CA Bordeaux, 4e ch. com., 20 mars 2024, n° 22/00139
BORDEAUX
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Durepaire (SAS), Montage d’Installations Industrielles Loudéacienne (SARL)
Défendeur :
MMA Iard (Sté), Gan Assurances (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Franco
Conseillers :
Mme Goumilloux, Mme Masson
Avocats :
Me Taillard, Me Tonin, Me Le Barazer, Me Lapous, Me Aimard, Me Della-Libera, Me La Grange
EXPOSE DU LITIGE :
La société par actions simplifiée Durepaire a pour activité la fabrication de matières premières entrant dans la composition d'aliments pour animaux, fabrication de granulés bois de chauffage et granulés à litière.
La société à responsabilité limitée Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne (ci-après Miil), assurée auprès de la société MMA Iard, a pour activité la fourniture, réfection, reconditionnement et maintenance de matériels de stockage et de fabrication nécessaire au fonctionnement de lignes de production.
Par devis du 11 janvier accepté le 5 février 2013, la société Durepaire a commandé à la société Miil des travaux d'un montant de 139.745 euros HT portant sur la restructuration de sa ligne de granulation et en particulier l'installation d'un élévateur à balancelle fabriqué par la société Geoffroy, assurée auprès de la société Gan Assurances.
Les travaux ont été réceptionnés avec des réserves le 8 juillet 2013.
En raison de dysfonctionnements récurrents, la société Durepaire a mis en demeure la société Miil le 3 septembre 2013 de régler la situation.
L'élévateur à balancelle a été remplacé en décembre 2013.
Il a été organisé une expertise amiable puis, le 10 mars 2015, le juge des référés du tribunal de commerce d'Angoulême a ordonné une expertise judiciaire, confiée à Monsieur [V] [J].
Le 27 avril 2018, la société Miil a fait assigner la société Durepaire devant le tribunal de commerce d'Angoulême en paiement du solde de sa prestation.
Le rapport d'expertise judiciaire a été déposé le 29 novembre 2018.
La société Miil a fait assigner les 12 et 19 août 2019 devant le tribunal de commerce d'Angoulême les sociétés MMA Iard et Gan Assurances.
Par jugement prononcé le 2 décembre 2021, le tribunal de commerce a statué ainsi qu'il suit :
- déclare prescrite l'action engagée par la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne et son assureur, la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la société MMA Iard, à l'encontre de la société Gan Assurances ;
- rejette la demande de la société MMA Iard Assurances Mutuelles et de la société MMA Iard ;
- dit que la garantie de la société MMA Iard Assurances Mutuelles et de la société MMA Iard des dommages immatériels non consécutifs trouve à s'appliquer avec un plafond de 300.000 euros ;
- constate que la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne n'a pas rempli ses obligations contractuelles ;
- constate que la société Geoffroy a respecté les obligations lui incombant ;
- rejette les demandes en paiement de la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne dirigée à l'encontre de la société Durepaire ;
- condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à livrer à la société Durepaire le matériel élévateur à balancelle, objet du devis n°3919 du 11 janvier 2013, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à partir du 6ème mois suivant la signification de la présente décision ;
- rejette l'ensemble des demandes d'indemnisation de la société Durepaire dirigées contre la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne ainsi que la demande de sursis à statuer ;
- condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Durepaire la somme de 3.000 euros ;
- condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Gan Assurances la somme de 1.000 euros ;
- condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à tous les dépens ;
- liquide les dépens du jugement à la somme de 109,74 euros ;
- ordonne l'exécution provisoire de la décision y compris dans ses dispositions relatives aux frais
irrépétibles et aux dépens ;
- déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires.
La société Miil a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe du 11 janvier 2022, en intimant les sociétés Durepaire, MMA Iard Assurances Mutuelles, MMA Iard et Gan Assurances.
Les sociétés Durepaire et MMA Iard ont chacune formé un appel incident.
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Par dernières conclusions notifiées le 20 octobre 2023, la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne demande à la cour de :
Vu les articles 1641 et suivants du code civil,
Vu l'article 113-17 du code des assurances,
- confirmer le jugement du tribunal de commerce d'Angoulême du 2 décembre 2021 en ce qu'il
a :
-déclaré recevable la société MMA Iard à intervenir à la présente instance,
-rejeté la demande de non garantie des sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard,
-dit que la garantie de la société MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard des dommages immatériels non consécutifs trouvait à s'appliquer avec un plafond de 300.000 euros,
-rejeté l'ensemble des demandes d'indemnisation de la société Durepaire contre la
société Miil ainsi que la demande de sursis à statuer,
-rejeté la demande avant dire droit de la société Durepaire au titre d'une demande de
provision à hauteur de 1.359.482 euros,
-rejeté les plus amples demandes de la société Durepaire, et notamment sa demande
subsidiaire visant à ordonner une expertise complémentaire ;
- réformer le jugement du tribunal de commerce d'Angoulême du 2 décembre 2021 en ce qu'il a :
-n'a pas statué sur les contestations élevées à l'encontre du rapport d'expertise déposé par M. [J] et sur la demande de rejet du rapport d'expertise présentée par la société concluante,
-déclaré prescrite l'action engagée par la société Miil et les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard à l'encontre de la société Gan Assurances,
-constaté que la société Miil n'avait pas rempli ses obligations contractuelles,
-constaté que la société Geoffroy avait respecté les obligations lui incombant,
-rejeté les demandes en paiement de la société Miil dirigée à l'encontre de la société Durepaire,
-condamné la société Miil à livrer à la société Durepaire le matériel élévateur à balancelle, objet du devis du 11 janvier 2013, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard à partir du 6ème mois suivant la signification de la décision,
-dit que le Tribunal se réservait la liquidation de l'astreinte,
-condamné la société Miil à payer à la société Durepaire la somme de 3.000 euros
-condamné la société Miil à payer à la société Gan Assurances la somme de 1.000 euros,
-condamné la société Miil à tous les dépens,
-ordonné l'exécution provisoire de la décision,
-débouté la société Miil de ses demandes plus amples ou contraires ;
Et, statuant à nouveau,
- juger que la société Durepaire en sollicitant le remplacement de l'élévateur à balancelle et en demandant à la société Miil de procéder à son remplacement a acquiescé à l'installation de son nouvel équipement et en conséquence débouter la société Durepaire de sa demande tendant à ce que la société Miil lui livre un équipement conforme au devis du 11 janvier 2013 ;
- débouter la société Durepaire de sa demande de préjudice à hauteur de la somme provisionnelle de 1.359.482 euros à compter de janvier 2014 pour défaut de livraison conforme ;
- débouter la société Durepaire de sa demande visant à ce que soit ordonnée une expertise complémentaire sur le préjudice qu'elle prétend avoir subi ;
- débouter la société Durepaire de ses demandes à hauteur de 19.600 euros et 60.000 euros en l'absence de lien de causalité avec les dysfonctionnements affectant l'élévateur ;
- limiter l'éventuel préjudice pouvant être réclamé par la société Durepaire sur la période de juillet à décembre 2013 à un montant de 70.000 euros ;
- débouter la société Durepaire de ses demandes à hauteur de 40.000 euros et 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile respectivement devant le tribunal de première instance et la cour ;
- réduire à plus justes proportions la somme à allouer à la société Durepaire au titre des frais irrépétibles ;
- déclarer qu'il n'y a pas lieu à homologation du rapport de Monsieur [J] et rejeter les conclusions de l'expert judiciaire et de son sapiteur au titre tant du volet technique que du volet financier et ce faisant rejeter de l'évaluation des préjudices concernant la période de dysfonctionnements de l'élévateur entre juillet et décembre 2013 ;
- condamner la société Durepaire, et /ou la société Gan Assurances, assureur de la société Geoffroy, au paiement des factures demeurées impayées de la société Miil, à savoir les sommes suivantes :
-la somme de 77.212,51 euros correspondant au solde restant dû sur les factures n° 11812 et 11854 en date des 31 mai 2013 et 30 juin 2013 (retenue en garantie par Durepaire) au titre de l'installation comprenant l'élévateur à balancelle,
-la somme de 42.241,28 euros au titre du coût d'intervention de la société Miil à la suite des désordres sur l'élévateur à balancelle Geoffroy,
-la somme de 41.151,34 euros HT au titre de l'installation de remplacement réalisée par Miil à la demande de la société Durepaire ;
- condamner solidairement les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances à prendre en charge toutes condamnations à intervenir du chef de la société Miil et notamment le montant des dommages et intérêts éventuellement alloués à la société Durepaire ou à défaut condamner les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances à relever et garantir la société Miil de toutes sommes susceptibles d'être mises à sa charge en principal, intérêts, frais et dépens ;
- déclarer que la société Geoffroy a engagé sa responsabilité dans la survenance des désordres affectant les élévateurs ;
- déclarer que l'action de la société Miil à l'encontre de la SA Gan Assurances est recevable en ce qu'elle n'est pas prescrite ;
- débouter la société Gan Assurances de sa demande formulée au titre de la prescription de l'action formée à son encontre ;
- débouter la société Gan Assurances de ses motifs de limitation de son obligation à garantie au titre des limites ou exclusions et plafonds figurant dans la police d'assurance ;
- juger que la société Gan Assurances a pris la direction du procès concernant son assurée et, ce faisant qu'elle a renoncé à se prévaloir des exclusions de garantie, limites de garantie et plafonds de garantie en application de l'article L. 113-17 du code des assurances ;
- condamner la société Gan Assurances à garantir la société Geoffroy à hauteur du plafond de garantie de 1.250.000 euros applicable sur les dommages matériels et immatériels consécutifs à des dommages matériels garantis ;
- condamner la société Gan Assurances à prendre en charge le montant des dommages éventuellement alloués à hauteur de 60% ou à défaut la condamner à relever et garantir la société Miil à hauteur de 60% des sommes susceptibles d'être mises à sa charge en principal, intérêts, frais et dépens ;
- débouter la société Gan Assurances de sa demande d'indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Gan Assurances, assureur de la société Geoffroy, à payer à la société Miil la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire dans le cadre de l'instance enregistrée sous les numéros RG 2014/010318 ;
En toute hypothèse,
- condamner la société Durepaire ou tout succombant à payer à la société Miil la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire dans le cadre de l'instance enregistrée sous les numéros RG 2014/010318.
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Par dernières écritures notifiées le 15 novembre 2023, la société Durepaire demande à la cour de :
Vu les articles 1603, 1641 et suivants du code civil,
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
'rejeté les demandes en paiement de la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à l'encontre de la société Durepaire,
'condamné la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à livrer à la société Durepaire le matériel élévateur à balancelle, objet du devis n°3919 du 11 janvier 2013, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à partir du 6ème mois suivant la signification du jugement,
'dit qu'il se réservait la liquidation de l'astreinte,
'condamné la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à tous les dépens,
'liquidé les dépens du jugement à la somme de 109,74 euros,
'ordonné l'exécution provisoire de la décision y compris dans ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens,
'débouté la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne de ses demandes autres, plus amples ou contraires ;
- infirmer le jugement pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
- condamner la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Durepaire la somme de 432.389 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice économique subi par la société Durepaire de juillet à décembre 2013 à raison des vices cachés et non-conformités affectant l'élévateur à balancelle installé en juillet 2013, subsidiairement à payer la somme de 384.826 euros au titre de ce préjudice ;
- condamner la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Durepaire les sommes suivantes :
'la somme de 19.600 euros au titre du préjudice financier ;
'la somme de 60.000 euros au titre du trouble au fonctionnement de l'entreprise ;
- avant dire droit sur la liquidation définitive du préjudice économique subi par la société Durepaire depuis le 1er janvier 2014 à raison du défaut de délivrance conforme, condamner la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Durepaire, à titre de provision, la somme de 1.359.482 euros ;
- ordonner le sursis à statuer dans l'attente de la livraison et de la mise en service de l'élévateur à
balancelle conforme au devis Miil n°3919 du 11 janvier 2013 ;
A titre subsidiaire,
- ordonner une expertise complémentaire sur le préjudice de la société Durepaire et notamment sur le préjudice subi par la société Durepaire depuis le 1er juillet 2014 et commettre à cet effet tout expert judiciaire de son choix avec mission habituelle en pareille matière ;
En tout état de cause,
- condamner les sociétés MMA Iard, MMA Iard Assurances Mutuelles et Gan Assurances à garantir la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne dans telle proportion que la cour jugera ;
- débouter la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne de ses demandes en paiement et de manière générale de toutes ses demandes plus amples ou contraires ;
- condamner la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Durepaire la somme de 40.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ;
- condamner la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Durepaire la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;
- condamner la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne aux entiers dépens de référé, de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise et les frais d'établissement des procès verbaux de constat du 9 et 13 septembre 2013.
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Par dernières écritures notifiées le 14 novembre 2023, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles demandent à la cour de :
Vu les articles 1231-1 et suivants, 1641 et suivants et 1603 du code civil,
Vu l'article L 113-17 du code des assurances,
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angoulême en ce qu'il -rejette l'ensemble des demandes d'indemnisation de la société Durepaire contre la société Miil ainsi que la demande de sursis à statuer,
-rejette la demande avant dire droit de la société Durepaire au titre du paiement d'une provision à hauteur de la somme de 1.359.482 euros,
-rejette la demande subsidiaire de la société Durepaire visant à ordonner une expertise complémentaire ;
- réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angoulême en ce qu'il :
-n'a pas statué sur les contestations élevées à l'encontre du rapport d'expertise déposé par M. [J] et sur la demande de rejet du rapport d'expertise présentée par la société Miil,
-écarte les motifs d'exclusion de garantie invoqués par les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard à l'appui d'une demande de mise hors de cause,
-déclare que la garantie des sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard des dommages immatériels non consécutifs trouve à s'appliquer avec un plafond de 300.000 euros,
-déclare prescrite l'action engagée par les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard et la société Miil à l'encontre de la société Gan Assurances,
-constate que la société Miil n'a pas rempli ses obligations contractuelles,
-constate que la société Geoffroy a respecté les obligations lui incombant ;
Et, statuant à nouveau,
A titre principal,
- déclarer que les sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles bien fondées à invoquer les exclusions de garantie figurant dans les Conventions spéciales de la police souscrite par la société Miil lesquelles s'appliquent sur l'ensemble des demandes de la société Durepaire ;
Par conséquent,
- prononcer la mise hors de cause des sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles sur les demandes de condamnation sous astreinte de la société Durepaire à livrer les élévateurs contractuellement prévus et à prendre en charge les sommes réclamées par la société Durepaire au titre de l'ensemble de ses préjudices économiques ;
- condamner la société Durepaire ou tout succombant à verser aux sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 3.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
A titre subsidiaire,
- dans l'éventualité où il serait jugé à l'application de la garantie relative aux dommages immatériels non consécutifs, déclarer les sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles bien fondées à invoquer le plafond de garantie d'un montant de 300.000 euros contractuellement fixé dans la police d'assurance et opposable à l'assuré et aux tiers ;
Par conséquent,
- débouter la société Durepaire et la société Miil de leurs demandes à l'encontre des sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles en ce qu'elles sont supérieures à la somme de 300.000 euros ;
- débouter la société Durepaire de sa demande de préjudice à hauteur de la somme provisionnelle de 1.359.482 euros à compter de janvier 2014 pour défaut de livraison conforme en application d'une clause d'exclusion de la garantie figurant dans la police d'assurance ;
- débouter la société Durepaire de sa demande visant à ce que soit ordonnée une expertise complémentaire sur le préjudice qu'elle prétend avoir subi ;
- débouter la société Durepaire de ses demandes à hauteur de 19.600 euros et 60.000 euros en l'absence de lien de causalité établi avec les dysfonctionnements affectant l'élévateur et en considération des exclusions de garantie figurant dans la police d'assurance ;
- déclarer qu'il n'y a pas lieu à homologation du rapport de Monsieur [J] et rejetter les conclusions de l'expert judiciaire et de son sapiteur au titre de l'évaluation des préjudices concernant la période de dysfonctionnements de l'élévateur entre juillet et décembre 2013 ;
Par conséquent,
- fixer à la somme maximale de 70.000 euros le préjudice pouvant être réclamé par la société Durepaire sur la période de juillet et décembre 2013 à l'exception de toute autre somme ;
- déclarer que la société Geoffroy a engagé sa responsabilité dans la survenance des désordres affectant les élévateurs ;
Par conséquent,
- déclarer que l'action des sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles à l'encontre de la société Gan Assurances est recevable en ce qu'elle n'est pas prescrite ;
- débouter la société Gan Assurances de ses motifs de prescription de l'action formée à son encontre, tant par les sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles que la société Miil ;
- condamner la société Gan Assurances à prendre en charge le montant des dommages éventuellement alloués à hauteur de 40% ou à défaut condamner la société Gan Assurance à relever et garantir les sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles à hauteur de 40% des sommes susceptibles d'être mises à leur charge en principal, intérêts, frais et dépens ;
- déclarer que la société GAN Assurance a pris la direction du procès concernant son assurée et, ce faisant, qu'elle a renoncé à se prévaloir des exclusions de garantie, limites de garantie et plafonds de garantie en application de l'article L. 113-17 du code des assurances ;
Par conséquent,
- débouter la société GAN Assurance de ses motifs de limitation de son obligation à garantie au titre des limites ou exclusions et plafonds figurant dans la police d'assurance ;
- condamner la société Gan Assurances à garantir la société Geoffroy à hauteur du plafond de garantie de 1.250.000 euros applicable sur les dommages matériels et immatériels consécutifs à des dommages matériels garantis ;
En toute hypothèse,
- débouter la société Durepaire de ses demandes à hauteur de 40.000 euros et 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile respectivement devant le tribunal de première instance et la cour ;
- condamner la société Durepaire ou tout succombant à payer aux sociétés MMA et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
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Par dernières conclusions notifiées le 21 novembre 2023, la société Gan Assurances demande à la cour de :
Vu les articles 1641,1648 du code civil,
Vu les articles L.112-1 et L 113-17 du code des assurances,
A titre principal,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Angoulême le 2 décembre 2021 ;
- débouter toutes les parties de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions formulées à l'encontre de la société Gan Assurances ;
A titre subsidiaire,
- juger que la société Gan Assurances ne saurait être tenue que dans les termes et limites de plafond et de garanties et de franchises du contrat souscrit par la société Geoffroy ;
- limiter la condamnation de la société Gan Assurances à la somme de 152.000 euros correspondant à son plafond de garantie, application faite de la franchise ;
En tout état de cause,
- condamner la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne et la société Durepaire, in solidum avec les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard, à verser à la société Gan Assurances la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
- condamner la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne et la société Durepaire, in solidum avec les sociétés MMA Iard Assurances Mutuelles et MMA Iard, aux entiers dépens tant de première instance que d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
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L'ordonnance de clôture a été reportée au jour de l'audience, avant les plaidoiries, ainsi qu'il a été indiqué aux parties par message RPVA du 13 novembre 2023.
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions écrites déposées.
Motivation
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1. Sur le rapport d'expertise
1. La société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne (ci-après Miil) discute les conclusions du rapport de M. [J], expert judiciaire, en faisant valoir que les opérations d'expertise présentent un caractère inachevé, incomplet et critiquable à de nombreux égards.
L'appelante fait valoir que M. [J] a tiré des conclusions péremptoires de ses observations et lui reproche de répondre aux dires des parties dans son rapport définitif, ce qui ne permet pas aux parties de discuter de manière contradictoire ses conclusions.
2. Il apparaît cependant que M. [J] a adressé aux parties, entre le 20 juillet 2017 et le 8 avril 2018, des notes n°3, 4 et 5 qui leur ont permis d'appréhender le cheminement des conclusions de l'expert et donc de discuter les observations et conclusions de celui-ci ; de plus, les parties en été en mesure de discuter le rapport d'expertise devant le tribunal de commerce et devant la cour.
3. Il n'y a donc pas lieu de 'rejeter' les conclusions de l'expert judiciaire ainsi que le réclament la société Miil et son assureur MMA Iard.
4. M. [J] a conclu son rapport en observant tout d'abord que les résultats attendus par la société Durepaire en débit, qualité, sécurité, fiabilité et maintenance n'avaient pas été atteints.
L'expert judiciaire ajoute que le modèle d'élévateur à godets basculants EG 700 a été assemblé et mis en route par la société Miil en l'absence d'un technicien de la société Geoffroy, fabriquant, et qu'il a été mis en mouvement par la société Miil « dans le sens inverse de rotation normale, irréversible, provoquant des détériorations internes (déformations godets, cames, axes, etc.)»
La réception des travaux, le 8 juillet 2013, a fait l'objet d'un procès-verbal avec réserves, les sociétés Miil et Durepaire ayant indiqué : « (...) Les travaux et prestations n'étant pas conformes à ceux prévus par les pièces du marché.»
Les réserves mentionnées sont notamment les suivantes :
« Balancelle mauvais fonctionnement général : remplissage ; produit et poussière dans les caissons ; le débit ne passe pas.»
Par courrier du 3 septembre 2013, la société Durepaire a évoqué la possibilité d'un mauvais montage et a évoqué de nombreux arrêts de production (plus de 80 heures d'arrêt usine), outre le nombre d'heures d'intervention des salariés ; elle mentionne en particulier : « retour de produit dans le caisson de la balancelle qui nécessite un nettoyage quotidien inacceptable et qui peut générer des bourrages et la casse de la chaîne et des godets.»
Par courrier du 5 octobre suivant, la société Durepaire a mentionné que le matériel était potentiellement dangereux.
Les interventions de la société Geoffroy et de la société Miil n'ont pas permis de lever les réserves, de sorte que la société Miil a proposé à sa cliente de remplacer la balancelle, ce qui a été réalisé au mois de décembre 2013, ce deuxième dispositif étant constitué d'un élévateur à sangle avec petits godets et vis de transfert évoluant à une vitesse six fois supérieure à celle de la première installation, « d'où chocs, poussières, bris des granulés » selon le rapport d'expertise judiciaire.
M. [J] conclut : « Sur le plan des responsabilités, Miil est pour moi le maître d'oeuvre de ces travaux, n'a pas confié le montage et les branchements à Geoffroy, ne l'a pas invitée à procéder à un contrôle avant mise en route et se trouve être le seul responsable. Je m'étonne que l'élévateur EG 700 n'ait pas été refabriqué pour respecter la commande et obtenir les objectifs fixés, tout-à-fait corrects.»
5. Il doit donc être relevé en l'espèce deux périodes particulières : la période courant de juillet à décembre 2013, au cours de laquelle a été utilisée la balancelle installée par la société Miil ; puis la période courant à compter de janvier 2014, au cours de laquelle a été utilisée l'installation de remplacement à vis hélicoïdale.
2. Sur le vice caché
6. L'article 1641 du code civil dispose :
« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent
impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne
l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ».
7. L'expert judiciaire, après examen de la première installation, conservée sous abri, ainsi que des plans de fabrication et de montage, a relevé que ce concept d'élévateur 'en Z' était conforme au projet pour transférer les granulés sortant de presse à 90° C à faible vitesse, sans chocs, vers les refroidisseurs.
Toutefois, le montage et la mise en route de l'installation par la société Miil ont abouti à ce que « dès les premiers tours de pignons de chaînes, les godets sont partis dans le mauvais sens. (...) Il n'a pu qu'en résulter des déformations de la géométrie des godets, des pliages de capteurs, des usures et déformations de cames diverses, et., car utiliser des cames impose un seul sens de mouvement, non réversible.»
Le fonctionnement de l'installation en sens inverse de la rotation normale doit être regardé comme un défaut caché qui ne s'est révélé dans son ampleur qu'en cours de fonctionnement mais n'a pu être mis au jour que grâce aux observations de M. [J] ; il ne pouvait être connu de la société Durepaire dont l'activité porte sur la fabrication de granulés, non d'installations de transport de granulés.
Or il est établi que les dysfonctionnements générés par l'inadéquation entre montage et mise en oeuvre -dont il est constant en fait qu'ils relèvent l'un et l'autre de la seule intervention de la société Miil- ont entraîné des pertes de produit ainsi que de nombreuses heures d'arrêt de production comptabilisées à 408 heures par le Cabinet Arc Atlantic, désigné par l'assureur de protection juridique de la société Durepaire, la perte en production étant estimée par cet expert amiable à 361.677 euros.
8. Il apparaît en conséquence que ce défaut caché de l'installation mise en oeuvre fin juin 2013 a rendue cette installation impropre à son usage, c'est-à-dire le transport vers les refroidisseurs des granulés sortis de la presse, ce dont la société Miil doit réparation à sa cliente.
3. Sur le défaut de conformité
9. En vertu de l'article 1603 du code civil, le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend.
Il est constant en droit que, d'une part, la délivrance, acte d'exécution du contrat, est la mise à la disposition de la chose à l'acquéreur, au temps et au lieu convenus, d'autre part, la non conformité se caractérise par la différence entre ce qui était prévu et ce qui a été livré.
10. Le devis proposé le 11 janvier 2013 par la société Miil et accepté le 5 février suivant par la société Durepaire portait notamment sur l'installation d'un matériel qui devait répondre aux exigences d'une vitesse d'avance de chaîne de 0,3 m/seconde pour un débit de 50 m3/heure, d'une densité de produit de 0,4 et d'une température de produit de 90°.
Il n'est pas discuté que l'élévateur de remplacement installé par la société Miil fonctionnait à la vitesse de 1,8 m/s, soit six fois plus rapidement que la vitesse contractuellement prévue de 0,3 m/s, ce qui a généré des difficultés quant au transport des granulés chauds et donc à leur qualité. L'expert judiciaire mentionne ainsi l'agression par chocs des granulés sortant de presse ainsi que la formation de poussières.
11. Dès lors, cette solution de remplacement n'était pas conforme à la commande de la société Durepaire telle que définie au devis accepté le 11 janvier 2013, laquelle est fondée à soutenir la responsabilité contractuelle de la société Miil pour la période postérieure au 1er janvier 2014.
4. Sur le préjudice
a] Le deuxième semestre 2013
12. Monsieur [B] [R], sapiteur de l'expert judiciaire, a procédé à l'estimation du préjudice de la société Durepaire pour la période de juillet à décembre 2013.
Il rappelle tout d'abord que celle-ci fonctionne à flux tendu puisqu'elle travaille exclusivement sur commande, de sorte que le stock est faible et que tout arrêt prolongé de la production a un impact direct sur le chiffre d'affaires de la société.
Il observe que les arrêts de production peuvent être estimés à 408 h 40 dont 395 h affectables à la production.
Il ajoute que l'évaluation de la perte ne peut s'arrêter au seul temps d'arrêt de la production et doit prendre en compte également la différence de rendement entre la période antérieure et la période postérieure à l'installation de la balancelle ; il a observé à cet égard une baisse significative au cours de l'année 2013, par l'analyse comparée des rendements de 2011 à 2015.
M. [R] a évalué le préjudice subi au cours du deuxième semestre 2013 par la société Durepaire à la perte de marge brute à concurrence de 432.389 euros HT, cela en reconstituant les rendements de production à un niveau équivalent aux rendements observés en moyenne. Il précise que la baisse constatée des rendements en 2013 est sans effet sur les charges variables de la société et qu'elle a plutôt entraîné une désorganisation globale de la production qui a généré des coûts supplémentaires difficilement chiffrables.
13. Les sociétés Miil et MMA Iard font valoir que ce préjudice doit être ramené à la somme de 88.061 euros dont il doit être déduit le montant des charges variables économisées par la société Durepaire, soit, in fine, 70.000 euros.
Elles versent à ce titre les notes financières établies par leur expert amiable, le cabinet GM Consultant, qui propose de se fonder de préférence sur la perte d'exploitation, laquelle est estimée à 46.367 euros HT par le cabinet GM Consultant.
14. Il convient toutefois de relever que l'évaluation du préjudice de la société Durepaire par le biais de la perte d'exploitation suppose que l'on se trouve dans une situation où le sinistre a un effet limité dans le temps. Or, en l'espèce, dans la mesure où l'activité de la société Durepaire est exercée à flux tendu, sur commande, le fait pour celle-ci de n'avoir pu honorer convenablement en temps et en quantité les commandes de ses clients a généré d'autres types de difficultés telle que la perte de confiance de la part des clients insatisfaits. Elle verse ainsi à son dossier l'attestation de la société Cada, cliente, qui décrit d'une part l'organisation des commandes et des livraisons et d'autre part le difficile maintien des relations commerciales en raison des contretemps subis à l'exécution des contrats. De plus, les dysfonctionnements de la nouvelle installation ont également généré des pertes du temps de travail des salariés occupés à la maintenance d'une machine neuve, ainsi qu'il résulte d'une note validée par le commissaire au comptes de la société Durepaire.
L'évaluation du préjudice par la perte de marge prend en compte la perte de chiffre d'affaires lorsque la société n'a pas été en mesure de trouver une solution lui permettant de reconstituer son stock en temps voulu pour assurer la livraison de ses clients sans perturbation, ce qui est la situation rencontrée par la société Durepaire. Le sapiteur était donc fondé à proposer une évaluation du préjudice par le biais de la perte de marge brute, étant rappelé qu'il est de principe qu'un préjudice d'exploitation ne peut consister en la perte d'un chiffre d'affaires et qu'il doit être considéré que la perte d'exploitation subie correspond à la perte de marge.
Il est également admis que certaines charges varient par palier et non pas de façon linéaire. Dès lors, il ne peut être déduit de l'évaluation proposée par M. [R] un coût fixe de transport qui aurait été économisé faute de stock à livrer, les coûts à ce titre étant variables pour cette entreprise compte tenu du principe d'une production à la commande.
15. Il y a donc lieu de retenir l'évaluation proposée par le sapiteur de l'expert judiciaire et, infirmant le jugement déféré, de faire droit à la demande en paiement formée par la société Durepaire contre la société Miil pour l'indemnisation du préjudice subi pendant le deuxième semestre 2013, soit la somme de 432.389 euros HT.
16. Il convient par ailleurs de rejeter la demande portant sur l'allocation de dommages et intérêts au titre du trouble dans le fonctionnement de l'entreprise dans la mesure où la société Durepaire décrit à ce titre le préjudice subi personnellement par les salariés, épuisés par les tensions générées par le danger présenté par leurs interventions sur la balancelle défectueuse et par leur souhait de remédier aux difficultés de rendement de l'installation, préjudice dont la société elle-même n'est pas fondée à demander réparation.
b] Le préjudice subi à compter de janvier 2014
17. La société Durepaire tend à l'indemnisation du préjudice qui résulterait du défaut de conformité de l'installation de remplacement dont elle explique que son fonctionnement insatisfaisant, depuis janvier 2014, a généré un préjudice résultant de l'importante dégradation subie par le produit dans l'élévateur. Elle explique qu'il est nécessaire d'adapter les machines de production afin de compenser l'importante dégradation du produit au cours de son passage dans l'élévateur à vis, celle-ci étant due notamment à une vitesse de déplacement trop élevée.
18. Cette question n'a pas été examinée par l'expert judiciaire ni par son sapiteur, qui ont estimé qu'elle n'entrait pas dans leur mission. La société Durepaire, qui fait valoir que la mission de l'expert portait sur la détermination de tous ses préjudices, n'a cependant pas saisi le juge chargé des expertises pour faire trancher cette difficulté.
19. Au soutien de sa demande de ce chef, la société Durepaire verse à son dossier un tableau relatif à la composition des différents produits et au réglage des machines, dont les mentions ne sont pas suffisantes à déterminer un préjudice avec exactitude. Par ailleurs, le préjudice économique examiné pour la période du deuxième semestre 2013 ne peut être extrapolé pour la période qui s'ouvre à partir de janvier 2014 puisque le préjudice de la première période est le fruit des multiples dysfonctionnements de l'élévateur à balancelle et de leurs conséquence sur le rendement et les pertes de production, tandis que celui qui est ici invoqué porte sur l'altération de la qualité des produits.
20. Il est donc établi un principe de préjudice que la cour n'est pas en mesure de fixer, les pièces produites n'étant pas suffisantes à cet égard. Il sera donc fait droit à la demande subsidiaire en expertise, selon des modalités détaillées au dispositif, et la cour allouera à la société Durepaire une provision de 50.000 euros à valoir sur l'indemnisation du préjudice subi à compter du mois de janvier 2014 au titre des interventions techniques à répétition sur la ligne de production et la perte de qualité des produitqs transportés.
21. La société Durepaire établit par ailleurs, par la production des factures établies par les sociétés Miil, Chavaroche et Sera et par la note visée par son commissaire aux comptes relative au coût de la maintenance, par ses propres salariés, de la sangle équipant l'élévateur installé en décembre 2013, que les multiples interventions sur cette installation de remplacement ont généré un coût de 19.600 euros.
Il sera fait droit à cette demande en paiement.
5. Sur la garantie des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles
22. La société Miil tend à la garantie de son assureur, les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles (ci-après MMA), en exécution du contrat d'assurance professionnelle à effet au 16 janvier 2013.
23. Les sociétés MMA dénient leur garantie au motif que le tribunal de commerce a retenu que leur assurée avait engagé sa responsabilité contractuelle et que les conséquences de ce manquement font l'objet d'une exclusion.
24. Il apparaît que le contrat d'assurance professionnelle dont bénéficie la société Miil garantit les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile encourue par l'assurée du fait des dommages corporels, matériels et immatériels causés à autrui dans le cadre de son activité professionnelle, sous réserve de certaines exclusions.
Il est en particulier stipulé :
« Sont exclus, avec toutes leurs conséquences (...) :
Les dommages immatériels non consécutifs découlant de la non performance des produits, matériels ou travaux réalisés et / ou facturés par l'assuré lorsque cette non performance l'empêche de satisfaire à son obligation de faire ou de délivrance.
Ils demeurent garantis dès lors qu'ils résultent :
- D'un vice caché, d'un défaut de conception ou de réalisation du produit,
- D'une faute, erreur, omission ou négligence commise dans la réalisation de la prestation fournie.»
25. Il a été retenu supra le principe d'un préjudice aux dépens de la société Durepaire et résultant directement des conséquences du vice caché affectant l'installation et la mise en oeuvre par la société Miil de l'élévateur à balancelle.
26. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a accueilli la demande de la société Miil au titre du principe de garantie de son assureur MMA avec application d'un plafond de 300.000 euros, expressément stipulé en page 3 des conditions particulières du contrat.
6. Sur la demande en garantie formée contre la société Gan Assurances
27. La société Miil et les sociétés MMA tendent à la garantie de la société Gan Assurances, assureur de la société Geoffroy, concepteur et fabricant de la balancelle litigieuse.
28. La société Gan Assurances leur oppose la prescription de leur action en invoquant les dispositions de l'article L.110-4 du code de commerce qui impose une prescription de 5 ans aux obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants, ainsi que les dispositions de l'article 1648 du code civil, qui impose à l'acquéreur d'agir dans un délai de deux années à compter de la découverte du vice.
29. A cet égard, il est constant en droit que le délai prévu à l'article 1648, alinéa 1er, du code civil pour exercer l'action en garantie des vices cachés est un délai de prescription susceptible de suspension en application de l'article 2239 du même code, qui prévoit que la prescription ne recommence à courir qu'à compter du jour où la mesure a été exécutée.
30. En l'espèce, la société Durepaire a mis en demeure la société Miil de remédier aux dysfonctionnements constatés le 3 septembre 2013 et a engagé une action en référé aux fins d'expertise le 19 décembre 2014. M. [J] a déposé son rapport le 29 novembre 2018, date à laquelle la société Durepaire a été en mesure de découvrir l'étendue du vice caché affectant l'installation.
Une action au fond avait par ailleurs été engagée le 27 avril 2018 par la société Miil en paiement de ses factures ; la société Durepaire a alors agi en garanti des vices cachés par la notification de ses écritures en ce sens le 6 juin 2019. La société Miil a fait assigner les 12 et 19 août 2019 devant le tribunal de commerce d'Angoulême les sociétés MMA Iard et Gan Assurances. Dès lors, puisque le vice caché a été révélé par le rapport de M. [J] et que la société Gan Assurances a été assignée moins d'une année plus tard, la prescription n'est pas acquise.
31. Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement de ce chef et, statuant à nouveau, de déclarer recevable l'action en garantie des sociétés Miil et MMA contre la société Gan Assurances.
32. Toutefois, cette action est sans objet puisqu'il a été jugé plus haut le vice caché était le fonctionnement de l'installation en sens inverse de la rotation normale, ce qui relève de la seule responsabilité de la société Miil.
Les sociétés Miil et MMA seront en conséquence déboutées de leurs demandes à ce titre.
7. Sur les autres demandes
33. La société Durepaire, qui poursuit à juste titre la non conformité de l'installation de remplacement, est fondée à réclamer, par voie de conséquence, la fourniture et l'installation de l'élévateur commandé en février 2013 et répondant aux caractéristiques de cette commande.
Le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il a condamné la société Miil à livrer le matériel considéré, ce sous astreinte.
34. La société Miil est intervenue à plusieurs reprises au sein de la société Durepaire pour remédier aux dysfonctionnements de l'élévateur à balancelle puis pour y installer un nouvel élévateur. Elle démontre par ailleurs qu'elle n'a pas été réglée du solde de ses travaux initiaux.
Toutefois, la pièce produite au soutien de la demande en paiement des interventions sur site mentionne un coût de 40.411,78 euros HT, inférieur à la somme réclamée à ce titre.
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Miil de sa demande en paiement, celle-ci étant fondée par la réalité des prestations réalisées et le détail des factures produites. La demande sera cependant ramenée à la somme de 40.411,78 euros HT pour les interventions de réparation, 41.151,34 HT euros pour le coût de remplacement de l'élévateur et 77.212,51 euros au titre du solde des factures du 31 mai et du 30 juin 2013.
35. Les sociétés MMA et Miil, parties succombantes au principal en appel, seront condamnées à payer in solidum les dépens de l'appel et à verser la somme de 7.000 euros à la société Durepaire et celle de 2.000 euros à la société Gan Assurances en indemnisation de leur frais irrépétibles.
Dispositif
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire en dernier ressort,
Confirme le jugement prononcé le 2 décembre 2021 par le tribunal de commerce d'Angoulême, SAUF en ce qu'il a :
- déclaré irrecevable l'action de la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne, la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la société MMA Iard contre la société Gan Assurances,
- rejeté la demande en paiement de la société Durepaire au titre de l'indemnisation des conséquences du vice caché ainsi que la demande en paiement au titre du préjudice financier,
- rejeté la demande en paiement de la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne.
Statuant à nouveau de ces chefs,
Condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Durepaire la somme de 432.389 euros HT et la somme de 19.600 euros.
Condamne la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la société MMA Iard à garantir, dans la limite de 300.000 euros les condamnations prononcées contre la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne.
Condamne la société Durepaire à payer à la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne les sommes de 40.411,78 euros HT au titre des interventions de réparation, 41.151,34 HT euros pour le coût de remplacement de l'élévateur et 77.212,51 euros au titre du solde des factures du 31 mai et du 30 juin 2013.
Rejette la fin de non recevoir soulevée par la société Gan Assurances.
Déboute la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne, la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la société MMA Iard de leur appel en garantie formé contre la société Gan Assurances.
Y ajoutant,
Condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne à payer à la société Durepaire la somme de 50.000 euros à titre de provision à valoir sur le préjudice subi à compter de janvier 2014.
Ordonne une expertise et désigne pour y procéder Monsieur [U] [M], [Adresse 4] Tél : [XXXXXXXX01]- Mèl : [Courriel 6], qui aura pour mission de :
- convoquer les parties, les entendre, entre tout sachant qu'il estimera utile,
- se faire remettre par les parties ou par tout tiers détenteur les documents qu'il estimera utiles à sa mission,
- déterminer le préjudice économique subi par la société Durepaire depuis le 1er janvier 2014 en raison de la non conformité de l'installation de remplacement,
- adresser aux parties un pré-rapport en fixant un délai d'envoi des dires avant le dépôt de son rapport définitif,
- répondre aux dires des parties,
- faire toutes observations utiles au règlement du litige.
Fixe à la somme de 5.000 euros la provision concernant les frais d'expertise qui devra être consignée par la société Durepaire à la RÉGIE de la Cour d'appel de Bordeaux le 22 mai 2024 au plus tard.
Dit que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l'expert sera caduque et de nul effet .
Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport au greffe de la Cour d'appel de Bordeaux avant le 20 décembre 2024 sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile auprès du Juge du contrôle.
Dit que l'exécution de la mesure d'instruction sera suivie par le magistrat du service du contrôle des expertises, spécialement désigné à cette fin en application des article 155 et 155-1 du même code.
Condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne, la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la société MMA Iard à payer in solidum à la société Durepaire la somme de 7.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne, la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la société MMA Iard à payer in solidum à la société Gan Assurances la somme de 2.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société Montage d'Installations Industrielles Loudéacienne, la société MMA Iard Assurances Mutuelles et la société MMA Iard à payer in solidum les dépens de l'appel.