CA Riom, ch. com., 28 février 2024, n° 22/00474
RIOM
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Allianz Benelux NV (Sté)
Défendeur :
Generali Iard (SA), Société AIG Europe (SA), Scheuten Solar Holdings BV (Sté), Scheuten Solar Systems BV (Sté), MJA (Selafa)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dubled-Vacheron
Conseillers :
Mme Theuil-Dif, M. Kheitmi
Avocats :
Me Gutton Perrin, Me Lacquit, Me Rahon
Suivant contrat conclu le 19 janvier 2010, la SAS Hélios a fait procéder, par la société Free Power, à la réalisation d'une centrale de production d'électricité photovoltaïque sur un bâtiment lui appartenant sur la commune de [Localité 7].
Pour les besoins de cette opération, la société Free Power, assurée auprès de la SA Generali IARD, s'est fournie en panneaux photovoltaïques auprès de la société Scheuten Solar Holding BV, placée en liquidation judiciaire le 30 mars 2012. La SA AIG Europe Limited, venant aux droits de la SA AIG Europe Nederland NV est l'assureur responsabilité civile de la société Scheuten Solar Systems BV en vertu d'un contrat souscrit le 28 octobre 2008.
Ces panneaux photovoltaïques étaient équipés de boîtiers de jonction de la marque Solexus, fabriqués par la société Alrack BV, assurée auprès de la compagnie Allianz Nederland.
Un procès-verbal de réception est intervenu le 6 janvier 2011.
Au cours du mois d'août 2012, la société Free Power, faisant suite à une recommandation du fabricant des panneaux de marque Scheuten, a préconisé la mise à l'arrêt de l'installation.
La SAS Hélios a sollicité du président du tribunal de commerce d'Aurillac la désignation d'un expert judiciaire afin de déterminer l'origine des désordres.
Par une ordonnance du 11 juin 2013, il a été fait droit à cette demande et M. [E] a été désigné en qualité d'expert judiciaire. Ce dernier a déposé son rapport le 10 septembre 2015.
Par un jugement du 12 décembre 2013, la société Free Power a été placée sous procédure de sauvegarde.
Par exploits d'huissier des 23 décembre 2015 et 18 janvier 2016, la SAS Hélios a fait assigner la société Free Power, son mandataire judiciaire et son administrateur judiciaire ainsi que son assureur, la SA Generali IARD, devant le tribunal de commerce d'Aurillac aux fins de les voir condamner à lui verser la somme de 237.157, 52 euros HT.
Par jugement du 13 février 2018, le tribunal de commerce d'Aurillac s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand.
La SA Generali IARD a fait assigner en intervention forcée les sociétés Scheuten Solar Holdings BV, Scheuten Solar Systems BV, Scheuten Solar France, M. [X] [C], Me [O], Scheuten Solar Solutions BV, AIG Europe Limited Nederland, ALRACK BV, Allianz Benelux afin de les voir condamner à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre dans le cadre de l'instance.
Les sociétés Hélios et Generali IARD, sans reconnaissance de garantie, se sont rapprochées afin de trouver une issue amiable dans ce dossier et ont régularisé un protocole d'accord transactionnel.
Dans le cadre de ce protocole, la société Hélios a donné quittance le 8 avril 2019 à la société Generali IARD pour la somme totale de 126.497 euros HT et la subroge ainsi expressément dans ses droits et actions à l'encontre de tous tiers responsables et de leurs assureurs, notamment en application de l'article 1250 et le cas échéant 1251, 3° du code civil.
Selon jugement du 3 février 2022, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a :
-donné acte à la SA AIG Europe SA de son intervention volontaire, venant aux droits de la SA AIG Europe Limited,
-dit la SA Generali IARD recevable et partiellement fondée en ses recours subrogatoires,
-dit les sociétés Scheuten Solar Holdings BV, Scheuten Solar Systems BV, Scheuten Solar France et Alrack BV responsables solidairement des sinistres survenus, et tenues à la réparation du préjudice subi par la SAS Hélios, laquelle a donné quittance subrogatoire à la SA Generali IARD,
-fixé au passif de ces mêmes sociétés, la créance de la SA Generali IARD la somme de 126.497 euros HT au titre de la quittance subrogative établie entre la SAS HELIOS et la SA Generali IARD,
-dit que les conditions et exclusions de la police SA AIG Europe sont applicables et mobilisables,
-dit que le délai légal de trois ans de la garantie définie en clause C9 de la police SA AIG Europe a commencé à courir à compter du 12 avril 2013,
-dit que la SAS Hélios a interrompu ce délai en date de son assignation au fond le 23 décembre 2015, soit dans le délai légal de trois ans,
-dit que les dispositions contractuelles de la police SA AIG Europe limite le montant de la garantie à 5.000 000 euros,
-dit que les dispositions contractuelles de la police Allianz Benelux NV prévoit un plafond de garantie de 1.250.000 euros par sinistre avec un maximum de 2.500.000 euros par année d'assurance,
-dit que le sinistre Scheuten constitue un sinistre sériel,
-dit que la loi applicable aux polices d'assurance SA AIG Europe et Allianz Benelux NV est la loi néerlandaise,
-condamné solidairement la société Allianz Benelux N.V. et la SA AIG Europe à payer et porter à la SA Generali IARD la somme de 126.497 euros HT au titre de la quittance subrogative établie entre la SAS Hélios et la compagnie Generali IARD, assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 avril 2019, date de la quittance subrogative,
-prononcé le sursis de tout paiement par la société Allianz Benelux N.V. et la SA AIG Europe à la SA Generali IARD des condamnations en principales mises à leurs charges dans l'attente de la fixation défnitive des réclamations des victimes et des demandeurs en garantie afin de pouvoir fixer définitivement le montant dus sur la base du prorata pour les sinistres sériels,
-condamné solidairement la société Allianz Benelux N.V. et la SA AIG Europe à payer et porter à la SA Generali IARD la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
-débouté l'ensemble des parties du surplus de leurs demandes,
-condamné solidairement la société Allianz Benelux N.V. et la SA AIG Europe aux dépens de l'instance, comprenant les frais d'expertise de M. [E] et frais de greffe liquidés a 211,20 euros T.V.A. incluse,
-admis Me Sophie Vignancour, avocat, au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile
La société Generali IARD a interjeté appel de cette décision, suivant déclaration du 17 mars 2022. L'affaire a été enrôlée sous le N° RG-22/00577.
La Société Allianz Benelux NV a également interjeté appel de cette décision, suivant déclaration du 3 mars 2022. L'affaire a été enrôlée sous le N° RG-22/00474.
Cet appel a été enregistré sous le N° RG-22/00474.
Les deux procédures ont fait l'objet d'une jonction le 11 avril 2022.
Par ordonnance du 3 novembre 2022, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Riom a constaté le désistement par la société Allianz Benelux NV de son appel à l'encontre de [X] [C], [P] [B], SELARL MJA, Scheuten Solard Holdings BV, Scheuten Solar Systems BV.
Exposé du litige
Par conclusions déposées et notifiées le 11 octobre 2023, la société Allianz Benelux demande à la cour :
-d'infirmer partiellement le jugement du 3 février 2022,
A titre principal :
-de juger que la SA Generali IARD ne justifie pas d'un intérêt à agir, et la débouter en conséquence de l'intégralité de ses demandes,
A titre subsidiaire :
-de juger que la responsabilité de la société Alrack sur le terrain des produits défectueux ne peut être retenue et que la SA Generali IARD est irrecevable sur le terrain d'une prétendue responsabilité contractuelle ou extracontractuelle de la société Alrack,
-de juger en conséquence que la responsabilité de la société Alrack ne peut être retenue et que la SA Generali IARD est mal fondée ; prononcer à titre subsidiaire un partage de responsabilité entre les sociétés Scheuten et Alrack.
En conséquence,
-de débouter la SA Generali IARD et la SA AIG Europe de l'intégralité de leurs demandes contre la société Allianz Benelux, en sa qualité d'assureur responsabilité civile de la société Alrack
A titre infiniment subsidiaire :
-de juger que le droit néerlandais, applicable à sa police d'assurance interdit en tout l'état tout paiement,
Par conséquent,
-de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé le sursis de tout paiement de sa part dans l'attente de la fixation définitive des réclamations des victimes (et demandeurs en garantie) éligibles à la couverture de la police de la société Allianz Benelux, afin de pouvoir fixer définitivement le montant dû sur une base de prorata.
En tout état de cause :
-de condamner la SA Generali IARD et la SA AIG Europe à lui payer la somme de 10.000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
-de condamner la SA Generali IARD ou toute partie succombante aux entiers dépens, en compris les frais de première instance et d'expertise judiciaire.
Par conclusions déposées et notifiées le 16 octobre 2023, la SA Generali IARD demande à la cour :
I- Sur la recevabilité du recours subrogatoire à l'encontre de la SA AIG Europe et la société Allianz Benelux
-de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déclaré recevable en ses recours subrogatoires à l'encontre des SA AIG Europe et la société Allianz Benelux à hauteur de 126.497 euros HT en principal,
II- Sur la responsabilité des sociétés Scheuten et Alrack
-de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré les sociétés Scheuten Solar Holdings BV, Scheuten Solar Systems BV, Scheuten Solar France et Alrack BV responsables solidairement des sinistres, et tenus à la réparation du préjudice subi par la société Hélios, laquelle a donné quittance subrogative à la SA Generali IARD.
-de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé au passif des sociétés Scheuten Soler Holdings BV, Scheuten Solar Systems BV, Scheuten Solar France et Alrack BV, sa créance à la somme de 126.497 euros HT, au titre de la quittance subrogative établie avec la société Hélios.
III- Sur les garanties de la SA AIG EUROPE
A. De l'inopposabilité des limitations et exclusions de la police SA AIG EUROPE
-d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que les conditions et exclusions de la police d'AIG Europe sont applicables et mobilisables, et ce faisant, condamner la SA AIG Europe à lui payer la somme de 126.497 euros, au titre de la quittance subrogative signée entre elle et la société Hélios, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de la quittance subrogative régularisée le 8 avril 2019,
B. Des volets de garantie de la police AIG Europe applicables
A titre principal,
-d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que les dispositions contractuelles de la police SA AIG Europe limitent le montant de la garantie à 5.000.000 euros,
-Statuant à nouveau, de condamner la SA AIG Europe à la garantir sur le volet de garantie A " Responsabilité générale " et ce faisant, fixer le montant de la garantie à 25.000.000 euros par événement
-de condamner la SA AIG Europe à la garantir dans la limite de son plafond applicable de 50.000.000 euros par année d'assurance,
-dans le cas où la cour juge que la définition de l'événement tel que défini dans la police d'assurance AIG permet une globalisation des sinistres, de condamner la SA AIG Europe à la garantir dans la limite de son plafond applicable de 25.000.000 euros par événement.
A titre subsidiaire,
-de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que les dispositions contractuelles de la police AIG Europe limitent le montant de la garantie à 5.000.000 €, en application du volet de garantie B 'Responsabilité produit étendue conformément à la clause C9', et ce faisant, condamner la SA AIG Europe à la garantir sur le volet B à 5.000.000 € par réclamation,
-de débouter la SA AIG Europe de ses moyens tendant à assimiler les termes " d'événement " et de " réclamation ".
V- Sur la mobilisation des garanties de la société Allianz Benelux
-d'infirmer le jugement en ce qu'il a jugé les conditions et exclusions de la police d'Allianz Benelux comme applicables et mobilisables,
-de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Allianz Benelux à lui payer la somme de 126.497 euros, au titre de la quittance subrogative signée entre elle et la société Hélios, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de la quittance subrogative régularisée le 8 avril 2019
VI- Sur la condamnation in solidum d'AIG Europe et D'Allianz Benelux
-de confirmer le jugement en ce qu'il les a condamnés in solidum à lui verser l'indemnité de 126.497 euros HT, au titre de la quittance subrogative établie avec la société Hélios.
VII- Infirmation du jugement en ce qu'il a prononcé le sursis à paiement des condamnations en principal
-d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé le sursis de tout paiement par la société Allianz Benelux NV et la SA AIG Europe des condamnations en principal mises à leur charge dans l'attente de la fixation définitive des réclamations des victimes et des demandeurs en garantie, et ce faisant, condamner in solidum la SA AIG Europe, ainsi que la société Allianz Benelux à lui verser une indemnité de 126.497 euros, au titre de la quittance subrogative établie par la société Hélios.
VII- Du rejet de toutes demandes adverses
-de débouter les sociétés Allianz Benelux NV et la SA AIG Europe de toutes demandées formées à son encontre
VIII- Des demandes accessoires
-de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné solidairement la SA AIG Europe, ainsi que la société Allianz Benelux à lui verser une indemnité de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance, comprenant les frais d'expertise de M. [U],
-de condamner in solidum la société Allianz Benelux et la SA AIG Europe à lui verser la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, et qui pourront être recouvrés directement par Me Lacquit, conformément à l'article 699 du code procédure civile,
-de débouter l'ensemble des parties de leurs demandes au paiement de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à son encontre.
Par conclusions déposées et notifiées le 17 octobre 2023, la SA AIG Europe venant aux droits de la société AIG Europe Limited (venant elle-même aux droits de la société AIG Europe Netherlands) demande à la cour :
Sur la recevabilité du recours subrogatoire :
-d'infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a dit la SA Generali IARD recevable et partiellement fondée en ses recours subrogatoires
Statuant de nouveau,
-de juger que la SA Generali IARD ne justifie pas d'un intérêt à agir,
-de juger que l'action de la SA Generali IARD à son encontre, tant sur le fondement de la responsabilité du fait des défectueux que sur la garantie des vices cachés est irrecevable car prescrite
En conséquence,
-de débouter la SA Generali IARD de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
-de rejeter toute demande dirigée à son encontre et la mettre hors de cause,
Sur la responsabilité des sociétés Scheuten et Alrack :
-d'infirmer partiellement le jugement en ce qu'il :
" A dit que les sociétés Scheuten Solar Holdings BV, Scheuten Solar Systems BV, Scheuten Solar France, responsables des sinistres survenus et tenues à la réparation du préjudice subi par la société Hélios sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux ainsi que condamnées solidairement
" L'a condamnée solidairement avec la société Allianz Benelux à payer à la SA Generali IARD la somme de 126.497 euros HT au titre d'une prétendue quittance subrogative dont celle-ci bénéficierait,
Statuant de nouveau,
-de juger que le régime de la responsabilité des produits défectueux, fondé sur les articles 1245 et suivants du code civil, n'est pas applicable, en l'absence de dommages à des biens autres que le produit livré lui-même (c'est-à-dire autres que les panneaux photovoltaïques livrés par la société Scheuten).
-de juger que le préjudice de la société Hélios résulte de l'atteinte au seul produit défectueux lui-même, qui est donc exclu du régime de réparation au titre de la responsabilité des produits défectueux au sens des articles 1245 et suivants du code civil.
-de juger que la société Generali IARD prétend être subrogée dans les droits des sociétés exploitantes qui n'avaient pas de rapports contractuels avec la société Scheuten Solar Systems BV ;
-de juger que l'action directe des sociétés exploitantes dirigées à son encontre ne peut avoir qu'une nature délictuelle, s'agissant d'une chaîne internationale de contrats,
-de juger cependant que la compagnie Generali IARD, prétendument subrogée dans les droits de la société Hélios, se fonde sur un régime de responsabilité contractuel, par conséquent mal fondé,
-de juger que l'action directe dirigée par la société Generali IARD à l'encontre de la SA AIG Europe sur le fondement de l'article 1641 du code civil, est mal fondée, faute d'existence démontrée d'un contrat de vente entre les sociétés exploitantes et la société Scheuten Solar Systems BV, et faute pour elle de démontrer le droit applicable en l'espèce.
En conséquence,
-de débouter la société Generali IARD de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
-de la mettre purement et simplement hors de cause,
-de rejeter toutes demandes, fins et conclusions formulées à son encontre
Sur l'application de la police AIG Europe n°70.08.229 :
-de confirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a :
" Dit la loi applicable aux polices d'assurance AIG Europe et Allianz Benelux NV est la loi néerlandaise
" Dit que les conditions et exclusions de la police AIG Europe sont applicables et mobilisables
-d'infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a :
" Dit que le délai légal de trois ans de la garantie définitive en clause C9 de la police AIG Europe a commencé à courir à compter du 12 avril 2013,
" Dit que la société Hélios a interrompu ce délai en date de son assignation au fond le 23 décembre 2015, soit dans le délai légal de trois ans,
Statuant de nouveau,
-juger que les dispositions contractuelles liant la SA AIG Europe à Scheuten Solar Holding BV, excluent la couverture des dommages aux biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité ;
-juger que les frais de remplacement des panneaux sont hors du champ de la garantie de la police AIG Europe en application de la limite temporelle de garantie stipulée au § 5 de la clause C9 ;
En conséquence,
-Débouter la société Generali IARD de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
-Rejeter toute demande dirigée contre elle et la mettre purement et simplement hors de cause.
A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour viendrait confirmer le jugement entrepris en écartant les clauses d'exclusions et conditions d'application de la police AIG Europe, sur l'application du plafond de garantie et des règles de droit néerlandais :
-de confirmer partiellement du jugement entrepris en ce qu'il a :
*Dit que les dispositions contractuelles de la police AIG Europe limite le montant de la garantie à 5.000.000 € ;
*Dit que le sinistre Scheuten constitue un sinistre sériel ;
*Prononcé le sursis de tout paiement par la société AIG Europe SA à la SA Generali IARD des condamnations en principales mises à sa charge dans l'attente de la fixation définitive des réclamations des victimes et des demandeurs en garantie afin de pouvoir fixer définitivement le montant du sur la base du prorata pour les sinistres sériels ;
En conséquence :
-débouter la société Generali IARD de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions
-l'autoriser à suspendre le paiement de l'indemnité au titre des préjudices subis par la société Hélios, jusqu'à ce que la part proportionnelle de chaque victime du sinistre sériel soit établie ;
-rejeter toute demande d'exécution provisoire des condamnations qui seraient prononcée à son encontre ;
Subsidiairement, dans le cas où la cour entrerait en voie de condamnation à son encontre et considérerait que le plafond de 5.000.000 euros n'est pas applicable ni en conséquence, la suspension des paiements :
-d'infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a :
*Dit que la franchise de la police AIG EUROPE n'est pas opposable aux tiers et ne sera pas applicable en l'espèce
Statuant de nouveau,
-juger quelle est fondée à opposer ses franchises contractuelles de 100.000 € au titre de la garantie " Frais de montage et d'installation " (Clause C9 de la police AIG).
-faire application des franchises contractuelles applicables au titre des dommages matériels (100.000 €)
A titre encore plus subsidiaire, sans reconnaissance de responsabilité, sur le recours contre la société Allianz Benelux NV, assureur de la société Alrack BV :
-juger que les désordres dénoncés engagent la responsabilité de la société Alrack BV, qui a conçu les boîtiers " Solexus " mis en cause ;
-juger que la société Alrack BV a pour assureur en responsabilité la société Allianz Benelux ;
-juger acquises les garanties de son assureur, la société Allianz Benelux NV.
En conséquence,
-condamner la société Allianz Benelux NV, ès-qualités d'assureur de la société Alrack, à relever et garantir la société AIG Europe SA de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.
Il sera renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé complet de leurs demandes et moyens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 octobre 2023.
Motivation
MOTIFS :
A titre liminaire, il sera rappelé que les " demandes " tendant à voir " constater " ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour, il en est de même des " demandes " tendant à voir " juger " ou " dire et juger " lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.
I- Sur l'intérêt à agir de la société Generali IARD :
Selon l'article 1346-1 du code civil, la subrogation conventionnelle s'opère à l'initiative du créancier lorsque celui-ci recevant son paiement d'une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur. Cette subrogation doit être expresse.
Les intimés soutiennent que la société Generali IARD :
*ne rapporte pas la preuve d'une indemnisation effective (du paiement), la copie d'un chèque établi à l'ordre de la CARPA étant insuffisante,
*ne peut se prévaloir d'une subrogation légale faute de rapporter la preuve de l'existence d'une garantie régulièrement souscrite à défaut de signature des conditions générales et particulières.
En l'espèce, la société Generali IARD se prévaut d'une subrogation conventionnelle et verse aux débats :
-la quittance subrogative établie par la SAS Hélios qui traduit au demeurant l'existence du contrat et son exécution et se trouve ainsi libellée " Le 8-4-2019. Lu et approuvé-bon pour quittance de la somme de 126.497 euros hors taxe (cent vingt-six mille quatre cent quatre-vingt-dix-sept euros) et subrogation avec remise concomitante du chèque N° 52154254. ". Cette quittance permet de vérifier l'identité du bénéficiaire du chèque.
-la copie du chèque portant le numéro 5215424 mentionné sur la quittance subrogative permettant de vérifier que les fonds ayant transités par la CARPA, sont ceux qui ont été versés à la société Hélios ; il sera rappelé que les avocats ont l'obligation de faire transiter les fonds qu'ils reçoivent par la CARPA.
-la preuve de son désistement de l'instance introduite devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, démontrant que chaque partie a satisfait aux engagements pris dans le cadre de la transaction qu'elles ont opérée.
Il est ainsi démontré que la société Generali IARD est conventionnellement subrogée dans les droits et actions de la société Hélios pour la somme de 126.497 euros HT. Cette subrogation conventionnelle est régulière et conforme à l'article 1346-1 du code civil.
Par ailleurs, la société Generali IARD se prévaut d'une subrogation légale dans les droits de son assurée la société Free Power. Elle rappelle avoir été condamnée antérieurement à la transaction à l'égard de son assuré à la garantir au titre de sa garantie décennale dans des litiges similaires.
La société AIG Europe SA lui oppose le principe de l'estoppel. Elle le fait à mauvais escient car la société Generali IARD ne conteste pas l'existence de la garantie de la société AIG Europe SA mais l'opposabilité des limites et exclusions contenues dans la police d'assurance liant la société AIG Europe SA à son assuré. S'agissant de la société Generali IARD, cette dernière n'oppose aucune exclusion de garantie à son assuré puisqu'elle a indemnisé la société Hélios au titre d'une garantie légale obligatoire.
L'article L. 121-12 du code des assurances précise que l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur. La subrogation légale intervient au profit de l'assureur lorsque l'indemnité a été versée en application des garanties souscrites, sans distinguer si cet assureur a payé de sa propre initiative ou en vertu d'une transaction, ou en exécution d'une décision de justice.
Il n'est pas contestable que l'indemnité versée à la société Hélios l'a été en application des garanties souscrites par la société Free Power que la société Generali IARD verse aux débats.
Il s'ensuit que la société Generali IARD est bien fondée à se prévaloir d'une subrogation légale dans les droits de son assurée.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, la société Generali IARD justifie de son intérêt à agir et le jugement sera confirmé sur ce point.
II-Sur la responsabilité des sociétés Scheuten Solar et Alrack.
II-1- Sur la responsabilité des produits défectueux :
1-Sur la loi applicable :
Aux termes de l'article 1386-1(ancien code civil) applicable au litige (devenu l'article 1245 du code civil) le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime.
La société Generali IARD subrogée dans les droits de la société Hélios et dans les droits de la société Free Power est recevable à exercer une action subrogatoire sur le fondement de l'article susvisé.
S'agissant d'une action de nature délictuelle, il convient de faire application des dispositions du règlement N°864/2007 du 11 juillet 2007 dit " Rome II " applicables aux obligations non contractuelles et dans les situations comprenant un conflit de lois, aux obligations non contractuelles relevant de la matière civile et commerciale.
En application de l'article 4 dudit règlement et du lieu du dommage (le territoire français) il sera fait application de la loi française.
2- Sur le bien-fondé de la demande :
Les dispositions de l'article 1386-1 du code civil (ancien) applicables à l'espèce, instaurent une responsabilité de plein droit à la charge des producteurs ; elles s'appliquent à la réparation de dommages résultant d'atteintes à la personne, et à celle de dommages supérieurs à un montant fixé par décret, qui résultent d'une atteinte à un bien autre que le produit défectueux lui-même (article 1386-2 ancien du code civil).
Est un produit tout bien meuble, même s'il est incorporé dans un immeuble ; un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre (articles 1386-2 à 1386-4 anciens du code civil). Est producteur, lorsqu'il agit à titre professionnel, le fabricant du produit, ou le fabricant d'une partie composante; en cas de dommage causé par le défaut d'un produit incorporé dans un autre, le producteur de la partie composante et celui qui a réalisé l'incorporation sont solidairement responsables (articles 1386-6 et -8 anciens).
La société Allianz Benelux et la société AIG Europe font valoir que la garantie des produits défectueux n'a pas pour objet de réparer un risque de dommage à un bien autre que le produit défectueux lui-même et qui n'est jamais survenu mais uniquement la réparation du dommage qui s'est réalisé.
La société AIG Europe observe que l'indemnité versée à la société Hélios porte sur le remplacement des panneaux.
En l'espèce, il ressort des énonciations du rapport d'expertise que la SAS Hélios a fait réaliser un bâtiment de stockage, avec la mise en place d'une installation de centrale de production d'électricité photovoltaïque intégrée au bâti. Elle a contacté la SARL Free Power qui a établi une étude d'installation avec fournitures de panneaux photovoltaïques. Un procès-verbal de réception des travaux a été établi le 6 janvier 2011.La centrale est composée de 600 modules photovoltaïques de marque Scheuten P6-54 210 Wc.
La SAS Hélios a ensuite été informée par la SARL Free Power de la nécessité de mettre son installation à l'arrêt en raison d'un risque d'échauffement et de sinistre.
Le 26 mars 2015, M. [F] a procédé à l'identification des boîtiers de connexion montés en sous-face des panneaux photovoltaïques. A l'issue de ses opérations, il a été mis en évidence des lésions imputables à des contraintes thermiques induites par des échauffements ponctuels soutenus. M. [E] a constaté que les 600 modules photovoltaïques de marque Scheuten P6-54 210 Wc étaient tous étaient dotés de boîtiers de connexion Solexus Alrack dont 7 ont été retrouvés détériorés en conséquence d'échauffements anormaux internes, similaires à ceux décrits par l'étude du laboratoire IC 2000.
Il considère que la cause des désordres est à imputer à un défaut à caractère sériel dans la conception et la réalisation des boîtiers de connexion Alrack Solexus, à même de générer dans le temps des mises à feu.
Aucune des parties n'a contesté le fait que les boîtiers de jonction Solexus sont le siège d'échauffements importants et anormaux, d'une dégradation évolutive des contacts des connecteurs internes situés entre la carte de jonction et les câbles du module (Phénomène de fretting corrosion). M. [E], sur la base des conclusions du laboratoire IC 2000, a confirmé que l'installation de la société Hélios présentait un fort risque de panne ou de sinistre par départ de feu au niveau des modules équipés de boîtiers Solexus, contre lequel il conviendra de mettre en œuvre une ou des solutions de remplacement.
Ainsi, les énonciations de l'expert, fondées sur ses propres constatations (avec des indices d'échauffement sur de nombreux modules), sur des analyses techniques opérées par des laboratoires, et sur de nombreux sinistres précédents provoqués par des modules de même marque et de même modèle, laissent apparaître que les panneaux photovoltaïques Scheuten équipés des boîtiers de jonction Solexus n'offrent pas la sécurité à laquelle le maître de l'ouvrage pouvait légitimement s'attendre, puisqu'ils comportent un risque d'incendie majeur pour les panneaux eux-mêmes mais aussi pour la toiture et le contenu des bâtiments qui risquent d'être incendiés.
Pour autant, la responsabilité des produits défectueux ne s'appliquant pas à la réparation de dommages autres que le produit lui-même et la réclamation de la société Generali IARD ne correspondant pas à autre chose qu'au remplacement des panneaux livrés et leurs composants (les boîtiers Solexus intégrés aux panneaux), l'action de la société Generali IARD sur le fondement des produits défectueux ne peut prospérer.
En effet, la société Generali IARD décrit et démontre l'existence d'un risque d'incendie mais elle sollicite la mise en œuvre d'une garantie (celle des produits défectueux) qui ne couvre pas le dommage au produit défectueux lui-même et sollicite le remboursement du coût des panneaux de remplacement.
En outre, la garantie des produits défectueux ne s'étend pas aux pertes d'exploitation.
Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité des sociétés Scheuten et Alrack sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux.
II-2- Sur la responsabilité au titre des vices cachés :
Le régime de la responsabilité des produits défectueux n'étant pas exclusif des autres régimes, la société GENERALI IARD fonde également son action sur la garantie des vices cachés.
A- Sur la responsabilité de la société Scheuten :
1- Sur la loi applicable :
La société AIG Europe rappelle que le contrat conclu avec la société installatrice est un contrat qui relève d'une chaîne internationale de contrat entre des sociétés de droit français et néerlandais.
La société Generali bénéficie d'une subrogation légale qui lui permet d'agir sur le fondement d'une responsabilité contractuelle (les vices cachés) contre les sociétés Scheuten et Alrack.
Il convient en conséquence, au regard de la nature de la responsabilité engagée, de vérifier quelle est la loi applicable.
La loi applicable au contrat de vente est celle :
-du contrat,
-à défaut et en application de l'article 4-1 a) du règlement CE 593/2008 du 17 juin2008 dit Rome I par la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle,
Il est indiqué sur la facture d'achat des modules auprès de la société Scheuten Solar Systems BV N° SIN11021822 produite par la société Generali que le contrat de vente est, suivant les conditions générales annexées à la facture, régi par le droit néerlandais.
La SA AIG Europe fait valoir que la facture produite par Generali IARD est incomplète puisqu'elle ne fait pas référence, contrairement à celles produites dans d'autres dossiers, à l'inscription selon laquelle le contrat est soumis au droit néerlandais.
La SA Generali IARD ne rapporte pas la preuve du droit applicable et se borne à demander l'application des dispositions du code civil français. Or, la relation contractuelle s'inscrit dans une chaîne de contrats européenne. Il convient donc de se référer aux prescriptions susmentionnées, lesquelles prévoient qu'à défaut de mention de la loi applicable dans le contrat, il convient d'appliquer la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle.
En l'espèce, la société Scheuten Solar Holding BV a sa résidence habituelle aux Pays-Bas. Par conséquent, c'est le droit néerlandais qui a vocation à s'appliquer au contrat.
La société Generali IARD se prévaut du caractère d'ordre public de l'article 1641. Il lui appartient d'établir qu'il s'agit d'une règle de police permettant de déroger au droit applicable, étant rappelé que l'exception en droit international privé n'est pas l'ordre public interne, dès lors qu'une telle assimilation conduirait à considérer que toute loi étrangère qui contrevient à une règle impérative française devrait être rejetée.
Sont considérées comme des lois de police, les règles et principes qui fondent l'organisation sociale en France, les principes et règles assurant la sauvegarde de certaines politiques législatives et les principes des droits naturels.
En conséquence, et dès lors que les dispositions de l'article 1641 auxquelles il est possible de déroger conventionnellement (article 1643 du code civil), ne sont pas d'ordre public international français, le droit néerlandais s'applique et la société Generali IARD n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la société Scheuten sur le fondement de la garantie des vices cachés.
Le jugement sera infirmé sur ce point.
B- Sur la responsabilité de la société Alrack :
S'agissant de la société Alrack, il convient pour les mêmes raisons de domiciliation de faire application de la loi néerlandaise quant à l'action dont bénéficie la société Generali IARD subrogée dans les droits de la société Free Power.
Par ailleurs, la société Helios en tant que maître de l'ouvrage jouit comme la société Free Power des droits et action attachés à la chose. L'action qu'elle pouvait engager contre la société Alrack et dans laquelle la société Generali IARD est subrogée est de nature contractuelle et obéit donc aux règles susvisées. Il s'ensuit que l'action de la société Generali IARD ne peut aboutir à l'égard de la société Alrack sur le fondement des vices cachés.
II-3. Sur la responsabilité contractuelle et quasi-délictuelle :
La société Generali IARD entend rechercher en tout état de cause la responsabilité des sociétés Scheuten et Alrack sur le fondement de leur responsabilité contractuelle et quasi-délictuelle.
1- Sur la loi applicable :
La société Generali IARD bénéficie d'une subrogation légale et d'une subrogation conventionnelle et partant d'une action en responsabilité contractuelle et d'une action en responsabilité délictuelle à l'encontre des sociétés Scheuten et Alrack dès lors que la société Scheuten était dans l'obligation de livrer un objet conforme et exempt de vice et que le tiers au contrat ( la société Hélios à l'encontre des sociétés Scheuten et Alrack ) est fondé à agir sur le fondement d'une action délictuelle en raison des manquements dans l'exécution du contrat dès lors que ces manquements lui ont occasionné un dommage.
Les sociétés AIG Europe et Allianz Benelux n'ont formulé aucune observation pour contester le bienfondé de cette action.
S'agissant de l'action délictuelle de la société Hélios dans les droits de laquelle la société Generali IARD est conventionnellement subrogée, il convient de faire application du règlement de Rome II (article 4) qui fixe comme principe général le fait que la loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d'un fait dommageable est celle du pays où le dommage survient, quel que soit le pays où le fait générateur du dommage se produit et quels que soient le ou les pays dans lesquels des conséquences indirectes de ce fait surviennent.
Le dommage étant survenu en France, la loi applicable à l'action délictuelle exercée est la loi française.
S'agissant de l'action contractuelle de la société Free Power dans les droits de laquelle la société Generali est légalement subrogée, il convient de faire application de la loi du contrat soit de la loi néerlandaise (CF §II-2-A-1).
Cependant, à défaut pour les sociétés Allianz Benelux et AIG Europe de produire à la cour le droit néerlandais applicable et de justifier qu'aux termes du contrat comme aux termes de la loi du contrat, le vendeur ne serait pas tenu des mêmes obligations que celles posées par la loi française, la cour fera application des obligations fixées par celle-ci à la charge du vendeur.
2- Sur la responsabilité des sociétés Scheuten et Alrack :
Le co-contractant est tenu d'une obligation de résultat de livrer un produit conforme, exempt de vice et répondant à la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre. Par ailleurs, le tiers à un contrat est en droit d'invoquer, au soutien qu'une action quasi-délictuelle qu'il exerce contre une des parties au contrat, un manquement de cette partie à ses obligations contractuelles.
En l'espèce, et par renvoi aux constatations techniques susvisées, il est établi que les modules Scheuten livrés à la société Free Power intégrant les boîtiers Solexus ont pour origine une un défaut dans la conception et la réalisation des boîtiers de connexion montés en sous-face des panneaux Scheuten.
Ces défauts ont été clairement établis par le rapport d'expertise de M. [E].
Il s'ensuit que la société Scheuten et la société Alrack sont responsables tant à l'égard de la société Hélios que de la société Free-Power des désordres constatés.
Elles sont tenues in solidum à la réparation du préjudice subi par la société Hélios.
Le jugement sera infirmé sur ce point en ce qu'il a, au regard du fondement retenu, fait état d'une responsabilité solidaire et non in solidum. Il sera confirmé en ce qu'il a fixé au passif des sociétés Scheuten Soler Holdings BV, Scheuten Solar Systems BV, Scheuten Solar France, et Alrack BV, la créance de la SA Generali IARD à la somme de 126.497 euros, au titre de la quittance subrogative établie entre elle et la société Hélios.
3- Sur la demande en partage de responsabilité et le recours en garantie formé par la société Allianz Benelux
La société Allianz Benelux demande à la cour d'opérer un partage de responsabilité entre les sociétés Scheuten et Alrack.
Elle décrit son assuré, la société Alrack, comme une simple exécutante et cite les propos de M. [S] expert judiciaire qui rappelle que le boîter Solexus est intégré au panneau Scheuten qui prend la responsabilité du produit manufacturé comprenant le verre, les cellules, le boîtier, le cadre, les connecteurs en tant qu'intégrateur de ces composants. Cet expert considère que la responsabilité de l'ensemblier (Scheuten) est plus importante que celle d'Alrack dans sa position de fabriquant contraint par son donneur d'ordre.
La société Allianz Benelux évoque l'absence d'autonomie de la société Alrack, simple exécutant dans la conception des boîtiers imposée par la société Scheuten Solar, travaillant sur la base de plans remis par cette société et à partir de directives reçues de cette dernière, étant rappelé que ces boîtiers n'étaient pas en vente libre sur le marché mais seulement montés à l'arrière des modules photovoltaïques de Scheuten Solar.
Le contrat de collaboration conclu entre les sociétés Scheuten Solar Technology GMBH et Alrack BV (pièce n°44 de la société AIG) prévoit cependant que, si la société Alrack devait produire des appareils de jonction " en étroite collaboration avec Scheuten " et sur la base d'une documentation fournie par celle-ci, en revanche la société Alrack déclarait en préambule détenir elle-même " le savoir-faire nécessaire à la conception, à l'ingénierie, et à la production " du système de jonction Solexus, et les deux parties convenaient que la société Alrack avait pour mission d'assurer " la conception, la construction et la production du système à titre exclusif " (article 2.1 du contrat). La société Alrack avait de plus la faculté de recueillir le concours de tiers de son choix (article 2.3), et de leur déléguer le pouvoir de passer des commandes (article 2.4).
Ces stipulations révèlent que la société Alrack, bien que sa mission fût soumise au contrôle et à l'accord de la société Scheuten (qui se réservait le droit d'agréer les tiers), disposait dans l'accomplissement de ses obligations d'une autonomie véritable, caractérisée par son savoir-faire propre, qui lui permettaient de concevoir et de fabriquer les boîtiers en cause, ainsi qu'elle l'a fait conformément à son engagement contractuel : elle était donc le producteur d'une partie composante au sens des articles susdits, la société Scheuten étant pour sa part le producteur ayant réalisé l'incorporation aux panneaux.
Aux termes du contrat, la société Alrack était chargée de la conception du boîtier dans lequel elle devait intégrer le système 8 points breveté par Scheuten Solar.
Les dispositions contractuelles (article 2.2 et articles 6.1 et suivants) attribuent à la société Alrack la conception du boîtier dans lequel elle devait intégrer le système 8 points breveté de Scheuten. Les deux sociétés ont donc travaillé en étroite collaboration et en toute hypothèse il incombait à la société Alrack, en sa qualité d'entreprise spécialisée, d'attirer l'attention du donneur d'ordres sur les risques techniques que comportaient ses instructions éventuelles.
En outre, ainsi que cela a déjà été jugé, la conception du raccordement ne se confond pas avec celle du boîtier Solexus lui-même, et notamment le choix, la nature et l'assemblage des composants et plus particulièrement les broches de sorties vers les câbles qui permettent le raccordement du panneau vers la série des panneaux voisins. Selon les experts, c'est la languette de sortie positive du circuit imprimé situé dans le boîtier et son raccordement à la broche du câble qui sont le siège de réchauffement anormal. ) Les cartes Solexus ne résistent pas à la température élevée parce qu'elles sont réalisées avec des connexions en cuivre d'épaisseur insuffisante et susceptible de provoquer des incendies La société Alrack ne peut donc être considérée comme une simple exécutante dans la fabrication des boîtiers défectueux.
Ainsi et dans leurs rapports entre elles, les sociétés Scheuten Solar Holding BV et Alrack, se répartiront la responsabilité des dommages subis comme suit :
-société Scheuten : 30%
-société Alrack : 70%
III-Sur les garanties des assureurs des sociétés Scheuten et Alrack :
La société AIG Europe soutient qu'en présence d'une chaîne de contrats internationale, la société Generali IARD ne peut exercer à son encontre une action directe
Les sociétés AIG et Allianz Benelux font valoir que c'est le droit néerlandais qui doit s'appliquer, quand bien même la société Generali IARD fait une action directe.
III-1- Sur l'exercice de l'action directe et la loi applicable :
Il convient de distinguer entre :
-la détermination de la loi applicable à la possibilité d'une action directe de la société Generali IARD (A)
Et,
-le régime de l'assurance (la loi pouvant gouverner le régime juridique de l'action directe) (B)
A- La détermination de la loi applicable à l'action directe :
Il résulte de l'article 11 §2 du règlement Bruxelles I que la possibilité de l'action directe est déterminée par la loi désignée par la règle de conflit du juge saisi.
Suivant les principes régissant le conflit de lois en matière d'action directe de la partie lésée contre l'assureur du responsable " l'action directe est possible si elle est permise, soit par la loi de l'obligation principale, soit par la loi du contrat d'assurance, de sorte que, si la loi de l'obligation principale l'autorise, la loi du contrat d'assurance ne peut y faire obstacle et ne peut être invoquée que dans ses dispositions qui régissent les relations entre l'assureur et l'assuré, dispositions à laquelle la question de l'action directe est étrangère ".
Aux termes de l'article L. 124-3 du code des assurances, la personne lésée dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
Le régime de l'action directe dépendra du rapport liant les parties qui va déterminer la qualification de l'obligation.
Le règlement de Rome II (article 4) fixe comme principe général le fait que la loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d'un fait dommageable est celle du pays où le dommage survient, quel que soit le pays où le fait générateur du dommage se produit et quels que soient le ou les pays dans lesquels des conséquences indirectes de ce fait surviennent.
Aux termes de l'article 18 de ce règlement, " la personne lésée peut agir directement contre l'assureur de la personne devant réparation si la loi applicable à l'obligation non contractuelle ou la loi applicable au contrat d'assurance le prévoit. "
En l'espèce :
*il n'existe pas de contrat entre la société Hélios personne lésée et les sociétés Scheuten et Alrack ;
*l'action directe exercée par la société Generali IARD, subrogée dans les droits de la société Hélios est de nature délictuelle ;
*l'article L. 124-3 du code des assurances permet au tiers lésé d'agir directement à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable;
*l'assureur qui bénéficie de la subrogation légale prévue par l'article L.121-12 du code des assurances peut agir contre un tiers.
Il sera donc fait sur cette question application de la loi française (loi du lieu de survenance du dommage) qui permet à la société Generali d'exercer une action directe contre les sociétés d'assurance intimées.
B- Le régime de l'assurance :
Si, en application de l'article 18 du règlement (CE) n° 864/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 ("Rome II"), en matière non contractuelle, la personne lésée peut agir directement contre l'assureur de la personne devant réparation si la loi applicable à l'obligation non contractuelle, déterminée conformément à l'article 4 du règlement, ou la loi applicable au contrat d'assurance le prévoit, le régime juridique de l'assurance est soumis à la loi de ce contrat, notamment en ce qui concerne les exceptions opposables par l'assureur. (1re Civ., 18 décembre 2019, pourvoi n° 18-18.709, 18-14.827)
En l'espèce, les contrats d'assurances Allianz Benelux et AIG Europe sont soumis au droit néerlandais en application des dispositions des articles 9 et 14 des contrats souscrits.
III-2- Sur les exceptions de garanties :
La société Generali IARD prétend voir écarter les exceptions et limitations de garanties qui lui sont opposées.
III-2.1 - Sur les garanties de la société AIG Europe et les exceptions opposées par la société AIG Europe :
La société AIG Europe soutient que la société Generali IARD n'est pas recevable à soulever l'inopposabilité des limitations de garanties puisqu'elle est tiers au contrat et n'a pas la qualité d'assuré.
Cependant, l'assureur qui bénéficie de la subrogation légale prévue par l'article L.121-12 du code des assurances peut agir contre un tiers. Il a été jugé que la société Generali IARD était subrogée dans les droits de son assuré la société Free Power qui est tiers au contrat d'assurance souscrit entre Scheuten et AIG Europe.
Le tiers lésé qui exerce l'action directe peut contester la validité d'une exception de garantie opposée à l'assureur même en l'absence de contestation de l'assuré (Cass. Civ. 3ème, 19-23.033). Cet attendu de portée générale permet de considérer que si le tiers lésé est recevable à contester la validité d'une exception de garantie, il est a fortiori recevable à contester l'opposabilité d'une telle exception.
La société Generali IARD est donc recevable à soulever l'inopposabilité des limitations de garanties.
La société Generali IARD rappelle que l'article L. 181-3 du code des assurances dispose que les articles L. 181-1 et -2 du même code (relatifs à la loi applicable aux contrats d'assurance) ne peuvent faire obstacle aux dispositions d'ordre public de la loi française applicable, quelle que soit la loi régissant le contrat. Ainsi, si la loi applicable au contrat est la loi néerlandaise, elle ne pourra faire obstacle aux dispositions d'ordre public de la loi française.
Au visa de l'article L. 112-2 du code des assurances, elle soutient que les exclusions et limitations de garantie des contrats AIG et Allianz lui sont inopposables puisqu'il n'est pas établi que les souscripteurs en ont eu connaissance avant le sinistre.
Les parties s'opposent dès lors sur le fait que les dispositions de l'article L. 112-2 du code des assurances soient d'ordre public puisque seules les règles d'ordre public font obstacles à la loi néerlandaise.
Cet article dispose :
" L'assureur doit obligatoirement fournir une fiche d'information sur le prix et les garanties avant la conclusion du contrat.
Avant la conclusion du contrat, l'assureur remet à l'assuré un exemplaire du projet de contrat et de ses pièces annexes ou une notice d'information sur le contrat qui décrit précisément les garanties assorties des exclusions, ainsi que les obligations de l'assuré. Les documents remis au preneur d'assurance précisent la loi qui est applicable au contrat si celle-ci n'est pas la loi française, les modalités d'examen des réclamations qu'il peut formuler au sujet du contrat, y compris, le cas échéant, l'existence d'une instance chargée en particulier de cet examen, sans préjudice pour lui d'intenter une action en justice, ainsi que l'adresse du siège social et, le cas échéant, de la succursale qui se propose d'accorder la couverture. Avant la conclusion d'un contrat comportant des garanties de responsabilité, l'assureur remet à l'assuré une fiche d'information, dont le modèle est fixé par arrêté, décrivant le fonctionnement dans le temps des garanties déclenchées par le fait dommageable, le fonctionnement dans le temps des garanties déclenchées par la réclamation, ainsi que les conséquences de la succession de contrats ayant des modes de déclenchement différents.
Un décret en Conseil d'Etat définit les moyens de constater la remise effective des documents mentionnés à l'alinéa précédent. Il détermine, en outre, les dérogations justifiées par la nature du contrat ou les circonstances de sa souscription.
La proposition d'assurance n'engage ni l'assuré, ni l'assureur ; seule la police ou la note de couverture constate leur engagement réciproque.
Est considérée comme acceptée la proposition, faite par lettre recommandée, de prolonger ou de modifier un contrat ou de remettre en vigueur un contrat suspendu, si l'assureur ne refuse pas cette proposition dans les dix jours après qu'elle lui est parvenue.
Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables aux assurances sur la vie. "
L'article R. 112-3 du code des assurances le complète, en prévoyant que le souscripteur atteste par écrit de la date de remise des documents mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 112-2 et de leur bonne réception.
Aux termes d'un arrêt du 29 janvier 2020, la Cour de cassation a désigné comme étant d'ordre public les dispositions des articles L112-4 et L113-1 du code des assurances en ces termes " en matière d'assurance de dommages non obligatoire, les dispositions d'ordre public des articles L. 112-4 et L. 113-1 du code des assurances sont applicables, quelle que soit la loi régissant le contrat ".
Elle ne s'est pas prononcée sur les dispositions de l'article L 112-2 du code des assurances.
Au regard de l'appréciation restrictive de la jurisprudence de la validité des clauses d'exclusion stipulées dans les contrats d'assurance, et de l'importance attachée à l'information de l'assuré sur l'étendue de sa protection, les dispositions de l'article susvisé peuvent être considérées comme appartenant à l'ordre public interne et ce d'autant que l'article L. 111-2 du code des assurances dispose que : " ne peuvent être modifiées par convention les prescriptions des titres Ier, II, III et IV du présent livre, sauf celles qui donnent aux parties une simple faculté et qui sont contenues au dernier alinéa du I et au II de l'article L. 111-10 et dans les articles L. 112-1, L. 112-5, L. 112-6, L. 113-10, L. 121-5 à L. 121-8, L. 121-12, L. 121-14, L. 122-1, L. 122-2, L. 122-6, L. 124-1, L. 124-2, L. 127-6, L. 132-1, L. 132-10, L. 132-15 et L. 132-19 ".
Ainsi, selon l'article L. 111-2, les dispositions des quatre premiers titres du livre I du code des assurances se subdivisent en deux catégories : tandis que certaines d'entre elles " ne peuvent être modifiées par convention ", et sont donc d'ordre public, d'autres " donnent aux parties une simple faculté ", et sont en conséquence supplétives de volonté.
Le législateur a pris le parti non pas d'énumérer les règles d'ordre public, mais d'énoncer limitativement les règles supplétives de volonté, faisant ainsi, pour une meilleure protection de l'assuré, de la liberté contractuelle l'exception. L'article L. 112-2 du code des assurances fait partie du livre Ier chapitre Ier et n'est pas mentionné comme étant une disposition supplétive de volonté, ce qui permet encore d'affirmer qu'il fait partie des dispositions d'ordre public interne.
Toutefois, ainsi que le soulignent les intimées, le présent litige s'inscrit dans une chaîne de contrat internationale. Il ne suffit donc pas de savoir si l'article L. 112-2 relève des dispositions de l'ordre public interne français mais bien s'il relève de l'ordre public international français.
La société Generali IARD ne démontre pas en quoi ces dispositions relèvent du droit public international français. En outre, la cour observe que l'article L. 112-2 du code des assurances est un article très formaliste, fixant très précisément et par renvoi à un arrêté, les diligences à la charge de l'assureur. Or, il ne peut être exigé de deux sociétés de droit néerlandais (les sociétés Scheuten Solard Holding BV et AIG Europe) parties au contrat d'assurance ayant opté pour le droit néerlandais qu'elles appliquent lors de la conclusion du contrat des règles de forme définies par la loi et le règlement français. Une telle exigence porterait atteinte aux règles de conflit.
A défaut d'établir que l'article L112-2 du code des assurances constitue une règle d'ordre public international, et puisque le litige est soumis à la loi néerlandaise, il ne sera pas fait application de ce texte.
A titre surabondant, la cour observe que la société Scheuten a eu connaissance des conditions générales et particulières de la police d'assurance avant la signature du contrat.
Cette preuve est établie par les conclusions déposées dans le cadre d'une instance similaire (pièce 64 AIG) aux termes desquelles M. [C], liquidateur judiciaire des sociétés Scheuten a indiqué :
" La compagnie d'assurance AIG Europe Limited est l'assureur responsabilité civile de la société Scheuten Solar Holding BV en vertu d'un contrat souscrit le 28 octobre 2008.
Si ce contrat stipule expressément en son article 14 que le droit néerlandais s'applique à ce contrat, la portée territoriale de la couverture de la police d'assurance est mondiale.
Au regard des dispositions contractuelles liant AIG Europe Limited à Scheuten, le montant de la garantie est limité à la somme de 5.000.000 euros.
La société AIG Europe Limited est donc tenu de garantir le préjudice de Mme [K] s'il est établi qu'il a été causé par les panneaux photovoltaïques de la marque Scheuten ".
La décision du tribunal sera confirmée en ce qu'il a jugé les garanties de la société AIG Europe étaient applicables et mobilisables.
L'examen des clauses opposables à la société Generali IARD, impose de rappeler le fondement de sa demande.
Cette dernière précise (page 49 de ses écritures) qu'elle ne recherche pas la garantie des dommages aux panneaux photovoltaïques mais la garantie au titre des dommages pouvant être subis par le bâtiment sur lequel ils sont installés et du risque d'incendie et d'atteinte à la sécurité des personnes et des biens. Elle entend mobiliser la garantie responsabilité générale (Garantie A) et souligne que le tribunal a fait application du volet B de la police " responsabilité produit étendue ".
La société Generali IARD vise les articles 3.1 et 3.2.3.3 de la garantie A " responsabilité générale ".
L'article 3 traite de la portée de la couverture qui s'étend à :
- La responsabilité de l'assuré pour un préjudice de tiers en rapport avec des activités relevant de la qualité assurée telle que mentionné dans la police, sous réserve que ledit préjudice soit constitué pendant la durée de l'assurance. On tiendra compte des conditions générales " (article 3.1 " responsabilité ")
- " Frais exposés en vue de prévenir ou limiter un préjudice ". Les frais exposés en vue de prévenir ou de limiter un préjudice tels que définis à l'article 1.7 dont les dommages aux biens également en jeu " (article 3.2.3.3.).
L'article 1.7.1 précise quels sont les " frais exposés en vue de prévenir ou de limiter un préjudice " (1.7).
Sont considérés comme tels les frais supplémentaires afférents à des mesures plus ou moins spéciales prises par un assuré ou en son nom et qui ont été proposées de façon raisonnable, tant relativement à leur portée que relativement à la nécessité correspondante, afin de prévenir ou de limiter le danger imminent de préjudice et qui n'auraient pas été prises si le danger imminent de préjudice ne s'était pas concrétisé.
Sont exclus de la catégorie des " frais exposés en vue de prévenir ou de limiter un préjudice " les frais qui ont été exclus de la couverture à un autre endroit de la police.
Sont ainsi exclus aux termes de l'article 4.4.2 les dommages et les frais en lien avec le remplacement, la correction, la réparation ou le rappel des biens livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité sauf à ce que les frais de rappel puissent être considérés comme des frais au sens visé de l'article 1.7.
La société AIG Europe affirme que le coût de remplacement des panneaux ne correspond pas à des frais exposés en vue de prévenir ou limiter un préjudice.
Il apparaît en effet que la police ne couvre pas le risque d'entreprise et partant le remplacement du matériel défectueux mais uniquement les frais en lien avec ce remplacement, frais supplémentaires afférents à des mesures plus ou moins spéciales (') . Cette analyse est confortée par les dispositions de la clause C9 qui sont des dispositions " produit élargi " s'étendant au produit défectueux mais qui ne couvrent que les frais de montage, d'installation et de rappel à l'exclusion des frais de remplacement des produits eux-mêmes.
Ainsi l'action engagée à titre principale sur le volet A de la police doit être rejetée.
A titre subsidiaire, la société Generali IARD entend mobiliser le volet B de la garantie " Responsabilité produit étendue - conformément à la clause C9 ". Celle-ci intervient par dérogation partielle aux dispositions de l'article 4.4.2 des conditions générales. Elle couvre la responsabilité de l'assuré au titre des frais exposés par des tiers en conséquence de produit défectueux livrés par l'assuré consistant en : frais de montage et d'installation et frais de rappel.
L'article 7 de la clause C9 stipule que l'assurance ne couvre aucune responsabilité pour les frais exposés au titre " des produits devant être à nouveau livrés eux-mêmes, ce qui inclut(..) un remplacement en tout ou partie. "
Cette clause ne nécessite aucune interprétation et se suffit à elle-même.
En outre, la société AIG oppose à la SA Generali l'article C 9 § 5 des conditions particulières, qui limite à une période de deux ans, à compter de la livraison de produits défectueux par l'assuré, les frais de renouvellement ou de remplacement des matériaux détériorés.
Pour échapper aux exclusions qui lui sont opposées, la société Generali IARD invoque la nullité des clauses d'exclusion et objecte que cette clause ne respecte pas les termes de l'article L.112-4 du code des assurances applicable à l'espèce puisque d'ordre public. Elle ajoute que les clauses de limitation et d'exclusion de garantie qui lui sont opposées ne sont en outre ni formelles ni limitées au sens de l'article L.113-1 du code des assurances.
Conformément aux éléments de motivation précédemment développés, il résulte des dispositions de l'article L.111-2 du code des assurances ainsi que de la jurisprudence (cassation 29 janvier 2020) que les dispositions de l'article L.112-4 du code des assurances sont d'ordre public et donc opposables à la société AIG.
Aux termes de cet article :
" (') Les clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents. "
Toutefois, la clause C9§5 limitant dans le temps la garantie due par la société AIG doit recevoir application : elle ne constitue pas une nullité, déchéance ou exclusion qui devrait être mentionnée en caractères très apparents selon les dispositions d'ordre public de l'article L 112-4 du code des assurances. Elle est d'ailleurs formelle et limitée conformément à l'article L. 113-1 du même code qui est lui aussi d'ordre public.
Cette clause, qui participe de la définition de la garantie et reste soumise au droit néerlandais est opposable à la société Generali IARD. Elle ne stipule pas un délai de prescription puisqu'elle n'a pas pour objet d'encadrer l'action mais précise l'étendue de la garantie qui s'applique.
Il est établi que la réception a été prononcée le 6 janvier 2011 et que la facture des travaux de reprise est datée du 22 octobre 2013 (page 72 rapport d'expertise).
Il en résulte que les frais consécutifs au sinistre ont été exposés plus de deux ans après la livraison des produits défectueux, et qu'en vertu de la clause susdite, la société AIG est fondée à refuser sa garantie à la société Generali.
Enfin, s'agissant des pertes d'exploitation, AIG se prévaut des limites et exclusions de garantie de la police, limites et exclusions contestées par l'appelante.
L'article C15 des conditions particulières intitulé " préjudice financier " stipule " qu'en complément de l'article 10.6 des conditions générales, la présente assurancecouvre égamlement la responsabilité des assurés pour les dommages affectant le seul patrimoine subi par des tiers.
Par " dommage affectant le seul patrimoine ", on entend un préjudce autre qu'un préjudiceen conséquence de dommages aux biens ou aux personnes, dans le cas où les produits livrés ar l'assuré ne peuvent pas être utilisés convenablement, sous réserve que les produits livrés puissent être considérés comme défectueux. "
Il s'agit d'une extension de garantie par rapport aux conditions générales.
La société AIG soutient que les pertes de production d'électricité du fait de la défectuosité des panneaux litigieux sont exclus par la clause G24 des conditions particulières et par l'article 4.4.3 des conditions générales. L'article H24 des conditions particulières prévoir :
" exclusion de la non livraison ou de la livraison insuffisante d'énergie.
La responsabilité au titre d'un préjudice et/ou de frais -ainsi que le préjudice en découlant-du fait de l'absence de transport ou du transport insuffisant d'énergie solaire par des produits en verre/des panneaux solaires livrés par l'assuré ou sous sa responsabilité.
Les termes de cette clause, clairs et précis, portent spécifiquement sur les préjudices consécutifs à l'absence d'énergie solaire par les panneaux livrés par la société Scheuten sans distinguer selon la cause.
Or l'article C15 couvre les préjudices autres que les dommages aux personnes et aux biens, dans les cas où les produits livrés par la société sont défectueux et ne peuvent pas être utilisés normalement. Le champ d'application quant à la cause du dommage est plus large que celui que l'article G24.
Dans ces conditions, il ne peut être considéré que l'article G24 a pour effet de vider de sa substance l'article C15. L'exclusion de l'article G24 est donc opposable à l'article Generali IARD.
Il en résulte que la demande de garantie de l'indemnité sur laquelle il a été transigé au titre de la perte d'exploitation doit être rejetée.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, l'action formée par la SA Generali contre la société AIG sera rejetée.
III-2-2 Sur la garantie de la société Allianz Benelux :
Il est incontesté entre les sociétés Generali IARD et Allianz Benelux que cette dernière était l'assureur responsabilité de la société Alrack, en vertu d'un contrat d'assurance dont la société Allianz Benelux produit les conditions générales en pièce n° 18-1.
Il est renvoyé aux éléments de motivation supra sur :
-la responsabilité de la société Alrack
-l'application du droit néerlandais au contrat
La société Generali IARD précise qu'elle entend mobiliser la garantie de la société Allianz Benelux au titre des articles 1.11 " mesures de sauvegarde " et sollicite la condamnation de la société Allianz Benelux sur le fondement de l'article 2.4.1 de la police à savoir les coûts des mesures de sauvegarde. Elle ajoute que la garantie n'est pas recherchée pour les dommages aux boîtiers mais ceux subis par les panneaux.
L'article 2.4.1 de la police inclut dans les indemnisations supplémentaires, les coûts de mesures de sauvegarde décrits à l'article 1.11, qui porte sur les " coûts des mesures de sauvegarde " et stipule que " Les coûts de mesures prises par ou au nom du souscripteur ou d'un assuré et lesquelles s'imposent raisonnablement pour éviter tout risque de dommage imminent dont - s'il s'était produit- l'assuré serait responsable et lequel serait couvert par l'assurance, ou pour limiter ce dommage. Est également entendu par les coûts de mesure, le dommage aux biens utilisés pour prendre les mesures visées ici ".
En l'espèce, la clause dont il est demandé l'application ne trouve pas à s'appliquer dès lors que les travaux de remplacement des modules ou panneaux réalisés pour un coût de 126.497 euros (il s'agit du montant des travaux réparatoires) euros ne constituent pas de simples mesures de sauvegarde telles que l'aurait été la dépose des panneaux défectueux, mais de véritables travaux de reprise des désordres, visant non seulement à protéger les bâtiments contre le risque d'incendie, mais aussi à mettre l'installation en état de fonctionner : ces travaux ne relèvent donc pas de l'article 1.11 invoqué par la SA Generali, article qui au surplus limite les mesures de sauvegarde indemnisables à celles prises par un assuré ou par un souscripteur, ou en son nom, alors que les travaux en cause n'ont pas été accomplis par l'assuré de la société Allianz Benelux, la société Alrack, mais à la diligence du maître de l'ouvrage, la société Hélios.
IV- Sur les autres demandes :
La société Generali IARD succombant dans la présente procédure sera condamnée aux dépens qui comprendront les frais d'expertise et de greffe.
En application de l'article 699 du code de procédure civile, Me Rahon, avocat, pourra recouvrer directement les frais dont il aurait fait l'avance sans percevoir de provision.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné solidairement la société AIG Europe SA avec la société Allianz Benelux NV à verser à la SA Generali IARD la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société AIG Europe et de la société Allianz Benelux les frais exposés pour leur défense. Eu égard au nombre de dossiers plaidés à la même audience pour lesquels les arguments de droit et de faits développés sont extrêmement similaires, la société Generali IARD sera condamnée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à verser à la société AIG Europe la somme de 4.000 euros et à la société Allianz Benelux la somme de 4.000 euros.
Dispositif
Par ces motifs :
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, en dernier ressort, par arrêt contradictoire, mis à disposition des parties au greffe de la juridiction ;
Confirme le jugement entrepris :
*en ce qu'il a déclaré la société Generali IARD déclarée recevable en ses recours subrogatoires à l'encontre des sociétés AIG Europe SA et Allianz Benelux à hauteur de 126.497 euros HT en principal ;
*en ce qu'il a déclaré les sociétés Scheuten Solar Holding BV, Scheuten Solar Systems BV, Scheuten Solar France, et Alrack BV responsables solidairement des sinistres, et tenues à la réparation du préjudice subi par la société Hélios laquelle lui a donné quittance subrogative ;
*en ce qu'il a fixé au passif de ces mêmes sociétés la créance de la SA Generali IARD à la somme de 126.497 euros HT au titre de la quittance subrogative établie entre la SAS Hélios et la SA Generali IARD,
*en ce qu'il a jugé que les conditions et exclusions de la police AIG Europe sont applicables et mobilisable
L'infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau ;
Rejette les demandes présentées par la société Generali IARD sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux ;
Rejette les demandes présentées par la société Generali IARD sur le fondement des vices cachés ;
Déclare les sociétés Scheuten Solar Holding BV et Alrack responsables, in solidum, des dommages subis par la société Hélios ;
Dit que dans leurs rapports entre elles, les sociétés Scheuten Solar Holding BV et Alrack, se répartiront la responsabilité des dommages subis comme suit :
-société Scheuten : 30 %
-société Alrack : 70 %
Déclare la société Generali IARD recevable à agir directement à l'encontre des sociétés AIG Europe et Allianz Benelux ;
Déboute la société Generali IARD de l'action directe dirigée contre la société AIG Europe ;
Déboute la société Generali IARD de l'action directe dirigée contre la société Allianz Benelux ;
Condamne la société Generali IARD à verser la somme de 4.000 euros à la société AIG Europe au titre des frais irrépétibles ;
Condamne la société Generali IARD à verser la somme de 4.000 euros à la Allianz Benelux au titre des frais irrépétibles ;
Condamne la société Generali IARD aux dépens qui comprendront les frais d'expertise et de greffe.
Dit qu'en application de l'article 699 du code de procédure civile, Me Rahon, avocat, pourra recouvrer directement les frais dont il aurait fait l'avance sans percevoir de provision.