Cass. 1re civ., 20 décembre 2023, n° 22-14.020
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Champalaune
Rapporteur :
Mme Champ
Avocat général :
Mme Cazaux-Charles
Avocats :
SCP Gouz-Fitoussi, SCP Célice, Texidor, Périer, Me Occhipinti
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 janvier 2022), le 2 mars 2015, M. [J] (l'acquéreur) a conclu hors établissement avec la société GEF Négoces (le vendeur) un contrat de fourniture et de pose d'un kit photogénérateur au prix de 18 600 euros, financé, par un crédit souscrit le même jour avec son épouse Mme [J] auprès de la société Sygma, devenue BNP Paribas Personal Finance (la banque).
2. Invoquant des irrégularités du bon de commande, M. et Mme [J] ont assigné le vendeur et la banque en nullité des contrats.
Examen des moyens
Sur les deuxième, troisième et quatrième moyens
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. Le vendeur fait grief à l'arrêt de prononcer l'annulation du bon de commande signé le 2 mars 2015, de constater l'annulation de plein droit du contrat de crédit souscrit le même jour, de le condamner à rembourser à l'acquéreur le prix de vente de l'installation photovoltaïque, soit la somme de 18 600 euros, déduction faite des sommes perçues par ce dernier suite à la vente d'électricité à ERDF depuis le 2 septembre 2015, d'ordonner à l'acquéreur de tenir l'installation à sa disposition, de condamner le vendeur à prendre en charge le coût de la dépose et de la remise en état de l'existant, ainsi qu'à garantir M. et Mme [J] du remboursement du capital emprunté, alors « qu'un élément ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du code de la consommation, qu'à la condition que les parties l'aient fait entrer dans le champ contractuel ; qu'en se bornant, pour annuler le bon de commande, à relever que les caractéristiques du kit photovoltaïque étaient illisibles et que la puissance du micro-onduleur n'apparaissait pas, sans rechercher, si les parties avaient fait entrer ces deux éléments dans le champ contractuel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-17, L. 121-18-1, alinéa 1, et L. 111-1 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
5. Il résulte des articles L. 111-1, L. 121-17 et L. 121-18-1 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, qu'un contrat de vente ou de fourniture de services conclu hors établissement doit, à peine de nullité, indiquer, de manière lisible et compréhensible, les caractéristiques essentielles du bien ou du service.
6. L'arrêt relève, par motifs adoptés, que si la description de l'installation qui comportait les éléments suivants : 1 kit photogénérateur 2,5 kW, 10 capteurs solaires 250 Wc basse tension, 10 micro onduleurs M 215 Enphase, pose en surimposition, pose et mise en service de l'installation/test d'étanchéité, contrat d'accompagnement : contrôle de l'installation et assistance, permettait aux acquéreurs de se faire une idée globale des éléments la composant, elle était insuffisante pour décrire ses caractéristiques techniques en termes de performance, de rendement et de capacité de production.
7. Faisant ainsi ressortir que ces éléments ne satisfaisaient pas à l'exigence de compréhensibilité imposée par l'article L. 121-17 du code de la consommation, faute d'informer les acquéreurs sur la production d'électricité de l'installation, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en l'absence d'une telle information portant sur le résultat attendu de l'utilisation de cet équipement, constituant une caractéristique essentielle, la vente devait être annulée.
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
8. Le vendeur fait le même grief à l'arrêt, alors « que le document annexé au bon de commande a une valeur contractuelle ; que n'encourt pas la nullité le bon de commande qui est accompagné d'un document annexe détaillant les caractéristiques précises du bien vendu ; qu'en annulant le bon de commande, aux motifs qu'il importait peu que les caractéristiques précises du kit photovoltaïque ainsi que la puissance du micro-onduleur aient figuré dans un document annexe, la cour d'appel a violé les articles L. 121-17 et L. 121-18-1, alinéa 1, du code de la consommation et L. 111-1 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
9. L'article L. 121-18-1, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dispose :
« Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17. »
10. Il en résulte que les informations relatives aux caractéristiques essentielles du bien ou du service, qui sont au nombre de celles que visent ces dispositions, ne peuvent figurer sur des documents annexes qui ne sont pas signés de toutes les parties.
11. En retenant que l'insuffisance des mentions du contrat ne pouvait être suppléée par des documents dont les acquéreurs avaient été destinataires, la cour d'appel en a exactement déduit l'annulation du bon de commande.
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
12. Le vendeur fait le même grief à l'arrêt, alors « que l'erreur sur le point de départ du délai de rétractation est sanctionnée par la prolongation de douze mois du délai de rétractation prévue à l'article L. 121 -21-1 du code de la consommation à compter de la fin du délai de rétractation initial ; qu'en jugeant que l'erreur dans la mention relative au point de départ du droit de rétractation dans le bon de commande emportait la nullité du contrat, alors que la seule sanction de cette erreur était le prolongement du délai de douze mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial, la cour d'appel a violé l'article L. 121-21-1 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
13. Il résulte de la combinaison des articles L. 121-17,I, 2°, L. 121-18-1 et L. 121-21-1 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, que, lorsque contrairement aux exigences du premier de ces textes, les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement ou sont erronées, la prolongation du délai de rétractation, prévue par le troisième, n'est pas exclusive du droit pour le consommateur de demander l'annulation du contrat en vertu du deuxième.
14. La cour d'appel, qui a retenu que le formulaire de rétractation donnait des informations erronées sur le point de départ du délai de rétractation, en a exactement déduit l'annulation du contrat.
Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
15. Le vendeur fait le même grief à l'arrêt, alors « que les causes de nullités du bon de commande sont couvertes lorsque les acheteurs ont poursuivi en toute connaissance de cause l'exécution du contrat qui leur a permis de bénéficier de l'installation de production d'électricité ; qu'en affirmant que le fait d'exécuter le contrat n'avait pas permis de couvrir les causes de nullités du bon de commande, après avoir pourtant constaté que M. [J] avait payé les mensualités du prêt signé le 2 mars 2015, que les acheteurs avaient signé un certificat de livraison sans réserve le 6 mai 2015 et un procès-verbal de fin de chantier sans réserves, que M. [J] a fait raccorder son installation au réseau EDF le 2 septembre 2015, et enfin que dans les deux lettres de mise en demeure du 5 novembre 2017 et du 16 novembre 1017 les époux [J] avaient évoqué les causes de nullité du bon de commande dont ils avaient donc connaissance, ce dont il résulte que cette exécution volontaire avait couvert les causes de nullités du bon de commande, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé les articles L. 121-17 et L. 121-18-1, alinéa 1, du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
16. La cour d'appel, ayant retenu que le bon de commande du 2 mars 2015 ne mentionnait pas l'article L. 121-18-1, alinéa 1, du code de la consommation, qui prévoit la nullité du contrat en cas de manquement aux obligations d'information, en a exactement déduit que les actes accomplis par les acquéreurs antérieurement aux lettres de mises en demeure invoquées , dans l'ignorance de la sanction attachée aux dispositions que citait le contrat, ne pouvaient couvrir les vices qui l'affectaient.
17. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.