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Décisions

CA Versailles, ch. civ. 1-2, 20 février 2024, n° 22/03215

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bnp Paribas Personal Finance (SA)

Défendeur :

Société Ic Groupe (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M Javelas

Conseillers :

M. Pinoy, Mme Thivellier

Avocats :

Me Karm, Me Mendes

TP d'Antony; du 9 nov. 2021; N° 11190085…

9 novembre 2021

Par contrat du 5 mars 2018, M. [M] a conclu avec la société IC Groupe un contrat relatif à la fourniture, la pose et l'installation de douze panneaux photovoltaïques, d'un kit batterie et d'un chauffe-eau thermodynamique pour un montant total de 24 500 euros TTC.

Par contrat du 5 mars 2018, M. [M] a souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance, un crédit affecté d'un montant de 24 500 euros, au taux débiteur de 4,70% remboursable en 120 échéances d'un montant de 261, 34 euros.

Par actes de commissaire de justice délivrés les 23 et 30 octobre 2019, M. [M] a assigné la société IC Groupe et la société BNP Paribas Personal Finance devant le juge des contentieux de protection du tribunal d'Antony aux fins d'obtenir l'annulation du contrat de vente et de crédit affecté, ainsi que des dommages et intérêts.

Par jugement contradictoire du 9 novembre 2021, le tribunal de proximité d'Antony a :

- déclaré recevable la demande de nullité du contrat de vente et celle subséquente en nullité du contrat de crédit formées par M. [M],

- prononcé la nullité du bon de commande du 5 mars 2018 liant M. [M] et la société IC Groupe,

- prononcé la nullité du contrat de crédit du 5 mars 2018 liant M. [M] et la société BNP Personal Finance,

- condamné M. [M] à verser à la société BNP Personal Finance la somme de 23 045,91 euros,

- débouté M. [M] de l'ensemble de ses demandes de dommages et intérêts,

- débouté la société BNP Personal Finance et la SELAS Alliance de leur demande respective au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la société BNP Personal Finance à verser à M. [M] la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BNP Personal Finance et la SELAS Alliance aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 9 mai 2022, M. [M] a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions signifiées le 20 septembre 2023, M. [M], appelant, demande à la cour de :

- déclarer recevable l'appel de M. [M],

- confirmé le jugement rendu le 9 novembre 2021 en ce qu'il a :

* déclaré recevable la demande de nullité du contrat de vente et celle subséquente en nullité du contrat de crédit formées par M. [M],

* prononcé la nullité du bon de commande du 5 mars 2018 liant M. [M] et la société IC Groupe,

*prononcé la nullité du contrat de crédit du 5 mars 2018 liant M. [M] et la société BNP Personal Finance,

*condamné la société BNP Personal Finance à verser à M. [M] la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

* condamné la société BNP Personal Finance et la SELAS Alliance aux dépens,

- réformer le jugement rendu le 9 novembre 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Antony pour le surplus, à savoir, en ce qu'il a :

* condamné M. [M] à verser à la société BNP Personal Finance la somme de 23 045,91 euros,

* débouté M. [M] de l'ensemble de ses demandes de dommages et intérêts,

* ordonner l'exécution provisoire.

Statuant à nouveau :

- débouter la société BNP Personal Finance et la SELAS Alliance de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- constater que la société IC Groupe et la société BNP Personal Finance ont commis des fautes engageant leur responsabilité à l'égard de M. [M],

Que la société BNP Personal Finance ne pourra se prévaloir des effets de l'annulation à l'égard des emprunteurs,

Qu'elle devra réparer les préjudices subis

En conséquence,

- ordonner le remboursement par la société BNP Personal Finance des sommes qui lui ont été versées par M. [M] au jour de la décision à intervenir, soit la somme de 1 454,09 euros,

- condamner la société BNP Personal Finance à verser à M. [M] la somme de :

* 42 000 euros au titre du préjudice financier et du trouble de jouissance,

* 5 000 euros au titre du préjudice moral,

En tout état de cause :

- condamner la société BNP Personal Finance à régler à M. [M] la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que des entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 28 juin 2023, la société BNP Personal Finance, intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Antony le 9 novembre 2021 en ce qu'il a prononcé la nullité du bon de commande du 5 mars 2018 liant M. [M] et la société IC Groupe,

En ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de crédit du 5 mars 2018 liant M. [M] et la société BNP Personal Finance,

En ce qu'il a limité la condamnation de M. [M] à payer à la société BNP Personal Finance la somme de 23 045,91 euros,

En ce qu'il a débouté la société BNP Personal Finance du surplus de ses prétentions, en ce compris sa demande visant a la condamnation de M. [M] à lui payer la somme de 27173,93 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 4,70 % a compter du 14 octobre 2019,

En ce qu'il débouté la société BNP Personal Finance de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En ce qu'il a condamné la société BNP Personal Finance à payer à M. [M] une somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En ce qu'il a condamné la société BNP Personal Finance à payer les dépens.

Subsidiairement, en cas de nullité du contrat de crédit, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [M] à restituer le capital prêté,

En tout état de cause, confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par M. [M],

Statuant à nouveau,

- A titre principal,

*déclarer irrecevable la demande de M. [M] en nullité du contrat conclu avec la société IC Groupe, déclarer par voie de conséquence, irrecevable la demande de la société IC Groupe en nullité du contrat de crédit conclu avec la société BNP Personal Finance, dire et juger, à tout le moins, que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées,

* débouter M. [M] de sa demande en nullité du contrat conclu avec la société IC Groupe, ainsi que de sa demande en nullité du contrat de crédit conclu avec la société BNP Personal Finance et de sa demande en restitution des mensualités réglées ;

En tout état de cause,

* condamner M. [M] à payer à la société BNP Personal Finance la somme de 27 173,93 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,70 % l'an sur la somme de 25 565,90 euros à compter du 14/10/2019 et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit,

Subsidiairement, en cas de nullité des contrats,

*déclarer irrecevable la demande de M. [M] visant à la décharge de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins l'en débouter,

* condamner, en conséquence, M. [M] à régler à la société BNP Personal Finance la somme de 24 500 euros en restitution du capital prêté avec intérêts au taux légal à compter du 12/04/2018, date du déblocage,

En tout état de cause,

* déclarer irrecevables la demande de M. [M] visant à la privation de la créance de la société BNP Personal Finance, ainsi que sa demande de dommages et intérêts, A tout le moins, le débouter de ses demandes,

- Très subsidiairement,

* limiter la réparation qui serait due par la société BNP Personal Finance, eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice,

*limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. [M] d'en justifier,

En cas de réparation par voie de dommages et intérêts, limiter la réparation à hauteur du préjudice subi, et dire et juger que M. [M] reste tenu de restituer l'entier capital à hauteur de 24 500 euros,

- A titre infiniment subsidiaire, en cas de privation de créance de la banque,

* condamner M. [M] à payer à la société BNP Personal Finance la somme de 24 500 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de sa légèreté blâmable,

*enjoindre à M. [M], de restituer, à ses frais, le matériel installé chez lui à la SELAS Alliance, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société IC Groupe, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de l'arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité,

* dire et juger qu'à défaut de restitution, il restera tenu du remboursement du capital prêté,

Subsidiairement, priver M. [M] de sa créance en restitution des sommes réglées du fait de sa légèreté blâmable,

- débouter M. [M] de toutes autres demandes, fins et conclusions,

- ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

En tout état de cause, condamner M. [M] au paiement à la société BNP Personal Finance de la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel de l'article 700 du code de procédure civile, le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la SCP Pichard Devemy Karm,

La clôture de l'instruction a été prononcée le 21 septembre 2023.

La SELAS ALLIANCE, représentée par Me [U], intimée ès qualités de liquidateur judiciaire de la société IC Groupe, n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant lui ont été signifiées à personne morale par actes de commissaire de justice des 9 juin et 30 janvier 2023. Les conclusions de la société BNP Paribas Personal Finance, co-intimée, lui ont été signifiées à personne morale par acte de commissaire de justice du 22 novembre 2022.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

La société SELAS ALLIANCE ayant été citée à personne morale, la cour statuera par arrêt réputé contradictoire en application des dispositions de l'article 473, alinéa 2, du code de procédure civile.

Motivation

MOTIFS DE LA DÉCISION

I) Sur la nullité de contrats de vente et de crédit affecté

Moyens des parties

La société BNP Paribas Personal Finance forme appel incident du chef du jugement déféré ayant annulé les contrats de vente et de crédits affecté au motif que le bon de commande mentionnait la marque des panneaux et de l'onduleur mais sans préciser le modèle du matériel susceptible d'être fourni.

A hauteur de cour, la banque soutient que :

- la demande de nullité est irrecevable, sur le fondement de l'article 1103 du code civil, M. [M] faisant preuve de mauvaise foi en sollicitant la nullité des contrats, alors même qu'il conservera l'installation photovoltaïque qu'il a acquise en raison de l'impossibilité pour la société venderesse de la récupérer du fait de sa mise en liquidation judiciaire,

- le bon de commande, dont M. [M] ne produit qu'une copie illisible, ne comporte, s'agissant de la désignation du matériel vendu aucune irrégularité formelle : le matériel vendu est décrit très précisément, le bon de commande stipule une date d'installation ' entre 2 et 8 semaines', les modalités de paiement sont indiquées, le prix global étant suffisant,

- M. [M] ne justifie pas d'un préjudice en lien avec les irrégularités du bon de commande dont il entend se prévaloir,

- à titre subsidiaire, les irrégularités affectant le bon de commande ont été couvertes par l'exécution volontaire du contrat par l'acquéreur qui a laissé le vendeur installer les panneaux, a réceptionné l'installation sans réserve, et a utilisé le matériel pour sa consommation personnelle en toute connaissance des caractéristiques de l'installation,

- les manoeuvres dolosives invoquées par M. [M] ne sont nullement démontrées, non plus que l'erreur commise dans la conclusion du contrat, dans la mesure où il n'est nullement précisé dans le contrat que l'installation acquise permettra de couvrir tous les besoins en électricité de l'acquéreur, et aucune expertise contradictoire établie par un professionnel n'est produite pour étayer les griefs invoqués par M. [M], et la pièce n°24 produite par ce dernier est dénuée de valeur probante s'agissant du manque de rentabilité de l'installation, parce qu'il s'agit, non d'une expertise judiciaire, mais d'une analyse faite par une autre entreprise de manière non contradictoire, qui conclut que le système a été installé en toiture dans les règles de l'art, ne présente pas de malfaçons, que l'installation fonctionne, mais que le système de télégestion de la batterie n'a pas été paramétré, ce qui nécessiterait une intervention.

M. [M] conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a annulé les contrats de vente et, subséquemment, de crédit affecté en s'appropriant la motivation du premier juge et en y ajoutant que le bon de commande encourt de plus fort la nullité du fait que :

- les modalités de pose des panneaux ne sont pas mentionnées, non plus que le délai de mise en service, l'orientation des panneaux, l'adresse de livraison, le nom de l'établissement financier, le coût total du financement, les informations relatives aux garanties légales, la durée de vie des matériels et notamment de l'onduleur, qui est de cinq à dix ans,

- le bon de commande est présenté comme un simple dossier sans engagement,

- M. [M] a subi un préjudice, en raison du fait que son installation n'est pas fonctionnelle, la société IC Groupe n'ayant pas procédé au paramètrage de la batterie,

- les nullités entachant le bon de commande n'ont jamais été couvertes, dès lors qu'il a porté plainte contre la société IC Groupe, qui a été condamnée pour pratique commerciale trompeuse, et n'a donc jamais manifesté une quelconque volonté d'exécuter le contrat,

- le contrat de vente encourt également la nullité pour dol par réticence: le discours commercial et la plaquette publicitaire consistaient à faire croire à une autoconsommation totale ou presque et une garantie de production de 90 % pendant 35 ans et de 80% pendant 25 ans,

- M. [M] a fait réaliser une expertise qui fait apparaître que l'installation n'est pas fonctionnelle faute de paramétrage de la batterie,

- la nullité du contrat de vente entraîne ipso facto celle du contrat de crédit affecté.

Réponse de la cour

Le seul fait de remettre en cause un contrat postérieurement à l'expiration du délai de rétractation ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi alléguée de M. [M], qui agit en raison du caractère qu'il juge non fonctionnel de l'installation qui lui a été vendue par la société IC Groupe.

Aucune violation des dispositions de l'article 1134 ancien du code civil n'étant, en l'espèce, établie, la fin de non-recevoir ne pourra donc être accueillie et la demande d'annulation des contrats de vente et de crédit affecté jugée recevable.

Le contrat de vente conclu le 5 mars 2018 entre M. [M] et la société IC Groupe, après démarchage à domicile, est soumis aux dispositions des articles L. 221-8 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, et le contrat de crédit conclu entre M. [M] et la société BNP Paribas Personal Finance le 5 mars 2018 est un contrat de crédit affecté soumis aux dispositions des articles L. 312-44 et suivants du code de la consommation dans sa rédaction applicable à compter du 1er juillet 2016.

En application de l'article L. 221-5 du code précité, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2.

L'article L. 221-9 dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.

Selon l'article L. 111-1, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;

5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence de toute restriction d'installation de logiciel, à l'existence et aux modalités de mise en oeuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles ;

6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

Aux termes de l'article L. 111-2, le professionnel doit également mettre à la disposition du consommateur, ou lui communiquer, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, qui sont précisées dans l'article R. 111-2.

Au cas d'espèce, le bon de commande du 5 mars 2018 portait sur :

Le kit photovoltaïque comportant 12 panneaux en autoconsommation :

Panneaux photovoltaïques d'une puissance de 300 WC de marque Solutex ou d'une puissance totale du kit équivalente

Un coffret AC/DC

Un onduleur Omnik ou Effekta ou équivalent

Une étanchéité GSE ou surimposition

Câbles et connectiques

Raccordement à la charge d'IC Groupe

Un kit batterie Emphase ou équivalent

Un chauffe-eau thermodynamique Thaléos Thermor de 270 litres

pour un prix total de 24 500 euros toutes taxes comprises

Le bon litigieux mentionne également, concernant la livraison ' Date prévue d'installation : à définir entre 2 et 8 semaines' et, concernant le financement de l'achat ' vente à crédit auprès de CETELEM pour 24 500 euros toutes taxes comprises'.

Il résulte de ce qui précède que le bon de commande ne comporte pas l'ensemble des caractéristiques essentielles des biens offerts à la vente. La marque est, en effet, une caractéristique essentielle pour le consommateur qui lui permet d'être renseigné sur les performances du produit offert à la vente et de faire des comparaisons avec des produits d'autres marques. Or, le bon de commande litigieux prévoit que l'onduleur pourra être de marque 'Omnik ou Effekta ou équivalent', ce qui n'est pas suffisamment précis et permet au professionnel de décider unilatéralement de livrer au consommateur une autre marque non précisée.

Par ailleurs, le bon de commande prévoit la date prévue d'installation : 'à définir de 2 à 8 semaines'.

Alors que le contrat conclu implique des opérations à la fois matérielles de livraison et d'installation du matériel commandé, mais également des démarches administratives et de raccordement, cette mention est insuffisante pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1, 3°du code de la consommation, dès lors qu'il n'est pas distingué entre le délai de pose des modules, et autres matériels et celui de réalisation des prestations à caractère administratif, à savoir le raccordement à la charge d'IC Groupe, démarches administratives et obtention du consuel, et qu'un tel délai global, particulièrement imprécis, ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations.

C'est en vain que la société BNP Paribas Personal Finance prétend que les nullités entachant le bon de commande ont été couvertes par l'exécution volontaire du contrat par M. [M].

En effet, il est de règle que la nullité qui découle de l'irrégularité formelle du contrat au regard des dispositions régissant la vente hors établissement et dont la finalité est la protection du consommateur, est une nullité relative.

L'article 1182 du code civil, énonce que la confirmation est l'acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Cet acte mentionne l'objet de l'obligation et le vice affectant le contrat.

La confirmation ne peut intervenir qu'après la conclusion du contrat.

L'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. En cas de violence, la confirmation ne peut intervenir qu'après que la violence a cessé.

La confirmation emporte renonciation aux moyens et exceptions qui pouvaient être opposés, sans préjudice néanmoins des droits des tiers.

Il s'en déduit que la confirmation d'un acte nul impose, d'une part, la connaissance du vice l'ayant affecté et, d'autre part, l'intention de le réparer.

En l'espèce, la preuve de la connaissance des irrégularités n'est pas établie, la reproduction, dans les conditions générales figurant au verso du bon de commande, dont l'acquéreur avait déclaré avoir pris connaissance, des dispositions du code de la consommation étant insuffisante à révéler à l'acquéreur les vices affectant ce bon (Cass.1re Civ., 24 janvier 2024, pourvoi n° 21-20.691).

Le seul fait que M. [M] ait laissé le contrat s'exécuter en acceptant la livraison, en signant l'attestation de réception des travaux, ne peut s'analyser en une confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité, alors que ces faits ne démontrent pas qu'il a eu connaissance des irrégularités affectant le bon de commande en litige et l'intention de les réparer.

Par suite, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a annulé le contrat de vente, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la demande de nullité à raison du prétendu dol commis par la société venderesse.

L'annulation du contrat de vente entraîne, ipso facto, celle du contrat de crédit affecté.

En effet, aux termes de l'article L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit, lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

III) Sur la créance de restitution de la société BNP Paribas Personal Finance et les demandes indemnitaires de M. [M]

L'annulation du prêt affecté a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu'elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre.

M. [M] fait valoir que la banque a commis une faute en finançant un contrat accessoire à un contrat de vente nul, alors qu'elle ne pouvait ignorer les pratiques commerciales trompeuses de la société IC Groupe qui lui ont valu une condamnation pénale, en manquant à ses obligations de dispensateur de crédit (obligation de conseil et de mise en garde et d'information),en libérant hâtivement les fonds sans s'assurer que la prestation avait été entièrement exécutée, de sorte qu'il doit être exonéré de son obligation de restituer à la banque les fonds qui lui ont été prêtés.

M. [M] souligne que les fautes commises par la banque lui ont causé un préjudice lié au dysfonctionnement de son installation, démontrée par une expertise, qui fait également apparaître que seulement dix panneaux ont été posés sur les douze qu'il a acquis.

Par ailleurs, M. [M] réclame la condamnation de la société BNP Paribas Personal Finance à lui payer, à titre de dommages et intérêts, une somme de 42 000 euros représentant le prix de l'électricité dont son acquisition aurait dû lui permettre de faire l'économie sur la durée de vie du matériel soit 35 ans, outre une somme de 5 000 euros en réparation de son préjudicequ moral consécutif au fait qu'il est fiché à la banque de France pour avoir renoncé à payer les échéances de son prêt, qu'il a été contraint de subir les désagréments liés à la réalisation d'importants travaux d'installation des panneaux solaires et doit supporter une installation aussi inutile qu'inesthétique.

La société BNP Paribas Personal finance de répliquer que M. [M] ne peut rechercher sa responsabilité que sur un fondement délictuel, le contrat de crédit ayant été annulé, qu'elle n'a commis aucune faute dans le déblocage des fonds ni dans le défaut de vérification de la régularité du bon de commande, qu'elle a libéré les fonds sur le fondement d'une attestation valant mandat de payer, que M. [M] ne rapporte pas la preuve, lui incombant d'un préjudice en lien avec les fautes qu'il reproche à la banque.

Elle souligne que M. [M] ne rapporte pas la preuve que le rendement de son installation ne serait pas conforme à celui obtenu par des installations du même type, ni le dysfonctionnement de l'installation qu'il invoque en produisant, au soutien de ses allégations - pièce n°24 de M. [M] - une 'expertise', dans la mesure où cette expertise a été réalisée par une autre entreprise, de manière non contradictoire, qu'elle n'est pas une expertise judiciaire, et que cette expertise ne rapporte pas la preuve du caractère non fonctionnel de l'installation dès lors qu'elle constate que cette même installation est en état de fonctionnement, et que le préjudice invoqué n'est pas en lien avec la faute prêtée à la banque, la prestation ayant été fournie, sans que les dysfonctionnements ultérieurs de l'installation soient de nature à remettre en cause le déblocage des fonds.

Elle fait valoir, en outre, que M. [M], en cas d'annulation du contrat de crédit, bénéficiera déjà de l'exonération du paiement des intérêts conventionnels pour un montant de 6 860, 80 euros et qu'il ne peut solliciter, tout à la fois, des dommages et intérêts par la voie de la décharge et solliciter, au surplus, l'indemnisation d'un préjudice moral et d'un préjudice de jouissance, si bien que sa demande de dommages et intérêts devra être jugée irrecevable ou, à tout le moins, mal fondée.

Réponse de la cour

Suite à l'annulation du contrat de crédit, les parties à ce contrat sont rétablies dans leur état antérieur, ce qui impose en principe à l'emprunteur de restituer le capital emprunté, même lorsque les fonds ont été directement versés entre les mains du vendeur.

L'emprunteur peut toutefois échapper à une telle restitution s'il parvient à démontrer que le prêteur a commis une faute en libérant les fonds, laquelle lui permet d'obtenir des dommages-intérêts venant se compenser avec le capital emprunté.

Au cas d'espèce, M. [M] reproche, en premier lieu, à la banque de ne pas avoir procédé, préalablement à la libération des fonds, aux vérifications qui lui auraient permis de constater que le contrat de vente et d'installation était affecté d'une cause de nullité.

Dans la logique de l'opération commerciale unique et afin de protéger le consommateur, le prêteur est tenu de vérifier la régularité formelle du contrat principal et d'informer l'emprunteur d'une éventuelle irrégularité afin que celui-ci puisse confirmer le contrat ou y renoncer. A défaut, le prêteur commet une faute susceptible d'engager sa responsabilité.

En ne vérifiant pas la régularité du bon de commande et en finançant une opération accessoire à un contrat de vente nul, la banque a donc, et contrairement à ce qu'elle soutient, commis une faute.

M. [M] reproche, en deuxième lieu, à la banque d' avoir libéré hâtivement les fonds, sans s'être assurée au préalable de l'exécution complète du contrat principal.

Dans la logique de l'opération commerciale unique, l'emprunteur ne saurait être tenu d'un engagement financier qui n'aurait pas pour contrepartie la livraison d'un bien ou l'exécution d'une prestation de service. L'article L. 312-48 du code de la consommation prévoit du reste que les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation. Il est donc justifié que le prêteur s'enquière de l'exécution complète du contrat principal et ne délivre les fonds qu'après une telle exécution, sous peine de commettre une faute.

L'emprunteur qui détermine l'établissement de crédit à libérer les fonds au vu d'une attestation de livraison n'est pas recevable à soutenir ensuite, au détriment du prêteur, que le bien ne lui a pas été livré (Cass.1ère Civ., 14 novembre 2001, pourvoi n° 99-15.690).

Il incombe donc au prêteur de vérifier que l'attestation de fin de travaux qui lui est adressée suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.

Au cas d'espèce, aux termes du document signé par la venderesse et M. [M] le 20 mars 2018, il est attesté de la livraison conformément au contrat de vente et la venderesse demande au prêteur de lui verser les fonds au titre du contrat de crédit (24 500 euros).

L' attestation signée par l'emprunteur, datée du 20 mars 2018, si elle est de nature à identifier l'opération financée, n'est pourtant pas propre à caractériser l'exécution complète du contrat principal, dès lors que le bon de commande stipulait que le raccordement au réseau et les démarches administratives étaient comprises dans la commande.

En outre, l'attestation de fin de travaux est rédigée par la société prestataire qui exprime elle-même la demande de paiement et non pas par l'emprunteur qui, par sa signature, se contente d'acquiescer à cette demande.

Ce libellé aurait dû inciter le prêteur à opérer une vérification auprès de son client pour s'assurer que les prestations avaient effectivement été achevées.

La société BNP Paribas Personal Finance a donc commis une faute en libérant les fonds sans s'assurer que la prestation financée avait été entièrement exécutée.

M. [M] reproche, en outre, à la banque d'avoir manqué à sont obligation de conseil et de mise en garde et d'information. Le moyen est toutefois, inopérant, ces manquements étant sanctionnés par la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, qui n'est pas sollicitée par M. [M].

M. [M] doit, après avoir démontré l'existence de fautes commises par la banque, également rapporter la preuve qu'il en est résulté pour lui un préjudice en lien causal avec les fautes commises.

Pour ce faire, il fait valoir que son installation ne fonctionne pas en versant aux débats pour prouver ses dires, une expertise et des factures d'électricité antérieures et postérieures à l'acquisition de sa centrale photovoltaïque aux fins de montrer qu'il continue à acquitter des factures d'électricité.

L'expertise a été réalisée par un autre installateur de panneaux photovoltaïques, la société JCM SOLAR. Elle est datée du 6 mai 2022 et indique en substance :

' Couverture : nous avons une installation photovoltaïque de10 panneaux photovoltaïques de marque Solutex, d'une puissance unitaire de 300 wc. L'installation est intégrée à la toiture via le système d'intégration GSE In Roof. Le bon de commande signé par M. [M] en date du 5 mars 2018 stipulait une installation de 12 panneaux photovoltaïques. Malgré cette incohérence, le système installé a été réalisé dans les règles de l'art et ne présente pas de malfaçon.

Electricité : l'installation électrique est bien réalisée en suivant les normes en vigueur, malgré une incohérence dans le choix des produits (Onduleur Omnik et batterie Emphase). Cela n'empêche pas le bon fonctionnement de l'installation. L'installateur IC Groupe n'a cependant pas paramétré le système de télégestion de la batterie ce qui la rend inefficace.

Travaux préconisés sur ce projet : concernant la partie toiture, hormis le manque de deux panneaux par rapport au bon de commande, il n'y a pas d'intervention à prévoir, l'installation est en règle.

Concernant la partie électrique, nous préconisons le paramétrage de la télégestion Emphase afin de rendre le système complet fonctionnel. Ce type d'intervention nécessitera la présence d'un technicien pendant la durée du paramétrage'.

Il convient de relever que cette expertise est non contradictoire et qu'il s'agit d'une expertise amiable réalisée à la demande de M. [M], non par un expert mais par un installateur de panneaux photovoltaïques concurrent de la société IC Groupe.

Si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties ( Cass. Com.1er décembre 2021 ' n° 19-22.135).

L'expertise doit être corroborée par d'autres éléments de preuve.

M. [M] produit, à cette fin, des factures d'électricité dont il ressort notamment :

- consommation en mars 2017 : 748 ; consommation mars 2018 : 950 ; consommation en mars 2019 : 492

- consommation en avril 2017 : 419 ; consommation en avril 2018 : 193 ; consommation en avril 2019 : 205

- consommation en mai 2017 : 248 ; consommation en mai 2018 : 74 ; consommation en mai 2019 : 114

- consommation en juin 2017 : 253 ; consommation en juin 2018 : 65 ; consommation en juin 2019 : 113

- consommation en juillet 2017 : 299 ; consommation en juillet 2018 : 120 ; consommation en juillet 2019 : 137

- consommation en août 2017 : 318 ; consommation en août 2018 : 102 ; consommation en août 2019 : 205

- consommation en septembre 2017 : 259 ; consommation en septembre 2018 : 126 ; consommation en septembre 2019 : 103

- consommation en octobre 2017 : 297 ; consommation en octobre 2018 : 311 ; consommation en octobre 2019 : 375

- consommation en novembre 2017 : 984 ; consommation en novembre 2018 : 660 ; consommation en novembre 2019 : 577

- consommation en décembre2017 : 1225 ; consommation en décembre 2018 : 1023 ; consommation en décembre 2019 : 965

Il convient de rappeler que l'installation a été mise en marche dans la dernière décade du mois de mars 2018.

Ces factures permettent de constater, pour l'essentiel, que M. [M] continue à régler des factures d'électricité, que sa consommation d'électricité a toutefois notablement baissé durant l'année 2018, après que l'installation eut été raccordée, étant relevé que les variations de consommations peuvent s'expliquer également par des variations climatiques ou des changements dans les habitudes de vie de M. [M].

Il s'ensuit que ces factures ne permettent pas de corroborer le manque d'efficacité de la centrale photovoltaïque, relatée dans l'expertise, dans la mesure où l'autosuffisance n'était pas dans le champ contractuel, contrairement à ce que soutient M. [M] et que, partant, le seul fait que M. [M] continue d'acquitter des factures n'est pas constitutif du préjudice en lien causal avec les fautes de la banque, qui doit être démontré par M. [M].

L'expertise amiable et non contradictoire et les informations qu'elle recèle - nombre de panneaux posés, défaut de paramétrage de la batterie - n'étant corroborées par aucun autre élément de preuve, la preuve du préjudice en lien causal avec les fautes de la banque n'est pas rapportée.

Il s'ensuit que M. [M] sera débouté de l'ensemble de ses demandes indemnitaires et que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [M] à rembourser à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 23 045,91 euros représentant le montant du capital emprunté (24 500 euros) après déduction des échéances du prêt remboursées (1 454, 09), avec intérêts au taux légal à compter, non de la date du déblocage comme le sollicite la société BNP Paribas Personal Finance, mais du jugement déféré à la cour, qui est confirmé en toutes ses dispositions.

IV) Sur les demandes accessoires

M. [M], qui succombe, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel, les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens de première instance et aux frais irrépétibles non compris dans ces mêmes dépens étant, par ailleurs, confirmées.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt réputé contradictoire

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant

Déboute M. [C] [M] de la totalité de ses demandes ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [C] [M] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance une indemnité de 800 euros ;

Condamne M. [C] [M] aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par la société Pichard Devemy Karm qui en a fait la demande.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.