Cass. 2e civ., 20 janvier 2022, n° 19-22.435
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pireyre
Rapporteur :
M. Pradel
Avocat général :
M. Grignon Dumoulin
Avocats :
SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Spinosi
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 6 juin 2019), par jugement du 3 mai 2007, un tribunal de grande instance a condamné la société La Logne, propriétaire, au sein d'une copropriété, du lot voisin de celui de Mme [K], à détruire un cellier et à cesser l'activité de toilettage pour chiens qui était exercée sur place, et ce, pour chaque obligation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification du jugement.
2. Par un arrêt du 14 décembre 2011, signifié le 5 janvier 2012, une cour d'appel a confirmé en toutes ses dispositions ce jugement.
3. Mme [K] a assigné la société La Logne aux fins d'obtenir la liquidation et le paiement de l'astreinte.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. La société La Logne fait grief à l'arrêt de liquider les astreintes aux sommes de 7 200 euros et 35 805 euros et de la condamner en conséquence à payer ces sommes à Mme [K], alors « que l'action en liquidation d'une astreinte est soumise au délai de prescription des actions personnelles et mobilières prévu à l'article 2224 du code civil ; qu'en statuant ainsi au regard des « dates auxquelles il est prétendu que la mise en conformité a été effectuée », la cour, qui s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser la recevabilité, au regard de la prescription, de l'action en liquidation de l'astreinte, a privé sa décision de base légale au regard de ce texte. »
Réponse de la Cour
5. C'est sans encourir le grief du moyen que la cour d'appel a décidé, abstraction faite du motif surabondant critiqué par le moyen, que c'est à partir de la date de la signification de l'arrêt confirmatif de la décision du 14 décembre 2011 que les astreintes avaient commencé à courir et que la prescription de l'action aux fins de liquidation n'était pas acquise.
6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
7. La société La Logne fait le même grief à l'arrêt, alors « que le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter, mais aussi de ses facultés ; qu'en statuant par de tels motifs impropres à permettre à la Cour de cassation de s'assurer de ce que le montant de l'astreinte n'était pas disproportionné au regard des facultés de la société condamnée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 134-1 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble le principe de proportionnalité et l'article 1er du Protocole n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant le droit de propriété contre les atteintes injustifiées. »
Réponse de la Cour
8. Pour liquider l'astreinte, l'arrêt retient que la démolition du cellier est encore imparfaite, et que l'incidence des périodes estivales n'est pas une cause déterminante de l'inexécution, de sorte qu'en l'absence de toute bonne foi de la part des débiteurs de l'obligation, le principe d'une suppression de la pénalité n'est pas envisageable. Il relève cependant que des points positifs peuvent être relevés dans le comportement des intéressés puisque l'activité de toilettage a été interrompue et le cellier partiellement démonté.
9. Il ajoute qu'en raison de l'absence de limitation de l'astreinte dans le temps, la durée à prendre en compte au titre de la liquidation, certes liée aux mauvais choix stratégiques et procéduraux des débiteurs des obligations, rend nécessaire d'opérer un contrôle de proportionnalité afin d'éviter, par le prononcé d'une condamnation quasi confiscatoire, une atteinte injustifiée au droit de propriété.
10. En l'état de ces constatations et énonciations, dont il résulte qu'elle a pris en compte tant le comportement des débiteurs de l'obligation que les difficultés auxquelles ils s'étaient heurtés pour l'exécuter, et qu'elle s'est assurée que le montant de l'astreinte liquidée était raisonnablement proportionné à l'enjeu du litige, la cour d'appel, qui n'avait pas à prendre en considération les facultés financières des débiteurs, a, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, liquidé l'astreinte au montant qu'elle a retenu.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.