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Décisions

CA Lyon, ch. soc. a, 28 février 2024, n° 20/03242

LYON

Arrêt

Autre

CA Lyon n° 20/03242

28 février 2024

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 20/03242 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NAGP

Société BILFINGER LTM INDUSTRIE

C/

[R]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 28 Mai 2020

RG : F19/01220

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2024

APPELANTE :

Société BILFINGER LTM INDUSTRIE

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Fabienne MARTIN, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉ :

[Y] [R]

né le 22 Mars 1972 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Séverine MARTIN de la SELARL MARTIN SEYFERT & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Elodie BOUCHARLAT ODET, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Décembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Catherine MAILHES, Présidente

Anne BRUNNER, Conseillère

Françoise CARRIER, Magistrate honoraire

Assistées pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 28 Février 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MAILHES, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTION DES PARTIES

Suivant promesse d'embauche du 14 mai 2007, M. [Y] [R] a été engagé à compter du 12 septembre 2007 par la société Bilfinger Ltm Industrie (la société), en qualité de responsable du département Pharmacie, statut cadre, pour un salaire annuel de 61 200 euros brut par an.

Le 16 avril 2012, un contrat de travail à durée indéterminée a été signé, avec effet rétroactif, pour un poste de responsable du département Pharma et Procédés, statut cadre Position II coefficient 108, moyennant une rémunération fixe de 79 372,80 euros bruts, outre une rémunération variable.

La société Bilfinger Ltm Industrie applique la convention collective nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie et emploie plus de 11 salariés.

Par courrier du 11 mars 2019, M. [R] a remis sa démission

Le 3 mai 2019, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de voir requalifier la prise d'acte en licenciement et voir la société Bilfinger Ltm Industrie condamnée à lui verser des rappels de salaire sur heures supplémentaires et l'indemnité de congés payés afférente, des rappels de salaire sur la contrepartie obligatoire en repos et l'indemnité de congés payés afférente, une indemnité au titre du brevet, une indemnité de licenciement, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, à titre subsidiaire, des dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail, des dommages-intérêts pour travail dissimulé et à titre conservatoire, une indemnité compensatrice de congés payés, outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à lui remettre les bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés avec astreinte, au paiement des intérêts au taux légal.

La société Bilfinger Ltm Industrie a été convoquée devant le bureau de conciliation et d'orientation par courrier recommandé avec accusé de réception signé le 9 mai 2019.

Elle s'est opposée aux demandes du salarié et a sollicité à titre reconventionnel la condamnation de celui-ci au remboursement de la somme de 435,61 euros nets indûment perçue et au versement de la somme de 3 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 28 mai 2020, le conseil de prud'hommes de Lyon a :

rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par la société Bilfinger Ltm Industrie ;

dit que M. [R] avait le statut de cadre dirigeant à compter de novembre 2017 ;

débouté M. [Y] [R] de sa demande de paiement d'heures supplémentaires sur la période du 1er novembre 2017 à mars 2019 ;

dit et juge que les heures effectuées entre la 26ème et la 39ème heure au cours de la période de mars 2016 à octobre 2017 ont été régulièrement rémunérées,

débouté M. [Y] [R] de sa demande sur ce point,

dit fondée la demande de paiement d'heures supplémentaires au-delà de 39 heures hebdomadaires sur la période de mars 2016 à octobre 2017,

condamné la société Bilfinger Ltm Industrie à payer à M. [Y] [R] les sommes suivantes :

27 441 euros au titre d'heures supplémentaires pour l'année 2016,

2 744 euros au titre des congés payés afférents,

25 538 euros au titre d'heures supplémentaires pour l'année 2017,

2 554 euros au titre des congés payés afférents,

constaté le droit de M. [Y] [R] à une contrepartie obligatoire en repos du fait du dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires,

condamné la société Bilfinger Ltm Industrie à payer à M. [Y] [R] les sommes suivantes :

15 300 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2016,

1 530 euros au titre des congés payés afférents,

13 409 euros à titre de rappel de salaire pour l'année 2017,

1 340 euros au titre des congés payés afférents,

dit qu'aucune dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée et débouté M. [Y] [R] de ce chef de demande,

débouté Monsieur [Y] [R] de sa demande indemnitaire au titre du brevet d'invention,

dit que la décision de rupture du contrat par M. [Y] [R] produit les effets d'une démission, et l'a débouté de ses demandes sur ce point,

dit que la société Bilfinger Ltm Industrie a manqué à son obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail et condamné la société Bilfinger Ltm Industrie à payer à M. [Y] [R] la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts à ce titre,

ordonné la remise par la société Bilfinger Ltm Industrie des documents corrigés (bulletins de salaire, certificat de travail, attestation Pôle Emploi) sans astreinte,

condamné M. [Y] [R] à rembourser à la société Bilfinger Ltm Industrie la somme nette de 435,61 euros indûment perçue par lui ;

condamné la société Bilfinger Ltm Industrie à payer à M. [Y] [R] la somme de 1 700 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

rappelé que les condamnations au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, du salaire et de l'indemnité conventionnelle de licenciement sont assortis de plein droit de l'exécution provisoire selon les dispositions de l'article R. 1454-28 du Code du Travail,

fixé pour l'application de ce texte la moyenne des salaires la somme de 11 229 euros

condamné la société Bilfinger Ltm Industries aux dépens.

Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 24 juin 2020, la société Bilfinger Ltm Industrie a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement qui lui a été notifié le 29 mai 2020, aux fins d'infirmation en ce qu'il a fait droit aux demandes du salarié au titre des heures supplémentaires et congés payés afférent, contrepartie obligatoire en repos et congés payés afférents, dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 17 mars 2021, la société Bilfinger Ltm Industrie demande à la cour de :

infirmer le jugement et débouter M. [R] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, contrepartie obligatoire en repos et congés payés afférents ;

ordonner le remboursement par M. [Y] [R], des sommes qui lui ont été versées à tort au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents, ainsi qu'au titre de la contrepartie obligatoire en repos et des congés payés afférents ;

infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés ;

infirmer le jugement en ce qu'il fait droit à la demande au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail et débouter le salarié de sa demande à ce titre ;

confirmer le jugement le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes au titre du travail dissimulé, du brevet d'invention et de la rupture du contrat de travail ;

infirmer le jugement et condamner M. [R] lui payer une indemnité de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 21 décembre 2020, ayant fait appel incident, M. [R] demande à la cour :

de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'exception d'irrecevabilité, dit que la société Bilfinger Ltm Indutrie a manqué à son obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail, reconnu dans son principe, son droit au paiement de ses heures supplémentaires correspondant aux années 2016 et 2017, son droit au paiement d'une contrepartie obligatoire en repos du fait du dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires, correspondant aux années 2016 et 2017, condamné la société Bilfinger Ltm Industrie à lui payer la somme de 1 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la société Bilfinger Ltm Industrie de sa demande à ce titre, condamné la société Bilfinger Ltm Industrie aux dépens ;

d'infirmer pour le surplus, le jugement entrepris et statuant à nouveau de :

à titre reconventionnel,

condamner la SAS Bilfinger Ltm Industrie à lui verser les sommes suivantes au titre des heures supplémentaires non-rémunérées :

rappel de salaire année 2016 : 31 138 euros

congés payés afférents 3 113,80 euros

rappel de salaire année 2017 : 34 700 euros

congés payés afférents 3 470 euros

rappel de salaire année 2018 : 32 639 euros

congés payés afférents 3 263,90 euros

rappel de salaire année 2019 : 4 196 euros

congés payés afférents : 419,60 euros

condamner la SAS Bilfinger Ltm Industrie à lui verser les sommes suivantes au titre de la contrepartie obligatoire en repos :

rappel de salaire année 2016 : 21 883,89 euros

congés payés afférents : 2 189 euros

rappel de salaire année 2017 : 23 621,80 euros

congés payés afférents : 2 362 euros

rappel de salaire année 2018 : 22 344,93 euros

congés payés afférents : 2 234 euros

rappel de salaire année 2019 : 3 486,89 euros

congés payés afférents : 348 euros

condamner la SAS Bilfinger Ltm Industrie au versement d'une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé de 67 374 euros ;

condamner la SAS Bilfinger Ltm Industrie à lui verser une indemnité au titre de son brevet d'invention à hauteur de 11 229 euros ;

condamner la SAS Bilfinger Ltm Industrie à lui verser des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail à hauteur de 157 206 euros ;

dire que sa démission est équivoque et qu'elle doit être requalifiée en prise d'acte aux torts de l'employeur, produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

condamner la SAS Bilfinger Ltm Industrie à lui verser les sommes suivantes :

indemnité de licenciement 47 723 euros

dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 117 904,50 euros

condamner la S.A.S. Bilfinger Ltm Industrie à lui remettre des bulletins de salaire, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi établis en fonction des condamnations prononcées, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

juger que la Cour se réservera le droit de liquider l'astreinte ;

juger que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal, à compter du 3 mai 2019, date de la saisine du Conseil de prud'hommes ;

ordonner la capitalisation des intérêts année après année par application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

condamner la société Bilfinger Ltm Industrie à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société Bilfinger Ltm Industrie aux entiers dépens, ceux de l'appel distraits au profit de Me Séverine Martin.

La clôture des débats a été ordonnée le 9 novembre 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

SUR CE,

Sur l'exécution du contrat de travail

Sur les heures supplémentaires et la contrepartie obligatoire en repos :

La société Bilfinger Ltm Industrie soutient que M. [R] était cadre dirigeant et que le conseil de prud'homme n'a pas examiné concrètement la fonction réellement exercée par le salarié. Elle fait valoir que :

M. [R] organisait librement son activité professionnelle et son emploi du temps, ainsi que cela ressort des mails qu'il verse aux débats ;

il était habilité à prendre des décisions de façon autonome et disposait des pouvoirs les plus larges pour décider de l'engagement des dépenses, sans aucune validation préalable et au-delà de la gestion courante ;

il avait, sous sa responsabilité personnelle, une centaine de salariés, dont au moins une dizaine de cadres, dont il assurait la gestion sociale et le recrutement ;

il percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés de la société et la plus élevée, après les dirigeants de l'entreprise, représentant 2,5 à 3 fois le minimum conventionnel, était positionné Cadre position III coefficient 135, et était placé directement sous la hiérarchie du président de la société ;

il disposait d'un pouvoir bancaire lui permettant d'engager lui-même les fonds financiers de la société ;

que ce statut de cadre dirigeant exclut de la réglementation sur la durée du travail M. [R], qui doit être débouté de ses demandes au titre des heures supplémentaires et de la contrepartie obligatoire en repos.

Le salarié objecte que :

selon son contrat de travail, il était soumis à un horaire de 39 heures ;

il a régulièrement effectué des heures supplémentaires au-delà de la 39ème heure, comme le prouvent son agenda informatique, ses notes de frais, ses emails et ses déplacements ;

la société Bilfinger Ltm Industrie ne pouvait l'ignorer puisque son agenda outlook était partagé avec ses collègues et sa direction et que ses notes de frais lui ont été remboursées ;

la qualité de cadre dirigeant est incompatible avec la mention dans le contrat de travail selon laquelle le salarié ne peut pas refuser d'effectuer des heures supplémentaires et est soumis à l'horaire de travail de l'entreprise ;

il ne remplissait pas les conditions pour bénéficier du statut de cadre dirigeant au regard des dispositions du contrat de travail ;

il était classé à la position II de la convention collective et ne disposait pas de l'autonomie prétendue par la société ;

il était directeur d'un département et non directeur général ni directeur de la société ;

il ne détenait aucune participation au capital de la SAS, n'avait aucune délégation de pouvoir en matière de gestion du personnel, n'a jamais représenté la direction aux réunions des instances représentatives du personnel et avait un pouvoir bancaire limité sur un seul compte, uniquement lors des absences de la direction ;

il a été convié aux réunions du Codir à compter du mois de novembre 2017, lorsque la direction générale élargissait, occasionnellement, selon les sujets abordés, sans que cela lui confère le statut de cadre dirigeant ;

le seuil de déclenchement des heures supplémentaires est de 1607 heures annuelles et le contingent annuel est de 220 heures.

***

En vertu de L. 3111-2 du code du travail, sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.

Les trois critères ainsi requis, indépendance dans l'organisation de l'emploi du temps, prise de décision largement autonome et rémunération élevée sont cumulatifs et impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l'entreprise.

Il en résulte que, sauf stipulations contractuelles ou conventionnelles plus favorables, les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la réglementation du travail en matière de repos quotidien, de repos hebdomadaire, de durées maximales de travail (quotidienne, hebdomadaire), de contrôle de la durée du travail, d'heures supplémentaires, de jours fériés, de travail de nuit.

Selon son contrat de travail, M. [R] est engagé sur la base de 39 heures par semaine ; ses horaires de travail sont les horaires collectifs applicables au sein de la société et le salarié « s'engage à effectuer toutes les heures supplémentaires qui pourront être prévues dans les horaires collectifs de travail en fonction du nombre ou de l'importance des contrats ou qui pourront lui être demandées à titre individuel »

La société Bilfinger, pour établir l'indépendance dans l'organisation, s'appuie sur des mails de M. [R], qui sont des échanges ordinaires entre collègues à propos de la fixation du jour et de l'heure d'une réunion ou d'un rendez-vous chez un client et auxquels M. [R] répond s'il est disponible ou pas. Ces échanges n'établissent en rien l'indépendance dans l'organisation de l'emploi du temps.

Il en est de même des mails par lesquels le salarié sollicite que soient pris des billets de train, d'avion ou réservation hôtelière. Ces mails établissent seulement que M. [R] se déplaçait pour les besoins de sa profession.

Pour démontrer la prise de décision autonome, la société Bilfinger verse aux débats des mails de M. [R], par lesquels ce dernier demande au service compétent de payer des factures bloquées, autorise l'achat d'un container ou encore est sollicité pour valider des factures.

Ces mails établissent seulement que le salarié prenait des décisions.

La société Bilfinger verse aux débats en pièce n°17, trois ordres du jour en langue anglaise et 5 convocations aux réunions de Codir, adressés entre le 20 novembre 2017 et le 20 octobre 2018 à M [R], ce qui est insuffisant à établir le rôle qu'aurait tenu M. [R] lors de ces réunions.

S'il est constant que la rémunération de M. [R] était élevée, l'employeur ne démontre pas qu'elle était parmi les plus élevées. Il était rémunéré au coefficient 135, lequel peut correspondre au dernier échelon de la position II ou au premier échelon de la position III, or les fiches de paie ne mentionnent que le coefficient, sans référence à la position de sorte que le coefficient ne renseigne pas sur le degré de responsabilité.

En conséquence, aucun des critères cumulatifs n'est réuni.

M. [Y] [R] n'avait pas le statut de cadre dirigeant. Le jugement qui a retenu que le salarié avait ce statut à compter du 20 novembre 2017 sera infirmé.

Il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant (Soc., 18 mars 2020, pourvoi n° 18-10.919, FP, P + B + R + I).

M. [R] verse aux débats :

le récapitulatif des heures supplémentaires pour chaque année 2016, 2017 et 2018, faisant apparaître, pour chaque semaine, le nombre d'heures réalisées et le nombre d'heure supplémentaires au-delà de 39 heures, ventilé entre les heures majorées à 25% et celles majorées à 50% ;

la page d'agenda Outlook de chacune des semaines pour lesquelles sont réclamées des heure supplémentaires ;

l'horaire quotidien pour chaque semaine : horaire d'arrivée au bureau ou chez le client, heure de départ et de retour du déjeuner, heure de départ du bureau et le cas échéant, les temps de trajet ;

les états de frais de déplacement, hébergement, restauration

les justificatifs de ses déplacements : billets de train ou billet d'avion sur lesquels sont mentionnées les horaires de départ et d'arrivée.

Ces éléments sont suffisamment précis et permettent à l'employeur d'y répondre, or, la société Bilfinger Ltm Industries ne produit aucun élément de contrôle de la durée du travail.

Déduction faite des temps de trajet qui ne constituent pas du temps de travail effectif, des heures comptabilisées alors que le salarié n'a pas travaillé au-delà de 39 heures, la cour dispose d'éléments permettant de fixer le nombre d'heures supplémentaires effectuées, les semaines où le temps de travail a dépassé 39 heures et non rémunérés à 4 heures par semaine et la créance salariale à ce titre :

Pour l'année 2016 à 9 910,09 euros, outre celle de 991,09 euros pour congés payés afférents.

Pour l'année 2017 à 13 419 euros, outre celle de 1 341 euros pour congés payés afférents

Pour l'année 2018 à 12 034,75 euros, outre celle de 1 203,47 euros pour congés payés afférents

Pour l'année 2019 à 2 208,50 euros, outre celle de 220,85 euros pour congés payés afférents.

La société Bilfinger Ltm Industrie sera condamnée au paiement de ces sommes, le jugement étant infirmé en ce sens.

Aux termes de l'article L.3121-30, alinéas 1 et 2 du code du travail, « des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale. ».

Le salarié, qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur, a droit à l'indemnisation du préjudice subi ; cette indemnisation comporte à la fois le montant de l'indemnité calculée comme si le salarié avait pris son repos et le montant des congés payés afférents. (Soc. 1er mars 2023, pourvoi n°21-12.068, F-B).

Tout salarié dont le contrat est rompu avant qu'il ait pu bénéficier d'un repos compensateur reçoit en application des dispositions de l'article D.3121-23 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, une indemnité en espèce correspondant à ses droits acquis comprenant l'indemnité de congés payés. Il ne peut prétendre à indemnité compensatrice de congés payés indépendante en plus de l'indemnité.

Selon l'article L. 3121-38 du code du travail, à défaut d'accord, la contrepartie obligatoire sous forme de repos mentionnée à l'article L. 3121-30 est fixée à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné au même article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.

Au regard du nombre d'heures supplémentaires non rémunérées retenu et du nombre d'heures supplémentaires prévues au contrat de travail, de 4 heures par semaine, le contingent annuel de 220 heures a été dépassé de 39 heures en 2016, de 116 heures en 2017 et de 100 heures en 2018, or le salarié n'a pas bénéficié de contrepartie obligatoire en repos, avant de quitter la société.

En considération des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel de 220 heures, du droit à repos compensateur équivalent à 100 % de ces heures et du salaire horaire de base de 66,40 euros, le salarié est en droit de bénéficier d'une indemnité de 18 625,20 euros ainsi calculée : 255 heures x 66,40 euros + 10% de ce montant = 18 625,20.

La société Bilfinger Ltm Industries sera condamnée au paiement de cette somme, le jugement étant infirmé en ce sens.

Sur le travail dissimulé :

L'employeur fait valoir que les cadres dirigeants ne sont pas soumis à aux dispositions relatives à la durée du travail et que le caractère intentionnel du délit ne peut résulter du seul constat de l'absence des mentions des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

Le salarié affirme que la société ne pouvait ignorer les heures supplémentaires effectuées et qu'elle a tenté de lui faire signer une délégation de pouvoir 2 jours après la remise de son courrier de rupture, révélant qu'elle se soustrayait intentionnellement à la mention sur les bulletins de salaire du nombre exacte d'heures de travail réellement accompli ; que l'infraction est caractérisée.

***

La dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 2°du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué. Le caractère intentionnel ne peut pas se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

Il ne résulte pas des éléments du dossier que l'employeur aurait entendu se soustraire à ses obligations déclaratives et aurait sciemment omis de rémunérer des heures de travail dont il avait connaissance qu'elles avaient été accomplies.

Le jugement, qui a rejeté la demande de dommages-intérêts à ce titre, sera confirmé.

Sur la demande au titre du brevet :

La société Bilfinger Ltm Industrie rappelle les dispositions de la convention collective relatives aux inventions des ingénieurs et cadres et fait valoir :

le salarié avait notamment pour responsabilité, de développer l'innovation ;

au jour du dépôt du brevet dont il se prévaut, sa rémunération était égale à 1,7 fois le salaire minimum conventionnel

dès lors qu'il n'est que co-inventeur, il ne peut prétendre à une rémunération supplémentaire au titre du brevet

ainsi que l'a relevé le conseil de prud'hommes de Lyon, ce brevet ne présente pas, pour elle, un intérêt exceptionnel, au regard des commandes générées.

S'appuyant sur l'article L. 611-6 du code de la propriété intellectuelle et l'article 26 alinéa 4 de la convention collective, M. [R] affirme que :

il est l'auteur d'une invention dont le titre est « kit de filtration, procédé de nettoyage d'un filtre et élément de nettoyage apparent », brevetée en 2012 ;

il n'a pas perçu de rémunération complémentaire alors même que ce brevet représente un intérêt exceptionnel pour la SAS Bilfinger Ltm Industrie.

***

Aux termes de l'article L. 611-7 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction applicable à l'espèce, « si l'inventeur est un salarié, le droit au titre de propriété industrielle, à défaut de stipulation contractuelle plus favorable au salarié, est défini selon les dispositions ci-après :

1. Les inventions faites par le salarié dans l'exécution soit d'un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, soit d'études et de recherches qui lui sont explicitement confiées, appartiennent à l'employeur. Les conditions dans lesquelles le salarié, auteur d'une telle invention, bénéficie d'une rémunération supplémentaire sont déterminées par les conventions collectives, les accords d'entreprise et les contrats individuels de travail. ['] ».

Selon l'article 26 de la convention collective des ingénieurs et cadre de la métallurgie, dans sa rédaction applicable à l'espèce, « lorsqu'un employeur confie à un ingénieur ou cadre une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, des études ou recherches, à titre permanent ou occasionnel, exclusif ou non exclusif, les inventions dont le salarié serait l'auteur dans l'exécution de cette mission, de ces études ou recherches sont la propriété de l'employeur, conformément au paragraphe 1 de l'article 1er ter de la loi n° 68-1 du 2 janvier 1968 modifiée. L'auteur de l'invention est mentionné comme tel dans le brevet, sauf s'il s'y oppose.

La rétribution de l'ingénieur ou cadre tient compte de cette mission, de ces études ou recherches et rémunère forfaitairement les résultats de son travail. Toutefois, si une invention dont le salarié serait l'auteur dans le cadre de cette tâche présentait pour l'entreprise un intérêt exceptionnel dont l'importance serait sans commune mesure avec le salaire de l'inventeur, celui-ci se verrait attribuer, après la délivrance du brevet, une rémunération supplémentaire pouvant prendre la forme d'une prime globale versée en une ou plusieurs fois. ».

Il est constant que la société est titulaire d'un brevet « kit de filtration, procédé de nettoyage d'un filtre et élément de nettoyage afférents », déposé le 26 juin 2012, dont les inventeurs sont M. [Y] [R], M. [O] [J] et M. [B] [F].

En 2012, la rémunération fixe de M. [R] s'élevait à 6 614,40 euros par mois, soit 79 372,80 euros par an alors que la rémunération annuelle était, selon la convention collective, pour son échelon, de 32 948 euros. Il peut dès lors être considéré que la rétribution tenait compte de sa mission de recherches.

M. [R] produit deux bons de commande de la société GSK, en 2017, pour une « étude construction 4 inserts nettoyage » (32 791 euros) et en 2018 pour « 2 inserts nettoyage carter » (24 950 euros).

Au regard des sommes en jeu et du nombre de client (1), il n'est pas établi que l'invention présente un intérêt exceptionnel pour la société Bilfinger LTM.

Le jugement sera confirmé.

Sur la demande en dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

L'employeur fait valoir que :

durant toutes les années de collaboration, M. [R] n'a jamais émis aucune revendication ;

ce n'est qu'après avoir sollicité vainement la mise en œuvre d'une procédure de rupture conventionnelle qu'il a évoqué des manquements à la législation sociale ;

il n'apporte pas la preuve d'un préjudice distinct de ses demandes de rappel de salaire.

Le salarié objecte que le non-paiement des heures supplémentaires, de la contrepartie en repos et de la rémunération complémentaire au titre d'une invention brevetée ainsi que la tentative de lui faire signer une délégation de pouvoir constitue une exécution déloyale du contrat de travail.

***

En vertu de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

En l'espèce, après que le salarié lui a adressé, le 11 mars 2019, sa lettre de démission, se plaignant de manquements à la législation sociale et du non-paiement d'heures supplémentaires, l'employeur a remis à M. [R] une délégation de pouvoir, au terme de laquelle il lui « confirme ' qu'il a délégation pleine et entière' en ce qui concerne la réglementation sociale et la main d'œuvre, la gestion administrative du personnel, la sécurité du personnel et du matériel'et qu'il engage à ce titre sa responsabilité pénale. ».

Alors que le salarié était démissionnaire et qu'était né un désaccord quant à la législation sociale et les heures supplémentaires, remettre cette délégation de pouvoir caractérise un comportement déloyal.

Les premiers juges n'ont toutefois pas fait une juste appréciation du préjudice du salarié.

Le jugement sera infirmé et la société Bilfinger Ltm Industries condamnée au paiement de la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Sur la rupture du contrat de travail

M. [R] fait valoir que :

il n'est pas parvenu à obtenir paiement des rappels de salaire malgré ses demandes ;

c'est ainsi qu'il a sollicité, sur demande de son employeur, une rupture conventionnelle ;

après refus de son employeur, il a provoqué deux réunions aux fins de régulariser la situation et n'ayant pas obtenu gain de cause, a remis une « lettre de rupture » ;

la rupture du contrat de travail résulte d'une démission équivoque, qui doit s'analyser en prise d'acte, qui doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société objecte que :

c'est spontanément que M. [R] a sollicité la mise en œuvre d'une procédure de rupture conventionnelle par courrier du 1er mars 2019 ;

sa demande n'ayant pas été acceptée, il a présenté sa démission ;

les manquements invoqués sont particulièrement anciens et n'ont pas empêché la poursuite du contrat de travail ;

le salarié n'a jamais exprimé aucune revendication.

***

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements suffisamment graves imputables à son employeur, et lorsqu'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, le juge doit l'analyser en une prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail ou, dans le cas contraire, d'une démission.

La lettre de M. [R] du 1er mars 2019 est ainsi libellée « Salarié de l'entreprise Bilfinger Ltm Industrie depuis le 12/09/2007, je vous présente ma démission au poste de Directeur des Opérations Pharma et Procédés à compter de ce jour.

En effet, je ne peux que m'étonner des suites que vous avez réservées aux deux entretiens que nous avons eus et au cours desquels j'ai porté à votre attention vos manquements sur les 11 dernières années à la législation sociale relative à la durée du travail et au paiement des heures supplémentaires.

Bien conscient toutefois de mon positionnement stratégique au sein de l'entreprise, je réaliserai mon préavis de 3 mois afin de ne pas mettre en péril les projets dont j'assure le suivi. Dans ces conditions, mon contrat de travail expirera le 10/06/2019 au soir ».

Le salarié souligne, dans cette lettre, les manquements à la législation sociale et le non-paiement des heures supplémentaires. Ce courrier ne peut donc s'analyser en une démission claire et non équivoque.

Le non-paiement, persistant pendant trois années, des heures supplémentaires est contemporain à la rupture du contrat de travail. Il constitue un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

La lettre du 11 mars 2019 doit dès lors être qualifiée de prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

Sur les conséquences de la rupture

Le salarié fait valoir qu'il avait 11 ans et 9 mois d'ancienneté au moment de la rupture et qu'il peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 10,5 mois de salaire. Il sollicite une indemnité conventionnelle de licenciement.

L'employeur objecte que le salarié ne justifie pas de son préjudice.

***

Selon l'article 29 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadre de la métallurgie, dans sa version applicable à la relation contractuelle, il est alloué à l'ingénieur ou cadre, licencié sans avoir commis une faute grave, une indemnité de licenciement distincte du préavis.

Le taux de cette indemnité de licenciement est fixé comme suit, en fonction de la durée de l'ancienneté de l'intéressé dans l'entreprise :

pour la tranche de 1 à 7 ans d'ancienneté : 1/5 de mois par année d'ancienneté ;

pour la tranche au-delà de 7 ans : 3/5 de mois par année d'ancienneté.

Pour le calcul de l'indemnité de licenciement, l'ancienneté et, le cas échéant, les conditions d'âge de l'ingénieur ou cadre sont appréciées à la date de fin du préavis, exécuté ou non.

La prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié a droit à l'indemnité conventionnelle de licenciement, soit la somme de 47 723 euros, comme demandé.

La société Bilfinger Ltm Industries sera condamnée au paiement de cette somme, le jugement étant infirmé dans ce sens.

Au jour de son licenciement, M. [R] comptait 11 années complètes d'ancienneté dans l'entreprise.

En application de l'article L.1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2018-217 du 29 mars 2018, en vigueur à compter du 1er avril 2018, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre 3 mois et 10,5 mois de salaire brut.

En considération de sa situation particulière, notamment de son âge, des circonstances de la rupture, de sa capacité à retrouver un emploi compte tenu de sa formation, sur la base d'un salaire mensuel moyen brut de 11 229 euros, il y a lieu de condamner la société Bilfinger Ltm Industries à verser à M. [Y] [R] la somme de 80 000 euros brut à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

Sur la remise des documents de fin de contrat

Il y a lieu d'ordonner à la société Bilfinger Ltm Industries de remettre à M. [R] un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes aux dispositions du présent arrêt, et ce, dans un délai d'un mois à compter de sa signification.

Aucune circonstance ne justifie que cette décision soit assortie d'une astreinte.

Sur la demande d'intérêts au taux légal et de capitalisation des intérêts

Les intérêts au taux légal portant sur les créances indemnitaires courent à compter du présent arrêt s'agissant de dispositions infirmatives du jugement entrepris.

Les intérêts au taux légal portant sur les créances de nature salariale courent à compter de la notification à l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation, soit le 9 mai 2019.

Les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article1343-2 du code civil.

Sur le remboursement des indemnités chômages

Il convient en application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, d'ordonner d'office le remboursement par la société Bilfinger Ltm Industries à Pôle Emploi des indemnités de chômages versées à M. [Y] [R] du jour de son licenciement dans la limite de 3 mois d'indemnités de chômage.

Sur les autres demandes :

Les dispositions du jugement déféré relatives aux frais irrépétibles et dépens seront confirmées.

La société Bilfinger Ltm Industries, partie qui succombe au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera déboutée de sa demande en indemnisation de ses frais irrépétibles et condamnée à payer à M. [Y] [R] la somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et ce, en sus des entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;

Dans la limite de la dévolution,

INFIRME le jugement en ce qu'il a dit que le salarié avait le statut de cadre dirigeant à compter du 20 novembre 2017, quant au montant des sommes allouées au titre des heures supplémentaires de la contrepartie obligatoire en repos, quant au montant de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et ne ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission ;

Statuant à nouveau :

CONDAMNE la société Bilfinger Ltm Industries à payer à M. [R], au titre du rappel d'heures supplémentaires :

pour l'année 2016, la somme de 9 910,09 euros, outre celle de 991,09 euros pour congés payés afférents ;

pour l'année 2017, la somme de 13 419 euros, outre celle de 1 341 euros pour congés payés afférents ;

pour l'année 2018, la somme de 12 034,75 euros, outre celle de 1 203,47 euros pour congés payés afférents ;

pour l'année 2019 la somme de 2 208,50 euros, outre celle de 220,85 euros pour congés payés afférents ;

CONDAMNE la société Bilfinger Ltm Industries à payer à M. [R], au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour les années 2016 à 2018, la somme de 18 625,20 euros ;

CONDAMNE la société Bilfinger Ltm Industries à payer à M. [R] la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

CONDAMNE la société Bilfinger Ltm Industries à payer à M. [R] la somme de 47 723 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

CONDAMNE la société Bilfinger Ltm Industries à payer à M. [R] la somme de 80 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

RAPPELLE que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;

DIT que les intérêts au taux légal sur les créances de nature salariale courent à compter de la demande, soit à compter de la notification à la société Bilfinger Ltm Industries de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes le 9 mai 2019 ;

DIT que les intérêts au taux légal sur les créances de nature indemnitaires courent à compter de ce jour ;

DIT que les intérêts au taux légal seront capitalisés en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

ORDONNE à la société Bilfinger Ltm Industries de remettre à M. [R] un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes aux dispositions du présent arrêt, et ce, dans un délai d'un mois à compter de sa signification, sans qu'il y ait lieu à astreinte ;

Y ajoutant,

ORDONNE le remboursement par la société Bilfinger Ltm Industries à Pôle Emploi des indemnités de chômages versées à M. [Y] [R] du jour de son licenciement dans la limite de 3 mois d'indemnités de chômage ;

CONDAMNE la société Bilfinger Ltm Industries aux dépens de l'appel ;

CONDAMNE la société Bilfinger Ltm Industries à verser à M. [Y] [R] la somme de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande de distraction au titre de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE