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Décisions

CA Cayenne, ch. com., 25 janvier 2024, n° 22/00244

CAYENNE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Soferro (Sasu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Blum

Conseillers :

M. Bouchare, Mme Goillot

Avocat :

Me Gay

T. com. mixte Cayenne, du 1 avr. 2022, n…

1 avril 2022

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 20 février 2020, Monsieur [J] [K] [E] gérant de la société ENTREPRISE SERVICES GUYANE passait commande auprès de la SASU SOFERRO pour la confection d'une grille d'extraction de minerais avec « sluice » sur mesure démontable et ajustable en hauteur d'une valeur de 35 000 euros selon devis n°02/20 000103.

Le 16 mars 2020, Monsieur [J] [K] [E] procédait au versement d'un acompte de 5 000 euros au profit de la SASU SOFERRO (pièce 2) et le 25 mars 2020 la SASU SOFERRO émettait une facture du solde restant dû de 30 000 euros.

Par lettres recommandées avec accusé réception du 26 mai 2020 et du 15 juillet 2020, la SASU SOFERRO mettait en demeure l'ENTREPRISE SERVICES GUYANE de payer les sommes restantes dues sous dizaine, soit jusqu'au 6 juin 2020.

Par chèque bancaire émis au profit de la SASU SOFERRO le 20 mars 2020, Monsieur [J] [K] [E] versait la somme de 10 000 euros. Mais le titre de crédit revenait impayé le 22 juin 2020.

Saisi par requête reçue le 10 août 2020, le Président du Tribunal mixte de commerce condamnait l'ENTREPRISE SERVICES GUYANE représentée par Monsieur [J] [K] [E] au paiement de la somme de 30 000 euros par ordonnance d'injonction de payer du 27 août 2020.

Cette ordonnance faisait l'objet d'une signification à Monsieur [J] [K] [E] par exploit du 15 septembre 2020, lequel formait opposition devant le Tribunal mixte de commerce de Cayenne le 1er octobre 2020.

Par jugement du 1er avril 2022, le Tribunal mixte de commerce de Cayenne :

- rejetait la demande d'expertise avant dire droit présentée par Monsieur [J] [K] [E],

- prononçait la résolution du contrat conclu entre la SASU SOFERRO et [J] [K] [E],

- ordonnait la restitution de la somme de 5 000 euros par la SASU SOFERRO à Monsieur [J] [K] [E],

- ordonnait la restitution à ses frais par Monsieur [J] [K] [E] à la SASU SOFERRO de la grille d'extraction objet du contrat,

- disait qu'en cas de carence de Monsieur [J] [K] [E] passé un délai de 2 mois, la SASU SOFERRO pourra organiser la restitution de la grille objet du litige et après avoir fait l'avance des frais afférents en obtenir le remboursement par Monsieur [J] [K] [E] sur présentation des factures,

- condamnait Monsieur [J] [K] [E] à payer la somme de 2 000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de la procédure,

- rejetait le surplus des demandes,

- rappelait que l'exécution provisoire est de droit et taxait les frais de greffe à la somme de 93,25 euros.

Par déclaration enregistrée au greffe le 1er juin 2022, la SASU SOFERRO interjetait appel de ce jugement.

Le 4 juillet 2022, avis était donné à l'appelant d'avoir à signifier la déclaration d'appel, en l'absence de constitution de l'intimé dans le mois de la transmission de la déclaration d'appel qui lui a été fait par le greffe, lequel y procédait le 27 juillet 2022.

En l'état de ses premières et dernières conclusions reçues le 15 juillet 2022, la SASU SOFERRO demandait à la Cour, au visa des articles 1104, 1217 et 1229 code civil, d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la restitution de la somme de 5 000 euros par la SASU SOFERRO à Monsieur [J] [K] [E].

Elle sollicite dès lors de la Cour qu'elle statue de nouveau :

- en disant que la SASU SOFERRO conservera l'acompte de 5 000 euros versé par Monsieur [J] [K] [E],

- en confirmant le jugement pour le surplus,

- en condamnant Monsieur [J] [K] [E] à lui payer la somme de 3 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens pour la procédure d'appel en ce compris les frais de greffe liquidés et de signification de la requête et de l'ordonnance d'injonction de payer.

L'appelant soutenait que l'acquéreur était de mauvaise foi et qu'il avait tenté par tous moyens de se soustraire au paiement du solde du prix, notamment en contestant la conformité de la grille ; que l'acquéreur a utilisé l'équipement litigieux durant quatre mois ce qui avait entraîné sa dévalorisation. Il considère que c'est donc à tort, après avoir prononcé la résolution du contrat, que le jugement a ordonné la restitution de l'acompte versé à la SASU SOFERRO par Monsieur [J] [K] [E].

Bien que régulièrement cité à personne, le défendeur ne s'est pas constitué.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 juin 2023.

Sur ce, la cour,

Sur les effets de la résolution du contrat de vente

Aux termes des articles 1582 et suivants du code civil, la vente est un contrat synallagmatique par lequel deux parties s'engagent, l'une à livrer la chose, l'autre à la payer. De plus, la vente est un contrat à exécution instantanée dont les obligations s'exécutent en une prestation unique.

Motivation

Or, en vertu de l'article 1229 du code civil, il y a lieu de rappeler que la résolution s'applique classiquement aux contrats à exécution instantanée, contrairement à la résiliation qui, elle, met fin aux contrats à exécution successive.

En l'espèce, le fait que l'acheteur Monsieur [J] [K] [E] ait utilisé la grille d'extraction de minerais pendant 4 mois, après conclusion de la vente, n'entraine pas de modification de la nature du contrat de vente.

En effet, cette vente est devenue parfaite entre les parties, par échange des consentements, à partir du moment où elles avaient convenu du prix et de la chose.

Ainsi, il ressort de l'ensemble de ces éléments que la résolution judiciaire, sollicitée par les deux parties en première instance, a eu pour effet l'anéantissement du contrat de vente. Cette résolution emporte obligation légale pour les parties de restituer l'intégralité de ce qu'elles se sont procuré l'une à l'autre, conformément aux articles 1229 et 1352 du code précité.

Il est de plus de jurisprudence constante qu'après résolution d'une vente, le vendeur est tenu de restituer le prix qu'il a reçu, sans diminution liée à l'utilisation de la chose vendue ou à l'usure en résultant.

De même, l'effet rétroactif de la résolution d'une vente oblige l'acquéreur à indemniser le vendeur de la dépréciation subie par la chose en raison de son utilisation.

En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a ordonné à la SASU SOFERRO de restituer la somme de 5 000 € perçue au titre de l'acompte et réciproquement à Monsieur [J] [K] [E] de restituer à ses frais la grille d'extraction dans un délai de deux mois à compter du jugement.

Ainsi, et d'autant plus qu'il est convenu que la SASU SOFERRO obtienne l'indemnisation de la dépréciation du matériel vendu, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de conservation de l'acompte.

En l'espèce, si l'appelant allègue de la mauvaise foi de l'acquéreur dans l'exécution de sa prestation, à savoir le paiement intégral du prix, pour autant ce critère ne constitue pas une condition autorisant le vendeur à conserver le prix de vente qu'il a reçu.

D'ailleurs, l'article 1352-1 du Code civil prévoit que celui qui restitue la chose répond des dégradations et détériorations qui en ont diminué la valeur, à moins qu'il ne soit de bonne foi et que celles-ci ne soient pas dues à sa faute. C'est donc la seule hypothèse où la bonne foi est évoquée dans le régime des restitutions.

Il y a donc lieu de débouter la SASU SOFERRO de sa demande.

Sur les demandes accessoires

Succombant, la SASU SOFERRO supportera la charge des dépens d'appel.

Il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du CPC.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition au greffe :

CONFIRME le jugement déféré, en toutes ses dispositions,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

DIT que la SASU SOFERRO supportera la charge des dépens d'appel.