CA Colmar, ch. 1 a, 3 décembre 2023, n° 21/03489
COLMAR
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
AJ-RS (Selarl)
Défendeur :
Sebil (SAS), SCI GS
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Walgenwitz
Conseillers :
M. Roublot, Mme Rhode
Avocats :
Me Spieser, Me Schneider, Me Reins, Me Grivaud
FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par assignations à jour fixe délivrées les 3 et 4 mai 2021, la SCI GS a fait citer la SAS SEBIL, la SELARL AJ-RS, prise en la personne de Maître [I] [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance de la SAS SEBIL, Me [U] [H] en sa qualité de mandataire au redressement de la SAS SEBIL et M. [C] [O], devant la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Strasbourg.
Par jugement du 9 juillet 2021, la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Strasbourg a :
'DIT et JUGE la SAS SEBIL et monsieur [C] [O] occupants sans droit ni titre des locaux sis [Adresse 2] à [Localité 7].
ORDONNE leur expulsion, ainsi que celles de tous occupants de leur chef des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 7], au besoin avec l'assistance de la force publique, un mois après la signification de la présente décision.
ORDONNE l'enlèvement des biens se trouvant dans les lieux, aux frais et risques de la SAS SEBIL, respectivement de son administrateur judiciaire et de monsieur [C] [O].
ORDONNE cette expulsion sous astreinte comminatoire de 500 € par jour de retard, jusqu'à parfait délaissement.
CONDAMNE la SAS SEBIL et la SELARL AJ-RS en la personne de maître [N] es qualité d'administrateur de la SAS SEBIL, conjointement et in solidum avec monsieur [C] [O] aux entiers frais et dépens de la procédure, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
RAPPELE le caractère exécutoire de la présente décision'.
La SELARL AJ-RS, prise en la personne de Me [N], en qualité d'administrateur judiciaire de la SAS SEBIL, la SAS SEBIL, Me [U] [H], en qualité de mandataire judiciaire de la SAS SEBIL, et M. [C] [O], ont interjeté appel de cette décision par déclaration déposée le 26 juillet 2021.
La SCI GS s'est constituée intimée le 2 septembre 2021.
Par ordonnance du 4 octobre 2021, la présidente de chambre agissant sur délégation de la première présidente de la Cour d'appel de Colmar a ordonné le sursis à l'exécution provisoire du jugement rendu le 9 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg.
La clôture de la procédure a été prononcée le 28 mars 2022 et l'affaire renvoyée à l'audience de plaidoirie du 25 avril 2022.
Dans un arrêt du 9 novembre 2022, la cour a ordonné la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture, afin que les parties présentent leurs observations sur l'incidence de la décision rendue par la Cour d'Appel le 9 Novembre 2022, sur l'appel interjeté contre le jugement rendu le 25 Juin 2021 par la chambre des procédures collectives du Tribunal judiciaire de Strasbourg.
Dans sa motivation, la cour a rappelé que :
'En 2011, la société MUTEVELLI SUPERMARKET a conclu un bail commercial portant sur des locaux, [Adresse 6] à [Localité 7] dont la SARL PRIMO était alors propriétaire.
Par suite, ces locaux ont été acquis par la SCI GS.
Par jugement en date du 04 février 2019, la chambre des procédures collectives commerciales du Tribunal de grande instance de STRASBOURG a prononcé à l'encontre de la SARL MUTEVELLI l'ouverture d'une procédure de sauvegarde de justice.
Par un jugement du Tribunal judiciaire de STRASBOURG du 27 janvier 2020, la procédure de sauvegarde à l'encontre de la SARL MUTEVELLI SUPERMARKET a été convertie en liquidation judiciaire.
Dans ce cadre, Me [B] a été désigné en qualité de liquidateur de la SARL MUTEVELLI SUPERMARKET et a déposé, le 29 janvier 2020 une requête tendant à la vente de gré à gré du fonds de commerce propriété de la SARL MUTEVELLI.
Par une ordonnance du 31 janvier 2020, M. le Juge Commissaire a autorisé la vente de gré à gré du fonds de commerce et ce inclus le droit au bail, propriété de la SARL MUTEVELLI SUPERMARKET, au profit de la SAS SEBIL ou de toute autre personne s'y substituant, moyennant un prix de cession de 90 000 euros, comprenant les éléments corporels et incorporels du fonds.
Le fonds de commerce susmentionné a fait l'objet d'une cession régularisée par acte sous seing privé daté du 25 février 2020.
Par déclaration faite au greffe le 08 juillet 2020, la SCI GS a interjeté appel de l'ordonnance du 31 janvier 2020 considérant que Me [B] n'aurait pas accompli certaines diligences auprès du bailleur ni requis auprès du Juge Commissaire, l'autorisation de céder le bail dans le respect des dispositions de l'article L.641-12 du Code de commerce et donc que le Juge Commissaire aurait excédé ses pouvoirs dès lors qu'il n'était pas saisi d'une requête en autorisation de cession de bail en l'autorisant dans son ordonnance.
Par un arrêt rendu le 22 Mars 2021, la Cour d'Appel de Colmar a :
Déclaré recevable le recours formé par la SCI GS,
Confirmé l'ordonnance rendue le 31 janvier 2020, par M. le Juge Commissaire du Tribunal Judiciaire de Strasbourg,
Y Ajoutant,
Condamné la SCI GS aux entiers dépens,
Condamné la SCI GS à verser à Maître [B] en qualité de mandataire liquidateur de la SARL MUTEVELLI MARKET, la somme de 1500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamné la SCI GS à verser à la société SEBIL, la somme de 1000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La Cour d'Appel pour confirmer l'ordonnance critiquée du juge commissaire a retenu :
- que la cession du fonds de commerce a été notifiée par courrier recommandé du 13 Mars 2020 avec demande d'avis de réception à la société PRIMO, bailleur initial.
- que ce courrier a été retourné avec la mention 'inconnu à cette adresse.'
- que l'acte de cession, du 16 décembre 2014, de l'immeuble dans lequel la société MUTEVELLI SUPERMARKET disposait d'un fonds de commerce, devait être notifié au locataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, par l'acquéreur directement, conformément aux dispositions contenues en page 12 de cet acte.
- que la SCI GS ne justifie pas avoir effectué cette démarche, et que dans ces conditions, le mandataire judiciaire et le juge commissaire ne pouvaient pas avoir connaissance de la cession du bail et du nouveau bailleur à la date à laquelle la décision entreprise a été rendue.
- que ce n'est qu'à compter du courrier recommandé du 05 Mars 2020, par lequel la SCI GS a déclaré entre les mains de Maître [B], sa créance de loyers et d'avances sur charges dus au titre du mois de février 2020, qu'il a été porté à la connaissance du mandataire, que le nouveau bailleur serait la société GS.
- que les factures produites aux débats par la SCI GS, pour justifier qu'elle avait sollicité le paiement des loyers et charges auprès de la société MUTEVELLI, sont établies sur du papier qui porte en fin de page la mention 'PRIMO eurl au capital de 100 000 € siren FR 432 142 503000'.
- que dans ces conditions, ces documents ne sont pas de nature à démontrer que la société MUTEVELLI avait connaissance de la cession de l'immeuble et du changement de bailleur.
- que la qualité de bailleur invoquée par la SCI GS était inopposable à la société MUTEVELLI et au mandataire judiciaire et l'agrément de la SCI GS n'était pas requis pour la validité de l'ordonnance entreprise.
Cette décision régulièrement signifiée n'a pas fait l'objet d'un pourvoi en cassation et est définitive.
Aucun élément nouveau ne justifie que la Cour apprécie différemment les éléments du litige, dans la présente instance et dans ces conditions la Cour ne retiendra pas le moyen soulevé par la SCI GS tiré notamment de l'absence de respect de la clause d'agrément figurant dans le bail initial.
Or, la lecture de la décision entreprise établit que les premiers juges ont statué sans tenir compte de l'arrêt rendu par la Cour d'appel le 22 Mars 2021, et ont jugé que la SAS SEBIL et son gérant étaient occupants sans droit ni titre, en interprétant l'ordonnance du juge-commissaire rendue le 31 Janvier 2020, alors qu'une instance portant sur la résiliation du bail était pendante devant la chambre commerciale chargée des procédures collectives.
La cour d'appel dans son arrêt du 22 Mars 2021, a retenu que la SCI GS ne pouvait se prévaloir de sa qualité de bailleur qu'à partir du 05 Mars 2020.
Par une requête en date du 2 juin 2020, la SCI GS, estimant n'avoir jamais été réglée au titre des échéances locatives mensuelles du bail commercial pourtant poursuivi, a saisi le Juge Commissaire près le Tribunal judiciaire de STRASBOURG d'une requête aux fins de constat de la résiliation de plein droit dudit bail sur le fondement de l'article L.641-12 du Code de commerce.
Le Tribunal judiciaire a statué sur cette requête et par jugement daté du 25 juin 2021, il a infirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge commissaire en date du 9 novembre 2020 et a constaté la résiliation de plein droit du bail portant sur les locaux sis [Adresse 2] en fixant les effets de cette résiliation au 27 avril 2020 et appel a été interjeté contre cette décision.
Ce jugement a fait l'objet d'un recours devant la Cour d'Appel, qui par décision du 9 Novembre 2022, a infirmé cette décision en ce qu'elle avait prononcé la résiliation du contrat de bail.
La décision de la Cour d'Appel a une incidence sur la solution du litige car dès lors que la décision ayant prononcé la résiliation du bail a été infirmée, la SAS SEBIL et son gérant ne peuvent pas être jugés comme étant occupants sans droit ni titre.
Il convient en conséquence, d'ordonner la réouverture des débats afin que les parties présentent leurs observations sur l'incidence de la décision rendue par la Cour d'Appel le 9 Novembre 2022, sur l'appel interjeté contre le jugement rendu le 25 Juin 2021 par la chambre des procédures collectives du Tribunal judiciaire de Strasbourg'.
Dans leurs dernières conclusions en date du 5 septembre 2023, auxquelles est joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, la SAS SEBIL, la SELARL AJ-RS, prise en la personne de Me [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance de la SAS SEBIL, Me [H], en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SAS SEBIL et M. [C] [O], demandent à la cour de :
'DECLARER la SAS SEBIL, la SELARL AJ-RS, prise en la personne de Maître [N], ès qualité d'administrateur judiciaire de la SAS SEBIL, Maître [H], ès qualité de mandataire judiciaire de la SAS SEBIL et Monsieur [O] recevables et bien fondés en leurs appels ;
Y faisant droit
INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Strasbourg dans son intégralité en ce qu'il a ;
DIT et JUGE la SAS SEBIL et monsieur [C] [O] occupants sans droit ni titre des locaux sis [Adresse 2] à [Localité 7].
ORDONNE leur expulsion, ainsi que celles de tous occupants de leur chef des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 7], au besoin avec l'assistance de la force publique, un mois après la signification de la présente décision.
ORDONNE l'enlèvement des biens se trouvant dans les lieux, aux frais et risques de la SAS SEBIL, respectivement de son administrateur judiciaire et de monsieur [C] [O].
ORDONNE cette expulsion sous astreinte comminatoire de 500 € par jour de retard, jusqu'à parfait délaissement.
CONDAMNE la SAS SEBIL et la SELARL AJ-RS en la personne de maître [N] es qualité d'administrateur de la SAS SEBIL, conjointement et in solidum avec monsieur [C] [O] aux entiers frais et dépens de la procédure, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
RAPPELE le caractère exécutoire de la présente décision.
STATUANT A NOUVEAU :
DECLARER les demandes de la SCI GS irrecevables et non fondées,
DEBOUTER la SCI GS de l'intégralité de ses demandes ;
DEBOUTER la SCI GS de l'intégralité de ses demandes formées à hauteur d'appel ;
CONDAMNER la SCI GS à payer à la SAS SEBIL, la SELARL AJ-RS, prise en la personne de Maître [I] [N], ès qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance de la société SAS SEBIL, Maître [U] [H] es qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SAS SEBIL, et Monsieur [C] [O], la somme de 5.000 € chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance'.
Au soutien de leurs prétentions, la SAS SEBIL, La SELARL AJ-RS, prise en la personne de Me [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance de la SAS SEBIL, Me [H], en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SAS SEBIL et M. [C] [O], font valoir que :
- Les premiers juges ont omis de prendre en compte l'arrêt rendu par la cour d'appel en date du 22 mars 2021 qui avait confirmé l'ordonnance du juge commissaire rendue le 31 janvier 2020 par laquelle il avait autorisé la vente de gré à gré du fonds de commerce litigieux en ce inclus le droit au bail commercial au profit de la société SEBIL, décision désormais définitive,
- Dans le cadre de cessions des biens du débiteur autorisées en vertu de l'article L642-19 du code de commerce, la vente est parfaite dès la décision du juge commissaire, sous condition suspensive que celle-ci devienne définitive,
- Même pour les ventes nécessitant un acte concrétisant le transfert de propriété, la décision du juge commissaire vaut vente et l'on ne peut y déroger.
Dans ses dernières écritures datées du 12 septembre 2023, auxquelles est joint un bordereau de communication de pièces qui n'a fait l'objet d'aucune contestation des parties, la SCI GS demande à la cour de :
'DECLARER l'appel recevable mais non fondé, le REJETER
DÉBOUTER la SAS SEBIL, la SELAR AJ-RS agissant par Me [I] [N] est qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, Me [U] [H] es qualité de Mandataire Judiciaire de la SAS SEBIL et Monsieur [C] [O] de l'intégralité de leurs demandes, fins, moyens et prétentions,
DECLARER les demandes de la concluante recevables et bien fondées,
FAIRE DROIT à l'ensemble des demandes, fins et prétentions de la concluante,
CONFIRMER le Jugement entrepris en toutes ses dispositions,
En conséquence,
DÉCLARER voire JUGER la SAS SEBIL, respectivement la SELAR AJ-RS agissant par Me [I] [N] est qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, Me [U] [H] es qualité de Mandataire Judiciaire de la SAS SEBIL et Monsieur [C] [O] occupants sans droit ni titre des locaux sis [Adresse 2] à [Localité 7],
ORDONNER leur expulsion, ainsi que celle de tous occupants de leur chef, des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 7] avec, au besoin, assistance de la Force Publique et sans délai à compter de la signification de la décision à intervenir,
ORDONNER l'enlèvement des biens et facultés mobilières se trouvant dans les lieux en un lieu approprié, aux frais, risques et périls de la SAS SEBIL, respectivement de son Administrateur Judiciaire et de Monsieur [C] [O],
ORDONNER cette expulsion sous astreinte définitive de 500,00 € (cinq cents euros) par jour de retard jusqu'à parfait délaissement,
Et par ailleurs,
CONDAMNER la SAS SEBIL et la SELARL AJ-RS en la personne de Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, conjointement et solidairement ou in solidum avec Monsieur [C] [O] au versement d'une indemnité d'occupation d'un montant de 8.136,00 € par mois avec effet au mois de novembre 2020 et jusqu'à parfait délaissement,
CONDAMNER la SAS SEBIL et la SELARL AJ-RS en la personne de Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, conjointement et solidairement ou in solidum avec Monsieur [C] [O] au paiement de la somme de 768,50 € ;
Et dans tous les cas,
CONDAMNER la SAS SEBIL, la SELARL AJ-RS agissant par Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, conjointement et solidairement ou in solidum entre eux avec Monsieur [C] [O] aux entiers frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel,
CONDAMNER la SAS SEBIL, la SELAR AJ-RS agissant par Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, Me [U] [H] es qualité de Mandataire Judiciaire de la SAS SEBIL, conjointement et solidairement ou in solidum entre eux avec Monsieur [C] [O] au versement d'une indemnité de 10.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile'.
Au soutien de ses prétentions, la SCI GS fait valoir que :
- En cas de liquidation judiciaire, la cession du droit au bail, seule ou même inclue dans celle du fonds de commerce, autorisée par le juge commissaire, se fait aux conditions prévues par le contrat à la date du jugement d'ouverture,
- Le bail n'a jamais été valablement transféré à la SAS SEBIL faute de respect de la clause d'agrément et de réitération de la cession par acte authentique,
- Le transfert de propriété du fonds ne s'opère, s'il n'en est autrement décidé par l'ordonnance du juge commissaire, qu'à la date de la passation des actes nécessaires à la réalisation de la vente,
- Seul le dispositif de l'arrêt de la Cour du 22 mars 2021 est revêtu de l'autorité de chose jugée soit l'autorisation de la cession du fonds de commerce,
- Dans la motivation de son arrêt 21/3126, la cour a, à tort, considéré que la vente serait parfaite par l'ordonnance du juge commissaire sans distinction entre la vente de gré à gré et la cession d'actif isolé qui implique le respect des clauses du contrat de bail,
- Le bail est arrivé à échéance avant que la décision autorisant le transfert du fonds de commerce n'ait acquis force de chose jugée ;
- Le local n'est plus occupé par la société SEBIL qui a cédé illicitement un droit d'occupation dont elle ne disposait pas légitiment,
- La société SEBIL ne règle pas sa consommation d'eau.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de chacune des parties, il conviendra de se référer à leurs dernières conclusions respectives.
La clôture de la procédure a été prononcée le 11 octobre 2023 et l'affaire renvoyée à l'audience de plaidoirie du 23 octobre 2023.
Lors de l'audience, la Cour a invité les parties à présenter leurs observations, via une note en délibéré, sur la demande présentée par la SCI GS de condamnation de la SAS SEBIL, la SELARL AJ-RS agissant par Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, Me [U] [H] es qualité de Mandataire Judiciaire de la SAS SEBIL, conjointement et solidairement ou in solidum entre eux avec Monsieur [C] [O], au paiement de la somme de 768,50 € au titre de la consommation d'eau, demande qui n'était pas présentée dans ses premières conclusions.
Les 24 octobre et 25 novembre 2023, la SCI GS a déposé des notes en délibéré.
Le 13 novembre 2023, la SAS SEBIL, la SELARL AJ-RS, prise en la personne de Me [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire avec mission d'assistance de la SAS SEBIL, Me [H], en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire de la SAS SEBIL et M. [C] [O], ont déposé une note en délibéré.
Motivation
MOTIFS :
Sur les notes en délibéré :
Aux termes de l'article 445 du code de procédure civile, après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444.
Lors de l'audience du 23 octobre 2023, la Cour a invité les parties à présenter leurs observations, via une note en délibéré, sur la demande présentée par la SCI GS de condamnation de la SAS SEBIL, la SELARL AJ-RS agissant par Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, Me [U] [H] es qualité de Mandataire Judiciaire de la SAS SEBIL, conjointement et solidairement ou in solidum entre eux avec Monsieur [C] [O], au paiement de la somme de 768,50 € au titre de la consommation d'eau, demande qui n'était pas présentée dans ses premières conclusions.
Les parties ont déposé des notes en délibéré sur cette question les 24 octobre, 13 et 25 novembre 2023.
Ces notes concernent la question soulevée par la cour et ont été autorisées par elles.
Il n'y a en conséquence pas lieu de les écarter des débats.
Sur l'irrecevabilité des demandes de la SCI GS :
Aux termes de l'article 910-4 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
En l'espèce, dans ses dernières conclusions, la SCI GS demande à la cour de condamner la SAS SEBIL et la SELARL AJ-RS en la personne de Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, conjointement et solidairement ou in solidum avec Monsieur [C] [O], au paiement de la somme de 768,50 €.
Cette demande ne figurait pas dans le dispositif de ses premières conclusions, qui ne contenaient aucune prétention relative aux charges locatives, de sorte qu'elle sera déclarée irrecevable.
Pour le surplus, les appelants demandent à la cour de déclarer les prétentions de la SCI GS irrecevables.
Toutefois, ils n'évoquent aucun moyen au soutien de leur prétention, de sorte qu'elle sera rejetée.
Sur la cession du droit au bail :
L'article 1134 du code civil, dans sa version application au litige, dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Aux termes de l'article L641-12 du code de commerce, le liquidateur peut céder le bail dans les conditions prévues au contrat conclu avec le bailleur avec tous les droits et obligations qui s'y rattachent.
Ainsi, le liquidateur doit respecter les conditions prévues au contrat de bail, notamment les clauses restreignant la cession telle que la clause d'agrément du bailleur et la clause imposant la rédaction d'un acte authentique (Cass. Civ. 3ème, 17 juin 2014, n°13-15119).
Par ailleurs, il résulte des articles L642-19 du code de commerce et 1583 du code civil que la vente, qu'il s'agisse d'un actif mobilier ou d'un actif immobilier, est parfaite dès l'ordonnance du juge commissaire, sous la condition suspensive que celle-ci acquière force de chose jugée (Cass. Com. 11 mars 2020, n°18-25504 et Com. 8 mars 2017, n°15-21945).
La décision du juge commissaire ne peut devenir irrévocable, que si elle est notifiée aux parties et aux personnes, dont les droits sont susceptibles d'être affectés par elle.
En l'espèce, le contrat de bail conclu le 26 septembre 2011 entre la SARL PRIMO et la SARL MUTEVELLI SUPERMARKET, stipule que 'Cession - Sous Location - Cession de Parts : Le preneur ne pourra dans aucun cas et sous aucun prétexte céder son droit au présent bail, ni sous-louer en tout ou en partie les lieux loués, sans le consentement exprès et par écrit du bailleur, sauf toutefois dans le cas de cession à son successeur dans son commerce (ce dernier devant toutefois avoir obtenu au préalable et par écrit l'agrément du bailleur). (') En outre, toute cession ou sous-location devra avoir lieu moyennant un loyer égal à celui-ci-après fixé, qui devra être stipulé payable directement entre les mains du bailleur, et devra être réalisée par acte authentique, auquel le bailleur sera appelé, et dont une copie lui sera remise, sans frais pour lui'.
Par ordonnance du 31 janvier 2020, le juge commissaire a autorisé la vente de gré à gré du fonds de commerce et ce inclus le droit au bail, propriété de la SARL MUTEVELLI SUPERMARKET au profit de la SAS SEBIL, ou de toute autre personne s'y substituant, moyennant un prix de cession de 90 000 euros, comprenant les éléments corporels et incorporels du fonds.
Le 25 février 2020, un acte sous seing privé de cession du fonds de commerce a été conclu entre la société MUTEVELLI SUPERMARKET, en liquidation judiciaire, et la SAS SEBIL.
La clause d'agrément et la clause imposant la rédaction d'un acte authentique, n'ont pas été respectées.
La SCI GS a interjeté appel de la décision rendue par le juge commissaire.
Dans son arrêt du 22 mars 2021, la Cour d'appel a retenu que :
- La société GS était recevable en son appel en sa qualité de tiers soutenant que l'ordonnance entreprise avait affecté ses droits,
- la cession du fonds de commerce a été notifiée par courrier recommandé du 13 mars 2020 à la société PRIMO, bailleur initial,
- L'acte de cession du 16 décembre 2014 de l'immeuble dans lequel la société MUTEVELLI SUPERMARKET disposait d'un fonds de commerce n'a pas été notifié au locataire par l'acquéreur conformément aux dispositions contenues en page 12 de cet acte,
- Ce n'est qu'à compter du 5 mars 2020 qu'il a été porté à la connaissance du mandataire que le nouveau bailleur serait la société GS,
- La qualité de bailleur invoquée par la SCI GS était inopposable à la société MUTEVELLI et au mandataire judiciaire,
- L'agrément de la société GS n'était pas requis pour l'autorisation de la cession de gré à gré du fonds de commerce et la société GS ne démontre pas que ses droits ont été affectés par l'ordonnance entreprise.
En conséquence, la Cour d'appel a confirmé l'ordonnance rendue le 31 janvier 2020 par le juge commissaire du tribunal judiciaire de Strasbourg.
Cette décision n'a pas fait l'objet d'un pourvoi en cassation. Elle est à ce jour définitive.
Il en résulte, conformément à la jurisprudence susvisée, que la vente est parfaite.
Dès lors, les appelants ne peuvent être expulsés du local litigieux, au motif qu'ils en seraient occupants sans droit ni titre, et le jugement du 9 juillet 2021 sera infirmé dans l'ensemble de ses dispositions, telles que déférées à la cour.
Enfin, le fait que les locaux litigieux soient désormais exploités par une société tierce, sans information ni agrément du bailleur, est indifférent à l'issue du présent litige, de sorte que la cour n'examinera pas le bien fondé de ce moyen. Il en va de même pour les paiements tardifs des loyers.
Sur les demandes accessoires :
Eu égard à l'issue du litige, le jugement rendu le 9 juillet 2021 sera infirmé sur ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.
La SCI GS sera condamnée aux dépens des procédures de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à la SAS SEBIL la somme de 3 500 €, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
P A R C E S M O T I F S
La Cour,
Dispositif
Déclare recevables les notes en délibéré déposées par les parties,
Déclare irrecevable la demande présentée par la SCI GS, tendant à la condamnation de la SAS SEBIL, la SELAR AJ-RS agissant par Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, Me [U] [H] es qualité de Mandataire Judiciaire de la SAS SEBIL, conjointement et solidairement ou in solidum entre eux avec Monsieur [C] [O], au paiement de la somme de 768,50 € au titre de la consommation d'eau,
Déclare la SCI GS recevable en ses prétentions pour le surplus,
Infirme le jugement rendu le 9 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg, tel que déféré à la cour,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la SCI GS de sa demande d'expulsion de la SAS SEBIL, respectivement la SELAR AJ-RS agissant par Me [I] [N] es qualité d'Administrateur Judiciaire de la SAS SEBIL, Me [U] [H] es qualité de Mandataire Judiciaire de la SAS SEBIL et Monsieur [C] [O], en leur qualité d'occupants sans droit ni titre des locaux sis [Adresse 2] à [Localité 7], et de ses demandes subséquentes,
Condamne la SCI GS aux dépens de la procédure de première instance et d'appel,
Condamne la SCI GS à payer à la SAS SEBIL la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la SCI GS de ses prétentions au titre des dépens et frais irrépétibles.