CA Paris, Pôle 5 - ch. 3, 28 mars 2024, n° 21/14674
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Boum (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Recoules
Conseillers :
Mme Leroy, Mme Girousse
Avocats :
Me Dujardin, Me Guillemin, Me Hardouin, Me Mrabet
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte sous seing privé du 15 juillet 2019, modifié par avenant du 24 juillet de la même année, la société [Adresse 1] a conclu avec la société Boum un bail dérogatoire pour une durée de 2 ans et 16 jours se terminant le 31 juillet 2021, portant sur un ensemble immobilier situé [Adresse 1] et [Adresse 3] à [Localité 6] comprenant à la fois des locaux à usage commercial (café/restaurant, salle de spectacle..) et à usage d'habitation, moyennant un loyer annuel de 200.000 euros HT, soit 240.000 euros TTC, hors charges, une franchise partielle ayant été consentie pour les trois premières échéances.
Le 15 mars 2020, la société Boum a été contrainte de fermer son établissement en application des dispositions légales et réglementaire prises dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire des mesures générales pour faire face à l'épidéme de covid-19 .
Le 16 juillet 2020, la société [Adresse 1] a mis en demeure la société Boum de payer les loyers et charges impayés, soit un total de 104.255,52 euros HT, puis par acte d'huissier du 27 juillet 2020, elle lui a fait délivrer un commandement de payer la somme de 104.255,52 € visant la clause résolutoire du bail.
Le 10 août 2020, la société Boum a fait assigner la société [Adresse 1] devant le tribunal de commerce de Paris pour solliciter la nullité de la mise en demeure et du commandement de payer.
Par ailleurs, la société [Adresse 1] a fait procéder à deux saisies attributions successivement le 16 septembre 2020 et le 20 novembre 2020, sur les comptes bancaires de la société Boum, laquelle a saisi le juge de l'exécution pour contester la validité de ces saisies exécutoires. Cette procédure a été radiée par ordonnance du 25 mars 2021.
Saisi par requête de la société Boum, le Président du tribunal de commerce de Paris a, par ordonnance du 3 novembre 2020, ouvert une procédure de conciliation et désigné la société Baronnie-[T] en qualité de conciliateur.
Saisi par la société Boum, le président du tribunal de commerce a, par ordonnance sur requête du 3 février 2021, notamment décidé d'interrompre toute action en justice ainsi que toute procédure d'exécution déjà engagée, d'interdire toute nouvelle action en justice tendant au paiement de l'arriéré locatif ou à la résiliation du bail ainsi que d'interrompre et interdire toute procédure d'exécution de la part de la société [Adresse 1] et a suspendu l'exigibilité des sommes dues ainsi que des pénalités durant la procédure de conciliation. Cette ordonnance a été rétractée par jugement rendu le 15 juin 2021 par le tribunal de commerce de Paris saisi par la société [Adresse 1]. Saisi par la société Boum, par ordonnance sur requête du 12 octobre 2021, le président du tribunal de commerce a désigné Maître [K] [T] en qualité de mandataire ad hoc notamment pour assister cette société dans ses discussions avec ses créanciers pour favoriser la conclusion d'un accord amiable destiné à permettre la poursuite de son activité économique.
Par jugement du 5 juillet 2021, le tribunal de commerce de Paris a :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire visée à l'article 12 du bail conclu le 15 juillet 2019;
- condamné la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 122.529,60 euros TTC au titre des arriérés de loyers et charges du mois de mars 2020 au mois d'août 2020 inclus, augmenté des intérêts au taux légal majoré de 5 points au jour de leur échéance ;
- condamné la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 23.333,34 euros HT et hors charges au titre de l'indemnité d'occupation mensuelle, à compter du 27 août 2020 jusqu'à la justification de la libération effective des lieux ;
- ordonné l'expulsion de la société Boum de tous occupants de son chef ainsi que de ses biens ;
- ordonné le séquestre des effets mobiliers qui en sont susceptibles pour sûreté des loyers échus et des charges locatives ;
- débouté la société [Adresse 1] de sa demande de condamnation de la société Boum à lui payer la somme de 50.000 euros HT au titre des pénalités de retard contractuelles ;
- débouté la société Boum de l'ensemble de ses demandes ;
- condamné la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du CPC, déboutant pour le surplus de la demande ;
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
- condamné la société Boum aux dépens;
- ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration du 27 juillet 2021, la société Boum a interjeté appel partiel du jugement.
Par actes délivrés le 2 et 5 août 2021, la société Boum a fait assigner la société 114 Oberkampf et la société Baronie-[T] ès-qualités de conciliateur de la société Boum devant le premier président de la cour d'appel de Paris aux fins de voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement du 5 juillet 2021. Par ordonnance du 2 mars 2022, le premier président de la cour d'appel a déclaré irrecevable la demande formée par la société Boum sur le fondement de l'article 514-3 du code de procédure civile.
Par conclusions du 20 janvier 2022, la société [Adresse 1] a interjeté appel incident partiel du jugement.
Saisi par assignation aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Boum délivrée à la requête de la société [Adresse 1], par jugement du 14 décembre 2022, le tribunal de commerce de Paris a sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt à rendre par la cour de céans.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 1er février 2023.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Par conclusions déposées le 23 janvier 2023, la société Boum, appelante à titre principal et intimée à titre incident, demande à la Cour de :
- dire la société Boum recevable et bien fondée en son appel ;
- infirmer le jugement du tribunal de commerce rendu le 5 juillet 2021 en ce qu'il a validé le commandement visant la clause résolutoire et prononcé des condamnations à l'égard de la société Boum ;
Statuant à nouveau,
- déclarer nul et de nul effet le commandement d'avoir à payer la somme de 104.655,22 € visant la clause résolutoire, notifié le 27 juillet 2020 ;
- dire que la société Boum du fait de l'interdiction d'exploiter les lieux loués conformément à leur destination depuis le 15 mars 2020 n'est pas tenue au règlement de son loyer pour la partie commerciale du 15 mars 2020 jusqu'au 1er juillet 2021.
En conséquence,
- dispenser la société Boum d'avoir à régler l'arriéré de loyers et charges facturés par la société [Adresse 1] au titre du bail des locaux commerciaux pour la période du 15 mars 2020 au 1er juillet 2021 ;
Ou pour le moins les intérêts de retards et de pénalités facturés par la société Oberkrampf ;
Subsidiairement,
- octroyer deux ans de délais de grâce à la société Boum pour s'acquitter de l'arriéré de loyers et charges dû à la société [Adresse 1] ;
En tous les cas :
- dire la société [Adresse 1] irrecevable et mal fondée en son appel incident ;
- la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner la société [Adresse 1] au paiement d'une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- la condamner aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 13 décembre 2022, la société [Adresse 1], intimée à titre principal et appelante à titre incident, demande à la Cour de :
- débouter la société Boum de l'ensemble de ses prétentions, moyens et fins ;
- confirmer en toutes ses dispositions, le jugement entrepris RG 20200336645 du tribunal de commerce de Paris du 5 juillet 2021 en ce qu'il a :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire visée à l'article 12 du bail conclu le 15 juillet 2019 ;
- condamné la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 122.529,60 € TTC au titre des arriérés de loyers et charges du mois de mars 2020 au mois d'août 2020 inclus augmentés des intérêts au taux légal majoré de 5 points au jour de leur échéance ;
- condamné la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 23.333,34 € HT et hors charges au titre de l'indemnité d'occupation mensuelle à compter du 27 aout 2020 jusqu'à la justification de la libération effective des lieux ;
- ordonné l'expulsion de la société Boum de tous occupants de son chef ainsi que de ses biens ;
- ordonné le séquestre des effets mobiliers qui en sont susceptibles pour sûreté des loyers échus et des charges locatives ;
- débouté la société Boum de ses demandes ;
- condamné la société Boum à payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC ainsi qu'aux dépens.
- ordonné l'exécution provisoire .
Y ajoutant,
- condamner la société Boum au paiement de la somme de 192.277,57 € au titre des arriérés de loyers, charges, et indemnité d'occupation ;
- déclarer la société [Adresse 1] recevable et bien fondée en son appel incident ;
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a : « déboute la société [Adresse 1] de sa demande de condamnation de la SARL BOUM à lui payer la somme de 50.000 € HT au titre des pénalités de retard contractuelles » ;
Statuant à nouveau,
- condamner la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 50.000 € H.T. au titre des pénalités de retard contractuelles ;
En tout état de cause,
- débouter la société société Boum de l'ensemble de ses prétentions, moyens et fins ;
- condamner la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Sur la demande de dispense de paiement du loyer :
Aux termes de l'article 1728 du code civil, le preneur est tenu de deux obligations principales dont celle de payer le prix de la chose louée.
En application de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l'épidémie de covid-19, l'état d'urgence sanitaire a été déclaré sur l'ensemble du territoire national. En application de l'article 3, I, 2° du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 et du décret n° 2020-423 du 14 avril 2020 le complétant, jusqu'au 11 mai 2020, tout déplacement de personne hors de son domicile a été interdit à l'exception des déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle et des achats de première nécessité. Par ailleurs, une interdiction de recevoir du public a été édictée pour restreindre les rapports interpersonnels par arrêtés des 14 et 16 mars 2020 fondée sur le caractère non indispensable à la vie de la Nation et à l'absence de première nécessité des biens ou services fournis sur la période du 17 mars au 10 mai 2020, durée d'interdiction qui a été prolongée pour certaines catégories d'établissements recevant du public, notamment les discothèques, aux fins de garantir la santé publique.
Les dispositions de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée par l'ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 prorogeant des délais procéduraux échus pendant la période d'urgence sanitaire et neutralisant certains mécanismes sanctionnant l'inexécution d'obligation contractuelles n'ont pas eu pour effet de suspendre l'exigibilité du loyer dû par le locataire d'un bail commercial.
Pour demander à être dispensée du paiement du loyer, la société Boum se prévaut de la force majeure, du non respect de l'obligation de délivrance par la bailleresse, de la destruction partielle de la chose louée et de la mauvaise foi contractuelle de la bailleresse.
Il résulte des dispositions de l'article 1218 du code civil d'une part, que le créancier qui n'a pu profiter de la contrepartie à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat ou la suspension de son obligation en invoquant la force majeure, d'autre part que le débiteur d'une obligation contractuelle de somme d'argent inexécutée ne peut s'exonérer de cette obligation en invoquant la force majeure. En conséquence, c'est à juste titre que le jugement déféré a écarté le moyen tiré de la force majeure soulevé par la société Boum.
Dès lors que les locaux loués ont été mis à la disposition de la locataire, l'impossibilité d'exploiter résultant d'une mesure gouvernementale d'interdiction de recevoir du public, générale et temporaire, n'est pas constitutive d'une inexécution de l'obligation de délivrance par la bailleresse susceptible de justifier une exception d'inexécution par la locataire.
Dès lors que c'est pour des raisons étrangères aux locaux loués, qui n'ont subis aucun changement, que les exploitants se sont vu interdire de recevoir leurs clients par une mesure générale temporaire sans lien avec leur destination contractuelle, cette interdiction ne peut être assimilée à la perte de la chose louée au sens de l'article 1722 du code civil.
La société Boum fait valoir que la société [Adresse 1] n'a pas respecté l'exigence de bonne foi devant régir les relations contractuelles en application de l'article 1104 du code civil. Il ressort cependant des éléments du dossier que la bailleresse a notamment proposé à sa locataire le 14 avril 2020 un report de loyers sous réserve d'une proposition d'échelonnement d'une durée de neuf mois, adressé des propositions de remises de loyers sous différentes conditions par courriel du 12 juillet 2020 et accepté le 15 décembre 2020 de suspendre l'exigibilité des créances durant la procédure de conciliation. Au regard du contexte et du montant des impayés, la délivrance d'une mise en demeure visant la clause résolutoire dès 16 juillet 2020 et la mise en oeuvre de procédures de saisies conservatoires constituent l'exercice d'un droit dont le caractère abusif n'est pas démontré en l'absence d'intention de nuire. Par ailleurs, les conditions posées par la bailleresse dans le cadre de ses propositions d'accord telles que la proposition d'un changement d'activité, celle d'une résiliation anticipée, la demande d'une garantie à première demande ou la caution de la société mère du groupe auquel appartient la locataire ne caractérisent pas un manquement à l'obligation de bonne foi contractuelle.
Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la locataire n'est pas fondée à demander d'être dispensée du paiement des loyers échus à compter du 15 mars 2020.
C'est donc à juste titre que le jugement déféré a constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail le 27 août 2020 et ordonné l'expulsion de la locataire. Il convient de le confirmer sur ces points.
Une indemnité d'occupation est due à compter du 27 août 2020 dont le montant est fixé ci-dessous.
Sur la dette locative
La société [Adresse 1] demande la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Boum à lui payer la somme de 122.529,60 € TTC au titre des arriérés de loyers et charges arrêtés au mois d'août 2020 augmenté des intérêts majorés outre la somme de 23.333,34 € HT et HC au titre de l'indemnité mensuelle d'occupation à compter du 27 août 2020 jusqu'à la justification de la libération effective des lieux mais sollicite, également, la somme de 192.277,57 € au titre des arriérés de loyers, charges et indemnités d'occupation en se prévalant d'un décompte d'huissier comprenant les arriérés de loyer de mars 2020 à août 2020 et les indemnités d'occupation du 27 août 2020 au 29 juillet 2021. Ces deux prétentions étant incompatibles, c'est à la dernière prétention correspondant à un solde locatif au mois de juillet 2021 inclus, sans demande de paiement d'indemnité d'occupations à échoir, qu'il convient de se référer, la bailleresse ne discutant pas l'affirmation de la locataire selon laquelle cette dernière a restitué les locaux au mois de juillet 2021 conformément au terme contractuel du bail dérogatoire conclu le 15 juillet 2019.
De son côté, la société Boum fixe la dette locative, dont elle demande à titre principal à être dispensée, à la somme de 78.462,22 € suivant décompte arrêté au 17 janvier 2023 incluant les mensualités jusqu'en juillet 2021 inclus. Elle demande à être dispensée, à tout le moins, des intérêts au taux légal et pénalités facturés par la bailleresse.
Compte tenu des circonstances de l'espèce, la société Boum ayant dû subir en raison des restrictions sanitaires liées au Covid-19 une longue période de fermeture de son établissement, loué pour une durée de deux ans seulment, alors qu'elle avait procédé à des investissements pour aménager les locaux, les clauses pénales prévues au contrat de bail sont manifestement excessives et doivent être réduites en application de l'article L. 1231-5 du code civil.
Selon les décomptes présentés par les deux parties les mensualités correspondant aux loyers, charges et taxes s'élevaient à 20.421,60 €. La stipulation du bail prévoyant une indemnité d'occupation égale au double du loyer normal s'analyse en une clause pénale qu'il convient de réduire pour ramener l'indemnité d'occupation mensuelle, taxes et charges forfaitairement comprises, à la somme de 20.421,60 €. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a fixé l'indemnité d'occupation à la somme mensuelle de 23.333,34 € hors taxe et hors charges.
Sur le dernier compte d'huissier dont se prévaut la bailleresse, il est réclamé une somme non détaillée de 122.529,60 € au titre de l'arriéré de loyers et charges dus pour la période de mars 2020 à août 2020 inclus, alors que tant selon le relevé de la bailleresse du 31 décembre 2021 (pièce 27) que celui de la locataire du 17 janvier 2023 (pièce 24) la dette locative s'élève en août 2020 à 79.529,40€. La société [Adresse 1] ne justifie donc pas de la créance qu'elle fixe à 122.529,60 € au titre de l'arriéré de loyers et charges.
Sur le dernier compte d'huissier dont se prévaut la bailleresse, il est réclamé une somme non détaillée de 308.000,09 € au titre des indemnités d'occupation dues pour la période du 27 août 2020 au 29 juillet 2021 inclus. Aucun décompte ne permet d'expliciter ce montant. Il n'est notamment pas précisé le montant mensuel retenu au titre de l'indemnité d'occupation. Selon le relevé de la bailleresse du 31 décembre 2021 mentionnant des mensualités de 20.421,60 €(pièce 27) , au mois de juin 2021 inclus, les indemnités d'occupations dues s'élevaient à 159.586,40 € (239.115,80 - 79.529,40 €) le montant réclamé de 308.000 € n' est donc pas justifié.
Il convient donc de se référer au décompte produit par la société Boum qui mentionne 16 échéances locatives mensuelles de 20.421,60 € d'avril 2020 à juillet 2021 outre 3.370,40 € au titre de la taxe foncière, soit un total de 330.116 € dont elle déduit des paiements pour un montant de 251.653,78 €, dépôt de garantie compris. Les paiements pris en compte sur le relevé non détaillé de l'huissier de la bailleresse s'élèvant à 261.614,82 €, il en résulte que la somme de 251.653,78 € déduite par la locataire est justifiée et qu'en conséquence elle est bien fondée à dire que la dette locative comprenant les loyers, provisions sur charges et indemnités d'occupation s'élève à 78.462,22 € (330.116 - 251.653,78). Ce montant sera retenu.
La société [Adresse 1] réclame, en outre, sur son décompte les sommes de 4.633,20 € et 3.745,90 € au titre des régularisations de charges pour les périodes respectivement du 27/8/2020 au 29/7/2021 et de juillet 2019 à juillet 2020. Dès lors que la locataire conteste devoir ces sommes et que la bailleresse ne produit aucun élément permettant d'en justifier, elles ne seront pas retenues.
Les sommes dues au titre des frais irrépétibles de première instance et au titre des dépens notamment d'exécution font l'objet de dispositions spécifiques du jugement et de l'arrêt, il n'y a donc pas lieu de les retenir en outre dans le décompte de la dette locative comme cela apparaît sur le décompte d'huissier produit.
Sur ce décompte apparaît la somme de 9.770,41 € au titre des intérêts de retard majorés de 5,76 %. Cette majoration contractuelle étant manifestement excessive au regard des circonstances de l'espèce, il convient de la réduire et de dire que les intérêts au taux légal seront dus sur les loyers et indemnités d'occupation impayés à compter de leur échéance.
Il convient, en conséquence, de condamner la société Boum à payer à la société 114 Oberkampf la somme de 78.462,22 € au titre du solde de sa dette locative comprenant les loyers, charges et indemnités d'occupations avec intérêts au taux légal sur les loyers et indemnités d'occupation impayés à compter de leur échéance.
La société [Adresse 1] sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en paiement d'une indemnité de 50.000 € à titre de pénalité de retard contractuelle. Une telle pénalité est manifestement excessive au regard des circonstances de l'espèce et du préjudice subi partiellement pris en charge par les intérêts au taux légal . Il convient d'infirmer le jugement, de modérer la pénalité et de condamner la société Boum au paiement d'une somme de 500 € à titre de pénalité contractuelle.
Compte tenu du délai déjà expiré depuis la date d'échéance des loyers et indemnités d'occupation, de l'absence de réglement depuis juillet 2021, des éléments produits relatifs à la situation financière de la société Boum ne permettant pas de garantir qu'elle pourrait respecter les délais qu'elle sollicite, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il'a déboutée de sa demande de délais de paiement.
Sur les autres demandes
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes aux fins de voir 'dire' , lorsqu'elles ne constituent pas des prétentions visant à confèrer un droit à la partie qui les requiert et ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.
Il convient de confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
La société Boum qui succombe partiellement sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.
L'équité commande de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elle a exposé pour la procédure d'appel.
Les autres demandes seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 5 juillet 2021 (N° RG 202003) en ce qu'il a :
- condamné la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 122.529,60 € TTC au titre des arriérés de loyers et charges du mois de mars 2020 au mois d'août 2020 inclus, augmenté des intérêts au taux légal majoré de 5 points au jour de leur échéance ;
- condamné la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 23.333,34 euros HT et hors charges au titre de l'indemnité d'occupation mensuelle, à compter du 27 août 2020 jusqu'à la justification de la libération effective des lieux ;
- débouté la société [Adresse 1] de sa demande en paiement d'une somme de 50.000 € à titre de pénalité contractuelle ;
- débouté la société Boum de l'ensemble de ses demandes ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la société Boum de sa demande aux fins d'être dispensée d'avoir à régler l'arriéré de loyers et charges facturés par la société [Adresse 1] au titre du bail des locaux commerciaux pour la période du 15 mars 2020 au 1er juillet 2021 ;
Condamne la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 78.462,22 € au titre du solde de sa dette locative comprenant les loyers, charges et indemnités d'occupations avec intérêts au taux légal sur les loyers et indemnités d'occupation impayés à compter de leur échéance ;
Condamne la société Boum à payer à la société [Adresse 1] la somme de 500 € à titre de pénalité contractuelle ;
Déboute la société Boum de sa demande subsidiaire de deux années de délais pour s'acquitter de l'arriéré de loyers et charges dû à la société Oberkampf ;
Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne la société Boum aux dépens avec distraction au profit de Maître P. Hardouin, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.