Cass. com., 27 mars 2024, n° 22-14.028
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
Mme Vallansan
Avocat général :
M. de Monteynard
Avocats :
SCP Duhamel, SCP Ohl et Vexliard
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 3 février 2022) et les productions, un jugement du 13 janvier 2019 a prononcé la résolution du plan de sauvegarde de la société Business and Commuter Aircraft (la société BCA) et son redressement judiciaire, le jugement étant publié au BODACC le 13 janvier 2019. La procédure a été convertie, le 27 février suivant, en liquidation judiciaire et la société Jérôme Allais désignée liquidateur.
2. Le 21 juin 2019, la société Blue Aero, mandatée par le GIE BE200 (le GIE), a demandé au liquidateur la restitution d'un aéronef régulièrement immatriculé sous sa dénomination au Registre d'immatriculation des aéronefs, appareil qu'elle avait confié pour maintenance à la société BCA. Le liquidateur a refusé d'acquiescer à la demande en invoquant sa forclusion. Le GIE a ensuite saisi le juge-commissaire pour obtenir la restitution de l'aéronef.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Le liquidateur de la société BCA fait grief à l'arrêt de lui ordonner de restituer au GIE l'aéronef ainsi que ses équipements et documentation technique et réglementaire, alors « que la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement d'ouverture, à défaut de quoi le droit de propriété est inopposable à la procédure collective ; que le propriétaire d'un bien n'est dispensé de faire reconnaître son droit de propriété par une action en revendication, et peut se borner à demander la restitution du bien, que lorsque le contrat portant sur ce bien qu'il a conclu avec le débiteur a fait l'objet d'une publicité ; qu'en l'espèce, le GIE, propriétaire d'un aéronef, l'a confié en 2017 à la société BCA pour que celle-ci effectue des travaux de maintenance ; que par jugement du 3 janvier 2019, publié au BODACC le 13 janvier 2019, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert le redressement judiciaire de la société BCA ; que le GIE n'a pas exercé d'action en revendication dans le délai de trois mois qui lui était imparti ; qu'il a demandé la restitution de l'aéronef le 14 octobre 2020, invoquant de façon inopérante le fait que l'aéronef était immatriculé ; que le GIE n'a pas confié l'aéronef à la société BCA en vertu d'un contrat publié ; qu'ainsi le droit de propriété du GIE sur l'aéronef est devenu inopposable à la liquidation judiciaire de la société BCA ; qu'en accueillant toutefois l'action en restitution aux motifs inopérants que l'aéronef était immatriculé, ne constituait pas un élément d'actif de la société BCA, ne figurait pas dans son inventaire qui était imprécis, que la société BCA n'avait aucun droit sur ce bien et n'était pas créancière du GIE, tandis que le droit de propriété du GIE sur l'aéronef était inopposable à la procédure collective, de sorte que le GIE ne pouvait en solliciter la restitution, la cour d'appel a violé l'article L. 624-10 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
4. Selon l'article L. 624-9 du code de commerce, à peine de forclusion, la revendication des meubles doit être exercée dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure collective.
5. Ce texte a pour finalité de rendre opposable à la procédure collective le droit de propriété dont fait l'objet le bien revendiqué.
6. Il résulte de l'article L. 6121-2 du code des transports applicable à l'aéronef que l'inscription de celui-ci au registre français d'immatriculation ouvert à la direction générale de l'aviation civile vaut titre, l'article D. 6111-3, alinéa 2, du même code indiquant que ce registre est tenu à la disposition du public et que toute personne peut en obtenir copie conforme sur demande écrite.
7. La propriété de l'aéronef étant, par l'immatriculation de celui-ci, opposable à tous, elle est nécessairement opposable à la procédure collective et le propriétaire n'est pas soumis à la procédure de revendication prévue à l'article L. 624-9 du code de commerce.
8. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée.
9. Le moyen ne peut donc être accueilli.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.