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Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. com., 23 février 2024, n° 22/01068

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

Transports (SARL)

Défendeur :

Caviglioli-Baron-Fourquie (S.C.P.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chevrier

Conseillers :

Mme Piedagnel, Mme Aliamus

Avocats :

Me Thierry, Me Tragin, Me Le Cointre

T. com. mixte Saint-Denis, du 19 avr. 20…

19 avril 2017

EXPOSE DU LITIGE

La société TRANSPORTS [F] est une société de transports de voyageurs dont le gérant est Monsieur [C] [F].

Par jugement du 16 septembre 2015, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la société TRANSPORTS [F].

Par jugement du 22 juin 2016, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis, saisi sur requête de la SELARL [B], mandataire judiciaire, a converti la procédure de sauvegarde de la société TRANSPORTS [F] en redressement judiciaire.

Par jugement du 19 avril 2017, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et a statué en ces termes :

- PRONONCE la liquidation judiciaire sous le régime de droit commun de :

TRANSPORTS [F] (SARL)

[Adresse 12] [Localité 10]

N° RCS de ST DENIS : 339 108 086 (86 B 258)

- MAINTIENT [Y] [W] en qualité de Juge-commissaire,

- DESIGNE la SELARL [B] en la personne de Maître [B] [H] - en qualité de liquidateur judiciaire,

- DIT qu'en application de l'article R 641-29 du code de commerce, le liquidateur devra compléter la liste des créances mentionnées à l'article R624-2 de ce code et déposer ainsi la liste complétée au greffe.

- FIXE à DIX-HUIT MOIS le délai au terme duquel la clôture de la procédure devra être examinée par application de l'article L 643-9 du code commerce.

- ORDONNE les publications, publicités et transmissions légales.

- ORDONNE l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

La société TRANSPORTS [F] a interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt du 3 octobre 2018, la cour d'appel de Saint-Denis a statué en ces termes :

- CONFIRME la décision en toutes ses dispositions ;

- CONDAMNE la société Transports [F] aux dépens lesquels qui seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

******

Saisie sur pourvoi de Monsieur [C] [F], de la société TRANSPORTS [F] et de la société CAVIGLIOLI-BARON-FOURQUIE, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANSPORTS [F], la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, par un arrêt du 21 octobre 2020, a statué en ces termes :

- DÉCLARE irrecevable le pourvoi en tant qu'il est formé par M. [F] à titre personnel et par la société Caviglioli-Baron-Fourquié, prise en qualité de liquidateur de la société Transports [F] ;

- CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ;

- REMET l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion autrement composée ;

- CONDAMNE la société [B], en qualité de mandataire judiciaire de la société Transports [F], aux dépens ;

- En application de l'article 700 du code de procédure civile, REJETTE la demande de M. [F], la société Transport [F] et la société Caviglioli-Baron-Fourquié, en qualité de liquidateur de la société Transports [F] ;

La Cour de cassation a notamment motivé sa décision comme suit :

Vu les articles L. 626-9 et L. 631-15, Il, alinéa 2, du code de commerce :

6. Il résulte de ces textes que le tribunal statue sur le projet de plan proposé ou la conversion du redressement judiciaire en liquidation après avoir recueilli l'avis du ministère public.

7. Pour confirmer la conversion du redressement judiciaire de la société Transports [F] en liquidation, l'arrêt mentionne que le « parquet général, auquel les procédures [...] ont été communiquées, a apposé son visa le 22 septembre 2017 et a été avisé de la date de la première audience. »

8. En statuant ainsi, alors qu'il ne résulte pas de cette mention que l'avis du ministère public ait été recueilli, l'apposition d'un simple visa n'équivalant pas à l'émission d'un avis, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

******

Monsieur [C] [F] et la société TRANSPORTS [F] ont déposé une déclaration de saisine de la cour d'appel de Saint-Denis par une déclaration RPVA remise au greffe le 23 juin 2022.

Monsieur [C] [F] et la société TRANSPORTS [F] ont déposé leurs premières conclusions d'appelants le 23 août 2022.

La SELARL [X] et [H] [B], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANSPORTS [F] a déposé ses uniques conclusions d'intimée le 27 octobre 2022.

Le parquet général a rendu son unique avis le 14 novembre 2022.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 19 avril 2023.

PRETENTIONS ET MOYENS

Aux termes de leurs dernières conclusions d'appelants déposées le 21 mars 2023, Monsieur [C] [F] et la société TRANSPORTS [F] demandent à la cour de :

- DEBOUTER la SELARL [B] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société TRANSPORTS [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- INFIRMER le jugement rendu le 19 avril 2017 par le tribunal mixte de commerce de SAINT DENIS DE LA REUNION en ce qu'il a :

Prononcé la liquidation judiciaire sous le régime de droit commun de :

TRANSPORTS [F] (SARL)

[Adresse 12]

[Localité 10]

N° RCS de ST DENIS : 339 108 086 (86 B 258)

Maintenu [Y] [W] en qualité de Juge-Commissaire ;

Désigné la SELARL [B] en la personne de Maître [B] [H] ' en qualité de Liquidateur Judiciaire ;

Dit qu'en application de l'article R 641-29 du code de commerce, le liquidateur devra compléter la liste des créanciers mentionnées à l'article R. 624-2 de ce code et déposer ainsi la liste complétée au greffe ;

Fixé à DIX-HUIT MOIS le délai au terme duquel la clôture de la procédure devra être examinée par application de l'article L. 643-9 du code de commerce ;

Ordonné les publications, publicités et transmissions légales ;

Ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Statuant à nouveau :

- HOMOLOGUER le plan de redressement par voie de continuation présenté par la société TRANSPORTS [F], dont la durée est fixée à dix ans, ainsi qu'il suit :

Les créanciers admis seront remboursés sur 10 ans, par 20 échéances semestrielles progressives, la première échéance intervenant dans un délai de 6 mois à compter de l'arrêt à intervenir, selon le détail et les taux suivants :

Année 1 : 5% Echéance 1: 2,5% - Echéance 2: 2,5%

Année 2 : 5% Echéance 1: 2,5% - Echéance 2 : : 2,5%

Année 3 : 8% Echéance 1 : 4% - Echéance 2 : 4%

Année 4 : 8% Echéance 1 : 4% - Echéance 2 : 4%

Année 5 : 8% Echéance 1 : 4% - Echéance 2 : 4%

Année 6 : 10% Echéance 1 : 5% - Echéance 2 : 5%

Année 7 : 12% Echéance 1 : 6% - Echéance 2 : 6%

Année 8 : 14% Echéance 1 : 7% - Echéance 2 : 7%

Année 9 : 15% Echéance 1 : 7,5% - Echéance 2: 7,5%

Année 10 : 15% Echéance 1 : 7,5% - Echéance 2 : 7,5%

Les créances inférieures ou égales à 500 € seront payées immédiatement dès l'homologation du plan de même que la créance assortie du super privilège ;

Le fonds de commerce de la société TRANSPORTS [F] ne pourra être aliéné pendant la durée du plan ni son fonds de commerce donné en location-gérance sans l'autorisation du tribunal mixte de commerce de SAINT-DENIS ;

Le plan est subordonné à la signature et/ ou à la conclusion par les sociétés NCN INVESTISSEMENTS, ORIZONS et PLC dans le mois de la décision à intervenir, des conventions suivantes :

Mise en place d'une convention de gestion centralisée ;

Mise en place d'une convention d'intégration fiscale ;

Mise en place de conventions de prestations de services ;

Nouveau bail commercial pour les bureaux d'une durée égale à celle du plan avec l'engagement de se maintenir dans les lieux jusqu'à l'expiration du bail ;

Le plan est subordonné à la signature et/ ou à la conclusion par les sociétés CITEVA, VALOREST, DSDN, ERPL et SOFICAR de la signature dans le mois de la décision à intervenir, des conventions suivantes :

Mise en place d'une convention de gestion centralisée ;

Mise en place d'une convention d'intégration fiscale ;

Mise en place de conventions de prestations de services ;

Nouveau bail commercial pour les bureaux d'une durée égale à celle du plan avec l'engagement de se maintenir dans les lieux jusqu'à l'expiration du bail ;

Le plan est assorti des conditions suivantes :

Cautionnement de la société ORIZONS à hauteur de 100% du passif ;

Engagement de la société TRANSPORTS [F] de ne distribuer aucun dividende aux actionnaires pendant la durée du plan ;

Apport à NCN INVESTISSEMENTS, par Monsieur et Madame [F], de l'intégralité de leurs titres dans le capital des sociétés [F], CITEVA, VALOREST, DSDN, ORIZONS, ERPL, PLC et SOFICAR et ce, dans les 6 mois de la décision définitive d'homologation du plan.

Cession des actifs immobiliers, dans un délai de 3 ans de la décision définitive d'homologation du plan, à un prix supérieur à celui déterminé par expertise, soit 2.050.000 € et affectation du prix de cession au créancier privilégié spécial puis, après fiscalité, aux autres créanciers admis par la distribution d'un dividende spécial et exceptionnel.

- DESIGNER tel administrateur judiciaire ou mandataire judiciaire qu'il plaira à la fonction de commissaire à l'exécution du plan ;

- JUGER que le dirigeant sera tenu d'exécuter le plan ;

- ORDONNER les publications légales de la décision à intervenir ;

- DEBOUTER la SELARL [B] ès-qualités de sa requête en conversion en liquidation judiciaire ;

- STATUER ce que de droit sur les dépens.

******

Aux termes de ses uniques conclusions d'intimée déposées le 27 octobre 2022, la SELARL [X] et [H] [B] demande à la cour de :

A titre principal,

- DECLARER caduque la déclaration d'appel en date du 2 mai 2017 régularisée ensemble par M. [F] en sa qualité de gérant de la société TRANSPORTS [F] et par la SCP CAVIGLIOLI BARON FOURQUIE en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société TRANSPORTS [F], à défaut pour les appelants d'avoir procédé aux formalités de signification de la déclaration d'appel dans les délais requis.

A titre subsidiaire,

- DECLARER irrecevables les conclusions des auteurs de la saisine de renvoi de cassation, à défaut d'avoir été notifiées dans les délais requis.

- DEBOUTER M. [F] à titre personnel et en sa qualité de gérant de la société TRANSPORTS [F] de l'ensemble de ses demandes en information et de toutes ses fins et prétentions en ce compris notamment sa demande d'homologation d'un plan de redressement.

- CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement n° 17/347 RG 2016 005609 en date du 19 avril 2017 rendu le par le Tribunal mixte de commerce de Saint Denis.

En tout état de cause,

- CONDAMNER M. [F] à titre personnel au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ' en ce compris le droit de timbre pour un montant de 225 euros.

******

Aux termes de son unique avis déposé le 14 novembre 2022, le parquet général :

- ADHERE en tout point aux conclusions développées par la SELARL [B] tendant à la caducité de la déclaration d'appel, subsidiairement à déclarer irrecevable les conclusions des auteurs de la saisine de renvoi de cassation et confirmer le jugement 17/347 du tribunal mixte de commerce de Saint Denis rendu le 19 avril 2017.

***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées, figurant au dossier de la procédure, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

Sur la caducité de la déclaration d'appel :

La SELARL [B], ès qualité de liquidateur de la société [F], demande à la cour de déclarer caduque la déclaration d'appel en date du 2 mai 2017, à défaut pour les appelants d'avoir procédé aux formalités de signification de la déclaration d'appel dans les délais requis.

Monsieur [C] [F] et la société TRANSPORTS [F] répliquent que :

. En premier lieu, l'instance devant la cour d'appel, saisie sur renvoi après cassation, est instruite selon les modalités de l'article 1037-1 du code de procédure civile et 905-1 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue de l'article 17 du décret n° 2017-891, applicable aux instances consécutives à un renvoi après cassation.

. Il en résulte que seul le président est compétent pour connaitre du moyen tiré de la caducité de la déclaration d'appel pour absence de signification de celle-ci dans le délai de l'article 902 ancien du code de procédure civile, à supposer toutefois que ce délai n'ait jamais couru (Cass. Civ. 3 ème , 4 mars 2021, n° 19-12564). Les conclusions aux fins de caducité de la déclaration d'appel régularisée en son temps par la société TRANSPORTS [F], remises à la cour, ont donc été adressées à une juridiction incompétente pour en connaitre. L'incident de caducité de la déclaration d'appel soulevée par la SELARL [B] ès-qualités ne pourra qu'être rejeté, de ce premier chef.

. En second lieu, il est constant que dans l'hypothèse où le greffe n'a pas adressé l'avis d'avoir à signifier prévu à l'article 902 du code de procédure civile, l'appelant n'est pas tenu de procéder à la signification de la déclaration d'appel. En l'espèce, la SELARL [B] ès-qualités ne prétend pas ni a fortiori ne démontre que l'avis d'avoir à signifier dont l'envoi était prévu à l'article 902 du code de procédure civile, applicable à l'instance d'appel aurait été adressé à l'ancien Conseil de la société TRANSPORTS [F] et de Monsieur [C] [F]. Il en résulte qu'il n'est pas même établi que cet avis ait jamais été adressé et encore moins reçu par l'ancien Conseil de la société TRANSPORTS [F] et de Monsieur [C] [F].

. En troisième lieu, il n'est pas contestable que la SELARL [B] ès-qualités n'a pas saisi la Cour d'appel de céans d'un incident de caducité à l'occasion de l'instance d'appel initiale.

Il n'est pas plus contestable que la cause alléguée de la caducité est intervenue antérieurement à la clôture de l'instruction de l'instance d'appel initiale. Il en résulte que la SELARL [B] ès-qualités n'était en tout état de cause plus recevable à soulever la caducité de la déclaration d'appel de la société TRANSPORTS [F] et de Monsieur [C] [F] à compter de cette date, en application de l'article 914 du code de procédure civile et en tant que de besoin de l'article 762 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable à l'instance d'appel initiale.

Le parquet général indique qu'il adhère en tout point aux conclusions développées par la SELARL [B] tendant à la caducité de la déclaration d'appel.

Sur ce,

La cour observe d'abord que la SELARL [B] invoque la caducité de la première déclaration d'appel, ayant donné lieu à l'arrêt du 3 octobre 2018, annulé par l'arrêt de renvoi.

La jurisprudence admet que la cour puisse se saisir d'office d'une éventuelle caducité de la déclaration d'appel ou de la saisine en application des articles 905-1 et 1037-1 du code de procédure civile.

Mais la prétendue caducité de la première déclaration d'appel déposée le 2 mai 2017, invoquée dans le cadre de l'examen de la nouvelle saisine du 23 juin 2022, est inefficace s'agissant désormais de la procédure de renvoi de la Cour de cassation, sur saisine d'une des parties en application des articles 1032 et suivants du code de procédure civile, notamment de l'article 1037-1.

La demande de caducité de la première déclaration d'appel doit être rejetée.

Sur l'irrecevabilité des conclusions des auteurs de la saisine de renvoi :

La SELARL [B], ès qualité, soulève subsidiairement l'irrecevabilité des conclusions des auteurs de la saisine de renvoi de cassation, à défaut d'avoir été notifiées dans les délais requis.

Elle fait valoir que la déclaration de saisine est datée du 23 juin 2022, que les conclusions des auteurs de la saisine ont été remises au greffe le 23 août 2022 mais n'ont été signifiées à la SELARL [B] es qualités que le 30 août 2022 soit au-delà du délai de deux mois, imparti pour y satisfaire.

Selon les appelants, le délai de remise au greffe des conclusions de l'auteur de la déclaration devant la cour d'appel de renvoi doit, lorsque l'affaire relève des dispositions de l'article 1037-1 du code de procédure civile, comme c'est le cas en l'espèce, intervenir dans un délai de deux mois suivant la déclaration de saisine. Lorsque le défendeur à la déclaration de saisine n'a pas constitué avocat, la signification des conclusions de l'auteur de la saisine doit intervenir dans un délai d'un mois suivant le délai qui lui a été imparti pour remettre ses conclusions au greffe.

En l'espèce, les conclusions de Monsieur [C] [F] et de la société TRANSPORTS

[F] ont été remises au greffe le 23 août 2022, soit dans le délai de deux mois suivant la régularisation de la déclaration de saisine intervenue le 23 juin 2022. Monsieur [C] [F] et la société TRANSPORTS [F] disposait donc d'un délai expirant le 23 septembre 2022 pour signifier à la SELARL [B] ès-qualités lesdites conclusions. Par exploit d'huissier du 30 août 2022, les conclusions sur renvoi après cassation de la société TRANSPORTS [F] et de Monsieur [C] [F] ont été signifiées à la SELARL [B] ès-qualités. La signification à partie des conclusions n° 1 de la société TRANSPORTS [F] et de Monsieur [C] [F] est donc bien intervenue dans le respect des dispositions combinées des articles 1037-1 et 911 du code de procédure civile.

Le parquet général indique qu'il adhère en tout point aux conclusions développées par la SELARL [B] tendant à déclarer irrecevables les conclusions des auteurs de la saisine de renvoi de cassation.

Sur ce,

Selon l'article 1037-1 du code de procédure civile, en cas de renvoi devant la cour d'appel, lorsque l'affaire relevait de la procédure ordinaire, celle-ci est fixée à bref délai dans les conditions de l'article 905. En ce cas, les dispositions de l'article 1036 ne sont pas applicables.

La déclaration de saisine est signifiée par son auteur aux autres parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l'avis de fixation. Ce délai est prescrit à peine de caducité de la déclaration, relevée d'office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président.

Les conclusions de l'auteur de la déclaration sont remises au greffe et notifiées dans un délai de deux mois suivant cette déclaration.

Les parties adverses remettent et notifient leurs conclusions dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'auteur de la déclaration.

En l'espèce, l'avis de fixation de l'affaire à bref délai, prévu par l'article 905-1 du code de procédure civile, a été adressé aux parties le 22 août 2022.

La SELARL [B], ès-qualités, s'est constituée dès le 30 août 2022, soit dans le délai de dix jours suivant l'avis de bref délai.

Les appelants pouvaient donc se dispenser de lui signifier l'avis de bref délai du 22 août 2022.

Néanmoins, l'article 1037-1 susvisé impose aux appelants de remettre les premières conclusions de l'auteur de la déclaration et de les notifier dans un délai de deux mois suivant cette déclaration.

Les premières conclusions d'appel ont été remises par RPVA le 23 août 2022, alors que la SELARL [B] n'avait pas encore constitué avocat.

Elles lui ont été signifiées le 30 août 2022 avec la déclaration de saisine du 23 juin 2022 et l'avis de bref délai du 22 août 2022 (Pièce N° 15 de l'intimée).

Or, la disposition de l'article 1037-1 du code de procédure civile, prévoyant que l'affaire est fixée à bref délai, dans les conditions de l'article 905 du code de procédure civile, ne concerne que l'application de cet article, à l'exclusion de celles des dispositions des articles 905-1 et 905-2 conférant à ce magistrat des attributions destinées à sanctionner le respect par les parties des diligences prescrites par ces deux derniers textes. Or la liste des attributions conférées à ce magistrat, qui font exception à la compétence de principe de la formation collégiale de la cour d'appel, est, pour ce motif, limitative.

Par conséquent, seule la cour d'appel, à l'exclusion du président de la chambre ou du magistrat désigné par le premier président, peut prononcer l'irrecevabilité des conclusions des parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation.

En outre, la SCP CAVIGLIOLI-BARON-FOURQUIE, ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société TRANSPORTS [F], désignée à ces fonctions par jugement du tribunal mixte de commerce de SAINT DENIS du 16 septembre 2015, aussi intimée, n'avait pas constitué avocat.

Ainsi, les appelants devaient lui signifier la déclaration d'appel dans le délai de dix jours suivant l'avis de bref délai du 22 août 2022 et les conclusions d'appel au plus tard le 23 août 2022.

En application de l'article 1037-1 susvisé, les parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation, qui ne respectent pas les délais qui leur sont impartis pour conclure, sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la cour d'appel dont l'arrêt a été cassé. Il en résulte qu'en ce cas, les conclusions que ces parties prennent, hors délai, devant la cour d'appel de renvoi sont irrecevables.

Dès lors, les appelants sont réputés s'en tenir aux moyens et prétentions qu'ils avaient soumis à la cour d'appel lors de la première procédure d'appel, l'irrecevabilité sanctionnant uniquement les conclusions tardives.

Pour rappel, il résulte du dispositif de ces dernières conclusions déposées par voie électronique le 21 août 2017, signifiées à la SELARL [B] le 26 juillet 2017, que M. [C] [F] ès-qualités et la SCP CAVIGLIOLI BARON FOURQUIE administrateurs judiciaires de la société Transports [F] demandaient à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau

- homologuer le plan de redressement par voie de continuation présenté par Transports [F] ;

- dire et juger que les créanciers ayant choisi l'option n° 1 seront remboursés dans les conditions suivantes :

° remboursement sur 10 ans par 20 échéances semestrielles progressives ;

- dire et juger que les créanciers ayant choisi l'option n° 2 seront remboursés dans les conditions suivantes :

° remboursement sur 3 ans par 6 échéances semestrielles progressives,

° abandon de 50 % du passif,

° droit de priorité sur le prix de cession de l'immeuble après remboursement des créanciers hypothécaires,

- dire que les créances admises au passif seront remboursées sans intérêt;

- donner acte aux sociétés NCN INVESTISSEMENTS ORIZONS et PLC de la signature dans le mois de la décision à intervenir des conventions suivantes :

° reconnaissance de dette à l'égard de [F] arrêtée au 30 novembre 2016,

° mise en place d'une convention de gestion centralisée,

° mise en place d'une convention d'intégration fiscale,

° mise en place de conventions de prestations de service,

° nouveau bail commercial pour les bureaux d'une durée égale à celle du plan avec l'engagement de se maintenir dans les lieux jusqu'à l'expiration du bail,

- donner acte aux sociétés CITEVA VALOREST DSDN ERPL et SOFICAR de la signature dans le mois de la décision à intervenir des conventions suivantes:

° mise en place d'une convention de gestion centralisée,

° mise en place d'une convention d'intégration fiscale,

° mise en place de conventions de prestations de service,

° nouveau bail commercial pour les bureaux d'une durée égale à celle du plan avec l'engagement de se maintenir,

- dire et juger que le plan est assorti des conditions suivantes :

1) cautionnement de la société ORIZONS à hauteur de 100 % du passif,

2) inaliénabilité du fonds de commerce du débiteur,

3) engagement du débiteur de ne distribuer aucun dividende aux actionnaires pendant la durée du plan,

4) signature dans le mois de la décision définitive de l'homologation du plan par les sociétés NCN INVESTISSEMENTS ORIZONS et PLC des conventions suivantes :

° reconnaissance de dette à l'égard de [F] arrêtée au 30 novembre 2016,

° mise en place d'une convention de gestion centralisée,

° mise en place d'une convention d'intégration fiscale,

° mise en place de conventions de prestations de service,

° nouveau bail commercial pour les bureaux d'une durée égale à celle du plan avec l'engagement de se maintenir dans les lieux jusqu'à l'expiration du bail,

5) signature dans le mois de la décision définitive de l'homologation du plan par les sociétés CITEVA VALOREST DSDN ERPL et SOFICAR des conventions suivantes :

° mise en place d'une convention de gestion centralisée,

° mise en place d'une convention d'intégration fiscale,

° mise en place de conventions de prestations de service,

° nouveau bail commercial pour les bureaux d'une durée égale à celle du plan avec l'engagement de se maintenir,

6) apport par la société NCN INVESTISSEMENT par M. et Mme [F] de l'intégralité de leurs titres dans le capital des sociétés [F], CITEVA, VALOREST, DSDN, ORIZONS, ERPL, PLC et SOFICAR et ce dans les 6 mois de la décision définitive d'homologation du plan,

7) Cession des actifs immobiliers dans un délai de 3 ans de la décision définitive d'homologation du plan à un prix supérieur à celui déterminé par expertise soit 2 050 000,00 € et affectation du prix de cession au créancier privilégié spécial puis après fiscalité aux autres créanciers admis par la distribution d'un dividende spécial et exceptionnel,

- désigner tel administrateur judiciaire ou mandataire judiciaire qu'il plaira à la fonction de commissaire à l'exécution du plan,

- dire que le dirigeant sera tenu d'exécuter le plan,

- ordonner les publications légales de la décision à intervenir,

- débouter Me [B] es qualités de sa requête en conversion en liquidation judiciaire,

- dire que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de procédure dont distraction.

Sur le rejet des demandes de Monsieur [F] à titre personnel :

Selon le dispositif de ses conclusions, la SELARL [B] demande à la cour de débouter Monsieur [C] [F] à titre personnel et en sa qualité de gérant de la société TRANSPORTS [F] de l'ensemble de ses demandes en « information » (réformation) et de toutes ses fins et prétentions en ce compris notamment sa demande d'homologation d'un plan de redressement.

Cependant, aucune discussion à ce sujet ne figure dans les motifs des conclusions de l'intimée.

Monsieur [C] [F] n'a pas répliqué à cette prétention.

Ainsi, la cour d'appel n'a pas à se prononcer de ce chef en application de l'article 954 du code de procédure civile.

Toutefois, il est opportun de souligner que la Cour de cassation, dans son arrêt de renvoi, a considéré que, si le pourvoi formé par la société transports [F], représentée par M. [F], son dirigeant, est recevable, dès lors qu'est en cause l'exercice des droits propres du débiteur, il est irrecevable en ce qu'il est formé par M. [F] qui, agissant à titre personnel, n'a pas qualité pour se pourvoir. Il est également irrecevable en ce qu'il est formé par la société Caviglioli-Baron-Fourquié qui n'a pas la qualité de liquidateur.

Sur le fond :

Les premiers juges ont considéré que l'adoption d`un plan de redressement par continuation suppose notamment que le débiteur justifie de sérieuses possibilités de redressement.

S'agissant de l'interrogation des créanciers sur le projet de plan, le TMC observait que cette formalité a été réalisée sur la base de différentes considérations qui depuis lors ont été modifiées. Ainsi le plan devait notamment s'appuyer sur la cession des actifs immobiliers de la société TRANSPORTS [F] et que la société TRANSPORTS [F] s'engageait d 'ores et déjà à vendre cet actif à la valeur minimale de 3.500.000 euros. Or, outre l'absence de contrôle sur la cession promise du principal actif, et faute d'inaliénabilité proposée, ce bien a été évalué après expertise à la somme de 2.050.000 euros au lieu de celle annoncée plus haut.

En outre, en cours de délibéré, avant le prononcé de la décision du 21 décembre 2016, Monsieur [C] [F] s'était engagé en qualité de caution solidaire « en complément de la caution donnée par la société ORIZONS, figurant dans le plan présente » pour le compte de la société SARL TRANSPORTS [F]. Cette garantie supplémentaire a été soumise à l'avis des créanciers. Mais, lors des débats du 5 avril 2017, il a clairement pu être indiqué que cette sûreté n'était plus d'actualité.

Aux termes de leurs dernières conclusions recevables déposées le 21 août 2017, les appelants font valoir en substance que :

- Un groupe de sociétés " familiales" s'est constitué de manière empirique à la suite de l'impossibilité pour la société Transports [F] de soumissionner des marchés publics de transports en raison de nombreuses inscriptions de privilèges, ces marchés représentant 80 % de son chiffre d'affaires ;

- La société ORIZONS a été constituée pour maintenir l'activité et l'emploi, sans traduction juridique du transfert d'activité, la société ORIZONS utilisant les moyens de production de la société Transports [F], par le biais de divers contrats de location ;

- Le plan élaboré s'appuie sur la constitution d'un véritable groupe de sociétés [F] particulièrement simple à élaborer dans la mesure où les époux [F] sont les uniques actionnaires des sociétés du groupe et que la holding sera constituée par la réunion de leurs parts sociales ;

- Le passif déclaré, y compris le passif contesté, s'élève à 8 062 359,06 € et le passif à échoir à 1 122 048,96 euros ;

- Le passif soumis au plan, après contestations s'élève à la somme de 5 412 239,38 euros ;

- Les projections réalisées au niveau du "groupe" [F] laissent supposer que le débiteur est largement en mesure de payer son passif sur 10 ans en n'y consacrant que 50 % de sa capacité d'autofinancement ;

- La vente du bien immobilier permettrait de diminuer le passif soumis au plan, la CAF du groupe hors loyer étant augmentée rendant le plan d'apurement du passif encore plus réalisable ;

- L'essentiel des créanciers interrogés dont le passif a été admis a accepté le plan ;

- Le plan proposé permet la poursuite de l'activité, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif ;

- Contrairement à ce que soutient la SELARL [B] la société débitrice est à jour de ses dettes de procédure certaines et exigibles, les créances de la SNC SALAZIE et de la société NATIXIS LEASE étant contestées ;

- Le plan proposé remplit parfaitement l'obligation d'indemniser les créanciers.

En réplique, la SELARL [B], ès-qualités de liquidateur de la société TRANSPORT [F], expose que :

. Les possibilités sérieuses de redressement d'une société s'apprécient au regard de ses propres capacités ou de celles des sociétés qui s'engagent, à travers des actes juridiques contraignants, à rembourser le passif et non, de facto, de celles du groupe auquel elle appartient.

. Le tribunal de commerce a justement retenu que la seule société à prendre en considération dans l'appréciation des possibilités de redressement de la société débitrice, en dehors d'elle-même, et de la société ORIZONS. En effet seule cette société s'est engagée à exécuter le plan de redressement se portant caution des engagements de la société appelante.

. Les reconnaissances de dette des autres sociétés du groupe [F] ne sont aucunement des engagements à exécuter le plan ils ne peuvent en tant que tel être retenues.

. La promesse des sociétés animées par les époux [F] de conclure un nouveau bail commercial et de rester dans les lieux jusqu'à la fin du plan ou encore de conclure de nouveaux contrats de prestation'sans précision sur les prestations'ne constitue pas un engagement à supporter tout ou partie du passif de la société TRANSPORTS [F], en sorte que les capacités contributives desdites sociétés n'ont pas été prises en compte pour apprécier les chances de redressement de l'entreprise débitrice.

L'intimée affirme que ces sociétés, occupantes sans droit ni titre depuis les ordonnances du juge-commissaire du 20 août 2020, n'ont jamais procédé au règlement des loyers et indemnités d'occupation dus depuis le prononcé de la liquidation judiciaire.

Ainsi, la société POIDSLOURD CONTROLE reste devoir la somme de 31 040 € à la liquidation au titre des loyers du 2 mai 2017 à septembre 2022.

La société DSDN RECYCLAGE reste devoir la somme de 58 590 € au titre des loyers pour la même période.

La société SOFICAR reste devoir la somme de 20 615 € au même titre.

La société ORIZONS reste devoir la somme de 658 125 € au titre des contrats de location des véhicules pour les loyers du 2 mai 2000 au 17 septembre 2022 alors qu'aucun paiement n'a été effectué entre les mains du liquidateur. Cette société doit aussi la somme de 317 362,50 euros au titre du bail commercial.

. La société CITEVA reste devoir la somme de 302 715 € pour la même période.

. La société VALOREST reste devoir la somme de 302 715 € pour la même période.

Selon l'intimée, ces créances non recouvrées établissent l'insuffisance du projet de plan compte tenu des capacités de remboursement de la société débitrice et de la société ORIZONS, seule société du groupe [F] à s'être engagée à exécuter le plan.

La SELARL [B], ès-qualités, fait valoir que le projet de plan ne remplit pas les objectifs posés par les dispositions de l'article L. 631'1 du code de commerce. La poursuite de l'activité était largement obérée à court terme du fait de la cession du seul actif immobilier et de l'obsolescence du parc roulant. La société n'avait plus qu'un seul salarié lors de la conversion en liquidation judiciaire. L'apurement du passif n'est pas sérieusement envisageable au regard des capacités de remboursement des sociétés TRANSPORTS [F] et ORIZONS. En effet le projet de plan se limite à un projet de cession immobilière devant intervenir dans les trois ans suivant l'arrêté du plan pour un montant évalué à 2 225 000 €. L'intimée souligne que l'inaliénabilité des actifs immobiliers n'est pas proposée ; qu'une clause de priorité au profit des sociétés du groupe est prévue sans que les conditions soient connues ; que la vente priverait la société débitrice de revenus locatifs conséquents compte-tenu de l'activité résiduelle de celle-ci.

La SELARL [B], ès-qualités, conteste la capacité contributive théorique des deux sociétés impliquées dans le projet de plan. Elle considère que les prévisions sont au-dessus des capacités réelles contributives annoncées. Elle rappelle que le plan de continuation doit prévoir le règlement des créances déclarées en totalité, y compris les créances à échoir, et ce même si elles sont contestées. Elle précise que l'avis des créanciers n'a pas été recueilli sur les modifications apportées au projet de plan. Ce projet est en réalité un projet d'étalement des dettes du groupe au préjudice des créanciers de la société débitrice sur une durée de 10 ans. En réalité, selon l'intimée, la société TRANSPORTS [F] n'avait plus à l'ouverture de la procédure qu'une activité de loueur d'une flotte vieillissante de véhicules, l'ensemble de ses salariés ayant été transféré sur d'autres entités du groupe [F] qui n'a jamais recouvré ses créances sur les autres sociétés du groupe si bien que ses propres créanciers ont assumé le financement des sociétés du groupe [F].

Enfin, l'intimée prétend que la société TRANSPORTS [F] a généré de nouvelles dettes portées pendant la période d'observation, à savoir :

CFE : 2 469,00 €

Impôts directs (article 1920 du CGI) : 15 620,00 €

Privilège salarial : 1 632,40 €

Charges sociales : 7 993,96 €

Chirographaires : 997 899,80 €

TOTAL : 1 025 615,16 €

Le principal créancier est la société NATIXIS LEASE pour un montant de 575 376,00 euros. Dans l'hypothèse où ces créanciers bénéficieraient d'un titre exécutoire, ils ne seraient pas soumis à la règle de l'interdiction des poursuites, s'agissant de créance relevant de l'article L. 622-17 du Code de commerce. Au demeurant, il appartiendrait à l'administrateur judiciaire d'éclairer la juridiction sur les capacités de la société TRANSPORTS [F] à payer ces dettes d'exploitation (article L. 631-15 I du Code de commerce). Condition sine qua non de la prolongation de la période d'observation qu'entraînerait une éventuelle infirmation.

Ceci étant exposé,

Aux termes de l'article L. 626-1 du code de commerce, lorsqu'il existe une possibilité sérieuse pour l'entreprise d'être sauvegardée, le tribunal arrête dans ce but un plan qui met fin à la période d'observation.

Le plan de sauvegarde comporte, s'il y a lieu, l'arrêt, l'adjonction ou la cession d'une ou de plusieurs activités.

Les cessions faites en application du présent article sont soumises aux dispositions de la section 1 du chapitre II du titre IV et à celles de l'article L. 642-22. Toutefois, le mandataire judiciaire exerce les missions confiées au liquidateur. En outre, le tribunal peut, par un jugement spécialement motivé, après avoir recueilli l'avis du ministère public et demandé celui des contrôleurs, déroger aux interdictions prévues au premier alinéa de l'article L. 642-3 et autoriser la cession à l'une des personnes mentionnées à cet alinéa, à l'exception des contrôleurs et du débiteur au titre de l'un quelconque de ses patrimoines.

Lorsqu'un plan de sauvegarde de l'emploi doit être élaboré, il est fait application des dispositions du III de l'article L. 1233-58 du code du travail.

Les droits de préemption institués par le code rural et de la pêche maritime ou le code de l'urbanisme ne peuvent s'exercer sur un bien compris dans une cession d'une ou de plusieurs activités, décidée en application du présent article.

En l'espèce, les énonciations de l'arrêt annulé restent d'actualité compte tenu de l'irrecevabilité des dernières conclusions des appelants ainsi que de ses pièces nouvelles.

La situation de la société Transports [F] telle qu'elle ressort de l'analyse du dernier bilan économique social et environnemental élaboré le 09 décembre 2016 et la note complémentaire du 03 avril 2017 documents rédigés par l'administrateur judiciaire font apparaître les éléments suivants :

. Le capital social de la société Transports [F] est détenu à 95,50 % par l'EURL NCN Investissement (dont M. [C] [F] est l'unique associé) à hauteur de 4,5 % par M. [C] [F].

. Depuis 2011 le chiffre d'affaires de la société Transports [F] n'a cessé de diminuer passant de 7 430 119 € pour l'exercice 2011 à 3 917 703 € pour l'exercice 2014.

. L'environnement de la société est caractérisé par la création en 2012 de la société ORIZONS détenue à 100 % par Madame [G] [F], la société transports [F] ne parvenant plus à obtenir les marchés publics dont elle était dépendante en l'absence d'attestations de régularité fiscales et sociales.

. La société ORIZONS a obtenu le marché de la commune de [Localité 10], le marché de la commune de [Localité 11] et le marché CIREST (1 805 000,00 €) lequel était antérieurement détenu par la société Transports [F] et qui a été résilié en 2013.

. Dans le même temps la société ORIZONS loue à la société Transports [F] ses locaux et une partie de son matériel roulant, dont le coût financier est assuré par la société Transports [F]. La société ORIZONS est débitrice à l'égard de la société Transports [F] d'une somme actualisée de 658.125,00 euros au mois de septembre 2022.

. L'actif de la société Transports [F] comprend un actif immobilier composé d'un terrain cadastré AW [Cadastre 2] comportant des constructions dont la valeur vénale a été estimée par l'expert [M] le 21 mars 2015 à 3.800 000,00 € et deux parcelles AW [Cadastre 3] et A [Cadastre 5] évaluées à hauteur de 700 000,00 € (500 + 200).

. Le matériel roulant dont elle est propriétaire est évalué à hauteur de 1 210 500,00 euros.

Les revenus actuels de l'entreprise débitrice ne ressortent pas de l'exploitation de son activité originaire de transporteur mais de la location de terrains et de matériel roulant principalement à la société ORIZONS et dans une moindre mesure à la société SRPU spécialisée dans la collecte et le traitement des ordures ménagères qui est détenue à 100 % par la société CAR LOC dont l'unique actionnaire est [G] [F].

. Le chiffre d'affaires prévisionnel pour l'année 2018 s'élevait à la somme de 638 879,00 €.

. Tout au long de la période d'observation d'octobre 2015 au mois de février 2017 son compte de résultat a été négatif.

. La société Transports [F] doit faire face au paiement d'un passif définitif déclaré qui s'élève à la somme de 6.830.353,05 euros et d'un passif non définitif de 4.867,00 euros.

Au surplus, les créanciers ont été avisés du projet de plan sur la base de la cession de l'actif immobilier évalué à un prix de 3.500.000 euros dans la note complémentaire du 3 avril 2017 rédigée par l'administrateur judiciaire, et ce, « quelle que soit la valeur d'expertise. »

Pourtant, si cet engagement figure bien dans la proposition de plan (page 4), la même proposition évoque au paragraphe précédent un engagement de vente du bien immobilier « dans un délai de trois ans suivant la date d'homologation du plan de redressement « pour un prix égal à la valeur de l'expertise qui sera fixée par l'expert désigné par le juge commissaire. »

La cour observe que ces deux mentions sont contradictoires puisque d'une part, le prix de cession correspondrait à la valeur de l'expertise mais que, de toute façon, la vente se ferait au prix minimal de 3.500.000,00 euros.

Enfin, le plan propose que les sociétés du GROUPE [F] soient prioritaires pour le rachat de l'actif visé, « sous condition d'en obtenir le financement. »

Ainsi, cette proposition de règlement des créanciers du plan, à un prix minimal susceptible d'excéder la valeur réelle du bien après estimation par expertise judiciaire, en priorité à des sociétés du groupe de l'entreprise débitrice, sous la condition d'obtention des financements, dans un délai de trois ans suivant l'adoption du plan, ne constitue pas une véritable garantie d'exécution du plan proposé compte tenu du manque de crédibilité de l'hypothèse de la cession du seul bien immobilier constituant l'actif de la société TRANSPORTS [F].

Face à cette solution aléatoire non garantie, la société TRANSPORTS [F] invoque les engagements des sociétés gérées par Monsieur ou Madame [F], débitrices de la société appelante.

A cet égard, les sociétés SNC INVESTISSEMENTS, ORIZONS et PLC reconnaissent être débitrices de la société TRANSPORTS [F] au 30 novembre 2016, et s'engagent à procéder au règlement de l'intégralité de leurs dettes dans un délai de dix ans pour les sociétés NCN INVESTISSEMENTS ET ORIZONS et trois ans pour la société PLC.

Mais cette proposition ne constitue en réalité qu'un octroi de délais de paiement aux sociétés débitrices de la société TRANSPORTS [F], aboutissant alors à un échelonnement des créances de celle-ci sans aucune contrepartie et encore sous la condition que les assemblées générales de ces sociétés valident un engagement de payer des dettes incontestables et exigibles pendant la procédure collective de la société TRANSPORTS [F].

En conséquence, l'élaboration d'un échéancier au bénéfice des créanciers de la société débitrice ne peut constituer une garantie d'apurement du passif de la société TRANSPORTS [F] mais bien une solution favorable à ses débiteurs du GROUPE [F] mais pas à l'ensemble des créanciers admis dans la procédure collective de la société appelante.

Au surplus, le rapport évoque une restructuration du GROUPE [F] (page 9) qui permettrait « le paiement du passif de la société TRANSPORTS [F], qui dépendrait directement de la CAF prévisionnelle des sociétés contributives qui transiteront par la société NCN, et du remboursement par les sociétés du groupe de leurs dettes à l'égard de la société appelante pour 2 millions d'euros. »

Cette solution encore conditionnée par la restructuration promise du GROUPE [F] et le transfert de dettes de la société appelante, sans explication sur le fondement juridique de tels transferts, encore conditionnés par l'évolution de la capacité d'autofinancements des sociétés du groupe ou de ces entreprises, manque encore de crédibilité et pourrait même être contredite par le principe d'autonomie de chaque personne morale du groupe alors que la mise en place alléguée de conventions de prestations de services entre elles par des facturations internes, risque, au pire, d'enfreindre les règles générales de la comptabilité de ces sociétés, et, au moins, de ne pas permettre d'apports de trésorerie à la société TRANSPORTS [F] puisque ces apports ne dépendraient que des résultats futurs et éventuels de la holding restant à créer.

Il résulte de ce qui précède que ne sont pas établis la possibilité sérieuse de redressement ni la pertinence du plan proposé, compte tenu des éléments suivants :

. L'exploitation déficitaire de la société TRANSPORTS [F] pendant la période d'observation, d'un montant supérieur à 1 million d'euros qui ne peut pas être intégré au plan proposé mais constitue une dette exigible par priorité aux dettes antérieures à la procédure collective ;

. De l'importance du passif définitif évalué désormais à une somme dépassant 6.800.000 euros ;

. De l'hypothèse aléatoire de la cession de son actif immobilier à un prix supérieur d'un million d'euros à la valeur dégagée par l'expertise, par priorité à des sociétés du groupe [F] dans un délai de trois ans ;

. De l'hypothèse alléguée de la restructuration du GROUPE [F] emportant alors transfert de dettes par des conventions internes de prestations facturées ;

. Du seul engagement des débiteurs de l'appelante, se résumant à un étalement sur dix ans du paiement des créances de la société TRANSPORTS CRAPAYE, la privant ainsi, sans contrepartie, de la ressource incontestable née des dettes des autres sociétés du groupe [F].

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Sur les dépens :

Monsieur [C] [F] supportera seul les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après renvoi de cassation, publiquement, par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la SELARL [B], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société TRANSPORTS [F], de sa demande de caducité de la première déclaration d'appel en date du 2 mai 2017 ;

DECLARE IRRECEVABLES les conclusions des auteurs de la saisine du 23 juin 2022 sur renvoi de la Cour de cassation ;

RETIENT les dernières conclusions déposées par les appelants le 21 août 2017 ;

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne les dépens ;

CONDAMNE Monsieur [C] [F] aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Nadia HANAFI, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.