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Décisions

CA Montpellier, 2e ch. civ., 29 février 2024, n° 23/02935

MONTPELLIER

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

International Hotel (SA)

Défendeur :

La Fontaine (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Torrecillas

Conseillers :

Mme Carlier, Mme Herment

Avocats :

Me Salvignol, Me Guele, Me Cortey Lotz, Me Dolfi

TJ Rodez, du 25 mai 2023, n° 23/00043

25 mai 2023

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 1er août 1994, la société civile immobilière La Fontaine a donné à bail à la société International Hôtel à titre commercial un immeuble situé à [Localité 5], à l'angle de la [Adresse 7] et de la [Adresse 8], pour une durée de neuf ans commençant à courir le 1er août 1994, moyennant le règlement d'un loyer annuel de 600 300 francs (91 515, 15 euros) tva en sus, payable par mois en douze termes égaux et d'avance, révisable tous les trois ans en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction.

Par acte authentique en date du 24 mars 2002, les parties convenaient d'un avenant au contrat de bail, aux termes duquel, notamment, la consistance des lieux loués était modifiée en ce qu'un bâtiment sis au [Adresse 8] et un appartement indépendant au septième étage en étaient exclus, et la clause relative au montant du loyer était modifiée en ce que le loyer était fixé à la somme de 45 735 euros par an, hors taxes, durant quatre ans, puis au delà de la quatrième année, sur la base d'un loyer de 45 735 euros auquel s'ajouterait une prime de 10 % du résultat brut d'exploitation (RBE), lui-même fixé hors loyer, hors amortissement et hors frais financiers, sans que le montant du loyer ne puisse excéder 91 470 euros, valeur décembre 2001, ni être inférieur en fin de bail à cette somme de 91 470 euros, valeur décembre 2001.

Par acte d'huissier en date du 25 mai 2009, la société International Hôtel a fait signifier à la société civile immobilière La Fontaine une demande de renouvellement du bail pour une durée de neuf années à compter du 1er août 2009, sollicitant en outre la fixation du loyer annuel hors taxe et hors charge à la somme forfaitaire de 43 125 euros.

Par acte d'huissier en date du 20 juillet 2009, la société civile immobilière La Fontaine a accepté le principe du renouvellement sollicité pour une durée de neuf années à compter du 1er juillet 2009, mais a refusé le nouveau loyer proposé par la société locataire, entendant voir fixer le loyer du bail renouvelé aux mêmes conditions que celles définies aux termes de l'avenant conclu le 24 mars 2002, soit un loyer de base de 57 620 euros ht par an auquel s'ajouterait une prime de 10% sur le résultat brut d'exploitation de la société International Hôtel, le tout limité à la somme de 122 308 euros hors taxes par an, valeur 4ème trimestre 2008, indexé sur l'indice national du coût de la construction publié par l'Insee.

La société International Hôtel a saisi le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Rodez afin de faire fixer le prix du bail renouvelé à la somme de 41 478 euros par an, en principal, à compter du 1er août 2009.

Par jugement du 22 février 2011, le juge des loyers commerciaux, constatant que le loyer composé d'une partie fixe et d'une partie variable, ne pouvait qu'être fixé par la loi des parties, s'est déclaré incompétent et a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Rodez, lequel a, aux termes d'un jugement rendu le 15 mars 2013, débouté la société International Hôtel de l'ensemble de ses demandes, l'a condamnée à payer une somme de 179 056, 18 euros au titre des loyers et charges impayés et lui a enjoint de fournir chaque année ses comptes de résultats détaillés pour permettre le calcul du revenu brut d'exploitation.

La société International Hôtel a interjeté appel de cette décision.

Aux termes d'un arrêt rendu le 30 décembre 2014, la cour d'appel de Montpellier a confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en celle relative à la condamnation au titre des loyers et charges impayés, et statuant à nouveau sur ce point, a condamné la société International Hôtel à verser à la société civile immobilière La Fontaine la somme de 114 841, 99 euros au titre des loyers et charges impayés, somme arrêtée au 31 décembre 2013.

La société International Hôtel a formé un pourvoi contre cette décision.

Dans un arrêt rendu le 12 mai 2016, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi dirigé contre l'arrêt rendu le 30 décembre 2014 par la cour d'appel de Montpellier.

Par acte d'huissier en date du 11 mars 2022, la société International Hôtel a fait délivrer à la société civile immobilière La Fontaine une demande de renouvellement du bail commercial pour une durée de neuf années à compter du 1er avril 2022.

Par acte d'huissier délivré à la société International Hôtel le 19 mai 2022, la société civile immobilière La Fontaine a notifié à la société International Hôtel son refus de renouveler le bail.

Puis, par lettre recommandée en date du 24 juin 2022, la société International Hôtel a indiqué à l'huissier de justice qui avait délivré le refus de renouvellement du bail que dans son exploit manquait la mention obligatoire, prévue à peine de nullité, selon laquelle le preneur qui entendait contester le refus de renouvellement du bail ou demander une indemnité d'éviction devait saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date à laquelle était signifié le refus de renouvellement.

Postérieurement, par acte du 1er décembre 2022, la société civile immobilière La Fontaine a fait délivrer à la société civile immobilière La Fontaine un commandement de payer la somme de 154 670, 96 euros en règlement des loyers restant dus au titre des années 2018 et 2019, visant la clause résolutoire figurant au bail.

Par acte du 27 février 2023, la société civile immobilière La Fontaine a fait assigner en référé la société International Hôtel devant le président du tribunal judiciaire de Rodez afin qu'il :

- constate l'acquisition de la clause résolutoire du bail commercial liant les parties,

- ordonne en conséquence l'expulsion immédiate de la société International Hôtel des locaux sis [Adresse 6] à [Localité 5], et de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours d'un hussier de justice, de la force publique et d'un serrurier,

- assortisse l'obligation de quitter les lieux d'une astreinte d'un montant de 300 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant le prononcé de la décision à intervenir, et ce jusqu'à complète libération des lieux et remise des clés,

- condamne la société International Hôtel à lui verser une somme de 154 670, 96 euros à titre de provision sur l'arriéré de loyers et charges,

- condamne la société International Hôtel à lui verser une somme de 15 467, 10 euros en application de la clause pénale contenue dans le bail commercial,

- condamne la société International Hôtel à lui verser une somme de 14 151, 38 euros par mois, correspondant à deux fois le montant mensuel du loyer, à titre d'indemnité d'occupation, jusqu'au jour de la libération effective des lieux,

- condamne la société International Hôtel à lui verser une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Aux termes d'une ordonnance rendue le 25 mai 2023, le président du tribunal judiciaire de Rodez statuant en référé a :

- condamné la société International Hôtel au paiement de la somme provisionnelle de 154 670, 96 euros au titre des loyers des années 2018 et 2019, outre les intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2020,

- dit que la société International Hôtel pourrait s'acquitter de cette dette en 23 versements mensuels de 6 400, 00 euros, augmenté des intérêts de retard, le solde étant réglé avec la 24ème et dernière échéance,

- ordonné la suspension rétroactive des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais et sous réserve de leur intégral respect qui serait apprécié chaque 15 des vingt-quatre prochains mois,

- ordonné la suspension rétroactive des effets de la clause pénale dans les mêmes conditions,

- dit que si un seul loyer courant postérieur à l'arrêté de compte ou une seule échéance de remboursement prévue dans l'ordonnance n'était pas honoré à son échéance et non régularisé suite à l'envoi par le bailleur d'une lettre recommandée de mise en demeure demeurée infructueuse dans un délai de quinze jours francs à compter de sa réception, la totalité des sommes restant dues deviendrait exigible avec intérêts au taux légal à compter de la date de défaillance, la clause résolutoire serait acquise et le bail se trouverait automatiquement résilié,

- autorisé dans cette seule hypothèse, la société civile immobilière La Fontaine à faire procéder à l'expulsion de la société International Hôtel ainsi qu'à celle de tous occupants du logement avec si besoin, l'assistance d'un serrurier et de la force publique, faute pour la locataire de n'avoir pas su respecter l'une quelconque des échéances prévues ci-dessus,

- dit que dans ce cas, le sort des biens mobiliers trouvés dans les lieux serait régi par les dispositions prévues par les articles L.433-1 et R.433-l et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

- fixé dans ce cas, l'indemnité d'occupation que la société International Hôtel serait condamnée à payer à la société civile immobilière La Fontaine, à compter de la défaillance et jusqu'à son départ effectif des lieux caractérisé soit par l'expulsion, soit par la restitution volontaire des clés en mains propres au bailleur, au montant du loyer courant réindexé, majoré des charges et taxes normalement exigibles sans astreinte ni majoration,

- rejeté la demande liée au trouble manifestement illicite relatif à la toiture des locaux loués,

- rejeté toutes les autres demandes et surplus de demandes et notamment, celles formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ou celle formulée pour procédure abusive,

- condamné la société International Hôtel aux entiers dépens.

Par déclaration en date du 7 juin 2023, la société International Hôtel a relevé appel de cette ordonnance en ce qu'elle l'avait condamnée au paiement de la somme provisionnelle de 154 670, 96 euros au titre des loyers des années 2018 et 2019, outre les intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2020, en ce qu'en cas de défaillance d'une échéance de remboursement de la dette de loyers sur vingt-quatre mois, elle avait autorisé son expulsion et l'avait condamnée au paiement d'une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer courant réindexé majoré des charges et taxes normalement exigibles, et en ce qu'elle l'avait déboutée de sa demande liée au trouble manifestement illicite et l'avait condamnée aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 7 septembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la société International Hôtel demande à la cour de :

A titre principal,

- annuler ou tout le moins réformer l'ordonnance de référé en ce qu'elle l'a condamnée au paiement à titre provisionnel des loyers de 2018 et 2019 et ordonné son expulsion en cas de défaut de paiement,

- condamner la société civile immobilière La Fontaine à lui rembourser l'intégralité des échéances qui auront été versées par elle au titre des provisions des loyers de 2018 et 2019 depuis l'ordonnance de référé rendue le 25 mai 2023 jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir, outre les intérêts au taux légal,

A titre subsidiaire,

- confirmer les délais de paiement de vingt-quatre mois qui lui ont été octroyés et la suspension rétroactive de la clause résolutoire et de la clause pénale pendant le cours des délais,

A titre reconventionnel,

- infirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a rejeté la demande au titre des travaux de réfection de la toiture des lieux loués,

Et statuant à nouveau,

- condamner la société civile immobilière La Fontaine à faire réaliser en urgence et à ses frais les travaux de réfection de la toiture, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de quinze jours de la décision à intervenir,

En tout état de cause,

- condamner la société civile immobilière La Fontaine à lui payer une somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société civile immobilière La Fontaine aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle rappelle les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce et indique qu'en cas de mise en demeure de payer, le commandement doit indiquer le montant des loyers dus, informer clairement le locataire et être suffisamment précis pour lui permettre d'identifier les causes des sommes réclamées, leur bien-fondé et leurs dates d'échéance. Elle précise qu'en l'espèce, la société civile immobilière La Fontaine a fait délivrer un commandement de payer la somme de 154 670, 96 euros, auquel était annexé un décompte faisant apparaître le solde du au titre de l'année 2018 et le solde du au titre de l'année 2019.

Elle explique qu'au cours des années 2018 et 2019, elle a réglé la partie fixe des loyers portée à la somme de 65 731, 88 euros HT et la partie variable égale à 10 % du résultat brut d'exploitation.

Elle soutient que la société civile immobilière La Fontaine fait un calcul erroné des loyers dus au titre des années 2018 et 2019 puisqu'elle applique le plafond de 130 178, 11 euros comme plancher en cours de bail et non comme plafond, ne respectant pas les termes de l'avenant au bail commercial de 2002.

Elle en déduit que le commandement de payer délivré par la société civile immobilière La Fontaine est infondé, puisqu'elle a démontré avoir réglé la partie fixe et la partie variable égale à 10% du résultat brut d'exploitation.

Elle ajoute que le bailleur est de mauvaise foi. Elle précise qu'en effet, la société civile immobilière La Fontaine a été informée dès le 2 mars 2020 qu'elle allait devoir engager des travaux de réfection de l'ensemble des chambres et services communs et précise que ces travaux ont engendré des investissements très conséquents. Elle affirme que la société civile immobilière La Fontaine n'a engagé cette procédure que pour récupérer le fonds de commerce des deux hôtels Mercure et Ibis, sans avoir à lui verser une indemnité d'éviction qui serait d'un montant important, compte tenu de la valeur du fonds de commerce.

De plus, elle soutient que le bail commercial étant en cours, le plafond d'un montant de 130 178, 11 euros était applicable mais que l'addition des parties fixes et variables des loyers de 2018 et 2019 ne dépassait pas ce plafond. Elle ajoute que le plancher de 130 178, 11 euros ne s'appliquait pas au bail en cours puisqu'il ne s'applique qu'à la fin du bail.

Subsidiairement, elle précise solliciter la confirmation de l'ordonnance déférée en ce qu'elle lui a accordé des délais de paiement sur vingt-quatre mois et a ordonné la suspension rétroactive des effets de la clause résolutoire.

A titre reconventionnel, elle expose que depuis la loi Pinel, le statut des baux commerciaux interdit au bailleur de laisser à la charge du locataire les dépenses relatives aux grosses réparations visées à l'article 606 du code civil et précise que cette disposition est applicable aux contrats conclus ou renouvelés depuis le 5 novembre 2014.

Elle indique que la réfection de la toiture d'un bâtiment, dès lors qu'elle est totale, constitue une grosse réparation et souligne que les baux conclus ou renouvelés depuis le 5 novembre 2014 ne peuvent plus mettre à la charge du locataire les dépenses liées aux travaux occasionnés par la vétusté lorsqu'ils constituent des grosses réparations.

Elle explique qu'en l'espèce, des infiltrations ont eu lieu dans certaines chambres, l'empêchant de les louer et lui créant un préjudice de jouissance, que par lettre recommandée en date du 3 avril 2023, elle a demandé à la société civile immobilière La Fontaine de prendre en charge le coût du devis qu'elle avait fait réaliser et qu'elle justifie de la réalisation des travaux d'entretien et de réfection de la toiture terrasse en produisant des factures et un constat d'huissier.

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 21 décembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la société civile immobilière La Fontaine demande à la cour de :

- la recevoir en son appel incident,

- infirmer l'ordonnance de référé rendue par le président du tribunal judiciaire de Rodez le 25 mai 2023 en ce qu'elle a :

* dit que la société International Hôtel pourait s'acquitter de sa dette en 23 versements mensuels de 6 400, 00 euros, augmenté des intérêts de retard, le solde étant réglé avec la 24ème et dernière échéance,

* ordonné la suspension rétroactive des effets de la clause resolutoire pendant le cours des délais et sous réserve de leur intégral respect qui serait apprécié chaque 15 des vingt-quatre prochains mois,

* ordonné la suspension rétroactive des effets de la clause pénale dans les mêmes conditions,

* rejeté toutes les autres demandes et surplus de demandes, et notamment celles formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ou pour procédure abusive,

Statuant à nouveau,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail commercial la liant à la société International Hôtel, par l'effet du commandement signifié le 1er décembre 2022,

- en conséquence, ordonner à défaut de départ volontaire, l'expulsion immédiate de la société International Hôtel des locaux sis [Adresse 6] à [Localité 5], et de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours d'un hussier de justice, de la force publique et d'un serrurier,

- ordonner l'enlèvement des biens et facultés mobilières se trouvant dans les lieux en un lieu approprié aux frais, risques et périls du défendeur qui disposerait d'un délai d'un mois pour les retirer à compter de la sommation délivrée par l'huissier chargé de l'exécution,

- assortir l'obligation de quitter les lieux d'une astreinte d'un montant de 300 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant le prononcé de la décision à intervenir et ce jusqu'au jour de complète libération des lieux et de remise des clés,

- condamner la société International Hôtel à lui payer la somme de 15 788, 42 euros par mois, correspondant à deux fois le montant mensuel fixe du loyer, à titre d'indemnité d'occupation, jusqu'au jour de la libération effective des lieux,

- confirmer l'ordonnance en toutes ses autres dispositions,

- condamner la société International Hôtel à lui verser une somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

S'agissant des loyers dus au titre des années 2018 et 2019, elle indique que la société International Hôtel n'explique pas pour quel motif, le plancher du loyer correspondant à la somme de 91 470 euros ne serait pas applicable au titre des années 2018 et 2019 et qu'elle n'a pas contesté avant le commandement de payer, les factures émises en application du loyer pour les années 2018 et 2019, ni par voie judiciaire le commandement de payer, car elle sait que les sommes réclamées sont dues.

En outre, elle précise que la Cour de cassation a expressément jugé que le loyer ne pouvait être inférieur à la valeur plancher définie contractuellement. Elle souligne que la société International Hôtel avait elle-même reconnu dans un mémoire que les parties avaient l'intention de revenir au terme du contrat, et donc avant un renouvellement éventuel, à un système de loyer fixe.

Elle explique qu'en l'espèce, il est acquis que le bail a été renouvelé le 1er août 2009 et qu'il s'est ensuite prolongé tacitement du 1er août 2018 jusqu'à son renouvellement le 1er avril 2022. Elle ajoute qu'il est évident que pour les années 2018 et 2019, années de prolongation tacite du bail, le loyer plancher doit s'appliquer.

Du reste, elle fait valoir que la société International Hôtel ne démontre pas s'être acquittée des sommes correspondant à 10% du résultat brut d'exploitation.

En ce qui concerne la régularité du commandement, elle explique que celui-ci rappelle les dispositions des articles L. 145-41 du code de commerce, reproduit les termes de la clause résolutoire insérée au contrat de bail et attire précisément l'attention de la société International Hôtel sur le fait qu'à défaut de règlement dans le délai d'un mois, elle entend solliciter la résiliation du bail commercial. Elle ajoute qu'étaient joints au commandement un décompte des sommes dues ainsi que les factures non réglées par la société International Hôtel mentionnant le loyer plancher. Elle soutient enfin que le commandement n'a pas été émis de mauvaise foi, dans la mesure où il porte sur des sommes qui sont dues.

Elle expose que le commandement du 1er décembre 2022 est resté infructueux passé le délai d'un mois suivant sa délivrance et ajoute que depuis plusieurs années, la société International Hôtel ne règle pas le loyer le premier de chaque mois, ne rembourse pas les charges à leurs échéances et s'octroi des délais de paiement. Elle précise que dans ces conditions, elle a été contrainte d'émettre plusieurs commandements de payer et de saisir le juge des référés à deux reprises pour obtenir le paiement de ses créances.

Elle ajoute qu'en conséquence de la résiliation du bail, la société International Hôtel doit être condamnée au paiement de la somme de 15 467, 10 euros en application de la clause pénale contractuelle.

Enfin, s'agissant des demandes reconventionnelles de la société International Hôtel, elle explique que sous l'empire du bail commercial renouvelé le 1er août 2009 et en vertu de l'avenant du 24 mars 2002, il incombait à l'appelante au titre de ses obligations de réparation et d'entretien des locaux de procéder aux grosses réparations visées aux articles 605 et 606 du code civil et que ce n'est que depuis son renouvellement, le 1er avril 2022, que le bail est soumis aux dispositions de la loi Pinel du 18 juin 2014. Elle précise que du reste, les travaux des grosses réparations incombent au bailleur uniquement sous réserve qu'elles ne résultent pas de l'inexécution de ses obligations par le preneur sous l'empire du précédent bail. Elle explique qu'en l'espèce, la société International Hôtel rencontre des problèmes d'étanchéité depuis plusieurs années et reconnaît que sous l'emprise de l'ancien bail, les travaux de réfection lui incombaient. Elle en déduit qu'il existe une contestation sérieuse soustrayant la demande de la société International Hôtel du champ de la compétence du juge des référés.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la résiliation du bail

Aux termes de l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Selon les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Il est de principe que les contestations élevées par le preneur sur la validité du commandement peuvent faire échec en référé à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire si elles revêtent un caractère sérieux.

Le commandement de payer doit permettre au locataire de connaître précisément les loyers et charges impayés revendiqués à son égard afin de lui donner la possibilité d'en vérifier la régularité et la conformité, ainsi que, le cas échéant, d'en former contestation, étant rappelé que ce commandement visant la clause résolutoire a pour but la résiliation du contrat de bail.

En l'espèce, il est établi que le 1er décembre 2022, a été délivré à la société International Hôtel, à la demande de la société civile immobilière La Fontaine, un commandement de payer la somme de 154 670, 96 euros au titre des loyers restant dus pour les années 2018 et 2019, rappelant les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce et reproduisant la clause résolutoire insérée au contrat de location stipulant qu'à défaut de paiement d'un seul terme ou fraction de terme de loyer ou de ses accessoires à son échéance, ou en cas d'inexécution d'une seule des conditions du bail, et quinze jours après une mise en demeure restée infructueuse et un mois après un commandement mentionnant ce dernier délai, non suivi d'effet, le bail serait résilié de plein droit.

A ce commandement étaient annexés des factures datées du 12 novembre 2018 et du 4 décembre 2019 ainsi qu'un décompte des sommes dues au 25 novembre 2022, additionnant la somme due au titre de la facture du 12 novembre 2018 et celle due au titre de la facture du 4 décembre 2019.

Or, sur les factures ne sont indiqués que le montant du loyer plancher, le montant des loyers fixes appelés et le montant des loyers variables dus, correspondant à la différence entre le montant du loyer plancher et le montant des loyers fixes appelés.

Si l'examen de ces deux factures révèle que la locataire a réglé chaque année une somme de 65 731, 88 euros, aucun détail des sommes versées par la locataire, mois par mois, et des sommes restant dues par cette dernière n'y figure, de sorte qu'il n'est pas possible pour la locataire de vérifier que les paiements par elle effectués ont été effectivement imputés sur les sommes qu'elle devait.

Ce décompte ne permet pas, notamment, de vérifier que les chèques au bénéfice de la société civile immobilière La Fontaine, que la société International Hôtel justifie voir établis entre le 14 juin 2019 et le 2 septembre 2019, pour un montant total de 12 600 euros, et dont elle établit le paiement en produisant le relevé du compte ouvert à son nom auprès de la société CIC Iberbanco, afférent à la période allant du 19 juin 2019 au 26 novembre 2020, ont effectivement été pris en compte dans le calcul de la somme versée par la locataire en 2018 et 2019.

Ainsi, le commandement ne contient pas toutes les précisions permettant à la société International Hôtel de connaître la nature, les causes et le montant des sommes réclamées, de vérifier si l'intégralité des paiements par elle effectués a été déduit de sa demande et de procéder au règlement des sommes dues ou de motiver la critique du décompte.

Il en résulte une contestation suffisamment sérieuse quant à la régularité du commandement de payer et partant, quant à l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire.

Au surplus, s'agissant du montant de l'arriéré locatif visé au commandement, il est stipulé à l'avenant du bail commercial en date du 24 mars 2002 qu'au-delà de la quatrième année, 'la base du loyer sera fixée de la manière suivante :

- Loyer de base soit 45 735 EUR auquel s'ajoutera une prime de 10 % du Résultat Brut d'Exploitation (R.B.E) lui même fixé hors loyer, hors amortissement et hors frais financiers, sans que le montant du loyer puisse excéder 91 470 EUR valeur décembre 2001, ni être inférieur en fin de bail à cette somme de 91 470 EUROS, valeur décembre 2001.'

Les parties s'accordent pour indiquer que le montant des loyers fixes s'est élevé à la somme de 65 731, 88 euros au titre de l'année 2018 et au titre de l'année 2019.

Elles s'accordent également sur le fait que cette somme a été réglée par la société International Hôtel.

Toutefois, les parties sont en désaccord sur l'interprétation de la clause ci-dessus reproduite et ont varié dans leur interprétation de cette clause.

En effet, si la société International Hôtel soutient, dans le cadre de cette présente instance, qu'elle n'est redevable que d'une partie fixe à hauteur de 65 731, 88 euros, et d'une partie variable correspondant à 10% du résultat brut d'exploitation, elle avait développé devant la Cour de cassation, suite au pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 30 décembre 2014 par la cour d'appel de Montpellier, le moyen selon lequel la valeur plancher était de même montant que la valeur plafond, ce qui révélait l'intention des parties de revenir, au terme du contrat, et donc avant un éventuel renouvellement, à un système de loyer fixe.

De son côté, la société civile immobilière La Fontaine a varié dans le calcul des sommes réclamées à la société International Hôtel au titre du loyer puisque si dans les factures au titre des années 2018 et 2019, elle considère que la partie variable correspond à la différence entre le montant du loyer plancher et le montant des loyers fixes, dans les factures émises le 16 février 2021, relatives aux termes de janvier, février, mars, août, septembre et novembre 2021, elle a sollicité le paiement des loyers fixes et a précisé que le loyer 2021 intègrerait une fraction du résultat brut d'exploitation de l'exercice 2021.

Ainsi, la clause ambigue figurant à l'avenant, relative au calcul du montant loyer, nécessite une interprétation sur laquelle les parties ont varié et sont en désaccord, impliquant de déterminer si le fait que la valeur plancher prévue 'en fin de bail' est de même montant que la valeur plafond, révèle l'intention des parties de revenir, au terme du contrat, et donc avant un éventuel renouvellement, à un système de loyer fixe.

Il existe donc une contestation sérieuse sur l'exigibilité des sommes réclamées dans le commandement de payer, faisant obstacle à l'exercice des pouvoirs du juge des référés.

L'ordonnance critiquée doit en conséquence être infirmée en ce qu'elle a constaté l'acquisition de la clause résolutoire du contrat de bail, et en ces dispositions en découlant, à savoir la suspension rétroactive des effets de la clause résolutoire ainsi que de la clause pénale, l'expulsion de la société International Hôtel des locaux, ainsi que la condamnation de la société International Hôtel au paiement d'une indemnité d'occupation.

Sur la demande au titre de l'arriéré locatif

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure prévoit que le président du tribunal judiciaire peut dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

En application de ce texte, le montant de la provision qui peut être allouée en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

En l'espèce, si les parties s'accordent sur la somme sollicitée par la société civile immobilière La Fontaine au titre des loyers fixes, elles sont en désaccord sur l'interprétation de la clause figurant à l'avenant du bail commercial en date du 24 mars 2002, relative au montant du loyer.

La détermination des sommes dues par la société International Hôtel au titre de l'arriéré locatif suppose une interprétation de cette clause ambigue, laquelle excède la compétence du juge des référés.

Par conséquent, en l'état de la contestation sérieuse sur les sommes réclamées par la société civile immobilière La Fontaine en paiement des loyers, il n'y a lieu à référé sur la demande en paiement de l'arriéré locatif.

Du reste, il est prévu au contrat de bail que 'sans qu'il soit dérogé à la présente clause résolutoire, le preneur s'engage, en cas de non-paiement à régler au bailleur en plus des loyers, charges et frais réclamés, une pénalité de 10% du montant de la somme dûe pour couvrir celui-ci des frais exposés par lui pour obtenir le règlement des sommes impayées et ce non compris les frais taxables légalement à la charge du preneur', laquelle 'sera applicable dans un délai de 8 jours de la notification par lettre recommandée avec avis de réception.'

En l'état de la contestation sérieuse relative au montant des loyers dus sur la base desquels doit être calculé le montant de la clause pénale, il n'y a lieu à référé sur la demande au titre de cette clause pénale.

Enfin, l'obligation de restitution des sommes perçues en vertu d'une décision assortie de l'exécution provisoire résulte de plein droit de sa réformation. Il n'y a lieu par conséquent de statuer sur la demande de l'appelante tendant à la condamnation de la société civile immobilière La Fontaine à lui rembourser l'intégralité des échéances par elle versées au titre des provisions à valoir sur les loyers des années 2018 et 2019.

Sur la demande au titre des travaux de réfection de la toiture

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure prévoit que le président du tribunal judiciaire peut dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

A l'avenant signé le 24 mars 2002, il a été convenu entre les parties que le preneur s'engageait à exécuter aux lieu et place du bailleur, toutes les réparations qui pourraient être nécessaires dans les lieux loués, y compris les grosses réparations.

Toutefois, aux termes de l'article R. 145-35 du code de commerce, dans sa version issue de l'article 6 du décret n°2014-1317, ne peuvent être imputées au locataire les dépenses relatives aux grosses réparations mentionnées à l'article 606 du code civil ainsi que, le cas échéant, les honoraires liés à la réalisation de ces travaux, et selon l'article 8 alinéa 2 du décret n°2014-1317 du 3 novembre 2014, ces dispositions sont applicables aux contrats conclus ou renouvelés à compter de la publication du décret, soit le 5 novembre 2014.

En l'espèce, les parties s'accordent pour indiquer que le contrat a été renouvelé à compter du 1er avril 2022.

Il s'ensuit qu'à compter de cette date, la clause prévoyant que le preneur prenait en charge toutes les réparations qui pourraient être nécessaires dans les lieux loués, y compris les grosses réparations, n'était plus applicable, celles-ci incombant donc au bailleur.

La société International Hôtel produit un procès-verbal de constat réalisé le 14 mars 2023 par maître [C] [V], commissaire de justice, duquel il ressort qu'il existe des infiltrations d'eau dans la salle de restaurant, que le plafond de la salle dite 'réfectoire' est humide, que des cloquages avec des auréoles ainsi que des traces d'humidité sont visibles dans les chambres portant les numéros 905, 907, 908, 910 et 912, et dans la salle dite 'Grand Viaduc', que de l'eau s'infiltre à proximité de la trappe de désenfumage située sur le palier du neuvième étage et que de l'eau stagne sur le toit-terrasse sur lequel des colmatages sont visibles.

De plus, l'appelante justifie avoir fait réaliser un devis par la société Soprassistance, laquelle a évalué le 17 mars 2023 les travaux de réfection de la toiture à la somme de 126 640, 92 euros ttc.

Il n'est pas contesté que les travaux de réfection de la toiture de l'immeuble loué par la société International Hôtel constitue une grosse réparation, concernant la structure et la préservation de l'immeuble.

Cependant, est versée aux débats une attestation de M. [D] [T], salarié de la société International Hôtel, qui explique qu'en sa qualité de responsable technique de la maintenance et de l'entretien du 27 avril 2021 au 6 mai 2022, il a mis en garde la direction concernant les infiltrations du toit terrasse, lesquelles l'ont amené à retirer de la location les chambres victimes de dégâts. L'auteur de l'attestation précise également qu'il avait été chargé d'accompagner une entreprise de couverture pour l'établissement d'un devis mais qu'au vu du montant du devis, le président directeur général de la société International Hôtel a refusé d'y donner suite.

Au vu de cette attestation précise et circonstanciée, qui ne saurait être écartée au seul motif que son auteur a pu entretenir des relations avec M. [R] [N], il est établi que les désordres résultant des infiltrations d'eau sont apparus avant la date de renouvellement du bail, c'est à dire à une date à laquelle les grosses réparations incombaient au preneur.

Ceci ressort du reste des déclarations faites par M. [Y], directeur de l'établissement, au commissaire de justice, à l'occasion de l'établissement du procès-verbal de constat du 14 mars 2023, celui-ci ayant évoqué des infiltrations d'eau s'étant produites 'il y a plusieurs années'.

Dans ces conditions, est sérieusement discutable l'imputabilité à la bailleresse des travaux de réfection de la toiture.

Au surplus, aucune autre pièce n'est produite, et notamment aucune mesure d'expertise, de sorte qu'il est impossible de connaître précisément la date d'apparition des désordres, ainsi que leur ampleur et leurs conséquences.

Dans ces conditions, en l'état de la contestation sérieuse sur l'imputabilité à la bailleresse des travaux de réfection de la toiture, il n'y a lieu à référé sur la demande formée à ce titre.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La société civile immobilière La Fontaine, partie succombante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Elle sera du reste condamnée à verser à la société International Hôtel une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme l'ordonnance rendue le 25 mai 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande relative à la réfection de la toiture,

La réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes formées par la société civile immobilière La Fontaine tendant au constat de la résiliation du bail, à l'expulsion de la locataire et à sa condamnation au paiement d'une provision au titre de l'arriéré locatif, de la clause pénale et de l'indemnité d'occupation,

Condamne la société civile immobilière La Fontaine à verser à la société International Hôtel une somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la société civile immobilière La Fontaine de sa demande fomée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société civile immobilière La Fontaine aux dépens de première instance et d'appel.