Livv
Décisions

CA Agen, ch. civ., 29 novembre 2023, n° 22/00254

AGEN

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Odile Stutz (SCP)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauclair

Conseillers :

M. Benon, Mme Rigault

Avocats :

Me Hamadache, Me Dubuisson, Me Drigo, Me Baudouin

TJ Agen, du 25 janv. 2022, n° 19/01203

25 janvier 2022

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 29 juin 2017, les époux [D] [A] et [Z] [T], en instance de divorce, ont signé un mandat de vente exclusif avec l'agence immobilière VALADIE IMMOBILIER, portant sur un bien immobilier sis [Adresse 2] à [Localité 3] (47) cadastré section AB n°[Cadastre 5]-[Cadastre 6]-[Cadastre 7], leur appartenant en indivision.

Aux termes d'une lettre d'intention d'achat du 15 juillet 2017, les époux [U] [B] et [X] [Y] ont fait une offre d'achat portant sur ce bien moyennant un prix de 177.400 euros, frais d'agence inclus.

Le 05 septembre 2017, la SCP Odile STUTZ, agissant es-qualité de liquidateur de M. [A], artisan, a adressé un courrier aux époux [B], leur indiquant qu'elle devait présenter une requête au juge commissaire afin d'être autorisée à signer l'acte de vente de ce bien indivis, et les invitant à lui adresser un chèque d'arrhes de 10 % du prix proposé, qui resterait définitivement acquis à la procédure en cas de désistement pour un motif autre que la non-survenance d'une des éventuelles conditions suspensives énoncées dans leur proposition.

Le 29 septembre 2017, les époux [B] ont émis une offre ferme d'acquisition pour un prix de 170.000,00 euros net vendeur, et adressé un chèque d'arrhes de 17.000,00 euros à la SCP ODILE STUTZ.

Par ordonnance en date du 23 janvier 2018, le juge commissaire à la liquidation judiciaire de M. [A] a autorisé la SCP Odile STUTZ, es-qualités à :

- signer l'acte relatif à la cession du bien immobilier,

- percevoir les droits indivis revenant à la procédure de liquidation judiciaire de M. [A], déduction faite des frais notariés qui grèveraient la vente, et du règlement des créances de l'indivision.

Cette ordonnance précisait qu'il était pris acte de ce que l'acquéreur avait versé au titre d'arrhes la somme de 17.000 euros à la SCP Odile STUTZ, et que cette somme resterait acquise à la procédure, à titre de dommages et intérêts, en cas de désistement injustifié de la part de l'acquéreur.

Par courrier en date du 24 janvier 2018, la SCP Odile STUTZ a demandé à la SCP BRUGALIERES-SAVARD, Notaire chargé de la rédaction des actes, de procéder à l'établissement de l'acte de vente dans les meilleurs délais.

Par courriers recommandés avec accusés de réception du 07 juin 2018, Maître [K] [S], Notaire, a transmis aux époux [B] un projet de l'acte authentique de vente de l'immeuble qu'il était chargé de recevoir, leur précisant qu'ils disposaient d'un délai de réflexion de dix jours pour l'informer de leur volonté de renoncer à la signature.

La réitération de la vente par acte authentique n'est pas intervenue.

Par courrier et courriel en date du 03 août 2018, le conseil des époux [B] a sollicité auprès de la SCP Odile STUTZ la restitution des fonds versés à titre d'arrhes.

Le 11 octobre 2018, Maître [K] [S] a dressé un procès-verbal de difficultés.

Par courrier recommandé avec accusé de réception et courriel en date du 23 janvier 2019, le conseil des époux [B] a mis la SCP Odile STUTZ en demeure de leur restituer sous huitaine le dépôt de garantie versé.

Par courrier en date du 11 mars 2009, la SCP Odile STUTZ a fait part de son refus de restituer les arrhes de 17.000,00 euros versés au soutien de leur offre.

Par courrier recommandé en date du 29 avril 2019, le conseil des époux [B] a, à nouveau, mis la SCP Odile STUTZ en demeure de leur restituer le dépôt de garantie versé.

Saisi par requête de la SCP Odile STUTZ en date du 10 avril 2019 visant à ce que soit constaté le désistement fautif des époux [B], et à être autorisée à conserver la somme de 17.000 euros, versée à l'appui de leur offre d'acquisition à titre de dommages et intérêts, et par ordonnance en date du 1er août 2019. le juge commissaire du Tribunal de commerce d'AGEN s'est déclaré incompétent, et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Par acte d'huissier en date du 03 juillet 2019, les époux [B] ont fait assigner M. [A], la SCP Odile STUTZ, ès-qualités, et Mme [Z] [T] aux fins de :

voir prononcer la nullité de la vente de l'immeuble,

voir ordonner la restitution des sommes versées par eux et notamment la consignation de 17.000,00 euros versée entre les mains de la SCP Odile STUTZ.

Par actes d'huissier en date des 18 et 19 décembre 2019, la SCP Odile STUTZ a fait assigner M. [A] et Mme [Z] [T] aux fins notamment de voir dire parfaite la vente de l'immeuble litigieux.

Par ordonnance en date du 10 juin 2020, le juge de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux procédures.

Par jugement en date du 25 janvier 2022, le tribunal judiciaire d'AGEN a :

déclaré recevable la demande principale des époux [B] tendant à la nullité de la vente,

débouté les époux [B] de leurs demandes formées sur le fondement du dol,

débouté la SCP Odile STUTZ de sa demande reconventionnelle de constatation judiciaire de la vente de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 3] (47) cadastré section AB n°[Cadastre 5]-[Cadastre 6]-[Cadastre 7],

débouté la SCP Odile STUTZ de sa demande visant à être autorisée es-qualité à conserver la somme de 17.000,00 euros versée par les époux [B],

condamné la SCP Odile STUTZ à restituer aux époux [B] la somme de 17.000,00 euros.

débouté les parties de leurs plus amples demandes.

condamné la SCP Odile STUTZ aux dépens,

condamné la SCP Odile STUTZ à payer aux époux [B] la somme de 2.000,00'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La SCP Odile STUTZ ès qualité a interjeté appel de cette décision par déclaration d'appel en date du 28 mars 2022 intimant M. [U] [B], Mme [X] [Y], M. [D] [A] et Mme [Z] [T]. Tous les chefs du jugement ont été expressément visés dans la déclaration d'appel.

La déclaration d'appel a été régulièrement signifiée à M. [U] [B], Mme [X] [Y], M. [D] [A] par acte du 6 mai 2022, par acte remis à étude, et à Mme [T] par acte du 27 avril 2022.

La SCP Odile STUTZ ès qualité a conclu au fond les 21 juin 2022 et 16 novembre 2022, ne signifiant ses écritures d'appelante ni à [D] [A] ni à [Z] [T]. Les époux [B] ont conclu au fond le 20 septembre 2022.

Par ordonnance en date du 26 avril 2023, le conseiller de la mise en état a':

déclaré caduque la déclaration d'appel de la SCP Odile STUTZ ès qualités en ce qu'elle intime les consorts [D] [A] et [Z] [T],

condamné la SCP Odile STUTZ aux dépens de l'incident.

La clôture a été prononcée le 28 juin 2023, l'affaire fixée à l'audience de la Cour du 2 octobre 2023 et l'arrêt prononcé par mise à disposition le 29 novembre 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS :

Par dernières conclusions récapitulatives N°2 notifiées le 16 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation par application de l'article 455 du code de procédure civile, la SCP Odile STUTZ, en qualité de liquidateur de Monsieur [D] [A], appelante, sollicite de voir':

Recevoir la SCP ODILE STUTZ ès-qualités en ses présentes écritures

Y faisant droit,

Infirmer le jugement du Tribunal Judiciaire d'AGEN du 25 janvier 2022 en ce qu'il a :

Déclaré la demande principale des époux [B] recevable ;

Débouté la SCP ODILE STUTZ ès qualités de sa demande reconventionnelle de constatation judiciaire de la vente de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 3] (47) cadastré section AB n°[Cadastre 5]-[Cadastre 6]-[Cadastre 7] ;

Débouté la SCP ODILE STUTZ ès qualités de sa demande visant à être autorisée à conserver la somme de 17.000 euros versée par les époux [B] ;

Condamné la SCP ODILE STUTZ ès qualités à restituer aux époux [B] la somme de 17.000 euros ;

Débouté les parties de leurs plus amples demandes ;

Condamné la SCP ODILE STUTZ ès qualités aux dépens ;

Condamné la SCP ODILE STUTZ ès qualités à payer aux époux [B] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Et statuant à nouveau,

A titre principal, Vu l'article 1130 du Code civil, Vu l'article 122 du Code de procédure civile, Vu la jurisprudence,

Juger irrecevable la demande formulée par Monsieur [U] [B] et Madame [X] [Y] épouse [B], en nullité de la vente à leur profit de l'immeuble appartenant en indivision à Monsieur [D] [A] et à Madame [Z] [T] ;

Juger en conséquence irrecevable l'ensemble des demandes de Monsieur [U] [B] et Madame [X] [Y], épouse [B], et les en débouter ;

Subsidiairement, Vu l'article L. 642-18 al. 3 du Code de commerce, Vu les articles 1583, 1589, 1130, 113, et 1240 du Code civil, Vu la jurisprudence,

Débouter Monsieur [U] [B] et Madame [X] [Y], épouse [B] de l'ensemble de leurs demandes ;

Reconventionnellement,

A titre principal, Vu l'article L. 642-18 al. 3 du Code de commerce, Vu les articles 1583, 1589 et 1192 du Code civil, Vu les articles 455 et 5 du Code de procédure civile, Vu la jurisprudence,

Dire et juger parfaite la vente entre : la SCP ODILE STUTZ, ès-qualités de mandataire liquidateur de Monsieur [D] [R] [A], Madame [Z] [T], Titulaires de droits indivis en pleine propriété à hauteur de moitié chacun, et Monsieur [U] [B], retraité, et Madame [X] [Y], épouse [B],

Dire et juger que l'arrêt vaudra vente ;

Condamner solidairement Monsieur [U] [B] et Madame [X] [Y] épouse [B] à payer à la SCP ODILE STUTZ ès-qualités et à Madame [Z] [J] [T] le prix de vente et les accessoires d'un montant de 179.871 euros portant intérêts au taux légal à compter du procès-verbal de difficultés en date du 11 octobre 2018 ;

Dire et juger que la SCP ODILE STUTZ ès-qualités bénéficie du privilège du vendeur sur ledit immeuble ;

Ordonner la publicité en marge des hypothèques du jugement à intervenir ;

Désigné tel Notaire à qui le prix sera versé, et qui sera chargé de sa distribution ;

Subsidiairement, Vu l'article L. 642-18 al. 3 du Code de commerce, Vu les articles 1192, 1103 et 1231-1 du Code civil, Vu l'article 12 du Code de procédure civile, Vu la jurisprudence,

Constater le désistement injustifié des époux [B] suite à l'ordonnance du 23 janvier 2018 ;

Autoriser la SCP ODILE STUTZ ès-qualités à conserver la somme de 17.000 euros à titre d'arrhes,

A défaut, condamner Monsieur [U] [B] et Madame [X] [Y], épouse [B], à payer à la SCP ODILE STUTZ la somme de 17.000 euros à titre de dommages-intérêts, et autoriser le liquidateur à conserver cette somme ;

En tout état de cause,

Condamner les époux [B] à payer à la SCP ODILE STUTZ ès-qualités la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner les époux [B] aux dépens.

La SCP ODILE STUTZ ès-qualité, fait valoir :

sur l'irrecevabilité de la demande d'annulation de la vente, les vices du consentement ne peuvent être valablement invoqués par les époux [B] dès lors que la vente a été autorisée par le juge commissaire, et qu'elle constitue une vente de gré à gré, l'autorisation de signer l'acte de vente donnée par le juge commissaire au liquidateur produisant les mêmes effets que l'autorisation de vendre de gré à gré, laquelle vente ne peut être remise en cause par les vices du consentement destinés à s'appliquer au contrat et non à une vente réalisée par une autorité judiciaire,

l'incohérence des demandes des époux [B], lesquels ne peuvent solliciter principalement la confirmation de la décision ayant constaté l'absence de nullité de la vente et l'infirmation de cette même décision au motif de la nullité de la vente intervenue pour être affectée de vices du consentement, à savoir le dol,

les époux [B] ne démontrent pas le dol pour avoir été parfaitement informés de l'occupation par les parents d'un des indivisaires du bien immobilier dont ils projetaient l'acquisition,

l'intention des époux [B] d'occuper le bien immobilier pour y établir leur résidence principale n'est pas rapportée mais au contraire démentie puisqu'ils entendaient effectuer un investissement locatif,

sur la constatation judiciaire de la vente par application de l'article L642-18 alinéa 3 du code du commerce, la vente est parfaite et ne peut plus être remise en cause puisque d'une part le juge commissaire a autorisé ladite vente et d'autre part, la coindivisiaire, Mme [Z] [T] a accepté de conclure la vente,

en première instance les époux [B] n'avaient pas contesté l'absence d'accord sur la chose et le prix, de sorte que la vente doit être constatée comme parfaite, et être prononcée par la juridiction saisie,

la somme de 17000 € doit être conservée par le liquidateur par application de la volonté des parties, s'agissant d'arrhes, qui ne peuvent être restitués en raison de la faute des époux [B] dans la réitération de la vente.

Aux termes de ses écritures notifiées le 20 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation par application de l'article 455 du code de procédure civile, [U] [B] et [X] [B], intimés, sollicitent de voir,

recevoir Monsieur et Madame [B] en leurs écritures, et y faisant droit,

confirmer le jugement du Tribunal judiciaire d'achat du 25 janvier 2022 en ce qu'il a :

déclaré la demande principale des époux [B] recevable

débouté la SCP ODILE STUTZ ès qualité de sa demande reconventionnelle de constatation judiciaire de la vente de l'immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 3] (47) cadastrée section AB n°[Cadastre 5]-[Cadastre 6]-[Cadastre 7].

débouté la SCP ODILE STUTZ ès qualité de sa demande visant à être autorisée à conserver la somme de 17 000 € versée par les époux [B],

condamné la SCP ODILE STUTZ ès qualité à restituer aux époux [B] la somme de 1 7000 €

condamné la SCP ODILE STUTZ ès qualité aux dépens

condamné la SCP ODILE STUTZ ès qualité à payer aux époux [B] la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

infirmer le jugement en ce qu'il a :

débouté Monsieur [U] [B] et Madame [X] [B] de leurs demandes formées sur le fondement du dol,

débouté les parties de leurs plus amples demandes.

Statuant à nouveau,

débouter intégralement la SCP ODILE STUTZ de ses demandes, les déclarées mal fondées,

A titre principal,

dire et juger que Monsieur [D] [A], Madame [Z] [T] et la SCP ODILE STUTZ, ès-qualités de liquidateur de Monsieur [D] [A] ont commis des manœuvres dolosives au préjudice des consorts [B],

dire et juger que les manœuvres dolosives commises par les défendeurs ont vicié le consentement des consorts [B],

juger que la faute dolosive des défendeurs a eu pour conséquence de générer pour les consorts [B] un préjudice distinct de ceux liés strictement au vice de leur consentement.

Par conséquent,

prononcer la nullité de la vente de l'immeuble appartenant en indivision à Monsieur [D] [A] et à Madame [Z] [T] au profit des consorts [B],

ordonner la restitution de toutes les sommes versées en application de l'annulation de la vente notamment de la consignation de 17 000 euros entre les mains de la SCP ODILE STUTZ,

A titre subsidiaire, si tant est que la Cour considère que la vente est parfaite :

dire et juger que Monsieur [D] [A], Madame [Z] [T] et la SCP ODILE STUTZ, ès-qualités de liquidateur de Monsieur [D] [A] ont dissimulé une information essentielle aux consort [B] et ont, par conséquent, engagé leur responsabilité civile en les obligeant à acquérir une maison d'habitation qu'ils ne peuvent occuper,

juger que la faute des défendeurs qui ont caché une information essentielle a eu pour conséquence de générer pour les consorts [B] un préjudice distinct de celui lié strictement à l'impossibilité d'habiter la maison qu'ils envisageaient d'acquérir,

Par conséquent,

condamner in solidum Monsieur [D] [A], Madame [Z] [T], la SCP ODILE STUTZ, ès-qualités de liquidateur de Monsieur [D] [A] à indemniser le préjudice subi par les consorts [B] à hauteur de 170 000 euros au titre de l'impossibilité d'habiter la maison qu'ils avaient pour intention d'acquérir,

ordonner la compensation entre les sommes qui devraient être réglées par les époux [B] au titre de l'acquisition du bien indivis et celle qui seraient allouées aux demandeurs par des défendeurs au titre du préjudice qu'ils subissent ;

condamner in solidum Monsieur [D] [A], Madame [Z] [T], la SCP ODILE STUTZ, ès-qualités de liquidateur de Monsieur [D] [A] à régler aux consorts [B] la somme de 17 000 euros résultant de la compensation,

En tout état de cause,

condamner in solidum Monsieur [D] [A], Madame [Z] [T], la SCP ODILE STUTZ, ès-qualités de liquidateur de Monsieur [D] [A] à indemniser le préjudice subi par les consorts [B] à hauteur de 15 000 euros,

condamner in solidum Monsieur [D] [A], Madame [Z] [T], la SCP ODILE STUTZ, ès-qualités de liquidateur de Monsieur [D] [A] à la somme de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

condamner in solidum Monsieur [D] [A], Madame [Z] [T], la SCP ODILE STUTZ, ès-qualités de liquidateur de Monsieur [D] [A] aux entiers dépens d'instance et d'appel.

[U] [B] et [X] [B] font valoir que':

les dispositions de l'article 815-17 du code civil s'appliquent, de sorte que le bien immobilier indivis, propriété de [D] [A], débiteur, et de [Z] [T], se trouve exclu de la procédure collective, ouverte contre [D] [A],

aucune vente de gré à gré n'a été autorisée par le juge commissaire, seule a été autorisée la représentation par la SCP ODILE STUTZ du débiteur pour la vente d'un immeuble indivis,

le bail grevant le bien immobilier n'étant pas mentionné, il n'y a pas eu accord sur la chose, ni le prix, la vente judiciaire ne pouvant alors être prononcée par la juridiction saisie,

en l'absence de mention du bail d'habitation sur les actes, le consentement des époux [B] a été vicié par un dol quand bien même les époux [B] auraient ils été informés de la présence des parents de Mme [Z] [T], indivisaire,

compte tenu du dol, les époux [B] ont subi un préjudice distinct, à savoir l'impossibilité pour eux de loger dans l'immeuble concerné et l'impossibilité pour eux de donner à la location le logement par eux actuellement habité (loyer projeté de 700 € par mois),

subsidiairement, si la vente devait être constatée, alors et par application de l'article 1112-1 du code civil, la SCP Odile STUTZ et les propriétaires seraient condamnés in solidum au versement de la somme de 170 000 €.

Motivation

MOTIFS':

Sur les demandes en lien avec la nullité de la vente

A titre liminaire, et avant de statuer sur la demande tirée de l'irrecevabilité de la demande principale en nullité de la vente de l'immeuble appartenant à Monsieur [D] [A] et à Madame [Z] [T], il convient d'examiner si la vente est intervenue.

Selon l'article 1583 du code civil, la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé.

Il appartient à la SCP ODILE STUTZ de rapporter la preuve de ce que la vente serait intervenue.

Il est acquis aux débats que le 29 septembre 2017, les époux [B] ont émis une offre ferme d'acquisition pour un prix de 170.000,00 euros net vendeur, et adressé un chèque d'arrhes de 17.000,00 euros à la SCP ODILE STUTZ.

Par ordonnance en date du 23 janvier 2018, que le juge commissaire du Tribunal de commerce d'AGEN a':

autorisé la SCP Odile STUTZ, en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur [D] [A] à signer l'acte relatif à la cession de l'immeuble au profit des époux [B] moyennant le prix de 170.000 € net vendeur, et à percevoir les droits indivis revenant à la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [A], déduction faite des frais notariés qui grèveraient la vente, et du règlement des créanciers de l'indivision,

pris acte de ce que l'acquéreur avait versé au titre d'arrhes la somme de 17.000 euros à la SCP Odile STUTZ, et que cette somme resterait acquise à la procédure, à titre de dommages et intérêts, en cas de désistement injustifié de la part de l'acquéreur.

Il se déduit de cette ordonnance que si la SCP Odile STUTZ, en sa qualité, a été autorisée à représenter le débiteur lors de la signature de l'acte relatif à la cession de l'immeuble au profit des époux [B] moyennant le prix de 170.000 € net vendeur, et à percevoir les droits indivis revenant à la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [A], déduction faite des divers frais et du règlement des créanciers de l'indivision, ladite autorisation ne constitue pas en une autorisation du juge commissaire de vente de gré à gré, valant vente, la coindivisaire, Mme [Z] [T] n'ayant pas donné son accord sur la chose, ni le prix à la date du prononcé de ladite ordonnance.

Il résulte ensuite des faits que par courrier en date du 24 janvier 2018, la SCP Odile STUTZ a demandé à la SCP BRUGALIERES-SAVARD, Notaire chargé de la rédaction des actes, de procéder à l'établissement de l'acte de vente dans les meilleurs délais.

Par courriers recommandés avec accusés de réception du 07 juin 2018, Maître [K] [S], Notaire, a notifié aux époux [B] un projet de l'acte authentique de vente de l'immeuble, projet mentionnant l'occupation du bien par les parents de Mme [Z] [T].

Ledit projet n'a été signé par aucune des parties, la SCP Odile STUTZ, ès qualité ayant indiqué au Notaire que le bien se trouvait grevé d'un bail d'habitation conclu en 2012 avec les parents de Mme [Z] [T].

Par courriers recommandés en date du 26 juin 2018, Me [S] a alors notifié aux époux [B] un nouveau projet d'acte, ledit projet mentionnant l'existence du bail signé en 2012 au profit des parents de Mme [Z] [T] et grevant le bien, objet de la vente.

Mme [Z] [T] a dans un premier temps refusé de signer ledit projet.

Ce projet d'acte n'a pas été signé par les époux [B], ainsi que cela résulte du PV de difficulté en date du 11 octobre 2018 dressé par Me [S].

Il convient alors de constater que les parties ne se sont pas accordées sur la chose, pour laquelle il n'a dans un premier temps pas été fait mention d'une occupation (offre d'acquisition du 29 septembre 2017) puis dans un second temps pour laquelle il a été fait mention d'une occupation (projet d'acte notifié par le Notaire le 7 juin 2018), puis pour laquelle dans un troisième temps il a été fait mention d'un bail conclu en 2012 (projet d'acte notifié par le Notaire le 26 juin 2018).

Il convient alors de constater l'absence de vente relative au bien immobilier entre les acquéreurs et les acheteurs.

Partant, et en l'absence de vente, il convient de dire sans emport le moyen relatif au dol sur la nullité d'une vente qui n'existe pas.

Le jugement sera réformé en ce sens.

Sur la demande de la SCP Odile STUTZ de constatation judiciaire de la vente de l'immeuble

Aux termes de l'article L. 642-18, alinéa 3, du Code de commerce, le juge commissaire peut, si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleures conditions, ordonner la vente par adjudication amiable sur la mise à prix qu'il fixe ou autoriser la vente de gré à gré aux prix et conditions qu'il détermine. En cas d'adjudication amiable, il peut toujours être fait surenchère.

Pour les motifs précédemment développés, il convient de rejeter cette demande, le Juge commissaire en son ordonnance ayant seulement donné autorisation à la SCP ODILE STUTZ ès qualité de représenter le débiteur à l'acte de vente.

Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCP Odile STUTZ de sa demande de constatation judiciaire de la vente de l'immeuble.

Sur la demande de restitution de la somme de 17 000 €

Selon l'article 1590 du code civil, si la promesse de vendre a été faite avec des arrhes chacun des contractants est maître de s'en départir, celui qui les a données, en les perdant, et celui qui les a reçues, en restituant le double.

Il résulte de la chronologie des faits que :

aux termes d'une lettre d'intention d'achat du 15 juillet 2017, les époux [U] [B] et [X] [Y] ont fait une offre d'achat portant sur ce bien moyennant un prix de 177.400 euros, frais d'agence inclus, ladite offre mentionnant trois conditions suspensives, sans mention aucune de l'occupation du bien, ni d'un bail sur le bien, objet de la vente,

par courrier en date du 5 septembre 2017, la SCP Odile STUTZ, agissant es-qualité de liquidateur de M. [A], artisan, a indiqué aux époux [B], qu'elle devait présenter une requête au juge commissaire afin d'être autorisée à signer l'acte de vente de ce bien indivis, et les a invités à lui adresser un chèque d'arrhes de 10 % du prix proposé, «'qui resterait définitivement acquis à la procédure en cas de désistement pour un motif autre que la non-survenance d'une des éventuelles conditions suspensives énoncées dans leur proposition'»,

le 29 septembre 2017, les époux [B] ont émis une offre ferme d'acquisition pour un prix de 170.000,00 euros net vendeur, et adressé un chèque d'arrhes de 17.000,00 euros à la SCP ODILE STUTZ.

Il résulte de ces éléments que si les époux [B] ont donné leur accord sur la chose en retournant un chèque de 17 000 €, ils ont donné leur accord sur un bien libre de toute occupation et de tout bail, conformément aux stipulations de la lettre d'intention.

Il est acquis que le bien, objet de la vente, se trouve grevé d'un bail conclu en l'année 2012 au profit des parents de la venderesse coindivisaire, de sorte que la promesse d'achat se trouve viciée.

Partant, il convient de dire que les époux [B] ont subi un dol, lequel prive la SCP ODILE STUTZ, ès qualité, de la possibilité de conserver les arrhes.

Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a':

débouté la SCP Odile STUTZ de sa demande visant à être autorisée es-qualité à conserver la somme de 17.000,00 euros versée par les époux [B],

condamné la SCP Odile STUTZ à restituer aux époux [B] la somme de 17.000,00 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral

En l'absence de tout élément de nature à caractériser un préjudice moral, il convient de débouter les époux [B] de leur demande.

Il convient de confirmer le jugement en ce sens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SCP Odile STUTZ aux dépens, et à payer aux époux [B] la somme de 2.000,00'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, il convient de condamner la SCP Odile STUTZ aux dépens d'appel, et à payer aux époux [B] la somme de 3.000,00'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement SAUF en ce qu'il a :

déclaré recevable la demande principale des époux [B] tendant à la nullité de la vente,

débouté les époux [B] de leurs demandes formées sur le fondement du dol,

STATUANT À NOUVEAU sur ces points':

DÉCLARE la demande d'annulation de la vente sans objet';

Y ajoutant,

CONDAMNE la SCP Odile STUTZ, agissant es-qualité de liquidateur de M. [D] [A], à payer à M. [U] [B] et Mme [X] [Y] épouse [B] en cause d'appel, la somme totale de 3 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SCP Odile STUTZ, agissant es-qualité de liquidateur de M. [D] [A] aux dépens de l'appel.