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Décisions

CA Nîmes, 5e ch. soc., 12 mars 2024, n° 21/03904

NÎMES

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

Tesca France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rouquette-Dugaret

Conseillers :

Mme Reyter Levis, Mme Remili

Avocats :

Me Calice, Me Lardaux

Cons. prud'h. Annonay, du 5 oct. 2021, n…

5 octobre 2021

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Le groupe Tesca est un équipementier automobile issu du rachat au groupe Treves et au groupe Chomarat de l'activité de fabrication de textile pour sièges automobile.

En 2016, le groupe Tesca a développé une stratégie de développement de la conception et de la fabrication des intérieurs automobiles pour pénétrer l'ensemble des marchés mondiaux.

En France, l'activité de Tesca est opérée par la société Tesca France et la société Tesca France [Localité 1].

Suite à des difficultés économiques, la société Tesca France [Localité 1] a pris la décision de fermer le site et de supprimer l'ensemble de ses postes.

Le projet de fermeture de la société et de suppression des postes a été présenté au comité social et économique lors d'une réunion d'information qui s'est tenue le 25 septembre 2019.

Par courrier du 27 septembre 2019, les membres du comité social et économique ont été convoqués à une première réunion d'information et de consultation programmée au 4 octobre 2019.

Le 4 octobre 2019, une première réunion d'information et de consultation s'est tenue, à l'occasion de laquelle le comité social et économique a désigné le cabinet Secafi pour l'assister dans le cadre de cette procédure.

Des réunions du comité social et économique se sont tenues les 15 octobre et 13 novembre 2019.

Le 22 novembre 2019, le cabinet Secafi a transmis son rapport à la société Tesca [Localité 1], rapport qui a été remis et discuté lors de la réunion du comité social et économique qui s'est tenue le 26 novembre 2019.

Au cours de la réunion du 2 décembre 2019, le comité social et économique a rendu son avis sur le plan de sauvegarde de l'emploi.

À l'issue d'une réunion qui s'est tenue le 6 janvier 2020, les membres du comité social et économique ont rendu un avis négatif sur le projet de fermeture de la société Tesca [Localité 1].

Le 6 janvier 2020, la société Tesca [Localité 1] a adressé à la Direccte le document unilatéral, sur lequel le comité social et économique venait d'être consulté, portant plan de sauvegarde de l'emploi et sollicitait son homologation.

Par décision en date du 24 janvier 2020 la Direccte a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Tesca [Localité 1].

Le 7 février 2020, les salariés non protégés étaient licenciés pour motif économique à titre conservatoire sous réserve d'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle.

Le 23 mars 2020, deux salariés de la société Tesca [Localité 1] ont saisi le tribunal administratif de Lyon afin d'obtenir l'annulation de la décision d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi, lequel par jugement en date du 22 juin 2020, a rejeté la demande des salariés.

Contestant son licenciement, M. [C] [N] a saisi le conseil de prud'hommes d'Annonay, par requête reçue le 9 juin 2020, afin de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et condamner la société Tesca [Localité 1] à lui payer diverses indemnités.

Par jugement contradictoire du 05 octobre 2021, le conseil de prud'hommes d'Annonay a :

- jugé le licenciement de M. [C] [N] intervenu le 7 février 2020 est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Tesca France [Localité 1] à payer la somme de 23 092,52 euros au demandeur au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Tesca France [Localité 1] à payer la somme de 4 844,54 euros au demandeur au titre de l'indemnité de préavis,

- condamné la société Tesca France [Localité 1] à payer la somme de 484,45 euros au titre des congés payés,

- débouté le demandeur de sa demande d'indemnités pour non-respect de l'obligation de formation,

- condamné la société Tesca France [Localité 1] au montant de 1000 euros au titre de l'article 700,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par acte du 27 octobre 2021, la société Tesca France [Localité 1] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par acte d'huissier en date du 9 novembre 2021, la société Tesca France [Localité 1] a fait assigner en référé M. [C] [N] devant le premier président de la cour d'appel de Nîmes aux fins de voir arrêter l'exécution provisoire attachée à ces condamnations, au visa de l'article 517-1 du code de procédure civile.

Par ordonnance de référé en date du 14 janvier 2022, le premier président de la présente cour d'appel a :

- arrêté l'exécution provisoire facultative attachée aux dispositions du jugement prononcé le 5 octobre 2021 par le conseil de prud'hommes d'Annonay à l'égard de M. [C] [N],

- déclaré irrecevable la demande d'arrêt d'exécution provisoire présentée à l'égard des dispositions du jugement assorties de l'exécution provisoire de droit,

- concernant ces dernières dispositions, rejeté la demande de consignation,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande,

- condamné la société Tesca France [Localité 1] aux dépens de la procédure.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 05 janvier 2024, la SAS Tesca France [Localité 1] demande à la cour de :

- la recevoir en ses demandes, fins et conclusions ;

Et y faisant droit,

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Annonay en ce qu'il a jugé que le licenciement de M.[N] ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il l'a condamnée à verser à M.[N] les sommes suivantes :

* 23 092,52 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse,

* 4844,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 484,45 euros au titre des congés payés y afférents,

* 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Annonay pour le surplus,

En conséquence :

- débouter M.[N] de l'ensemble de ses demandes

En tout état de cause :

- condamner M.[N] à lui verser la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M.[N] aux entiers dépens.

Elle soutient que :

Sur la prétendue absence de motif économique :

- le conseil de prud'hommes a fait une interprétation erronée de l'article L1233-3 du code du travail ; contrairement à ce qu'il a retenu, les dispositions de l'article L1233-3 du code du travail ne subordonnent pas le bien fondé du motif économique à la 'cessation d'activité du groupe' mais à la cessation d'activité de l'entreprise,

- la cessation totale et définitive de son activité suffit à justifier le licenciement pour motif économique des salariés,

- la cessation définitive de son activité ne fait aucun doute comme l'a reconnue la ministre du travail dans sa décision du 10 mai 2021 et la cour administrative d'appel de Lyon dans ses arrêts du 11 mai 2023,

- contrairement à ce qu'affirment les salariés, elle a cessé son activité au 31 janvier 2020, comme le démontrent le récépissé de notification de cessation d'activité à la préfecture de l'Ardèche, les comptes 2021 certifiés par les commissaires aux comptes, le livre d'entrées et de sorties du personnel et le congé du bail commercial et l'état des lieux de sortie,

- si elle n'a pas sollicité sa radiation du greffe du tribunal de commerce c'est en raison de l'existence de contentieux en cours devant la présente cour et le conseil de prud'hommes d'Annonay,

- le licenciement de M.[N] repose bien sur un motif économique.

Sur sa situation économique :

- elle a été impactée par les difficultés du marché automobile et le ralentissement à la fois européen et mondial du marché de l'automobile,

- la crise du marché de l'automobile a entraîné une baisse des ventes des véhicules et a conduit les revendeurs à proposer des modèles avec intérieur cuir au lieu des intérieurs tissus. Par conséquent, elle a été confrontée à un effondrement de son chiffre d'affaires entre 2018 et 2019,

- en sus des difficultés rencontrées par le marché de l'automobile, elle a fait face à des coûts de fabrication très élevés rendant les produits fabriqués peu concurrentiels,

- elle était dans l'impossibilité de réduire ses frais de fonctionnement ou d'augmenter ses prix de vente,

- ses difficultés économiques étaient avérées et justifiaient pleinement sa fermeture, d'autant plus que la situation du marché de l'automobile ne fait que se détériorer.

Sur sa prétendue faute ou légèreté blâmable :

- l'intimé prétend que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison de la faute ou à tout le moins de la légèreté blâmable de la société, or les arrêts invoqués par celui-ci sont inopérants,

- par une décision devenue définitive en date du 22 juin 2020, le tribunal administratif a validé le plan de sauvegarde de l'emploi jugé en parfaite adéquation avec les moyens du groupe Tesca,

- contrairement à ce qu'affirment les intimés, le rapport du cabinet Secafi fait le constat des difficultés économiques évidentes de la société et en fait porter, pour l'essentiel, la responsabilité sur l'attitude de Chomarat à la fois au moment de la cession et lors de la renégociation des surfaces louées,

- à aucun moment le rapport ne qualifie les choix opérés par elle de faute ou de légèreté blâmable,

- outre qu'il n'est démontré aucune erreur dans ses choix de gestion, la jurisprudence considère que l'erreur éventuellement commise dans l'appréciation du risque inhérent à tout choix de gestion ne caractérise pas une faute ou une légèreté blâmable,

- la prétendue bonne santé financière du groupe Tesca invoquée par l'intimé ne permet en aucun cas de remettre en cause ses difficultés économiques,

- le licenciement de l'intimé est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Sur le reclassement interne :

- elle a respecté son obligation de reclassement et a même été au-delà de ses obligations légales en la matière,

- elle a, tout au long de la procédure d'information et de consultation, recherché des postes de reclassement,

- elle a proposé 7 postes de reclassement situés sur le territoire national et 5 postes de reclassement situés en Espagne,

- au-delà de la procédure d'information et de consultation, elle a proposé de nouveaux postes de reclassement aux salariés protégés qui n'avaient pas encore été licenciés,

- l'intimé a choisi de lier l'issue du présent contentieux à celle de la procédure administrative en se prévalant, en première instance, de la note de synthèse rédigée par l'inspection du travail (dans le cadre de son recours à l'encontre des décisions de refus d'autorisation de licenciement de 7 salariés protégés), pour démontrer l'absence de respect de l'obligation de reclassement,

- l'intimé ne peut plus solliciter de la présente cour qu'elle écarte les décisions rendues par le ministère du travail le 10 mai 2021 ayant validé à la fois le motif économique et le respect de ses obligations au titre du reclassement,

- l'intimé lui fait grief de ne pas verser au débat les courriers qui auraient été adressés aux autres entités du groupe dans le cadre de la recherche de reclassement, alors qu'il n'existe aucune obligation légale d'adresser aux entités du groupe des courriers formels de recherches de reclassement,

- l'intimé lui fait grief de ne pas avoir étendu le périmètre de reclassement au site de la société Tesca France situé à [Localité 9], ce qui est faux. La recherche de reclassement a été effectuée au sein de Tesca France comprenant les sites de [Localité 6] et [Localité 9],

- contrairement à ce que soutient le salarié, le courrier de reclassement qui lui a été adressé mentionne expressément que la liste de reclassement lui est annexée, au surplus, cette liste de reclassement a été affichée au sein de l'entreprise,

- l'intimé lui fait grief de ce que 2 postes de reclassement (de responsable juridique et de concepteur innovation) ont été pourvus avant la fin du délai de réflexion de 30 jours alors qu'il n'a manifesté aucun intérêt pour l'un ou l'autre des postes ni posé sa candidature,

- concernant les propositions de reclassement anticipé : contrairement à ce que soutient l'intimé, il n'existe aucune rupture d'égalité dans le fait d'avoir adressé à 4 salariés des offres de reclassement dès le 25 novembre 2019 et les offres de l'ensemble des salariés restant, le 5 décembre suivant. Par ailleurs, les membres du comité social et économique ont voté à l'unanimité en faveur de la proposition anticipée d'offres de reclassement,

- l'intimé lui fait grief d'avoir accepté d'assortir certains postes de reclassement de la possibilité de télétravailler, or la possibilité de télétravailler n'a été envisagée qu'à la demande expresse des salariés qui se sont positionnés sur les postes et ce en totale transparence avec les représentants du personnel.

Sur le reclassement externe :

- il résulte des dispositions du plan de sauvegarde de l'emploi que seuls les salariés « actifs » ayant adhéré à l'antenne emploi pouvaient se voir proposer deux offres valables d'emploi,

- or, M.[N] n'a pas adhéré à l'antenne emploi,

- M.[N] ne peut donc valablement soutenir que les dispositions du plan de sauvegarde de l'emploi n'ont pas été respectées.

Sur les condamnations :

- M.[N] ayant adhéré au contrat de sécurisation professionnelle, il ne peut prétendre à aucun rappel au titre du préavis et des congés payés y afférents.

- le licenciement pour motif économique de l'intimé étant fondé, il ne peut prétendre à aucune indemnité, au surplus il ne justifie d'aucun préjudice.

Sur le prétendu non-respect de ses obligations en matière de formation :

- cette demande est dénuée de tout fondement,

- elle n'a nullement manqué à son obligation de formation puisque, comme il est justifié, M.[N] a bien bénéficié de formations tout au long de la relation contractuelle.

En l'état de ses dernières écritures en date du 08 janvier 2024, contenant appel incident, M. [C] [N] demande à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

- l'infirmer sur le montant des sommes allouées au salarié.

Vu les articles L1233-3 et L 1233-4 du code du travail et la jurisprudence précitée

- déclarer son licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

- condamner la société Tesca France [Localité 1] à lui verser les sommes suivantes :

* dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 66 734,00 euros

* indemnité de préavis : 8 341,80 euros

* congés payés sur indemnité de préavis : 834,18 euros

* dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de formation : 5000 euros

* article 700 du code de procédure civile : 2000 euros.

Il fait valoir que :

- le contentieux sur l'homologation du plan de sauvegarde intervenu devant le juge administratif n'a aucune incidence sur le présent contentieux,

Sur l'absence de réalité du motif économique :

- la société ne justifie pas des difficultés économiques subies consécutivement à la prétendue mauvaise conjoncture du secteur automobile,

- les bulletins d'information de février 2020, octobre 2020 et de janvier 2021 font état d'une absence de toutes difficultés économiques,

- la décision de fermeture de la société Tesca [Localité 1] résulte d'un choix délibéré du groupe de délocaliser vers des pays à moindre coût de main d'oeuvre, non pas pour sauvegarder sa situation ou surmonter des difficultés économiques mais pour accroître ses profits au détriment de la situation de l'emploi du site concerné,

- contrairement à ce qui est indiqué dans la lettre de licenciement, la société Tesca Le Cheylar n'a pas cessé son activité, puisque :

* elle a déposé des comptes en 2021,

* elle compterait entre 6 et 9 salariés en 2021,

* elle a changé de siège social fin mars 2022,

* une décision de 'poursuite d'activité' a été publiée au greffe du tribunal de commerce fin juin 2020,

- la société ne justifie pas d'une cessation complète et totale de son activité.

Sur l'obligation de reclassement interne prévue dans le plan de sauvegarde de l'emploi :

- le juge judiciaire n'est pas tenu à l'appréciation du tribunal administratif ni à celle de la ministre du travail,

- la société Tesca [Localité 1] n'a pas respecté son obligation individuelle de reclassement,

- l'ensemble des constats factuels effectués par l'inspection du travail à l'endroit des salariés protégés peuvent se transposer aux salariés de droit commun

- les recherches de reclassement interne ne sont pas suffisamment précises, il n'existe aucun courrier de recherche de reclassement et a fortiori aucune de ces précisions,

- le périmètre des recherches de reclassement n'a pas été respecté par la société ; l'inspection du travail a estimé que le site de [Localité 9] de la société Tesca France n'a pas été sollicité sur ses possibilités de reclassement,

- aucune proposition de reclassement individuelle n'a été faite ; les courriers produits par la société en pièces 9 à 11 ne contiennent aucun accusé de réception de sorte qu'il n'est pas possible de savoir à quelle date les offres auraient été adressées ou même tout simplement si elles l'ont bien été,

- contrairement à ce que soutient la société, il n'a jamais été vérifié par l'autorité administrative qu'ils (salariés non protégés) ont bien reçu chacun des offres de reclassement, contrôle qui est attribué seulement au juge judiciaire,

- A titre subsidiaire,

* le courrier de propositions du 5 décembre 2019 produit par l'employeur contient de nombreuses irrégularités,

* contrairement à ce que prétend la société, la liste des postes de reclassement n'a pas été annexée au courrier de proposition de reclassement du 5 décembre 2019,

- certains postes de reclassement ont été pourvus avant l'expiration du délai de réflexion de 30 jours,

- certains salariés ont reçu leur proposition de reclassement le 26 novembre 2019 tandis que d'autres ne l'ont reçue que le 5 décembre. Il existe là une rupture d'égalité injustifiée rendant déloyale l'exécution de l'obligation de reclassement,

- l'inspection du travail a estimé très justement que la possibilité légale d'anticiper les mesures de reclassement a été détournée,

- les propositions qu'il a reçues ne respectent pas les dispositions de l'article L1233-4 alinéa 4 du code du travail,

- la recherche de reclassement a été déloyale car, les conditions substantielles des postes proposés ont varié selon les destinataires de l'offre. 4 salariés 'présélectionnés' ont reçu leur offre avant tout le monde et ont pu accepter des offres qui par conséquent n'étaient plus disponibles pour les autres salariés.

Sur le reclassement externe :

- l'employeur ne justifie pas avoir rempli son obligation de reclassement externe figurant dans le plan de sauvegarde de l'emploi

- il n'établit pas avoir proposé le nombre d'offres valables d'emploi prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi,

- contrairement à ce que soutient la société, le plan de sauvegarde de l'emploi ne mentionne aucune condition préalable pour être destinataire d'offres valables d'emploi.

- il résulte de tout ce qui précède que son licenciement pour motif économique est sans cause réelle et sérieuse.

Sur l'indemnisation :

- son préjudice est considérable eu égard à son âge et son ancienneté,

- son licenciement étant sans cause réelle ni sérieuse, il peut prétendre au versement de son indemnité de préavis,

Sur l'obligation de formation :

- il n'a reçu aucune formation pendant l'exécution de son contrat de travail et subit un préjudice d'autant plus grave qu'il se retrouve involontairement en situation de recherche d'emploi.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 11 mai 2023, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 08 janvier 2024. L'affaire a été fixée à l'audience du 07 février 2024.

MOTIFS

Sur l'existence d'un motif économique

Il résulte des dispositions de l'article L.1233-3 du code du travail que :

« Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :

a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;

b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;

c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;

d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;

2° A des mutations technologiques ;

3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

4° A la cessation d'activité de l'entreprise.

La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.

Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché.

Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l'une des causes énoncées au présent article, à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants et de la rupture d'un commun accord dans le cadre d'un accord collectif visée aux articles L. 1237-17 et suivants. »

La lettre de licenciement notifiée aux salariés indiquait comme motif la « nécessité de fermer

l'activité et de fermer le site du [Localité 1] de façon définitive ».

La cessation d'activité complète et définitive de l'entreprise constitue en soi un motif économique de licenciement.

La seule circonstance qu'une autre entreprise du groupe poursuive une activité de même nature ne fait pas par elle-même obstacle à ce que la cessation d'activité de la société soit regardée comme totale et définitive

Seule une cessation complète de l'activité de l'employeur peut constituer en elle-même une cause économique de licenciement, quand elle n'est pas due à une faute de ce dernier.

La cessation d'activité ne suppose pas la disparition de l'entité juridique, la société employeur pouvant subsister pour les besoins de sa liquidation et des opérations en cours et, à tout le moins, pour les besoins des contentieux en cours. Dans un arrêt du 20 septembre 2023 (n° 22-13.486 et s.), la Cour de cassation a estimé que le maintien d'une activité résiduelle jusqu'au 31 mars 2017, nécessaire à l'achèvement de l'exploitation de certains produits avant leur cession ne caractérisait pas une poursuite d'activité.

Pour déclarer les licenciements dénués de cause réelle et sérieuse le premier juge a indiqué «que la société TESCA France [Localité 1] fait partie du groupe TESCA qui continue d'exercer la

même activité sur d'autres sites, y compris à l'étranger... que la cessation du site du [Localité 1] ne constitue pas une cessation d'activité du groupe».

Le premier juge a fait une application erronée du texte susvisé.

La cessation d'activité de l'entreprise, lorsqu'elle n'est pas due à une faute de l'employeur ou à sa légèreté blâmable, constitue un motif autonome de licenciement, ce qui implique qu'elle n'a pas à être justifiée par des difficultés économiques, des mutations technologiques ou la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.

Dès lors l'argumentation des salariés tendant à contester l'existence d'un motif économique à l'origine de la cessation d'activité ne peut être suivie alors qu'il sera vu ci-après qu'aucune faute ou légèreté blâmable ne peut être retenue au débit de l'employeur.

Les salariés prétendent que la société Tesca Le Cheylar n'a pas cessé son activité.

Or la SAS Tesca France [Localité 1] produit aux débats :

- le récépissé de la notification de cessation totale d'activité adressée par la société à la préfecture de l'Ardèche dans la mesure où le site d'exploitation était une installation classée relevant du régime d'autorisation et d'enregistrement ; elle a, le 28 octobre 2019, informé la préfecture de la cessation de son activité au 31 janvier 2020.

- les comptes 2020 certifiés par les commissaires aux comptes qui constatent : « Il a été acté que la société TESCA France [Localité 1] cessera définitivement son activité à la fin du mois de février 2020. Par conséquent, une provision pour risques et charges est comptabilisée dans les comptes de 2020. En raison de l'arrêt de l'activité à fin février 2020, l'épidémie de Covid-19 n'a aucune incidence sur les comptes 2020... Compte tenu de la dégradation des perspectives économiques pour le site du [Localité 1], le groupe Tesca a décidé sa fermeture en septembre 2019.

Un plan de sauvegarde de l'emploi a été négocié au cours du 4ème trimestre 2019 et a été définitivement accepté en janvier 2020.

Il a été acté, par la suite, que la société Tesca France [Localité 1] cessera définitivement son

activité à la fin du mois de février 2020. Par conséquent, une provision pour risques et charges

est comptabilisée dans les comptes de 2020.

A ce jour, il y a toujours des procédures en cours avec les salariés.

En raison de l'arrêt de l'activité à fin février 2020, l'épidémie covid-19 n'a aucune incidence

sur les comptes 2021. »

- les comptes 2021 de la société tels que certifiés par les commissaires aux comptes, dans leur intégralité,

- le congé du bail commercial et l'état des lieux de sortie concernant le bail des locaux qu'elle occupait au [Adresse 3] [Localité 1] étant précisé qu'elle avait signé un bail commercial avec la société Chomarat à compter du 1er mars 2016 auquel elle ne pouvait mettre un terme qu'à l'issue de chaque période triennale raison pour laquelle elle a, par acte d'huissier en date du 25 mars 2021 donné congé à la société Chomarat pour le 31 décembre 2021,

- l'état des lieux démontre que l'ensemble du matériel et de l'outillage de la société avait été déménagé et les locaux remis en état au 22 décembre 2021.

L'existence d'un chiffre d'affaires de 420 078 euros au titre de l'année 2020 alors que la société n'a cessé son activité que fin février 2020 n'apparaît pas anormale et il ne peut en être tiré aucune conséquence d'autant que la SAS Tesca France [Localité 1] rappelle que son chiffre d'affaires en 2019 s'établissait à 6.290.354 euros, soit un chiffre d'affaires mensuel de 524 196 euros.

Concernant le nombre de salariés indiqué dans les comptes 2020, le commissaire aux comptes de la société a indiqué qu'il s'agissait d'un « effectif moyen 2020 » dès lors que la majorité des salariés a été licenciée au 29 février 2020, effectivement, comme le souligne la SAS Tesca France [Localité 1], l'effectif moyen 2020 ne pouvait être égal à zéro. La société verse aux débats le livre d'entrées et de sorties du personnel, dont l'authenticité est vainement contestée par les salariés, qui confirme ses propos. Les salariés ayant refusé le contrat de sécurisation professionnelle ne sont sortis des effectifs qu'à l'issue de leur préavis ( jusqu'au 31 mai 2020 pour certains). Quatre salariés ayant accepté l'offre de reclassement au sein de Tesca France sont sortis des effectifs en mars 2020. Enfin, le directeur en charge de mettre en œuvre les mesures valant PSE est sorti des effectifs le 24 septembre 2020.

Les salariés font valoir que la société a déposé des comptes en 2021. Or, la SAS Tesca France [Localité 1] explique, s'appuyant sur les comptes certifiés par le commissaire aux comptes, qu'au 31 décembre 2020, elle avait un stock évalué à 29 932 euros qui n'existait plus au 31 décembre 2021, que ce stock a été vendu avec les services afférents (frais de transport) ce qui explique ce chiffre d'affaires et qu'au 31 décembre 2021, il n'y avait plus de production ni stockée ni immobilisée. Elle précise que le nombre de 13 salariés mentionné dans les comptes 2020 correspond à l'effectif moyen de salariés sur la totalité de l'année 2020 dans la mesure où les licenciements sont intervenus en début d'année 2020. La circonstance que ce stock soit constitué de matières premières ne signifie pas que ces matières aient été produites postérieurement à l'arrêt d'activité de la société. Ces explications assorties des pièces produites sont pleinement pertinentes.

Les salariés ajoutent que la SAS Tesca France [Localité 1] compterait entre 6 et 9 salariés en 2021, ce à quoi la société appelante rétorque qu'il existait un effectif moyen de quatre salariés sur l'année 2021 correspondant aux salariés protégés non encore sortis des effectifs (ils ne le seront qu'en juin, août et septembre 2021).

Les salariés observent que la société a changé de siège social fin mars 2022, s'appuyant sur leur pièce L ( situation au répertoire SIREN) ce qui s'explique par la restitution du local commercial qu'elle occupait ( cf. ci-dessus). La société appelante précise sans être utilement contredite qu'elle est désormais domiciliée chez une société de domiciliation au sein d'une pépinière d'entreprises sise [Adresse 5] - [Localité 1].

Ils relèvent qu'une décision de 'poursuite d'activité' a été publiée au greffe du tribunal de commerce fin juin 2020 (pièce K), ce qui s'explique par les nécessités de solder les opérations courantes comme rappelé ci-avant.

Il résulte de ce qui précède que la SAS Tesca France [Localité 1] justifie d'une cessation totale et définitive de son activité en février 2020. Il n'y a donc pas lieu d'examiner les difficultés économiques rencontrées par la société.

Sur l'existence d'une faute ou légèreté blâmable de la société Tesca [Localité 1]

Les salariés soutiennent que la décision de fermeture de la société Tesca [Localité 1] résulte d'un choix délibéré du groupe de délocaliser vers des pays à moindre coût de main d'oeuvre, non pas pour sauvegarder sa situation ou surmonter des difficultés économiques mais pour accroître ses profits au détriment de la situation de l'emploi du site concerné.

Ils se fondent sur les conclusions du cabinet SECAFI désigné pour assister le comité social et économique selon lesquelles :

« Le niveau des frais fixes du site était connu dès la reprise du site et le groupe n'a pas réellement mis en œuvre d'actions visant à traiter cette difficulté.

Le groupe indique que son activité textile automobile connaît un important reflux avec la perte

de 2 millions de ML pour 2019.

Mais les indicateurs des trois usines, française, espagnole et tunisienne sont contrastés : à fin

septembre, seule la marge de la France s'écroule, les deux autres entités progressent fortement

en doublant leur marge industrielle.

Le groupe a décidé d'allouer les volumes français aux deux autres usines pour optimiser les

performances financières.

C'est une logique financière permettant au groupe de saturer ses deux autres usines,

maximisant ainsi ses résultats.

En décidant, dès 2018, de transférer les volumes automobiles du [Localité 1], le groupe a de fait

compromis l'équilibre économique de l'usine ardéchoise, en faveur de la saturation des

volumes des deux autres usines.

D'autant plus que le plan stratégique présenté en 2018 aux représentants du personnel n'a pas

été mis en œuvre, ou du moins très partiellement.

Les investissements annoncés n'ont pas été mis en œuvre. Au plan commercial, il n'y avait pas

de réelle volonté de porter la diversification du site.

Les négociations avec CHOMARAT ont été contre-productives et ont obéré le compte de résultat de l'usine, car la hausse tarifaire a conduit à la perte de ce client essentiel à toute diversification.

La situation financière du groupe reste satisfaisante, avec une trésorerie confortable permettant de faire face aux besoins de cash importants pour financer la croissance.

La question du préjudice subi par les salariés dans ce projet est aujourd'hui éludée, par un groupe qui s'inscrit dans une démarche de réduction de son empreinte industrielle et un pilotage par le cash, privilégiant sa profitabilité économique au maintien des capacités industrielles en France.

Le projet concrétise un processus de délocalisation vers la Tunisie et surtout l'Espagne qui récupère une part significative des équipements et espère reclasser 3 salariés français pour bénéficier des savoir-faire nécessaires à la reprise des activités de R&D et des volumes encore

à produire pour la SNCF. »

Dans leurs écritures les salariés ne développent aucune argumentation destinée à établir l'existence d'une faute ou d'une légèreté blâmable de la part de leur employeur. Ils tentent de discréditer les justifications avancées par l'employeur à l'appui de leur licenciement alors qu'il a été rappelé que l'existence de difficultés économiques ne constitue pas le motif de leur licenciement.

La connaissance par l'employeur des frais fixes élevés lors de la reprise du site ne peut être considérée comme fautive.

La SAS Tesca France [Localité 1] relève que ce rapport, commandé par le comité social et économique et donc d'une partialité discutable, relate des difficultés économiques essentiellement liées aux conditions qui lui ont été imposées par le groupe Chomarat ainsi qu'aux coûts de fonctionnement trop élevés du site au regard du déclin de son activité :

- « dans une logique évidente de désengagement, Chomarat a su optimiser à son profit les conditions de la vente en grevant les conditions d'exploitation de TESCA »,

- « l'opération a permis à Chomarat de transférer à TESCA une partie des coûts de dépollution

du site »,

- « Chomarat a pu piloter les opérations de filialisation à son avantage en transférant une grande partie de ses frais fixes à TESCA »,

- « la direction (de TESCA) avait pour ambition de réduire ses frais fixes de 420 k€ ['] Cela impliquait la renégociation du bail (réduction des surfaces) et des contrats associés

(maintenance') avec Chomarat. Cela a été un échec, Chomarat n'ayant pas donné une suite

favorable à cette demande ».

Le rapport pointe qu'en «décidant, dès 2018, de transférer les volumes automobiles du [Localité 1], le groupe a de fait compromis l'équilibre économique de l'usine ardéchoise, en faveur de la saturation des volumes des deux autres usines», or la SAS Tesca France [Localité 1] réplique que si elle a été contrainte, dès 2018, de délocaliser les productions de tissage non spécifiques en Tunisie et les tricotages et finitions non spécifiques en Espagne c'est uniquement parce que ses coûts de fabrication très élevés ne lui permettaient pas de conserver cette production. En effet, les arbitrages et les choix financiers et stratégiques pris dans l'intérêt du groupe ne peuvent caractériser une faute.

Au demeurant, la SAS Tesca France [Localité 1] rappelle que cette stratégie avait été validée, dès 2018, par le même cabinet SECAFI qui la qualifiait de « sensée » : « Dans ce cadre, la direction a fait le choix de centraliser la production automobile en Tunisie et en Espagne et de faire du site du [Localité 1] un site spécialisé R&D prototypage. Cette décision s'appuie sur la spécificité du site qu'est le savoir-faire sur la teinture pièce » étant précisé qu'elle a, parallèlement, récupéré l'activité développement qui était alors réalisée en Espagne.

La SAS Tesca France [Localité 1] relève que le rapport du cabinet SECAFI actait la volonté de repositionnement de la société sur :

- « les activités de conception (R&D) »,

- « l'essor des productions hors automobile

- Sous traitance pour Chomarat et ses spécificités teinture,

- Développement commercial important avec la SNCF »,

impliquant un « plan de réduction des frais fixes auprès de Chomarat ».

Elle explique que cette stratégie n'a pas pu fonctionner en raison :

- du refus de Chomarat de réduire la surface louée par Tesca [Localité 1],

- de la réduction par Chomarat de 50% de ses commandes,

- du développement commercial avec la SNCF qui n'a jamais démarré.

La SAS Tesca France [Localité 1] avance sans être utilement démentie qu'elle a bien investi pour réaliser ce repositionnement en ce qu'elle a cherché :

- à développer la technique du tricotage en forme en faisant notamment l'acquisition d'une machine Stoll,

- à former ses salariés à la technique du tricotage en forme,

- en développant un tissu suédé afin de proposer des alternatives aux tissus haut de gamme du

marché (Dinamica, Alcantara),

- en homologuant la conformité technique des produits SNCF,

- en faisant progresser le nombre d'échantillons automobiles réalisés entre 2018 et 2019 de

plus de 20%.

Enfin, la SAS Tesca France [Localité 1] observer que le rapport constate également ses difficultés économiques :

- « TESCA va perdre l'intégralité de sa marge habituelle de 1,10 €/ML (soit environ 440 k€ par

an) sans que l'entreprise ne puisse facturer la sur-marge en représailles »,

- « [Localité 1] voit effectivement ses volumes s'effondrer :

o Les textiles automobiles s'effondrent de 65%,

o La sous-traitance pour Chomarat recule de moitié,

o La production pour la SNCF reste décevante, bien en-deça des prévisions attendues ».

Concernant l'acquisition du Groupe Willy Schmitz annoncée dans un bulletin d'information de février 2020, qui constituait une opportunité de croissance, elle avait pour but, selon la SAS Tesca France [Localité 1], de permettre, à terme, au Groupe Tesca de pénétrer le marché des constructeurs allemands, Willy Schmitz étant un acteur majeur sur ce marché très convoité et particulièrement rentable. En tout état de cause, cette acquisition a été réalisée par le groupe et non par la SAS Tesca France [Localité 1] étant rappelé que les difficultés économiques d'une entreprise s'apprécient au niveau du secteur d'activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national.

Aucune légèreté blâmable ne peut être retenue à l'encontre de l'employeur.

La réalité du motif économique est dès lors établie.

Sur l'obligation de reclassement interne prévue dans le plan de sauvegarde de l'emploi

Selon l'article L.1233-4 du code du travail : «Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises».

En l'espèce, du fait de la cessation complète d'activité de la SAS Tesca France [Localité 1] les recherches de reclassement ne pouvaient être effectuées qu'au sein des sociétés du groupe situées sur le territoire national.

Seules deux sociétés répondaient à cette situation, les deux filiales opérationnelles de Tesca en France employant s'agissant de :

- la société Tesca France : 116 salariés

- la société Tesca Group : 5 salariés.

Seuls sept postes de reclassement étaient disponibles :

- technicien logistique,

- responsable juridique Groupe,

- designer

- directeur de Projet Qualité

- pilote Logistique-Gestion des fournisseurs

- Responsable Industrialisation Textile RFQ

- Concepteur Innovation.

En mars 2020 trois nouveaux postes de reclassement ont été identifiés :

- Project Quality Leader

- Sales & Project Manager

- Chargé de Ressources humaines

A l'issue du comité social et économique du 13 novembre 2019 des postes supplémentaires situés en Espagne ont été ajoutés à la liste des postes de reclassement :

- Technicien de Laboratoire de teinture

- Technicien prototype Teinture

- Techniciens prototypes Tricotage

- Technicien prototype Tissage

- Chef de projets techniques textile

Ces propositions étaient assorties de mesures d'accompagnement.

1) Les salariés soutiennent que les courriers de recherche de reclassement ne comportent aucune précision :

La lettre envoyée par l'employeur aux sociétés du groupe doit être suffisamment précise pour assurer l'effectivité de la recherche, l'idée étant que les sociétés interrogées puissent apporter une réponse précise et argumentée.

En l'espèce, si la société Tesca France était principalement concernée, les opérations de reclassement ont été menées par M. [T] [R], DRH du groupe qui connaissait les aptitudes et compétences des salariés dont le licenciement était envisagé et les besoins des autres sociétés du groupe.

En tout état de cause, des propositions de reclassement ont été présentées à l'intimé ce qui atteste du sérieux des recherches conduites.

2) Concernant le périmètre de recherche : la SAS Tesca France [Localité 1] précise que le siège de Tesca France est à [Localité 8] et que cette société comprend un établissement principal situé à [Localité 6] et un établissement secondaire situé à [Localité 9], comptant uniquement sept salariés. Les recherches ayant été menées par le DRH du groupe chaque établissement était concerné par ces recherches. En effet, il n'est pas démontré que le site de [Localité 9] disposait d'un service RH autonome.

La SAS Tesca France [Localité 1] produit au débat le livre d'entrées et de sorties des différents établissements de la société Tesca France qui démontre qu'il n'existait, sur le territoire national, aucun poste, hormis ceux identifiés et proposés à l'intimé, disponibles et susceptibles d'être proposés dans le cadre du reclassement de ce dernier lorsque la procédure a été lancée.

Au demeurant la cour administrative d'appel dans le recours concernant les salariés protégés a bien relevé : «Si la société Tesca France [Localité 1] ne s'est pas directement adressée à l'établissement de la société Tesca France situé à [Localité 9], sa recherche de reclassement a porté sur la société Tesca France. Ainsi, cette démarche de reclassement a nécessairement intéressé les établissements de la société Tesca France, l'obligation de reclassement pesant sur les sociétés du groupe et non sur leurs établissements. Au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que les recherches effectuées auprès de la société Tesca France n'auraient pas concerné les deux établissements de [Localité 6] et de [Localité 9] qui la composent, ce dernier employant seulement sept salariés et ne disposant d'aucun poste disponible pour le reclassement. »

Ce raisonnement est parfaitement transposable en l'espèce.

3) Sur l'absence de proposition de reclassement individuelle

L'intimé soutenait que «les courriers produits en pièce 9 à 11 ne contiennent aucun accusé de réception de sorte qu'il n'est pas possible de savoir à quelle date ils auraient été adressés ou même tout simplement s'ils l'ont bien été». Or les justificatifs d'envoi de ces courriers sont versés en pièce n°46 par l'appelante. L'intimé prétend à présent vainement que «ces photocopies d'accusé de réceptions ne peuvent être attribués avec certitude à quelconque courrier de proposition de reclassement interne» alors que la SAS Tesca France [Localité 1] démontre que les accusés réception des courriers de reclassement possèdent tous un numéro de suivi et que leur date correspond bien aux dates figurant sur les courriers de reclassement eux-mêmes.

En outre, comme le relève pertinemment l'appelante, l'intimé soutenait, dans le cadre de ses écritures de première instance, que la liste des postes de reclassement n'aurait pas été annexée au courrier de proposition de reclassement qu'il prétend à présent ne pas avoir reçu.

4) Sur l'absence de communication de la liste de poste de reclassement :

L'intimé soutient que si on trouve un « coupon réponse » et un tableau des critères de départage dans les courriers de proposition de reclassement adressés aux salariés, la liste des postes n'est pas jointe.

Or, le courrier de reclassement adressé à l'intimé mentionne expressément que la liste de reclassement lui est annexée ce qui suffit à établir la communication de ladite liste.

5) Sur le non-respect du délai de réflexion de 30 jours pour accepter la proposition de reclassement :

L'intimé indique que lorsqu'un délai de réflexion pour accepter les propositions de reclassement est institué par le PSE, il s'agit d'une garantie de fond, dont la méconnaissance rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'en l'espèce des postes ont été pourvus avant l'expiration du délai de réflexion de 30 jours francs qui selon le PSE devait être accordé aux salariés, que la décision ministérielle invoquée par l'employeur admet que certains des postes

disponibles ont été pourvu dès le 6 janvier 2020 alors qu'un délai de 30 jours francs notifié le 7 commence à courir le 8 à 0h00 et s'achève le 6 à minuit en sorte que ce délai n'a pas été respecté.

Or l'intimé ne verse aucun élément à l'appui de son argumentation.

La SAS Tesca France [Localité 1] réplique que seuls les postes de Concepteur Innovation et de Responsable Juridique ont été pourvus le 6 janvier 2020 pour lesquels ni l'intimé, ni aucun autre des salariés ayant contesté son licenciement, n'a postulé faute de disposer d'une formation initiale permettant de l'occuper.

La SAS Tesca France [Localité 1] précise sans être utilement contredite que :

- le poste de Responsable juridique exigeait une formation juridique ainsi qu'une expérience

de 10 années au sein d'un service juridique ou d'un cabinet d'avocat dont l'intimé ne pouvait

justifier,

- le poste de Concepteur Innovation nécessitait des compétences techniques particulières (plan

architecture, élaboration de plans et d'études techniques, etc) que l'intimé ne maîtrisait pas.

Le non respect du délai n'est dès lors d'aucune incidence sur la situation personnelle de l'intimé.

Au demeurant la SAS Tesca France [Localité 1] rappelle les termes de l'arrêt de la cour administrative d'appel selon lesquels : « Le document valant PSE prévoit, en son article 3.1, que : « les salariés disposeront d'un délai de trente jours francs pour présenter leur candidature écrite à un ou plusieurs postes de reclassements. L'absence de candidature écrite du salarié à l'issue du délai de trente jours vaudra refus de se porter candidat à l'un des postes figurant dans la liste ». Parmi les offres de reclassement que l'intéressé a reçues par un courrier du 5 décembre 2019, reçu le 7 décembre suivant, figuraient celles relatives à des emplois de responsable juridique et de concepteur innovation.

Si chacun de ces postes a été pourvu dès le 6 janvier 2020, soit avant l'expiration du délai de trente jours prévu pour se porter candidat, il n'apparaît pas que, dans ce délai, l'intéressé aurait manifesté son intérêt pour l'un ou l'autre d'entre eux ou posé sa candidature, voire le cas échéant été réellement dissuadé de le faire par l'annonce de ces recrutements. Dans ces conditions, il ne saurait être regardé comme ayant été effectivement privé de la possibilité de présenter sa candidature sur les postes en cause. »

La SAS Tesca France [Localité 1] relève justement que l'intimé, non informé que ces deux postes avaient été pourvus le dernier jour du délai, n'a pourtant pas jugé utile de présenter sa candidature à l'un de ces postes de sorte qu'il ne peut utilement prétendre avoir été privé de la possibilité de présenter sa candidature.

6) Sur les reclassements anticipés déloyaux :

L'intimé fait valoir que certains salariés ont reçu leur proposition de reclassement le 26 novembre 2019 tandis que d'autres ne l'ont reçue que le 5 décembre, qu'il existe là une rupture d'égalité injustifiée rendant déloyale l'exécution de l'obligation de reclassement.

L'intimé se fonde sur le rapport de synthèse de l'inspecteur du travail qui mentionne :

« En effet, pour rappel, le principe d'obligation de recherches anticipées de reclassement a été

dégagé par la jurisprudence.

Il prévoit que le reclassement des salariés menacés dans leur emploi, doit être recherché dès

l'instant où le licenciement est envisagé.

S'agissant d'un licenciement collectif, cette obligation intervient à la date d'engagement de la

procédure de consultation des représentants du personnel sur le projet de réorganisation et, lorsqu'un PSE doit être établi, ce qui correspond à la situation d'espèce, les recherches de reclassement doivent être engagées, par anticipation, avant la décision d'homologation de la DIRECCTE.

En l'espèce, la recherche de reclassement devait concrètement être engagée à compter du 25

septembre 2019, date de la 1ère réunion de consultation du CSE sur le projet de cessation d'activité (Cour de cassation - Chambre sociale - 30 mars 1999 - n° 97-41.265).

A cette date, il appartenait donc à l'employeur de procéder à des recherches de reclassement

pour l'ensemble des salariés concernés par les licenciements.

Or, le principe de recherche anticipée de reclassement tel que dégagé par la jurisprudence, ne

saurait conduire l'employeur à porter atteinte au sérieux et à la loyauté des recherches de reclassement, en présentant sa démarche comme relevant d'une « recherche anticipée de

reclassement autorisée par les représentants du personnel » et validée par la décision

d'homologation de la DIRECCTE.

En effet, dans le cadre de son obligation de reclassement, l'employeur est tenu non seulement

de rechercher toutes les possibilités de reclassement, mais il est également tenu de faire

effectivement des propositions au salarié lorsque des postes sont identifiés.

À cet égard, il doit lui offrir tous les emplois disponibles en rapport avec ses aptitudes

professionnelles (Cass. soc., 12 juill. 2006, no 04-45.578 ; 25 nov. 2009, Bull. civ. V, no 267)

en donnant la priorité aux emplois correspondant à son niveau de qualification.

Or, le choix du salarié effectivement retenu, ne peut être opéré de manière discrétionnaire par

l'employeur qui ne peut qu'opérer un choix, qu'en fonction de critères objectifs prédéterminés.

Or, lors de notre contre-enquête, nous avons relevé que lorsque la société présente à

l'administration, le 7 janvier 2020, son projet de PSE, elle fait dans la version 2 de ce document

(différente de celle présentée au CSE lors des premières réunions de CSE précédentes) ;

Or, nous relevons, qu'à cette date, toutes les personnes devant occuper effectivement les postes

proposés au reclassement interne ont déjà été soit sélectionnées parmi les salariés concernés

par les licenciements soit embauchées via un recrutement extérieur.

En effet, nous relevons que sur les 7 offres de reclassement interne, en France : 4 ont été

directement choisis par l'employeur qui a ainsi neutralisé toute possibilité pour les autres

salariés de candidater sur les postes alors que certains disposaient du profil pour pouvoir

l'occuper.

En effet, il est établi que, de manière « discrétionnaire », la direction a le 19 novembre 2019,

sélectionné :

- Messieurs [K], [H], [O] et [F].

- 2 ont fait l'objet d'un recrutement externe pendant la période où la société était tenu de mettre

en œuvre son obligation de reclassement.

Il est effectivement établi que ces 2 embauches sont intervenues le 6 janvier 2020.

- Le poste de technicien logistique n'a pas été pourvu.

Or, il ressort de nos vérifications, que ce n'est qu'une fois cette démarche de reclassement menée à son terme que l'employeur va, à posteriori, modifier les modalités des recherches de reclassement internes du livre 2 pour les faire correspondre à la réalité de la procédure de reclassement qu'il a effectivement menée.

Or, à cette date et dans les faits, cette démarche de reclassement est « close » lorsque la société

présente sa demande d'homologation du PSE à l'administration.

A ce titre, il y a lieu de relever que, dans la première version du livre 2, il était initialement prévu que : « la liste des postes ouverts au sein du groupe TESCA France sera mise à jour '

les postes de reclassement pourraient être proposés dès le début de la procédure'à l'issue de

la procédure, la direction cherchera à identifier le profil des salariés qui correspondraient le mieux aux postes de reclassement. La liste de postes de reclassement disponible sera diffusée

à tous les salariés' ».

Cependant, dans le livre 2, dans sa deuxième version, les modalités de recherche de

reclassement ont été modifiées.

En effet, dans ce document, il est précisé page 8 : « il est également rappelé que le CSE a, le 4

octobre 2019, accepté le principe de proposer des postes de reclassement interne pendant la procédure lorsque la direction aura pu identifier des salariés ayant le profil correspondant à l'un des postes ouverts au reclassement ».

Sur ce dernier point, s'agissant de la réunion du 4 octobre 2019 citée par l'employeur, il ressort

de nos vérifications que d'une part, le CSE n'a pas été informé de cette mesure et que d'autre

part, cette instance n'en a jamais accepté ledit principe.

En effet, si lors de cette réunion, l'instance a effectivement été informée que l'employeur allait

procéder à une recherche de reclassement anticipée ce qui correspond à l'état du droit, il n'a

jamais été question, lors de cette réunion, d'identifier un quelconque salarié pendant la mise

en œuvre de la procédure.

En effet, au cours de la réunion du 4 octobre 2019, l'employeur avait bien précisé aux élus que

la liste des postes disponibles allait être envoyée à chaque salarié et que la direction

procéderait à une identification des personnes ayant un profil adapté à l'issue de la procédure

et non pendant celle-ci (Cf.- PV réunion du 4 octobre 2020) :

Par ailleurs, comme tente de le faire valoir l'employeur, il n'appartenait pas au CSE de donner

un quelconque consentement à l'égard d'une démarche contraire aux obligations de

l'employeur en matière de reclassement.

En effet, le débiteur de l'obligation de reclassement est uniquement l'employeur qui ne peut

reporter la responsabilité de la démarche suivie vers le CSE.

Cette attitude de la société nous semble matérialiser le caractère déloyal de la démarche de

reclassement menée.

En effet, s'il n'appartient pas à l'IT de contrôler la régularité de la procédure d'information et

de Consultation du CSE qui incombe au DIRECCTE dans le cadre d'un PSE (CE, 19 juillet 2017, n°391.849, Sté Milonga) ; il n'en demeure pas moins que la décision d'homologation ne

saurait valider les démarches de reclassement menée par la société TESCA FRANCE LE

[Localité 1] contraires à l'état du droit. »

La SAS Tesca France [Localité 1] se réfère aux dispositions de l'article L.1233-45-1 selon lesquelles : «Dans les entreprises de cinquante salariés ou plus, l'employeur peut, après avis favorable du comité social et économique, proposer des mesures de reclassement interne avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 1233-30.»

Or, ce n'est pas le principe d'une proposition anticipée de reclassement qui est discuté mais son application à savoir que l'employeur n'a présenté ces propositions anticipées qu'à l'égard de certains salariés au détriment d'autres dont l'intimé créant ainsi une distorsion dans les chances d'obtenir une solution de reclassement.

La SAS Tesca France [Localité 1] se prévaut d'une acceptation donnée en ce sens par le comité social et économique dont les élus ont voté à l'unanimité en faveur la proposition anticipée d'offres de reclassement.

Elle fait valoir que si l'inspecteur du travail a relevé qu'«il n'a jamais été question, lors de cette réunion, d'identifier un quelconque salarié pendant la mise en œuvre de la procédure», le tribunal administratif de Lyon a quant à lui estimé qu' «il ressort des pièces du dossier que le comité social et économique a disposé, lors la réunion du 6 janvier 2020, de l'ensemble des éléments nécessaires afin que celui-ci puisse émettre son avis en toute connaissance de cause, tant sur l'opération projetée et ses modalités d'application que sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi».

Enfin, la SAS Tesca France [Localité 1] s'approprie les motifs de la cour administrative d'appel qui a jugé « Si l'employeur a antérieurement proposé de manière anticipée et individualisée certains des postes en reclassement à des salariés, cette démarche était rendue possible par les dispositions de l'article L. 1233-45-1 du code du travail. En tout état de cause, ces postes, qui figuraient dans la liste des postes diffusés le 5 décembre 2019, n'ont pas été pourvus avant d'être également proposés aux autres salariés, dont l'intéressé. Aucun des postes que l'employeur a identifiés et proposés pour un éventuel reclassement des salariés privés d'emploi, n'a reçu de réponse de l'intéressé. L'ensemble des salariés intéressés, y compris l'intéressé, a ainsi été mis à même de se positionner sur tous les postes de reclassement ouverts à un recrutement. »

Ce constat n'est effectivement pas utilement combattu par les pièces produites et les arguments développés par les salariés lesquels se fondent exclusivement sur le rapport de l'inspecteur du travail saisi de la demande d'autorisation de licenciement des salariés protégés.

Il ne peut donc être soutenu que l'employeur ait détourné la possibilité de présenter des propositions anticipées de reclassement au détriment des salariés.

7) Sur la violation des dispositions de l'article L.1233-4 alinéa 4 du code du travail :

Les salariés se reportent encore une fois au rapport de l'inspecteur du travail qui mentionne concernant les salariés protégés :

« Il ressort des dispositions de l'article L.1233-4 du code du travail, que les offres de

reclassement doivent être écrites et précises.

Cet article prévoit également une option laissée au bénéfice de l'employeur.

Ce dernier peut en effet :

- soit adresser de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ;

- soit diffuser par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés.

En conséquence, l'employeur a un choix à opérer entre l'une ou l'autre de ces deux possibilités. Par ailleurs, s'il opte pour la mise en œuvre d'une proposition de reclassement de type

personnalisé, il ne pourra pas soumettre les mêmes offres de reclassement à plusieurs autres salariés qu'à la condition que ces offres soient adaptées à leurs capacités et, qu'il ne propose pas, en des termes identiques, les mêmes postes à des salariés exerçant des fonctions et ayant une ancienneté différente.

Ainsi, il a été jugé que « la diffusion d'une même offre auprès des salariés exerçant des fonctions

distinctes et jouissant d'anciennetés différentes rend le licenciement sans cause réelle et

sérieuse, en ce que l'offre de reclassement n'est pas personnalisée et compatible avec la

qualification de l'intéressé » (Cass. soc, 19 mai 2010, n° 09-40.524).

Or, en l'espèce, il s'agit là bien de la démarche menée par l'employeur.

En effet, dans un premier temps, la direction a annoncé dès les premières réunions du CSE qu'elle allait adresser à tous les salariés la liste des postes disponibles.

Or, dans les faits, elle va procéder différemment et, le 19 novembre 2019, en dépit des

informations contraires communiquées au CSE, elle va procéder à l'envoi de 4 offres individuelles et personnalisées de reclassement à 4 salariés choisis discrétionnairement pour occuper chacun, un poste précis.

En effet, l'employeur va directement sélectionner ces 4 salariés et ce, malgré le fait que, parmi

les autres salariés « licenciables » certains avaient parfaitement le profil pour prétendre

occuper les postes en question.

Il ressort de nos vérifications que cette sélection est intervenue au bénéfice de Messieurs

[K], [H], [O] et [F].

Il ressort également de nos vérifications, que la direction, va, dans, un premier temps, définir

les modalités d'exercice de ces 4 postes, directement avec les 4 collaborateurs (notamment leur

localisation géographique).

Dans un deuxième temps, elle annoncera aux représentants du personnel, lors de la réunion du CSE du 26 novembre, avoir non seulement sélectionné directement ces 4 personnes qu'elle souhaitait voir occuper les postes proposés mais, qu'elle avait également, accepté que ces

postes soient localisés géographiquement au [Localité 1] et non sur l'établissement de

[Localité 6] près de [Localité 10], comme cela avait été initialement prévu.

A ce titre, il ressort du PV de la réunion du CSE du 26 novembre 2019, que la direction interrogée sur ce point, justifie avoir sélectionné discrétionnairement ces 4 salariés sur des conditions de profil et d'expériences.

Par ailleurs, il ressort de nos vérifications, que ce sont bien ces 4 personnes qui vont occuper

les postes en question, selon les conditions géographiques présentées lors de cette réunion.

Or, le 28 novembre 2019, elle va présenter à 4 autres salariés également choisis au préalable,

une liste de 7 postes (dont ceux proposés le 19 novembre 2019 mais également d'autres qui

ne correspondent pas au profil des personnes composant ce 2ème groupe de salariés. Il s'agit de Monsieur [G], Monsieur [B], Monsieur [V] et Monsieur [L].

En conséquence, il est établi selon nous, que l'employeur a d'abord mis en œuvre une recherche

individuelle et personnalisée pour 4 salariés.

Or, les offres de reclassement des 19 et 28 novembre faites à Messieurs [K], [H],

[O] et [F] sont individualisées et personnalisées alors que pour les autres salariés

ont toutes été présentées sous forme de liste.

En conséquence, il ressort donc que la société n'a pas respecté les dispositions de l'article L.1233-4, alinéa 4.

En effet, il lui appartenait de choisir l'une ou l'autre des options prévues et, d'en faire

application à l'ensemble des salariés.

Il y a donc lieu de considérer selon nous que celles-ci ont de fait été contournées par la société.

Il nous semble ainsi que ces modalités traduisent une inégalité de traitement opérée au

détriment des 7 salariés protégés.

Elles matérialisent également, selon nous, le caractère déloyal et l'absence de sérieux dans

l'effort de reclassement des 7 salariés protégés ; à ce titre, cela justifie le refus d'autorisation

de licenciement.

Par ailleurs, il y a également lieu de relever que les offres de reclassement faites aux 7 salariés

protégés sont intervenus bien après la sélection des 4 premiers salariés (Messieurs [K],

[H], [O] et [F]) et postérieurement à l'envoi le 28 novembre des

propositions sous forme de liste aux 4 autres salariés (Monsieur [G], Monsieur

[B], Monsieur [V] et Monsieur [L].

En conséquence, ce traitement plus défavorable des 7 salariés protégés justifie également, selon nous, un refus d'autorisation de licenciement.»

La lecture par l'inspecteur du travail de l'arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 19 mai 2010 (n° 09-40.524) ne reflète pas la réalité, la Cour de cassation ayant juste relevé qu' «une proposition de modification du contrat de travail n'ayant pas valeur d'offre de reclassement et ne dispensant pas l'employeur de son obligation de rechercher et de proposer, avant un licenciement pour motif économique, toutes les possibilités de reclassement adaptées aux aptitudes et aux compétences du salarié disponibles dans des sociétés du même groupe, entre lesquelles des permutations d'emplois sont possibles, la cour d'appel qui, sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation et sans se prononcer par un motif hypothétique, a constaté que la société MGA ne justifiait pas avoir effectué une telle recherche, ni avoir adressé aux salariés des propositions personnalisées de reclassement, alors que des postes étaient disponibles à cette fin, a par ces seuls motifs légalement justifié sa décision».

Il est donc inexact de soutenir que l'employeur ne peut diffuser une même offre auprès des salariés exerçant des fonctions distinctes et jouissant d'anciennetés différentes. Il est tout aussi inexact d'affirmer que l'employeur a un choix à opérer entre l'envoi d'une offre personnalisée et la diffusion de listes de postes, ces deux modalités pouvant être concurremment exercées, le délai de réflexion s'appréciant au regard de la première.

Le reclassement du salarié doit s'effectuer sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente, voire sur un emploi d'une catégorie inférieure. Il n'est donc fait référence ni aux fonctions exactes occupées, ni à l'ancienneté du salarié.

Il est demandé à l'employeur d'adresser les offres de reclassement de manière personnalisée ce qui ne signifie nullement que ces offres soient présentées de manière exclusive à certains salariés.

Les choix s'effectuant par la suite en fonction des critères arrêtés.

La SAS Tesca France [Localité 1] se réfère encore à la motivation de la cour administrative d'appel qui a jugé « Si la société Tesca France [Localité 1] a engagé deux démarches comprenant l'envoi d'offres personnalisées et d'une liste de postes, cette circonstance ne saurait, à elle seule, remettre en cause la loyauté et la réalité d'une démarche sérieuse de reclassement. A cet égard, si quatre postes de reclassement, disponibles au sein de la société Tesca France ont, au préalable, été proposés à certains salariés sous forme d'offres de reclassement individualisées, ces propositions, effectuées en amont, mais qui ont ensuite été intégrés dans la liste diffusée à l'ensemble des salariés concernés, sont ici demeurées sans incidence».

En effet nul ne soutient que ces modalités de diffusion auraient eu une incidence sur les possibilités offertes aux salariés dont le licenciement était envisagé de postuler utilement sur ces postes.

8) Sur l'obligation de proposer tous les postes disponibles :

Les salariés se fondent toujours sur le rapport de l'inspecteur du travail qui relate : « Lors de la réunion du 4 octobre 2019, l'employeur présentait au CSE (Page 9 PV du 4 octobre 2019), les 4 postes identifiés au niveau de TESCA FRANCE tous localisés sur les sites de [Localité 6] et [Localité 8] et précisait aux élus que : « La liste des postes ouverts au sein des entreprises du groupe TESCA figure en Annexe 1'la liste des poste ouverts sera mise jour si d'autres postes venaient à être ouverts » (page 9 du PV) :

- Technicien logistique

- Responsable juridique groupe

- Designer

- Project quality leader

Lors de la réunion du CSE du 15 octobre 2019, la Direction présentera deux nouveaux postes

ouverts aux reclassements internes localisés sur le site de [Localité 6] (page 6 du PV) : Pilote

logistique, gestion des fournisseurs et Responsable industrialisation textile RFQ.

Par ailleurs, seront également présentés, lors de cette réunion, 4 postes de reclassement ouverts

sur un établissement espagnol du groupe TESCA.

Or, pour rappel, l'obligation de recherche de reclassement de la société TESCA FRANCE LE

[Localité 1] devait être mise en œuvre, à compter du 25 septembre 2019.

Cependant, il ressort de nos vérifications opérées sur le registre unique du personnel de l'établissement de [Localité 6] que, le 18 novembre 2019, la société TESCA FRANCE qui est

comprise dans le périmètre géographique de l'obligation de reclassement, embauchait

Monsieur [P] [X] sur une poste de « responsable achats famille » (Cf. registre

unique du personnel).

A ce titre, il y a lieu de préciser que cette embauche a été réalisée via un processus recrutement

extérieur qui a nécessairement démarré avant le 18 novembre 2019.

Or, ni au cours de la réunion du 25 septembre, ni au cours de celles des 4, 15 et 30 octobre

2019 et, ni à l'occasion de celle du 13 novembre 2019, l'employeur ne va aborder l'existence

de ce poste qui ne sera d'ailleurs proposé à aucun des salariés concernés par les licenciements

(protégé ou pas) alors que l'obligation de l'employeur en la matière était effective depuis le 25

septembre 2019.

L'employeur, dans son courriel du 5 février 2021, fait valoir que la proposition d'embauche a

été faite à Monsieur [P], le 11 septembre 2019. Il précise que ce poste n'entrait donc pas,

selon lui, dans ceux devant être proposés au reclassement.

Or, il nous semble que cet argument est inopérant car, les éléments transmis par la société ne

font état que de la proposition du poste faite par la société TESCA FRANCE à Monsieur

[P].

En effet, il ressort de nos vérifications que, ce dernier, informait la société TESCA, dans un

courriel du 20 septembre 2019, qu'il serait « disponible » qu'à compter du 18 novembre 2019

pour cause de préavis à effectuer.En conséquence, il ressort bien des éléments recueillis que, l'embauche de Monsieur [P] ne pouvait pas être effective qu'à compter du 18 novembre 2019 ; en effet, avant cette date, le salarié était lié contractuellement avec un autre employeur et devait effectuer une période de préavis.

De ce fait, il y a lieu selon nous de considérer qu'entre le 11 septembre et le 18 novembre 2019,

le poste de responsable achat famille était disponible et qu'à ce titre, il aurait dû être proposé

aux salariés concernés par les licenciements, dès le 25 septembre 2019.

En conséquence, il y a lieu, selon nous, de considérer que l'obligation de reclassement n'a

pas été respectée pour l'ensemble des 7 salariés protégés justifiant ainsi le refus

d'autorisation de licenciement.»

Les salariés en tirent la même conséquence pour ce qui les concerne.

La SAS Tesca France [Localité 1] rétorque que le processus de recrutement pour ce poste a été initié bien avant la première réunion avec le comité social et économique qui s'est tenue le 25 septembre 2019, que par courrier en date du 11 septembre 2019, la société Tesca France proposait à M. [X] [P] d'occuper les fonctions de Responsable Achats famille Polyuréthane et Plastique, que par courrier électronique en date du même jour M. [P] acceptait sans réserve cette proposition, que par courrier électronique en date du 20 septembre 2019 M. [P] indiquait à la société que suite à sa démission de son emploi actuel il serait disponible à compter du 18 novembre 2019.

Ces éléments, corroborés par les pièces produites, confirment que le contrat de travail avait été formé dès acceptation par M [P] de la proposition présentée par la SAS Tesca France [Localité 1] le 11 septembre 2019 en sorte qu'à cette même date ce poste n'était plus disponible. En effet, dès lors que l'emploi, la rémunération et la période d'engagement sont précisées et que la date d'entrée en fonction dépend de l'intéressé, il ne peut s'agir que d'une offre de contrat de travail qui, dès qu'elle est acceptée, est concrétisée.

Comme l'indique à juste titre la SAS Tesca France [Localité 1], à la date du 25 septembre, date à laquelle le projet a été présenté aux membres du comité social et économique de Tesca France [Localité 1] et qui marque le début de l'obligation pour la société de rechercher les possibilités de reclassement, le poste de Responsable Achats famille Polyuréthane et Plastique n'était plus disponible au sein de Tesca France et ne pouvait dès lors figurer dans la liste des postes disponibles.

La cour administrative d'appel s'est du reste rangée à cette analyse.

9) Sur l'obligation de proposer les offres de reclassement aux mêmes conditions a tous les salariés :

L'intimé reprend en réalité la même argumentation que celle examinée supra au point 6 (Sur les reclassements anticipés déloyaux) à laquelle il a été répondu.

Il est fait grief à l'employeur, toujours sur la seule base du rapport de l'inspecteur du travail, d'avoir sélectionné quatre salariés qui se sont vu remettre une offre personnalisée d'emploi :

- M. [F] [C] pour le poste de Designer

- M. [O] [A] pour le poste pilote logistique gestion fournisseurs

- M. [K] [Y] pour le poste de Project quality leader

- M. [H] [M] pour le poste de responsable industrialisation textile.

Or, comme l'a relevé la cour administrative d'appel «ces postes, qui figuraient dans la liste des postes diffusés le 5 décembre 2019, n'ont pas été pourvus avant d'être également proposés aux autres salariés» et l'intimé ne démontre nullement en quoi il aurait été lésé par ce choix dans la mesure où ce n'est qu'in fine que ces quatre salariés ont été retenus pour ces affectations sans qu'il soit évoqué ni établi l'existence d'une application erronée des critères devant présider à ces choix.

Sur le reclassement externe

Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoyait en son article 6 :

«Afin de favoriser le reclassement externe des salariés dont le licenciement n'aura pu être évité, la Direction rappelle que les salariés bénéficieront de l'accompagnement de l'Antenne Emploi animé par des référents du cabinet de reclassement.

En outre, la société TESCA France [Localité 1] propose des mesures d'accompagnement. Il est d'ores et déjà précisé que ces mesures viseront uniquement les cas des salariés pouvant justifier, pendant la durée équivalente à celle du contrat de sécurisation professionnelle, d'une des solutions professionnelles identifiées suivantes :

- d'un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) ou d'un projet professionnel en CDI

ou CDD ou CTT (minimum 6 mois) ;

- d'un projet professionnel de reprise ou de création d'entreprise ;

- d'un projet de formation d'adaptation diplômante ou qualifiante

Le salarié ne pourra bénéficier que des aides propres à la solution professionnelle qui aura été validée par l'Antenne Emploi.

Le salarié qui aura validé et identifié sa solution professionnelle avant la notification du licenciement et n'aura donc pas besoin d'adhérer au contrat de sécurisation professionnelle pourra néanmoins bénéficier des aides ci-après si sa solution professionnelle identifiée a été validée par l'Antenne Emploi.

6.1 Les aides en cas d'identification d'un projet professionnel en CDI ou CDD (l'OVE -Offre Valable d'Emploi)

a) Les engagements de l'Antenne Emploi

L'Antenne Emploi s'engage à proposer aux salariés actifs (tels que définis ci-dessus), dans le cadre de leur accompagnement, qui souhaitent retrouver un emploi salarié (en CDI ou CDD ou CTT d'au moins 6 mois) 2 OVE (Offre Valable d'Emploi). »

L'intimé estime qu'aucune autre condition n'est posée dans cet article que celle d'être un salarié dont le licenciement n'a pu être évité.

Il réfute l'analyse de la SAS Tesca France [Localité 1] selon laquelle pour bénéficier des offres valables d'emploi formulées par l'antenne emploi, les salariés devraient déjà bénéficier d'un CDI, CDD ou CTT de plus de 6 mois, d'une reprise d'entreprise ou d'une formation ce qui revient à vider l'obligation de son objet.

Il estime que le titre du chapitre ne peut se concevoir que comme définissant les aides en cas

d'identification, par l'antenne Emploi (et non pas par le salarié), d'un projet professionnel en CDI ou CDD, que ces aides consistent justement à proposer au salarié licencié deux offres valables d'emploi qui ont été préalablement identifiées par l'antenne ce qu'a compris la DIRECCTE dans la décision d'homologation du PSE en motivant ainsi : «CONSIDERANT que le document unilatéral prévoit des mesures d'accompagnement au reclassement externe telles que :

(...)

- la mise en place d'une Antenne Emploi afin de faciliter le reclassement en externe des salariés licenciés, qui sera notamment en charge de proposer aux salariés concernés:

- (...)

- deux Offres Valables d'Emploi.

(...) ;»

La SAS Tesca France [Localité 1] considère au contraire que seuls les salariés actifs pouvaient se voir proposer une offre valable d'emploi.

Aux termes de l'article 1.2 du plan de sauvegarde de l'emploi :

«Le bénéfice de l'accompagnement de l'Antenne Emploi sera réservé aux salariés qui auront signé la Charte d'adhésion et d'engagement mutuel (cf. Annexe 4). Dans le cadre de cette Charte, il sera demandé aux salariés d'avoir une démarche active.

Est considéré comme « actif», le salarié qui :

- Adhère globalement aux modalités de l'accompagnement du cabinet,

- Participe aux différentes prestations proposées par les consultants (animations, ateliers, entretiens individuels)

- Mène personnellement une démarche de recherche active et tient son consultant informé

- Se présente aux entretiens de recrutement organisés par les consultants.

L'objectif assigné à l'Antenne Emploi est que chaque salarié actif`soit engagé dans une solution professionnelle identifiée à l'issue de l'accompagnement».

La SAS Tesca France [Localité 1] rappelle sans être utilement démentie que l'intimé n'a pas adhéré à l'antenne emploi en sorte qu'il ne pouvait prétendre au bénéfice de cette offre.

En effet, l'intimé ne justifie pas répondre aux conditions fixées par cet article pour être considéré comme salarié actif.

Il en résulte que l'appelante a satisfait à son obligation de recherche de reclassement externe.

Sur l'indemnité de préavis

La SAS Tesca France [Localité 1] fait justement observer que l'intimé a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle et qu'elle a déjà versé le montant de l'indemnité compensatrice de préavis, et des congés payés y afférents, au profit de Pôle emploi, devenu France Travail, en sorte que ce dernier ne peut prétendre à aucun rappel au titre du préavis et des congés payés y afférents dans la mesure où il y a expressément renoncé en adhérant au contrat de sécurisation professionnelle.

Dès lors que le licenciement n'est pas déclaré dénué de cause réelle et sérieuse, le salarié ayant adhéré au contrat de sécurisation professionnelle ne peut prétendre au paiement de l'indemnité de préavis.

Le jugement sera donc réformé de ce chef également.

Sur l'obligation de formation

Il sera relevé que l'intimé, au dispositif de ses écritures, ne demande pas l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnités pour non-respect de l'obligation de formation. En effet, la demande d'infirmation ne porte que sur le montant des sommes allouées au salarié.

La cour n'est par conséquent saisie d'aucun appel de chef.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en l'espèce.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

- Infirme, dans les limites de la saisine de la cour, le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- Statuant à nouveau,

- Déboute M. [C] [N] de l'ensemble de ses prétentions,

- Rappelle en tant que de besoin que le présent arrêt infirmatif tient lieu de titre afin d'obtenir le remboursement des sommes versées en vertu de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire,

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne M. [C] [N] aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par le président et par le greffier.