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Décisions

TUE, 5e ch., 28 février 2024, n° T-364/20

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Royaume de Danemark, Royaume de Belgique, République fédérale d’Allemagne, Grand-Duché de Luxembourg

Défendeur :

Commission européenne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Spielmann

Juge :

M. Gâlea

Avocats :

Me Holdgaard, Me Pinborg, Me Vanden Eynde

TUE n° T-364/20

27 février 2024

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, le Royaume de Danemark demande l’annulation de la décision C(2020) 1683 final de la Commission, du 20 mars 2020, concernant l’aide d’État SA.39078 – 2019/C (ex 2014/N) mise à exécution par le Danemark en faveur de Femern A/S (JO 2020, L 339, p. 1), en ce que, dans la première phrase de son article 2, elle a qualifié d’aide d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, les mesures consistant en des injections de capitaux et en une combinaison de prêts de l’État et de garanties de l’État en faveur de Femern A/S (ci-après la « décision attaquée »).

I.      Antécédents du litige

A.      Projet de liaison fixe du détroit de Fehmarn

2        Le projet de liaison fixe du détroit de Fehmarn entre le Danemark et l’Allemagne (ci-après le « projet ») a été approuvé par le traité entre le Royaume de Danemark et la République fédérale d’Allemagne concernant la liaison fixe du détroit de Fehmarn, signé le 3 septembre 2008 et ratifié en 2009 (ci-après le « traité sur le détroit de Fehmarn »).

3        Le projet consiste, d’une part, en un tunnel ferroviaire et routier (ci-après la « liaison fixe ») et, d’autre part, en des connexions routières vers l’arrière-pays danois (ci-après les « connexions routières ») et en des connexions ferroviaires vers l’arrière-pays danois (ci-après les « connexions ferroviaires ») (ci-après, prises ensemble, les « connexions routières et ferroviaires vers l’arrière-pays »).

4        La liaison fixe consiste en un tunnel immergé sous la mer Baltique entre Rødby sur l’île de Lolland au Danemark et Puttgarden en Allemagne, d’une longueur d’environ 19 km, qui contiendra une voie ferrée électrifiée et une autoroute. Les connexions ferroviaires comprendront l’élargissement et l’amélioration de la liaison ferroviaire existante entre Ringsted (Danemark) et Rødby, longue d’environ 120 km, qui appartient à Banedanmark, le gestionnaire public de l’infrastructure ferroviaire de l’État danois.

5        Le projet a été précédé d’une phase de planification. Le financement de cette phase, en ce qui concerne la liaison fixe et les connexions routières et ferroviaires vers l’arrière-pays, a été notifié à la Commission européenne. Par sa décision du 13 juillet 2009 dans l’affaire N 157/2009 – Financement de la phase de planification de la liaison fixe du détroit de Fehmarn mentionnée au Journal officiel de l’Union européenne du 27 août 2009 (JO 2009, C 202, p. 2), la Commission a conclu, d’une part, que les mesures liées au financement de la planification du projet pourraient ne pas constituer une aide d’État, dans la mesure où Femern avait agi en tant qu’autorité publique et, d’autre part, que ces mesures seraient en tout état de cause compatibles avec le marché intérieur. Elle a donc décidé de ne pas soulever d’objections au sens de l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1).

6        À la suite d’une actualisation en prix fixes de 2015 fournie par les autorités danoises, le coût total de la planification et de la construction de la liaison fixe a été estimé à 52,6 milliards de couronnes danoises (DKK) (environ 7,1 milliards d’euros) et les coûts liés à la planification et à la construction de l’amélioration des connexions routières et ferroviaires vers l’arrière-pays sont estimés à 9,5 milliards de DKK (environ 1,3 milliard d’euros), soit un coût total du projet estimé à 62,1 milliards de DKK (environ 8,4 milliards d’euros).

7        Conformément à l’article 6 du traité sur le détroit de Fehmarn et à la lov no 575 om anlæg og drift af en fast forbindelse over Femern Bælt med tilhørende landanlæg i Danmark (loi no 575, relative à la construction et à l’exploitation de la liaison fixe du détroit de Fehmarn et des liaisons avec l’arrière-pays danois), du 4 mai 2015 (ci-après la « loi relative à la construction »), deux entreprises publiques ont été chargées de l’exécution du projet.

8        La première, Femern, constituée en 2005, est chargée du financement, de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe. La seconde, Femern Landanlæg A/S, constituée en 2009, a été désignée pour gérer la construction et l’exploitation des connexions vers l’arrière-pays danois. Femern Landanlæg est une filiale de Sund & Bælt Holding A/S qui appartient à l’État danois. Femern est devenue la filiale de Femern Landanlæg à la suite de la constitution de cette dernière.

9        Les travaux liés à la construction de la liaison fixe sont effectués, aux soins de Femern, dans le cadre de contrats de construction soumis aux procédures relatives aux marchés publics.

10      La construction des améliorations nécessaires des connexions routières est entreprise par la direction danoise des routes pour le compte de l’État danois et est financée par Femern Landanlæg. Les connexions routières feront partie du réseau général d’infrastructures routières danois, qui est financé, exploité et entretenu par la direction des routes danoise. La construction et l’exploitation des connexions ferroviaires sont assurées par Banedanmark pour le compte de l’État danois et sont financées par Femern Landanlæg.

11      Selon la notification du Royaume de Danemark du 22 décembre 2014, adressée à la Commission en application de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, le projet est financé par Femern et Femern Landanlæg, grâce des injections de capitaux, des prêts garantis par l’État ainsi que, à titre alternatif, des prêts accordés par les autorités danoises. À partir de la mise en service de la liaison fixe, Femern percevra les redevances des usagers afin de rembourser sa dette et versera à Femern Landanlæg des dividendes que cette dernière utilisera pour rembourser sa propre dette. Femern Landanlæg recevra également 80 % des redevances d’utilisation payées par les opérateurs ferroviaires pour l’utilisation des connexions ferroviaires, perçues par Banedanmark, en raison du partage de la propriété de ces connexions ferroviaires entre elle et cette dernière.

B.      Évènements antérieurs au litige

12      Au cours des années 2014 et 2015, la Commission a reçu cinq plaintes, dont la première introduite le 5 juin 2014, reprochant au Royaume de Danemark d’avoir accordé à Femern et à Femern Landanlæg des aides d’État illégales et incompatibles avec le marché intérieur.

13      Au cours de la même période, les services de la Commission ont adressé plusieurs demandes d’informations aux autorités danoises, lesquelles ont répondu et fourni des informations supplémentaires à plusieurs reprises.

14      Par lettre du 22 décembre 2014, conformément à l’article 108, paragraphe 3, TFUE, les autorités danoises ont notifié à la Commission le modèle de financement du projet.

15      Le 23 juillet 2015, la Commission a adopté la décision C(2015) 5023 final, relative à l’aide d’État SA.39078 (2014/N) (Danemark), concernant le financement du projet de liaison fixe du détroit de Fehmarn, mentionnée au Journal officiel du 2 octobre 2015 (JO 2015, C 325, p. 5, ci-après la « décision concernant la construction »). Le dispositif de cette décision s’articulait autour de deux volets.

16      Dans le premier volet, la Commission avait considéré que les mesures accordées à Femern Landanlæg pour la planification, la construction et l’exploitation des connexions routières et ferroviaires vers l’arrière-pays ne constituaient pas des aides d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

17      Dans le second volet, la Commission avait considéré que les mesures accordées à Femern pour la planification, la construction et l’exploitation de la liaison fixe, même dans le cas où elles constitueraient des aides d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, étaient compatibles avec le marché intérieur en vertu de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.

18      Ainsi, à l’issue de la phase préliminaire d’examen, la Commission avait décidé de ne pas soulever d’objections à l’égard des mesures notifiées par les autorités danoises.

19      Par arrêts du 13 décembre 2018, Scandlines Danmark et Scandlines Deutschland/Commission (T‑630/15, non publié, EU:T:2018:942), et du 13 décembre 2018, Stena Line Scandinavia/Commission (T‑631/15, non publié, EU:T:2018:944), le Tribunal a annulé la décision concernant la construction en ce que la Commission avait décidé de ne pas soulever d’objections à l’égard des mesures accordées par le Royaume de Danemark à Femern pour la planification, la construction et l’exploitation de la liaison fixe et a rejeté le recours pour le surplus.

20      Tout d’abord, s’agissant des financements publics accordés à Femern Landanlæg pour le financement de la planification, de la construction et de l’exploitation des connexions ferroviaires, le Tribunal a rejeté comme non fondés les moyens selon lesquels la Commission aurait commis des erreurs de fait et de droit en estimant que ces financements ne constituaient pas des aides d’État dès lors qu’ils n’étaient pas susceptibles de fausser la concurrence ou d’affecter les échanges entre les États membres au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

21      Ensuite, en ce qui concerne les financements publics accordés à Femern pour la construction et l’exploitation de la liaison fixe, le Tribunal a accueilli les recours au motif que la Commission avait manqué à l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 108, paragraphe 3, TFUE d’ouvrir la procédure formelle d’examen en raison de l’existence de difficultés sérieuses.

C.      Procédure administrative

22      À la suite du prononcé des arrêts du 13 décembre 2018, Scandlines Danmark et Scandlines Deutschland/Commission (T‑630/15, non publié, EU:T:2018:942), et du 13 décembre 2018, Stena Line Scandinavia/Commission (T‑631/15, non publié, EU:T:2018:944), confirmés par la Cour par l’arrêt du 6 octobre 2021, Scandlines Danmark et Scandlines Deutschland/Commission (C‑174/19 P et C‑175/19 P, EU:C:2021:801), la Commission a, par lettre du 14 juin 2019, informé les autorités danoises de sa décision d’ouvrir une procédure formelle d’examen, prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, des mesures consenties en faveur de Femern pour la partie du projet concernant le financement de la liaison fixe (ci-après la « décision d’ouverture »).

23      La décision d’ouverture a été publiée le 5 juillet 2019 au Journal officiel (JO 2019, C 226, p. 5). Dans ladite décision, sur la base des informations disponibles lors de l’ouverture de la procédure formelle d’examen, la Commission a notamment fait part de ses doutes sur la possibilité de considérer que Femern exerce une activité économique.

D.      Décision attaquée

24      Le 20 mars 2020, la Commission a adopté la décision attaquée.

25      La décision attaquée couvre les mesures octroyées à Femern pour la planification, la construction et l’exploitation de la liaison fixe. En revanche, à la différence de la décision concernant la construction, la décision attaquée ne concerne pas les mesures consenties en faveur de Femern Landanlæg concernant le financement des connexions routières et ferroviaires vers l’arrière-pays.

26      Selon l’article 1er de la décision attaquée, les mesures comprenant l’amortissement des actifs, le report de pertes fiscales, le régime d’imposition commune, les redevances ferroviaires, l’utilisation gratuite des biens appartenant à l’État et les garanties de l’État portant sur des produits dérivés ne constituent pas une aide d’État en faveur de Femern au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

27      En revanche, selon l’article 2 de la décision attaquée, les mesures comprenant des injections de capitaux et une combinaison de prêts de l’État et de garanties de l’État en faveur de Femern, que le Danemark a au moins partiellement mises à exécution illégalement, constituent une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. À la suite de la modification de ces mesures telle qu’exposée dans la notification révisée qui a suivi la décision d’ouverture, celles-ci sont jugées compatibles avec le marché intérieur sur la base de l’article 107, paragraphe 3, sous b), TFUE.

E.      Conclusions des parties

28      Le Royaume de Danemark, soutenu par le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’article 2 de la décision attaquée en ce que les mesures consistant en des injections de capitaux et en une combinaison de prêts de l’État et de garanties de l’État en faveur de Femern, pour partie mises à exécution illégalement, constituent une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE ;

–        condamner la Commission aux dépens.

29      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable ou, à titre subsidiaire, non fondé ;

–        condamner le Royaume de Danemark aux dépens.

II.    En droit

A.      Sur la recevabilité

30      Sans soulever une exception d’irrecevabilité par acte séparé sur le fondement de l’article 130 du règlement de procédure du Tribunal, la Commission soutient que le recours est irrecevable. Selon la Commission, le chef de conclusions en annulation partielle visant la première phrase de l’article 2 de la décision attaquée, selon laquelle les mesures consistant en des injections de capitaux et en une combinaison de prêts de l’État et de garanties de l’État en faveur de Femern constituent une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, est irrecevable au motif que la seconde phrase de l’article 2 de la décision attaquée, à savoir la constatation selon laquelle lesdites mesures sont compatibles avec le marché intérieur, n’est pas détachable de la première phrase dudit article.

31      Le Royaume de Danemark, soutenu par le Grand-Duché de Luxembourg, conteste cette irrecevabilité.

32      Il convient de rappeler que l’article 263 TFUE fait une distinction nette entre le droit de recours en annulation des institutions de l’Union européenne et des États membres, d’une part, et celui des personnes physiques et morales, d’autre part, le deuxième alinéa de cet article ouvrant notamment à tout État membre le droit de contester, par un recours en annulation, la légalité des décisions de la Commission, sans que l’exercice de ce droit soit conditionné par la justification d’un intérêt à agir. Contrairement aux personnes physiques et morales, un État membre n’a donc pas à démontrer qu’un acte de la Commission qu’il attaque produit des effets juridiques à son égard pour que son recours soit recevable (voir, en ce sens, ordonnance du 27 novembre 2001, Portugal/Commission, C‑208/99, EU:C:2001:638, points 22 et 23 ; arrêt du 20 septembre 2019, Allemagne/ECHA, T‑755/17, EU:T:2019:647, point 334).

33      Toutefois, pour qu’un acte de la Commission puisse faire l’objet d’un recours en annulation, il faut qu’il soit destiné à produire des effets juridiques même si, dans le cas où c’est un État membre qui entend présenter un tel recours, ces effets n’ont pas à s’exercer dans le propre chef dudit État (voir, en ce sens, ordonnance du 27 novembre 2001, Portugal/Commission, C‑208/99, EU:C:2001:638, point 24).

34      En l’espèce, il convient de constater que le Royaume de Danemark demande l’annulation de l’article 2 de la décision attaquée uniquement en ce que les mesures consistant en des injections de capitaux et d’une combinaison de prêts de l’État et de garanties de l’État en faveur de Femern, pour partie mises à exécution illégalement, constituent une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Il s’ensuit que, comme le souligne la Commission, le présent recours ne vise pas la seconde phrase de l’article 2 de la décision attaquée, à savoir la constatation selon laquelle lesdites mesures sont compatibles avec le marché intérieur.

35      Or, il y a lieu de considérer que, dans le cadre d’un recours en annulation dirigé contre une décision déclarant des mesures d’aide compatibles avec le marché intérieur, pour importante que soit la qualification de la mesure en tant qu’aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, la déclaration de compatibilité n’en demeure pas moins détachable, à titre provisoire, de sorte qu’une annulation partielle est possible et justifiée par la circonstance que ladite déclaration est favorable à l’État membre (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 23 octobre 1974, Transocean Marine Paint Association/Commission, 17/74, EU:C:1974:106, point 21).

36      En effet, en cas d’annulation visant y compris la compatibilité des mesures en cause avec le marché intérieur, il ne saurait être exclu que la Commission, dans une nouvelle décision, conclue à une aide d’État incompatible. Par conséquent, il ne saurait être exigé d’un État membre que ses chefs de conclusions visant à l’annulation d’une décision déclarant une aide compatible avec le marché intérieur visent également la partie du dispositif d’une décision par laquelle les mesures sont déclarées compatibles avec le marché intérieur. En outre, des erreurs dans la qualification de mesures en tant qu’aides d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE n’impliquent pas nécessairement que la déclaration de compatibilité soit entachée d’une erreur d’appréciation et dépourvue d’effets juridiques. Tel peut notamment être le cas lorsque seule une partie des mesures aurait été erronément qualifiée en tant qu’aide d’État, mais qu’il serait constaté que la Commission aurait correctement qualifié d’aides d’État les autres mesures. En pareille hypothèse, dans l’attente d’une nouvelle décision de la Commission, l’annulation partielle de l’acte attaqué permettrait à l’État membre de poursuivre le versement des financements accordés au titre des mesures dont la qualification en tant qu’aide d’État n’est pas entachée d’erreur et pour lesquels la déclaration de compatibilité continuerait ainsi de produire ses effets.

37      Dès lors, la qualification de mesures nationales en tant qu’aides d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et l’examen de la compatibilité de mesures d’aides avec le marché intérieur constituent des appréciations de natures différentes qui, au regard de la recevabilité du présent recours de l’État membre concerné, doivent être considérées comme des appréciations juridiques autonomes. Il s’ensuit que, compte tenu des circonstances de l’espèce, l’argumentation de la Commission concernant le caractère non détachable des deux phrases de l’article 2 de la décision attaquée, au motif que la qualification d’aide d’État est la prémisse nécessaire et logique de sa compatibilité, doit être écartée.

38      Par ailleurs, l’argument de la Commission selon lequel le recours en annulation n’aurait aucun effet utile à moins que le Tribunal n’annule l’ensemble de l’article 2 de la décision attaquée, ce qui irait toutefois au-delà des conclusions du Royaume de Danemark, doit être écarté. En effet, en application de l’article 266 TFUE, l’institution dont émane l’acte annulé est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt d’annulation. Dès lors, si le présent recours était accueilli et entraînait l’annulation partielle de l’acte attaqué, il incomberait à la Commission d’en assurer l’exécution.

39      Il résulte des considérations qui précèdent que le présent recours est recevable.

B.      Sur le fond

40      Au soutien de son recours, le Royaume de Danemark soulève deux moyens, tirés, d’une part, de ce que la Commission aurait constaté à tort que le financement de Femern constitue une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et, d’autre part, de ce que la Commission aurait commis une erreur d’appréciation en constatant que Femern exerce une activité économique en concurrence avec des tiers avant la mise en service de la liaison fixe.

41      Le premier moyen se subdivise en quatre branches par lesquelles le Royaume de Danemark considère que dans la décision attaquée la Commission a constaté à tort, premièrement, que les activités de Femern ne se rattachent pas à l’exercice de prérogatives de puissance publique, deuxièmement, que Femern offre des services de transport sur un marché en concurrence avec d’autres opérateurs, troisièmement, que Femern est un opérateur économique poursuivant une logique commerciale et, quatrièmement, que le financement de Femern fausse la concurrence et affecte les échanges entre États membres. Le second moyen porte sur une argumentation par laquelle le Royaume de Danemark conteste, en substance, que les activités de Femern puissent être considérées comme étant de nature économique avant la mise en service de la liaison fixe.

42      Dans la mesure où les trois premières branches du premier moyen et le second moyen portent sur la qualification des activités de Femern en tant qu’activités de nature économique, le Tribunal juge opportun de les examiner avant de traiter la quatrième branche du premier moyen qui concerne les conditions relatives à la distorsion de la concurrence et à l’affectation des échanges entre États membres, prévues à l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

1.      Sur la première branche du premier moyen, concernant l’absence de rattachement des activités de Femern à l’exercice de prérogatives de puissance publique 

43      Dans la première branche du premier moyen, le Royaume de Danemark soulève trois griefs. Premièrement, il est fait grief à la Commission d’avoir interprété de manière restrictive la notion d’« activité relevant de l’autorité publique ou qui se rattache à l’exercice de prérogatives de puissance publique ». Deuxièmement, la Commission aurait à tort accordé de l’importance au fait qu’un opérateur privé assure des services susceptibles d’être considérés comme une alternative aux activités de Femern. Troisièmement, la Commission aurait omis de tenir compte d’informations disponibles attestant que certaines activités de Femern se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

a)      Sur le premier grief, tiré d’une prétendue interprétation trop restrictive de la notion d’« activité relevant de l’autorité publique ou qui se rattache à l’exercice de prérogatives de puissance publique »

44      Le Royaume de Danemark, soutenu par le Royaume de Belgique et le Grand-Duché de Luxembourg, fait valoir, en substance, que la Commission a retenu une interprétation trop restrictive de la notion de « prérogatives de puissance publique » en limitant celles-ci à celles se rattachant aux fonctions essentielles de l’État. Plus spécifiquement, le Royaume de Danemark, soutenu par le Grand-Duché de Luxembourg, considère qu’il ressort de la jurisprudence que l’exercice de prérogatives de puissance publique ne se limite pas aux seules fonctions essentielles de l’État, qui ne sont qu’un exemple parmi d’autres activités relevant typiquement de ces prérogatives.

45      En outre, le Royaume de Danemark considère que la Commission n’a pas tenu compte du point 13 de sa communication relative à la notion d’« aide d’État » visée à l’article 107, paragraphe 1, [TFUE] (JO 2016, C 262, p. 1, ci-après la « communication relative à la notion d’“aide d’État” »). Selon le Royaume de Danemark, il en découlerait qu’un État est libre de définir les activités relevant de prérogatives de puissance publique et celles qui n’en relèvent pas. Ainsi, le Royaume de Danemark soutient que ce qui est déterminant pour établir l’existence de telles prérogatives, c’est le fait qu’elles relèvent de celles des autorités publiques telles qu’elles sont organisées concrètement dans l’État membre concerné. En l’espèce, le Royaume de Danemark considère que les activités de construction et d’exploitation des infrastructures routières et ferroviaires, telles qu’elles sont organisées au Danemark, impliquent qu’il s’agit d’activités se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique, y compris lorsqu’elles s’exercent sur la liaison fixe appartenant à une entité publique telle que Femern.

46      De même, le Royaume de Danemark fait valoir, en substance, que pour déterminer si les activités de Femern impliquaient des prérogatives de puissance publique, il convient de tenir compte de la circonstance que cette entité se voit confier des missions de service public qui ne peuvent pas être assurées par des opérateurs privés. À cet égard, selon le Royaume de Belgique, pour déterminer si l’exercice d’une activité implique le recours à des prérogatives de puissance publique, il convient de tenir compte de la poursuite d’un objectif d’intérêt général ne visant pas la seule rentabilité de l’activité.

47      Par ailleurs, le Royaume de Belgique fait valoir que la notion de « fonctions essentielles de l’État », utilisée par la Commission dans la décision attaquée, n’est pas clairement définie en droit de l’Union, que la liste des fonctions énumérées à l’article 4, paragraphe 2, TUE n’est pas exhaustive et que la jurisprudence ne préconise pas une interprétation restrictive de la notion de « prérogatives de puissance publique ».

48      La Commission conteste cette argumentation.

49      À titre liminaire, il y a lieu de préciser que, dans le présent arrêt, les notions d’« activité relevant de l’exercice de l’autorité publique » et d’« activité se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique » se recoupent. Une telle approche correspond à celle retenue par la Commission dans la décision attaquée ainsi qu’aux points 17 et 18 de la communication relative à la notion d’« aide d’État ». À cet égard, dans sa réponse écrite à une question posée par le Tribunal, la Commission a confirmé qu’il n’y a pas de différence entre ces expressions qui constituent des variantes lexicales de la même notion juridique.

50      En premier lieu, s’agissant de l’argument selon lequel la Commission aurait considéré à tort que les activités relevant de l’autorité publique ou se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique sont celles qui se rattachent aux fonctions essentielles de l’État, il convient de rappeler que ne présentent pas de caractère économique justifiant l’application des règles de concurrence prévues par le traité FUE les activités relevant de l’autorité publique (arrêt du 4 mai 1988, Bodson, 30/87, EU:C:1988:225, point 18) ou qui se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique (arrêts du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, EU:C:1994:7, point 30, et du 24 mars 2022, GVN/Commission, C‑666/20 P, non publié, EU:C:2022:225, point 70).

51      En l’espèce, en suivant l’approche préconisée au point 17 de la communication relative à la notion d’« aide d’État », aux considérants 190 et 191 de la décision attaquée, la Commission a estimé qu’une entité peut être considérée comme agissant en tant qu’autorité publique ou en exerçant des prérogatives de puissance publique lorsque son activité est liée aux fonctions essentielles de l’État ou rattachée à ces fonctions par sa nature, par son objet et par les règles auxquelles elle est soumise.

52      D’une part, il y a lieu de rappeler que parmi les activités impliquant l’exercice de prérogatives de puissance publique figurent, notamment, le contrôle et la police de l’espace aérien (arrêt du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, EU:C:1994:7, point 30), le maintien, l’amélioration et le développement de la sécurité aérienne (arrêt du 26 mars 2009, SELEX Sistemi Integrati/Commission, C‑113/07 P, EU:C:2009:191, point 76), la surveillance antipollution dans un port pétrolier (arrêt du 18 mars 1997, Diego Calì & Figli, C‑343/95, EU:C:1997:160, point 22), ainsi que le contrôle et la sécurité du trafic maritime (arrêt du 20 septembre 2019, Port autonome du Centre et de l’Ouest e.a./Commission, T‑673/17, non publié, EU:T:2019:643, point 91). En outre, il a été jugé qu’une activité de collecte de données relatives à des entreprises, sur le fondement d’une obligation légale de déclaration imposée à ces dernières et des pouvoirs coercitifs afférents, relève de l’exercice de prérogatives de puissance publique (arrêt du 12 juillet 2012, Compass-Datenbank, C‑138/11, EU:C:2012:449, point 40). De plus, la fourniture, à titre gratuit, de fonctionnalités qui assurent la passation électronique des marchés publics sur l’ensemble du territoire d’un État membre en conformité avec les directives et la loi sur la passation des marchés publics et qui a été mise en place par un ministère à cette fin a été considérée comme se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique (arrêt du 28 septembre 2017, Aanbestedingskalender e.a./Commission, T‑138/15, non publié, EU:T:2017:675, point 71). De même, des autorités municipales, dans leur rôle d’autorité compétente au sens du règlement (CE) no 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2007, relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, et abrogeant les règlements (CEE) no 1191/69 et (CEE) no 1107/70 du Conseil (JO 2007, L 315, p. 1), agissent en tant qu’autorité publique lorsqu’elles fixent les modalités de compensation financières aux entreprises de transport en vertu d’une obligation légale, dans le cadre établi par ce règlement (arrêt du 24 mars 2022, GVN/Commission, C‑666/20 P, non publié, EU:C:2022:225, point 73).

53      Ainsi, il ressort de la jurisprudence que la notion d’« activité se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique » vise notamment les activités qui impliquent le recours à des prérogatives exorbitantes du droit commun, telles que des pouvoirs de réglementation ou de coercition, ou à des privilèges de puissance publique qui s’imposent aux citoyens et aux entreprises, ou les activités ayant pour objet d’assurer le respect de la réglementation en vigueur.

54      D’autre part, il convient de relever que les fonctions essentielles de l’État ne sont pas définies par les traités. À cet égard, il ressort de l’article 4, paragraphe 2, TUE que parmi les fonctions essentielles de l’État figurent notamment celles qui ont pour objet d’assurer l’intégrité territoriale, de maintenir l’ordre public et de sauvegarder la sécurité nationale. Dès lors que la liste figurant dans cette disposition est non exhaustive, les fonctions essentielles de l’État ne sauraient se limiter à la préservation de l’intégrité territoriale et de l’ordre public ni à la sauvegarde de la sécurité nationale.

55      Ainsi, en matière d’aides d’État, il a été jugé que la surveillance antipollution dans un port pétrolier constitue une mission d’intérêt général qui relève des fonctions essentielles de l’État en matière de protection de l’environnement du domaine maritime et qu’une telle activité de surveillance, par sa nature, son objet et les règles auxquelles elle est soumise, se rattache à l’exercice de prérogatives relatives à la protection de l’environnement qui sont typiquement des prérogatives de puissance publique (arrêt du 18 mars 1997, Diego Calì & Figli, C‑343/95, EU:C:1997:160, points 22 et 23). Il s’ensuit que, dans certaines circonstances, les activités d’une entité peuvent être considérées comme se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique lorsqu’elles relèvent des fonctions essentielles de l’État.

56      En outre, en ce qui concerne l’argument du Royaume de Danemark selon lequel il ressortirait du point 36 de l’arrêt du 12 juillet 2012, Compass-Datenbank (C‑138/11, EU:C:2012:449), que le terme « prérogatives » couvrirait plus généralement les missions de service public ou d’autorité publique, il y a lieu de relever que, en jugeant que ne présentent pas de caractère économique justifiant l’application des règles de concurrence prévues par le traité FUE les activités qui se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique, la Cour a uniquement rappelé une jurisprudence constante (voir, en ce sens, arrêts du 11 juillet 1985, Commission/Allemagne, 107/84, EU:C:1985:332, points 14 et 15 ; du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, EU:C:1994:7, point 30, et du 1er juillet 2008, MOTOE, C‑49/07, EU:C:2008:376, point 24) sans en modifier sa portée. Il s’ensuit que le Royaume de Danemark ne saurait se fonder sur ledit arrêt pour faire valoir que la notion de « prérogatives » devrait être interprété comme incluant plus largement les missions de service public. Au demeurant, il convient de relever, ainsi que cela ressort du point 40 de l’arrêt du 12 juillet 2012, Compass-Datenbank (C‑138/11, EU:C:2012:449), que la Cour a considéré que l’activité en cause dans cette affaire se rattachait à l’exercice de prérogatives de puissance publique au motif que la collecte de données reposait sur le fondement d’une obligation légale dont le respect pouvait être assuré par le recours à des pouvoirs coercitifs.

57      Il s’ensuit que la Commission n’a pas commis d’erreur de droit en considérant qu’une entité agit en tant qu’autorité publique ou en exerçant des prérogatives de puissance publique lorsque son activité est liée aux fonctions essentielles de l’État par sa nature, son objectif et les règles auxquelles elle est soumise.

58      En deuxième lieu, en ce qui concerne l’argument selon lequel la Commission n’aurait pas tenu compte du point 13 de la communication relative à la notion d’« aide d’État », duquel il ressortirait que les États membres seraient libres de définir les activités relevant des prérogatives de puissance publique et celles qui n’en relèvent pas, il convient de relever, ainsi que le fait valoir à bon droit la Commission, que le point 13 de cette communication ne concerne pas les critères permettant de déterminer si une activité se rattache à l’exercice de prérogatives de puissance publique, lesquels figurent aux points 17 et 18 de ladite communication.

59      En effet, au point 13 de la communication relative à la notion d’« aide d’État », il est indiqué que la question de savoir s’il existe un marché pour des services déterminés peut dépendre de la manière dont ces services sont organisés dans l’État membre concerné et peut donc varier d’un État membre à un autre. À cet égard, à la note en bas de page no 10 sous le point 13 de ladite communication, il est renvoyé à la jurisprudence relative aux activités dans le domaine de la sécurité sociale, lesquelles sont susceptibles d’être qualifiées d’activités économiques ou d’activités non économiques en fonction de leurs modalités d’organisation. Ainsi, aux fins de leur qualification d’activités économiques exercées sur un marché ou d’activités non économiques, il importe de déterminer si lesdites activités en rapport avec la sécurité sociale mettent en œuvre le principe de solidarité tel qu’interprété par la jurisprudence, si elles sont dépourvues de tout but lucratif et font l’objet d’un contrôle par l’État (voir, en ce sens, arrêts du 17 février 1993, Poucet et Pistre, C‑159/91 et C‑160/91, EU:C:1993:63, points 7 à 12, 15 et 18, et du 11 juin 2020, Commission et République slovaque/Dôvera zdravotná poist’ovňa, C‑262/18 P et C‑271/18 P, EU:C:2020:450, points 29 à 35).

60      Par ailleurs, il y a lieu de relever que, pour les activités d’enseignement, le financement de telles activités par des fonds publics constitue, dans le cadre de la prise en considération des modalités d’organisation d’une activité dans un État membre, un élément pertinent pour distinguer les activités de nature économique des activités non économiques (voir, en ce sens, arrêts du 11 septembre 2007, Schwarz et Gootjes-Schwarz, C‑76/05, EU:C:2007:492, point 39, et du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania, C‑74/16, EU:C:2017:496, point 50). En pareille hypothèse, la nature non économique des activités d’enseignement dispensées par certains établissements publics qui font partie d’un système d’enseignement public découle des modalités d’organisation de celles-ci dans l’État membre, à savoir la poursuite d’un objectif d’intérêt général financé entièrement ou principalement par le budget public, sans qu’il soit nécessaire de vérifier si ces activités se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

61      Dès lors, il y a lieu de constater que la lecture faite par le Royaume de Danemark du point 13 de la communication relative à la notion d’« aide d’État » doit être écartée, dès lors qu’elle opère une confusion entre, d’une part, les activités qui ne sont pas considérées comme ayant une nature économique au motif qu’elles se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique (arrêts du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, EU:C:1994:7, point 30, et du 24 mars 2022, GVN/Commission, C‑666/20 P, non publié, EU:C:2022:225, point 70) et, d’autre part, les activités qui ne sont pas de nature économique au motif qu’elles ne consistent pas à fournir des biens ou des services sur un marché donné en concurrence avec celles d’autres opérateurs qui poursuivent un but lucratif (voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, MOTOE, C‑49/07, EU:C:2008:376, point 27, et du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania, C‑74/16, EU:C:2017:496, point 46).

62      En outre, s’agissant de l’affirmation du Royaume de Danemark selon laquelle, en substance, un État membre serait libre de définir les activités relevant de prérogatives de puissance publique, il convient de rappeler que les notions d’« entreprise » et d’« activité économique » sont des notions objectives qui découlent directement du traité et qui dépendent d’éléments de fait et non des choix ou des appréciations subjectives des autorités nationales [voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2019, Chambre de commerce et d’industrie métropolitaine Bretagne-Ouest (port de Brest)/Commission, T‑754/17, non publié, EU:T:2019:270, point 75].

63      Partant, l’argument du Royaume de Danemark se fondant sur le point 13 de la communication relative à la notion d’« aide d’État » procède d’une interprétation erronée de cette disposition et doit, de ce fait, être écarté.

64      En troisième lieu, en ce qui concerne l’argumentation du Royaume de Danemark et du Royaume de Belgique selon laquelle, en substance, pour déterminer l’existence d’une prérogative de puissance publique, il conviendrait de tenir compte de la poursuite d’un objectif d’intérêt général, il y a lieu de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que le fait qu’une entité se soit vu confier certaines missions d’intérêt général ne saurait empêcher que les activités en cause soient considérées comme des activités économiques (arrêts du 23 mars 2006, Enirisorse, C‑237/04, EU:C:2006:197, point 34, et du 16 décembre 2010, Pays-Bas et NOS/Commission, T‑231/06 et T‑237/06, EU:T:2010:525, point 94).

65      Il résulte des considérations qui précèdent que le grief tiré d’une interprétation trop restrictive de la notion d’« activité relevant de l’autorité publique ou se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique » doit être rejeté.

b)      Sur le troisième grief, tiré du défaut de prise en compte d’informations disponibles permettant de rattacher certaines activités de Femern à l’exercice de prérogatives de puissance publique

66      Le Royaume de Danemark fait valoir que c’est à tort que la Commission n’a pas tenu compte de certains éléments d’informations disponibles attestant que les activités de Femern, prises ensemble ou séparément, se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

67      Le Royaume de Danemark, soutenu par le Royaume de Belgique et la République fédérale d’Allemagne, considère que pour déterminer si des activités se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique ou constituent des activités économiques, il convient de procéder à une appréciation concrète d’ensemble de la nature et de l’objet des activités ainsi que des règles auxquelles elles sont soumises. Selon le Royaume de Danemark, pour déterminer si des activités se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique, la Commission serait tenue de procéder à une analyse spécifique et détaillée de chacune d’entre elles.

68      Premièrement, le Royaume de Danemark soutient que la construction et l’exploitation des voies publiques et du réseau ferroviaire public sont des activités relevant de l’exercice de l’autorité publique qu’aucun opérateur privé ne peut exercer. À cet égard, d’une part, le Royaume de Danemark, soutenu par le Grand-Duché de Luxembourg, signale que Femern s’est vu confier les missions d’autorité routière et de gestionnaire d’infrastructures ferroviaires normalement assumées par des administrations publiques. S’agissant de la mission d’autorité routière confiée à Femern en ce qui concerne la liaison fixe, le Royaume de Danemark signale que celle-ci implique notamment un pouvoir de décision en application de la lov n° 1520 af 27. december 2014 om offentlige veje (loi no 1520, portant sur les voies publiques), du 27 décembre 2014 (ci‑après la « loi sur les voies publiques »). D’autre part, le Royaume de Danemark soutient que, dans le cadre de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe, Femern s’est vu confier la préparation des plans de sécurité de la liaison fixe.

69      Deuxièmement, le Royaume de Danemark, soutenu par le Grand-Duché de Luxembourg, considère que la Commission n’a pas pris en considération le fait que les activités de Femern font l’objet d’un contrôle administratif et politique étroit tant du ministre des Transports danois que du Parlement, ni la circonstance que cette entité est soumise à des obligations de droit public dans plusieurs domaines, en particulier en matière d’accès aux documents ou de contrôle public des comptes, de sorte que cette entité s’apparente à une administration publique.

70      Troisièmement, le Royaume de Danemark, soutenu par la République fédérale d’Allemagne, relève que Femern est une entité chargée par la loi d’exécuter des obligations internationales.

71      Quatrièmement, le Royaume de Danemark reproche à la Commission de ne pas avoir pris en considération la circonstance que, à la différence du secteur aéroportuaire, les infrastructures ferroviaires et routières danoises n’ont pas été libéralisées, de sorte que les activités de Femern se différencient fondamentalement de celles des entreprises commerciales.

72      Par ailleurs, le Royaume de Danemark considère que la Commission a indûment renversé la charge de la preuve en ce qu’elle a exigé qu’il explique les raisons pour lesquelles il convenait de considérer que les activités de Femern impliquaient l’exercice de prérogatives de puissance publique. À cet égard, le Royaume de Belgique fait valoir que dès lors qu’il incombe à la Commission de prouver l’existence d’aides d’État, en ne tenant pas compte, en l’espèce, de tous les éléments pertinents de l’opération litigieuse, la Commission n’a pas apporté dans sa décision des éléments suffisamment probants permettant de démontrer que les activités de Femern ne se rattachent pas à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

73      La Commission conteste cette argumentation.

74      Interrogé à l’audience sur le sens et la portée du grief tiré de ce que la Commission aurait omis de prendre en compte des prérogatives de puissance publique confiées à Femern, le Royaume de Danemark a précisé que ce grief se subdivise en deux sous-griefs. À titre principal, il est fait grief à la Commission d’avoir considéré à tort que les activités de Femern, dans leur ensemble, ne se rattachent pas à des prérogatives de puissance publique. À titre subsidiaire, dans l’éventualité où le Tribunal ne ferait pas droit au premier sous-grief, le Royaume de Danemark fait grief à la Commission d’avoir commis une erreur en ce que les fonctions déléguées à Femern en sa qualité d’autorité routière et en sa qualité de gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire et son obligation de préparation des plans de sécurité de la liaison fixe n’ont pas été considérées comme se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

1)      Sur le premier sous-grief, tiré de ce que la Commission aurait considéré à tort que, en tant que telles, les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe ne relèvent pas de l’exercice de l’autorité publique 

75      Par son premier sous-grief, le Royaume de Danemark soutient, à titre principal, que la Commission aurait conclu à tort que, en tant que telles, les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe ne relèvent pas de l’exercice de l’autorité publique.

76      En l’espèce, au considérant 191 de la décision attaquée, la Commission a considéré, dans le cadre d’une appréciation globale des activités de Femern, que les arguments des autorités danoises concernant l’objectif, la nature et les règles régissant lesdites activités, lesquels sont repris au considérant 190 de la décision attaquée, n’étaient pas suffisants pour conclure que cette entité agissait dans le cadre de l’exercice de l’autorité publique.

77      Pour contester cette conclusion, premièrement, le Royaume de Danemark soutient que la Commission n’a pas tenu compte du fait que Femern s’apparenterait à une administration publique en raison du contrôle étroit exercé par les pouvoirs publics sur elle ainsi que de l’obligation faite à cette entité de respecter les règles sur l’accès aux documents ou le contrôle des comptes.

78      À cet égard, il y a lieu de rappeler que la circonstance qu’une entité constitue un établissement public placé sous l’autorité d’un ministre ne saurait exclure, à elle seule, qu’elle puisse être considérée comme une entreprise au sens des dispositions du traité FUE (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission, T‑128/98, EU:T:2000:290, point 109). En outre, dès lors que l’État lui-même ou une entité étatique peut agir en tant qu’entreprise (arrêts du 12 juillet 2012, Compass-Datenbank, C‑138/11, EU:C:2012:449, point 35, et du 20 septembre 2019, Port autonome du Centre et de l’Ouest e.a./Commission, T‑673/17, non publié, EU:T:2019:643, point 71), la circonstance qu’une entité puisse à certains égards être assimilée à une administration publique en raison d’un contrôle étroit des pouvoirs publics et du fait qu’elle soit tenue de respecter certaines règles de droit public applicables aux administrations publiques, telles que celles relatives à l’accès aux documents ou au contrôle des comptes, ne saurait faire obstacle à ce qu’elle exerce une activité économique.

79      En outre, le fait qu’une entité soit placée sous le contrôle étroit des pouvoirs publics et soumise au respect de certaines obligations de droit public applicables aux administrations publiques n’implique pas par lui-même que les activités de cette entité se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

80      Il s’ensuit que le fait que Femern soit soumise à un contrôle étroit des pouvoirs publics et qu’elle doive respecter les règles sur l’accès aux documents ou le contrôle des comptes ne saurait suffire pour conclure que ses activités se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique. Au demeurant, la circonstance que Femern soit soumise à un contrôle étroit des pouvoirs publics et qu’elle doive respecter les règles sur l’accès aux documents ou le contrôle des comptes ne permet pas, à elle seule, de la considérer comme une administration publique.

81      Deuxièmement, s’agissant de l’argument selon lequel Femern est une entité chargée par la loi d’exécuter des obligations internationales, il convient de considérer qu’il ne saurait, en tant que tel, être suffisant pour conclure que ses activités se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

82      En effet, en l’espèce, il convient de relever que, au cours de la procédure formelle d’examen, le Royaume de Danemark ne s’est prévalu d’aucune disposition spécifique du traité sur le détroit de Fehmarn qui aurait permis à la Commission de constater que ledit traité confie à Femern des activités se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique. Ainsi, à la section 3.1.1.2. de leurs observations du 26 août 2019, soumises à la Commission à la suite de l’ouverture de la procédure formelle d’examen, les autorités danoises ont uniquement indiqué que la création de Femern et ses activités ont pour objet d’assurer la mise en œuvre, par le Royaume de Danemark, d’un accord international ainsi que d’importantes décisions de planification adoptées par l’État danois. À la note en bas de page no 9 desdites observations, il est renvoyé à l’article 6 du traité sur le détroit de Fehmarn et précisé que, dans l’arrêt du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft (C‑364/92, EU:C:1994:7), Eurocontrol aurait été considéré comme exerçant une activité d’autorité publique sur le fondement d’un accord conclu entre des États membres.

83      Or, d’une part, il y a lieu de constater que les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe ne sont pas comparables à celles confiées à Eurocontrol. En effet, il y a lieu de rappeler que les activités d’Eurocontrol avaient été exclues du champ d’application des règles du traité relatives à la concurrence au motif que les activités relatives au contrôle et à la police de l’espace aérien, lesquelles impliquent notamment le recours à des prérogatives et des pouvoirs de coercition dérogatoires au droit commun à l’égard des usagers de l’espace aérien, sont typiquement des prérogatives de puissance publique (voir, en ce sens, arrêt du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft, C‑364/92, EU:C:1994:7, points 24 et 30).

84      D’autre part, s’agissant de l’article 6 du traité sur le détroit de Fehmarn, il convient de relever que le premier paragraphe de cette disposition prévoit que le Royaume de Danemark doit constituer une société chargée des travaux préparatoires, de la planification, de la conception, de l’obtention des autorisations, de la conclusion des contrats, du financement, de l’exploitation et de la maintenance de la liaison fixe, étant précisé que ladite société sera propriétaire de la liaison fixe. Le deuxième paragraphe de cette disposition précise que cette société sera une société de droit danois et que ses activités seront exercées conformément aux principes commerciaux généraux et aux obligations internationales, notamment celles découlant du droit de l’Union. Le troisième paragraphe de l’article 6 du traité sur le détroit de Fehmarn prévoit que le Royaume de Danemark percevra tous les bénéfices de la société et supportera les pertes causées par ses activités. Le quatrième paragraphe, quant à lui, précise que le Royaume de Danemark a le droit de modifier l’organisation de la société sans préjudice des obligations souscrites dans le cadre du traité sur le détroit de Fehmarn et qu’une approbation préalable de la République fédérale d’Allemagne est nécessaire en cas de vente de plus de 50 % des actions à des entités non contrôlées par les autorités danoises. Le cinquième paragraphe de l’article 6 du traité sur le détroit de Fehmarn prévoit que le Royaume de Danemark veille à ce que la société s’acquitte des missions qui lui ont été confiées par le traité.

85      Force est de constater que l’article 6 du traité sur le détroit de Fehmarn, invoqué par les autorités danoises au cours de la procédure formelle d’examen, ne contient aucune disposition qui aurait permis à la Commission de constater que, en tant que telles, les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

86      Troisièmement, s’agissant de l’argument selon lequel la Commission n’aurait pas tenu compte du fait qu’au Danemark la construction et l’exploitation des infrastructures ferroviaires et routières ne sont pas libéralisées, il y a lieu de considérer que l’absence de libéralisation d’un secteur d’activité ne constitue pas un indice permettant de conclure que, par principe, une activité se rattache à l’exercice de prérogatives de puissance publique. En ce sens, il convient de relever que c’est en raison des modalités de leur organisation dans les États membres que certaines activités ont été considérées comme n’étant pas de nature économique et non parce qu’elles se rattachaient à des prérogatives de puissance publique. Tel est notamment le cas des activités d’enseignement public financées entièrement ou principalement par des fonds publics (voir, en ce sens, arrêts du 11 septembre 2007, Schwarz et Gootjes-Schwarz, C‑76/05, EU:C:2007:492, point 39, et du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania, C‑74/16, EU:C:2017:496, point 50), des régimes de sécurité sociale mettant en œuvre le principe de solidarité (voir, en ce sens, arrêts du 17 février 1993, Poucet et Pistre, C‑159/91 et C‑160/91, EU:C:1993:63, points 7 à 12, 15 et 18, et du 11 juin 2020, Commission et République slovaque/Dôvera zdravotná poist’ovňa, C‑262/18 P et C‑271/18 P, EU:C:2020:450, points 30 à 34) ou encore d’entités chargées de la gestion d’un système national de santé offrant des services de soins à titre gratuit (voir, en ce sens, arrêts du 11 juillet 2006, FENIN/Commission, C‑205/03 P, EU:C:2006:453, point 27, et du 4 mars 2003, FENIN/Commission, T‑319/99, EU:T:2003:50, points 39 et 49). Il s’ensuit que la circonstance que les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe ne soient pas libéralisées n’implique pas pour autant que lesdites activités se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

87      Quatrièmement, en ce qui concerne l’argument selon lequel la Commission n’a pas tenu compte des fonctions déléguées à Femern en tant qu’autorité routière et en tant que gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire ni du fait qu’il lui incombe de préparer les plans de sécurité de la liaison fixe, il convient de rappeler que la circonstance qu’une entité dispose, pour l’exercice d’une partie de ses activités, de prérogatives de puissance publique ne fait pas, à elle seule, obstacle à la qualification d’entreprise, au sens des dispositions du traité FUE relatives aux règles de concurrence, pour ses autres activités économiques (arrêts du 1er juillet 2008, MOTOE, C‑49/07, EU:C:2008:376, point 25 ; du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission, T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117, points 98 et 99, et du 20 septembre 2019, Havenbedrijf Antwerpen et Maatschappij van de Brugse Zeehaven/Commission, T‑696/17, EU:T:2019:652, point 85).

88      Selon la jurisprudence, dans la mesure où une entité publique exerce une activité économique qui peut être dissociée de l’exercice de ses prérogatives de puissance publique, cette entité, pour ce qui est de cette activité, agit en tant qu’entreprise, tandis que si ladite activité économique est indissociable de l’exercice de ses prérogatives de puissance publique, l’ensemble des activités exercées par ladite entité demeurent des activités se rattachant à l’exercice de ces prérogatives (arrêts du 12 juillet 2012, Compass-Datenbank, C‑138/11, EU:C:2012:449, point 38, et du 30 avril 2019, UPF/Commission, T‑747/17, EU:T:2019:271, point 82). Il s’ensuit qu’il n’existe aucun seuil en dessous duquel il conviendrait de considérer que l’ensemble des activités d’une entité seraient des activités non économiques, et ce même dans l’éventualité où les activités économiques seraient minoritaires (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 2019, UPF/Commission, T‑747/17, EU:T:2019:271, point 83, et du 20 septembre 2019, Le Port de Bruxelles et Région de Bruxelles-Capitale/Commission, T‑674/17, non publié, EU:T:2019:651, point 104).

89      En l’espèce, force est de constater que le Royaume de Danemark n’a apporté aucun élément afin de démontrer que les fonctions d’autorité routière et de gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire assurées par Femern ou l’obligation de préparer des plans de sécurité seraient indissociables des activités économiques identifiées par la Commission, à savoir la construction et l’exploitation de la liaison fixe. En tout état de cause, ainsi que cela ressort de l’examen du second sous-grief, dans les circonstances de la présente affaire, la Commission pouvait valablement considérer que, dans l’exercice desdites fonctions et pour la préparation des plans de sécurité de la liaison fixe, Femern ne s’était vu confier aucune prérogative de puissance publique particulière (voir points 101 à 103 ci-après).

90      Il résulte des considérations qui précèdent que les informations soumises à la Commission par les autorités danoises au cours de la procédure formelle d’examen ne constituaient pas des éléments qui, pris isolément ou dans leur ensemble, seraient susceptibles d’aboutir au constat que l’ensemble des activités en cause de Femern, à savoir la construction et l’exploitation de la liaison fixe, se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

91      Partant, la Commission pouvait valablement considérer, au considérant 191 de la décision attaquée, que, compte tenu de leur nature, de leur objet et des règles auxquelles elles sont soumises, les activités de Femern ne constituent pas, en tant que telles, des activités relevant de l’exercice de l’autorité publique.

2)      Sur le second sous-grief, tiré de ce que la Commission aurait constaté à tort que Femern n’a reçu aucune prérogative de puissance publique particulière

92      Par son second sous-grief, exposé à titre subsidiaire, le Royaume de Danemark reproche à la Commission d’avoir erronément considéré que les fonctions déléguées à Femern en sa qualité d’autorité routière et en sa qualité de gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire ainsi que la préparation des plans de sécurité de la liaison fixe ne constituent pas des activités qui se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

93      À cet égard, dans sa réponse écrite aux questions du Tribunal, la Commission a indiqué ne pas avoir procédé à un examen approfondi des activités spécifiques de Femern invoquées par le Royaume de Danemark dans la présente procédure au motif que, au cours de la procédure formelle d’examen, les autorités danoises se sont uniquement prévalues de ce que l’ensemble du projet de liaison fixe devait être considéré comme se rattachant à des prérogatives de puissance publique et qu’elles n’ont pas explicitement invoqué ni présenté d’arguments suffisamment précis concernant ces activités.

94      Lors de l’audience, le Royaume de Danemark a soutenu que, au cours de la procédure administrative, des éléments avaient été fournis concernant les fonctions déléguées à Femern en sa qualité d’autorité routière et en sa qualité de gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire ainsi qu’en ce qui concerne la préparation des plans de sécurité de la liaison fixe et qu’il revenait à la Commission, à qui incombe la charge de la preuve de démontrer l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, de demander des informations supplémentaires.

95      À cet égard, il convient de relever que si c’est à la Commission qu’il incombe de prouver qu’une mesure remplit les conditions requises pour être qualifiée d’aide d’État, c’est ensuite à l’État membre qui a dispensé ou qui projette de dispenser cette aide qu’il revient de démontrer que cette mesure échappe à une telle qualification.

96      Il en résulte que lorsque la Commission considère qu’une entité exerce des activités économiques, pour lui permettre de vérifier si certaines activités de ladite entité doivent être exclues du champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE au motif qu’elles se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique, il incombe à l’État membre concerné, dans le cadre du devoir de coopération loyale entre États membres et institutions tel qu’il découle de l’article 4, paragraphe 3, TUE, d’invoquer explicitement l’existence de telles activités et de fournir des explications circonstanciées sur la réglementation applicable à ces activités ainsi que tous les éléments de nature à permettre à la Commission de vérifier qu’il s’agit effectivement d’activités se rattachant à des prérogatives de puissance publique (voir, par analogie, arrêt du 15 novembre 2011, Commission et Espagne/Government of Gibraltar et Royaume-Uni, C‑106/09 P et C‑107/09 P, EU:C:2011:732, points 146 et 147).

97      Il s’ensuit qu’il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte d’éventuels éléments d’information qui auraient pu lui être présentés pendant la procédure administrative mais qui ne l’ont pas été, la Commission n’étant pas dans l’obligation d’examiner d’office et par supputation quels sont les éléments qui auraient pu lui être soumis [voir, par analogie, arrêts du 9 septembre 2009, Holland Malt/Commission, T‑369/06, EU:T:2009:319, point 152, et du 6 avril 2022, Mead Johnson Nutrition (Asia Pacific) e.a./Commission, T‑508/19, EU:T:2022:217, point 106].

98      En l’espèce, il convient de relever que dans la lettre adressée aux autorités danoises le 14 juin 2019, reprise dans la décision d’ouverture, la Commission a exposé, aux considérants 84 à 89, les raisons pour lesquelles, à la suite d’une analyse prima facie, il y aurait lieu de considérer que Femern exerce une activité économique. Plus précisément, au considérant 85 de ladite décision, la Commission a indiqué que la circonstance que le projet de liaison fixe poursuive des objectifs d’intérêt général n’implique pas nécessairement qu’il s’agisse d’une activité relevant de l’exercice de l’autorité publique. En outre, au considérant 86 de ladite lettre, la Commission a également considéré que la circonstance que l’octroi, par deux États souverains, d’autorisations pour la construction d’une infrastructure de transport transfrontalière relève de l’exercice de la puissance publique n’implique pas nécessairement que les services de transport eux-mêmes ou la construction de l’infrastructure relèvent également de l’exercice de l’autorité publique.

99      Certes, ainsi que l’a relevé le Royaume de Danemark à l’audience, la Commission a, aux considérants 84 à 89 de la lettre du 14 juin 2019, fait part de certaines interrogations quant à la possibilité de qualifier l’activité de Femern d’activité économique. Dès lors, la Commission a invité les autorités danoises à lui fournir tous les documents et informations pertinentes actualisées et complètes pour lui permettre de poursuivre, notamment, l’évaluation de la nature économique ou non économique de l’activité de Femern.

100    En réponse à ladite invitation, dans leurs observations sur l’ouverture de la procédure formelle d’examen du 26 août 2019, les autorités danoises ont développé une argumentation tendant à faire valoir, à titre principal, que l’ensemble des activités de Femern devaient être considérées comme se rattachant à des prérogatives de puissance publique et, à titre subsidiaire, que seule l’activité d’exploitation de la liaison fixe devait être considérée comme étant une activité de nature économique.

101    Toutefois, force est de constater que dans lesdites observations les autorités danoises ne se sont pas explicitement prévalues de ce que les fonctions déléguées à Femern en sa qualité d’autorité routière et en sa qualité de gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire ainsi qu’en ce qui concerne la préparation des plans de sécurité de la liaison fixe devraient être considérées comme se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique, de sorte que les coûts afférents devraient échapper au champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

102    D’une part, s’agissant des fonctions déléguées à Femern en sa qualité de gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire ainsi qu’en ce qui concerne la préparation des plans de sécurité, il y a lieu de constater que les autorités danoises n’en ont fait mention ni dans leurs observations sur l’ouverture de la procédure formelle d’examen du 26 août 2019 ni dans les observations sur les commentaires des parties intéressées soumises lors de la procédure formelle d’examen le 4 octobre 2019. Dans ces conditions, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir examiné, au cours de la procédure formelle d’examen, si les fonctions de gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire et la préparation des plans de sécurité de la liaison fixe devaient être exclues du champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE au motif que ces activités devaient être considérées comme se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

103    D’autre part, en ce qui concerne les fonctions déléguées à Femern en sa qualité d’autorité routière, il convient de relever que celles-ci n’ont fait l’objet que d’une mention ponctuelle dans les observations des autorités danoises du 26 août 2019. Plus précisément, ces fonctions ont été évoquées en tant qu’illustration d’une « responsabilité publique » incombant à Femern, illustration exposée au soutien d’une argumentation plus générale tendant à faire valoir que, en raison de leur nature, l’ensemble des activités de Femern devraient être considérées comme se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique. En outre, il y a lieu de constater que les éléments transmis à la Commission par les autorités danoises au cours de la procédure formelle d’examen ne lui permettaient pas de conclure que cette activité se rattache à de telles prérogatives. En effet, le point 25 de la loi relative à la construction, auquel il est renvoyé dans la note en bas de page no 12 des observations sur l’ouverture de la procédure formelle d’examen du 26 août 2019, se limite à énoncer, en son premier paragraphe, que la liaison routière de côte à côte est une route publique administrée conformément à la loi sur les voies publiques et que Femern est l’autorité routière. Certes, dans les travaux préparatoires concernant la loi relative à la construction, dont la Commission disposait au cours de la procédure formelle d’examen, il est indiqué qu’« il est proposé que Femern soit chargée de l’administration des liaisons routières se rattachant au projet de liaison de côte à côte mentionnées à l’article 1er, lu avec l’article 38, de la loi sur les voies publiques » et que, « [p]ar conséquent, Femern sera l’autorité routière au sens de la réglementation sur les voies publiques et aura un pouvoir de décision en application de la loi sur les voies publiques et des textes adoptés sur la base de celle‑ci ». Toutefois, force est de constater que les éléments à disposition de la Commission lors de la procédure formelle d’examen ne contenaient aucune précision sur les éventuelles prérogatives dont disposent les autorités routières à l’égard des tiers, en particulier en ce qui concerne la nature et la portée du « pouvoir décisionnel » desdites autorités. En outre, comme le Royaume de Danemark l’a admis à l’audience, il n’a pas communiqué à la Commission la loi sur les voies publiques au cours de la procédure formelle d’examen. Par ailleurs, il y a lieu de relever que, au cours de cette procédure, les autorités danoises ne se sont pas explicitement prévalues de ce que les fonctions déléguées à Femern en sa qualité d’autorité routière devaient être rattachées à l’exercice de prérogatives de puissance publique. Il s’ensuit qu’il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir examiné de manière détaillée lesdites fonctions.

104    Il résulte des considérations qui précèdent que, dans les circonstances de la présente affaire, la Commission n’a pas conclu à tort, au considérant 194 de la décision attaquée, que Femern n’a pas reçu de prérogatives de puissance publique particulières.

105    Par conséquent, il convient de rejeter le second sous-grief invoqué à titre subsidiaire par le Royaume de Danemark.

106    Partant, il convient de rejeter dans son ensemble le grief tiré du défaut de prise en compte d’informations disponibles permettant de rattacher certaines activités de Femern à l’exercice de prérogatives de puissance publique

c)      Sur le deuxième grief, tiré de ce que la Commission aurait à tort pris en considération l’existence de services substituables à la liaison fixe 

107    Le Royaume de Danemark fait valoir que, dans son examen aux fins d’établir si les activités de Femern se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique, la Commission a commis une erreur en accordant de l’importance au fait qu’un opérateur privé offre des services de transbordeurs considérés comme une alternative à ceux offerts par ladite entité. Selon le Royaume de Danemark, la circonstance qu’un opérateur privé offre des services substituables ne devrait pas avoir d’incidence sur la constatation que les activités de Femern se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

108    Le Royaume de Danemark fait valoir, en substance, que les activités de construction et d’exploitation d’infrastructures routières et ferroviaires relèvent de l’exercice de prérogatives de puissance publique et que l’existence d’un rapport de substitution entre ces infrastructures et des modes de transports alternatifs ne devrait pas remettre en cause ce constat. Dès lors que la mise à disposition des réseaux routiers et ferroviaires danois ne relève pas de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, le Royaume de Danemark considère également que la Commission n’a pas donné d’éléments suffisants pour expliquer les raisons pour lesquelles les activités de Femern se distinguent de la mise à disposition desdits réseaux.

109    Selon le Royaume de Danemark, la mise en place d’un régime de paiement pour l’utilisation d’une infrastructure routière par les usagers ne saurait être un élément déterminant pour qualifier la mise à disposition de ladite infrastructure en tant qu’activité économique en concurrence avec des opérateurs privés qui proposent des solutions alternatives au réseau routier.

110    Le Royaume de Danemark fait valoir que, dans la décision concernant la construction, la Commission a considéré que, étant donné que le réseau ferroviaire national était géré et exploité sur un marché fermé où ne s’exerce aucune concurrence, les financements publics accordés à Femern Landanlaeg n’étaient pas susceptibles d’affecter les échanges entre États membres, et ce alors que certaines liaisons aériennes ou par transbordeurs pouvaient constituer des alternatives à certaines liaisons ferroviaires. Dès lors, le Royaume de Danemark considère que le critère de substituabilité mis en œuvre par la Commission lors de l’examen des services de transport ferroviaire de Femern est différent et plus strict que celui retenu dans son examen global du réseau ferroviaire public danois.

111    La Commission conteste cette argumentation.

112    Il ressort de l’examen du troisième grief effectué aux points 74 à 106 ci-dessus que la Commission pouvait valablement considérer qu’il ne ressortait pas des éléments du dossier que les activités de Femern, en tant que telles, relevaient de l’exercice de l’autorité publique et que cette entité s’était vu confier des prérogatives de puissance publique. Il s’ensuit que l’argumentation du Royaume de Danemark dans le cadre du présent grief repose sur la prémisse erronée selon laquelle les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe se rattachent à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

113    Par ailleurs, contrairement à ce que fait valoir le Royaume de Danemark, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir examiné si, dans le cadre de l’exploitation de la liaison fixe, les services qui seront offerts par Femern peuvent se substituer à ceux offerts par des opérateurs poursuivant un but lucratif sur un marché donné. En effet, ce faisant, la Commission applique un critère lui permettant de déterminer si ladite activité d’exploitation constitue une activité économique (voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, MOTOE, C‑49/07, EU:C:2008:376, point 27, et du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania, C‑74/16, EU:C:2017:496, point 46).

114    S’agissant de l’argument selon lequel, en substance, la Commission aurait dû procéder à un examen approfondi des caractéristiques des réseaux routiers et ferroviaires danois pour établir si les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe se rattachaient à l’exercice de prérogatives de puissance publique, il convient de relever que le Royaume de Danemark n’a pas versé d’éléments au dossier qui permettraient de considérer que, dans leur ensemble, les activités de construction ou d’exploitation des réseaux routiers et ferroviaires se rattachent effectivement à l’exercice de prérogatives de puissance publique. En outre, comme le relève à juste titre la Commission, la décision attaquée porte uniquement sur le financement de la liaison fixe et non sur le financement de l’ensemble des réseaux routiers et ferroviaires danois, de sorte que les caractéristiques de ces derniers ne sont pas pertinentes pour déterminer si les activités de Femern en cause en l’espèce sont de nature économique. Il s’ensuit que cet argument du Royaume de Danemark ne saurait prospérer.

115    En ce qui concerne l’argument par lequel il est reproché à la Commission d’avoir eu recours, dans la décision attaquée, à un critère de substituabilité plus strict que celui retenu dans la décision concernant la construction, de sorte que l’appréciation effectuée dans le cas d’espèce serait insuffisante et contradictoire, il suffit de relever que l’existence de services de transport substituables ne constitue pas un élément pertinent aux fins de la détermination de l’existence d’activités se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique. En tout état de cause, contrairement à ce que fait valoir le Royaume de Danemark, il convient de constater que dans la décision concernant la construction et dans les arrêts du 13 décembre 2018, Scandlines Danmark et Scandlines Deutschland/Commission (T‑630/15, non publié, EU:T:2018:942), et du 13 décembre 2018, Stena Line Scandinavia/Commission (T‑631/15, non publié, EU:T:2018:944), il n’a aucunement été question d’une éventuelle concurrence entre les connexions ferroviaires et les exploitants de transbordeurs ou de liaisons aériennes, de sorte que l’argumentation du Royaume de Danemark ne saurait prospérer.

116    Quant à l’argument selon lequel la mise en place d’un régime de paiement pour l’utilisation d’une infrastructure routière par les usagers ne serait pas un critère déterminant pour qualifier la mise à disposition de ladite infrastructure en tant qu’activité économique en raison de l’existence d’un rapport de substitution sur un marché avec des opérateurs poursuivant un but lucratif proposant des solutions alternatives au réseau routier, il doit être écarté. En effet, comme il sera précisé dans le cadre de la troisième branche du présent moyen, aux points 148 à 153 ci-après, le paiement de redevances constitue un élément qui, s’il n’est pas déterminant, est à tout le moins pertinent pour qualifier la mise à disposition de l’infrastructure d’activité économique, de sorte qu’il pouvait donc valablement être pris en compte par la Commission.

117    Au surplus, dès lors que la Commission pouvait valablement constater que Femern n’avait reçu aucune prérogative de puissance publique particulière, l’argumentation tendant à comparer un rapport de substitution entre les infrastructures de transport et les modes de transports alternatifs avec le rapport de substitution qui existerait entre, d’une part, les activités de la police et de la justice et, d’autre part, les activités de sociétés de sécurité privées et l’arbitrage ne saurait prospérer. À cet égard, il y a lieu de relever que les activités de la police et de la justice relèvent par nature de l’autorité publique en ce qu’elles impliquent le recours à des prérogatives exorbitantes du droit commun et à des privilèges de puissance publique qui s’imposent aux citoyens et aux entreprises. Tel n’est pas le cas des activités des entreprises de sécurité privée ni de l’activité d’arbitrage. Un même constat s’impose en ce qui concerne les activités de construction et d’exploitation d’une infrastructure de transport telle que la liaison fixe.

118    Par conséquent, il convient de rejeter le grief tiré d’une prétendue erreur découlant de la prise en considération de l’existence de services substituables à la liaison fixe.

119    Il résulte des considérations qui précèdent que la première branche du premier moyen, tirée de ce que la Commission aurait considéré à tort que les activités de Femern n’impliquent pas l’exercice de prérogatives de puissance publique, doit être rejetée dans son intégralité.

2.      Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée du constat prétendument erroné selon lequel Femern offre des services de transport sur un marché en concurrence avec d’autres opérateurs

120    Le Royaume de Danemark, soutenu par le Royaume de Belgique, fait valoir que la liaison fixe ne se trouve pas en concurrence avec les exploitants de transbordeurs au même titre qu’une infrastructure ferroviaire ne se trouve pas en concurrence directe avec la route, les autocars ou les aéroports.

121    Selon le Royaume de Danemark, les éventuels effets sur la concurrence seraient la résultante de la décision de réaliser la liaison fixe qui relève de l’exercice de l’autorité publique. Dès lors, la coexistence d’activités commerciales avec des activités impliquant l’exercice de prérogatives de puissance publique ne signifierait pas automatiquement que ces dernières constitueraient des activités économiques.

122    En outre, le Royaume de Danemark fait valoir que même si les activités de Femern n’étaient pas considérées comme se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique, cette entité ne serait pas en concurrence avec les exploitants de transbordeurs. En ce sens, le Royaume de Danemark souligne que Femern a pour missions la construction et l’exploitation de la liaison fixe d’une manière permettant d’optimiser les avantages macroéconomiques. Ainsi, la circonstance que les activités de cette entité auraient des incidences sur l’économie nationale et les marchés alentour, notamment celui des services offerts par les exploitants de transbordeurs, ne signifierait pas que la construction et l’exploitation de la liaison fixe puissent être considérées comme étant en concurrence avec des opérateurs privés sur un marché de fourniture de services de transport.

123    Le Royaume de Danemark soutient que, en tout état de cause, Femern ne pourrait être en concurrence sur un marché de services de transport au stade de la planification et de la construction de la liaison fixe.

124    Le Royaume de Belgique considère qu’il n’y aurait pas de concurrence avec les transbordeurs privés, dans la mesure où l’intervention publique se limiterait à pallier les carences de l’initiative privée.

125    La Commission conteste cette argumentation.

126    À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, constitue une entreprise, aux fins de l’application des dispositions du droit de l’Union en matière de concurrence, toute entité exerçant une activité économique et constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné (arrêts du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission, C‑288/11 P, EU:C:2012:821, point 50, et du 24 mars 2022, GVN/Commission, C‑666/20 P, non publié, EU:C:2022:225, point 69).

127    En l’espèce, au considérant 193 de la décision attaquée, la Commission a constaté qu’il existe un marché de services de transport pour la traversée du détroit de Fehmarn sur lequel opère déjà un exploitant de transbordeurs, qui est une entreprise opérant aux conditions du marché. Par conséquent, la Commission a considéré que les services de transport fournis par Femern sont en concurrence avec les services de transport offerts par cet exploitant de transbordeurs.

128    D’une part, force est de constater que le Royaume de Danemark ne conteste pas l’existence d’un marché de services pour la traversée du détroit de Fehmarn entre Rødby et Puttgarden qui seraient fournis par un exploitant de transbordeurs et reconnaît que la mise en service de la liaison fixe aura également un effet sur plusieurs types d’entreprises, telles que les exploitants de transbordeurs, les entreprises de transport par autobus ou encore les entreprises de transport routier de marchandises.

129    D’autre part, alors que le Royaume de Danemark conteste l’existence d’un rapport de concurrence entre les services offerts par Femern et ceux fournis par l’exploitant de transbordeurs, il convient de relever que, ainsi que cela ressort de l’analyse financière de Femern pour l’année 2016, le niveau des prix constitue un élément pris en compte par le consommateur dans le choix d’utiliser, pour effectuer la traversée du détroit de Fehmarn, la liaison fixe ou les transbordeurs.

130    Dès lors, il convient de constater qu’il existe un rapport de substitution entre les services qui seront offerts par Femern et ceux offerts par l’exploitant de transbordeurs. Par conséquent, ainsi que le fait valoir à juste titre la Commission, même si Femern et l’exploitant de transbordeurs offrent des services dont les caractéristiques sont différentes à certains égards, il y a lieu de considérer qu’ils opèrent sur le même marché, à savoir celui des services de transport pour la traversée du détroit de Fehmarn, sur lequel les consommateurs auront le choix, dans l’hypothèse possible du maintien des services offerts par l’exploitant de transbordeurs après la mise en service de la liaison fixe, entre les services offerts par cet exploitant et ceux offerts par Femern dans le cadre de l’exploitation de la liaison fixe.

131    En outre, il convient de relever que le Royaume de Danemark ne conteste pas l’autre hypothèse envisageable, évoquée aux considérants 237 et 360 de la décision attaquée, selon laquelle la mise en service de la liaison fixe est susceptible d’entraîner la disparition des services de transbordeurs sur la liaison entre Rødby et Puttgarden. Or, une telle hypothèse corrobore l’existence d’un rapport de substitution entre les services offerts par l’exploitant de transbordeurs assurant cette liaison et ceux qui seront offerts par Femern.

132    Ainsi, dans les circonstances de la présente affaire, contrairement à ce que fait valoir le Royaume de Danemark, il y a lieu de considérer que les services offerts par Femern dans le cadre de l’exploitation de la liaison fixe seront en concurrence directe avec ceux offerts, pour la traversée du détroit de Fehmarn, par un autre prestataire de transport, à savoir l’exploitant de transbordeurs assurant la liaison entre Rødby et Puttgarden, lequel constitue, sans que cela ne soit contesté par le Royaume de Danemark, une entreprise poursuivant un but lucratif.

133    Par ailleurs, il convient de relever que la Commission a également identifié un marché de services de transport plus étendu, à savoir celui des liaisons de transport qui constituent une alternative pour la traversée du détroit de Fehmarn. En ce sens, il découle d’une lecture combinée des considérants 193 et 237 de la décision attaquée que la Commission a également pris en compte le marché des services de transport pour assurer la traversée de la mer Baltique occidentale, à savoir les liaisons entre le Danemark, l’Allemagne et la Suède, sur lesquelles opèrent également des exploitants de transbordeurs, dont, ainsi que cela ressort de l’analyse financière de Femern pour l’année 2016, une partie du trafic pourrait être absorbée par la liaison fixe.

134    S’agissant de l’argumentation selon laquelle, en substance, Femern ne pourrait pas être en concurrence avec d’autres prestataires de transport en raison de considérations relatives à l’exercice de prérogatives de puissance publique, celle-ci doit être écartée.

135    D’une part, pour autant que par cette argumentation le Royaume de Danemark soutient qu’il n’existerait pas de concurrence entre la liaison fixe et les exploitants de transbordeurs au motif que les effets de la mise en service de ladite liaison sur la concurrence résultent d’une décision des pouvoirs publics adoptée dans l’exercice de leurs prérogatives de puissance publique, celle-ci ne saurait prospérer. En effet, il convient de relever que le fait qu’un État membre fasse usage de telles prérogatives pour constituer une entité chargée de construire et d’exploiter une infrastructure n’implique pas nécessairement que les activités de cette entité se rattachent également à l’exercice de prérogatives de puissance publique.

136    D’autre part, pour autant que le Royaume de Danemark soutient que les éventuels effets sur la concurrence des activités de Femern seraient sans pertinence en raison de ce que lesdites activités se rattacheraient à l’exercice de prérogatives de puissance publique, une telle argumentation doit être écartée. En effet, comme cela a été constaté précédemment (voir points 74 à 106 ci-dessus), la Commission pouvait, dans les circonstances de la présente affaire, valablement constater que les activités de Femern, en tant que telles, ne relevaient pas de l’exercice de l’autorité publique et que, au vu des éléments du dossier, cette entité ne s’était pas vu confier de prérogatives de puissance publique.

137    En ce qui concerne l’argument tiré de ce que les effets des activités de Femern sur l’économie nationale et les marchés alentour seraient dénués de pertinence pour établir un rapport de concurrence entre cette entité et les exploitants de transbordeurs au motif que lesdites activités visent à optimiser les avantages macroéconomiques du Danemark, il convient de relever que ledit argument revient, en substance, à faire valoir que le constat qu’une entité exerce des activités en poursuivant un objectif d’intérêt général s’opposerait à ce que ladite entité puisse être considérée comme étant en concurrence avec des opérateurs poursuivant un but lucratif. Or, ainsi que cela a été rappelé au point 64 ci-dessus, la circonstance qu’une entité se soit vu confier certaines missions d’intérêt général ne saurait empêcher que les activités en cause soient considérées comme des activités économiques. En effet, il convient de rappeler qu’il résulte d’une jurisprudence constante que l’article 107, paragraphe 1, TFUE ne distingue pas selon les causes ou les objectifs des interventions étatiques, mais les définit en fonction de leurs effets [arrêts du 2 juillet 1974, Italie/Commission, 173/73, EU:C:1974:71, point 27, et du 6 avril 2022, Mead Johnson Nutrition (Asia Pacific) e.a./Commission, T‑508/19, EU:T:2022:217, point 80].

138    Quant à l’argument selon lequel il n’y aurait pas de concurrence entre Femern et les exploitants de transbordeurs au motif que l’intervention publique se limiterait à pallier les carences de l’initiative privée, il doit être rejeté. En effet, ainsi que cela ressort du point 126 ci-dessus, pour déterminer si une entité exerce une activité économique, la Commission doit établir que ladite entité offre des biens ou services sur un marché en concurrence avec des opérateurs poursuivant un but lucratif. Or, dans le cas d’espèce, ainsi que cela ressort du considérant 193 de la décision attaquée, il existe déjà un opérateur privé offrant des services pour assurer la traversée du détroit de Fehmarn. De même, il existe également des entreprises privées qui fournissent des services de transport sur d’autres liaisons qui constituent une alternative pour la traversée dudit détroit.

139    S’agissant de l’argument selon lequel Femern ne peut pas être en concurrence sur le marché des services de transport au stade de la construction de la liaison fixe, il doit également être écarté. En effet, comme il sera précisé dans le cadre de l’examen du second moyen aux points 185 à 207 ci-après, dans les circonstances de la présente affaire, la Commission pouvait sans commettre d’erreur d’appréciation conclure que les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe étaient indissociables.

140    Il résulte des considérations qui précèdent que la deuxième branche du premier moyen, tirée de ce qu’il aurait été constaté à tort que Femern offre des services de transport sur un marché en concurrence avec d’autres opérateurs, doit être rejetée dans son intégralité.

3.      Sur la troisième branche du premier moyen, tirée du constat prétendument erroné selon lequel Femern est un opérateur poursuivant une logique commerciale

141    Le Royaume de Danemark fait valoir que Femern ne peut pas exploiter la liaison fixe comme un opérateur en économie de marché fonctionnant dans une logique d’économie de marché et ne peut, par conséquent, pas se livrer à une exploitation commerciale de la liaison fixe. En ce sens, le Royaume de Danemark indique que Femern agit, pour les éléments essentiels, sur instruction du ministre des Transports danois qui sera également chargé de fixer le montant des péages en tenant compte de considérations macroéconomiques et politiques et précise que ses bénéfices seront affectés au financement d’infrastructures sur le territoire danois. Le Grand-Duché de Luxembourg soutient à cet égard que dès lors que Femern n’est pas soumise à la règle de maximisation des profits, que ses bénéfices contribuent au financement de l’infrastructure terrestre publique et qu’elle ne dispose d’aucune autonomie décisionnelle, il ne saurait être considéré qu’elle exerce une activité économique.

142    En outre, selon le Royaume de Danemark, soutenu par la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg, la circonstance que les activités de Femern soient financées par des redevances perçues auprès des usagers ne suffit pas pour considérer que cette entité opère dans une logique de marché. À cet égard, le Grand-Duché de Luxembourg soutient que le mode de financement de la liaison fixe par l’impôt ou par les usagers ne constitue pas un élément pertinent pour distinguer les activités non économiques des activités économiques. De plus, le Royaume de Danemark considère que la Commission a insuffisamment tenu compte de l’absence de liberté en matière tarifaire qui serait un indice pertinent afin d’établir que Femern ne constitue pas une entreprise.

143    Par ailleurs, selon le Royaume de Danemark, la circonstance que Femern encaissera des redevances lorsque la liaison fixe sera mise en service ne devrait pas avoir pour conséquence que ses activités se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique deviennent des activités de nature économique.

144    La Commission conteste cette argumentation.

145    En premier lieu, s’agissant des arguments par lesquels il est soutenu que la liaison fixe ne fera pas l’objet d’une exploitation commerciale, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence applicable en matière d’aides d’État, constituent des services susceptibles d’être qualifiés d’activités économiques les prestations fournies normalement contre rémunération, étant précisé que la caractéristique essentielle de la rémunération réside dans le fait que celle-ci constitue la contrepartie économique de la prestation en cause (voir, en ce sens, arrêts du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania, C‑74/16, EU:C:2017:496, point 47, et du 20 septembre 2019, Havenbedrijf Antwerpen et Maatschappij van de Brugse Zeehaven/Commission, T‑696/17, EU:T:2019:652, point 75).

146    En outre, en matière d’aides d’État, le fait qu’une activité ne soit pas assurée par des opérateurs privés ou le fait qu’elle ne soit pas rentable ne constituent pas des critères pertinents aux fins de la qualifier ou non d’activité économique. En effet, il est de jurisprudence constante que, d’une part, la notion d’« entreprise », dans le contexte du droit de la concurrence, comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement et que, d’autre part, constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné (arrêts du 25 octobre 2001, Ambulanz Glöckner, C‑475/99, EU:C:2001:577, point 19, et du 20 septembre 2019, Havenbedrijf Antwerpen et Maatschappij van de Brugse Zeehaven/Commission, T‑696/17, EU:T:2019:652, point 46). Il en découle que le caractère économique ou non d’une activité ne dépend pas du statut privé ou public de l’entité qui l’exerce ni de la rentabilité de cette activité (arrêts du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission, C‑288/11 P, EU:C:2012:821, point 50, et du 15 décembre 2016, Espagne/Commission, T‑808/14, non publié, EU:T:2016:734, point 55).

147    C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner les arguments soulevés par le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg.

148    Contrairement à ce que soutiennent en substance le Royaume de Danemark et le Grand-Duché de Luxembourg, le fait de subordonner l’accès à la liaison fixe au paiement de redevances constitue un élément pertinent pour qualifier l’exploitation de ladite liaison en tant qu’activité économique.

149    À cet égard, il importe de préciser que les dispositions du traité FUE relatives à la concurrence et plus spécifiquement les règles en matière d’aides d’État n’exigent pas que les États membres demandent un paiement pour l’accès aux infrastructures de transport, mais laissent à leur discrétion la question de savoir si l’accès doit être gratuit ou conditionné au paiement d’une contrepartie économique.

150    Ainsi, lorsque l’État membre décide dans le cadre de la mise en œuvre de sa politique des transports que la mise à disposition d’une infrastructure s’effectue à titre gratuit dans l’intérêt commun, cela peut constituer un indice pour constater que ladite infrastructure ne fait pas l’objet d’une exploitation économique. En revanche, lorsque l’État membre décide, comme en l’espèce, de conditionner l’accès à l’infrastructure au paiement d’une redevance afin de générer des recettes affectées, ainsi que cela ressort du considérant 192 de la décision attaquée, notamment au remboursement de la dette contractée pour financer la planification et la construction de la liaison fixe, il y a lieu de considérer que l’infrastructure fait l’objet d’une exploitation économique (voir, en ce sens, arrêt du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission, T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117, points 93 et 94).

151    En l’espèce, il y a lieu de constater que, au considérant 192 de la décision attaquée, la Commission a relevé que Femern fournit un service de transport aux citoyens et aux entreprises qui serait conditionné au paiement d’une redevance pour l’utilisation du tronçon routier et de l’infrastructure ferroviaire.

152    Il s’ensuit que, au considérant 194 de la décision attaquée, la Commission pouvait, sans commettre d’erreur d’appréciation, considérer que l’exploitation de la liaison fixe est régie par une logique économique étant donné qu’elle serait financée par les redevances d’utilisation.

153    Dès lors, dans la mesure où la Commission a constaté, d’une part, au considérant 193 de la décision attaquée, que Femern offrira notamment des services sur le marché des services de transport pour la traversée du détroit de Fehmarn sur lequel opère un opérateur poursuivant un but lucratif et, d’autre part, aux considérants 192 et 194 de la décision attaquée, que l’accès à la liaison fixe sera conditionné au paiement de redevances à cette entité qui constitue la contrepartie de la prestation de service, elle pouvait à bon droit conclure que l’activité d’exploitation de la liaison fixe constituait une activité économique.

154    Les arguments invoqués par le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg, tirés de ce que les règles auxquelles Femern est soumise ne lui permettraient pas de faire une exploitation commerciale de la liaison fixe, ne sauraient remettre en cause cette conclusion.

155    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, pour exclure le caractère économique d’une activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché, il n’est pas suffisant de faire valoir que l’exploitant de l’infrastructure n’agit pas sur une base purement commerciale de maximisation des profits, qu’il fait passer l’intérêt général avant le retour sur investissement, qu’il n’a pas de but lucratif et qu’il réinvestit systématiquement ses profits [voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2019, Chambre de commerce et d’industrie métropolitaine Bretagne-Ouest (port de Brest)/Commission, T‑754/17, non publié, EU:T:2019:270, point 80].

156    En outre, dès lors que le caractère économique ou non d’une activité ne dépend pas du statut privé ou public de l’entité qui l’exerce ni de la rentabilité de cette activité, il en résulte que même si les recettes d’une activité doivent obligatoirement être réinvesties dans des activités non économiques, les activités rémunérées constituent une participation au marché susceptible de mettre en cause les objectifs du droit de la concurrence, de sorte qu’une obligation de réinvestissement des recettes ne fait pas obstacle au caractère économique d’une activité (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2013, Allemagne/Commission, T‑347/09, non publié, EU:T:2013:418, point 50).

157    Ainsi, les arguments tirés de ce que Femern ne poursuit pas un objectif de maximisation des profits et doit réinvestir ses bénéfices pour le financement des infrastructures ne sauraient prospérer. En outre, la circonstance invoquée par le Royaume de Danemark selon laquelle le montant des redevances pour l’utilisation de la liaison fixe n’est pas établi sur la base d’une logique de marché, en ce sens que la structure des prix est éloignée de celle pratiquée sur le marché par les opérateurs privés, ne saurait faire obstacle au constat que l’exploitation de la liaison fixe constitue une activité économique.

158    De plus, il convient également de rejeter l’argument tiré de ce que Femern agit, pour les éléments essentiels, tels que la date de lancement des travaux, sur instruction du ministre des Transports danois. En effet, la question de savoir si les activités en cause exercées par une entité ont un caractère économique ne dépend pas du fait qu’un investisseur privé ne serait pas en mesure de les exercer sous les mêmes conditions (voir, par analogie, arrêt du 16 juillet 2014, Zweckverband Tierkörperbeseitigung/Commission, T‑309/12, non publié, EU:T:2014:676, point 76).

159    En outre, en ce qui concerne l’argument selon lequel la Commission aurait insuffisamment tenu compte de l’absence de liberté de Femern dans la fixation du montant des redevances pour l’utilisation de la liaison, il convient de relever que, certes, ainsi que cela ressort du point 42, paragraphe 2, de la loi relative à la construction, les principes régissant le montant des redevances sont arrêtés par le ministre des Transports danois. Toutefois, dans sa requête, le Royaume de Danemark reconnaît que, sur le fondement de l’article 42, paragraphe 3, de ladite loi, Femern peut amender les régimes généraux de rabais et en instituer de nouveaux, à condition que le niveau global des recettes ne s’en trouve pas sensiblement affecté. Dès lors, au considérant 197 de la décision attaquée, la Commission n’a pas commis d’erreur d’appréciation en constatant que Femern dispose d’une certaine marge de manœuvre pour fixer ses propres prix.

160    Or, le seul fait que le ministre des Transports danois encadre le montant des redevances sur la base de considérations macroéconomiques et se rattachant à la politique des transports ne saurait suffire pour conclure que l’activité d’exploitation de la liaison fixe ne constitue pas une activité économique.

161    Par ailleurs, ne saurait être prise en considération la circonstance, postérieure à la décision attaquée, que Femern ne dispose plus de la faculté de moduler le montant des redevances à la suite de l’adoption, au cours de la procédure juridictionnelle, d’une nouvelle loi, de sorte que seul le ministre des Transports danois est habilité à déterminer le montant desdites redevances. En effet, la légalité d’un acte de l’Union s’apprécie en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date à laquelle l’acte a été adopté (arrêts du 7 février 1979, France/Commission, 15/76 et 16/76, EU:C:1979:29, points 7 et 8, et du 12 décembre 1996, Altmann e.a./Commission, T‑177/94 et T‑377/94, EU:T:1996:193, point 119). Il s’ensuit qu’est exclue la prise en compte, lors de l’appréciation de la légalité de cet acte, d’éléments postérieurs à la date à laquelle l’acte de l’Union a été adopté (arrêts du 27 septembre 2006, Roquette Frères/Commission, T‑322/01, EU:T:2006:267, point 325, et du 11 février 2015, Espagne/Commission, T‑204/11, EU:T:2015:91, point 123). Ainsi, lors de l’adoption de la décision attaquée, la Commission pouvait valablement prendre en considération la circonstance que, dans une certaine mesure, Femern pouvait influencer le montant de certaines redevances pour l’accès à l’infrastructure.

162    Il résulte de ce qui précède que les arguments invoqués par le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg tendant à faire valoir que les règles auxquelles Femern est soumise ne lui permettraient pas de faire une exploitation commerciale de la liaison fixe, qu’ils soient pris isolément ou dans leur ensemble, ne remettent pas en cause le constat selon lequel l’exploitation de la liaison fixe constitue une activité économique.

163    En second lieu, s’agissant de l’argumentation selon laquelle, en substance, les activités de Femern se rattachant à des prérogatives de puissance publique ne sauraient devenir des activités économiques du fait de la perception de redevances pour l’utilisation de la liaison fixe, il suffit de relever qu’elle repose sur la prémisse erronée selon laquelle la Commission aurait dû considérer que certaines activités de Femern se rattachaient à l’exercice de prérogatives de puissance publique (voir points 75 à 106 ci-dessus). Dès lors, cette argumentation ne saurait prospérer.

164    Partant, la troisième branche du premier moyen doit être rejetée dans son intégralité.

4.      Sur le second moyen, tiré de ce que la Commission aurait constaté à tort que les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe sont indissociables

165    Par son second moyen, le Royaume de Danemark conteste non seulement le bien-fondé de la constatation selon laquelle les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe sont indissociables, mais également la motivation de la décision attaquée à cet égard.

a)      Sur la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne le caractère indissociable des activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe

166    Le Royaume de Danemark considère que la décision attaquée est insuffisamment motivée en ce qui concerne la constatation selon laquelle Femern exercerait une activité économique dès la phase de construction.

167    En outre, le Royaume de Danemark considère également que, au considérant 201 de la décision attaquée, la Commission n’a pas exposé les raisons pour lesquelles elle a conclu que les activités de promotion, de marketing ou d’information de Femern constituent des activités économiques.

168    La Commission conteste cette argumentation.

169    Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires de l’acte ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par celui-ci peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 166 et jurisprudence citée ; arrêt du 27 janvier 2021, KPN/Commission, T‑691/18, non publié, EU:T:2021:43, point 161). En particulier, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés. Il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (arrêts du 11 janvier 2007, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, C‑404/04 P, non publié, EU:C:2007:6, point 30, et du 24 septembre 2019, Fortischem/Commission, T‑121/15, EU:T:2019:684, point 41).

170    En l’espèce, s’agissant de la motivation du caractère indissociable des activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe, il y a lieu de relever que, au considérant 189 de la décision attaquée, la Commission a, tout d’abord, rappelé la jurisprudence selon laquelle l’exploitation d’un aéroport a été considérée comme une activité économique et qu’il en était de même pour la construction d’une piste d’un aéroport commercial. Si la Commission précise que cette jurisprudence portait spécifiquement sur les aéroports, elle a indiqué que les principes développés par la Cour et le Tribunal sont également applicables à la construction d’autres infrastructures. À cet égard, la note en bas de page no 89 sous le considérant 189 de la décision attaquée renvoie au point 202 de la communication relative à la notion d’« aide d’État », lequel indique que ces principes établis par les juridictions de l’Union sont applicables à la construction d’autres infrastructures indissociablement liées à une activité économique. De plus, au considérant 189 de la décision attaquée, la Commission évoque également la jurisprudence récente du Tribunal relative aux infrastructures portuaires en mentionnant, dans la note en bas de page no 90, l’arrêt du 20 septembre 2019, Havenbedrijf Antwerpen et Maatschappij van de Brugse Zeehaven/Commission (T‑696/17, EU:T:2019:652).

171    Ensuite, au considérant 192 de la décision attaquée, la Commission a constaté que les recettes de Femern provenant de l’exploitation des activités routières et ferroviaires sont notamment destinées à financer le coût total de la planification, de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe.

172    Enfin, au considérant 198 de la décision attaquée, après avoir conclu que l’exploitation de la liaison fixe constitue une activité économique, la Commission a considéré que la construction de l’infrastructure exploitée par Femern constitue également une activité économique sur le fondement des arrêts du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission (C‑288/11 P, EU:C:2012:821), et du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117).

173    Il y a lieu de constater que la Commission a fait référence aux arrêts de la Cour et du Tribunal concernant les infrastructures aéroportuaires, aux récentes affaires du Tribunal concernant les infrastructures portuaires ainsi qu’à la communication relative à la notion d’« aide d’État ». Dès lors, il convient de considérer que la Commission a entendu appliquer un principe selon lequel, en présence d’une infrastructure faisant l’objet d’une exploitation économique, l’activité de construction est également de nature économique lorsque les deux activités sont indissociablement liées. En l’espèce, la Commission a constaté l’existence d’un lien économique entre les deux activités au travers de l’utilisation des recettes d’exploitation pour rembourser notamment la dette contractée pour la planification et la construction de la liaison fixe.

174    Il s’ensuit que la Commission a motivé à suffisance de droit l’indissociabilité des activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe.

175    En ce qui concerne l’argument selon lequel, en substance, la Commission aurait insuffisamment motivé la conclusion selon laquelle les activités de promotion, de marketing ou d’information de Femern constituent des activités économiques, il convient de relever que, au considérant 201 de la décision attaquée, la Commission a indiqué, en substance, que ces activités ont contribué à la planification, à la construction et à l’exploitation de la liaison fixe et que, même dans l’éventualité où ces activités de promotion, de marketing ou d’information devraient être considérées comme étant des activités d’information, il n’en resterait pas moins qu’elles contribuent à l’activité économique de Femern. À cet égard, la Commission a relevé qu’il n’est pas rare que les entreprises soient tenues d’informer le public de leurs activités. En outre, elle a considéré que, en principe, les obligations d’information n’impliquent pas l’exercice de prérogatives de puissance publique. Ainsi, il ressort clairement du considérant 201 de la décision attaquée que la Commission a considéré que les activités de promotion, de marketing ou d’information constituent des activités économiques car elles se rattachent aux activités principales de Femern, à savoir la construction et l’exploitation de la liaison fixe. Dès lors, il convient de considérer que la Commission a suffisamment motivé la décision attaquée en ce qui concerne le caractère économique des activités de promotion, de marketing ou d’information.

b)      Sur le bien-fondé de la décision attaquée en ce qui concerne le caractère indissociable des activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe

176    Le Royaume de Danemark fait valoir que la Commission a commis une erreur d’appréciation en constatant que l’activité de construction n’est pas dissociable de l’activité d’exploitation de la liaison fixe.

177    À cet égard, premièrement, le Royaume de Danemark, soutenu par la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg, fait valoir que c’est à tort que la Commission considère qu’il ressortirait des arrêts du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission (C‑288/11 P, EU:C:2012:821), et du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117), qu’une activité de construction, c’est-à-dire une activité en amont, serait nécessairement une activité économique dès lors que l’activité d’exploitation, c’est-à-dire en aval, est une activité économique. Ce ne serait que dans certaines circonstances qu’une exploitation commerciale future d’une infrastructure pourrait avoir pour effet que sa construction constitue également une activité économique, notamment lorsqu’une piste d’aéroport ferait partie de l’activité économique existante dudit aéroport. Selon le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg, le cas d’espèce se distingue des précédentes affaires, dans la mesure où il s’agit d’un cas de construction initiale d’une infrastructure dont l’exploitation aura lieu dans le futur.

178    Deuxièmement, le Royaume de Danemark soutient qu’il convient de tenir compte de la circonstance que Femern n’exercera pas une activité économique avant la mise en service de la liaison fixe, de sorte que, lors de la phase de construction, l’entité n’est active sur aucun marché en concurrence avec d’autres opérateurs. À cet égard, le Royaume de Danemark fait valoir que ce n’est que si Femern est en mesure de pénétrer rapidement le marché en cause qu’elle pourrait être considérée comme concurrente des entreprises opérant déjà sur ledit marché.

179    Troisièmement, le Royaume de Danemark fait valoir, en substance, que dès lors que Femern n’opère pas sur un marché libéralisé, il ne saurait être considéré que cette entité exerce une activité économique.

180    Quatrièmement, selon le Royaume de Danemark, il ressort du point 84 de l’arrêt du 30 avril 2019, UPF/Commission (T‑747/17, EU:T:2019:271), que l’existence d’un lien économique entre deux activités ne suffit pas pour constater le caractère indissociable de ces activités, de sorte que le financement de la planification et de la construction de la liaison fixe par la perception de péages dans le cadre de l’exploitation de ladite liaison ne signifie pas nécessairement que les activités sont indissociables.

181    Cinquièmement, le Royaume de Danemark estime que la conclusion de la Commission sur le caractère indissociable des activités de construction et d’exploitation ne tient pas compte de ce que les circonstances pourraient évoluer d’ici à la mise en service de la liaison fixe, en particulier de ce que les autorités danoises pourraient décider de modifier les conditions d’exploitation de la liaison fixe.

182    Sixièmement, le Royaume de Danemark fait valoir que la qualification d’entreprise devrait faire l’objet d’une interprétation restrictive au motif que le fait de qualifier Femern d’entreprise avant la mise en service de la liaison fixe a des conséquences préjudiciables en ce que cette entité serait tenue de payer les intérêts dus au titre de la période d’illégalité. En outre, selon le Royaume de Danemark, une interprétation restrictive de la notion d’« entreprise » s’harmoniserait mieux avec des domaines voisins, notamment avec la réglementation nationale relative aux pratiques commerciales.

183    La Commission conteste ces arguments.

184    À titre liminaire, il y a lieu de constater que le Royaume de Danemark n’a invoqué aucun argument étayé pour contester le bien-fondé de la qualification des activités de promotion, de marketing ou d’information en tant qu’activités de nature économique.

185    S’agissant des arguments selon lesquels la Commission aurait erronément considéré que les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe sont indissociables, il y a lieu de rappeler que la jurisprudence a reconnu que l’exploitation commerciale et la construction d’infrastructures de transport en vue d’une telle exploitation commerciale sont susceptibles de constituer des activités économiques (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 2019, UPF/Commission, T‑747/17, EU:T:2019:271, point 65, et du 20 septembre 2019, Havenbedrijf Antwerpen et Maatschappij van de Brugse Zeehaven/Commission, T‑696/17, EU:T:2019:652, point 47). Cette jurisprudence est issue de l’arrêt du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117), auquel la Commission se réfère au considérant 198 de la décision attaquée, dans lequel le Tribunal avait jugé qu’elle pouvait valablement conclure au caractère indissociable de l’activité d’exploitation d’un aéroport et de l’activité de construction d’une nouvelle piste d’un aéroport étant donné que les taxes aéroportuaires constitueraient la principale source de revenus pour le financement de cette nouvelle piste et que l’exploitation de cette nouvelle piste participerait à l’activité économique de l’aéroport (arrêt du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission, T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117, point 94). En outre, dans cet arrêt, le Tribunal avait également jugé qu’il n’y avait pas lieu de dissocier l’activité de construction de la nouvelle piste d’aéroport de l’utilisation ultérieure qui en serait faite au motif que, eu égard à sa nature et à son objet, la construction de ladite piste ne relevait pas, en tant que telle, de prérogatives de puissance publique (arrêt du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission, T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117, point 99). Dans cette affaire, la Cour a jugé que le Tribunal n’avait pas commis d’erreur de droit en jugeant que la Commission avait à bon droit estimé que la construction de la nouvelle piste d’aéroport constituait une activité économique, de sorte que l’apport en capital litigieux, sous réserve des frais liés à l’exécution de missions publiques à déduire de son montant, constituait une aide d’État (arrêt du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission, C‑288/11 P, EU:C:2012:821, point 43).

186    Ainsi, lorsque l’exploitation d’une infrastructure fait l’objet d’une exploitation économique et que les redevances d’utilisation constituent la principale source de financement de sa construction, il convient de considérer que les activités de construction et d’exploitation de cette infrastructure constituent des activités économiques, à l’exclusion, lorsque l’État membre s’en prévaut expressément au cours de la procédure administrative, d’éventuelles missions qui impliqueraient le recours à des prérogatives de puissance publique.

187    C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments soulevés par le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg.

188    Premièrement, contrairement à ce que font valoir en substance le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg, les principes et critères relatifs à l’indissociabilité des activités de construction et d’exploitation d’une infrastructure de transport, posés dans les arrêts du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission (C‑288/11 P, EU:C:2012:821), et du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117), et rappelés au point 185 ci-dessus, ne sauraient être limités à la seule hypothèse de l’extension d’une infrastructure existante.

189    Certes, dans l’affaire ayant donné lieu aux arrêts du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission (C‑288/11 P, EU:C:2012:821), et du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117), était en cause l’extension d’une piste d’un aéroport préexistant.

190    Toutefois, lorsque, comme dans le cas d’espèce, il existe un marché de services de transport sur lequel opèrent déjà des opérateurs poursuivant un but lucratif, la construction d’une nouvelle infrastructure de transport ayant vocation à faire l’objet d’une exploitation économique est susceptible de perturber tout autant la concurrence sur ce marché que l’extension d’une infrastructure préexistante. Dès lors, il y a lieu de considérer que, aux fins de l’appréciation du caractère indissociable des activités de construction et d’exploitation d’une infrastructure, le cas d’une construction d’une nouvelle infrastructure ayant vocation à faire l’objet d’une exploitation économique future est comparable à celui d’une construction d’une extension d’une infrastructure de transport préexistante faisant l’objet d’une exploitation économique.

191    Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter l’argument selon lequel, en substance, les principes et critères relatifs à l’indissociabilité des activités de construction et d’exploitation d’une infrastructure de transport, posés dans les arrêts du 19 décembre 2012, Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission (C‑288/11 P, EU:C:2012:821), et du 24 mars 2011, Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117), ne seraient pas transposables au cas d’espèce.

192    Deuxièmement, s’agissant de l’argument selon lequel, en substance, Femern ne serait présente sur aucun marché pendant la phase de construction, il convient de relever qu’il est constant entre les parties que cette entité est à la fois chargée de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe.

193    À cet égard, ainsi que cela ressort de l’examen de la deuxième et de la troisième branche du premier moyen, dès lors que l’exploitation par Femern de la liaison fixe consistera à offrir des services sur un marché sur lequel opère un opérateur poursuivant un but lucratif en contrepartie d’une rémunération, la Commission n’a pas commis d’erreur de droit en constatant que l’exploitation de la liaison fixe constitue une activité économique.

194    En outre, il convient de relever que, au considérant 192 de la décision attaquée, la Commission a établi, sans que cela ne soit contesté par le Royaume de Danemark, que les recettes d’exploitation de l’infrastructure seront notamment utilisées pour rembourser les emprunts souscrits pour la planification et la construction de la liaison fixe. Ce faisant, contrairement à ce que font valoir en substance le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg, la Commission n’a pas présumé, mais a établi, en tenant compte des circonstances concrètes du cas d’espèce, que la construction de la liaison fixe ne peut être dissociée de son exploitation économique future. De même, ainsi que le reconnaît le Royaume de Danemark, l’exploitation économique de la liaison fixe a également pour objectif de financer sa construction dans la perspective de parvenir à un équilibre financier pour l’ensemble du projet. À cet égard, lors de l’audience, le Tribunal a interrogé la Commission sur l’articulation entre, d’une part, le constat effectué au considérant 192 de la décision attaquée selon lequel, en substance, les recettes de Femern provenant des activités routières et ferroviaires sont notamment destinées à financer le coût total de la planification, de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe et, d’autre part, l’affirmation du considérant 323 de ladite décision selon laquelle s’il était possible de fixer les prix à un niveau compensant l’ensemble des coûts de construction et d’exploitation, il n’existerait pas de déficit de financement et aucune aide d’État ne serait nécessaire. La Commission a répondu que, à la différence du considérant 323 de la décision attaquée, le considérant 192 concerne les coûts de planification et de construction déduits du montant de l’aide, de sorte qu’il ne saurait y avoir de contradiction entre ces deux considérants.

195    Ainsi, dès lors que l’exploitation économique de la liaison fixe a pour objectif de rembourser la dette souscrite pour sa construction et dans la mesure où la même entité est chargée des activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe, pour préserver l’effet utile des règles relatives aux aides d’État, il ne saurait être admis que les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe soient dissociées au motif que la mise en service de la liaison fixe n’interviendra que lorsque sa construction sera achevée.

196    Dans le cas contraire, dans la mesure où Femern est à la fois chargée de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe, si, comme le soutient le Royaume de Danemark, l’activité de construction était considérée comme étant dissociable de l’exploitation et, partant, non économique, les financements préférentiels obtenus pour la construction de la liaison fixe ne pourraient pas être qualifiés d’aides d’État. Il s’ensuivrait que, dans les circonstances de la présente affaire, au stade de l’exploitation de la liaison fixe, Femern bénéficierait de la possibilité d’exploiter une infrastructure subventionnée, ce qui lui procurerait un avantage économique qu’elle n’aurait pas obtenu aux conditions normales de marché (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 11 juillet 1996, SFEI e.a., C‑39/94, EU:C:1996:285, point 62, et du 15 mars 2018, Naviera Armas/Commission, T‑108/16, EU:T:2018:145, points 119 et 120). En effet, ainsi que cela ressort du point 223 de la communication relative à la notion d’« aide d’État », un exploitant d’une infrastructure est supposé bénéficier d’un avantage économique lorsque le montant payé pour disposer du droit d’exploiter l’infrastructure est inférieur au montant qu’il aurait dû payer pour exploiter une infrastructure comparable aux conditions normales du marché.

197    Il s’ensuit que la Commission a pu valablement conclure que la construction de la liaison fixe était indissociable de son exploitation économique future. Dès lors, c’est à bon droit qu’elle a considéré que Femern constitue une entreprise, et ce aussi bien pour l’activité d’exploitation de la liaison fixe que pour l’activité de construction de celle-ci.

198    Par conséquent, l’argumentation du Royaume de Danemark, selon laquelle Femern ne peut pas être considérée comme étant en concurrence avec des entreprises opérant sur le marché des services de transport pour la traversée du détroit de Fehmarn au stade de la construction de la liaison fixe ou au motif qu’elle n’aurait pas vocation à pénétrer rapidement ledit marché, doit être écartée.

199    Troisièmement, il est vrai, ainsi que le fait valoir le Royaume de Danemark, que, en tant que telles, les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe ne sont pas libéralisées en ce sens que la loi relative à la construction attribue l’exercice de ces activités à Femern exclusivement.

200    Toutefois, force est de constater que l’activité d’exploitation de la liaison fixe consistera à offrir des services pour assurer la traversée du détroit de Fehmarn qui est, sans que cela ne soit contesté par le Royaume de Danemark, un marché libéralisé sur lequel opère déjà un opérateur privé. Par ailleurs, ainsi que cela ressort du point 133 ci-dessus, la Commission a également identifié un marché plus large, à savoir celui des services de transport pour des liaisons qui constituent une alternative à la traversée du détroit de Fehmarn et sur lesquelles opèrent également des exploitants de transbordeurs.

201    Dans de telles circonstances, contrairement à ce que fait valoir en substance le Royaume de Danemark, le fait que les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe ne sont pas libéralisées n’a pas pour effet d’exclure la qualification desdites activités d’activités économiques. Dans le cas contraire, pour contourner l’application des règles du traité FUE relatives à la concurrence sur un marché libéralisé et ouvert à la concurrence, il suffirait qu’un État membre octroie des droits exclusifs à une entité appelée à offrir des services sur ledit marché.

202    Il s’ensuit que l’argument tiré de ce que la Commission aurait omis de tenir compte du fait que les activités de Femern ne sont pas libéralisées doit être rejeté.

203    Quatrièmement, s’agissant de l’argument du Royaume de Danemark fondé sur le point 84 de l’arrêt du 30 avril 2019, UPF/Commission (T‑747/17, EU:T:2019:271), selon lequel les activités de construction et d’exploitation sont dissociables, il convient de relever que ledit point concernait une problématique différente qui était liée au caractère dissociable des activités économiques de celles se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique. En particulier, dans cette affaire, pour écarter un argument tiré de ce que la Commission n’aurait pas déterminé les activités principales et accessoires des ports, le Tribunal avait considéré, au point 83 dudit arrêt, qu’il convenait de distinguer les activités économiques des ports et celles se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique en précisant qu’il n’existe aucun seuil en dessous duquel l’ensemble des activités économiques serait des activités non économiques, dès lors que les activités économiques seraient minoritaires. Ensuite, au point 84 de l’arrêt susmentionné, le Tribunal a rappelé que c’est seulement dans l’hypothèse où il serait établi que les activités économiques des ports seraient indissociables des activités se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique que l’ensemble des activités pourrait être considéré comme étant de nature non économique, étant précisé que la circonstance que les activités économiques financent les activités se rattachant à l’exercice de prérogatives de puissance publique ne suffit pas à établir un lien indissociable entre ces activités.

204    Or, ainsi que cela ressort de l’examen effectué aux points 74 à 106 ci-dessus, la Commission pouvait, dans les circonstances de la présente affaire, valablement constater que les activités de Femern, en tant que telles, ne relevaient pas de l’exercice de l’autorité publique et que cette entité ne s’était pas vu confier de prérogatives de puissance publique particulières. En tout état de cause, ainsi que cela a été constaté au point 89 ci-dessus, le Royaume de Danemark n’a apporté aucun élément tendant à démontrer que les fonctions d’autorité routière et de gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire assurées par Femern ou la préparation des plans de sécurité de la liaison fixe, dont il allègue qu’elles relèveraient de l’exercice de prérogatives de puissance publique, seraient indissociables de la construction et de l’exploitation de la liaison fixe. Dès lors, dans les circonstances de la présente affaire, le point 84 de l’arrêt du 30 avril 2019, UPF/Commission (T‑747/17, EU:T:2019:271), est dénué de pertinence pour établir que les activités de construction et d’exploitation de la liaison fixe seraient dissociables.

205    Cinquièmement, en ce qui concerne l’argument selon lequel, en substance, il serait loisible au Royaume de Danemark d’apporter, d’ici à la mise en service de la liaison fixe, des modifications aux modalités de son exploitation qui auraient pour effet que ladite activité ne serait plus de nature économique, en rendant par exemple gratuit l’accès à l’infrastructure pour tous les usagers, il suffit de rappeler que, comme indiqué au point 161 ci-dessus, il est de jurisprudence constante que la légalité d’une décision en matière d’aides d’État doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a adoptée. Par conséquent, les scénarios hypothétiques évoqués par le Royaume de Danemark ne sauraient être pertinents pour apprécier la légalité de la décision attaquée.

206    Sixièmement, quant à l’argument tiré de ce que la notion d’« entreprise » devrait être interprétée de manière restrictive au motif que le constat selon lequel les activités de Femern sont de nature économique lui serait préjudiciable car elle serait redevable d’intérêts pour la période d’illégalité au sens du point 52 de l’arrêt du 12 février 2008, CELF et ministre de la Culture et de la Communication (C‑199/06, EU:C:2008:79), celui-ci ne saurait prospérer. En effet, selon une jurisprudence constante, la notion d’« aide d’État », telle qu’elle est définie dans le traité FUE, présente un caractère juridique et doit être interprétée sur la base d’éléments objectifs (arrêts du 16 mai 2000, France/Ladbroke Racing et Commission, C‑83/98 P, EU:C:2000:248, point 25, et du 24 septembre 2019, Fortischem/Commission, T‑121/15, EU:T:2019:684, point 62). Dès lors, la notion d’« activité économique » ne saurait faire l’objet d’une interprétation restrictive au motif qu’une entreprise serait tenue au paiement d’intérêts pour la période d’illégalité du fait du non-respect par un État membre de l’obligation, prévue à l’article 108, paragraphe 3, TFUE, de ne pas mettre en œuvre une mesure susceptible de constituer une aide au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE aussi longtemps que la Commission n’a pas adopté une décision finale concernant cette mesure.

207    En outre, doit également être écarté l’argument tiré de ce que la notion d’« entreprise » devrait faire l’objet d’une interprétation restrictive à l’instar de ce qui serait prévu dans la réglementation danoise sur les pratiques commerciales. En effet, il convient de rappeler que les qualifications nationales ne sauraient être déterminantes pour apprécier la nature économique d’une activité au regard d’une disposition de droit de l’Union (voir, par analogie, arrêts du 12 décembre 2000, Aéroports de Paris/Commission, T‑128/98, EU:T:2000:290, point 128, et du 3 avril 2003, BaByliss/Commission, T‑114/02, EU:T:2003:100, point 114).

208    Il résulte des considérations qui précèdent que le second moyen doit être rejeté dans son intégralité.

5.      Sur la quatrième branche du premier moyen, tirée du constat prétendument erroné selon lequel les financements accordés à Femern faussent la concurrence et affectent les échanges entre États membres au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE

209    Le Royaume de Danemark considère que la circonstance que la liaison fixe viendra bouleverser les axes de déplacement en réduisant les temps et les distances des trajets sur l’ensemble des réseaux routiers et ferroviaires danois, scandinaves et de l’Allemagne septentrionale ne suffit pas pour affirmer que les financements accordés à Femern faussent la concurrence et affectent les échanges entre les États membres au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

210    Selon le Royaume de Danemark, la Commission aurait dû effectuer une appréciation concrète pour savoir s’il existe une réelle relation de concurrence entre l’infrastructure publique de transport et les liaisons alternatives. En particulier, le Royaume de Danemark reproche à la Commission de ne pas avoir tenu compte du fait que Femern ne se trouve pas en concurrence avec les exploitants de transbordeurs.

211    En outre, selon le Royaume de Danemark, pour apprécier si les financements accordés à Femern faussent la concurrence, il n’est pas pertinent de tenir compte du fait que la liaison fixe captera une partie du trafic d’une autre liaison publique, à savoir le pont du Grand Belt qui fait partie de la même structure juridique que Femern.

212    La Commission conteste ces arguments.

213    Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, en ce qui concerne les conditions de distorsion de la concurrence et d’affectation des échanges aux fins de la qualification d’une mesure nationale d’aide d’État, il y a lieu non pas d’établir une incidence réelle de l’aide en cause sur les échanges entre les États membres et une distorsion effective de la concurrence, mais seulement d’examiner si cette aide est susceptible d’affecter ces échanges et de fausser la concurrence (arrêts du 14 janvier 2015, Eventech, C‑518/13, EU:C:2015:9, point 65, et du 30 avril 2019, UPF/Commission, T‑747/17, EU:T:2019:271, point 91).

214    S’agissant de la condition relative à la distorsion de la concurrence au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, il y a lieu de rappeler que les aides qui visent à libérer une entreprise des coûts qu’elle aurait normalement dû supporter dans le cadre de sa gestion courante ou de ses activités normales faussent en principe les conditions de concurrence (arrêts du 30 avril 2009, Commission/Italie et Wam, C‑494/06 P, EU:C:2009:272, point 54, et du 30 avril 2019, UPF/Commission, T‑747/17, EU:T:2019:271, point 96).

215    En l’espèce, il y a lieu de relever que, au considérant 234 de la décision attaquée, la Commission a constaté que Femern est une entreprise active sur le marché des services de transport pour la traversée du détroit de Fehmarn, de sorte que l’avantage sélectif dont elle bénéficie est susceptible de renforcer sa position par rapport à d’autres entreprises actives sur ce marché, en particulier l’exploitant de transbordeurs et les opérateurs portuaires.

216    Ainsi, les financements accordés à Femern à des conditions préférentielles ont pour effet de réduire les coûts de financement de la construction de la liaison fixe et permettent l’exploitation sans contrepartie d’une infrastructure subventionnée. Il en résulte que ladite entité est ainsi libérée de coûts qu’elle aurait normalement dû supporter dans le cadre de sa gestion courante ou de ses activités normales. Par conséquent, la Commission pouvait valablement considérer que les financements en cause accordés à Femern sont susceptibles de fausser la concurrence.

217    S’agissant de l’affectation des échanges entre États membres, l’atteinte portée auxdits échanges ne peut être purement hypothétique ou présumée. Ainsi, il y a lieu de déterminer la raison pour laquelle la mesure considérée est susceptible d’affecter, par ses effets prévisibles, les échanges entre les États membres (arrêts du 18 mai 2017, Fondul Proprietatea, C‑150/16, EU:C:2017:388, point 30, et du 15 mai 2019, Achema e.a., C‑706/17, EU:C:2019:407, point 90). En particulier, lorsqu’une aide accordée par un État membre renforce la position de certaines entreprises par rapport à celle d’autres entreprises concurrentes dans les échanges entre les États membres, ces derniers doivent être considérés comme étant influencés par l’aide (arrêts du 14 janvier 2015, Eventech, C‑518/13, EU:C:2015:9, point 66, et du 30 avril 2019, UPF/Commission, T‑747/17, EU:T:2019:271, point 92).

218    À cet égard, il y a lieu de relever que la Commission a constaté que l’avantage sélectif accordé à Femern renforce sa position sur le marché des services de transport pour la traversée du détroit de Fehmarn entre Rødby et Puttgarden par rapport aux entreprises opérant déjà sur ce marché pour cette liaison entre le Danemark et l’Allemagne, en particulier par rapport à l’exploitant de transbordeurs offrant des services de transport sur ce marché. Dès lors, elle pouvait valablement considérer que les financements accordés à Femern affectent les échanges entre les États membres, ce d’autant plus que la satisfaction de cette condition ne saurait dépendre de la nature locale ou régionale des services de transport fournis (voir, en ce sens, arrêts du 14 janvier 2015, Eventech, C‑518/13, EU:C:2015:9, point 69, et du 29 juillet 2019, Azienda Napoletana Mobilità, C‑659/17, EU:C:2019:633, point 31).

219    Il s’ensuit que, contrairement à ce que fait valoir le Royaume de Danemark, la Commission pouvait, sans commettre d’erreur d’appréciation, conclure que les financements accordés à Femern faussent la concurrence et affectent les échanges entre États membres au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

220    S’agissant de l’argument selon lequel, en substance, Femern ne serait pas en concurrence avec des exploitants de transbordeurs, celui-ci a déjà été écarté dans le cadre de l’examen de la troisième branche du premier moyen (voir points 129 à 132 ci-dessus).

221    Enfin, le Royaume de Danemark soutient que la Commission aurait commis une erreur d’appréciation en considérant que la liaison fixe serait en concurrence avec d’autres infrastructures permettant de traverser la mer Baltique occidentale au motif qu’elles sont gérées par des entreprises publiques. Pour autant qu’il constitue un argument autonome, cet argument doit être rejeté comme étant inopérant. En effet, il suffisait à la Commission de constater que, sur le marché des services de transport pour la traversée du détroit de Fehmarn, en cause en l’espèce, les financements accordés à Femern à des conditions préférentielles étaient susceptibles de fausser la concurrence et d’affecter les échanges entre les États membres, ce qu’elle a fait au considérant 234 de la décision attaquée, dans lequel elle constate que lesdits financements offraient à Femern un avantage sélectif renforçant sa position par rapport aux entreprises présentes sur le marché en cause, à savoir celui des services de transport pour la traversée du détroit de Fehmarn.

222    Partant, il convient d’écarter la quatrième branche du premier moyen dans son intégralité.

223    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours.

III. Sur les dépens

224    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Royaume de Danemark ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

225    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Partant, le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Royaume de Danemark supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

3)      Le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne et le Grand-Duché de Luxembourg supporteront leurs propres dépens.