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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 26 mars 2024, n° 21/02475

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Toulouse Bureaux Services (Sté)

Défendeur :

Établissement Public Foncier Local du Grand Toulouse (EPFL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Salmeron

Conseillers :

Mme Martin de la Moutte, M. Norguet

Avocats :

Me Pedaille, Me Dalmayrac

TJ Toulouse, du 15 mars 2021, n° 19/0219…

15 mars 2021

Exposé des faits et procédure :

Madame [K] [L], exerçant sous l'enseigne Toulouse Bureaux Services, est titulaire d'un bail commercial qui lui a été consenti par acte sous seing privé datant de février 2007 par la Sci Wilson.

Le bail commercial porte sur les locaux à usage commercial, situés au [Adresse 5], au rez de chaussée d'un ensemble immobilier, soumis au régime de la copropriété. Le bail était prévu pour une durée de 9 ans avec un loyer de 14.400 euros ht payable trimestriellement et d'avance soit 4 800 euros de loyer par trimestre.

La Sci Wilson souhaitant vendre le bien immobilier, l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse a procédé à son acquisition en exerçant son droit de préemption le 12 janvier 2012.

Madame [L] et l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse ont signé un avenant en date du 1er mars 2013 actant d'une baisse du loyer commercial à 10.775 euros hors charges annuelles.

L'Établissement public foncier local (EPFL ) du Grand Toulouse a notifié à la locataire, par exploit en date du 19 décembre 2018, un congé avec refus de renouvellement et offre de paiement d'indemnité d'éviction à effet du 30 juin 2019.

Par exploit d'huissier de justice du 28 juillet 2019, Madame [L] a assigné l'EPFL du Grand Toulouse devant le tribunal judiciaire de Toulouse afin d'obtenir le prononcé de la nullité du congé et en condamnation à la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement du 15 mars 2021, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

dit valable le congé donné le 19 décembre 2018 en application du bail et de l'avenant,

dit en conséquence que le bail a pris fin le 1er juillet 2019,

dit que Madame [L] est en droit de prétendre au paiement de l'indemnité d'éviction et Établissement public foncier local au paiement d'une indemnité d'occupation à compter du 1er juillet 2019,

ordonné une expertise pour déterminer le montant de l'indemnité d'éviction,

ordonné une expertise avec en qualité d'expert : [Z] [C], [Adresse 4] avec pour mission de :

visiter les lieux situés à [Adresse 5],

les décrire et dresser le cas échéant la liste du personnel employé par le locataire,

fournir à la juridiction, en tenant compte des activités professionnelles autorisées par le bail et des facilités offertes à celle-ci par la situation des lieux, tous éléments utiles à l'estimation de l'indemnité compensatrice du préjudice résultant de la perte du fonds de commerce, indemnité comprenant notamment la valeur marchande du fonds, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que les frais et droits de mutation afférents à la cession d'un fonds de commerce de même importance et du montant du préjudice correspondant au trouble commercial que subirait le locataire, et tous autres postes de préjudices,

fournir, en donnant des références précises, tous éléments permettant de déterminer dans quelle mesure le locataire aurait la possibilité de transférer son fonds, sans perte importante de clientèle, sur un emplacement de qualité équivalente et quel serait, dans l'affirmative, le coût d'un tel transfert en ce compris

l'acquisition d'un titre locatif comportant les mêmes avantages juridiques que l'ancien bail, les frais et droits de mutation afférents a cette acquisition, et les dépenses nécessaires de déménagement et de réinstallation, ainsi que la réparation du trouble commercial qui résulterait d'un tel transfert de fonds et tous les autres postes de préjudices,

fournir de même tous éléments permettant d'apprécier :

le chiffrage de l'indemnité de transfert du siège social avec évaluation de recherche du temps a consacrer aux recherches de locaux et le coût des agences immobilières.

les frais engendres par le coût matériel du transfert du siège de la concluante et du transfert des sièges sociaux des sociétés domiciliées.

le cas échéant le chiffrage de l'indemnisation de la perte de surface pour de locaux de moindre taille,

le différentiel du coût de taxe foncière,

fournir tous éléments permettant à la juridiction d'apprécier le montant de l'indemnité d'occupation due par Madame [L] à compter du 1er juillet 2019 pour l'occupation des lieux dudit bail jusqu'à la libération effective.

préparation de l'expertise

convoquer, par courrier recommandé, les parties et leurs conseils,

les informer des termes de la mission et de l'autorité qui en a confié la charge à l'expert,

expertise et avis sapiteur :procéder personnellement aux opérations d'expertise, sauf à recueillir l'avis de tout sapiteur dans une spécialité autre que celle de l'expert,

mission : dépôt du rapport, rédaction d'un pré-rapport, délai de réponse aux dires,

disons que l'expert pourra en cas de besoin avoir recours à un technicien autrement qualifié,

donner connaissance aux parties des avis sapiteurs recueillis,

établir un pré-rapport qui sera communiqué aux parties, lesquelles disposeront d'un délai de 30 jours pour présenter leurs observations et au-delà duquel, après avoir répondu aux dires, l'expert déposera son rapport final, en transmettant un exemplaire a chaque parti,

le rapport définitif devra être notifié par envoi recommandé aux parties et par envoi simple aux avocats et la note d'honoraires devra être adressée aux parties par lettre recommandée avec accusé de réception avec mention du délai de 15 jours pour former leur observation,

disons que, sauf bénéfice de l'aide juridictionnelle l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse versera par chèque libellé à l'ordre du régisseur d'avances du Tribunal judiciaire de Toulouse une consignation de 1200 euros à valoir sur la rémunération de l'expert et ce avant le 19 avril 2021. Ce chèque sera adressé avec les références du dossier (R.G. N ° 19/2199) au greffe du Tribunal judiciaire de Toulouse,

rappelons qu'a défaut de consignation dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque selon les modalités fixées par l'article 271 du Code de procédure civile,

disons que l'expert devra déposer auprès du greffe du Tribunal judiciaire de Toulouse Pôle civil, un rapport détaillé de ses opérations dans les quatre mois de sa saisine et qu'il adressera copie complète de ce rapport, y compris la demande de 'xation de rémunération à chacune des parties conformément aux dispositions de l'article 173 du Code de procédure civile,

précisons qu'une photocopie du rapport sera adressé à l'avocat de chaque partie,

précisons que l'expert doit mentionner dans son rapport l'ensemble des destinataires à qui il l'aura adressé,

déboute Madame [L] de ses demandes au titre de l'abus de procédure et des frais de conseil,

réservé les dépens,

dit que l'affaire sera rappelée à I'audience de mise en état écrite du 27 mai 2021 pour vérification de Ia consignation.

Par déclaration en date du 2 juin 2021, Madame [L] a relevé appel du jugement. La portée de l'appel est la réformation des chefs du jugement qui ont :

statué sur le congé donné le 19 décembre 2018 par l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse en indiquant que ce congé était valable, qu'il était motivé, alors que le bail initial signé par le précédent propriétaire, la Sci Wilson, dont les locaux ont été achetés par préemption par l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse prévoyant le point de départ du bail au 1er février 2007 pour se terminer le 31 janvier 2016, qu'un avenant a été établi le 1er mars 2013 entre l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse et la locataire, le congé ayant donc été donné hors délai et n'étant pas conforme à la législation sur les baux commerciaux,

statue sur les préjudices de jouissance revendiqués par la locataire, en rejetant le principe de ce préjudice au motif que le bail mentionnait qu'une cave était louée et qui ne 'gurait pas la mention de garage, alors que manifestement il s'agit d'une qualification erronée de cave sur le document original, alors qu'il s'agit d'un garage, tel que cela résulte d'un constat d'huissier et d'une reconnaissance écrite de la part de l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse,

de n'avoir pas fait droit à la demande de reconnaissance d'un préjudice articulé par la locataire à la suite de coupures d'eau, de dégâts des eaux, de traces d'humidité au plafond et dans le bureau, avec une confusion avec les conséquences d'un incendie antérieur qui n'a rien a voir avec les dégâts faisant l'objet d'un constat d'huissier initial et d'avoir rejeté la demande d'expertise a'n de lister précisément les préjudices de jouissance subis par la locataire, leur étendue et leurs conséquences, de donner les éléments relatifs à la remise en état normal des locaux, le délai et le coût, de déterminer la perte d'activité subie par elle du fait de ces désordres et de chiffrer la dépréciation en résultant sur la valeur du fond, de calculer eu égard à l'amputation d'une partie de locaux de l'activité la valeur locative réelle qu'aurait dû supporter la locataire, de donner tous éléments permettant de chiffrer le préjudice.

La clôture est intervenue le 5 juin 2023.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions n°4 notifiées le 1er juin 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de Madame [K] [L] demandant, au visa des articles L145-4 alinéa 1er du Code de commerce, de :

réformer le jugement rendu le 15 mars 2021 par le Tribunal judiciaire de Toulouse,

dire et juger que le document signé entre les parties le 1er mars 2013 s'analyse en un nouveau bail de sorte que la date d'échéance du bail se situe au 1er mars 2022,

prononcer en conséquence la nullité du congé pour n'être pas conforme aux délais prescrits par le texte de l'article L145-4 alinéa 1er du Code de commerce,

vu les atteintes parallèlement occasionnées à la jouissance des lieux :

prononcer de plus fort la nullité du congé, compte tenu du fait qu'il constitue manifestement une mesure de rétorsion aux plaintes de la locataire quant aux difficultés rencontrées dans la jouissance des lieux,

condamner l'Établissement public foncier local du grand Toulouse à la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour s'être servi d'un congé par mesure de rétorsion,

débouter l'Etablissement public foncier local du grand Toulouse de l'intégralité de ses demandes,

sur l'évaluation des préjudices résultant des atteintes elles-mêmes à la jouissance, ordonner une expertise avec la mission suivante :

lister les préjudices de jouissance subis par la locataire relatifs aux locaux loués, et en particulier à la condamnation du garage compris dans la location, et celui de la coupure d'eau,

décrire l'origine, l'étendue et les conséquences des dégâts des eaux,

donner tous éléments permettant de déterminer la perte d'activité subie par la locataire du fait de ces désordres et la dépréciation en résultant sur la valeur du fonds de commerce, et dire la valeur marchande du fonds s'il n'avait pas subi ces désordres et les pertes en résultant,

dire que les parties amèneront tous les éléments à l'expert a'n de déterminer la moins-value résultant des dommages,

dire que l'expert calculera, eu égard à l'amputation d'une partie des locaux de l'activité, la valeur locative réelle qu'aurait dû supporter la locataire,

dire que l'expert donnera ces valeurs à compter de la date ou une partie des locaux n'a plus pu être exploités,

donner tous éléments permettant de chiffrer les autres chefs préjudices nés de la privation de partie des locaux et ceux résultant des dégâts des eaux et de la coupure d'eau, empêchant l'exploitation en termes de jouissance, et en apprécier le manque à gagner en résultant,

donner tous éléments également quant au préjudice moral subi par la locataire du fait des tracasseries résultant de la situation imputable au bailleur.

débouter l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse PFL de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

condamner l'Établissement public foncier local du Grand Toulouse à la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du CPC, et aux entiers dépens.

Vu les conclusions n°2 notifiées le 17 mai 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, de l'Etablissement public foncier local du Grand Toulouse demandant, au visa des articles L145-1, L145-14, R145-23 alinéa 2 du Code de commerce de :

confirmer le jugement en toutes ses dispositions, à titre principal, par substitution de motifs au regard de l'expropriation intervenue, à titre subsidiaire, par adoption des mêmes motifs,

y ajoutant, condamner Madame [L] au paiement d'une indemnité de 5.000,00 € au titre des frais irrépétibles, outre Ies entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de l'Etablissement public foncier du Grand Toulouse, dont distraction au profit de Maître Nicolas Dalmayrac, avocat, qui pourra Ies recouvrer sur son offre de droit conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

Motifs de la décision :

En cause d'appel, les débats portent essentiellement sur la validité du congé donné le 19 décembre 2018, sur les préjudices de jouissance liés à la cave qui serait un garage et sur la liste des préjudices de jouissance liés à des désordres relatifs à des coupures d'eau, des dégâts des eaux et des traces d'humidité au plafond et dans le bureau.

- sur la nullité du congé sollicitée par [K] [L], preneuse à bail :

[K] [L] dénonce l'irrégularité du congé délivré le 19 décembre 2018 à effet au 30 juin 2019 alors que, selon elle, il ne pouvait être délivré avant le 1er février 2022 au regard de l'interprétation du document signé le 1er mars 2013 qui doit être analysé non pas comme un avenant au bail en cours mais comme un nouveau bail, la date d'échéance du bail se prolongeant d'autant.

Il est également dénoncé le congé comme une mesure de rétorsion aux plaintes de la locataire quant aux difficultés liées à la jouissance des lieux et il est sollicité se surcroît 5000 euros de dommages-intérêts pour réparer ce préjudice.

De son coté, le nouveau bailleur, l'EPFL du Grand Toulouse, expose qu'à la suite de l'arrêté préfectoral du 16 décembre 2019 sur la réalisation du projet Toulouse Eurosudouest, renommé Grand Matabiau, les travaux ont été déclarés d'utilité publique et l'EPFL Grand Toulouse a été autorisé à acquérir par voie d'expropriation les immeubles nécessaires à la réalisation de ce projet, immeubles qui concernent celui où [K] [L] exploite son fonds de commerce.

Précisant que par ordonnance du 7 juillet 2021, le juge de l'expropriation ayant donné acte à l'EPFL du Grand Toulouse de la cession intervenue entre lui-même et la SCI Wilson ancien bailleur de madame [K] [L], il en déduit qu'en application de l'article L222-2 du code de l'expropriation, le bail commercial a été résilié de plein droit à compter de l'ordonnance et que la discussion d'[K] [L] sur la validité du congé et l'interprétation du document du 1er mars 2013 sont inopérants puisque le bail a été résilié du fait de l'expropriation.

Enfin, il considère qu'il n'y a pas eu de nouveau bail en 2013 et le congé qui a été délivré n'avait pas à être motivé puisqu'il refusait de renouveler le bail, ne visait aucune faute de la preneuse à bail et qu'il offrait une indemnité d'éviction en application de l'article L145-9 du code de commerce.

L'article L222-2 du code de l'expropriation dispose que : « L'ordonnance d'expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés.

Il en est de même des cessions amiables consenties après déclaration d'utilité publique et, lorsqu'il en est donné acte par ordonnance du juge, des cessions amiables antérieures à la déclaration d'utilité publique.

Les inscriptions de privilèges ou d'hypothèques éteints par application des dispositions mentionnées ci-dessus sont périmées à l'expiration d'un délai de six mois à compter du jour de la publication de l'ordonnance d'expropriation devenue irrévocable, de l'acte de cession amiable passé après déclaration d'utilité publique ou de l'ordonnance de donné acte d'une vente antérieure à la déclaration d'utilité publique. Cette péremption ne peut être constatée à la publicité foncière que sur justification, par tout intéressé, du caractère irrévocable ou définitif des procédures susmentionnées emportant extinction des droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés.

Les dispositions du présent article sont applicables aux acquisitions réalisées dans les conditions prévues aux articles L152-2 et L213-5 du code de l'urbanisme »

Par ailleurs, l'article L145-26 du code de commerce dispose que : « Le renouvellement des baux concernant des immeubles appartenant à l'Etat, aux collectivités territoriales et aux établissements publics ne peut être refusé sans que la collectivité propriétaire soit tenue au paiement de l'indemnité d'éviction prévue à l'article L145-14, même si son refus est justifié par une raison d'utilité publique. »

En l'espèce, il ressort de la pièce n°8 de l'EPFL Grand Toulouse que [K] [L] a été informée dès le 21 octobre 2020 de l'offre d'indemnisation en matière d'expropriation, résultant d'une part de l'arrêté préfectoral du 16 décembre 2019 déclarant d'utilité publique les travaux du projet Eurosud ouest, renommé Grand Matabiau quais d'oc, et autorisant l'EPFL du Grand Toulouse à acquérir les immeubles par voie amiable ou par voie d'expropriation et d'autre part de l'arrêté préfectoral du 16 juin 2020 déclarant ces travaux urgents.

En revanche, l'ordonnance du 7 juillet 2021 du juge de l'expropriation ayant donné acte de la cession du local litigieux entre la SCI Wilson et l'EPFL du Grand Toulouse en date du 20 juillet 2012 n'est pas produite aux débats.

Dès lors que la cession amiable en date du 20 juillet 2012 et l'ordonnance du juge de l'expropriation du 7 juillet 2021 ne sont pas produites, il est impossible de tirer les conséquences de l'expropriation alléguée sur le bail commercial en termes de résiliation du bail comme le conclut l'intimée en application de l'article L222-2 du code de l'expropriation.

Il convient par conséquent de statuer sur la régularité du congé délivré le 19 décembre 2018 avec offre d'indemnité d'éviction.

La nullité du congé alléguée n'est pas établie dans la mesure où le bail commercial a été souscrit le 26 février 2007, que l'avenant au bail souscrit le 1er mars 2013 ne peut constituer un nouveau bail commercial alors qu'il est intitulé « avenant au bail commercial » et qu'il y était stipulé « le présent avenant, couplé avec le bail commercial susmentionné à l'article 1, constitue le contrat définitif, complet et exclusif du bail commercial entre les parties. En conformité avec les dispositions de l'avenant, le bail initial conserve toute sa validité et sa forme exécutoire ».

C'est donc à bon droit que le tribunal a considéré que le congé délivré le 19 décembre 2018 à effet au 30 juin 2019 avec offre d'indemnité d'éviction était régulier en application de l'article L 145-9 du code de commerce.

Concernant le caractère abusif du congé pour mesures de rétorsion prétendues, dès lors que le bailleur use de ses droits en application des dispositions de l'article L145-9 du code de commerce, le congé avec offre d'indemnité d'éviction n'a pas à être motivé.

Par ailleurs, le caractère abusif de son droit à congé délivré au preneur n'est pas établi en l'espèce. Il ne suffit pas de poursuivre son bailleur pour manquement à certaines de ses obligations contractuelles, pour en déduire que dès qu'il donne congé à son preneur, le recours à ce droit est nécessairement abusif.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit valable le congé donné le 19 décembre 2018 et dit, par voie de conséquence, que le bail avait pris fin le 1er juillet 2019.

Il y a lieu de confirmer le jugement de ces chefs sans substitution de motifs.

- sur l'indemnité d'éviction et l'indemnité d'occupation :

La partie intimée sollicitant la confirmation du jugement. Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a désigné un expert judiciaire pour déterminer le montant de l'indemnité d'éviction. En revanche, sa mission sera limitée dès lors que l'immeuble a été démoli et qu'il ne peut se déplacer pour visiter les lieux.

- sur les préjudices de jouissance subis par le preneur :

[K] [L] demande que la mission d'expertise soit étendue à l'évaluation du préjudice de jouissance lié à la privation du garage et aux désordres en plafond consécutifs aux dégâts des eaux. Pour en justifier, elle produit des procès-verbaux de constat d'huissier des 13 juin 2018, 28 février 2019 et 23 janvier 2020 ainsi que le procès-verbal l'assemblée générale du Syndicat des copropriétaires du 23 février 2018 refusant notamment de voter un fond pour les travaux à effectuer.

L'EPFL du Grand Toulouse s'y oppose en rappelant d'une part que la privation de jouissance alléguée du garage a été réparée et qu'elle a refusé de récupérer les clés de ce local, qu'en outre, elle y entreposait des objets de brocante sans aucun rapport avec son activité de mise à disposition d'espaces servant de bureaux occupés.

D'autre part il fait valoir que sur les pertes d'exploitation subies du fait des dégâts des eaux, elle a déjà assigné en référé l'EPFL du Grand Toulouse de ce chef et a été déboutée par ordonnance du président du tribunal de Toulouse du 15 février 2018. Dans ce litige, il relève que son assureur, la société Aviva, a précisé avoir indemnisé [K] [L] pour la perte d'exploitation subie du fait du dégâts des eaux litigieux à concurrence de 2.755 euros, outre 16.178 euros pour réparer les désordres matériels mais n'a procédé qu' au versement immédiat de 13.050 euros HT et non à l'indemnité différée à défaut de justifier de la mise en 'uvre des travaux de réparation pour mettre un terme au sinistre.

A l'examen des pièces produites par les parties, il convient de constater qu'en effet, l'EPFL du Grand Toulouse, après avoir muré à tort le garage, situé au [Adresse 2] et non au [Adresse 5], a reconnu son erreur alors que ce garage , sous le nom de cave, était inclus dans le bail commercial et il justifie avoir remis le local à la disposition d' [K] [L].

Par ailleurs, ce local était rempli d'objets et d'immondices ; [K] [L] n'utilisait donc pas ce local à des fins commerciales et ce d'autant moins qu'elle a elle-même précisé, à l'huissier venu constater le début d'emmurage du local, qu'elle y entreposait des objets de brocante.

Dans ces conditions, le préjudice de jouissance reproché au bailleur n'est pas établi.

S'agissant des pertes d'exploitation liées aux désordres en plafond à la suite des dégâts des eaux, il convient de rappeler que l'immeuble est, à ce jour, démoli et que l'expertise judiciaire ne permettrait pas de déterminer si [K] [L] a effectivement procédé à des réparations lorsqu'elle a été indemnisée par son assureur. Dès lors, il est impossible de déterminer les pertes d'exploitation liées aux désordres alléguées et à leur persistance dans le temps à défaut de procéder aux travaux dès réception de l'indemnité d'assurance.

Enfin [K] [L], sans contester les constatations de son adversaire quant au versement de son assureur, ne justifie pas d'une facture de réparation des locaux correspondant à des travaux de désordre liés à des dégâts des eaux.

Il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté [K] [L] de sa demande d'indemnisation des troubles de jouissance allégués et n'a pas fait droit à sa demande d'évaluation des dits préjudices dans la mission d'expertise judiciaire.

Le jugement sera donc confirmé sous réserve de limiter la mission d'expertise judiciaire à une évaluation de l'indemnité d'éviction et de l'indemnité d'occupation sur pièces en raison de la démolition de l'immeuble.

- sur les demandes accessoires :

[K] [L] qui succombe en appel sera condamnée aux dépens d'appel.

Eu égard à la situation respective des parties, il ne sera pas fait application de l'article 700 du code procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

- Confirme le jugement sauf à supprimer de la mission de l'expert judiciaire la nécessité de visiter les lieux pour les décrire

- Condamne [K] [L] aux dépens d'appel avec distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.