CJUE, 9e ch., 29 février 2024, n° C-688/22 P
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Methanol Holdings (Trinidad) Ltd
Défendeur :
Commission européenne, Achema AB, Grupa Azoty (S.A), Grupa Azoty Zakłady Azotowe Puławy (S.A)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avocat général :
M. P. Pikamäe
1 Par son pourvoi, Methanol Holdings (Trinidad) Ltd (ci-après « MHTL ») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 14 septembre 2022, Methanol Holdings (Trinidad)/Commission (T‑744/19, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2022:558), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation du règlement d’exécution (UE) 2019/1688 de la Commission, du 8 octobre 2019, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de mélanges d’urée et de nitrate d’ammonium originaires de Russie, de Trinité-et-Tobago et des États-Unis d’Amérique (JO 2019, L 258, p. 21, ci-après le « règlement d’exécution litigieux »), dans la mesure où ce règlement la concernait, et l’a condamnée aux dépens.
Le cadre juridique
2 L’article 1er du règlement (UE) 2016/1036 du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2016, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de l’Union européenne (JO 2016, L 176, p. 21), tel que modifié par le règlement (UE) 2018/825 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2018 (JO 2018, L 143, p. 1) (ci-après le « règlement de base ») JO 2016, L 176, p. 21, dispose :
« 1. Peut être soumis à un droit antidumping tout produit faisant l’objet d’un dumping lorsque sa mise en libre pratique dans l’Union [européenne] cause un préjudice.
[...] »
3 L’article 2 de ce règlement, intitulé « Détermination de l’existence d’un dumping », prévoit :
« [...]
8. Le prix à l’exportation est le prix réellement payé ou à payer pour le produit vendu à l’exportation vers l’Union.
9. Lorsqu’il n’y a pas de prix à l’exportation ou lorsqu’il apparaît que le prix à l’exportation n’est pas fiable en raison de l’existence d’une association ou d’un arrangement de compensation entre l’exportateur et l’importateur ou un tiers, le prix à l’exportation peut être construit sur la base du prix auquel les produits importés sont revendus pour la première fois à un acheteur indépendant ou, si les produits ne sont pas revendus à un acheteur indépendant ou ne sont pas revendus dans l’état où ils ont été importés, sur toute autre base raisonnable.
Dans de tels cas, des ajustements sont opérés pour tenir compte de tous les frais, y compris les droits et les taxes, intervenus entre l’importation et la revente et d’une marge bénéficiaire, afin d’établir un prix à l’exportation fiable au niveau frontière de l’Union.
[...]
C. COMPARAISON
10. Il est procédé à une comparaison équitable entre le prix à l’exportation et la valeur normale. Cette comparaison est faite, au même stade commercial, pour des ventes effectuées à des dates aussi proches que possible et en tenant dûment compte d’autres différences qui affectent la comparabilité des prix. Dans les cas où la valeur normale et le prix à l’exportation établis ne peuvent être ainsi comparés, il sera tenu compte dans chaque cas, sous forme d’ajustements, des différences constatées dans les facteurs dont il est revendiqué et démontré qu’ils affectent les prix et, partant, leur comparabilité. [...]
[...] »
4 L’article 3 dudit règlement, intitulé « Détermination de l’existence d’un préjudice », énonce :
« 1. Pour les besoins du présent règlement, le terme “préjudice” s’entend, sauf indication contraire, d’un préjudice important causé à l’industrie de l’Union, d’une menace de préjudice important pour l’industrie de l’Union ou d’un retard sensible dans la création d’une telle industrie, et est interprété conformément aux dispositions du présent article.
2. La détermination de l’existence d’un préjudice se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif :
a) du volume des importations faisant l’objet d’un dumping et de l’effet de ces importations sur les prix des produits similaires sur le marché de l’Union ; et
b) de l’incidence de ces importations sur l’industrie de l’Union.
3. En ce qui concerne le volume des importations faisant l’objet d’un dumping, on examine s’il y a eu une augmentation notable des importations faisant l’objet d’un dumping, soit en quantités absolues, soit par rapport à la production ou à la consommation dans l’Union. En ce qui concerne l’effet des importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix, on examine s’il y a eu, pour les importations faisant l’objet d’un dumping une sous-cotation notable du prix par rapport au prix d’un produit similaire de l’industrie de l’Union ou si ces importations ont, d’une autre manière, pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d’empêcher dans une mesure notable des hausses de prix qui, sans cela, se seraient produites. Un seul ou plusieurs de ces facteurs ne constituent pas nécessairement une base de jugement déterminante.
[...]
5. L’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie de l’Union concernée comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie, y compris le fait pour une industrie de ne pas encore avoir surmonté entièrement les effets de pratiques passées de dumping ou de subventionnement ; l’importance de la marge de dumping effective ; la diminution effective et potentielle des ventes, des bénéfices, de la production, de la part de marché, de la productivité, du rendement des investissements ou de l’utilisation des capacités ; les facteurs qui influent sur les prix dans l’Union ; les effets négatifs, effectifs et potentiels, sur les flux de liquidités, les stocks, l’emploi, les salaires, la croissance, l’aptitude à mobiliser les capitaux ou l’investissement. Cette liste n’est pas exhaustive et un seul ou plusieurs de ces facteurs ne constituent pas nécessairement une base de jugement déterminante.
6. Il doit être démontré à l’aide de tous les éléments de preuve pertinents présentés en relation avec le paragraphe 2 que les importations faisant l’objet d’un dumping causent un préjudice au sens du présent règlement. En l’occurrence, cela implique la démonstration que le volume et/ou les niveaux des prix visés au paragraphe 3 ont un impact sur l’industrie de l’Union au sens du paragraphe 5 et que cet impact est tel qu’on puisse le considérer comme important.
7. Les facteurs connus, autres que les importations faisant l’objet d’un dumping, qui, au même moment, causent un préjudice à l’industrie de l’Union sont aussi examinés de manière que le préjudice causé par ces autres facteurs ne soit pas attribué aux importations faisant l’objet d’un dumping au sens du paragraphe 6. Les facteurs qui peuvent être considérés comme pertinents à cet égard comprennent : le volume et les prix des importations non vendues à des prix de dumping ; la contraction de la demande ou les modifications de la configuration de la consommation ; les pratiques commerciales restrictives des producteurs de pays tiers et de l’Union et la concurrence entre ces mêmes producteurs ; l’évolution des techniques ainsi que les résultats à l’exportation, et la productivité de l’industrie de l’Union.
8. L’effet des importations faisant l’objet d’un dumping est évalué par rapport à la production de l’industrie de l’Union du produit similaire lorsque les données disponibles permettent d’identifier cette production séparément sur la base de critères tels que les procédés de production, les ventes et les bénéfices des producteurs. S’il n’est pas possible d’identifier séparément cette production, les effets des importations faisant l’objet d’un dumping sont évalués par examen de la production du groupe ou de la gamme de produits le plus étroit, comprenant le produit similaire, pour lequel les renseignements nécessaires peuvent être fournis.
[...] »
5 L’article 9, paragraphe 4, du même règlement dispose :
« Lorsqu’il ressort de la constatation définitive des faits qu’il y a dumping et préjudice en résultant et que l’intérêt de l’Union nécessite une action conformément à l’article 21, un droit antidumping définitif est imposé par la Commission [européenne], statuant conformément à la procédure d’examen visée à l’article 15, paragraphe 3. Lorsque des droits provisoires sont en vigueur, la Commission lance cette procédure au plus tard un mois avant l’expiration de ces droits.
Le montant du droit antidumping n’excède pas la marge de dumping établie et devrait être inférieur à cette marge, si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie de l’Union. [...]
[...] »
Les antécédents du litige
6 Les antécédents du litige sont exposés aux points 2 à 40 de l’arrêt attaqué. Aux fins de la présente procédure, ils peuvent être résumés comme suit.
7 Le 13 août 2018, la Commission a ouvert une enquête antidumping à la suite d’une plainte déposée par Fertilizers Europe au nom de producteurs représentant plus de 50 % de la production totale de mélanges d’urée et de nitrate d’ammonium de l’Union.
8 Le produit faisant l’objet de l’enquête correspondait à des mélanges d’urée et de nitrate d’ammonium en solution aqueuse ou ammoniacale pouvant contenir des additifs, relevant actuellement du code NC 3102 80 00 (ci-après les « UAN »).
9 La requérante, société régie par le droit de Trinité-et-Tobago, a vendu des UAN à un acheteur lié dans l’Union, à savoir Helm AG (ci-après « HAG »). Ce dernier a ensuite revendu les UAN à des acheteurs indépendants dans l’Union et à deux acheteurs liés établis dans l’Union, à savoir Helm Engrais France (ci-après « HEF ») et Helm Iberica (ci-après « HIB »).
10 Le 10 avril 2019, la Commission a adopté le règlement d’exécution (UE) 2019/576, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de mélanges d’urée et de nitrate d’ammonium originaires de Russie, de Trinité-et-Tobago et des États-Unis d’Amérique (JO 2019, L 100, p. 7).
11 Le 8 octobre 2019, la Commission a adopté, en application de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base, le règlement d’exécution litigieux instituant, notamment, un droit antidumping spécifique de 22,24 euros par tonne sur les importations dans l’Union d’UAN fabriqués par MHTL.
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
12 Par requête déposée au greffe du Tribunal, MHTL a introduit un recours tendant à l’annulation du règlement d’exécution litigieux, en ce qu’il la concerne.
13 À l’appui de son recours, MHTL a invoqué un moyen unique, en faisant valoir que la Commission avait violé l’article 3, paragraphes 1 à 3 et 5 à 8, du règlement de base ainsi que le principe d’égalité de traitement en appliquant, par analogie, l’article 2, paragraphe 9, de ce règlement pour la détermination du prix de MHTL à utiliser pour le calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs.
14 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ce recours dans son ensemble.
15 D’une part, MHTL a allégué que la méthode appliquée par la Commission pour le calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs violait l’article 3, paragraphe 1, du règlement de base.
16 Le Tribunal a relevé que les dispositions de l’article 3, paragraphes 1 à 3, de ce règlement ne prévoient aucune méthode particulière en ce qui concerne la détermination de l’effet des importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix des produits similaires de l’industrie de l’Union. Étant donné que MHTL n’a pas contesté que le prix à l’exportation qu’elle avait déclaré en douane n’était pas fiable, précisément en raison de l’existence d’une relation intragroupe avec HAG, l’importateur lié, le Tribunal a jugé que l’application par analogie de l’article 2, paragraphe 9, dudit règlement était correcte.
17 D’autre part, MHTL a allégué que la méthode appliquée par la Commission violait l’article 3, paragraphes 2, 3 et 5 à 8, du règlement de base ainsi que le principe d’égalité de traitement, dès lors que la Commission n’a pas tenu compte des prix négociés avec les acheteurs indépendants et n’a pas comparé le prix à l’exportation et le prix de l’industrie de l’Union au même stade commercial.
18 À cet égard, le Tribunal a relevé que, dans le cadre du calcul de la marge de sous-cotation des prix, effectué à titre principal par la Commission, celle-ci avait réduit les prix des ventes des producteurs-exportateurs dans l’Union du montant des frais de vente, des dépenses administratives et des autres frais généraux (ci-après les « frais VAG ») et d’une marge bénéficiaire théorique de leurs sociétés de négoce liées, mais n’avait effectué aucune déduction de cette nature pour les ventes de l’industrie de l’Union par l’intermédiaire de négociants liés. Il en a déduit que ce calcul, qui méconnaissait l’obligation de comparer les prix du produit concerné et ceux de l’industrie de l’Union au même stade commercial, était erroné. Cependant, après avoir analysé les deux calculs supplémentaires de la marge de sous-cotation des prix, effectués par la Commission, le Tribunal a considéré que les constatations de celle-ci concernant l’existence d’une sous-cotation des prix, fondées sur ces deux calculs, n’étaient entachées d’aucune erreur de droit ni d’aucune erreur manifeste d’appréciation. Enfin, il a estimé que l’erreur entachant le premier calcul de la marge de sous-cotation des prix n’affectait pas le calcul de la marge de sous-cotation des prix indicatifs, laquelle avait été fixée en utilisant le coût de production des producteurs de l’Union.
Les conclusions des parties devant la Cour
19 La requérante demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué et,
– à titre principal, de faire droit aux conclusions qu’elle a présentées dans son recours devant le Tribunal et de condamner la Commission ainsi que toute partie intervenante aux dépens, y compris ceux encourus en première instance, ou,
– à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour réexamen et de réserver les dépens de la procédure en première instance et du pourvoi.
20 La Commission, d’une part, Achema AB, Grupa Azoty S.A. et Grupa Azoty Zakłady Azotowe Puławy S.A., d’autre part, demandent à la Cour :
– de rejeter le pourvoi comme non fondé et
– de condamner la requérante aux dépens de l’instance.
Sur le pourvoi
21 À l’appui de son pourvoi, la requérante présente deux moyens, le premier, tiré d’une erreur de droit du Tribunal quant à la définition du stade commercial que la Commission peut prendre en compte pour établir le prix à l’exportation aux fins du calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs, et le second, tiré d’une erreur de droit commise par le Tribunal en considérant que ses arguments, tirés de l’incidence de l’erreur commise par la Commission en établissant le prix à l’exportation sur ses conclusions concernant l’existence d’une dépression des prix et d’un blocage des prix, étaient irrecevables au motif qu’ils n’avaient été énoncés que dans la réplique.
Sur le premier moyen
Argumentation des parties
22 Le premier moyen du pourvoi porte sur les appréciations du Tribunal relatives à la détermination du prix à l’exportation aux fins du calcul des marges de sous‑cotation des prix et des prix indicatifs, formulées aux points 74, 76, 82 à 94, 100 à 105 et 109 de l’arrêt attaqué.
23 La requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en interprétant la notion de « stade commercial » en fonction du type d’entité qui vend le produit considéré et non du type de client qui l’achète et en considérant, par voie de conséquence, que la Commission s’était livrée à une comparaison équitable en calculant les marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs de MHTL, conformément à l’article 3, paragraphes 2 et 3, du règlement de base. En raison de cette erreur, le Tribunal aurait estimé, à tort, que les prix comparés par la Commission dans ses deux calculs supplémentaires de la marge de sous-cotation des prix et dans son calcul de la marge de sous-cotation des prix indicatifs se situaient au même stade commercial, à savoir au stade de la vente des UAN par les entités productrices.
24 Le Tribunal aurait ainsi défini, de manière erronée, la notion de « stade commercial » comme le niveau auquel la transaction d’un produit a lieu, apprécié en fonction du type d’entité qui vend ce produit, selon qu’il s’agit de producteurs ou de négociants liés. La seule définition correcte de la notion de « stade commercial », telle qu’appliquée par la Commission dans de précédentes enquêtes et par la Cour dans ses arrêts antérieurs, correspondrait au stade auquel la transaction d’un produit a lieu, apprécié en fonction du type de client qui achète ce produit.
25 Cette définition, valable pour le calcul de la marge de dumping effectué au titre de l’article 2 du règlement de base, devrait nécessairement être retenue pour déterminer s’il y a lieu d’appliquer, par analogie, le paragraphe 9 de cet article aux fins du calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs.
26 Selon la requérante, la Commission ne serait en droit d’appliquer, par analogie, cette disposition aux fins du calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs que dans les cas où l’entité liée au producteur-exportateur dans l’Union vend un produit considéré à des clients indépendants à un stade commercial qui se situe plus en aval de la chaîne de distribution que les ventes réalisées par l’industrie de l’Union. Dans ces hypothèses, en l’absence de prix fiable au stade commercial approprié, elle serait fondée à déduire du prix de vente du produit considéré les frais VAG de cette entité et une marge bénéficiaire théorique pour construire le prix à l’exportation.
27 En revanche, l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base ne pourrait pas être appliqué, par analogie, pour construire le prix à l’exportation aux fins du calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs lorsque l’industrie de l’Union et ses entités liées, d’une part, et les entités liées au producteur-exportateur dans l’Union, d’autre part, vendent le produit considéré à des clients indépendants dans l’Union au même stade commercial, puisqu’il existerait, dans une telle hypothèse, un prix fiable au stade commercial approprié.
28 La requérante soutient que, en l’espèce, les ventes d’UAN par les producteurs de l’Union et leurs entités liées aux clients indépendants, d’une part, et celles de HAG, HEF et HIB à ces clients, d’autre part, interviennent au même stade commercial, qui correspond au « stade initial de la commercialisation du produit considéré ». L’application, par analogie, de l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base aux prix de vente de HAG, HEF et HIB aurait donc conduit à un prix à l’exportation artificiellement bas qui correspondrait non pas au « stade initial de la commercialisation du produit considéré », mais à un stade plus en amont de la chaîne de distribution, lors de la commercialisation du produit à un négociant.
29 Ainsi, selon la requérante, la Commission n’a pas comparé, pour les besoins des calculs des marges de sous‑cotation des prix et des prix indicatifs, les prix au même stade commercial puisqu’elle a construit un prix à l’exportation facturé par MHTL à un négociant, en l’occurrence HAG, qu’elle a comparé au prix pratiqué par l’industrie de l’Union pour des ventes directes à des distributeurs, détaillants, grossistes et grandes coopératives indépendants.
30 La Commission, d’une part, Achema, Grupa Azoty et Grupa Azoty Zakłady Azotowe Puławy, d’autre part, contestent le bien-fondé de ce moyen.
Appréciation de la Cour
31 Le premier moyen du pourvoi est tiré de ce que le Tribunal aurait interprété de manière erronée les dispositions de l’article 3, paragraphes 1 à 3 et 5 à 8, et de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base, en définissant, aux points 74, 76, 82 à 94, 100 à 105 et 109 de l’arrêt attaqué, le prix à l’exportation aux fins du calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs.
32 Conformément à l’article 1er, paragraphe 1, du règlement de base, pour pouvoir soumettre un produit faisant l’objet d’un dumping à un droit antidumping, il importe que sa mise en libre pratique dans l’Union cause un préjudice.
33 Aux fins de déterminer l’existence de ce préjudice, l’article 3, paragraphe 2, de ce règlement prévoit qu’il convient de procéder à un examen objectif du volume des importations faisant l’objet d’un dumping et de leur effet sur les prix des produits similaires sur le marché de l’Union ainsi que de leur incidence sur l’industrie de l’Union. S’agissant de l’effet des importations sur les prix, l’article 3, paragraphe 3, dudit règlement précise que la Commission doit examiner s’il y a, pour ces importations, une sous-cotation notable du prix par rapport au prix d’un produit similaire de l’industrie de l’Union ou si lesdites importations ont pour effet de déprimer sensiblement les prix ou d’empêcher dans une mesure notable des hausses de prix.
34 À cet égard, il convient de rappeler que, dans le domaine de la politique commerciale commune, et tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner. Le contrôle juridictionnel d’une telle appréciation doit ainsi être limité à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir (arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C‑191/09 P et C‑200/09 P, EU:C:2012:78, point 63 ainsi que jurisprudence citée).
35 Il convient également de relever que l’établissement par la Commission d’un droit antidumping définitif n’implique pas que la procédure introduite devant les juridictions de l’Union aux fins de contester ce droit antidumping ne soit pas contradictoire. À l’exception des moyens d’ordre public, que le juge est tenu de soulever d’office, telle l’absence de motivation de l’acte en cause, c’est à la partie requérante qu’il appartient de soulever des moyens contre cet acte et d’apporter des éléments de preuve à l’appui de ces moyens (voir, en ce sens, arrêt du 5 mai 2022, Zhejiang Jiuli Hi-Tech Metals/Commission, C‑718/20 P, EU:C:2022:362, point 62).
36 La requérante au pourvoi reproche, en substance, au Tribunal d’avoir commis une erreur en souscrivant à la détermination du prix à l’exportation de MHTL par la Commission dans le cadre des deux calculs supplémentaires de la marge de sous-cotation des prix et du calcul de la marge de sous-cotation des prix indicatifs de MHTL. Elle considère que l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base peut être appliqué par analogie uniquement dans les cas où l’entité liée à l’exportateur dans l’Union vend un produit considéré à des clients indépendants à un stade commercial qui se situe plus en aval de la chaîne de distribution que les ventes de ce produit réalisées par l’industrie de l’Union.
37 En l’occurrence, il convient de relever que, aux points 72 à 76 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rappelé que l’obligation de procéder à un examen objectif de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping, inscrite à l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base, imposait de procéder à une comparaison équitable entre le prix du produit concerné et le prix du produit similaire de l’industrie de l’Union lors des ventes effectuées sur le territoire de l’Union. Le Tribunal a jugé, au point 75 de l’arrêt attaqué, que la comparaison de ces prix au même stade commercial constituait une condition de licéité du calcul de la marge de sous-cotation des prix et, aux points 104 et 105 de cet arrêt, qu’une comparaison ne pouvait être considérée comme effectuée au même stade commercial lorsque les prix comparés n’incluaient pas les mêmes frais et bénéfices, lesquels sont déduits quand l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base est appliqué seulement aux prix à l’exportation.
38 Cette analyse du Tribunal est confirmée par le point 99 de l’arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper (C‑260/20 P, EU:C:2022:370), dans lequel la Cour a dit pour droit que, l’examen de l’existence d’une sous-cotation des prix étant une question économiquement complexe pour laquelle le règlement de base n’impose aucune méthode particulière, la Commission jouit d’un large pouvoir d’appréciation à cet égard. Il s’ensuit que, conformément à l’arrêt du 20 janvier 2022, Commission/Hubei Xinyegang Special Tube (C‑891/19 P, EU:C:2022:38, points 35 et 36 ainsi que jurisprudence citée), l’application, par analogie, de la méthode de construction de prix visée à l’article 2, paragraphe 9, de ce règlement afin d’examiner une sous-cotation de prix peut être envisagée pour autant que cette méthode s’inscrive dans le cadre juridique prévu par le règlement de base et ne conduise pas à un résultat manifestement erroné.
39 Aux points 100 à 102 de l’arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper (C‑260/20 P, EU:C:2022:370), la Cour a précisé qu’il convient de tenir compte de deux exigences particulières imposées par le règlement de base lors du calcul de l’existence d’une sous-cotation des prix. D’une part, l’article 3, paragraphe 2, de ce règlement exige que ce calcul se fasse en examinant objectivement les effets des importations sur les prix. Cette exigence implique elle-même que la comparaison des prix se fasse au même stade de commercialisation des produits en cause. En effet, ce n’est qu’à cette condition, premièrement, que l’effet réel des importations sur les prix d’un produit similaire de l’industrie de l’Union peut être correctement pris en compte, deuxièmement, que les ventes du produit considéré et celles du produit similaire de l’industrie de l’Union peuvent être considérées comme ayant un même « point de référence », troisièmement, que les prix de ventes aux premiers clients indépendants des produits considérés peuvent objectivement être pris en considération pour le calcul de la sous-cotation et, quatrièmement, que la comparaison des prix au niveau où se déroule la concurrence dans l’Union peut être pertinente. D’autre part, il découle d’une lecture conjointe de l’article 1er, paragraphe 1, et de l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base que le préjudice doit être apprécié lors de la « mise en libre pratique dans l’Union » du produit faisant l’objet d’un dumping. Par conséquent, le calcul de la sous-cotation doit, en principe, se faire au niveau des importations faisant l’objet d’un dumping.
40 Dans cette espèce, la Cour a notamment considéré qu’il était loisible à la Commission, en vue de garantir une comparaison objective des prix au niveau de la première mise en libre pratique du produit considéré dans l’Union, de construire le prix à l’importation après dédouanement à la frontière en déduisant du prix de revente de ce produit par une entité liée à l’exportateur à des clients indépendants des frais VAG et une marge bénéficiaire. En effet, cette application, par analogie, de l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base relevait de la large marge d’appréciation dont dispose la Commission pour mettre en œuvre l’article 3, paragraphe 2, de ce règlement et ne pouvait donc pas être considérée, en soi, comme étant entachée d’une erreur manifeste d’appréciation (arrêt du 12 mai 2022, Commission/Hansol Paper, C‑260/20 P, EU:C:2022:370, point 105).
41 Dans la présente affaire, ainsi que le soutient la Commission à bon droit au point 42 de son mémoire en réponse, le même stade commercial correspond au prix départ usine pratiqué par les producteurs de l’Union qui commercialisent des produits auprès de clients indépendants ainsi qu’au prix frontière de l’Union du produit considéré. Le prix de la première revente à un client indépendant sur le marché de l’Union par une entité de vente liée à l’exportateur correspond non pas au stade de commercialisation sortie usine du produit équivalent provenant de l’industrie de l’Union, mais à un stade ultérieur de la commercialisation de ce produit. Le prix de vente de l’entité de vente liée à l’exportateur au premier client indépendant dans l’Union est non pas le prix d’importation mais un prix de revente.
42 À cet égard, ainsi qu’il ressort du point 39 du présent arrêt, la Cour a confirmé que, en principe, le calcul de la sous-cotation doit se faire « au niveau des importations faisant l’objet d’un dumping », à savoir à la frontière de l’Union, en ce qui concerne les importations faisant l’objet d’un dumping. Par conséquent, dans les cas où le prix à l’importation n’est pas fiable en raison de la relation entre l’exportateur et ses entités de vente liées dans l’Union, la Commission peut, comme elle le soutient à juste titre au point 44 de son mémoire en réponse, appliquer l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base par analogie pour déterminer le prix à l’exportation aux fins des calculs de la sous-cotation des prix. Au demeurant, ces considérations correspondent, en substance, à celles qui figurent aux points 60 à 63 de l’arrêt attaqué, lesquels ne sont pas contestés par la requérante.
43 Il découle de ce qui précède que, premièrement, le Tribunal n’a pas commis d’erreur en considérant, au point 82 de l’arrêt attaqué, que, dans le premier calcul supplémentaire de la marge de sous-cotation des prix, dans lequel la Commission a déduit les frais VAG et les bénéfices des entités de vente liées de l’industrie de l’Union, les prix des producteurs de l’Union et ceux des producteurs-exportateurs avaient été ramenés au même stade commercial afin d’évaluer les effets sur les prix au titre de l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base. Ainsi que le soutient la Commission au point 45 de son mémoire en réponse, ces prix s’entendaient donc nets des coûts de commercialisation dans l’Union supportés par les entités de vente liées, de sorte qu’il y a lieu de considérer que la comparaison a été effectuée au stade initial de la commercialisation, où les importations faisant l’objet d’un dumping entrent en concurrence avec les produits des producteurs de l’Union.
44 Deuxièmement, au point 92 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a pas non plus commis d’erreur. En effet, il en ressort que, dans le second calcul supplémentaire de la marge de sous-cotation des prix, dans lequel la Commission a comparé uniquement le prix des ventes directes réalisées par l’industrie de l’Union et le prix à l’exportation, ajusté en vertu de l’article 2, paragraphe 9, du règlement de base, la Commission avait procédé à une comparaison équitable. Ce prix des ventes directes n’incluait, comme l’a réitéré la Commission à juste titre au point 46 de son mémoire en réponse, aucun coût de commercialisation supplémentaire supporté par les entités de vente liées aux producteurs de l’Union, alors que les coûts comparables supportés par les entités de vente liées à l’exportateur avaient été déduits des prix de revente pratiqués par celui-ci en application de l’article 2, paragraphe 9, de ce règlement pour obtenir un prix à la frontière de l’Union fiable.
45 Troisièmement, la requérante n’est pas fondée à soutenir que le calcul de la marge de la sous-cotation des prix indicatifs était également incorrect au motif que la Commission aurait comparé un prix à l’exportation construit facturé par MHTL à HAG avec le prix pratiqué par l’industrie de l’Union pour des ventes directes à l’égard des distributeurs, détaillants, grossistes et grandes coopératives indépendants. En effet, comme le Tribunal l’a observé au point 103 de l’arrêt attaqué, la marge de sous-cotation des prix indicatifs a été fixée en utilisant le coût de production des producteurs de l’Union et aucun coût de commercialisation supplémentaire n’a été ajouté aux prix faisant l’objet de la comparaison, de sorte qu’il y a lieu de considérer que la comparaison concerne le même stade commercial.
46 Quatrièmement, enfin, c’est à bon droit que la Commission soutient, au point 48 de son mémoire en réponse, que la requérante n’a pas démontré l’existence de différences dans les prix selon le type de client, qu’il s’agisse de distributeurs, de détaillants, de grossistes ou de grandes coopératives. En effet, au considérant 132 du règlement d’exécution litigieux, la Commission a constaté que les clients des producteurs de l’Union achetaient tous des UAN en gros et en grandes quantités et en livraient de grandes quantités à leurs clients. Ce constat n’a pas été contesté devant le Tribunal.
47 Il résulte de ce qui précède que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit dans la détermination du prix à l’exportation de MHTL dans le cadre des deux calculs supplémentaires de la marge de sous-cotation des prix et du calcul de la marge de sous-cotation des prix indicatifs. Par conséquent il y a lieu de rejeter le premier moyen du pourvoi.
Sur le second moyen
Argumentation des parties
48 Le second moyen du pourvoi porte sur les appréciations formulées par le Tribunal au point 69, deuxième phrase, et aux points 96 à 99 de l’arrêt attaqué, par lesquelles il a déclaré irrecevables, du fait qu’ils n’auraient été avancés pour la première fois qu’au stade de la réplique, les arguments de la requérante tirés de l’incidence de l’erreur commise par la Commission en établissant le prix à l’exportation sur ses conclusions concernant l’existence d’une dépression et d’un blocage des prix.
49 La requérante soutient que la Commission, dans son mémoire en défense devant le Tribunal, a fait valoir que l’erreur commise en établissant le prix à l’exportation aux fins du calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs ne remettait pas en cause ses conclusions sur le préjudice et le lien de causalité, dans la mesure où elle avait constaté que les importations faisant l’objet d’un dumping avaient entraîné, outre une sous-cotation des prix de l’industrie de l’Union, un blocage des prix et une dépression des prix. Dans sa réplique, MHTL aurait contesté les constatations de la Commission, en soutenant que cette erreur avait eu une incidence sur l’analyse de la dépression des prix et du blocage des prix.
50 Par ces arguments, la requérante se serait bornée à réfuter le moyen invoqué par la Commission dans son mémoire en défense en explicitant l’incidence de la violation du règlement de base commise par celle-ci en déterminant le prix à l’exportation utilisé pour le calcul des marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs.
51 En tout état de cause, même si lesdits arguments étaient considérés comme constituant un moyen nouveau, celui-ci constituerait l’ampliation du moyen énoncé antérieurement dans la requête.
52 La Commission, d’une part, Achema, Grupa Azoty et Grupa Azoty Zakłady Azotowe Puławy, d’autre part, contestent le bien-fondé du second moyen.
Appréciation de la Cour
53 Le second moyen du pourvoi porte sur les appréciations formulées par le Tribunal aux points 69, deuxième phrase, et 96 à 99 de l’arrêt attaqué, qui a déclaré irrecevables, du fait qu’ils n’auraient été avancés pour la première fois qu’au stade de la réplique, les arguments de la requérante tirés de l’incidence de la violation commise par la Commission en établissant le prix à l’exportation sur les conclusions de cette dernière concernant la dépression et le blocage des prix, au motif que ces arguments constituaient un moyen nouveau qui ne se fondait sur aucun élément de fait ou de droit qui se serait révélé durant la procédure devant le Tribunal et non l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement dans la requête introductive d’instance.
54 Il y a lieu de rappeler que, selon l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne soient fondés sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen ou un argument, qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (arrêt du 11 juillet 2013, Ziegler/Commission, C‑439/11 P, EU:C:2013:513, point 46 et jurisprudence citée).
55 Or, ainsi qu’il a été jugé aux points 69 et 96 à 99 de l’arrêt attaqué, force est de constater que la requérante s’est, pour l’essentiel, limitée dans sa requête introductive d’instance à la simple invocation des termes « dépression » ou « blocage », sans argumentation spécifique. Dans ces conditions, c’est à bon droit et sans violer l’obligation de motivation que le Tribunal a pu juger que l’argumentation, développée pour la première fois dans la réplique, ne saurait être considérée comme constituant l’ampliation du moyen unique.
56 En effet, le moyen unique de la requérante, dans sa requête introductive d’instance déposée devant le Tribunal, ne soulève pas la question de la méthodologie appliquée par la Commission pour analyser le blocage et la dépression des prix. En fait, dans les trois branches du moyen, la requérante conteste clairement et uniquement « la méthodologie suivie par la Commission pour calculer les marges de sous-cotation des prix et des prix indicatifs ». La méthodologie appliquée par la Commission dans ses analyses relatives au blocage et à la dépression des prix ne faisait donc pas partie du moyen invoqué par la requérante devant le Tribunal.
57 La requérante affirme, certes, que c’est à tort que, au point 96 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que « [l]es termes “dépression” ou “blocage” n[’étaie]nt d’ailleurs nullement mentionnés dans la requête ».
58 Or, s’il est vrai que les termes « déprimer les prix » et « empêcher [...] des hausses de prix » sont reproduits au point 44 de la requête devant le Tribunal, force est de constater que ces termes font partie d’une citation de l’article 3.2 de l’accord sur la mise en œuvre de l’article VI de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 (JO 1994, L 336, p. 103). Ces termes figurent également aux points 48 et 49 de la requête, où ils s’inscrivent dans le cadre d’une citation ou d’une paraphrase de l’article 3, paragraphe 3, du règlement de base.
59 La circonstance que lesdits termes figuraient dans la requête, dans le cadre d’une disposition conventionnelle ou légale que la requérante a citée ou paraphrasée dans son intégralité, ne prouve pas que son moyen unique portait également sur le blocage et la dépression des prix, lesquels n’ont fait l’objet d’aucune argumentation spécifique dans la requête introductive d’instance.
60 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le second moyen et par conséquent le pourvoi dans son intégralité.
Sur les dépens
61 Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.
62 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses moyens et la Commission ayant conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens, il y a lieu de la condamner à supporter l’ensemble des dépens afférents au présent pourvoi.
63 Conformément à l’article 140, paragraphe 3, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 4, de ce règlement, Achema, Grupa Azoty et Grupa Azoty Zakłady Azotowe Puławy, en tant que parties intervenantes devant le Tribunal ayant participé à la procédure écrite devant la Cour, supportent leurs propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Methanol Holdings (Trinidad) Ltd supporte, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.
3) Achema AB, Grupa Azoty S.A. et Grupa Azoty Zakłady Azotowe Puławy S.A. supportent leurs propres dépens.