Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 22 mars 2024, n° 22/07569

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Reflectiv (SASU)

Défendeur :

Reflectiv (SASU)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard

Conseillers :

Mme Lehmann, Mme Marcade

Avocats :

Me Bouzidi-Fabre, Me Andreani, Me Kong Thong, Me Casalonga

T. com. Paris, 15e ch., du 21 févr. 2022…

21 février 2022

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire rendu le 21 février 2022 par le tribunal de commerce de Paris,

Vu l'appel interjeté le 13 avril 2022 par la société Réflectiv,

Vu les conclusions numérotées 2 remises au greffe et notifiées par voie électronique le 9 janvier 2022 par la société Réflectiv, appelante et intimée incidente, régulièrement signifiées « à personne » le 20 janvier 2023 à la Selarl [G] [N], liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion,

Vu les dernières conclusions numérotées 5 remises au greffe et notifiées par voie électronique le 6 décembre 2023 par la société Réflectiv, appelante et intimée incidente, non signifiées à la Selarl [G] [N], liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion partie défaillante,

Vu les conclusions numérotées 1 remises au greffe et notifiées par voie électronique le 10 octobre 2022 par la société [6] France, intimée et appelante incidente, régulièrement signifiées « à personne » le 8 novembre 2022 à la Selarl [G] [N], liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion,

Vu les dernières conclusions numérotées 5 remises au greffe et notifiées par voie électronique le 7 décembre 2023 par la société [6] France, intimée et appelante incidente, non signifiées à la Selarl [G] [N], liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion partie défaillante,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 11 janvier 2024,

Vu l'envoi en cours de délibéré, à la demande de la cour, de l'extrait Kbis de la société Alldiffusion.

SUR CE, LA COUR

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

La société Réflectiv immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Créteil sous le numéro 490 648 409 conçoit et fabrique des films adhésifs s'appliquant sur le verre pour en modifier certaines caractéristiques. Elle se présente comme le distributeur leader de films polyester en Europe en grandes surfaces. Ses clients sont les distributeurs spécialisés dans le bâtiment et le bricolage dont à partir de 2009 la société [6] France. Elle précise venir aux droits d'une société Réflectiv immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Créteil sous le numéro 322 916 164, aujourd'hui dissoute, par l'effet d'une transmission universelle du patrimoine opérée en 2017.

La société [6] France immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Lille est une société de grande distribution spécialisée dans la construction, le bricolage et le jardinage. Elle a une activité de revendeur et commercialise par l'intermédiaire de ses fournisseurs de très nombreux produits dont des films pour vitrage.

La société Alldiffusion immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Lyon avait pour activité la vente de tous articles pour l'équipement de la maison.

Le tribunal de commerce de Lyon a prononcé par un premier jugement en date du 2 janvier 2020 l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire avec procédure simplifiée de la société Alldiffusion avec désignation de la Selarl Alliance MJ représentée par Me [G] [N] en qualité de liquidateur judiciaire.

Puis par un second jugement rendu le 10 décembre 2020, le tribunal de commerce de Lyon a décidé ne plus faire application de la procédure simplifiée. Par un nouveau jugement en date du 3 août 2021, la Selarl [G] [N] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire et par jugement du 30 septembre 2021 la date de cessation des paiements a été reportée au 31 juillet 2018.

A la suite d'un appel d'offre, la société [6] a fait part par courrier du 30 juillet 2013 à la société Réflectiv du déréférencement de ses produits à compter du 15 février 2015, l'appel d'offre ayant été remporté par la société Alldiffusion.

La société Réflectiv expose avoir à compter de l'année 2013-2014 fait évoluer ses emballages de rouleaux et son kit de pose par une nouvelle collection caractérisée par une charte graphique, des codes couleurs, un emballage carton rectangulaire et un positionnement spécifique des mentions y figurant. Elle précise dans ses écritures numérotées 5 que cette nouvelle collection venant remplacer celle antérieurement créée en 2008 a débuté au mois de mai 2013.

Aucune critique n'est portée par la société Réflectiv quant à la décision de la société [6] France de déférencer ses produits à compter du 15 février 2015 ni sur le fond de la décision, ni sur les modalités de la rupture des relations contractuelles.

En revanche, indiquant avoir constater que les emballages des produits offerts à la vente par les magasins à l'enseigne [6] émanant de la société Alldiffusion reproduisaient de façon quasi servile les nouveaux emballages de ses films adhésifs de sa collection 2013-2014, la société Réflectiv a fait procéder le 10 novembre 2015 à l'achat dans un point de vente parisien de [6] de cinq films adhésifs portant la dénomination Alldiffusion, achat constaté par un procès-verbal établi par Me [K] [O], huissier de justice.

La société Réflectiv a également procédé à l'achat au sein du magasin [6] de [Localité 5], sans constat d'huissier, de quatre films adhésifs et d'un kit de pose le 20 décembre 2016 et de quatre films adhésifs le 19 septembre 2017.

Au mois de juillet 2018, la société Réflectiv a fait assigner la société [6] et la société Alldiffusion devant le tribunal de commerce de Paris sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme.

En cours d'instance la société Alldiffusion placée en liquidation judiciaire a été représentée par la Selarl Alliance MJ ès qualités.

Le 22 janvier 2020, la société Réflectiv a produit sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Alldiffusion pour un montant total de 62 500 euros se décomposant en 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme, 2 500 euros pour dommages et intérêts complémentaires pour publication et 25 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 27 janvier 2020, la société [6] a également produit sa créance pour un montant total de 95 000 euros en raison de la demande de garantie formulée des condamnations pouvant être prononcées à son encontre.

Le jugement contradictoire du tribunal de commerce 21 février 2022 dont appel a :

- joint les instances ouvertes sous les numéros RG 2018052292 et sous le numéro J2022000062,

- débouté la société Réflectiv de ses demandes sur le fondement du parasitisme,

- débouté la société Réflectiv de ses demandes d'expertise et de communication de pièces,

- fixé la créance de la société Réflectiv au passif de la société Alldiffusion à la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre de la concurrence déloyale par confusion,

- condamné la société [6] France à verser à la société Réflectiv la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre de la concurrence déloyale par confusion,

- débouté la société Réflectiv pour le surplus de ses demandes à titre de dommages et intérêts,

- condamné la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ représentée par Me [G] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion à garantir la société [6] France de toute condamnation,

- ordonné la cessation immédiate par la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ représentée par Me [G] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et par la société [6] France, de la fabrication, de l'offre en vente et de la commercialisation des articles litigieux à savoir les produits Alldiffusion référencés sous la dénomination Anti-Buée (vert), Dépoli (orange), Sécurité (rouge), Anti-Chaleur (rouge-orange) et Dépoli Blanc (orange fonce) et ce sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter du 30ème jour suivant la signification du présent jugement et pendant une durée de 3 mois, date à compter de laquelle il sera à nouveau fait droit,

- débouté la société Réflectiv de ses demandes complémentaires d'interdiction et de destruction,

- débouté la société Réflectiv de ses demandes de publication du présent jugement,

- débouté la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ représentée par Me [G] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion de ses demandes reconventionnelles,

- débouté la société [6] France de sa demande de dommages et intérêts à titre de procédure abusive,

- dit le présent jugement opposable à la société Alldiffusion,

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire, sauf en ce qui concerne les mesures de cessation de fabrication, d'offre de vente et de commercialisation des produits litigieux,

- condamné la société [6] France à verser à la société Réflectiv la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société [6] France aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 113,10 euros dont 18,64 euros de TVA.

La société Réflectiv a interjeté appel de ce jugement et la société [6] France a formé appel incident. La société Alldiffusion n'a pas constitué avocat devant la cour.

La cour observe que les dernières conclusions signifiées à la société Alldiffusion prise en la personne de la société Selarl [G] [N], son liquidateur judiciaire, sont pour la société Réflective celles numérotées 2 remises au greffe par voie électronique le 9 janvier 2022 et pour la société [6] France celles numérotées 1 et remises au greffe par voie électronique le 10 octobre 2022.

Les dernières écritures des sociétés Réflectiv et [6] France toutes deux numérotées 5 sont respectivement opposables à ces deux sociétés constituées mais ne le sont pas à la société Alldiffusion.

La société Réflectiv, tant au dispositif de ses conclusions numérotées 2 qu'au dispositif de ses dernières conclusions numérotées 5, demande à la cour de :

- infirmer le jugement du tribunal de commerce du 21 février 2022 en ce qu'il a :

- débouté la société Réflectiv de ses demandes sur le fondement du parasitisme,

- débouté la société Réflectiv de ses demandes d'expertise et de communication de pièces,

- limité la fixation de la créance de la société Réflectiv au passif de la société Alldiffusion à la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre de la concurrence déloyale par confusion, et débouté la société Réflectiv pour le surplus de ses demandes à titre de dommages et intérêts,

- limité la condamnation de la société [6] France à verser à la société Réflectiv la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre de la concurrence déloyale par confusion et débouté la société Réflectiv pour le surplus de ses demandes à titre de dommages et intérêts,

- limité la fixation de l'astreinte de la cessation immédiate faite à la société Alldiffusion à la somme de 500 euros par infraction constatée à compter du 30ème jour suivant la signification du présent jugement et pendant une durée de 3 mois, date à compter de laquelle il sera à nouveau fait droit,

- débouté la société Réflectiv de ses demandes complémentaires d'interdiction et de destruction,

- débouté la société Réflectiv de ses demandes de publication du présent jugement,

- limité la condamnation de la société [6] France à verser à la société Réflectiv la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire sauf en ce qui concerne les mesures de cessation de fabrication, d'offre en vente et de commercialisation des produits litigieux,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce du 21 février 2022 en ce qu'il a :

- condamné la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, représentée par Me [G] [N], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion, au titre de la concurrence déloyale par confusion à des dommages et intérêts pour préjudice moral,

- condamné la société [6] France au titre de la concurrence déloyale par confusion à des dommages et intérêts pour préjudice moral,

- ordonné la cessation immédiate par la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ représentée par Me [G] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire et par la société [6] France, de la fabrication, de l'offre en vente et de la commercialisation des articles litigieux à savoir les produits Alldiffusion référencés sous la dénomination Anti-Buée (vert), Dépoli (orange), Sécurité (rouge), Anti-Chaleur (rouge-orange) et Dépoli Blanc (orange fonce),

- débouté la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ représentée par Me [G] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion de ses demandes reconventionnelles,

- débouté la société [6] France de sa demande de dommages et intérêts à titre de procédure abusive,

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- condamné la société [6] France à verser à la société Réflectiv la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société [6] France aux dépens dont ceux à recouvrer par le Greffe liquidés à la somme de 113,10 euros dont 18,64 euros de TVA,

Et statuant à nouveau de :

- débouter la société [6] France de l'ensemble de ses demandes dont incidentes,

- dire qu'en fabricant, faisant fabriquer, en important, en détenant, en offrant à la vente, et en commercialisant des emballages référencés Anti-Buée (vert), Dépoli (orange), Sécurité (rouge), Anti-Chaleur (rouge-orange), Dépoli Blanc (orange foncé) et un kit de pose, qui reproduisent la combinaison des mêmes éléments de formes et de gamme des emballages référencés MIR 500-Miroir sans tain (vert canard), INT 200-Dépoli (prune), SEC 054-SECURITÉ (rouge), SOL 102-Antichaleur (jaune-orange), INT 210-Teinté (vert) et le kit de pose de la société Réflectiv, la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et à la société [6] France se sont rendues coupables d'actes de concurrence déloyale au sens des articles 1240 et 1241 du code civil à son égard,

- dire qu'en fabricant, faisant fabriquer, en important, en détenant, en offrant à la vente, et en commercialisant des emballages qui reproduisent la combinaison des mêmes éléments de formes et de gamme des emballages et du kit de pose de la société Réflectiv, la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et la société [6] France se sont rendues coupables d'actes de parasitisme au sens des articles 1240 et 1241 du code civil,

En conséquence,

- faire injonction à la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et à la société [6], de communiquer de façon complète et exhaustive, tous les éléments comptables afférents à l'importation, la fabrication, à la distribution et à la commercialisation des produits dans les emballages référencés Anti-Buée (vert), Dépoli (orange), Sécurité (rouge), Anti-Chaleur (rouge-orange), Dépoli Blanc (orange foncé), les chiffres d'affaires et les marges correspondants et tous éléments utiles sur les situations de la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et à la société [6] France et les contrats en cours entre les deux sociétés et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard et ce, à compter du huitième jour suivant la signification de l'arrêt à intervenir, et ce afin d'évaluer son entier préjudice causé sur le territoire français en boutique et sur internet, si cela n'a pas pu être obtenu en cours de la procédure,

- fixer la créance de la société Réflectiv au passif de la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion pour un montant de 233 890 euros correspondant aux demandes formulées par la société Réflectiv devant la Cour d'Appel de Paris et se décomposant comme suit :

- 127 685,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de l'ensemble des actes de concurrence déloyale commis à son encontre,

- 76 205,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de l'ensemble des actes de parasitisme commis à son encontre,

- 5 000,00 euros par insertion à titre de dommages et intérêts complémentaires pour la publication du jugement à intervenir dans cinq journaux ou revues au choix de la société Réflectiv et, sur la page d'accueil du site internet www.Alldiffusion.com/www. Alldiffusion.wordpress.com et ce pendant une durée de 2 mois à compter de la signification du jugement à intervenir, et ce sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à s'exécuter et/ou par infraction constatée,

- 25 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de la présente instance conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamner la société [6] France à payer à la société Réflectiv les sommes se décomposant comme suit :

- 127 685,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de l'ensemble des actes de concurrence déloyale commis à son encontre,

- 76 205,00 à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de l'ensemble des actes de parasitisme commis à son encontre,

- faire interdiction à la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et à la société [6] France, de fabriquer, faire fabriquer, d'importer, d'offrir à la vente, de commercialiser directement ou indirectement, des emballages référencés Anti-Buée (vert), Dépoli (orange), Sécurité (rouge), Anti-Chaleur (rouge-orange), Dépoli Blanc (orange foncé), ainsi que tout article qui reproduirait les mêmes éléments de formes et de gamme des emballages de films adhésifs et du kit de pose diffusés par la société Réflectiv et ce sous astreinte de 1000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner la cessation immédiate par la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et par la société [6] France, de la fabrication, de l'importation, de l'offre en vente et de la commercialisation des emballages référencés Anti-Buée (vert), Dépoli (orange), Sécurité (rouge), Anti-Chaleur (rouge-orange), Dépoli Blanc (orange foncé) et du kit de pose, ainsi que tout article qui reproduirait les mêmes éléments de formes et de gamme des emballages de films adhésifs et du kit de pose diffusés par la société Réflectiv et le retrait du marché auprès des distributeurs de l'ensemble des marchandises litigieuses et ce sous astreinte de 1000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner la destruction en présence d'un Huissier de Justice et aux frais de la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et de la société [6] France, des emballages référencés Anti-Buée (vert), Dépoli (orange), Sécurité (rouge), Anti-Chaleur (rouge-orange), Dépoli Blanc (orange foncé), et du kit de pose, ainsi que de tous les articles qui reproduisent les mêmes éléments de formes et de gamme des emballages de films adhésifs et du kit de pose diffusés par la société Réflectiv, détenus par la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion et par la société [6] France et ce sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ainsi que tous prospectus, catalogues, documents professionnels concernant les articles incriminés,

- ordonner au besoin à titre de complément de dommages et intérêts, la publication de l'arrêt à intervenir, par extrait ou dans son intégralité :

- dans cinq journaux ou revues au choix de la société Réflectiv et aux frais de la société [6] France, à raison de 5 000,00 euros HT par insertion,

- ainsi que sur les pages d'accueil du site internet www.leroymerlin.com, et ce pendant une durée de 2 mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à s'exécuter et/ou par infraction constatée,

- condamner la société [6] France à payer à la société Réflectiv, la somme de 25 000,00 euros, sauf à parfaire, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société [6] France en tous les dépens de la présente instance conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société [6] France, tant au dispositif de ses conclusions numérotées 1 qu'au dispositif de ses dernières conclusions numérotées 5, demande à la cour de :

- déclarer la société Réflectiv mal fondée en son appel au principal, l'en débouter et la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement du 21 février 2022 en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Réflectiv sur le fondement du parasitisme, en ce compris ses demandes d'interdiction, de destruction, de publication, d'expertise et de communication de pièces, (en italique par la cour pour les seules mentions ajoutées au dispositif des conclusions n° 5 par rapport aux conclusions n° 1)

- confirmer également le jugement en ce qu'il a condamné la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ ès qualité de liquidateur représentée par Me [G] [N] à garantir la société [6] France de toute condamnation éventuelle,

- confirmer également le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Réflectiv se rapportant au film INT 210 et au kit de pose,

- confirmer également l'opposabilité du jugement à la société Alldiffusion prise en la personne de son liquidateur, et dire que l'arrêt à intervenir lui sera également opposable

recevoir la société [6] France bien fondée en son appel incident et infirmer le jugement en ce qu'il a fait droit à la demande de la société Réflectiv au titre de la concurrence déloyale et a condamné la société [6] France à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommage intérêts pour préjudice moral,

Statuant à nouveau sur ce point :

- débouter la société Réflectiv de l'intégralité de ses demandes au titre de la concurrence déloyale,

En tout état de cause :

- condamner la société Réflectiv à payer à la société [6] France la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner le société Réflectiv à payer à la société [6] France la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Réflectiv en tous les dépens de première instance et d'appel.

La cour observe que la société Alldiffusion, non représentée à la présente instance, n'a pas interjeté appel du jugement.

Ainsi sont irrévocables les chefs du jugement du tribunal de commerce du 21 février 2022 suivants qui ont :

* fixé la créance de la société Réflectiv au passif de la société Alldiffusion étant précisé que la somme fixée à 10 000 euros par le tribunal ne pourra qu'être augmentée et non diminuée,

* condamné la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ représentée par Me [G] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion à garantir la société [6] France de toute condamnation prononcées à son encontre,

* ordonné la cessation immédiate par la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ représentée par Me [G] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire

de la société Alldiffusion et par la société [6] France, de la fabrication, de l'offre en vente et de la commercialisation des articles litigieux à savoir les produits Alldiffusion référencés sous la dénomination Anti-Buée (vert), Dépoli (orange), Sécurité (rouge), Anti-Chaleur (rouge-orange) et Dépoli Blanc (orange fonce) et ce sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter du 30ème jour suivant la signification du présent jugement et pendant une durée de 3 mois, date à compter de laquelle il sera à nouveau fait droit,

* débouté la société Alldiffusion prise en la personne de la société Alliance MJ représentée par Me [G] [N] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Alldiffusion de ses demandes reconventionnelles,

* dit le jugement opposable à la société Alldiffusion.

Sur la concurrence déloyale reprochée à la société [6] France

La société [6] France sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a retenu à son encontre des actes de concurrence déloyale et l'a condamnée à payer à la société Réflectiv la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi de ce chef.

La société Réflectiv demande quant à elle que la condamnation prononcée pour concurrence déloyale par les premiers juges à l'encontre de la société [6] France soit portée à la somme de 127 685 euros et qu'une somme de 127 685 euros soit également fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Alldiffusion.

Au titre de la concurrence déloyale la société Réflectiv reproche la copie quasi servile des emballages (chartes graphiques, couleurs, formes), de la notice de pose et du kit de pose tels qu'ils ressortent de sa collection 2013/2014 qu'elle soutient avoir commercialisée dès le mois de mai 2013 ayant pour effet de créer une confusion entre les produits de la société Alldiffusion commercialisés par la société [6] France à compter du 15 février 2015 et les siens qui avaient été déférencés à compter de cette date.

Le principe de la liberté du commerce implique qu'un produit qui n'est pas l'objet de droits privatifs peut être librement reproduit et commercialisé à moins que la reproduction ou l'imitation du produit ait pour objet ou pour effet de créer un risque de confusion entre les produits dans l'esprit du public, comportement déloyal constitutif d'une faute au sens de l'article 1240 du code civil.

La demande en concurrence déloyale présente un fondement délictuel et il incombe en conséquence à la société Réflectiv de rapporter la preuve d'un agissement fautif de la société [6] France.

La société Réflectiv reproche à la société Alldiffusion d'avoir « reproduit, sur ordre ou non, les nouvelles versions des emballages de 2013 et ce dans un temps record pour permettre à la société [6] de les substituer en mars 2015 aux emballages Réflectiv sortant des rayons » et à la société [6] France d'avoir vendu en connaissance de cause les produits litigieux.

La société [6] France, pour s'opposer à cette demande, fait d'abord valoir que la première commercialisation des nouveaux emballages de la société Réflectiv est intervenue en réalité à compter du mois de janvier 2015, et que dès lors, ni elle-même ni la société Alldiffusion n'avaient pu les connaître avant la mise en fabrication et la diffusion des produits de la société Alldiffusion dans les magasins [6] France à compter de février 2015. Elle reprend en outre les éléments produits aux débats en première instance par la société Alldiffusion justifiant que sa gamme de packaging a été créée en 2014.

La cour qui a pris connaissance des écritures des parties et notamment de l'assignation introductive d'instance et des conclusions mentionnées au visa introductif du présent arrêt et de l'intégralité des pièces versées au débat pas les sociétés Réflectiv et [6] France constate que :

- les parties s'accordent aujourd'hui à dire que lors de l'appel d'offre ayant conduit en juillet 2013 au déférencement des produits de la société Réflectiv au profit de ceux de la société Alldiffusion, les nouveaux emballages revendiqués par la société Réflectiv n'étaient pas encore commercialisés et la société Alldiffusion commercialisait les siens sous forme de rouleaux. En revanche dans son assignation introductive d'instance, la société Réflectiv indiquait que la copie de ses emballages avait permis à la société Alldiffusion de remporter l'appel d'offre.

- dans ses dernières écritures numérotées 5, la société Réflectiv avance la date du mois de mai 2013 pour la diffusion de ses nouveaux emballages qu'elle nomme collection 2013-2014, alors que dans l'assignation elle précisait que les nouveaux produits étaient diffusés depuis 2015.

- aucun des catalogues de la société Reflectiv produit au débat antérieur à 2017 ne présente les nouveaux emballages soit qu'ils n'en montrent aucun, soit qu'ils montrent les anciens modèles.

- dans les conclusions, y compris les dernières, numérotées 5, la société Réflectiv présente pour l'année 2013/2014 les emballages anciens et elle ne présente les nouveaux produits que pour l'année 2014/2015.

- les factures produites ne permettent pas de s'assurer de la commercialisation des nouveaux emballages avant le mois de janvier 2015 et ce d'autant que la société Réflectiv reconnaît dans ses dernières écritures que la dimension de 2,50 m ne peut être un critère suffisant pour dater la commercialisation et qu'elle a écoulé les anciens produits en stock auprès de certaines enseignes alors même qu'elle avait déjà commencé la commercialisation des nouveaux.

- les photos produites des nouveaux emballages ou des rayons les présentant ne sont jamais ni datées, ni localisées.

Dès lors, c'est à juste titre que la société [6] France fait valoir que la société Réflectiv n'apporte pas la preuve qui lui incombe d'une commercialisation des nouveaux emballages, notamment auprès de la société [6] France, avant le mois de janvier 2015.

Or, c'est au mois de février 2015 que le référencement des produits de la société Réflectiv a cessé au profit de ceux de la société Alldiffusion.

La société Réflectiv n'apporte pas non plus la preuve que les emballages des produits de la société Alldiffusion ont été modifiés entre le mois de février 2015 date du début du référencement et le mois le 10 novembre 2015, date de l'achat des produits de la société Alldiffusion constaté par huissier de justice.

S'agissant des kits de pose et des notices, la société Réflectiv ne justifie pas non plus de la date de commercialisation de ses produits, ni de la connaissance de la société [6] France de ceux-ci avant 2015.

L'effet de gamme pour les mêmes motifs ne peut être retenu dès lors que la preuve de l'antériorité de la commercialisation n'est pas apportée.

Dès lors, la preuve d'une faute délictuelle de la société [6] France n'est pas apportée pour retenir à son encontre de concurrence déloyale. Le jugement est infirmé en ce qu'il a condamnée cette dernière à payer la somme de 10 000 euros de ce chef.

Sur le parasitisme reproché à l'encontre de la société Alldiffusion et de la société [6]

Le parasitisme qui présente également un fondement délictuel consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis.

La société Réflectiv doit démontrer qu'elle a consacré des investissements à la création et à la réalisation des emballages et que les éléments revendiqués présentent une valeur économique dont se seraient appropriée, sans bourse délier, les sociétés Alldiffusion et [6] France.

Or, comme justement retenu par les premiers juges les éléments comptables apportés au débat se présentent de manière globale et ne permettent pas de différencier la part qui serait liée aux nouveaux emballages qui auraient été copiés par la société Alldiffusion.

Aucun chiffrage lié à cet investissement n'est fourni, ni aucune facture ou preuve qui permettrait de relier sans équivoque le prétendu travail de création à chacun des quatre nouveaux emballages de films adhésifs et du kit de pose ou de la notice revendiqués par la société Réflectiv.

En outre, aucune publicité, aucun catalogue de la société Réflectiv ne porte sur les emballages revendiqués, les produits étant présentés hors de tout emballage.

Ainsi, les frais engagés apparaissent comme ayant pour objet de créer et promouvoir les produits eux-mêmes et non leurs emballages.

Enfin, il n'est pas explicité en quoi les sociétés intimées auraient profité indument des investissements ou de la notoriété acquise de la société Réflectiv.

Le jugement qui a débouté la société Réflectiv de ce chef sera confirmé de ce chef.

Sur le quantum de la fixation de la créance pour concurrence déloyale reprochée à la société Alldiffusion

Les premiers juges ont fixé la créance de la société Réflectiv au passif de la société Alldiffusion à la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre de la concurrence déloyale par confusion.

La société Alldiffusion n'a pas interjeté appel du jugement.

La société Réflectiv demande que la somme fixée au passif soit portée à la somme de 127 685 euros.

La cour observe pour autant que la société Réflectiv n'a produit au passif de la liquidation judiciaire de la société Alldiffusion que pour la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme et que dès lors toute demande de fixation au-delà de ce montant ne peut qu'être déclarée irrecevable.

Par ailleurs, si la société fait état d'une baisse de son chiffre d'affaires pour les films INT 200, MIR 500, SEC 054, SOL 102 et INT 2014, elle ne justifie pas de ce que cette baisse du chiffre d'affaires serait le fait des agissements retenus à l'encontre de la société Alldiffusion alors que ses produits avaient déjà fait l'objet de la décision de déférencement par la société [6] France dans des circonstances non critiquées et non constitutives d'agissements déloyaux.

Dès lors, c'est à juste titre que les premiers juges n'ont retenu qu'un préjudice moral et qu'ils ont fixé à la somme de 10 000 euros la créance de la société Réflectiv.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande incidente pour procédure abusive formée par la société [6] France

La société [6] France sollicite incidemment la condamnation de la société Réflectiv à lui verser la somme de 20 000 euros à titre d'indemnité pour procédure abusive.

Le fait d'exercer une action en justice ne constitue pas une faute, sauf s'il dégénère en abus.

Le jugement doit également être confirmé en ce qu'il a débouté la société [6] France de sa demande indemnitaire fondée sur l'abus de procédure dès lors qu'aucun abus de procédure ne peut être retenu à l'encontre de la société Réflectiv qui a pu se méprendre sur le bien-fondé de son action.

Sur les autres demandes

Le sens de l'arrêt conduit à débouter la société Réflectiv du surplus de ses demandes et à confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Réflectiv de ses demandes complémentaires d'interdiction et de destruction et de ses demandes de publication.

Il conduit également à infirmer les condamnations prononcées à l'encontre de la société [6] France au titre des frais et dépens de première instance.

La société Réflectiv qui succombe est condamnée aux dépens de première instance et d'appel et en équité à verser à la société [6] France la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de l'appel et de l'appel incident,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la société [6] France à verser à la société Réflectiv la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral au titre de la concurrence déloyale par confusion, à verser à la société Réflectiv la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 113,10 euros dont 18,64 euros de TVA,

Y substituant et y ajoutant,

Déboute la société Réflectiv de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société [6] France,

Condamne la société Réflectiv à payer à la société [6] France la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Réflectiv aux dépens de première instance et d'appel.

La Greffière La Présidente