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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 28 février 2024, n° 22/04528

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Pieces et Accessoires Industriels (SAS)

Défendeur :

Semin (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Douillet

Conseillers :

Mme Barutel, Mme Bohée

Avocats :

Me Tadeo-Arnaud, Me Lautier, Me Fromantin, Me Baujoin

TJ Paris, du 16 déc. 2021, n° 19/08564

16 décembre 2021

EXPOSE DU LITIGE

La société PIECES ET ACCESSOIRES INDUSTRIELS (ci-après PAI) est spécialisée dans l'étude et la fabrication de composants et d'accessoires de fixation.

Elle est titulaire du brevet français FR 2 882 379 (ci-après, le brevet FR 379), intitulé 'Dispositif d'ancrage pour plafonds suspendus', déposé le 18 février 2005 et maintenu en vigueur par le paiement régulier des annuités.

Ce brevet porte sur un dispositif d'ancrage destiné à maintenir en position fixe les plafonds suspendus sous les planchers, plus simple à construire et par conséquent moins cou'teux que les systèmes commercialisés jusqu'alors.

La société PAI indique qu'elle a commercialisé différents produits, dont les suspentes PHAR et PHAST, protégés par le brevet FR 379.

La société SEMIN est une entreprise familiale initialement spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation d'enduits et de colle destinés aux professionnels du ba'timent, qui a, depuis plusieurs années, élargi ses activités, notamment aux ossatures pour plafonds longues portées.

La société PAI expose qu'elle a constaté l'apparition sur le marché d'une suspente « [K] [R] » en acier galvanisé, portant la référence A06214, produite et commercialisée par la société SEMIN, dont elle considère qu'elle contrefait son brevet FR 379.

Par courrier de son conseil du 11 octobre 2017, la société PAI a mis en demeure la société SEMIN de cesser l'exploitation de ses dispositifs d'ancrage.

Par lettre du 23 octobre 2017, la société SEMIN a demandé à la société PAI de définir l'objet de sa demande et les atteintes prétendument invoquées au brevet FR 379.

Par acte d'huissier de justice en date du 27 juin 2019, la société PAI a fait assigner la société SEMIN devant le tribunal de grande instance de Paris, devenu le tribunal judiciaire de Paris à compter du 1er janvier 2020, en contrefaçon de son brevet FR 379.

Dans un jugement du 16 décembre 2021, le tribunal judicaire de Paris a :

- débouté la société PAI de sa demande de rejet des pièces présentées au tribunal par le conseil de la société SEMIN au cours de l'audience de plaidoirie ;

- déclaré nulles les revendications 1, 2 et 3 du brevet FR 379, pour défaut d'activité inventive ;

- déclaré nulles les revendications 8, 9 et 10 du brevet FR 379, pour absence de clarté et insuffisance de description ;

- ordonné la transmission à l'INPI de la présente décision, une fois passée en force de chose jugée, aux fins de transcriptions au Registre National des Brevets à l'initiative de la partie la plus diligente ;

- rejeté toutes les demandes de la société PAI fondées sur la contrefaçon du brevet FR 379 ;

- condamné la société PAI aux dépens ;

- condamné la société PAI à payer à la société SEMIN la somme de 8.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire, sauf en ce qui concerne la transcription au Registre National des Brevets.

La société PAI a interjeté appel de ce jugement le 25 février 2022.

Dans ses derniers conclusions numérotées 4, transmises le 29 août 2023, la société PAI ACCESSOIRES INDUSTRIELS (PAI), appelante, demande à la cour de :

Vu les articles 13 et 14 de la directive 2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle

Vu les articles L.613-3 et suivants, L.615-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, Vu les articles 699 et suivants du code de procédure civile,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- déclaré nulles les revendications 1, 2 et 3 du brevet français FR 379, pour défaut d'activité inventive ;

- déclaré nulles les revendications 8, 9 et 10 du brevet français FR 2 882 379, pour absence de clarté et insuffisance de description ;

- ordonné la transmission à l'INPI de la décision, une fois passée en force de chose jugée, aux fins de transcriptions au Registre National des Brevets à l'initiative de la partie la plus diligente ;

- rejeté toutes les demandes de la société PAI fondées sur la contrefaçon du brevet FR 379 ;

- condamné la société PAI aux dépens ;

- condamné la société PAI à payer à la société SEMIN la somme de 8 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision, sauf en ce qui concerne la transcription au Registre National des Brevets ;

- statuant à nouveau,

- recevoir la société PAI dans ses demandes, les déclarer bien fondées ;

- débouter la société SEMIN de ses demandes visant à voir annuler les revendications 1, 2, 3, 8, 9 et 10 du brevet FR 379 ;

- débouter intégralement la société SEMIN de ses demandes, les déclarer irrecevables et mal fondées ;

- juger que la société SEMIN a commis des actes de contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 8, 9 et 10 du brevet FR 379 appartenant à la société PAI ;

- à titre subsidiaire, sur la validité des revendications 8, 9 et 10 :

- annuler partiellement les revendications 8, 9 et 10 du brevet FR 379, mais seulement en ce qu'elles se rattachent à la revendication 4, les revendications 8, 9 et 10 demeurant valables en ce qu'elles se rattachent aux revendications 1, 2 et 3 ;

- en conséquence :

- interdire à la société SEMIN, sous astreinte de 1 000 € par jour de retard et par infraction constatée, toute fabrication, importation, présentation sur quelque support que ce soit et par ses agents commerciaux et représentants, des produits vendus sous la désignation SUSPENTE [K] [R], ou toute autre marque ou référence mettant en œuvre les revendications du brevet n° FR 379 ;

- enjoindre à la société SEMIN, sous astreinte de 1 000 € par produit et par jour de retard de retirer de la vente, de cesser toute livraison et de rappeler de tous circuits commerciaux les produits concernés ;

- ordonner à la société SEMIN la remise à la société PAI de l'intégralité des stocks d'articles contrefaisants sous astreinte de 20 000 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir ;

- condamner la société SEMIN à payer à la société PAI la somme de 285 000 € en réparation du préjudice matériel subi du fait des actes de contrefaçon ;

- condamner la société SEMIN à payer à la société PAI la somme de 50 000 € en réparation du préjudice moral subi du fait des actes de contrefaçon ;

- ordonner la publication dans cinq journaux maximum périodiques ou magazines, au choix de la société PAI, mais aux frais avancés de la société SEMIN, de la décision à intervenir en entier ou par extrait sans que le cou't global de ces insertions puisse excéder la somme de 50 000 € HT ;

- ordonner au frais de la société SEMIN, la publication dans le délai de 8 jours suivant la signification du jugement à intervenir et pendant une période d'au minimum deux mois, sur tous les sites internet officiels de la société SEMIN, d'un communiqué exposant la condamnation de la société SEMIN au titre de la contrefaçon du brevet n° FR 379 de la société PAI, sous forme d'un bandeau (sans menu déroulant) en partie supérieure de la page d'accueil de ces sites internet (et en toute hypothèse au-dessus de la ligne de flottaison desdits sites) dans une police et une grosseur de caractères supérieure à celle utilisée pour les autres informations contenues sur lesdits sites, et en toute hypothèse dans une police et une grosseur de caractère aisément lisible, le texte devant e'tre précédé du titre « COMMUNIQUE » en gras et lettres capitales, cette condamnation étant prononcée sous astreinte de 20 000 € par jour de retard ;

- ordonner la condamnation de la société SEMIN à voir la publication d'un communiqué exposant sa condamnation au titre de la contrefaçon du brevet n° FR 379 de la société PAI, sur tous les sites internet officiels de la société PAI, sous forme d'un bandeau (sans menu déroulant) en partie supérieure de la page d'accueil de ses sites internet (et en toute hypothèse au-dessus de la ligne de flottaison desdits sites) dans une police et une grosseur de caractères supérieure à celle utilisée pour les autres informations contenues sur lesdits sites, et en toute hypothèse dans une police et une grosseur de caractère aisément lisible, le texte devant e'tre précédé du titre « COMMUNIQUE » en gras et lettres capitales, pendant une durée d'au moins deux mois, et ce dès la signification de la décision à intervenir ;

- avant dire droit sur le surplus du préjudice, enjoindre sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à la société SEMIN de produire :

a) les noms et adresses des grossistes destinataires et détaillants ;

b) les quantités importées, produites, commercialisées, livrées, reçues ou commandées, ainsi que le prix obtenu pour les produits en cause ;

- en toute hypothèse, condamner la société SEMIN au paiement à la société PAI de la somme de 80 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, incluant 30 000 € pour la première instance et 50 000 € pour l'appel, ainsi qu'aux dépens, dont le recouvrement pourra e'tre poursuivi par Me [G] [X], en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions numérotées 3, transmises le 26 octobre 2023, la société SEMIN, intimée, demande à la cour de :

Vu le Livre VI du code de la propriété intellectuelle et notamment les articles article L 611-10, L 611-11, L 611-14, L. 612-6, L. 613-2 et L 613-25 ;

- déclarer la société la société PAI mal fondée en son appel ;

- l'en débouter ainsi que de l'ensemble de ses demandes ;

- en conséquence :

- à titre principal,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions en ce qu'il a :

- Débouté la société PIECES ET ACCESSOIRES INDUSTRIELS de sa demande de rejet des pièces présentées au tribunal par le conseil de la société SEMIN au cours de l'audience de plaidoirie ;

- Déclaré nulles les revendications 1, 2 et 3 du brevet français FR 2 882 379, pour défaut d'activité inventive ;

- Déclaré nulles les revendications 8, 9 et 10 du brevet français FR 2 882 379, pour absence de clarté et insuffisance de description ;

- Ordonné la transmission à l'INPI de la présente décision, une fois passée en force de chose jugée, aux fins de transcriptions au Registre National des Brevets à l'initiative de la partie la plus diligente ;

- Rejeté toutes les demandes de la société PIECES ET ACCESSOIRES INDUSTRIELS fondées sur la contrefaçon du brevet FR 2 882 379 ;

- Condamné la société PIECES ET ACCESSOIRES INDUSTRIELS aux dépens ;

- Condamné la société PIECES ET ACCESSOIRES INDUSTRIELS à payer à la société SEMIN la somme de 8.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision, sauf en ce qui concerne la transcription au Registre National des Brevets ;

- et y ajoutant,

- annuler les revendications 1, 2 et 3 du brevet FR 379 de la société PAI pour défaut de nouveauté ;

- annuler les revendications 8, 9 et 10 du brevet FR 379 de la société PAI pour défaut d'activité inventive ;

- à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait retenir la validité des revendications invoquées ;

- juger que les revendications 8, 9 et 10 ne permettent pas de définir l'étendue exacte de la protection et qu'elles ne sont donc pas opposables à la société SEMIN ;

- juger que la société SEMIN n'a pas commis d'actes de contrefaçon du brevet FR 379 de la société PAI ;

- débouter par conséquent la société PAI de ses demandes fondées sur la contrefaçon dudit brevet ;

- à titre infiniment subsidiaire, juger que la société PAI ne rapporte pas la preuve d'un préjudice ;

- en tout état de cause,

- débouter la société PAI de toutes ses demandes ;

- condamner la société PAI à payer à la société SEMIN la somme complémentaire de 50 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens ;

- condamner la société PAI aux dépens d'appel et dire qu'ils pourront être recouvrés en application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur le chef du jugement non critiqué

Le jugement n'est pas critiqué, et est donc définitif, en ce qu'il a débouté la société PAI de sa demande de rejet des pièces présentées au tribunal par le conseil de la société SEMIN au cours de l'audience de plaidoiries.

Sur la présentation du brevet FR 379 de la société PAI

Dans son introduction, le brevet mentionne que :

- les planchers modernes sont réalisés en alignant des poutrelles parallèlement à co'té les unes des autres et en ajustant des entrevous entre lesdites poutrelles, servant de coffrages perdus, qui doivent e'tre suffisamment résistants pour recevoir une chape de béton au-dessus et peu volumineux pour occuper l'espace le plus réduit possible ;

- les poutrelles sont généralement profilées en T et ajustées de manière inversée, de façon à faire apparai'tre leur talon dans la partie inférieure, talon définissant deux bords latéraux opposés, lesquels présentent respectivement une face latérale et une face supérieure sensiblement perpendiculaire à leur face latérale, de telle sorte que les entrevous sont portés en appui sur les rebords latéraux des poutrelles, prises deux à deux, de façon à couvrir toute la surface du plancher ;

- les entrevous ont une forme en arc présentant deux bords libres et une portion concave, les bords libres étant respectivement portés en appui contre les deux rebords latéraux de deux poutres en regard, la concavité orientée vers le bas ; les rebords latéraux présentent ainsi chacun une bordure libre qui longe respectivement leur face latérale sensiblement à l'aplomb d'une portion des entrevous située au voisinage des bords latéraux ;

- ces bordures libres sont usuellement exploitées pour fixer un dispositif d'ancrage.

Il est exposé que les dispositifs d'ancrage connus comprennent une platine de suspension et des moyens de blocage de celle-ci sur le rebord latéral. Précisément, la platine présente dans sa partie supérieure une aile libre en saillie qui vient en prise contre la bordure et, dans sa partie inférieure, une aile en retour sous le talon de la poutrelle qui est taraudée de façon à recevoir une vis de serrage. Ce dispositif d'ancrage, formant un étau solidaire du talon de la poutrelle, est décrit comme relativement cou'teux à produire et nécessitant un certain temps de montage.

L'invention objet du brevet FR 379 se propose ainsi de fournir un dispositif d'ancrage plus simple et moins cou'teux à fabriquer, et dont le montage serait facilité.

En l'occurrence, l'une des caractéristiques de l'invention réside dans la mise en oeuvre d'une languette, solidaire de la partie supérieure de la platine de suspension, qui se prolonge dans le sens inverse de la partie inférieure de la platine de suspension et qui va venir se fixer, par un système de vissage, aux entrevous pour en devenir solidaire.

A cette fin, le brevet se compose de dix revendications ainsi libellées, étant précisé que seules les revendications 1, 2, 3, 8, 9 et 10 sont opposées :

Revendication 1

Dispositif d'ancrage (30) pour suspendre un plafond sous un plancher, ledit plancher comprenant des poutrelles (10) disposées sensiblement parallèlement les unes à co'té des autres et des entrevous (20) supportés par lesdites poutrelles, lesdites poutrelles présentant un talon (12) définissant au moins un rebord latéral (14), ledit rebord latéral présentant une face latérale (16) et une face supérieure (18) sensiblement perpendiculaire à ladite face latérale, ladite face supérieure (18) présentant une bordure (26) qui longe ladite face latérale (16), lesdits entrevous étant destinés à venir en appui sur ledit rebord latéral en surplomb de ladite bordure (26), ledit dispositif d'ancrage comprenant une platine de suspension (31) et des moyens de blocage (42, 44) de ladite platine sur ledit rebord latéral, ladite platine présentant une partie supérieure (32) appliquée le long de ladite face latérale (16) et une partie inférieure (34) pour accrocher ledit plafond, lesdits moyens de blocage comprenant au moins une aile libre (42, 44) en saillie de ladite partie supérieure (32) pour venir en prise sur ladite bordure (26) ;

caractérisé en ce que lesdits moyens de blocage (42, 44) comprennent en outre, une languette (38) solidaire de ladite partie supérieure (32) et qui se prolonge dans un sens opposé à ladite partie inférieure (34) au-delà de ladite aile libre (42, 44), ladite languette (38) étant adaptée à être fixée audit entrevous (20) pour maintenir ladite aile libre (42, 44) en prise sur ladite bordure (26).

Revendication 2

Dispositif d'ancrage selon la revendication 1, caractérisé en ce que ladite languette (38) présente une pluralité de perçages (50) espacés respectivement les uns des autres, lesdits perçages étant adaptés à recevoir des moyens de vissage pour fixer ladite languette (38) aux entrevous (20).

Revendication 3

Dispositif d'ancrage selon la revendication 1 ou 2, caractérisé en ce que ladite languette est déformable.

Revendication 4

Dispositif d'ancrage selon l'une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce que ladite partie supérieure (32) présente des moyens de guidage (46, 48) pour guider en coulissement ladite partie inférieure contre ladite partie supérieure.

Revendication 5

Dispositif d'ancrage selon la revendication 4, caractérisé en ce que ladite partie supérieure (32) de ladite platine de suspension (31) présentant une face externe opposée par rapport à ladite aile (42, 44) et deux bords latéraux opposés, lesdits bords latéraux sont recourbés vers ladite face externe parallèlement l'un vers l'autre pour former lesdits moyens de guidage.

Revendication 6

Dispositif d'ancrage selon l'une quelconque des revendications 1 à 5, caractérisé en ce que ladite partie supérieure (32) présente une extrémité libre (36), ladite extrémité libre présentant deux portions recourbées espacées l'une de l'autre pour former deux ailes libres (42, 44).

Revendication 7

Dispositif d'ancrage selon la revendication 6, caractérisé en ce que ladite extrêmité libre (36) présente une portion centrale qui se prolonge entre lesdites ailes (42, 44) pour former ladite languette (38).

Revendication 8

Dispositif d'ancrage selon l'une quelconque des revendications 1 à 7, caractérisé en ce qu'il comprend des moyens de réglage (50, 54, 56, 60) pour régler la distance relative de ladite partie inférieure et de ladite partie supérieure.

Revendication 9

Dispositif d'ancrage selon la revendication 8, caractérisé en ce que lesdits moyens de réglage sont réalisés en pratiquant une fente longitudinale dans ladite partie supérieure et en ménageant au moins un orifice dans la partie inférieure.

Revendication 10

Dispositif d'ancrage selon l'une quelconque des revendications 1 à 9, caractérisé en ce que ladite platine de suspension (31), ladite aile (42, 44) et ladite languette (38), sont formés d'une seule pièce métallique.

Le brevet comprend également les figures suivantes :

Sur la validité des revendications opposées du brevet

Comme en première instance, la société SEMIN conteste la validité des revendications 1, 2 et 3 du brevet de la société PAI sur le terrain de la nouveauté et de l'activité inventive. Elle maintient que les revendications 8, 9 et 10 sont nulles pour absence de clarté et insuffisance de description et soutient également, sur la base de nouveaux documents produits en cause d'appel, qu'elles sont nulles pour défaut d'activité inventive.

Sur la validité des revendications 1, 2 et 3 du brevet FR 379 au regard du moyen de défaut de nouveauté

Comme en première instance, la société SEMIN invoque un défaut de nouveauté des revendications 1, 2 et 3 au regard de la demande de brevet FR 2 833 280 (ci-après, le document FR 280). Elle soutient que le document FR 280, qui divulgue un dispositif permettant de fixer sous un élément fixe en l'espèce une toiture ou une paroi, un élément suspendu, en l'occurrence un produit isolant, montre une platine comportant des moyens de blocage de ladite platine sur le rebord latéral d'un chevron, ainsi qu'une languette qui s'étend dans le prolongement de ladite platine, laquelle comporte à son extrémité inférieure des moyens de retenue d'un matériau isolant ; que ce document décrit également l'obtention de la languette par pliage, la mise en place en appui ou par coincement entre deux éléments de toiture, la fixation par vissage de l'une et/ou l'autre languette pliée ; qu'il décrit également la présence sur au moins une aile de dents de harpon et leur raison d'être « L'utilisation de dents ou harpons 14 permet d'éviter l'emploi de vis ou de clous, ou permet de fixer et de positionner rapidement le dispositif selon l'invention par enfoncement dans un élément de toiture ou de paroi, préalablement à une fixation par vis ou organe métallique équivalent » ; que cette platine, après pliage, décrit par conséquent toutes les caractéristiques de la revendication 1 du brevet FR 379.

La société PAI répond que le document FR 280 divulgue un dispositif de fixation pour produit isolant perforable et n'est donc pas prévu pour suspendre un plancher (qui n'est pas perforable), encore moins pour suspendre un plancher comprenant une structure de poutrelles et d'entrevous, mais pour une utilisation très différente de celle du brevet FR 379 ; qu'en outre, le dispositif du document FR 280 n'est pas prévu pour être fixé sur la partie supérieure d'une poutrelle, comme le prétend la société SEMIN, car dans cette position, seule la tête en pointe dépasse de la poutrelle et aucun isolant ne peut être embroché ; que le document FR 280 divulgue donc une forme et un agencement différents de celui du brevet FR 379.

Ceci étant exposé, l'article L. 611-10-1° du code de la propriété intellectuelle, « Sont brevetables, dans tous les domaines technologiques, les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptibles d'application industrielle ».

L'article L. 611-11 du code de la propriété intellectuelle dispose que « Une invention est considérée comme nouvelle si elle n'est pas comprise dans l'état de la technique.

L'état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen. »

Pour être comprise dans l'état de la technique et être privée de nouveauté, l'invention doit s'y retrouver toute entière dans une seule antériorité au caractère certain avec les mêmes éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique.

En l'occurrence, la demande de brevet FR 280 intitulée « Dispositif de fixation de produit isolant perforable », mise à la disposition du public le 13 juin 2003, décrit un dispositif de fixation de produit isolant perforable, notamment pour l'isolation de toitures ou parois, qui comporte (i) au moins une languette de maintien de produit isolant présentant une conformation pointue ou une conformation apte à perforer le produit isolant, ladite conformation étant pliable de manière à maintenir le produit après perforation et (ii) des moyens de fixation à la toiture ou à la paroi comportant deux parties formant patte de fixation, dont l'une au moins est pliable de manière à réaliser un dièdre de positionnement et comporte des orifices de passage de vis, clous ou rivets de fixation :

Le résultat technique recherché est donc différent, le dispositif décrit dans le document FR 280 visant à accrocher un produit isolant perforable aux fins notamment d'isolation de toitures ou parois, alors que le dispositif selon le brevet FR 379 doit permettre de fixer un plafond suspendu sous un plancher composé de poutrelles et d'entrevous. Ainsi, le document FR 280 ne divulgue pas de « platine de suspension » ni a fortiori une telle platine destinée à être appliquée sur la face latérale d'une poutrelle et à accrocher un plafond (directement ou au moyen d'un rail).

En outre, la forme, l'agencement et le fonctionnement sont également différents en ce que dans le document FR 280, la languette (1a et 1b), certes déformable comme dans le brevet FR 379, n'est pas destinée à être fixée à un entrevous constituant un élément d'un plancher ' qui pourrait être aussi bien une paroi, à suivre la société SEMIN ' comme dans le brevet FR 379, mais à perforer un produit isolant, la revendication 2 du document FR 280 indiquant expressément que « chaque languette (1a, 1b) de maintien du produit isolant (M) présente une conformation pointue ou une conformation apte à perforer le produit isolant (M), ladite conformation étant pliable (') de manière à maintenir le produit isolant après perforation. Dans le brevet FR 379, la languette (38) n'a pas cette fonction de perforation et de maintien du matériau (plafond ou produit isolant, à les supposer équivalents, comme le soutient la société SEMIN), mais, comme le décrit la partie caractérisante de la revendication 1 et comme l'illustre la figure 1, sert à fixer la platine de suspension (31), dont elle constitue l'une des extrémités, à l'entrevous (élément du plancher) (20) par un système de vissage.

Pour ces raisons, le document FR 280 n'est pas destructeur de la nouveauté de la revendication 1 du brevet. Il n'est donc pas davantage destructeur de la nouveauté des revendications 2 et 3 qui sont dépendantes de la revendication 1.

Sur la validité des revendications 1, 2, 3, 8, 9 et 10 du brevet au regard du moyen d'absence d'activité inventive

La société SEMIN soutient que les revendications 1, 2 et 3 du brevet FR 379 sont dépourvues d'activité inventive, comme les revendications 8, 9 et 10. Elle fait valoir que l'homme du métier, à juste raison défini par le tribunal comme un ingénieur concepteur de suspension de plafond ayant des connaissances en matière de structure, d'isolation et de moyens de suspension des plafonds et faux-plafonds, qui a donc une connaissance de tout ce qui se fait dans le domaine des plafonds, des faux-plafonds, de leur structure et de leur isolation, cherchant à proposer un dispositif d'ancrage simple à fabriquer, a des connaissances générales qui comprennent aussi bien un document FR 2 858 641 RECTOR publié le 11 février 2005, un document FR 2 786 514 publié le 2 juin 2000, le brevet FR 2 756 305 KNAUF, que des catalogues (ISOLOVA de 2000, PLACOPLATRE) et une demande de brevet FR 2 272 451 mise à la disposition du public le 31 mai 1996.

Elle soutient que l'homme de métier sera incité, à partir du brevet GB 2 314 102 du 17 décembre 1997 à rechercher un système de fixation du faux plafond à l'entrevous au moyen d'un procédé de vissage direct tel que l'y invite le brevet FR 641 RECTOR ; que le document précité FR 280 peut être combiné avec les connaissances de l'homme du métier, tel que le fait de pouvoir fixer par vissage directement dans l'entrevous mentionné dans la description même du brevet FR 379, cette combinaison étant destructrice de l'activité inventive revendiquée ; que le document FR 2 727 451 (ci-après, document FR 451) divulgue toutes les caractéristiques de la revendication 1 et permet de résoudre le problème technique du brevet ; que le document EP 0 319 390 (ci-après, document EP 390) publié le 7 juin 1989, qui divulgue une suspente solidarisable par vissage à une poutrelle en bois, comportant une extrémité (14) adaptée à la fixation d'une fourrure métallique (= rail) et des moyens de maintien d'un matériau isolant, issus du repliement d'ailettes (29) qui après repliement découvrent ledit profil (14) de fixation d'une fourrure, peut être combiné (i) au brevet US 2 386 887 (ci-après, document US 887) du 4 septembre 1943 qui décrit une suspente se présentant sous la forme d'une platine entièrement plate, dont la partie inférieure est destinée à supporter un élément de plafond, tandis que sa partie supérieure est destinée à être fixée à un entrevous ou (ii) au document FR 280 précité ; que quelle que soit la combinaison considérée, outre le fait qu'y sont reproduites toutes les caractéristiques énoncées dans la revendication 1, le problème technique posé, à savoir obtenir un dispositif d'ancrage plus simple à fabriquer et dont le montage serait facilité, est résolu ; que les autres revendications opposées 2, 3, 8, 9 et 10 sont tout autant dépourvues d'activité inventive.

La société PAI répond que la société SEMIN ne démontre pas d'incitation pour l'homme du métier, se bornant à isoler chacune des caractéristiques de la revendication 1, à dire que chacune de ces caractéristiques est connue pour en conclure que la revendication 1 n'est pas inventive ; qu'elle procède selon un raisonnement a posteriori ; que le tribunal a utilisé trop de documents sans se demander ce que l'homme du métier aurait été incité à faire pour résoudre le problème posé dans le brevet FR 379 et a présupposé que cet homme du métier avait déjà en tête de fixer la suspente à l'entrevous, alors que rien ne le suggère, outre que le tribunal a retenu des documents que l'homme du métier n'aurait même pas pris en compte (notamment des documents sur des isolants) ; que l'homme du métier est un spécialiste de la suspension de plafonds ; que les prétendues connaissances générales de l'homme du métier ne sont pas démontrées ; que si l'homme du métier peut avoir des connaissances dans des domaines voisins de celui du brevet, cela ne signifie pas qu'il en a une connaissance parfaite qu'il pourrait appliquer aisément dans le domaine du brevet ; que les connaissances générales ne peuvent être illustrées que par des manuels et ouvrages de base et des normes de référence dans le domaine de l'invention, un brevet ne pouvant être considéré comme un ouvrage de référence ; que les catalogues invoqués par SEMIN ne relèvent pas davantage des connaissances générales de l'homme du métier ; que l'homme du métier n'aurait pas considéré les documents US 887 et FR 280 qui concernent des dispositifs de fixation entre un plafond et un isolant, non plus que le catalogue KNAUF, illisible, et pas davantage le document EP 390 qui permet d'embrocher un isolant et de le maintenir en place lorsque la tête est rabattue mais non de fixer ensemble une poutrelle, un entrevous et un faux-plafond ; qu'aucune des cinq attaques de la société SEMIN ne remet en cause l'activité inventive de la revendication 1 du brevet FR 379 ; que la revendication 1 étant inventive, les revendications dépendantes 2, 3, 8 9 et 10 le sont également.

Ceci étant exposé, aux termes de l'article L. 611-14 du code de la propriété intellectuelle, « Une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique. Si l'état de la technique comprend des documents mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 611-11, ils ne sont pas pris en considération pour l'appréciation de l'activité inventive ».

Ainsi, pour apprécier l'activité inventive d'un brevet, il convient de déterminer d'une part, l'état de la technique le plus proche, d'autre part le problème technique objectif à résoudre et enfin d'examiner si l'invention revendiquée aurait été évidente pour l'homme du métier.

L'homme du métier est celui du domaine technique dans lequel se pose le problème que l'invention objet du brevet se propose de résoudre. L'invention couverte par le brevet FR 379 étant un dispositif d'ancrage pour plafonds suspendus, l'homme du métier est en l'espèce un concepteur de suspensions de plafonds, ayant des connaissances en matière de structures et de moyens de suspension des plafonds et faux plafonds ; s'il n'ignore pas les problématiques d'isolation de plafonds, il n'en est pas un spécialiste.

Le problème technique à résoudre est, comme il a été dit, de proposer un dispositif d'ancrage plus simple à fabriquer et dont le montage serait facilité.

Il n'est pas contesté que l'état de la technique le plus proche est constitué du brevet anglais GB 102 publié le 17 décembre 1997 intitulé « Ceiling clip » (pince de plafond), cité dans le rapport de recherche préliminaire du brevet FR 379.

Entrent par ailleurs dans les connaissances générales de l'homme du métier :

- la demande de brevet français FR 2 858 641 déposée par la société RECTOR (ci-après, document FR 641 ou RECTOR) mise à la disposition du public le 11 février 2005, intitulée « Procédé de fabrication d'éléments intercalaires pour plancher à poutrelles, élément intercalaire et plancher obtenu »,

- la demande de brevet français FR 2 786 514 mise à la disposition du public le 26 novembre 1998 intitulée « Entrevous à paroi mince » (ci-après, le document FR 514),

- la demande de brevet français FR 2 272 451 mise à la disposition du public le 31 mai 1996 intitulée « Procédé pour l'établissement d'un faux plafond en sous face d'un plancher à entrevous en matière synthétique expansée, suspente correspondante et entrevous équipé d'une telle suspente » (ci-après, le document FR 451),

- le catalogue ISOLOVA du 1er février 2000 qui divulgue une suspente en U pour entrevous,

- le catalogue PLACOPLATRE non daté mais antérieur au 18 octobre 1996 (affichant des n° de téléphone à 8 chiffres).

Le document GB 102

La société SEMIN fait valoir que ce document décrit une platine, comprenant une aile (20) perpendiculaire destinée à venir en appui sur le rebord d'une poutrelle pour permettre le plaquage de la platine sur la bordure de la poutrelle, l'aile (20) étant prolongée de deux ailes (22) adaptées à être pliées pour une fixation à un entrevous (12) et qu'il peut, à lui seul, détruire l'activité inventive de la revendication 1 dont il décrit toutes les caractéristiques ; qu'il divulgue ainsi la caractéristique essentielle du brevet FR 379, à savoir deux languettes (22) qui se prolongent dans un sens opposé à la partie inférieure, au-delà de l'aile libre (20) et adaptées à être fixées à l'entrevous, pour maintenir l'aile libre (20) en prise sur la bordure, les languettes prises verticalement entre l'entrevous et la face verticale (6) de la poutrelle, immobilisant l'aile libre (20) sur le talon de cette dernière ; que la seule différence avec le brevet réside dans le fait que les languettes (22) s'étendent à partir du bord de l'aile libre et non de la platine ; que cependant, l'homme du métier aurait été incité, à partir du brevet GB 102, à rechercher un système de fixation du faux plafond à l'entrevous au moyen d'un procédé de vissage direct tel que l'y incite le document FR 641 (RECTOR), et à pratiquer deux traits de coupe dans le prolongement de la languette 22, jusqu'au pli à angle droit que forme l'aile 20 avec la poutrelle.

Cependant, la société PAI objecte à juste raison que l'objectif du document GB 102 est de fixer le dispositif de fixation de plafond sans vissage, ce document proposant de coincer ce dispositif entre la poutrelle et l'entrevous : la partie horizontale (« aile libre » selon SEMIN) 20 et le repli (« languette » selon SEMIN) 22 sont coincés entre la poutrelle (2) et l'entrevous (12) afin d'empêcher le déplacement vertical ou horizontal du dispositif :

Ainsi, le document GB 102, non seulement montre une « languette » (22) s'étendant à partir du bord de l'aile libre (20) et non de la platine elle-même, au contraire de ce que décrit la revendication 1 du brevet FR 379, comme l'admet la société SEMIN, mais il ne divulgue pas une languette destinée à être fixée à l'entrevous (pour maintenir l'aile libre (ou moyen de blocage) sur la bordure de la poutrelle) comme dans la revendication 1 du brevet.

L'argumentation de la société SEMIN selon laquelle il suffirait de pratiquer, sur la suspente du document GB 102, deux incisions parallèles dans le prolongement de la « languette » 22 « pour en faire une suspente FR 379 » ne convainc pas car la « languette » ainsi relevée serait alors nécessairement rabattue ou aplatie lorsque l'entrevous viendrait se positionner en contact avec la poutrelle :

La société PAI peut être suivie quand elle affirme que par rapport au dispositif du document GB 102, le dispositif d'ancrage du brevet FR 379 (par vissage de la languette à l'entrevous) offre une solution plus résistante mécaniquement (l'aile libre est plus solidement maintenue sur la bordure du talon de la poutrelle) et plus simple à monter (l'opérateur pouvant assurer une fixation du dispositif d'ancrage en fixant la languette à l'entrevous).

Outre que l'homme du métier ne sera pas nécessairement incité à modifier le repli vertical 22 du brevet GB 102, puisque ce repli est déjà censé renforcer la mise en place du dispositif fixation du plafond, il ne trouvera pas dans ses connaissances générales portant sur des dispositifs pour suspendre un plafond sous un plancher d'indication le conduisant à adopter un dispositif comportant une fixation à l'entrevous.

En effet, si le document FR 641 (RECTOR) concerne des entrevous composites ou en matériaux synthétiques (comme les entrevous décrits dans le brevet PAI) permettant (contrairement à des entrevous en béton par exemple) la fixation par vissage direct notamment de plafonds ou faux-plafonds, il ne divulgue aucun dispositif d'ancrage ou de fixation, la plaque de faux plafond étant vissée directement dans l'entrevous.

Le document FR 280

L'homme du métier ne serait pas enclin à consulter le document FR 280 qui n'entre pas dans ses connaissances générales dès lors qu'il porte sur un « Dispositif de fixation de produit isolant perforable » et qu'il ne relève donc pas du domaine technique de l'invention objet du présent litige. En outre, le document FR 280 permet seulement de faire tenir ensemble deux éléments : une paroi et un isolant et non pas trois éléments comme dans le brevet FR 379, à savoir un plafond, une poutrelle et un entrevous.

Le document FR 451

Ce document concerne l'établissement d'un faux plafond sous un plancher à entrevous sur lequel est coulée une dalle. La société SEMIN fait valoir qu'il divulgue une platine dont la partie supérieure est appliquée le long de la face latérale de la poutrelle et des moyens de blocage comprenant une aile libre en saillie venant en prise sur la bordure de la poutrelle, ainsi que la formation d'un angle droit destiné à venir s'immobiliser contre le talon tandis que la languette (22a) se fixe sur l'entrevous en s'y appuyant pour maintenir cette immobilisation et s'étend au-delà des éléments d'appui :

Mais, comme le souligne la société PAI, dans ce document, la suspente (22) ne repose pas sur le rebord de la poutrelle au moyen d'ailes libres faisant moyens de blocage et n'est pas vissée à l'entrevous, comme dans le brevet FR 379, mais, grâce à sa partie supérieure en forme de pointe (page 6, lignes 33 à 36 de la description), est enfoncée dans l'entrevous (15) comme le montrent clairement les figures 3 et 6 du document :

Et dans la variante de réalisation représentée sur les figures 10 et 11 ci-dessus du document, particulièrement mise en avant par la société SEMIN, l'assujettissement de la suspente sur l'entrevous se fait par encliquetage, sa partie médiane (22a) étant élastique (page 12, lignes 8 à 15 de la description), et non par vissage.

La société SEMIN indique que si dans le document FR 451, les entrevous sont réalisés en un matériau synthétique expansé qui ne permet pas le vissage, dans la mesure où ils sont volumineux et doivent prendre appui sur la totalité du talon de la poutrelle, on peut parfaitement comprendre qu'en présence d'entrevous composites légers et à parois minces, l'homme du métier transforme la suspente pour l'adapter à un entrevous composite, comme cela est suggéré sur le dessin ci-dessous :

Cependant, ce croquis réalisé par la société SEMIN pour les besoins de sa thèse montre un entrevous aminci à l'extrême se terminant en forme de pointe afin de permettre de faire passer la suspente sous l'entrevous et de l'y visser. La société PAI objecte qu'un tel entrevous n'existe pas, outre qu'il n'est pas vraisemblable que l'homme de métier serait incité à réaliser pareille modification à seule fin de visser la languette 2b de la suspente à l'entrevous. Si le document FR 514 montre un entrevous « à paroi mince », ce document ne concerne pas des entrevous destinés à entrer dans la composition de planchers sous lesquels des plafonds ' par hypothèse, lourds ' doivent être suspendus et il ne mentionne d'ailleurs aucun dispositif d'ancrage ou de fixation à l'entrevous.

Le document EP 390 en combinaison avec les documents US 887 ou FR 280

Le document EP 390 porte sur une « Suspente pour élément d'ossature, en particulier pour plafond à ossature métallique ». La société SEMIN argue que ce document qui divulgue une suspente solidarisable par vissage à une poutrelle en bois, comportant une extrémité (14) adaptée à la fixation d'une fourrure métallique (= rail) et des moyens de maintien d'un matériau isolant, issus du repliement d'ailettes (29) qui après repliement découvrent ledit profil (14) de fixation d'une fourrure peut être combiné au brevet US 887 qui décrit une suspente se présentant sous la forme d'une platine entièrement plate, dont la partie inférieure est destinée à supporter un élément de plafond, tandis que sa partie supérieure est destinée à être fixée à un entrevous ; que par cette combinaison, on obtient :

La société SEMIN ajoute que le document EP 390 peut être combiné avec le document FR 280 précité pour obtenir l'une ou l'autre des combinaisons suivantes :

Le dispositif de fixation divulgué par le document EP 390 comporte une tête de fixation encadrée par une pointe pliable à l'équerre, formée par deux languettes chacune également pliable à l'équerre, cette pointe étant apte à traverser directement les plaques ou panneaux à mettre en œuvre pour la constitution d'un doublage thermo-acoustique, la retenue de ce doublage thermo-acoustique se faisant ensuite par le pliage à l'équerre de la pointe (description, page 2 colonne 2 lignes 39 à 63). Il est encore indiqué que selon l'invention, une seule et même pièce convient à la fois à la traversée d'un doublage thermo-acoustique et à la suspension d'un élément d'ossature (description page 3 colonne 3, 1er §), de sorte que ce document relève du même domaine technique que le brevet FR 379. En revanche, le document ne mentionne pas d'entrevous et, comme le souligne la société PAI, le dispositif de fixation permet de fixer ensemble, et par embrochage, une poutrelle et des couches d'isolant et non une poutrelle, un entrevous et un plafond ou faux-plafond comme dans la revendication 1 du brevet FR 379. En outre, la solution proposée par le document EP 390 consiste à fixer le dispositif sur la paroi latérale d'une poutrelle, et non sur un rebord de cette poutrelle.

A supposer que l'homme de métier soit incité à se référer au document américain US 887 de 1943, qui concerne plus particulièrement une fixation permettant de maintenir un matériau, tel que de l'isolant, ce qui ne ressortit pas au domaine de l'invention qui vise à suspendre un plafond sous un plancher, il y trouvera un dispositif de fixation comportant une plaque apte à être pliée et destinée à être « cimentée directement » à un plafond ou à un mur (ligne 32 de la page 1 de la traduction). Outre que cette plaque destinée à être cimentée est très éloignée de la languette vissable du brevet PAI assortie de deux ailes libres faisant moyens de blocage reposant sur le rebord d'une poutrelle, il reste qu'en combinant cette plaque à la pointe pliable et aux deux languettes pliables à l'équerre du document EP 390, on obtient un dispositif qui ne vise pas à permettre de relier ensemble une poutrelle, un entrevous et un plafond ou faux-plafond comme dans le brevet FR 379.

Le document FR 280, comme il a été dit, n'appartient pas au domaine technique de l'invention et permet seulement de faire tenir ensemble deux éléments : une paroi et un isolant, et non pas trois éléments comme dans le brevet FR 379, à savoir un plafond, une poutrelle et un entrevous. Rien ne permet de retenir que l'homme du métier aurait été incité à s'y référer pour modifier le dispositif de fixation du document EP 390.

Les antériorités invoquées par la société SEMIN, prises seules ou en combinaison, ne sont donc pas de nature à priver d'activité inventive la revendication 1 du brevet FR 379. La revendication 1 du brevet étant inventive, les revendications dépendantes 2, 3, 8, 9 et 10 le sont également.

En appel, la société SEMIN conteste l'activité inventive des revendications 8, 9 et 10 en se fondant sur le document FR 451 (contre la revendication 8), le document FR 507 (contre la revendication 9) et les documents KNAUF et ISOLAVA (contre la revendication 10).

Elle argue que la figure 5 du document FR 451 montre qu'il est connu de faire coulisser verticalement entre des moyens de guidage une suspente sur un support fixe, et de l'immobiliser sur ce dernier dans le but d'ajuster une hauteur de plafond. Mais rien n'indique à la lecture de la revendication 8 du brevet FR 379 ou à l'examen des figures (notamment la figure 2) que sont envisagés des moyens de réglage par coulissement. Au contraire, la description du brevet enseigne que la distance entre la partie inférieure et la partie supérieure de la platine de suspension peut être réglée et modulée au moyen de l'ajout d'une pièce rapportée (54) fixable par une vis de blocage sur l'un quelconque des orifices équidistants positionnés sur la platine (page 8, lignes 17 à 25).

Elle plaide par ailleurs qu'il est évident que, comme le prévoit la revendication 9, un réglage de longueur consiste à faire coopérer une fente avec un orifice dans lequel est vissée une vis, ce que confirme la figure 1 du document FR 2 732 057 LAFARGE, publié le 27 septembre 1996 et relatif à un dispositif de suspension d'un élément de construction. Cependant, la figure 2 (et non 1) reproduite dans les écritures de la société SEMIN (page 36) ne permet pas de se convaincre de la pertinence de son argumentation, dès lors que si la figure fait bien apparaître une fente (11), au demeurant en forme de T et non pas longitudinale, elle ne montre pas d'orifice dans la partie inférieure comme le prévoit la revendication 9 du brevet PAI, mais des « doigts » (14) et des « pattes » (12) dans la partie supérieure de la pièce.

La société SEMIN fait enfin valoir que toutes les suspentes sont faites d'une seule pièce métallique, comme cela ressort de tous les documents versés aux débats et que quand il y a plusieurs pièces, cela correspond à la présence de rallonge, de sorte que la revendication 10 ne témoigne d'aucune activité inventive. Elle se réfère plus spécialement à titre d'exemples, au catalogue édité par KNAUF en 1998 et au catalogue édité par ISOLAVA en 2000. Cependant, le catalogue ISOLAVA montre (en page 13) une sustente à ressort « Veerklem » manifestement constituée d'au moins deux pièces reliées entre elles par deux rivets ou vis.

Les revendications 8, 9 et 10 du brevet ne sont donc pas privées d'activité inventive par les documents invoqués en appel par la société SEMIN.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a déclaré nulles les revendications 1, 2 et 3 du brevet FR 379, pour défaut d'activité inventive et la demande de nullité des revendications 8, 9 et 10 pour défaut d'activité inventive sera rejetée.

Sur la validité des revendications 8, 9 et 10 du brevet FR 379 au regard du moyen d'absence de clarté et d'insuffisance de description

La société PAI fait valoir que le tribunal a annulé les revendications 8, 9 et 10 pour manque de clarté et insuffisance de description alors que la société SEMIN se bornait à invoquer un défaut de clarté qui n'est en aucun cas un motif de nullité ; que selon la Cour de cassation, l'interprétation d'une revendication est obligatoire, de sorte qu'en cas d'ambiguïté, il importe de lever celle-ci en interprétant les termes de la revendication ; que, de plus, le tribunal a annulé les revendications 8, 9 et 10 pour manque de clarté et insuffisance de description en se référant à la revendication 4 qui n'était nullement opposée à la société SEMIN ; que les revendications 8, 9 et 10 pouvaient tout au plus être annulées dans leur rattachement à la revendication 4, et non dans tous leurs rattachements ; qu'en tout état de cause, les revendications 8, 9 et 10 sont claires et suffisamment décrites ; que la revendication 8 ne peut être considérée qu'en combinaison avec une ou plusieurs des revendications 1, 2 et 3, et non avec la revendication 4 (non invoquée) et non plus avec les revendications 9 et 10 (qui viennent après) ; que la revendication 8 dépend de la revendication 1 et elle en intègre donc toutes les caractéristiques ; que lorsqu'il lit « la revendication 1+8 », l'homme du métier comprend que le dispositif d'ancrage comprend également (en plus de la platine de suspension, des moyens de blocage et de la languette) des moyens de réglage de la distance entre la partie supérieure (32) et cette partie inférieure (34) du dispositif d'ancrage telles que décrites dans la revendication 1 (« ladite platine présentant une partie supérieure (32) appliquée le long de ladite face latérale (16) et une partie inférieure (34) pour accrocher ledit plafond ») ; que de plus, lorsqu'il lit la description du brevet FR 379, l'homme du métier comprend que la revendication 8 est liée à la pièce rapportée 54, qui est décrite dans le brevet FR 379 comme étant un moyen pour « prolonger la longueur de cette platine de suspension 31 de façon à ajuster les positions relatives du rail précité et de la poutrelle 10 » (page 8, lignes 4-8) ; qu'il comprend donc qu'il s'agit d'un moyen pour régler la distance entre la partie inférieure et la partie supérieure du dispositif d'ancrage ; que la platine 31 et la pièce rapportée 54 sont d'ailleurs visibles sur la figure 2 du brevet ; qu'en lisant la description du brevet FR 379 avec la volonté de comprendre, l'homme du métier perçoit que « ladite partie inférieure » et « ladite partie supérieure » correspondent à la partie inférieure et à la partie supérieure du dispositif d'ancrage dans son ensemble, c'est-à-dire de l'ensemble formé par la platine 31 et la pièce rapportée 54 ; qu'en ce qui concerne la revendication 9, l'homme du métier comprend directement que le dispositif d'ancrage 30 est prolongé vers le bas par la pièce rapportée 54, la « partie supérieure » du dispositif d'ancrage 30 correspondant dès lors à la partie supérieure de la platine 31, tandis que la « partie inférieure » du dispositif d'ancrage 30 correspond à la partie inférieure de la pièce rapportée 54 ; qu'ainsi, on comprend qu'il convient de ménager une fente longitudinale sur la platine 31 et un orifice sur la pièce rapportée 54 et que la hauteur du dispositif d'ancrage 30 pourra être facilement réglée en vissant à travers l'orifice et la fente, après avoir positionné la fente par rapport à l'orifice (et donc après avoir réglé la hauteur du dispositif) ; que la revendication 10 dit simplement que la platine, l'aile et la languette sont formées d'une seule pièce métallique comme illustré par exemple sur la figure 1.

La société SEMIN demande la confirmation du jugement qui a annulé les revendications 8, 9 et 10 pour absence de clarté et insuffisance de description. Elle fait valoir que ces revendications sont incohérentes et manquent de clarté, sont même incompréhensibles et que la description est insuffisante, et même ambigüe ; que le tribunal pouvait valablement lire et analyser la revendication 4, même si celle-ci n'est pas invoquée au titre de la contrefaçon par PAI, chacune des revendications 8, 9 et 10 étant dans la dépendance des revendications précédentes, et notamment de la revendication 4, et que n'est pas poursuivie l'annulation de la revendication 4 ; que même sans se référer à la revendication 4, les revendications 8, 9 et 10 manquent de clarté, ni la description ni les dessins ne permettant de les interpréter ; qu'en tout état de cause, elles ne permettent pas de définir l'étendue exacte de la protection, n'offrent pas un degré raisonnable de certitude aux tiers, ne sont donc pas opposables aux tiers et ne peuvent servir de fondement à des demandes pour contrefaçon ; que la demande de la société PAI d'annulation partielle des revendications ne peut prospérer dès lors que l'annulation de ces revendications n'est pas fondée uniquement sur une question de rattachement à la revendication 4.

Ceci étant exposé, l'article L. 612-5 du code de la propriété intellectuelle dispose que « L'invention doit être exposée dans la demande de brevet de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter », l'article L. 612-6 ajoutant que « Les revendications définissent l'objet de la protection demandée. Elles doivent être claires et concises et se fonder sur la description ». Selon l'article L. 613-2 alinéa 1 du même code, « L'étendue de la protection conférée par le brevet est déterminée par les revendications. Toutefois, la description et les dessins servent à interpréter les revendications ».

Et l'article L. 613-25 du même code dispose que « Le brevet est déclaré nul par décision de justice : (') b) S'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter (')».

Le tribunal a rappelé à juste raison que l'exigence de suffisance de description, qui a pour finalité de garantir la possibilité pour l'homme du métier d'exécuter l'invention sans effort excessif grâce aux informations fournies par l'ensemble du brevet et ses propres connaissances techniques, est satisfaite dès lors que la description indique les moyens qui donnent à l'homme du métier, doté des capacités et des connaissances que l'on est en droit d'attendre de lui, la possibilité d'exécuter ou de mettre en œuvre l'invention par de simples mesures d'exécution, comme des essais de routine, ou moyennant un effort raisonnable de réflexion.

En l'espèce, la revendication 8 décrit un dispositif d'ancrage selon « l'une quelconque des revendications 1 à 7 (') » comprenant de moyens de réglage (50, 54, 56 et 60) permettant de régler « la distance relative de ladite partie inférieure et de ladite partie supérieure ».

L'homme du métier, qui, comme le souligne la société PAI, a la volonté de comprendre, comprendra en lisant la description du brevet (page 8, lignes 17 à 25) que la distance entre la partie inférieure et la partie supérieure de la platine, lesquelles sont évoquées à la revendication 1 (« ladite platine présentant une partie supérieure (32) appliquée le long de ladite face latérale (16) et une partie inférieure (34) pour accrocher ledit plafond »), peut être réglée et modulée au moyen de l'ajout d'une pièce rapportée (54) fixable par une vis de blocage dans l'un quelconque des orifices équidistants (60) positionnés sur la platine, sa compréhension étant facilitée ou confortée par la figure 2 du brevet qui montre une partie inférieure de la platine plus longue que celle apparaissant sur la figure 1.

De la même façon, il comprendra que la revendication 9, qui dépend de la revendication 8, propose un autre mode de réalisation du réglage de la distance entre la partie inférieure de la platine et sa partie supérieure par l'ajout là encore d'une pièce rapportée et que ce mode de réalisation consiste non pas à visser cette pièce rapportée dans l'un quelconque des orifices équidistants de la platine (comme dans la revendication 8), mais en faisant coulisser la pièce rapportée le long d'une fente longitudinale pratiquée dans la partie inférieure de la platine et en la fixant au moyen d'une vis selon l'espacement souhaité, ce qui permet un bien plus grand nombre de positions possibles de la pièce rapportée que les orifices équidistants. Ce mode de réalisation est expliqué suffisamment précisément et clairement dans la description : « Selon un autre mode de mise en œuvre non représenté, particulièrement avantageux, et qui permet d'ajuster la pièce rapportée 54 sur la platine, 31, dans une infinité de positions relatives, la partie inférieure 34 présente non pas une pluralité de perçages, mai une fente longitudinale qui s'étend selon la ligne centrale A et qui forme avant-trou au même titre que les perçages de ladite pluralité de perçages. Bien évidemment, la fente est suffisamment étroite pour qu'une vis puisse y être vissée à force en y restant bloquée. De la sorte, la pièce rapportée 54 est ajustée sur la platine de suspension 31 de telle façon que l'un au moins des orifices de la pièce rapportée 54 soit situé au regard de ladite fente, et en maintenant ladite pièce et ladite platine espacée l'une de l'autre à une distance désirée. Ensuite, une vis auto-taraudeuse de blocage est vissée à force à travers l'orifice et la fente de façon à bloquer ensemble la pièce rapportée et la platine » (page 8, lignes 26 à 32 et page 9).

L'homme de métier comprendra aisément que la pièce rapportée 54 supplémentaire a vocation à être positionnée puis fixée sur la platine grâce aux moyens de guidage (46, 48) décrits dans la revendication 4 du brevet qui ne présente ainsi aucune incohérence avec les revendications 8 et 9.

La revendication 10 qui décrit un dispositif d'ancrage selon l'une quelconque des revendications 1 à 9, caractérisé en ce que la platine de suspension (31), les moyens de blocage (ailes libres) (42, 44) et la languette (38) sont formés d'une seule pièce métallique ne pose pas de difficulté de compréhension et est au demeurant clairement illustrée par la figure 1 du brevet. La pièce rapportée 54 visée par les revendications 8 et 9 ne se confond pas avec la platine, mais constitue un élément qui peut lui être ajouté par vissage (revendication 8) ou coulissement + vissage (revendication 9), et ne vient donc pas en contradiction, pour l'homme de métier, avec le fait que la platine, les moyens de blocage et la languette sont, quand il n'est pas décidé d'ajouter une pièce rapportée, constitués d'une seule pièce.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a déclaré nulles les revendications 8, 9 et 10 du brevet FR 379, pour absence de clarté et insuffisance de description.

Sur la contrefaçon du brevet FR 379

La société PAI soutient que les suspentes [K] [R] commercialisées par la société SEMIN reproduisent les revendications 1, 2, 3, 8, 9 et 10 de son brevet FR 379. En ce qui concerne la reproduction de la revendication 1, elle fait valoir notamment que le produit SEMIN est constitué d'une platine de suspension qui comprend une partie inférieure (destinée à recevoir un profilé pour suspendre un faux plafond) et une partie supérieure, une aile libre et deux languettes ; que la suspente SEMIN « comprend bien une languette. Plus précisément, la suspente [K] [R] comprend deux languettes. Elle en comprend donc bien une, puisque la revendication 1 n'exclut pas la présence de plusieurs languettes » ; que chaque languette est bien solidaire de la partie supérieure de la platine et se prolonge dans un sens opposé à la partie inférieure au-delà de l'aile libre ; que lorsqu'elle est vendue, la suspente SEMIN est configurée avec ses languettes à angle droit par rapport à la platine de suspension, chaque languette présentant, au niveau de la partie supérieure de la platine, deux entailles latérales à la base de la languette, ce qui permet de faciliter le pliage de la languette par rapport à la platine ' et donc d'orienter la languette par rapport à la platine ; que l'orientation peut être aisément réglée à la main, en pliant la languette au niveau de ces deux entailles latérales ; que le brevet FR 379 prévoit justement que la languette est déformable et orientable, et ce afin de « s'adapter à toutes les géométries d'entrevous et de poutrelles » ; que la société SEMIN argue vainement que la revendication 1 du brevet est limitée à une seule languette ; que si la revendication enseigne que les moyens de blocage comprennent « une languette », le verbe « comprendre », dans le langage courant, signifie « inclure » et n'est pas exclusif, le fait qu'un produit comprenne un élément n'excluant pas qu'il inclut aussi d'autres éléments ; que le verbe « comprendre » se distingue de l'expression « constitué de » qui exclut la présence d'autres éléments ; que cette compréhension est confirmée par les directives de l'Office européen des brevets en des termes très clairs : « Sens des termes "comprenant" et "constitué de" - Une revendication portant sur un dispositif/procédé/produit qui "comprend" certaines caractéristiques est interprétée comme signifiant qu'elle inclut ces caractéristiques, mais qu'elle n'exclut pas la présence d'autres caractéristiques, tant qu'elles ne rendent pas la revendication inopérante. Par contre, si l'expression "constitué de" est employée, aucune autre caractéristique ne figure dans le dispositif/procédé/produit en dehors de celles qui suivent cette expression. » ; que dans la revendication 1, les termes « comprennent en outre une languette » 1 ont précisément été choisis pour couvrir des exemples utilisant possiblement plusieurs languettes ; que la suspente SEMIN comprend bien une languette, le fait que la société SEMIN ait ajouté une deuxième languette à sa suspente ne lui permet pas de contourner le brevet ; qu'en ayant, comme elle le prétend, amélioré la suspente PAI en lui ajoutant une languette, la société SEMIN contrefait le brevet ; qu'est tout aussi vain le second argument de la société SEMIN selon lequel ses deux languettes ne sont pas situées dans le prolongement de la platine, mais font un angle droit avec celle-ci ; qu'en effet, « prolongement » ne signifie pas « alignement » et que rien dans le brevet ne suggère une telle équivalence ; qu'au contraire la description du brevet indique que la languette s'étend longitudinalement, selon une direction inclinée, pour venir épouser l'entrevous, la revendication 3 du brevet confirmant que la languette est déformable ; que les languettes du produit SEMIN sont tout aussi déformables grâce aux deux entailles latérales qui permettent leur pliage et leur réorientation pour les adapter à différentes formes de poutrelles et d'entrevous et le cas échéant de façon à ce qu'elles « se prolongent dans un sens opposé à ladite partie inférieure au-delà de ladite aile libre », comme le prévoit la revendication 1 :

Cependant, la société SEMIN objecte pertinemment que sa suspente ne comporte pas une mais deux languettes.

Or, le brevet PAI, aux termes de la partie caractérisante de la revendication 1, n'en comporte qu'une : « dispositif d'ancrage (') caractérisé en ce que lesdits moyens de blocage (42, 44) comprennent en outre, une languette (38) solidaire de ladite partie supérieure (32) et qui se prolonge dans un sens opposé à ladite partie inférieure (34) au-delà de ladite aile libre (42, 44), ladite languette (38) étant adaptée à être fixée audit entrevous (20) pour maintenir ladite aile libre (42, 44) en prise sur ladite bordure (26) ». L'unicité de la languette se retrouve dans la revendication 2 (« ladite languette (38) présente une pluralité de perçages (50) espacés respectivement les uns des autres, lesdits perçages étant adaptés à recevoir des moyens de vissage pour fixer ladite languette (38) aux entrevous »), la revendication 3 (« ladite languette est déformable ») et la revendication 7 (« pour former ladite languette »). De même, de multiples passages de la description évoquent une seule languette (« Ainsi, une caractéristique de l'invention réside dans la mise en œuvre d'une languette' » - page 2 lignes 29 et 30 ; « ladite languette » - page 3 ligne 8, lignes 16 et 17 ; « pour former ladite languette » - page 4 ligne 4 ; « une languette 38 qui s'étend longitudinalement dans le prolongement et au centre de la partie supérieure 32 » - page 5 lignes 28 et 29 ; « de chaque côté de la languette 38 » - page 6 ligne 1 ; « la languette est découpée » - page 7 ligne 3 ; « le long de la languette » - page 7 ligne 11). Et les figures du brevet ne montrent qu'une unique languette.

La présence d'une unique languette est en lien avec celle d'ailes libres faisant moyens de blocage (42, 44) et reposant sur la bordure 26 de la poutrelle, la languette devant être vissée à l'entrevous alors que les ailes libres sont en prise sur la bordure de la poutrelle, et cohérente également avec l'objectif de l'invention qui est de proposer un dispositif d'ancrage « simple à fabriquer et par conséquent moins coûteux ».

Ainsi, ni les revendications, ni la description, ni les figures du brevet FR 379 ne mentionnent une pluralité de languettes, ou même seulement n'évoquent la possibilité d'une telle pluralité (par exemple, par la formule « au moins une languette ») qui autoriserait une analyse sémantique du verbe « comprendre » ; au contraire, il ressort de toutes les parties du brevet (revendications, description et figures) que le dispositif protégé de la société PAI comporte une et une seule languette.

Pour cette seule raison, la suspente [K] [R] de la société SEMIN ne constitue pas la contrefaçon de la revendication 1 du brevet PAI, ni celle des revendications dépendantes.

En outre, comme le relève la société SEMIN, les languettes de sa suspente ne se prolongent pas dans le sens opposé à la partie inférieure de la platine mais sont perpendiculaires à cette partie inférieure, faisant angle droit avec le corps de la platine, et s'étendent du côté opposé à l'aile libre et dans le même plan que celle-ci, alors que dans la suspente selon le brevet FR 379, la languette se situe dans l'alignement de la platine et perpendiculairement aux ailes libres faisant moyens de blocage. De fait, comme le souligne la société SEMIN, sa suspente correspond à la suspente du document US 887 précité qui est, selon elle, dans le domaine public :

Enfin, l'argumentation de la société PAI selon laquelle il suffit d'incliner les languettes du produit SEMIN pour obtenir la même orientation que sur la suspente selon le brevet est inopérante pour établir la reproduction de la revendication 1 du brevet dès lors que la déformabilité de la languette n'est évoquée que dans la revendication 3.

La société PAI sera, en conséquence des développements qui précèdent, déboutée de l'intégralité de ses demandes en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 8, 9 et 10 de son brevet FR 379.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La société PAI, partie perdante pour l'essentiel, sera condamnée aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile, et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

La somme qui doit être mise à la charge de la société PAI au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la société SEMIN en appel peut être équitablement fixée à 40 000 €, cette somme complétant celle allouée en première instance.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement si ce n'est en ce qu'il a :

- déclaré nulles les revendications 1, 2 et 3 du brevet FR 379, pour défaut d'activité inventive,

- déclaré nulles les revendications 8, 9 et 10 du brevet FR 379, pour absence de clarté et insuffisance de description,

- ordonné la transmission à l'INPI de la décision, une fois passée en force de chose jugée, aux fins de transcriptions au Registre National des Brevets à l'initiative de la partie la plus diligente,

L'infirmant de ces chefs, statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute la société SEMIN de l'ensemble de ses demandes en nullité des revendications 1, 2, 3, 8, 9 et 10 du brevet FR 379 dont est titulaire la société PIECES ET ACCESSOIRES INDUSTRIELS (PAI),

Condamne la société PAI aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile, et au paiement à la société SEMIN de la somme de 40 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.