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Décisions

CA Versailles, ch. civ. 1-4 construction, 11 mars 2024, n° 21/02783

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Daniel Nee Facade (SAS)

Défendeur :

Allianz IARD (SA), Vetisol (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Trouiller

Conseillers :

Mme Romi, Mme Paccioni

Avocats :

Me Buquet-Roussel, Me Debray, Me Duvernoy, Me Lepage

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP Nan…

25 mars 2021

FAITS ET PROCÉDURE

L'OPH Seine-Saint-Denis habitat (ci-après « l’OPH) est propriétaire de la cité [Adresse 7] à [Localité 6].

Par un marché conclu le 15 juin 2012 cet office public a confié à la société Daniel Nee Façade (ci-après « société DNF ») la réalisation de travaux de ravalement et d'isolation thermique des façades

La société DNF a fait appel à la société Vetisol, assurée par la société Allianz, en qualité de fournisseur de matériaux.

L'opération a débuté le 1er octobre 2012.

La société DNF a passé commande de prototypes auprès de la société Vetisol en novembre 2012 qu'elle a reçus le 16 décembre 2012. Les 11 avril, 3 juillet, et 7 novembre 2013, elle a passé commande des panneaux et fournitures dont les livraisons se sont échelonnées du 17 juin 2013 au 21 janvier 2014.

La société DNF a sous-traité à la société RP la pose des panneaux selon six contrats de sous-traitance échelonnés du 2 janvier au 2 avril 2013.

La réception a été prononcée le 3 avril 2014, avec les réserves suivantes :

- remplacer les plaques de vêture dont le parement est dégradé (traces blanches) sur la façade arrière du bâtiment 2 ainsi que sur les pignons des bâtiments 2 et 4 (côté chaufferie),

- remplacer les câbles des paraboles endommagés par l'entreprise.

Des traces blanches sont en effet apparues sur la façade arrière du bâtiment 4, la façade avant du bâtiment 2, les pignons des bâtiments 2 et 4.

À la demande de l'assureur de la société DNF, une expertise amiable a été réalisée.

Par acte d'huissier du 7 mars 2016, la société DNF a fait assigner en référé devant le tribunal de commerce de Paris la société Vetisol et son assureur la société Allianz, la société RP et son assureur Elite Insurance, et l'OPH.

Une expertise judiciaire a été ordonnée le 15 avril 2016 et confiée à M. [D]. La mission a été étendue selon ordonnance du 14 octobre 2016 aux pignons et façades d'autres bâtiments.

La société RP a été placée en liquidation judiciaire et radiée le 27 avril 2017.

L'expert a déposé son rapport le 28 juin 2019.

Par actes d'huissier des 4 et 10 janvier 2018 la société DNF a fait assigner au fond les sociétés Elite Insurance, Allianz et Vetisol devant le tribunal judiciaire de Nanterre.

Une ordonnance a prononcé le sursis à statuer et le retrait du rôle le 3 juillet 2018.

À la demande de la société DNF, l'affaire a été réinscrite au rôle en juillet 2019.

La société Elite Insurance était défaillante et l'OPH Seine-Saint-Denis Habitat est intervenu volontairement à l'instance le 6 février 2020.

Par un jugement réputé contradictoire du 25 mars 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

- reçu l'intervention volontaire de l'OPH Seine-Saint-Denis Habitat,

- déclaré les demandes formées par l'OPH à l'encontre de la société Vetisol et de son assureur la société Allianz irrecevables comme prescrites,

- déclaré les demandes de l'OPH à l'encontre de la société DNF recevables,

- déclaré recevable l'action de la société DNF à l'encontre des sociétés Vetisol et de son assureur la société Allianz,

- déclaré la demande de condamnation au titre d'une résistance abusive de la société DNF  à l'encontre de la société Elite Insurance irrecevable,

- débouté la société DNF de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Vetisol, et de son assureur la société Allianz, en ce comprises les demandes au titre des dépens et frais irrépétibles,

- condamné in solidum la société DNF et la société Elite Insurance, ès qualités d'assureur de la société RP, à payer à l'OPH Seine-Saint-Denis habitat la somme de 307 165,27 euros TTC,

- débouté Seine-Saint-Denis habitat de sa demande de condamnation de la société DNF et des défendeurs à lui payer la somme de 4 000 euros,

- condamné la société Elite Insurance ès qualités d'assureur de la société RP, dans les limites de la police souscrite, à payer à la société DNF 10 % du montant retenu pour la reprise des désordres soit un total de 30 716,52 euros TTC,

- débouté la société DNF de sa demande de condamnation à des dommages et intérêts au titre d'une résistance abusive,

- condamné la société DNF aux dépens, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire réalisée en référé, à concurrence de 90 %, dont distraction au profit de Me Elsa Magali Pinder et de Me Sandrine Lepage pour ceux dont elles auront fait l'avance,

- condamné la société Elite Insurance au paiement de 10 % des dépens, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire réalisée en référé, dont distraction au profit de Me Elsa Magali Pinder et de Me Sandrine Lepage, pour ceux dont elles auront fait l'avance sans en avoir reçu provision,

- condamné la société DNF à payer la somme de 5 000 euros à la société Vetisol et la somme de 2 000 euros à la société Allianz,

- débouté l'OPH de sa demande au titre des frais irrépétibles,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a retenu que l'intervention volontaire de l'OPH était recevable en sa qualité de maître d'ouvrage de l'immeuble affecté de désordres.

Il a relevé, au visa de l'article 31 du code de procédure civile, que la société DNF avait intérêt à agir contre son cocontractant Vetisol, ayant elle-même été mise en demeure par le maître d'ouvrage de réparer les désordres.

Il a également retenu, en application des articles 1792 et suivants, 2224, 2241, 1641 et 1642 du code civil que l'action du maître d'ouvrage à l'encontre de la société DNF, constructeur, se prescrivait par 10 ans à compter de la réception intervenue le 3 avril 2014 et que son action en responsabilité contractuelle du 9 février 2020 n'était pas prescrite.

Il a en revanche retenu que les demandes du maître d'ouvrage à l'encontre des sociétés Vetisol, RP et Elite Insurance sur le terrain délictuel étaient prescrites pour avoir été intentées plus de 5 ans à compter du 3 avril 2014, date à laquelle il a pris connaissance des défauts entachant les plaques livrées.

Il a aussi relevé que les demandes de la société DNF n'étaient pas précisées quant à leur fondement juridique, que le vice lié à un défaut de fabrication n'était pas apparent lors de la livraison et que l'action en garantie des vices cachées, qui devait être engagée dans les deux ans à compter de la découverte du vice rédhibitoire, était prescrite comme n'ayant pas été introduite avant le 12 février 2016. Il a aussi retenu que la demande en responsabilité contractuelle, bien que non prescrite, devait être rejetée car non justifiée.

Concernant les demandes de l'OPH, il a retenu, au visa des articles 472 du code de procédure civile et 1134 et 1135, 1147, 1382 anciens du code civil et L. 124-3 et L. 112-6 du code des assurances, que la dégradation des panneaux ayant été observée en cours de chantier, puis ayant fait l'objet de réserves suivies d'une mise en demeure d'y remédier dans le délai de parfait achèvement, le manquement de la société DNF à son obligation de résultat était caractérisé.

Par ailleurs, il a relevé que si la société DNF démontrait que ces désordres esthétiques étaient liés à une cause étrangère, en l'espèce le vice né d'un défaut de fabrication de l'enduit des panneaux, cette cause étrangère n'était pour autant pas de nature à la dégager de la garantie solidaire avec le fabriquant, visée à l'article 10 précité du CCTP, qu'elle avait acceptée, non plus qu'à celle de garantir le maître de l'ouvrage des conséquences des intempéries sur l'ouvrage.

Il a aussi retenu que les conditions de stockage des produits n'avaient pas été respectées, d'où il ressortait que la société RP engageait aussi sa responsabilité.

Le tribunal s'est ensuite prononcé sur le montant des travaux de reprise et le préjudice de l'OPH.

Par ailleurs, il a relevé, s'agissant de l'action de la société DNF à l'encontre de la société Elite Insurance, qu'en application des articles 1147 ancien du code civil et L. 124-3 et L. 112-6 du code des assurances celle-ci devait être condamnée dans les limites de sa police.

La société Daniel Nee Façade a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 29 avril 2021.

Aux termes de ses conclusions remises le 13 janvier 2022, la société Daniel Nee Façade demande à la cour :

- de constater qu'elle n'est pas prescrite en son action,

- d'infirmer en tous points le jugement,

- de condamner in solidum la société Vetisol et son assureur la société Allianz à lui payer les sommes suivantes : 371 998,44 euros TTC avec intérêts de droit à compter de l'assignation en date du 10 janvier 2018, 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et vexatoire, et de 30 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner in solidum la société Vetisol et son assureur la société Allianz aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise valorisés à la somme de 20 330,40 euros.

La société DNF fait valoir, sur le fondement des articles 1641 et 1642 du code civil, que le désordre n'était pas apparent à la livraison du matériel, mais qu'il est apparu après la pose, ce qui a impliqué une réserve à la réception par le maître de l'ouvrage. Elle soutient que la réception a eu lieu le 3 avril 2014, qu'elle a assigné en référé expertise avant l'expiration du premier délai et qu'avec l'ordonnance un nouveau délai de 2 ans a couru jusqu'au 15 avril 2018, qu'elle a assigné au fond le 18 janvier 2018, qu'elle est donc parfaitement recevable à l'encontre de la société Vetisol et de la société Allianz dans le cas où les désordres constatés et qualifiés par l'expert seraient considérés comme relevant des vices cachés de fabrication.

Elle soutient également que selon le rapport d'expertise, la société Vetisol est responsable à hauteur de 90 % et la société RP pour 10 %, d'où il ressort qu'elles sont responsables avec leur assureur, la société Allianz.

Aux termes de ses conclusions n°2 remises le 19 janvier 2022, la société Vetisol demande à la cour de :

- déclarer irrecevable pour être prescrite l'action de la société DNF à son encontre en garantie des vices cachés,

- pour le surplus, confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré les demandes formées par l'OPH à son encontre irrecevables comme prescrites, en ce qu'il a débouté la société DNF de l'ensemble de ses demandes à son encontre et en ce qu'il a débouté la société DNF de sa demande de condamnation à des dommages et intérêts au titre d'une résistance abusive,

- débouter l'OPH et la société DNF de l'intégralité des demandes formées à son encontre,

- condamner la société DNF  à lui payer en cause d'appel la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société DNF  aux entiers dépens d'appel,

- subsidiairement, réduire les demandes dans de notables proportions, hors taxes et sur justification, du seul coût des panneaux des façades à reprendre,

- ramener le montant de la réparation à la somme maximale de 110 354,88 euros,

- condamner la société Allianz à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre tant en principal qu'au titre des dépens et frais d'expertise,

- condamner la société Allianz à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Vetisol reprend l'argumentation du jugement sur la prescription de l'action sur les vices cachés et énonce qu'en outre cette demande n'est ni fondée ni justifiée car le vice rédhibitoire doit être grave, caché et antérieur à la conclusion du contrat, or il s'agit d'un vice esthétique qui ne compromet pas l'usage normal de la chose comme rappelé par le rapport d'expertise.

Par ailleurs, elle soutient que sur l'obligation de délivrer une chose conforme à la commande, il n'est ni allégué, ni démontré que les panneaux ne correspondaient pas à la commande passée, ni qu'ils ne présentaient pas les propriétés d'isolation escomptées.

De plus, elle fait valoir que ni en première instance, ni en cause d'appel, la société DNF n'allègue ni ne justifie de manquement de sa part susceptible d'engager sa responsabilité contractuelle. Elle ajoute qu'aucun manquement contractuel, d'information et de conseil, n'est démontré.

Elle fait également valoir qu'en application de ses conditions générales de vente, la mise en œuvre délibérée d'un produit qui aurait des défauts apparents esthétiques emporte du même coup et nécessairement l'acceptation et l'appropriation du produit et de fait le transport en la puissance et possession de l'acquéreur et que le vendeur n'est pas tenu des vices dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Elle soutient aussi que les désordres ne sont pas de nature décennale et qu'ils étaient apparents à la réception, qu'ils ne sont ni structurels ni généralisés mais d'ordre esthétique, que le point de départ de la prescription de 5 ans est au plus tard le 21 janvier 2014, date de la livraison, et qu'aucune réclamation n'a été formulée par l'OPH avant les conclusions d'intervention volontaire signifiées le 12 mars 2020. Par ailleurs, la société énonce qu'aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu et que les demandes formées à son égard par l'OPH sont prescrites.

Elle énonce enfin que la société Allianz doit, en tout état de cause, la garantir au titre de l'article L. 113-17 du code des assurances, dans la mesure l'assureur qui prend la direction du procès intenté à l'assuré est censé aussi renoncer à toutes les exceptions dont il avait connaissance lorsqu'il a pris la direction du procès, jurisprudence qui s'étend aux exclusions de garantie, ce qui est le cas en l'espèce.

De plus, elle soutient qu'en application des articles L. 113-1 et L. 112-4 du code des assurances, les clauses d'exclusions doivent être stipulées en caractères très apparents et doivent être formelles et limitées, ce qui n'est pas le cas ici.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives remises le 17 décembre 2021, la société Allianz forme appel incident et demande à la cour :

- de débouter la société DNF  de l'ensemble de ses demandes irrecevables et mal fondées,

- de juger que l'OPH ne formule aucune demande, dans le cadre de ses conclusions d'intimée signifiées le 25 octobre 2021, à l'encontre de la société Vetisol et/ou à son égard,

- de déclarer l'appel de la société DNF  mal fondé et de la débouter de l'ensemble de ses demandes,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé sa mise hors de cause,

- de juger que la société DNF avait connaissance du défaut affectant les plaques au plus tard le 12 février 2014, que ce n'est que par exploit délivré le 7 mars 2016, que la société DNF a cru bon d'ester à l'encontre notamment des sociétés Vetisol, Allianz, RP et que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré prescrite l'action en garantie des vices cachées comme n'ayant pas été introduite avant le 12 février 2016,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré prescrite l'action de la société DNF sur le fondement des vices cachés rédhibitoires, en ce qu'il a débouté la société DNF  de ses demandes formées à son encontre,

- de débouter la société DNF , et tout contestant aux présentes de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- de prononcer sa mise hors de cause pure et simple,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société DNF  à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- à titre subsidiaire, de juger que les vices allégués ne sont nullement rédhibitoires au sens de l'article 1641 du code civil, que l'action en non-conformité du produit n'est pas étayée, que l'action fondée sur les prétendus vices cachés/non conformités des produits n'est donc pas fondée, qu'aucun manquement au devoir d'information et de conseil ne peut être reproché à la société Vetisol, que la société Vetisol a parfaitement satisfait à ses obligations contractuelles et que les désordres ont pour origine un défaut de stockage des vêtures imputables à la société DNF et la société RP et non un défaut du produit fourni par la société Vetisol,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société DNF de ses demandes formées à son encontre,

- de débouter la société DNF , et tout contestant aux présentes de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- de prononcer sa mise hors de cause pure et simple,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société DNF à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- à titre très subsidiaire, si la cour devait considérer que les désordres n'ont pas pour origine un défaut de stockage mais un vice apparent du matériau, il ne pourrait, en tout état de cause, que les débouter de l'ensemble de leurs demandes, le vendeur n'étant « pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même »,

- de juger que la société DNF ne justifie nullement avoir réalisé les travaux de reprise, que la société DNF ne craint pas de solliciter à nouveau devant la cour d'appel la condamnation de la société Allianz à lui verser la somme de 371 998,44 euros TTC au titre des travaux de reprise, alors même que le tribunal a alloué à l'OPH une somme inférieure, que nul ne plaide par procureur, que la société DNF ne justifie d'aucune qualité/intérêt à solliciter l'octroi d'une telle indemnité, que la société DNF ne justifie nullement du bien-fondé du principe et du quantum de ses demandes formulées à titre des dommages et intérêts, frais irrépétibles et dépens, que la société DNF bénéficie d'ores et déjà d'un appel en garantie à hauteur de 10 % à l'encontre de la société Elite Insurance, tel qu'accordé à son profit par les premiers juges et que sauf à bénéficier d'un enrichissement sans cause, la société DNF est dépourvue de tout intérêt à agir pour la quote-part de responsabilité mis à la charge de l'assureur de son sous- traitant,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société DNF de l'ensemble de ses demandes telles que dirigées à son encontre comme mal fondées,

- de débouter la société DNF et tout contestant aux présentes de l'ensemble de leurs demandes,

- de prononcer sa mise hors de cause pure et simple,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société DNF à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- à titre subsidiaire, de juger que sont exclus du contrat souscrit par la société Vetisol les dommages à l'ouvrage livré et que le risque couvert par le contrat souscrit sous le n° 084213462 n'est pas réalisé en l'espèce,

- de juger mal fondée l'argumentation développée par la société Vetisol à son encontre, notamment s'agissant des questions relatives à la direction du procès et aux clauses d'exclusions,

- de confirmer, si besoin par substitution de motifs, le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société DNF de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions telles que dirigées à son encontre comme mal fondées,

- de débouter la société DNF, et tous contestants aux présentes, notamment la société Vetisol, de l'ensemble de leurs demandes,

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société DNF à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

- de prononcer sa mise hors de cause pure et simple,

- à titre infiniment subsidiaire, de la recevoir en son appel incident et l'y déclarer recevable et bien fondée, en réformant le jugement entrepris,

- de juger qu'aucune indemnité ne saurait être allouée au titre des travaux de reprise excédant 6/16ème de 279 241,16 euros HT, soit 104 715,43 euros HT,

- de juger que les sommes allouées ne peuvent être arrêtées qu'hors taxes,

- d'infirmer, en tant que de besoin, de réformer le jugement entrepris s'agissant du quantum des travaux de reprise et de juger que le montant de l'indemnité allouée à l'OPH ne saurait excéder 6/16ème de 279 241,16 euros HT, soit 104 715,43 euros HT,

- de juger qu'aucune condamnation ne saurait être prononcée à son encontre excédant la quote-part de responsabilité qui serait retenue à l'encontre de la société Vetisol, qu'aucune condamnation ne saurait être prononcée à son encontre excédant les limites du contrat 084213462, notamment en termes de plafonds, que toute condamnation qui serait prononcée à son encontre ne pourrait être que sous déduction des franchises contractuellement dues et que la société DNF doit donc répondre tant des manquements de son sous-traitant, la société RJ, que de ses propres manquements parfaitement consacrés par les premiers juges,

- de condamner la société DNF  à la relever et la garantir indemne de toute condamnation prononcée à son encontre, excédant le pourcentage de responsabilité qui serait retenu à l'encontre de la société Vetisol en principal, intérêts et frais et capitalisation de ces sommes conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- de condamner la société DNF  à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, lesquels pourront être recouvrés par Me Christophe Debray, avocat, et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Allianz fait valoir que le jugement doit être confirmé en son raisonnement sur la prescription de l'action de la société DNF  en raison de l'écoulement du délai de 2 ans.

Elle soutient également que la société Vetisol n'a commis aucun manquement à l'égard de la société DNF sur le fondement des articles 1641 et suivant sud code civil ou sur le fondement de la responsabilité contractuelle des articles 1231-1 et suivants du code civil. Elle soutient qu'il n'y a pas de vices cachés ou de non-conformité du produit, ni de responsabilité contractuelle relevant d'un manquement éventuel à un devoir d'information ou de conseil. Par ailleurs, la société énonce que les désordres ont pour origine un défaut de stockage des vêtures et non un défaut du produit fourni par la société Vetisol.

Elle discute ensuite du mal fondé des demandes au titre des travaux de reprise et autres préjudices en leur principe en quantum.

Elle soutient ensuite que le contrat responsabilité civile souscrit auprès de Gan Eurocourtage, aux droits de laquelle intervient la société Allianz, exclut les dommages à l'ouvrage livré, ce qui est en cause en l'espèce, d'où il ressort qu'aucune condamnation ne peut être prononcée à son encontre.

S'agissant des demandes de la société Vetisol formulée contre elle, elle énonce que la procédure contentieuse n'est pas de son fait, qu'elle ne pouvait ignorer le contenu de son contrat d'assurance même si elle l'a pris par le biais d'un courtier, qu'elle n'a elle-même jamais renoncé à se prévaloir de quelque exception de garantie que ce soit puisque au contraire, elle a pris le soin d'alerter systématiquement le courtier sur les limites de garantie, et qu'en définitive, elle ne peut actionner dans ce cas que son courtier pour ne pas l'avoir alerté sur les réserves formelles opposées par la société Allianz.

Elle fait également valoir que la société Vetisol ne peut soutenir que le contrat et ses clauses sont ambiguës car elles sont apparentes, formelles et limitées. Par ailleurs, elle soutient que les dommages en cause sont consécutifs à un dommage expressément exclu des garanties, d'où il découle que sa garantie des dommages non consécutifs n'a pas vocation à être mobilisées en l'espèce.

A titre infiniment subsidiaire, la société discute des quantums.

Aux termes de ses conclusions n°2 remises le 14 décembre 2021, l'OPH Seine-Saint-Denis habitat demande à la cour de :

- confirmer le jugement concernant les dispositions qui lui sont relatives et notamment celles condamnant in solidum la société DNF et la société Elite Insurance, ès qualité d'assureur de la société RP, à lui payer la somme de 307 165,27 euros TTC,

- débouter la société Allianz de son appel incident et la société Vetisol de sa demande subsidiaire, concernant le quantum des travaux de reprise,

- condamner la société DNF aux entiers dépens qui seront recouvrés par Me Sandrine Lepage, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'OPH fait valoir que le rapport d'expertise a établi que les désordres n'ont pas pour seule origine un défaut de stockage mais aussi un défaut de fabrication, que la société DNF aurait dû vérifier les documents techniques pendant la réalisation des travaux et veiller au respect des prescriptions de stockage, ce qui n'a pas été fait et constitue un manquement contractuel, mais également la responsabilité solidaire et conjointe des fabricants des produits en application de l'article 10 du CCTP.

L'OPH discute ensuite des montants des travaux de reprise.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2022 et l'affaire a été initialement appelée à l'audience du 23 janvier 2023, puis renvoyée à l'audience du 8 janvier 2024, date à laquelle l'affaire a été mise en délibéré au 11 mars 2024.

Motivation

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre préliminaire, la cour constate que l'OPH n'a émis aucune contestation du jugement. Les dispositions déclarant prescrites ses demandes et le déboutant sont par conséquent définitives de même que les dispositions lui octroyant la somme de 307 165,27 euros TTC qui ne sont pas contestées par l'appelante dans ses écritures en dépit d'une demande d'infirmation « en tous points » du jugement.

De la même façon, la société Elite insurance CY n'ayant pas été intimée, les dispositions du jugement relatives à celle-ci sont définitives.

Sur la recevabilité de l'action de la société DNF à l'encontre de la société Vetisol

Le tribunal a estimé, indépendamment du bien-fondé de son action, que la société DNF avait un intérêt à agir à l'encontre de son co-contractant, ce qui n'est pas contesté à hauteur d'appel.

Après avoir relevé que ni la garantie des vices cachés, ni l'action en non-conformité n'étaient invoquées par la société DNF, le tribunal a retenu que ces deux fondements étaient prescrits mais que l'action en responsabilité contractuelle était recevable.

La cour constate qu'à hauteur d'appel, la société DNF invoque désormais d'une part les vices cachés et subsidiairement la responsabilité contractuelle de la société Vetisol. Elle estime que le point de départ du délai biennal ou du délai quinquennal doit être fixé au 3 avril 2014, date de la réception avec réserves et qu'ayant assigné le 7 mars 2016, elle n'est pas prescrite.

Au visa non contesté des articles 1641, 1642 et 1648 du code civil, il est désormais acquis que l'action en garantie des vices cachés doit être exercée par l'acquéreur dans un délai de prescription de deux ans, courant à compter de la découverte du vice.

En l'espèce, il ressort du dossier que la société DNF ne peut prétendre avoir découvert les défauts affectant les plaques qu'au moment de la réception prononcée avec réserves le 3 avril 2014.

En effet, la société Vetisol a constaté dès le 19 juin 2013 que les plaques n'étaient pas stockées conformément aux préconisations du fournisseur et a, par courrier du 18 juillet 2013 alerté la société DNF sur ce non-respect des règles de stockage des produits.

Il apparaît que la dernière livraison de plaques est intervenue sans réserve le 21 janvier 2014 et qu'à la suite d'une réunion ayant eu lieu le 12 février 2014, la société DNF a, par courriel du 20 février, réclamé le remplacement de 620 plaques et que la société Vetisol lui a répondu le 27 février que les phénomènes constatés étaient principalement dus à un stockage inapproprié.

Les parties n'ont pas contesté les conclusions de l'expert qui a constaté la coloration de la surface exposée et qualifié ces désordres d'esthétiques sans atteinte à la destination de l'immeuble. Il a relevé que les décolorations étaient visibles sur les panneaux en cours de chantier.

C'est par conséquent à juste titre que le tribunal a retenu que la société DNF avait eu connaissance des défauts des matériaux dès le 12 février 2014. Son assignation du 7 mars 2016, est par conséquent tardive pour invoquer le fondement des vices cachés.

Au demeurant, il doit être rappelé qu'un défaut esthétique ne rentre pas dans la catégorie des vices cachés mais qu'il engage la responsabilité contractuelle du vendeur pour manquement à son obligation de délivrer une chose conforme.

Dès lors, c'est bien de délai de prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil qui a vocation à s'appliquer à l'action de la société DNF. Le point de départ de ce délai doit être fixé au 12 février 2014, correspondant au jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Ayant fait délivrer son assignation à la société Vétisol le 7 mars 2016, le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action en responsabilité contractuelle de la société DNF à l'encontre de la société Vetisol.

Sur le bien-fondé de l'action de la société DNF à l'encontre de la société Vetisol

À l'appui de son appel, la société DNF fait valoir que son assureur a conclu à la pleine et entière responsabilité de la société Vetisol et souligne que l'expert a conclu à la responsabilité du fournisseur à hauteur de 90 % et à hauteur de 10 % concernant la problématique du stockage traité par la société RP.

Au regard de ce qui précède, seul doit être examiné le fondement contractuel.

Pour rejeter cette demande, le premier juge a relevé que la société DNF se bornait à rappeler les conclusions de l'expert pour faire état d'un défaut de fabrication atteignant l'enduit de revêtement des plaques d'isolation, qu'aucun manquement à l'obligation de conseil et d'information n'était allégué ni établi et qu'aucun manquement du fabriquant vendeur des produits susceptibles d'engager sa responsabilité à l'égard de la société DNF n'était argumenté.

Force est de constater qu'aucun manquement contractuel imputable à la société Vetisol n'est allégué par l'appelante à hauteur d'appel.

Au contraire, le courrier adressé le 18 juillet 2013 à la société DNF, confirme que la société Vetisol a respecté son devoir de conseil et d'information en tant que vendeur et qu'elle a alerté la société DNF sur les risques inhérents à un stockage défectueux.

L'expert a en revanche souligné (page 58) la responsabilité de la société DNF quant à la surveillance et au contrôle des travaux ainsi qu'au stockage des produits à mettre en œuvre par son sous-traitant.

Partant le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la société DNF de sa demande à l'encontre de la société Vetisol et de son assureur.

Comme en première instance, la société DNF a réitéré dans les mêmes termes sa demande au titre d'une prétendue résistance abusive et vexatoire et s'est également abstenue de développer la moindre allégation ou argumentation juridique dans ses conclusions d'appel.

Le jugement est par conséquent confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes.

Sur les autres demandes

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer intégralement le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant dans son appel, les dépens d'appel resteront à la charge de la société DNF qui conservera la charge de ses frais irrépétibles.

Il n'apparaît pas inéquitable d'octroyer à la société Vetisol une somme de 5 000 euros et à la société Allianz une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant en dernier ressort, après débats en audience publique, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions dans les limites des appels interjetés ;

Y ajoutant,

Condamne la société Daniel Nee Façade aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement par Me Christophe Debray et Me Sandrine Lepage dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société Daniel Nee Façade à payer la somme de 5 000 euros à la société Vetisol et la somme de 2 000 euros à la société Allianz IARD.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.