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Décisions

CA Riom, ch. com., 28 février 2024, n° 22/02131

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Autos Velay (SAS), Protiere le Puy (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dubled-Vacheron

Conseillers :

Mme Theuil-Dif, M. Kheitmi

Avocats :

Me Gicquere-Sobieraj, Me Gutton Perrin

T. com. Puy en Velay, du 21 oct. 2022, n…

21 octobre 2022

La société Protière le Puy exploite un fonds de commerce de vente de véhicules neufs et d'occasion sous l'enseigne Citroën dans la zone commerciale automobile de la ville de [Localité 5].

M. [N] [S] a été salarié dans cette entreprise du 24 février 2014 au 24 novembre 2020, date à laquelle il a présenté sa démission. À compter du 16 février 2021, M. [S] a exercé une activité professionnelle de vendeur automobile dans le cadre d'une SAS dénommée Autos Velay dont il est le président et qui a pour objet social le négoce par tous moyens de tout véhicule automobile ainsi que la réparation. Cette entreprise est située à [Localité 5] dans la même zone commerciale que la société Protière le Puy.

Un litige est né entre les parties, la société Protière le Puy considérant que la SAS Autos Velay utilisait son fichier clientèle et se livrait à son égard à des actes de concurrence déloyale.

Par jugement du 21 octobre 2022, le tribunal de commerce du Puy-en-Velay a :

- condamné in solidum la société Autos Velay et M. [S] à régler à la société Protière le Puy la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice commercial, la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d'image et la somme de 7.492,06 euros TTC au titre du préjudice financier,

- débouté la société Protière le Puy de ses autres demandes,

- condamné in solidum la société Autos Velay et M. [S] à lui payer la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens,

- débouté ces derniers de leurs demandes reconventionnelles.

Le tribunal a considéré qu'à l'occasion de son travail au sein de la société Protière le Puy, M. [S] avait constitué un fichier clients qu'il a mis à disposition de la société Autos Velay et qui a été utilisé à des fins publicitaires au profit de cette société par le biais d'envoi de SMS et d'e-mails.

Il a également jugé que les données personnelles des clients ont été utilisées sans leur consentement ce qui a donné lieu à des plaintes auprès de la société Protière le Puy.

M. [S] et la SAS Autos Velay ont relevé appel de cette décision suivant déclaration du 9 novembre 2022.

Par conclusions notifiées le 27 janvier 2023, ils demandent à la cour :

- d'infirmer le jugement dans toutes ces dispositions

Statuant à nouveau :

- de débouter la société Protière le Puy de toutes prétentions comme étant infondées;

- de condamner la société Protière le Puy à payer à la société Autos Velay la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- de condamner la société Protière le Puy à payer à M. [S] la somme de 10.000 euros à titre de dommages intérêts au titre de la violation de la vie privée et en réparation du préjudice moral ;

- de condamner la société Protière le Puy au paiement d'une somme de 5.000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Les appelants affirment ne pas avoir débauché M. [L] (même si cet argument n'a pas été retenu par le tribunal de commerce) et contestent tout acte de concurrence déloyale.

Ils font grief au tribunal de ne pas avoir démontré le caractère intentionnel de la faute retenue à l'encontre de M. [S] et de ne pas avoir caractérisé la gravité de cette faute ainsi que son caractère séparable de ses fonctions de dirigeant.

Ils soutiennent enfin qu'il n'existe aucun préjudice.

Suivant conclusions notifiées le 25 avril 2023, la SAS Protière le Puy demande à la cour de réformer partiellement le jugement entrepris :

- en ordonnant la destruction du fichier clients lui appartenant et localisé sur l'ordinateur de la SAS Autos Velay et en tout autre endroit relevant de la responsabilité de M. [S], dont la justification devra être apportée sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard, commençant à courir 10 jours après la signification de l'arrêt à intervenir ;

- en ordonnant la publication de l'arrêt à intervenir aux frais exclusifs de la société Autos Velay dans trois publications qu'elle choisira et sur la page d'accueil du site Internet de la société Autos Velay sur la partie centrale de cette page dans un encadré de couleur rouge sur fond blanc en police de caractère de taille 13 de couleur noire pour une durée minimum d'un mois ;

Y ajoutant :

- de condamner in solidum la société Autos Velay et M. [S] à lui payer la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elle rappelle que le détournement de fichiers par un ancien salarié en vue de les exploiter au profit d'un concurrent est un acte constitutif de concurrence déloyale et de parasitisme et cite en ce sens un grand nombre d'arrêts de jurisprudence.

Elle souligne que le détournement de son fichier a été acté lors de la mesure d'instruction pratiquée au siège social de la société Autos Velay le 10 juin 2021 ; que M. [S] a reconnu avoir emporté ce fichier et l'avoir utilisé pour adresser des SMS et des mails aux clients de son ancien employeur en y joignant son catalogue et pour annoncer des offres privilèges. Elle rappelle que ce fichier a été constitué par M. [S] alors qu'il était son salarié avec les informations obtenues dans l'exercice de son contrat de travail et à partir de son propre fichier clients.

Elle ajoute que les faits prouvés relèvent d'une faute intentionnelle et d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales de M. [S].

Il sera renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé des moyens développés au soutien de leurs demandes.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 novembre 2023.

MOTIVATION :

Sur la concurrence déloyale :

L'article 1240 du code civil dispose que « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

L'article 1241 du code civil dispose quant à lui que « chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ».

La concurrence déloyale vise les comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin d'en tirer profit. Il appartient à la partie qui agit sur le fondement de la concurrence déloyale d'établir à l'encontre de son concurrent la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité. Cependant, bien que le demandeur doive rapporter l'existence d'une faute, celle-ci n'a pas à être intentionnelle ou non intentionnelle (Cass. Com., 29 mai 1967).

S'agissant de la responsabilité d'un dirigeant social, elle ne peut être engagée que s'il a commis une faute détachable de ses fonctions (Cass. 2ème civ., 7 octobre 2004, n° 02-14.399). La faute détachable des fonctions doit être intentionnelle, d'une particulière gravité et incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales.

Constitue ainsi une faute détachable de ses fonctions le fait pour le gérant de participer délibérément, de manière personnelle et active à des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale (Com, 7 juillet 2004, n° 02-17.729).

Sur ce :

La SAS Protière Le Puy fait grief à M. [S] d'avoir usé d'un procédé contraire aux usages du commerce et à l'honnêteté professionnelle en s'appropriant, de manière illicite, un fichier clients dont il s'est servi lors de la création de son entreprise notamment à des fins publicitaires. Elle invoque ce qui peut se définir comme un « procédé contraire aux usages du commerce et à l'honnêteté professionnelle ».

Au soutien de sa demande, elle produit plusieurs pièces desquelles il résulte que le 18 novembre 2020, M. [S] a présenté sa démission du poste de vendeur VO à la SAS Protière Le Puy située [Adresse 3].

Quatre mois plus tard, et le 16 février 2021, M. [S] a déposé les statuts de la société Autos Velay située [Adresse 4], au greffe du tribunal de commerce du Puy en Velay.

M. [P] salarié de la société Protière atteste avoir ainsi reçu plusieurs appels de clients, destinataires de SMS, mécontents de l'usage de leurs coordonnées personnelles. M. [U], cadre commercial du groupe Protière, indique avoir été témoin au cours d'un rendez-vous professionnel avec un négociant le 29 mars 2021, de la réception par ce dernier d'un SMS adressé par M. [S].

Les SMS envoyés étaient ainsi libellés « Votre ancien conseiller commercial Citroën, Mr.[S] [N] a décidé de voler de ses propres ailes et ouvre son Garage Distinxion Autos Velay, vente véhicules neufs et d'occasions multi-marques, mécanique et carrosserie, le 22 Mars dans le pôle automobile de [Localité 5] !Soyez les bienvenus ![XXXXXXXX01] »

Par ailleurs, il est apparu que la société Autos Velay s'adressait également par mails aux clients de la société Protière le Puy. C'est ainsi que M. [D] a fait part de son mécontentement à la société Protière pour l'usage de ses données mais également pour la divulgation de celles-ci aux deux cents autres destinataires du message.

Suivant ordonnance du président du tribunal de commerce du 28 mai 2021, elle a fait procéder ,le 10 juin 2021, à des mesures de constat par un huissier de justice, assisté d'un expert informaticien. Sur interpellation, M. [S] a déclaré disposer d'un fichier client sur son PC au format Excel, constitué lorsqu'il était salarié du groupe Protière, en l'alimentant au gré des ventes et contacts qu'il a pu avoir lorsqu'il occupait son ancien poste.

Il a reconnu avoir utilisé ce fichier pour adresser des SMS à ses clients via son fournisseur de pièces Opario et des mails à ces mêmes clients depuis la boîte mail de la société Autos Velay.Le mail comporte en objet « offre privilège clients M. [S] ».

M. [S] critique le fait que le fichier brut n'a pas été communiqué. Cependant l'objet de la mesure d'instruction in futurum n'étant pas de livrer à la société Protière l'entier fichier de son concurrent mais de lui permettre de connaître le nombre de clients communs identifiés dans le fichier emporté par M. [S], cet argument ne peut être retenu.

M. [S] proteste de sa bonne foi et souligne que le fichier litigieux comporte les numéros de ses proches.

Le fait que certains amis ou parents de M.[S] aient également été clients de la société Protière le Puy est probable eu égard aux anciennes fonctions de M.[S]. Cette circonstance n'explique pas l'importance du nombre de contacts communs.

Le fait que la clientèle de la SAS Protière Le Puy puisse se tourner vers la SAS Autos Velay ne caractérise effectivement pas une concurrence déloyale, les clients ayant la liberté de choisir leur interlocuteur.

Cependant, ce sont les procédés utilisés pour détourner la clientèle qui peuvent être caractérisés de concurrence déloyale. Or en l'espèce, à la suite des mesures d'investigations qui ont été menées, la cour observe :

- que M. [S] a ouvert une société à quelques pas de celle qui l'employait précédemment, dans un secteur identique ;

- que pour assurer le lancement de cette entreprise, il a, à dessein, fait état de ses anciennes fonctions afin d'entrer en contact avec les clients de la SAS Protière Le Puy au nom de sa nouvelle société, la SAS Autos Velay, pour les informer de l'ouverture de la société et diffuser son catalogue ;

- que toutes les adresses mentionnées dans le mail adressé par M. [S] figurent comme « clients » sur le fichier de la SAS Protière Le Puy, pour lesquels des ventes ont été opérées ;

- que le fichier clients qu'il avait alimenté lorsqu'il était salarié ne peut être considéré comme un simple répertoire de contacts puisque ce fichier représente le fruit des efforts de la société Protière le Puy pour attirer et fidéliser une clientèle.

- que la comparaison entre le fichier remis en préalable par la SAS Protière Le Puy et le fichier constitué par M. [S] pendant son activité salariale révèle 568 contacts communs ; que M. [S] ne peut raisonnablement expliquer comment il a pu en quelques mois développer une clientèle de 568 personnes toutes clientes de son ancien employeur ;

- que M. [S] ne peut utilement soutenir qu'il n'a adressé qu'un SMS alors que les attestations produites et le constat d'huissier réalisé, montrent qu'il a largement exploité les contacts du fichier détourné pour faire connaître l'ouverture de la société Autos Velay ainsi que son catalogue, usant ainsi d'un procédé déloyal ;

Il en résulte que M. [S] a utilisé le fichier de clients qu'il s'était constitué en tant que salarié et l'a ensuite mis à la disposition de la SAS Autos Velay dans le but de bénéficier rapidement d'une clientèle. Il a donc intentionnellement utilisé et détourné le fichier clients en faveur de la société nouvellement créée, ce qui caractérise la volonté de détourner la clientèle.

M. [S] s'est également servi de son appartenance passée à la société Protière le Puy pour faciliter l'attraction de la clientèle et réaliser ainsi des gains de temps et d'investissement pour la société dont il est le dirigeant.

L'ensemble de ces éléments caractérise un comportement fautif et intentionnel d'une particulière gravité pour un dirigeant social en ce qu'elle traduit un manquement aux exigences de loyauté et d'honnêteté nécessaires au bon fonctionnement du marché. Cette faute se détache totalement de l'exercice normal de ses fonctions, qui doivent nécessairement s'effectuer dans le respect des règles et principes du commerce.

Le fait pour la société Autos Velay de détenir et d'exploiter à son profit le fichier clients détourné par un ancien salarié d'une société concurrente constitue un acte de concurrence déloyale.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

II- Sur les demandes d'indemnisation :

La société Protière le Puy sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a fait droit à ses demandes indemnitaires dans les proportions suivantes :

- préjudice commercial : 20 000 euros

- préjudice d'image : 10 000 euros

- préjudice financier : 7 492.06 euros

Les appelants soutiennent que le préjudice commercial de la société Protière est inexistant et font valoir :

- qu'elle ne rapporte pas la preuve d'une perte de chiffre d'affaires en lien avec la publication des SMS et des mails alors que la société Autos Velay a usé d'autres moyens de publicité pour se faire connaître ;

- que sur la période litigieuse, la société Autos Velay n'a vendu aucun véhicule à un client de la société Protière le Puy.

Sur ce

Dans le cadre d'une action en concurrence déloyale, le demandeur doit également rapporter la preuve d'un dommage. Celui-ci peut être matériel ou moral et n'ouvre droit à réparation que s'il est direct, certain et légitime. (Cass. Com., 25 avril 1983, n° 82-11.050). Il appartient au demandeur d'établir l'existence d'un lien de causalité entre les agissements déloyaux et le dommage dont il sollicite réparation.

La notion de trouble commercial constitue un préjudice autonome et indépendant d'un éventuel détournement de clientèle. Il s'infère nécessairement un préjudice commercial d'un acte de concurrence déloyale (Cass. Com., 15 janvier 2020, n° 17-27.778).

Le préjudice commercial

La SAS Protière Le Puy déduit son préjudice commercial du fait que M. [S] a connu une activité commerciale intense dès son ouverture et qu'il a pu bénéficier d'un fichier client particulièrement volumineux en 2 mois et demi d'activité. Elle estime que son chiffre d'affaires n'a pas à être pris en considération puisque la SAS Autos Velay a pu bénéficier de sa notoriété et a ainsi fait l'économie de plusieurs années de développement de son activité.

Un des principaux biais de publicité utilisé par M. [S] a été effectivement l'envoi de SMS et mails à partir du fichier client préconstitué dans le cadre de son dernier emploi.

Les procédés employés par M. [S] ont nécessairement déstabilisé la SAS Protière Le Puy dans son activité commerciale en générant une certaine confusion chez la clientèle, voire un réel mécontentement chez certains clients qui ont imputé à la société Protière un certain laisser aller puisqu'il a été demandé à cette dernière de faire le nécessaire pour mettre un terme à la diffusion de leurs données personnelles.

Toutefois, l'intimée ne démontrant pas avoir subi une perte de chiffre d'affaires directement liée aux agissements de son concurrent, le préjudice indemnisé se résumera au seul fait d'avoir vu son concurrent abuser de sa notoriété pour développer une activité concurrente et à l'avantage indu qui en a résulté

Il convient de rappeler que l'activité de M.[S] lorsqu'il travaillait au sein de la société Protière le Puy représentait en 2019 78.80 % du chiffre d'affaires global pour la partie vente de véhicule et en 2020, 45.36%.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à la société Protière le Puy une somme de 20 .000 euros à ce titre.

Le préjudice d'image

La vie privée est protégée notamment au titre de l'article 9 du code civil. Au titre des éléments de la vie figurent notamment les données personnelles.

En l'espèce, le procès-verbal de constat relève que la SAS Protière a reçu un mail de l'un de ses clients, se plaignant d'avoir reçu de la part d'un des anciens commerciaux de la société, parti avec le fichier client et faisant apparaître son adresse mail ainsi que celle de tous les destinataires.

Le nombre de clients s'étant officiellement émus de cette pratique ne signe pas l'importance du préjudice de la société Protière le Puy, dès lors que chaque client contacté par un ancien salarié de cette société a pu légitimement reprocher à la société Protière de ne pas avoir protégé ses données.

Le préjudice d'image est donc caractérisé et le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Le préjudice financier

Enfin, la SAS Protière Le Puy justifie des sommes engagées (procès-verbaux de constat notamment) et produit les pièces justifiant du bienfondé de sa demande.

L'ensemble des éléments produits permet de caractériser le préjudice financier

Par conséquent, la cour condamne M. [S] à verser la somme de 7.409,6 euros à la SAS Protière Le Puy en réparation de ce chef de préjudice.

II. Sur les demandes de destruction du fichier client et de publication de l'arrêt :

L'action en concurrence déloyale donne généralement lieu à une condamnation à des dommages-intérêts mais elle peut aussi être complétée par une injonction de cessation des comportements déloyaux et/ou une publication du jugement prononçant la condamnation afin d'informer la clientèle et le milieu professionnel.

La destruction du fichier client

Les appelants invoquent le fait que le fichier clients a été détruit lors de l'intervention de l'huissier du 10 juin 2021 tandis que la SAS Protière estime que les appelants n'ont procédé à aucune destruction du fichier client.

Une attestation d'expertise produit par la SAS Autos Velay en date du 7 avril 2022 démontre que le document rassemblant la liste des coordonnées des clients n'est plus présent sur l'ordinateur de M. [S].

La demande de destruction sous astreinte apparaît donc inutile et à tout le moins vaine puisque M. [S] a eu le loisir de copier le fichier et que la demande de la société Protière le Puy se heurte à une preuve impossible, notamment au stade de la liquidation de l'astreinte.

Par conséquent cette demande sera rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

La publication de la décision à intervenir

La SAS Protière Le Puy réclame la publication de l'arrêt à intervenir aux frais exclusifs de la SAS Autos Velay dans 3 publications, à son choix et sur la page d'accueil du site internet de la société.

La partie qui entend que ses droits ont été enfreints peut souhaiter communiquer sur cette violation afin de réparer le préjudice commercial ou préjudice d'image qui lui a été causé.

En l'espèce, la société Protière le Puy dispose d'un intérêt légitime à voir publier l'arrêt afin que sa clientèle puisse être avisée des agissements de son concurrent et du fait qu'elle n'a pas autorisé M.[S] à faire usage des données personnelles de ses clients.

Par ailleurs, la preuve de la destruction effective du fichier étant impossible à rapporter, la publicité requise permettra de prévenir le renouvellement des procédés déloyaux dénoncés.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

III. Sur les demandes reconventionnelles

Sur la procédure abusive

L'article 32-1 du code de procédure civile dispose : « celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés ».

En l'espèce, il est retenu que M. [S] et la SAS AUTOS VELAY se sont rendus coupable d'actes de concurrence déloyale, ayant occasionné des dommages à l'endroit de la SAS Protère Le Puy.

Au regard des motifs susvisés, il ne peut être considéré que la SAS Protière Le Puy a intenté une procédure de manière dilatoire ou abusive.

Ainsi, elle ne pourra être condamné à une amende civile.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur l'atteinte à la vie privée

L'article 9 du code civil prévoit que « chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que le séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé ».

M. [S] fait valoir que son téléphone a été fouillé et que le contenu des messages a parfois été dévoilé et retranscrit, cette attitude consacrant une grave atteinte à l'intimité de sa vie privée.

En l'espèce, la mission de l'expert était diligentée selon les termes d'une ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de commerce du Puy-en-Velay. Cette expertise a donc été menée selon une procédure fixée.

Les appelants ne démontrent pas que lors de l'intervention de l'huissier de justice, la procédure n'ait pas été respectée.

Le jugement a retenu à bon droit que les éléments collectés ont été remis à l'expiration du délai de quinzaine tel que prévu et que les défendeurs n'ont présenté aucune demande en rétractation.

La cour jugera en conséquent que l'atteinte à la vie privée n'est pas démontrée.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

IV. Sur les frais irrépétibles et les dépens

M.[N] [S] et la société Autos Velay succombant dans la présente procédure seront condamnés in solidum aux dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Protière le Puy la charge de ses frais de défense.

M. [S] et la société Autos Velay seront condamnés in solidum à lui régler la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs :La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement critiqué en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a :

- rejeté la demande de publication de la décision

Statuant à nouveau,

Ordonne la publication du dispositif du présent arrêt, aux frais de la société Autos Velay, dans trois publications au choix de la société Protière Le Puy ( dans la limite d'un article par publication qu'elle soit hebdomadaire, mensuelle ou quotidienne) et sur la page d'accueil du site internet de la société Autos Velay pour une durée d'un mois, sur la partie centrale de cette page, dans un encadré de couleur rouge sur fond blanc en police de caractères 11 de couleur noire.

Condamne in solidum M. [N] [S] et la société Autos Velay à verser à la société Protière le Puy la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [N] [S] et la société Autos Velay Condamne in solidum M. [N] [S] et la société Autos Velay aux dépens.