un des signes contestés comprend le terme « detectors » également présent dans la marque opposée.
Ils se distinguent cependant nettement en ce que les signes contestés associent la lettre X, représentée en plus grand caractère ou de manière identique, au terme POINTER mais se présentant comme un tout, la lettre O étant reproduite en gris ou en orange pour deux d'entre eux à la manière d'une cible, outre l'ajout spécifique pour l'une de la mention « hand-held metal detectors », et pour le troisième d'un ® à la fin de POINTER. La cour considère que le fait que le O soit figuré à la manière d'une cible ou que le P soit représenté dans la troisième version en majuscule, ne permet nullement de retenir que l'élément XP constituerait visuellement un élément autonome comme le soutient la société XPLORER, alors que, justement, dans les deux signes où le O est ainsi représenté, le X se distingue du reste de la séquence en étant figuré en nettement plus grand caractère, constituant une seule lettre d'attaque et que, dans le dernier, on lit distinctement le mot « pointer ». Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la société Xplorer, les lettres X et P dans les signes contestés ne sont nullement entremêlées.
La marque antérieure, quant à elle, comporte en outre un élément figuratif fort, occupant les deux tiers du signe, soit un logo composé des deux lettres majuscules X et P entremêlées dans une police d'écriture très spécifique en caractères plein colorés en rouge doublés d'un côté seulement d'un fin liseré noir, associé à un élément verbal reproduit en lettres majuscules noires, soit les deux lettres XP suivies de « METAL DETECTORS » sur deux lignes en caractères encore plus petits.
Ces signes sont en outre de longueurs différentes, soit un mot seul pour les signes contestés XPOINTER ou associé à la séquence « hand-held metal detectors » pour l'un d'entre eux, et les quatre termes dissociés XP / XP METAL DETECTORS pour la marque opposée.
Phonétiquement, si l'on retrouve en attaque les deux mêmes lettres XP, les deux signes se prononceront cependant très différemment, soit en trois temps pour les signes contestés, soit X-POIN-TER, le P se lisant nécessairement en lien avec les lettres OIN et non de manière dissociée XP- O- INTER, comme le plaide l'appelante ( et dix temps pour le signe avec la séquence verbale plus longue), alors que dans la marque opposée, les éléments verbaux seront prononcés en sept temps X ' P- ME-TAL- DE-TEC-TORS, le X et le P étant nécessairement prononcés de manière distincte.
Contrairement à ce que soutient la société XPLORER, le O, même représenté à la manière d'une cible, a vocation à être lu par le public pertinent qui connaît le terme « pointer » comme désignant un détecteur secondaire.
Conceptuellement, les signes contestés font référence au terme « pointer » soit un détecteur secondaire de métaux, terme connu du public concerné, associé au terme X, pouvant désigner la cible à rechercher comme en attestent les documents produits par la société Kooistra, alors que la marque opposée fait référence d'abord à la société XPLORER, le logo rouge reprenant les deux premières lettres de son nom, à son nom commercial et à son domaine d'activité « metal detectors », soit la détection des métaux.
Il se déduit de cette comparaison globale de très nettes différences entre les signes.
Cette analyse est renforcée par la prise en compte des éléments distinctifs et dominants des signes en cause.
Au sein de la marque opposée, le signe dominant et distinctif est l'association des deux lettres XP qui composent le logo, très présent visuellement comme déjà relevé, et qui est repris en dessous de ce dernier, élément sans signification particulière au regard des produits visés à l'enregistrement, sauf le rappel des deux premières lettres constituant le nom de la société exploitante et devenu son nom commercial, le cas échéant, les éléments « METAL DETECTORS » aisément compréhensibles, étant descriptifs des produits concernés.
Au sein des signes contestés, comme il a été vu, rien n'incite le public pertinent concerné à les percevoir comme la reprise séparée des lettres XP, puis d'une cible et enfin des lettres INTER, la cour rappelant que ce public pertinent perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails.
En outre, la société Kooistra démontre, sans que l'appelante apporte la preuve contraire, que dans le milieu de la détection, la lettre X est couramment associée à un marqueur d'emplacement, le X correspondant aux mouvements de croisement effectués avec les appareils de détection, et est également fréquemment utilisée pour désigner des détecteurs de métaux et constitue ainsi une référence largement partagée.
Dans ce contexte, comme justement retenu par les premiers juges, l'usage de la lettre X en tête du nom d'un produit ne peut créer en soi un lien avec la marque « XP METAL DETECTORS », nonobstant son caractère notoire mis en avant et ce, d'autant que le signe X est directement associé au terme « pointer », descriptif d'une partie des produits visés pour le public pertinent.
Il résulte, en conséquence, de la comparaison globale des signes en présence, qui implique une certaine interdépendance entre les facteurs pris en compte, au vu de l'ensemble des critères pertinents au cas d'espèce, tenant compte de l'impression d'ensemble très différente produite par les signes, de leurs éléments distinctifs et dominants et, l'identité des produits visés, qu'il n'existe pas de risque de confusion ente les signes contestés et la marque antérieure XP METAL DETECTORS.
Le jugement déféré doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Xplorer présentées au titre de la contrefaçon de sa marque semi-figurative de l'Union européenne XP METAL DETECTORS n°4900155.
Sur l'atteinte à la renommée de la marque
Aux termes des dispositions de l'article 9 sur le « droit conféré par la marque de l'Union européenne » du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne :
« 2. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque : (')
c) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels il est utilisé soient identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d'une renommée dans l'Union et que l'usage de ce signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque de l'Union européenne ou leur porte préjudice. »
Puis, en vertu de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle dans sa version applicable aux faits de la cause, « la reproduction ou l'imitation d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou cette imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière. Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables à la reproduction ou l'imitation d'une marque notoirement connue au sens de l'article 6 bis de la Convention de [Localité 6] pour la protection de la propriété industrielle précitée. »
Une marque est considérée comme renommée lorsqu'elle est connue d'une fraction du public pertinent et qu'elle exerce un pouvoir d'attraction propre indépendant des produits ou services désignés, ces conditions devant être réunies au moment des atteintes alléguées. Sont notamment pris en compte l'ancienneté de la marque, la part de marché occupée par la marque, l'intensité de son exploitation, son succès commercial, l'étendue géographique de son usage et l'importance du budget publicitaire qui lui est consacré, son référencement dans la presse et sur internet, l'existence de sondages ou enquêtes de notoriété attestant de sa connaissance par le consommateur, des opérations de partenariat ou de mécénat, ou encore éventuellement, de précédentes décisions de justice. Ces critères ne sont pas cumulatifs et le titulaire d'une marque enregistrée peut, aux fins d'établir la renommée de celle-ci, se prévaloir de preuves de son utilisation sous une forme différente en tant que partie d'une autre marque enregistrée et renommée, à condition que le public concerné continue à percevoir les produits en cause comme provenant de la même entreprise. (CJCE 6 octobre 2009, Pago International/Tiromilchregistrierte genossenschaft- C301/07).
Dès lors que la renommée d'une marque communautaire antérieure est établie sur une partie substantielle du territoire de l'Union, pouvant le cas échéant coïncider avec le territoire d'un seul Etat membre, il y a lieu de considérer que cette marque jouit d'une renommée dans l'Union.
Il est enfin acquis que si la renommée d'une marque antérieure doit être établie à la date de dépôt de la demande de marque contestée, les documents portant une date postérieure à cette date ne sauraient toutefois être privés de valeur probante s'ils permettent de tirer des conclusions sur la situation telle qu'elle se présentait à cette même date. Il ne saurait être exclu a priori qu'un document établi un certain temps avant ou après cette date puisse contenir des indications utiles compte tenu du fait que la renommée d'une marque s'acquiert, en général, progressivement (TUE, 16 décembre 2010, affaires n° T-345/08 et T-357/08 -point 52).
A titre liminaire, la cour rappelle que l'ancien article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle, antérieur à l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 et applicable aux faits dénoncés au regard de leur date, sanctionne spécifiquement la reproduction ou l'imitation de la marque renommée, comme actes engageant la responsabilité civile de leur auteur.
Au cas présent, il appartient d'abord à la société Xplorer de démontrer que sa marque est connue par une partie significative du public concerné par les produits qu'elle désigne, soit un public spécialisé constitué des professionnels ou amateurs dans le milieu de la détection de métaux, puis que des atteintes ont été commises à l'encontre de celle-ci.
A titre liminaire, contrairement à ce que soutient la société Kooistra, la société Xplorer ne conteste pas le dépôt et l'usage de sa marque Xpointer mais, uniquement, son usage sous une forme spécifique mettant en avant les lettres XP selon elle, ainsi qu'il résulterait des constats qu'elle a fait établir en septembre 2017, avril 2018 et novembre 2019. En outre, contrairement à ce que soutient également l'intimée, le seul fait que certaines des pièces produites afin d'attester de la marque sont postérieures aux faits dénoncés ne peut suffire à les juger non probantes, puisque, comme il a été rappelé, la renommée d'une marque s'acquiert, en général, progressivement.
Pour justifier de la renommée de sa marque, la société Xplorer verse aux débats :
- un extrait du site Wikipedia décrivant le domaine d'activité de la société Xplorer ou XP Metal Detectors, mentionnant qu'elle est « la seule entreprise française spécialisée dans le domaine de détection de métaux avec du matériel conçu par des ingénieurs français et fabriqués en France », page existant depuis 2009,
- un extrait du site internet de la Maison de la détection, distributeur en France d'appareils de détection de métaux et notamment ceux de la société Xplorer, ( dans le cadre d'un procès-verbal de constat réalisé le 22 novembre 2018), selon lequel « le fabriquant français XP est sans conteste la marque de référence des détecteurs de métaux haut de gamme. Pionniers dans de nombreux domaines, les détecteurs de métaux XP disposent d'une excellente réputation auprès des utilisateurs . ( ') XP a définitivement marqué au fer rouge l'histoire de la détection en créant le XP DEUS »,
- deux extraits internet (et un extrait de la préface) d'un guide publié en 2013 puis en 2019 sur le détecteur de métaux DEUS de la société Xplorer mettant en avant sur la première page la marque semi-figurative, rédigé par [L] [K], spécialiste de la matière,
- des extraits de son site internet ventant ses produits ainsi que les ouvrages mentionnés ci-dessus,
- un article extrait du Journal des entreprises daté du 13 janvier 2020 intitulé « Xplorer s'engage sur la durabilité de ses détecteurs de métaux», et selon lequel « en vingt ans, Xplorer est devenu l'un des leaders mondiaux du marché des détecteurs de métaux de loisirs (') Commercialisés sous la marque XP Metal Detectors, ses produits sont devenus des références à travers le monde, 85% des ventes se faisant à l'export. Si la société cible la clientèle de particuliers, elle équipe aussi des archéologues et plusieurs unités de l'armée et de la police en Inde. »,
- des publicités de ses produits, sur lesquels sa marque semi-figurative est reproduite, extraites de deux magazines italiens « Metal Detector », datés de septembre/octobre 2003 et septembre/octobre 2005, cinq magazines britanniques « Treasure Hunting » datés de janvier 2004, novembre 2004, juillet 2005, mai 2007 et avril 2010, un magazine espagnol « D&M » daté de septembre/octobre 2013 et dans trois numéros du magazine français « Détections Passion » en mars 2011, février 2012 et décembre 2013, où elle se présente comme la première marque française de détecteurs de métaux,
- une attestation de son directeur administratif et financier faisant état de charges afférentes aux investissements consentis pour la marque DEUS s'agissant de la publicité française, européenne et internationale ainsi que pour son site internet et les réseaux sociaux à hauteur des de 175.421 € en 2018, 299.569 € en 2019 et de 200.326 € en 2020 (lissé sur 10 mois), ainsi que l'emploi de 4 personnes pour la communication et le développement des marques DEUS et XP, outre, en 2019 et 2020 la réalisation de films publicitaires à hauteur respectivement de 65.000 et 48.000€, sans qu'il soit précisé si ces dépenses ont été ou non prises en compte au titre des investissements annoncés précédemment,
- l'organisation d'un évènement en 2016 en Grande-Bretagne « Rallye XP » réunissant plus de 1000 participants et associant archéologues et particuliers pour la recherche de vestiges,
- un extrait d'une publication du 8 mars 2012 sur le blog www.blog.metaldetector.com dans lequel il est fait mention qu'elle a été récompensée comme étant la meilleure marque de détecteurs de métaux en 2011 par le magazine espagnol « Detection et Monedas »,
- l'usage de son matériel dans le cadre d'émissions ou séries organisées autour de la détection de métaux, diffusés depuis 2014,
- le co-sponsoring, avec plusieurs autres sociétés, d'un évènement intitulé UK Rallye 2019.
Ces éléments, s'ils démontrent que la société Xplorer engage des frais non négligeables pour promouvoir ses marques et ses produits et qu'elle est connue dans le monde de la détection des métaux notamment pour la qualité de ses produits, sont cependant insuffisants à caractériser la renommée de sa marque XP METAL DETECTORS.
En effet, tant la page Wikipédia que les extraits de son site internet ou de ceux de ses partenaires commerciaux (et notamment ses revendeurs) ne peuvent être considérés comme suffisamment probants étant nécessairement laudatifs pour vanter ses produits ainsi mis en vente. Si, en outre deux livres ont été publiés par un passionné du domaine, mettant en avant la qualité et la solidité des produits DEUS proposés à la vente par XP Metal Detectors, le même expert a publié d'autres ouvrages dans le même domaine et, notamment, trois concernant la société Minelab décrite comme « un leader reconnu dans la détection des métaux ». Dans les séries ou émissions mises en avant, les rares clichés communiqués, s'ils attestent de la présence de détecteurs de métaux, ne permettent nullement d'identifier la présence de la marque revendiquée. De même, les quelques extraits de publicités parues dans des revues italienne, espagnole, britannique ou française, ou l'organisation d'un évènement et le sponsoring d'un autre, sont insuffisants à asseoir cette renommée, la cour n'étant pas en mesure d'apprécier la part de marché réellement détenue par la marque sur le marché européen de la détection de métaux, l'intensité de son usage ni, davantage, le degré de connaissance de la marque semi-figurative qu'elle oppose auprès du public concerné. De même, le fait qu'elle soit présentée dans un article comme un des leaders mondiaux du secteur ne permet pas de caractériser la renommée de sa marque semi-figurative, en l'absence de toute autre donnée objective venant conforter cette analyse, l'attestation de son directeur financier, au demeurant non corroborée par un professionnel du chiffre, faisant état de dépenses de communication pour la marque DEUS et ne mentionnant les deux marques XP et DEUS, que pour la réalisation de films publicitaires.
Ainsi, la société Xplorer ne justifie pas que sa marque semi-figurative communautaire XP METAL DETECTORS n°4900155 jouit d'une renommée sur une partie substantielle du territoire européen auprès d'une fraction significative du public pertinent et qu'elle exerce un pouvoir d'attraction propre indépendant des produits désignés, à la date des faits incriminés constatés en septembre 2017.
Il convient en conséquence de débouter la société Xplorer des demandes formulées au titre des actes ayant porté atteinte à la renommée de sa marque semi-figurative communautaire XP METAL DETECTORS n° 4900155, le jugement étant complété sur ce point.
Sur les atteintes aux marques verbales communautaires et françaises DEUS,
La société Xplorer rappelle d'abord que ses marques DEUS jouissent d'une renommée notamment sur le territoire européen au regard de l'intensité de leur usage et des dépenses marketing et de communication consenties. Elle dénonce la représentation de son module de réception radio, figurant en outre sa marque, dans deux publicités destinées à vendre des casques de la société Deteknix. Contestant les moyens opposés, elle soutient que le magazine dans lequel la publicité litigieuse est parue « the Searcher » est accessible au public français et que les actes litigieux, contrairement à ce qui a été retenu par le tribunal, ont été constatés après le dépôt de sa marque européenne « DEUS ». Elle estime en conséquence que c'est sans juste motif que sa marque a été reproduite, les usages litigieux ne constituant pas selon elle des références nécessaires et laissant suggérer au contraire faussement par la société Kooistra une collaboration entre leurs deux marques, créant ainsi un risque de confusion.
Elle retient que ces faits sont également sanctionnables sur le terrain de la concurrence déloyale et parasitaire s'agissant de l'atteinte à la renommée de sa marque, la société Kooistra ayant en outre utilisé de façon déloyale une publicité de son produit WS4 DEUS pour son propre compte, et adopté un comportement parasitaire destiné à tirer indûment profit des investissements consacrés à sa marque de renommée DEUS et sollicite à ce titre une somme de 50.000€ en réparation du préjudice subi.
Concernant les marques DEUS, la société Kooistra conteste également l'imputabilité des faits en cause, rappelant qu'en première instance, son adversaire les imputait à la société Deteknix. Elle conteste en tout état de cause les faits de contrefaçon rappelant d'abord que les lecteurs de la revue en cause sont constitués d'un public d'expert et qu'il n'a été fait usage de la marque DEUS que comme référence nécessaire pour proposer à la vente un casque sans fil compatible, comme le font d'autres concurrents. Elle conteste également la notoriété des marques opposées, estimant notamment que la preuve de l'intensité de l'usage au sein de l'UE fait défaut.
Elle souligne que les publications faites dans la revue The Searcher ne lui sont pas imputables.
Elle ajoute que la marque de l'UE DEUS déposée le 24 mai 2018 est postérieure à la publication du magazine SEARCHER opposée du mois d'avril 2017.
Elle développe à titre subsidiaire, les mêmes moyens et arguments que ceux opposés à l'encontre des demandes fondées sur la marque semi-figurative XP METAL DETECTORS.
Sur ce, la cour constate que, dans le dispositif de ses demandes, la société Xplorer a formulé de manière distincte à la fois une demande de dommages et intérêts pour des actes de contrefaçon commis à l'encontre de ses marques DEUS, reproduction illicite de sa marque et, également, une demande dénonçant des actes de concurrence déloyale et parasitaire à son encontre reprochant à la société Kooistra d'avoir porté atteinte à la renommée de sa marque DEUS, sur le fondement de l'ancien article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle.
Cependant, dans le corps de ses écritures, elle développe essentiellement son argumentation sur le fondement de l'atteinte à la renommée de ses marques.
Sur la reproduction illicite de la marque « DEUS »
En vertu de l'article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction applicable à la cause « sont interdits, sauf autorisation du propriétaire :
a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que « formule, façon, système, imitation, genre, méthode » ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement ;
b) La suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée. »
Par ailleurs, selon l'article L. 713-6 du même code, « L'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire comme : (')
b) Référence nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée, à condition qu'il n'y ait pas de confusion dans leur origine ; (')
Toutefois, si cette utilisation porte atteinte à ses droits, le titulaire de l'enregistrement peut demander qu'elle soit limitée ou interdite. »
Des dispositions identiques sont instituées par l'article 14 de la Directive UE 2015/2436 du 16 décembre 2015 selon laquelle « Une marque ne permet pas à son titulaire d'interdire à un tiers l'usage, dans la vie des affaires: (')
a) de la marque pour désigner ou mentionner des produits ou des services comme étant ceux du titulaire de cette marque, en particulier lorsque cet usage de la marque est nécessaire pour indiquer la destination d'un produit ou d'un service, notamment en tant qu'accessoire ou pièce détachée.
2. Le paragraphe 1 ne s'applique que lorsque l'usage par le tiers est fait conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale. (') ».
Interprétant les dispositions identiques de la directive 89/104/CEE du Conseil du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, la Cour de justice de la Communauté européenne (dans un arrêt du 17 mars 2005, Gillette, C-228/03) a notamment dit pour droit que la question est de savoir si l'utilisation de la marque par un tiers est nécessaire pour indiquer la destination du produit qu'il commercialise, c'est-à-dire si, en tenant compte de la nature du public auquel est destiné ce produit, cet usage constitue en pratique le seul moyen pour fournir au public une information compréhensible et complète sur cette destination afin de préserver le système de concurrence non faussé sur le marché de ce produit (dispositif, point 1).
Elle a également précisé (dispositif, point 2) que la condition d'« usage honnête » est une obligation de loyauté à l'égard des intérêts légitimes du titulaire de la marque, qui n'est pas respectée, notamment, lorsque l'usage est fait de telle sorte qu'il peut donner à penser qu'il existe un lien commercial entre le tiers et le titulaire de la marque, qu'il affecte la valeur de celle-ci en tirant indument profit de son caractère distinctif ou de sa renommée, la discrédite ou la dénigre, ou que le tiers présente son produit comme une imitation ou reproduction du produit revêtu de la marque.
En l'espèce, la société Xplorer dénonce l'utilisation dans deux publicités parues l'une dans la revue anglaise The Searcher de mai 2017 et l'autre, sur le site internet d'un revendeur de métaux français (selon constat du 22 novembre 2018), la reproduction sans son autorisation du casque et de l'oreillette sans fil de son produit XP WS4 DEUS, sur lesquels figurent son logotype DEUS pour promouvoir un casque de la société Deteknix, également commercialisé par la société Kooistra.
Sur ce, il n'est pas contesté que sur le site marchand français Maison de la Détection figure une page consacrée aux casques sur laquelle est proposé à la vente un produit intitulé « casque Quest HD pour oreillette XP DEUS WSA » ( Quest étant la nouvelle dénomination de la société Deteknix) associé à trois clichés photographiques dont l'un intitulé QUEST [Localité 4] pour casque XP W54 représentant un sac noir reproduisant le nom Deteknix, associé à un casque reproduisant trois fois l'oreillette ou écouteur DEUS de la société Xplorer, sur lequel cette société mentionne sa marque éponyme.
Cependant, comme l'a retenu le tribunal, la reproduction de l'image de cette oreillette DEUS en trois exemplaires s'éloignant progressivement de l'emplacement du casque dans lequel elle est destinée à être fixée, de même que la transparence croissante des trois images à mesure que l'écouteur DEUS s'éloigne du casque, traduit un mouvement et indique ainsi l'usage de cet objet en lien avec le casque compatible vendu, soit la destination du produit au sens des textes précités, comme au demeurant l'indique clairement la description du produit telle que mentionnée ci-dessus.
Ainsi, cette image, de même que le reste de la page internet incriminée, ou la représentation en couleur orange du nom XP W54, couleur également utilisée pour représenter le Q de la marque QUEST, n'entretiennent aucune confusion auprès du public concerné entre les produits, marques ou sociétés en cause, ni même ne peuvent laisser entendre l'existence d'une collaboration entre ces marques ou sociétés, la publicité ne prétendant pas que la société Quest propose de vendre l'écouteur DEUS, ni aucun produit équivalent. A cet égard, le descriptif du produit mentionne en termes clairs et non équivoques que ce produit « est uniquement destiné aux possesseurs de XP DEUS équipés d'un casque sans fil WS4, il permet de fixer l'oreillette du WS4 et de bénéficier de tout le confort d'un casque intégral. (') Montage très simple : détachez l'oreillette WS4 et glisser la sur l'arceau QUEST ». La transparence progressive des représentations de cet écouteur confirme qu'il n'est pas le produit vendu et qu'il n'est représenté que pour préciser son usage et sa destination.
Par ailleurs, à supposer que la publicité en cause ait été conçue à partir d'une photographie dont se sert la société Xplorer pour commercialiser ses produits, ce fait ne peut suffire à caractériser une atteinte à un droit ou un usage déloyal, s'agissant d'une photographie assez banale reproduisant seulement l'oreillette, la société Xplorer ne justifiant pas au demeurant avoir engagé des dépenses particulières pour sa conception. Ainsi, le simple usage de cette photographie libre de droits d'auteur, présente sur des supports commerciaux également librement accessibles, ne peut caractériser un quelconque comportement fautif, étant au demeurant le seul moyen (s'agissant d'une image) de fournir au public une information compréhensible et complète sur la destination et l'usage du produit vendu.
C'est en conséquence, à juste titre, que le tribunal a retenu qu'il caractérisait un usage honnête de la marque pour désigner le produit comme étant celui du titulaire de celle-ci, de sorte que les faits de contrefaçon allégués ne sont pas établis.
Au surplus, s'il n'est pas contesté que la société Kooistra est effectivement le revendeur des produits Deteknix/Quest aux Pays Bas, il convient de s'interroger sur l'imputabilité des faits en cause à son encontre s'agissant manifestement d'une publicité effectuée au profit de la société américaine Deteknix /Quest, qui n'est plus dans la cause et à l'encontre de laquelle le tribunal, par un jugement définitif, n'a retenu aucun des faits de contrefaçon ou d'atteinte allégués, publicité en outre parue sur le site internet français d'une société française « Maison de la Détection », qui n'est pas davantage mise en cause dans la présente instance. Et, contrairement à ce que soutient la société Xplorer, si le juge de la mise en état a effectivement retenu la compétence des tribunaux français au regard des faits qu'elle dénonçait, il ne s'est nullement prononcé sur leur imputabilité à chacune des sociétés alors en cause, de sorte qu'aucune autorité de la chose jugée ne peut être revendiquée dans ce cadre.
La même analyse doit être faite s'agissant de la publicité publiée dans le magazine The Searcher de mai 2017 conçue de la même manière avec la reproduction en trois exemplaires de l'oreillette DEUS, avec un même effet de mouvement et sur laquelle est représentée en outre le porte-écouteur de la société Xplorer en haut à droite, avec une flèche indiquant que cet écouteur peut être retiré pour être logé sur le casque mis en avant dans la publicité, présenté en grande taille dans l'image.
Par ailleurs, si la publicité fait état de la marque Deteknix, précédée de la mention « by » qui attribue une paternité, rien n'incite le public concerné à penser que le produit vendu est l'oreillette seule ou associée au casque, ni même qu'il existerait un lien entre les marques ou les sociétés, et ce alors qu'une mention précise « compatible with XP DEUS WS4 Audio Module », et qu'une autre mention retranscrite en plus petits caractères, rappelle sans ambiguïté que le modèle XP DEUS WS4 est une marque de la société Xplorer.
Au surplus, comme il a déjà été dit, s'il n'est pas contesté que la société Kooistra est effectivement le revendeur des produits Deteknix/Quest aux Pays Bas, il convient de s'interroger sur l'imputabilité des faits en cause à cette société s'agissant manifestement d'une publicité effectuée au profit de la société Deteknix /Quest, qui n'est plus dans la cause et à l'encontre de laquelle, le tribunal par un jugement définitif n'a retenu aucun des faits de contrefaçon ou d'atteinte alléguée, parue dans un magazine anglais, à destination manifestement du public anglais, à une date (mai 2017) où la marque DEUS n'avait pas été déposée au niveau européen.
C'est en conséquence à juste titre que le tribunal a débouté la société Xplorer de ses demandes en contrefaçon des marques verbale et européenne DEUS, le jugement dont appel étant confirmé sur ce point.
Sur l'atteinte à la renommée de la marque « DEUS »
Pour justifier de la renommée de sa marque DEUS française et européenne, la société Xplorer met en avant les mêmes pièces que celles invoquées au titre de sa marque XP Metal Detectors, à l'exception de celles strictement relatives à cette dernière et en particulier :
- un extrait du site internet de la Maison de la détection, distributeur en France d'appareils de détection de métaux et notamment ceux de la société Xplorer, ( dans le cadre d'un procès-verbal de constat réalisé le 22 novembre 2018), selon lequel « le fabriquant français XP est sans conteste la marque de référence des détecteurs de métaux haut de gamme. Pionniers dans de nombreux domaines, les détecteurs de métaux XP disposent d'une excellente réputation auprès des utilisateurs . ( ') XP a définitivement marqué au fer rouge l'histoire de la détection en créant le XP DEUS »
- deux extraits internet (et un extrait de la préface) d'un guide publié en 2013 puis en 2019 sur le détecteur de métaux DEUS de la société Xplorer mettant en avant sur la première page la marque semi-figurative, rédigé par [L] [K], spécialiste de la matière,
- des extraits de son site internet ventant ses produits ainsi que les ouvrages mentionnés ci-dessus,
- un article extrait du Journal des entreprises daté du 13 janvier 2020 intitulé « Xplorer s'engage sur la durabilité de détecteurs de métaux», et selon lequel « en vingt ans, Xplorer est devenu l'un des leaders mondiaux du marché des détecteurs de métaux de loisirs (') Commercialisés sous la marque XP Metal Detectors, ses produits sont devenus des références à travers le monde, 85% des ventes se faisant à l'export. Si la société cible la clientèle de particuliers, elle équipe aussi des archéologues et plusieurs unités de l'armée et de la police en Inde »,
- des publicités de ses produits, sur lesquels sa marque DEUS est reproduite, extraites d'un magazine britannique « Treasure Hunting » daté d'avril 2010, d'un magazine espagnol « D&M » daté de septembre/octobre 2013 et dans trois numéros du magazine français « Détections Passion » en mars 2011, février 2012 et décembre 2013,
- une attestation de son directeur administratif et financier faisant état de charges afférentes aux investissements consentis pour la marque DEUS s'agissant de la publicité française, européenne et internationale ainsi que pour son site internet et les réseaux sociaux à hauteur des de 175.421€ en 2018, 299.569 € en 2019 et de 200.326 € en 2020 (lissé sur 10 mois), ainsi que l'emploi de 4 personnes pour la communication et le développement des marques DEUS et XP, outre, en 2019 et 2020, la réalisation de films publicitaires à hauteur respectivement de 65.000 et 48.000 €,
- l'organisation d'un évènement en 2016 en Grande-Bretagne « Rallye XP » réunissant plus de 1000 participants et associant archéologues et particuliers pour la recherche de vestiges,
- un extrait d'une publication du 8 mars 2012 sur le blog www.blog.metaldetector.com dans lequel il est fait mention qu'elle a été récompensée comme étant la meilleure marque de détecteurs de métaux en 2011 par le magazine espagnol « Detection et Monedas » pour son modèle DEUS,
- l'usage de son matériel dans le cadre d'émissions ou séries organisées autour de la détection de métaux, diffusés depuis 2014 ,
- le co-sponsoring, avec plusieurs autres sociétés, d'un évènement intitulé UK Rallye 2019.
La cour constate d'abord que certains des éléments mis en avant ne citent pas spécifiquement la marque DEUS. En outre, si, comme déjà relevé pour la marque semi-figurative XP Metal Detectors, ces pièces démontrent que la société Xplorer engage des frais non négligeables pour promouvoir ses marques et ses produits et qu'elle est connue dans le monde de la détection des métaux pour la qualité de ses produits, elles sont cependant insuffisantes, à elles seules, à caractériser la renommée de ses marques françaises et européennes DEUS.
Ainsi, les extraits de son site internet ou de ceux de ses partenaires commerciaux (et notamment ses revendeurs) ne peuvent être considérés comme suffisamment probants étant nécessairement laudatifs pour vanter ses produits ainsi mis en vente. Si, en outre deux livres ont été publiés par un passionné du domaine, mettant en avant la qualité et la solidité des produits DEUS proposés à la vente par XP Metal Detectors, le même expert a publié d'autres ouvrages dans le même domaine et, notamment, trois concernant la société Minelab décrite comme « un leader reconnu dans la détection des métaux ». Dans les séries ou émissions mises en avant, les rares clichés communiqués, s'ils attestent de la présence de détecteurs de métaux, ne permettent nullement d'identifier la présence des marques revendiquées. De même, les quelques extraits de publicités parues dans des revues espagnole, britannique ou française, ou l'organisation d'un évènement et le sponsoring d'un autre, sont insuffisants à asseoir cette renommée, la cour n'étant pas en mesure d'apprécier la part de marché réellement détenue par la marque sur le marché européen de la détection de métaux, l'intensité de son usage ni, davantage, le degré de connaissance de la marque semi-figurative qu'elle oppose auprès du public concerné, dans un marché très concurrentiel, l'article de presse produit par la société Xplorer sur son activité mentionnant qu'elle ne communique pas son chiffre d'affaires, et que « sur ce segment du haut de gamme, il n'existe qu'une poignée de fabricants dans le monde, de taille bien supérieure à la PME haute garonnaise et à ses 48 salariés ». De même, le fait qu'elle soit présentée dans un article comme un des leaders mondiaux du secteur ne permet pas de caractériser la renommée de ses deux marques verbales DEUS en l'absence de toute autre donnée objective venant conforter cette analyse, l'attestation de son directeur financier, au demeurant non corroborée par un professionnel du chiffre, faisant état de dépenses de communication pour la marque « DEUS » tout en visant, ensuite, la marque XP pour la réalisation de films publicitaires.
Ainsi, la société Xplorer ne justifie pas que ses deux marques verbales DEUS N° 3 582 785 et 17 907 004 jouissent d'une renommée sur une partie substantielle du territoire européen auprès d'une fraction significative du public pertinent et qu'elles exercent un pouvoir d'attraction propre indépendant des produits désignés, à la date des faits incriminés soit à compter de 2017 jusqu'en avril 2018, et ce d'autant que la marque verbale DEUS européenne n'a été déposée que le 24 mai 2018, soit postérieurement aux faits dénoncés.
Ces faits ne peuvent davantage être qualifiés d'actes de concurrence déloyale et parasitaire, le simple fait de reproduire une photographie d'un produit, dans les conditions déjà décrites, ne pouvant s'analyser en un « vol de documentation commerciale » et ni ne permettant d'établir la volonté de la société Kooistra, dont il n'est pas démontré qu'elle serait le concepteur de cette publicité, de se placer dans le sillage de la société Xplorer en profitant indûment de ses investissements et de sa notoriété.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire et de le compléter sur le rejet des demandes au titre de l'atteinte à la renommée des marques DEUS.
Sur les autres demandes
La société Xplorer, succombant, sera condamnée aux dépens d'appel, comprenant les dépens de l'incident, qui pourront être recouvrés par Maître Julien Lacker, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
Enfin, l'équité et la situation des parties commandent de condamner la société Xplorer à verser à la société Kooistra une somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute la société Xplorer de ses demandes au titre des atteintes à la renommée de la marque semi-figurative de l'Union européenne XP METAL DETECTORS n° 4 900 155,
Déboute la société Xplorer de ses demandes au titre des atteintes à la renommée des marques verbales française et de l'Union européenne DEUS n° 3 582 785 et 17 907 004,
Condamne la société Xplorer aux dépens d'appel et aux dépens de l'incident, qui pourront être recouvrés par Maître Julien Lacker, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Condamne la société Xplorer à verser à la société Kooistra Metal Detectors BV une somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.